CENTRE DE LINGUISTIQUE APPLIQUÉE T.E.S.T. LTÉE

CENTRE DE LINGUISTIQUE APPLIQUÉE T.E.S.T. LTÉE

c.
MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX
Dossier no PR-2014-028

Décision et motifs rendus
le mardi 16 décembre 2014

TABLE DES MATIÈRES

 

EU ÉGARD À une plainte déposée par le Centre de linguistique appliquée T.E.S.T. Ltée aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.);

ET À LA SUITE D’une décision d’enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

ENTRE

LE CENTRE DE LINGUISTIQUE APPLIQUÉE T.E.S.T. LTÉE Partie plaignante

ET

LE MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX Institution fédérale

DÉCISION

Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte est fondée en partie.

Aux termes du paragraphe 30.15(2) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur recommande au ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux de revoir ses pratiques en matière de marchés publics afin de s’assurer que les fournisseurs non retenus obtiennent, chacun, un compte rendu complet et compréhensible de leur évaluation et des motifs du rejet de leur proposition.

Chaque partie assumera ses propres frais.

Daniel Petit
Daniel Petit
Membre présidant

Membre du Tribunal : Daniel Petit, membre présidant

Conseillers juridiques pour le Tribunal : Eric Wildhaber
Anja Grabundzija

Agent principal du greffe par intérim : Haley Raynor

Partie plaignante : Centre de linguistique appliquée T.E.S.T. Ltée

Conseiller juridique pour la partie plaignante : Jean Marguerat

Institution fédérale : ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux

Conseillers juridiques pour l’institution fédérale : Roy Chamoun
Benoît de Champlain
Susan D. Clark
Ian McLeod

Veuillez adresser toutes les communications au :

Tribunal canadien du commerce extérieur
15e étage
333, avenue Laurier Ouest
Ottawa (Ontario)  K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel : secretaire@tcce-citt.gc.ca

EXPOSÉ DES MOTIFS

INTRODUCTION

  1. Le 18 septembre 2014, le Centre de linguistique appliquée T.E.S.T. Ltée (T.E.S.T.) a déposé une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal), aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur[1], concernant une demande d’arrangement en matière d’approvisionnement (DAMA) (invitation no EN966-140305/D) passée par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (TPSGC) pour la modernisation du répertoire des fournisseurs de services linguistiques du Bureau de la traduction, un organisme de service spécial qui relève de TPSGC.
  2. T.E.S.T. allègue qu’un arrangement en matière d’approvisionnement aurait dû lui être émis relativement aux domaines pour lesquels elle a postulé. De plus, T.E.S.T. allègue que des explications insuffisantes lui ont été fournies sur les résultats de l’évaluation et les raisons du rejet de sa proposition. T.E.S.T. allègue enfin que les critères de sélection retenus dans le cadre de la DAMA défavorisaient certains fournisseurs de services de traduction.
  3. À titre de mesure corrective, T.E.S.T. demande qu’un arrangement en matière d’approvisionnement lui soit émis pour les domaines pertinents. T.E.S.T. ne demande pas le remboursement des frais qu’elle a engagés relativement à sa plainte.
  4. Le Tribunal a décidé d’enquêter sur la plainte puisqu’elle satisfaisait aux exigences du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le TCCE et aux conditions énoncées au paragraphe 7(1) du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics[2].
  5. Le 10 novembre 2014, TPSGC a déposé auprès du Tribunal son rapport de l’institution fédérale (RIF), conformément à l’article 103 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur[3]. T.E.S.T. a déposé ses observations sur le RIF le 18 novembre 2014.
  6. Étant donné que les renseignements au dossier étaient suffisants pour juger du bien-fondé de la plainte, le Tribunal a décidé qu’une audience n’était pas nécessaire et a statué sur la plainte sur la foi des renseignements versés au dossier.

LA DAMA ET LA PLAINTE DÉPOSÉE PAR T.E.S.T.

