R.P.M. TECH INC.

R.P.M. TECH INC.
c.
MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX
Dossier no PR-2013-028

Ordonnance et motifs rendus
le lundi 24 février 2014

TABLE DES MATIÈRES

ORDONNANCE

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

ANALYSE

ORDONNANCE DU TRIBUNAL

 

EU ÉGARD À une plainte déposée par R.P.M. Tech Inc. aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.);

ET À LA SUITE D’une décision du Tribunal canadien du commerce extérieur d’enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur;

ET À LA SUITE D’une requête déposée par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux le 17 janvier 2014, aux termes de l’article 24 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur, en vue d’obtenir une ordonnance enjoignant le Tribunal canadien du commerce extérieur de mettre fin à l’enquête.

ENTRE

R.P.M. TECH INC. Partie plaignante

ET

LE MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX Institution fédérale

ORDONNANCE

Aux termes du paragraphe 30.13(5) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur, par la présente, met fin à son enquête sur la plainte, mettant un terme à toute procédure connexe.

Par conséquent, l’ordonnance rendue le 18 décembre 2013 en vue de reporter l’adjudication de tout contrat portant sur le présent marché public jusqu’à ce que le Tribunal canadien du commerce extérieur ait déterminé le bien-fondé de la plainte est, par la présente, annulée.

Serge Fréchette
Serge Fréchette
Membre présidant

Dominique Laporte
Dominique Laporte
Secrétaire

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

  1. Le 10 décembre 2013, R.P.M. Tech Inc. (R.P.M.) a déposé une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur[1] concernant un marché public (invitation no T3003-130050/B) passé par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (TPSGC), au nom du ministère des Transports, en vue de la fourniture et de la livraison d’une souffleuse à neige à haute capacité 3600 TPH (la souffleuse).
  2. R.P.M. allègue que TPSGC a établi un délai de livraison trop court pour la fourniture de la souffleuse, en vue de favoriser un fournisseur potentiel au détriment d’autres fournisseurs potentiels.
  3. À titre de mesure corrective, R.P.M. demande que l’exigence dans la demande de propositions (DP) ayant trait à la livraison soit révisée pour accepter un délai de livraison plus long, soit 100 jours ouvrables. R.P.M. a également demandé au Tribunal d’ordonner à TPSGC de différer l’adjudication d’un contrat jusqu’à ce que le Tribunal se prononce sur la validité de la plainte.
  4. Le 18 décembre 2013, le Tribunal a avisé les parties qu’il avait décidé d’enquêter sur la plainte, puisque cette dernière répondait aux exigences du paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE et aux conditions énoncées au paragraphe 7(1) du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics[2]. Le même jour, le Tribunal a rendu une ordonnance de report d’adjudication du contrat aux termes du paragraphe 30.13(3) de la Loi sur le TCCE.
  5. Le 17 janvier 2014, TPSGC a déposé une requête en vertu de l’article 24 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur[3] demandant au Tribunal de mettre fin à son enquête au motif que la DP concernant le marché public faisant l’objet de la plainte avait été annulée et que, par conséquent, le Tribunal n’a plus compétence pour enquêter sur cette plainte. TPSGC a aussi souligné le fait qu’une clause dans la DP lui réservait le droit d’annuler l’invitation en tout temps.
  6. Le 23 janvier 2014, R.P.M. a déposé ses observations sur la requête de TPSGC. R.P.M. ne s’est pas opposée à la requête, mais a tenu à souligner qu’il s’agissait de la deuxième fois que la procédure de passation du marché public concernant la fourniture d’une souffleuse avait été annulée sans explications, ainsi qu’à exprimer ses inquiétudes quant à l’intégrité de la procédure qui serait suivie dans l’éventualité où une nouvelle DP serait émise pour un marché public concernant le même bien.