  1. Le Bureau de la traduction fournit des services de traduction en langues officielles à diverses institutions, dont notamment le Parlement, les tribunaux et les divers ministères et organismes de la fonction publique fédérale. La DAMA visait à mettre à jour son répertoire de fournisseurs de services de traduction présélectionnés, qui sont les seuls fournisseurs potentiels qui peuvent subséquemment soumissionner dans le cadre de marchés publics concernant des contrats de traduction[4].
  2. La DAMA a été publiée le 10 février 2014. La date de clôture des soumissions était le 31 mars 2014.
  3. Aux termes de la DAMA, les fournisseurs choisissaient le ou les domaines pour lesquels ils voulaient être présélectionnés (par exemple « affaires autochtones », « biens immobiliers », « droit », etc.).
  4. De plus, la DAMA prévoyait que les fournisseurs potentiels pouvaient présenter une proposition pour un ou plusieurs de trois « paliers », définis en termes de volume quotidien de traduction. Ainsi, le palier 1 portait sur les « besoins dont la capacité quotidienne de traduction est supérieure ou égale à 1 500 mots et inférieure à 3 000 mots »[5]. Le palier 2 portait quant à lui sur les « besoins dont la capacité quotidienne de traduction est supérieure ou égale à 3 000 mots et inférieure à 8 000 mots ». Le palier 3 n’est pas pertinent en l’espèce.
  5. Les exigences précises à satisfaire afin d’obtenir un arrangement en matière d’approvisionnement dans le domaine et le palier demandés étaient spécifiées dans la DAMA. De façon générale, pour chaque domaine demandé, les fournisseurs potentiels devaient entre autres montrer qu’ils avaient traduit un certain nombre de mots en lien avec ce domaine « au cours des cinq dernières années à partir de la date de la DAMA »[6]. La DAMA ayant été publiée le 10 février 2014, la période de référence s’étendait du 10 février 2009 au 10 février 2014 (la période prescrite); cette précision sur les dates pertinentes a été apportée dans une réponse à une question en provenance d’un soumissionnaire, qui a fait l’objet de la modification no 005 à la DAMA[7].
  6. La DAMA incorporait par renvoi les dispositions du document « 2008 (2013-06-01) Instructions uniformisées – demande d’arrangement en matière d’approvisionnement – biens ou services » (Instructions uniformisées), tel qu’il appert de l’article 1 de la partie 2 de la DAMA[8]. Celles-ci en faisaient donc partie intégrante.
  7. La DAMA indiquait que pour être recevable, une proposition devait respecter les exigences de la DAMA et satisfaire à tous les critères d’évaluation techniques obligatoires[9].
  8. T.E.S.T. a soumis une proposition pour le palier 1 dans les domaines suivants : « textes administratifs et généraux », « affaires autochtones », « emploi », « informatique », « transport », « sciences de l’environnement », « mécanique » et « technique »[10].
  9. Elle a également soumissionné pour être reconnue comme fournisseur présélectionné pour le palier 2 dans les domaines suivants : « textes administratifs et généraux », « informatique », « transport », « mécanique » et « technique ».
  10. Le 21 août 2014, TPSGC a avisé T.E.S.T. que l’évaluation était terminée, mais qu’aucun arrangement en matière d’approvisionnement ne lui serait émis. En guise d’explication, cette lettre incluait pour chacun des paliers une formule standard où les motifs pour lesquels T.E.S.T. n’avait pas été retenue étaient cochés, sans toutefois donner de précisions quant au domaine concerné ou aux faits sur lesquels la conclusion était basée[11].
  11. Le 22 août 2014, T.E.S.T. a demandé des explications supplémentaires sur les motifs du rejet de sa proposition. TPSGC a répondu le 3 septembre 2014 par un courriel apportant certaines explications supplémentaires.
  12. Le même jour, T.E.S.T. a à nouveau écrit à TPSGC en apportant certains contre-arguments aux explications fournies, auquel courriel TPSGC a répondu le 8 septembre 2014. Il reconnaissait alors s’être trompé sur un des motifs de rejet cités, mais étant donné les autres motifs de rejet de la proposition de T.E.S.T., qui restaient valides, TPSGC a indiqué qu’il maintenait sa décision[12]. Ainsi, en définitive, TPSGC a indiqué qu’il rejetait la proposition de T.E.S.T. au motif que certaines dates de réalisation de projets de traduction inscrites dans les formulaires soumis par T.E.S.T. (pour les deux paliers) ne correspondaient pas à la période prescrite et que, de plus, dans plusieurs cas, le nombre de mots traduits inscrits dans les formulaires de réponse de T.E.S.T. était inférieur au nombre de mots exigé dans la DAMA[13].
  13. Après avoir envoyé à TPSGC une autre lettre d’opposition, restée sans réponse, T.E.S.T. a déposé sa plainte auprès du Tribunal le 18 septembre 2014, soit dans les délais prescrits au paragraphe 6(2) du Règlement.

ANALYSE

  1. Dans son enquête, le Tribunal doit limiter son étude à l’objet de la plainte[14]. À l’issue de l’enquête, le Tribunal doit déterminer la validité de la plainte en fonction des critères et procédures établis par règlement pour le contrat spécifique en question[15]. À cet égard, l’article 11 du Règlement prévoit que le Tribunal doit déterminer si la DAMA a été passée conformément aux accords commerciaux applicables, en l’espèce l’Accord sur le commerce intérieur[16].
  2. Tel qu’indiqué ci-dessus, la plainte de T.E.S.T. est basée sur trois motifs: 1) sa proposition répondait à tous les critères de la DAMA et, par conséquent, un arrangement en matière d’approvisionnement aurait dû lui être émis relativement aux domaines pour lesquels elle avait soumissionné; 2) des explications insuffisantes lui ont été fournies sur les résultats de l’évaluation; 3) les critères de sélection retenus dans le cadre de la DAMA défavorisaient certains fournisseurs de services de traduction.
  3. À cet égard, le Tribunal constate que T.E.S.T. a soulevé certains autres arguments dans ses observations sur le RIF, par exemple des allégations que la DAMA portait à confusion, que le processus d’évaluation avait été trop long et que les critères d’évaluation de la DAMA ne tenaient pas compte de la cote de satisfaction des clients par rapport au travail effectué par le fournisseur potentiel sur le plan de la qualité et de la ponctualité. Sans aborder la question de savoir si ces allégations sont fondées ou non, puisque de telles allégations ne font pas partie de la plainte déposée par T.E.S.T. le 18 septembre 2014, le Tribunal décide, conformément au paragraphe 30.14(1) de la Loi sur le TCCE, de ne pas étudier ces allégations supplémentaires.

Premier motif : TPSGC a-t-il contrevenu à ses obligations aux termes de l’ACI en refusant d’attribuer à T.E.S.T. un arrangement en matière d’approvisionnement dans les domaines pour lesquels elle avait soumissionné?

  1. Le paragraphe 506(6) de l’ACI prévoit que « [l]es documents d’appel d’offres doivent indiquer clairement les conditions du marché public, les critères qui seront appliqués dans l’évaluation des soumissions et les méthodes de pondération et d’évaluation des critères ». Il en découle également que lors de l’évaluation d’une soumission, l’institution fédérale a l’obligation d’appliquer les critères et conditions énoncés dans les documents d’appel d’offres.
  2. Avant d’aborder l’analyse des allégations de T.E.S.T., il convient de rappeler que le Tribunal fait généralement preuve de déférence à l’égard des évaluateurs pour ce qui est de leur évaluation des propositions. Dans Excel Human Resources Inc.[17], le Tribunal a confirmé qu’il « “[...] interviendra relativement à une évaluation uniquement dans les cas où elle serait réputée déraisonnable” et qu’il ne substituerait pas son jugement à celui des évaluateurs “[...] à moins que les évaluateurs ne se soient pas appliqués à évaluer la proposition d’un soumissionnaire, qu’ils aient donné une interprétation erronée de la portée d’une exigence, qu’ils n’aient pas tenu compte de renseignements cruciaux fournis dans une soumission, qu’ils aient fondé leur évaluation sur des critères non divulgués ou que l’évaluation n’ait pas été effectuée d’une manière équitable du point de vue de la procédure” ».
  3. Aux termes de la DAMA, TPSGC devait émettre un arrangement en matière d’approvisionnement aux fournisseurs potentiels dont les propositions satisfaisaient à tous les critères d’évaluation techniques obligatoires[18]. Il s’agit donc de déterminer si TPSGC a contrevenu aux termes de la DAMA et à ceux de l’ACI en estimant que la proposition de T.E.S.T. ne satisfaisait pas aux critères d’évaluation techniques obligatoires de la DAMA.

Acceptation par TPSGC de la proposition de T.E.S.T. dans certains domaines

  1. Tel qu’indiqué ci-dessus, T.E.S.T. conteste la conclusion de TPSGC voulant que sa proposition ne satisfaisait pas aux critères obligatoires de la DAMA relativement aux domaines pour lesquels elle avait postulé aux motifs que certaines dates de réalisation de projets inscrites sur le formulaire de réponse de T.E.S.T. ne respectaient pas la période prescrite et que, dans plusieurs domaines, le compte de mots traduits indiqué sur le formulaire de réponse de T.E.S.T. était en deçà du seuil requis.
  2. Il appert du RIF que TPSGC a depuis revu sa position en partie. En effet, TPSGC indique dans le RIF que depuis le dépôt de la plainte, il a émis un arrangement en matière d’approvisionnement à T.E.S.T. pour les domaines suivants du palier 1 : « textes administratifs et généraux », « affaires autochtones », « transport », « mécanique » et « technique », et pour les domaines suivants du palier 2 : « mécanique » et « technique »[19].
  3. Par ailleurs, à la lumière des observations sur le RIF déposées par T.E.S.T., le Tribunal prend acte du fait que T.E.S.T. a accepté sans réserves l’attribution d’un arrangement en matière d’approvisionnement dans les domaines « textes administratifs et généraux », « affaires autochtones », « transport », « mécanique » et « technique » du palier 1 et « mécanique » et « technique » du palier 2.
  4. À la lumière de ce qui précède, le Tribunal constate par conséquent que la plainte de T.E.S.T. à propos du rejet initial de sa proposition relativement à ces domaines est fondée.  

Domaines contestés du palier 1

  1. TPSGC a toutefois maintenu sa conclusion de non-conformité quant aux autres domaines pour lesquels T.E.S.T. a soumissionné. Les domaines du palier 1 toujours en litige sont « emploi », « informatique » et « sciences de l’environnement ».
  2. À cet égard, TPSGC explique que la proposition de T.E.S.T. ne satisfaisait pas aux exigences de la DAMA pour les domaines « emploi » et « sciences de l’environnement » du palier 1, car aucune des ressources proposées (c’est-à-dire aucun des trois traducteurs proposés) n’avait traduit à titre individuel les 300 000 mots requis en lien avec ces domaines durant la période prescrite[20].
  3. Quant au domaine « informatique », TPSGC explique que, contrairement à ce qui était indiqué dans la proposition de T.E.S.T., une vérification a révélé qu’aucun contrat lié à ce domaine n’avait été confié à T.E.S.T. par le Bureau de la traduction pendant la période prescrite[21], tel qu’il appert du sommaire des contrats du Bureau de la traduction accordés à T.E.S.T.[22] Le Bureau de la traduction était le seul client cité pour le domaine « informatique » dans la proposition de T.E.S.T. pour le palier 1[23].
  4. T.E.S.T. n’a pas contredit ces explications dans ses observations sur le RIF ou fourni quelque preuve du contraire, alléguant seulement que la DAMA portait à confusion.
  5. La DAMA prévoyait qu’au palier 1, chacune des ressources proposées devait posséder l’expérience minimale requise pour le domaine pertinent :

CRITÈRES D’ÉVALUATION TECHNIQUES OBLIGATOIRES POUR LE PALIER 1 – TRADUCTION EN LANGUES OFFICIELLES

[...]