ANALYSE

  1. TPSGC allègue qu’étant donné l’annulation de la DP concernant le marché public qui fait l’objet de la plainte, le Tribunal n’a plus compétence pour enquêter sur cette plainte. À cet égard, TPSGC renvoie au paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le TCCE, lequel stipule que la plainte déposée doit concerner « [...] la procédure des marchés publics suivie relativement à un contrat spécifique [...] », et à la définition de « contrat spécifique » à l’article 30.1, lequel renvoie à un contrat « [...] qui a été accordé [...] » par une institution fédérale « [...] ou [qui] pourrait l’être [...] ». TPSGC soutient que puisque la DP concernant le marché public en question a été annulée, il n’y a plus de « contrat [...] qui a été accordé par une institution fédérale — ou pourrait l’être » relativement à la DP.
  2. Contrairement aux prétentions de TPSGC, tel qu’expliqué dans la jurisprudence antérieure[4], le Tribunal est d’avis que rien dans la Loi sur le TCCE ou dans son règlement ne permet de conclure que le législateur ait envisagé qu’une décision du ministère public de mettre fin à une procédure de passation du marché public puisse mettre fin à la compétence du Tribunal de poursuivre une enquête qui a été ouverte aux termes de la loi. Notamment, le Tribunal est d’avis que le libellé des articles 30.11 et 30.1 de la Loi sur le TCCE et du paragraphe 7(1) du Règlement indique que l’existence d’un contrat « [...] qui a été accordé [...] » ou « [...] qui pourrait l’être [...] » est une précondition de la compétence du Tribunal qui doit exister au moment du dépôt de la plainte. Ces dispositions ne précisent pas que cet état de fait doit se poursuivre nécessairement à tout moment lors de l’enquête.
  3. Par conséquent, si cette précondition était remplie à l’ouverture de l’enquête, l’interruption ou l’abandon de la procédure de passation du marché public ne remet pas en cause la compétence du Tribunal. À partir du moment où l’examen des motifs de plainte demeure pertinent, la finalité de l’enquête, laquelle est de déterminer si la procédure de passation du marché public a été suivie en conformité avec les dispositions pertinentes des accords commerciaux pertinents, n’est pas remise en cause.
  4. Ceci étant dit, aux termes du paragraphe 30.13(5) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal peut en tout temps mettre fin à une enquête « [s]’il estime que la plainte est dénuée de tout intérêt [...] ». En l’espèce, le Tribunal a décidé de mettre fin à l’enquête aux termes de ce paragraphe.
  5. Le Tribunal estime, à la lumière de l’annulation de la procédure de passation du marché public, que la plainte est désormais dénuée de tout intérêt : l’examen des motifs de plainte, étroitement liés aux faits de l’espèce, n’aurait qu’une valeur théorique limitée et peu d’impact pratique.
  6. En effet, l’annulation de la procédure de passation du marché public donne dans les circonstances à R.P.M. l’essentiel de la mesure corrective qui lui aurait été attribuée si le Tribunal s’était prononcé en sa faveur sur le fond de la plainte. Tel qu’indiqué, l’unique mesure corrective demandée par R.P.M. était de réviser les exigences de la DP afin d’accepter un délai de livraison plus long, ce qui aurait évité, selon R.P.M., de favoriser un fournisseur potentiel particulier au détriment d’autres fournisseurs potentiels. Or, l’effet de l’annulation de la procédure de passation du marché public, et du réexamen des exigences obligatoires qu’entraînerait toute nouvelle invitation concernant la fourniture d’une souffleuse, est essentiellement de placer les fournisseurs potentiels dans les circonstances qui ont précédé la DP, c’est‑à‑dire, sur un pied d’égalité. Ainsi, un examen des motifs de la présente plainte devient dénué d’intérêt.[5]
  7. Le Tribunal constate par ailleurs que R.P.M. ne s’est pas opposée à la requête de TPSGC demandant de mettre fin à la présente enquête, mais a plutôt fait état de ses inquiétudes quant à l’intégrité du processus de passation du marché public dans l’éventualité d’un nouveau marché public concernant la fourniture d’une souffleuse.
  8. À cet égard, le Tribunal fait observer que, si R.P.M. est en désaccord avec la procédure de passation du marché public ayant trait à une nouvelle invitation éventuelle, rien dans la présente ordonnance ne l’empêche de déposer une autre plainte concernant cette invitation.
  9. Par conséquent, en tenant compte des circonstances particulières du marché public en question, le Tribunal conclut que la plainte est dénuée de tout intérêt et décide, aux termes du paragraphe 30.13(5) de la Loi sur le TCCE, de mettre fin à l’enquête.

ORDONNANCE DU TRIBUNAL

  1. Aux termes du paragraphe 30.13(5) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal, par la présente, met fin à son enquête sur la plainte, mettant un terme à toute procédure connexe.
  2. Par conséquent, l’ordonnance rendue le 18 décembre 2013 en vue de reporter l’adjudication de tout contrat portant sur le présent marché public jusqu’à ce que le Tribunal ait déterminé le bien-fondé de la plainte est, par la présente, annulée.
 

[1].     L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.) [Loi sur le TCCE].

[2].     D.O.R.S./93-602 [Règlement].

[3].     D.O.R.S./91-499.

[4].     Voir notamment Adélard Soucy (1975) Inc. c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (24 juin 2009), PR-2008-062 (TCCE) aux par. 11-32.

[5].     Le Tribunal fait remarquer que la DP de TPSGC incorporait par renvoi une clause indiquant qu’il se réservait le droit d’annuler l’invitation en tout temps. En tout état de cause, l’objet de la plainte ne porte pas sur la validité de l’annulation de la procédure de passation de ce marché public.