Le fournisseur doit démontrer les qualifications et l’expérience de chacune des ressources proposées selon les grilles ci-dessous, selon le ou les domaines de travail choisis [...][24].

[Nos italiques]

  1. Ce critère a de plus fait l’objet d’une question de la part d’un fournisseur potentiel, à la suite de laquelle TPSGC a clarifié que, pour le palier 1, « les fournisseurs doivent effectivement démontrer l’expérience de traduction pour chacune des ressources proposées », tel qu’il appert de la réponse 33 incluse dans la modification no 004 à la DAMA[25].
  2. De plus, pour chacun des domaines pertinents, la DAMA posait comme critère de sélection la démonstration d’une expérience en traduction « d’au moins 300 000 mots au cours des cinq dernières années à partir de la date de la DAMA »[26].
  3. À cet égard, la DAMA réservait le droit à TPSGC de vérifier l’exactitude des renseignements fournis par le fournisseur potentiel pour les fins de l’évaluation des propositions. En effet, les Instructions uniformisées stipulent ce qui suit :  

15 Déroulement de l’évaluation

  1. Lorsque le Canada évalue les arrangements, il peut, sans toutefois y être obligé, effectuer ce qui suit :
  1. demander des précisions ou vérifier l’exactitude de certains renseignements ou de tous les renseignements fournis par les fournisseurs relatifs à la DAMA;
  2. communiquer avec l’une ou toutes les personnes citées en référence pour vérifier et attester l’exactitude des renseignements fournis par les fournisseurs;

[...]

e) vérifier tous les renseignements fournis par les fournisseurs en faisant des recherches indépendantes, en utilisant des ressources du gouvernement ou en communiquant avec des tiers;

[...][27]

  1. Le Tribunal est d’avis que les motifs invoqués par TPSGC pour conclure que la proposition de T.E.S.T. n’était pas conforme concernant les domaines « emploi », « sciences de l’environnement » et « informatique » du palier 1 sont raisonnables à la lumière des dispositions de la DAMA précitées et des éléments de preuve au dossier. Par conséquent, le Tribunal conclut que la décision de TPSGC de ne pas accepter la proposition de T.E.S.T. relativement à ces domaines n’était pas déraisonnable.

Domaines contestés du palier 2

  1. En ce qui concerne le palier 2, TPSGC maintient que la proposition de T.E.S.T. était non conforme relativement aux domaines « textes administratifs et généraux », « transport » et « informatique ».
  2. TPSGC explique ainsi que pour le domaine « textes administratifs et généraux », T.E.S.T. n’a pas démontré une expérience de 600 000 mots traduits au cours de la période prescrite, notamment parce que certains des projets qui auraient pu être pertinents devaient déjà être comptabilisés dans les domaines « mécanique » et « technique » afin de permettre à T.E.S.T. d’être sélectionné pour ces domaines et que la même expérience de traduction ne pouvait être comptabilisée deux fois, conformément aux termes de la DAMA.
  3. T.E.S.T. n’a fourni aucun argument ou preuve du contraire.
  4. De plus, la DAMA stipulait effectivement, parmi les critères d’évaluation techniques obligatoires pour le palier 2, que « [l]e fournisseur ne peut pas utiliser la même expérience de traduction pour plus d’un domaine »[28]. Ce critère a été confirmé et expliqué plus amplement en réponse à des questions de fournisseurs potentiels, dans les réponses 14 et 15 incluses dans la modification no 003 à la DAMA[29].
  5. Par conséquent, le Tribunal conclut que la décision de TPSGC de ne pas accepter la proposition de T.E.S.T. relativement au domaine « textes administratifs et généraux » du palier 2 était conforme aux termes de la DAMA. Elle n’était donc pas déraisonnable.  
  6. Quant au domaine « transport », TPSGC explique qu’une vérification effectuée dans les dossiers du Bureau de la traduction a permis de constater que le nombre de mots effectivement traduits était inférieur à celui que T.E.S.T. indiquait avoir traduits pour ce client relativement à ce domaine. Premièrement, T.E.S.T. avait comptabilisé le nombre de mots prévus à l’attribution de certains contrats en lien avec ce domaine, et non le nombre de mots effectivement traduits par elle en vertu de ces contrats. Et deuxièmement, elle a comptabilisé certains contrats qui relevaient d’un autre domaine de spécialisation[30].
  7. T.E.S.T. n’a présenté aucune preuve du contraire.
  8. La DAMA fournissait un tableau de concordance entre les anciens domaines de spécialisation utilisés par le Bureau de la traduction (au moyen desquels les contrats effectués durant la période prescrite par le fournisseur potentiel ont été classifiés) et les nouveaux domaines de spécialisation qui figurent dans la DAMA[31]. À cet égard, le Tribunal remarque que T.E.S.T. a émis certains commentaires laissant entendre son désaccord quant à la reclassification des domaines de spécialisation; toutefois, il ne relève pas de la compétence du Tribunal dans le cadre de la présente plainte de juger du caractère approprié ou non de la méthode de classification des domaines de spécialisation utilisée par le Bureau de la traduction, et le Tribunal ne peut que constater que le tableau de concordance indiquait clairement la correspondance entre les anciens domaines de spécialisation et les nouveaux domaines pour les fins de la DAMA.
  9. Il était également clair à partir de la DAMA que c’est le nombre de mots effectivement traduits en vertu d’un contrat, et non le nombre de mots que le contrat envisageait, qui devait être comptabilisé aux fins de la DAMA; en effet, cet aspect a été expressément clarifié par TPSGC en réponse à une question d’un fournisseur potentiel qui a fait objet de la modification no 003 à la DAMA[32].  
  10. Par conséquent, la décision de TPSGC de ne pas accepter la proposition de T.E.S.T. relativement au domaine « transport » du palier 2 était conforme aux termes de la DAMA. Elle n’était donc pas déraisonnable.
  11. Enfin, en ce qui concerne le domaine « informatique » du palier 2, TPSGC réitère qu’aucun contrat lié à ce domaine n’a été émis à T.E.S.T., vérification faite auprès du Bureau de la traduction[33], de sorte que le volume de mots traduits relativement à ce domaine durant la période prescrite ne pouvait atteindre le seuil fixé pour le palier 2, contrairement à ce qui était indiqué dans la proposition de T.E.S.T.  
  12. Encore une fois, T.E.S.T. n’a présenté aucun argument ou preuve du contraire sur ce point.
  13. Par conséquent, à la lumière des éléments de preuve, la décision de TPSGC de ne pas accepter la proposition de T.E.S.T. relativement au domaine « informatique » du palier 2 était conforme aux termes de la DAMA.

Conclusion sur le premier motif de plainte

  1. En conclusion, pour les raisons qui précèdent, le Tribunal conclut que ce motif de la plainte de T.E.S.T. est fondé en partie.

Deuxième motif : TPSGC a-t-il contrevenu à ses obligations aux termes de l’ACI en fournissant à T.E.S.T. des explications insuffisantes quant aux raisons du rejet de sa proposition?

  1. Le deuxième motif de plainte invoqué par T.E.S.T. est qu’elle a reçu des explications insuffisantes quant aux motifs du rejet de sa proposition ayant trait à divers domaines. En particulier, elle dit n’avoir reçu qu’une « fin de non-recevoir sans aucune explication individualisée ». Elle réitère dans ses observations sur le RIF que la lettre l’avisant du rejet de sa proposition ainsi que les courriels échangés par la suite n’apportent pas d’explications, le dernier courriel envoyé par T.E.S.T. étant resté sans réponse. De plus, T.E.S.T. s’en prend au fait qu’« aucun de ces messages n’est signé, contrairement à la pratique de l’administration fédérale, et que les responsables capables de donner des explications ont refusé de nous répondre par téléphone ».
  2. TPSGC n’a pas abordé ce motif de plainte dans son RIF.
  3. L’ACI ne contient pas de disposition particulière obligeant l’institution fédérale concernée à offrir un compte rendu aux soumissionnaires dont les propositions ont été rejetées.
  4. Toutefois, les termes mêmes de la DAMA prévoyaient un droit pour les fournisseurs de demander un compte rendu des résultats comme suit :

PARTIE 1 – RENSEIGNEMENTS GÉNÉRAUX

[...]

5. Compte rendu

Les fournisseurs peuvent demander un compte rendu des résultats du processus de demande d’arrangements en matière d’approvisionnement. Les fournisseurs doivent en faire la demande par courriel au responsable de l’arrangement en matière d’approvisionnement dans les 15 jours ouvrables, suivant la réception des résultats du processus de demande d’arrangements en matière d’approvisionnement. Le compte rendu peut être fourni par écrit, par téléphone ou en personne[34].

  1. T.E.S.T. a été avisée du rejet de sa proposition par courriel en date du 21 août 2014. En guise d’explication des raisons de cette évaluation, une pièce jointe pour le palier 1 et une autre pour le palier 2 stipulait qu’un arrangement en matière d’approvisionnement ne serait pas émis à T.E.S.T. puisqu’aucune des ressources présentées n’avait été jugée conforme. La deuxième page des pièces jointes reproduisait une formule standard où figuraient les raisons pour lesquelles l’entreprise n’avait pas été retenue. Pour le palier 1, trois motifs de non-sélection étaient cochés, comme suit :

√ Certaines dates inscrites dans le formulaire ne respectent pas la période prescrite (de février 2009 à février 2014).

[...]

√ Compte de mots insuffisant.

√ Certaines attestations obligatoires n’ont pas été soumises ou sont incomplètes.

  1. Pour le palier 2, seul le premier motif était coché.
  2. T.E.S.T. a demandé par courriel en date du 22 août 2014 qu’on lui indique quels contrats en particulier avaient été jugés inadmissibles parce que ne respectant pas la période prescrite pour les paliers 1 et 2. Elle a aussi demandé des explications sur les deux autres motifs évoqués pour le rejet de sa proposition concernant le palier 1.
  3. Le 3 septembre 2014, TPSGC a fourni certaines explications en réponse à ces questions. Quant au premier motif de rejet, TPSGC a renvoyé de façon générale à la « pièce jointe 1 de la partie 4 » et à la « pièce jointe 2 de la partie 4 » et réitéré que l’expérience de traduction devait avoir été acquise « au cours des cinq dernières années à partir de la date de la DAMA »; elle rappelait aussi que dans la modification no 005 à la DAMA, il a été confirmé expressément que la période prescrite s’étalait du 10 février 2009 au 10 février 2014.
  4. Quant au deuxième motif de rejet, TPSGC s’est contentée de répondre que, « [d]ans plusieurs cas, le nombre de mots traduits inscrit dans [le] formulaire est inférieur au nombre de mots exigé [aux termes de la DAMA] ».
  5. Enfin, pour le troisième motif de rejet, TPSGC a expliqué que T.E.S.T. n’avait pas fourni une attestation qui était exigée.
  6. T.E.S.T. a encore une fois écrit à TPSGC afin de contester ces explications. Le 8 septembre 2014, TPSGC a répondu par courriel, reconnaissant que le troisième motif de rejet invoqué était en fait erroné, puisque l’attestation en question avait bien été reçue.
  7. Toutefois, TPSGC a indiqué qu’il maintenait néanmoins les résultats de l’évaluation pour les deux autres motifs. L’explication étayant les deux autres motifs était la suivante :

1 – Certaines dates inscrites dans votre formulaire ne respectent pas la période prescrite (de février 2009 à février 2014).

Les dates qui sont utilisées pour déterminer la période (cinq dernières années à partir de la date de la DAMA) sont celles qui sont soumises par les fournisseurs par l’entremise du formulaire de réponse. Malheureusement, les dates que vous avez inscrites dans votre formulaire de réponse pour plusieurs domaines, y compris celles pour les domaines Mécanique, Technique et Transport se trouvent à l’extérieur de la période prescrite.

2 – Compte de mots insuffisant.

Dans plusieurs cas, le nombre de mots traduits inscrit [dans] votre formulaire de réponse est inférieur au nombre de mots exigé comme le stipule la PIÈCE JOINTE 1 DE LA PARTIE 4.

  1. Il appert du message suivant de T.E.S.T. à TPSGC, en date du 10 septembre 2014, que T.E.S.T. a bien compris l’explication fournie par TPSGC quant au premier motif du rejet de sa proposition. En effet, elle ne demande pas d’explications supplémentaires, mais conteste plutôt la méthode d’évaluation employée par TPSGC, qui ne prenait en considération que les seules dates inscrites sur le formulaire de réponse. Les passages pertinents du message de T.E.S.T. sont les suivants :

[...] Merci de ces précisions qui ont au moins le mérite de cerner clairement le problème. [...]

À l’égard de votre premier argument : [...]

Je vous répondrai que les dates figurant sur le formulaire n’ont, à mon sens, pas pour but de justifier l’expérience de Linguistique TEST en nombre de mots. Les volumes revendiqués figurent dans le tableau ci-joint [...]. En effet, tous ces contrats ont été effectués à l’intérieur de la période définie du 02-09 au 02-14 (5 ans). Les chiffres que nous avançons sont donc parfaitement conformes à vos exigences. À mon sens, les formulaires en question, pour le Palier 1 et pour le Palier 2, ne devaient refléter que les périodes sur lesquelles ces services ont été rendus. [...]

  1. Par conséquent, le Tribunal est d’avis que les explications fournies par TPSGC quant au premier motif de rejet étaient suffisantes pour permettre à T.E.S.T. de comprendre comment ce premier motif a justifié le rejet de sa proposition. En effet, puisque la méthode d’évaluation employée par TPSGC se réduisait, selon ce qu’elle explique dans son courriel daté du 8 septembre 2014, à la vérification des dates inscrites sur le formulaire de réponse, il est difficile de concevoir comment elle aurait pu être expliquée davantage. À cet égard, il faut noter qu’en décidant de revoir le dossier et de reconnaître que T.E.S.T. en fin de compte remplissait les conditions requises pour certains domaines, TPSGC a nécessairement opté pour une méthode d’évaluation différente, c’est-à-dire qui ne se contente pas de s’en tenir aux seules dates inscrites sur le formulaire de réponse.
  2. Il reste néanmoins que les explications fournies par TPSGC quant au troisième motif de rejet (compte de mots insuffisant) étaient on ne peut plus brèves et, tout compte fait, incompréhensibles. En effet, ce n’est que dans le RIF que l’on apprend précisément pourquoi le compte de mots avait été jugé insuffisant à certains égards – par référence à des exigences de la DAMA (notamment l’exigence voulant que chacune des ressources proposées par le soumissionnaire pour le palier 1 devait avoir traduit 300 000 mots au cours de la période prescrite).
  3. Pour cette raison, le Tribunal est d’avis que les explications fournies par TPSGC étaient insuffisantes, puisqu’elles ne permettaient pas à T.E.S.T. de comprendre pleinement les raisons du rejet de sa proposition.
  4. Le Tribunal se serait attendu à ce que TPSGC, qui dispose de ressources considérables, traite avec davantage de considération les demandes de renseignement de ses fournisseurs potentiels. En effet, il est malencontreux que T.E.S.T. ait eu à avoir recours au processus de plainte formel devant le Tribunal afin d’obtenir une explication détaillée des motifs de rejet de sa proposition. Le Tribunal est d’avis que de telles situations doivent être évitées. Des comptes rendus de qualité favorisent les bonnes relations entre le gouvernement et ses fournisseurs potentiels et ainsi encouragent la concurrence dans les marchés publics passés par le gouvernement. Qui plus est, en permettant aux fournisseurs potentiels déçus de comprendre les motifs du rejet de leur offre, des comptes rendus de qualité peuvent également permettre d’éviter la judiciarisation des différends, et les coûts et délais supplémentaires que cela implique.
  5. Par conséquent, le Tribunal conclut que TPSGC a contrevenu à l’article 5 de la partie 1 de la DAMA en fournissant un compte rendu qui ne permettait pas à T.E.S.T. de comprendre pleinement les raisons du rejet de sa proposition.

Troisième motif : les critères de sélection retenus dans le cadre de la DAMA défavorisaient-ils certains fournisseurs de services de traduction?

  1. En dernier lieu, T.E.S.T. allègue que les critères de la DAMA avaient pour effet de « réduire la concurrence en éliminant les fournisseurs traditionnels du gouvernement » en imposant un plafond d’ancienneté[35]. Dans ses observations sur le RIF, T.E.S.T. a réitéré la même allégation.
  2. TPSGC n’a pas abordé ce motif de plainte dans le RIF.
  3. Le Tribunal n’examinera pas le mérite de ce motif de plainte, puisqu’il conclut qu’il n’a pas été soulevé dans les délais prescrits.  
  4. Les paragraphes 6(1) et (2) du Règlement prescrivent des délais strictes dans lesquels un fournisseur doit généralement soulever ses griefs concernant un processus de marché public. En effet, aux termes de ces dispositions, le fournisseur dispose de 10 jours ouvrables suivant la date où il prend connaissance des faits à l’origine de sa plainte, ou suivant la date où il aurait dû vraisemblablement les découvrir, soit pour présenter une opposition auprès de l’institution fédérale, soit pour déposer une plainte auprès du Tribunal. Les parties pertinentes de l’article 6 sont les suivantes :

6. (1) Sous réserve des paragraphes (2) et (3), le fournisseur potentiel qui dépose une plainte auprès du Tribunal en vertu de l’article 30.11 de la Loi doit le faire dans les 10 jours ouvrables suivant la date où il a découvert ou aurait dû vraisemblablement découvrir les faits à l’origine de la plainte.

(2) Le fournisseur potentiel qui a présenté à l’institution fédérale concernée une opposition concernant le marché public visé par un contrat spécifique et à qui l’institution refuse réparation peut déposer une plainte auprès du Tribunal dans les 10 jours ouvrables suivant la date où il a pris connaissance, directement ou par déduction, du refus, s’il a présenté son opposition dans les 10 jours ouvrables suivant la date où il a découvert ou aurait dû vraisemblablement découvrir les faits à l’origine de l’opposition.

  1. Par ailleurs, la Cour d’appel fédérale a indiqué ce qui suit à propos des délais de prescription inhérents au régime des marchés publics en vertu de la Loi sur le TCCE et des accords commerciaux applicables, dont l’ACI :

Dans les affaires de marchés publics, le temps représente une condition essentielle. [...] Les fournisseurs potentiels ne doivent donc pas attendre l’attribution d’un contrat avant de déposer toute plainte qu’ils pourraient avoir concernant la procédure. On s’attend à ce qu’ils soient vigilants et qu’ils réagissent dès qu’ils découvrent ou auraient vraisemblablement dû découvrir un vice de procédure. Toute la procédure de passation des marchés publics [...] se veut aussi transparente que rapide. Elle vise à s’assurer du caractère définitif des contrats dans les meilleurs délais possibles[36].

  1. Suivant ces principes, les plaintes fondées sur le choix ou l’interprétation des modalités d’un marché public doivent être présentées dans les 10 jours ouvrables suivant le moment où le vice de procédure allégué est devenu ou aurait dû devenir apparent.
  2. Dans le cas présent, la DAMA a été publiée le 10 février 2014 et les soumissions étaient acceptées jusqu’au 31 mars 2014. Dans ce contexte, T.E.S.T. a ou aurait vraisemblablement dû découvrir le fait que la DAMA imposait un « plafond d’ancienneté », selon l’expression employée par T.E.S.T., au plus tard le 31 mars 2014, date limite à laquelle elle devait déposer sa proposition.
  3. Aux termes des paragraphes 6(1) et (2) du Règlement, T.E.S.T. avait donc 10 jours ouvrables à partir du 31 mars 2014 pour soit déposer une plainte auprès du Tribunal, soit présenter une opposition à ce sujet à TPSGC.
  4. Toutefois, selon les éléments de preuve au dossier, T.E.S.T. semble n’avoir fait part de ses craintes quant au caractère injuste des critères figurant dans la DAMA que le 10 septembre 2014[37], soit plus de cinq mois à partir du moment où elle aurait vraisemblablement dû prendre connaissance des critères figurant dans la DAMA.
  5. Pour ces raisons, le Tribunal conclut que ce motif de plainte est forclos.

MESURE CORRECTIVE ET FRAIS

  1. Pour les motifs qui précèdent, le Tribunal est d’avis que la plainte déposée par T.E.S.T. est fondée en partie. TPSGC a reconnu postérieurement au dépôt de la plainte avoir erronément rejeté la proposition de T.E.S.T. pour un arrangement en matière d’approvisionnement pour cinq domaines du palier 1 (« textes administratifs et généraux », « affaires autochtones », « transport », « mécanique » et « technique ») et deux domaines du palier 2 (« mécanique » et « technique »). De plus, TPSGC n’a pas fourni un compte rendu permettant à T.E.S.T. de comprendre l’évaluation et ses résultats. Ainsi, TPSGC a agi contrairement aux dispositions de la DAMA et, par conséquent, contrairement à ses obligations aux termes de l’ACI.
  2. Lorsque son enquête révèle qu’une procédure de marché public a été non conforme aux exigences de l’ACI, le Tribunal doit déterminer la mesure corrective appropriée, eu égard aux termes des paragraphes 30.15(2) et (3) de la Loi sur le TCCE.
  3. Le Tribunal constate que T.E.S.T. a déjà obtenu la réparation qu’elle demandait puisqu’elle a été incluse dans le répertoire des fournisseurs de services linguistiques pour les domaines pour lesquels elle a été retenue. Quoi qu’il en soit, comme une inclusion au sein du répertoire des fournisseurs ne garantit pas l’attribution d’un contrat, il ne peut y avoir lieu d’accorder à T.E.S.T. une compensation pour la période durant laquelle elle en a été exclue. 
  4. Par la force des choses, la présente procédure a également permis à T.E.S.T. d’obtenir les renseignements nécessaires pour comprendre pourquoi sa proposition n’a pas été retenue quant aux autres domaines – obtenant ainsi l’information qui aurait dû lui être communiquée à l’étape du compte rendu.
  5. Il n’y a pas d’indication de mauvaise foi de part ou d’autre. Le Tribunal ne considère pas par ailleurs que les contraventions constatées, admises et corrigées par TPSGC, relatives à l’application des critères de la DAMA soient d’une gravité importante puisqu’elles sont liées de près aux termes mêmes de la DAMA et aux faits de l’espèce. Par contre, le traitement insatisfaisant des demandes de renseignement des fournisseurs n’ayant pas été retenus aux termes de la DAMA a pu miner le lien de confiance entre le gouvernement et ses fournisseurs potentiels, tels que T.E.S.T., et ainsi avoir eu un impact négatif sur l’efficacité du mécanisme d’adjudication de contrats.
  6. Par conséquent, ayant examiné l’ensemble des facteurs prescrits et les faits de l’espèce, le Tribunal est d’avis que la recommandation appropriée est celle de conseiller à TPSGC de revoir ses pratiques en matière de marchés publics afin de s’assurer que les fournisseurs non retenus obtiennent, chacun, un compte rendu complet et compréhensible de leur évaluation et des motifs du rejet de leur proposition.
  7. Chaque partie assumera ses frais en l’espèce puisque T.E.S.T. et TPSGC ont chacune eu gain de cause en partie.

DÉCISION

  1. Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal détermine que la plainte est fondée en partie.
  2. Aux termes du paragraphe 30.15(2) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal recommande à TPSGC de revoir ses pratiques en matière de marchés publics afin de s’assurer que les fournisseurs non retenus obtiennent, chacun, un compte rendu complet et compréhensible de leur évaluation et des motifs du rejet de leur proposition.
  3. Chaque partie assumera ses propres frais.
 

[1].     L.R.C. 1985, ch. 47 (4e suppl.) [Loi sur le TCCE].

[2].     D.O.R.S./93-602 [Règlement].

[3].     D.O.R.S./91-499 [Règles].

[4].     Pièce PR-2014-028-15, onglet A aux pp. 4-5.

[5].     Ibid., onglet A à la p. 25.

[6].     Ibid., onglet A à la p. 26.

[7].     Reproduite dans le courriel en date du 3 septembre 2014 de TPSGC à T.E.S.T., pièce PR-2014-028-01.

[8].     Pièce PR-2014-028-15, onglet A à la p. 12, article 1.

[9].     Ibid., onglet A à la p. 24.

[10].   Ibid., onglet C.

[11].   Pièce PR-2014-028-01.

[12].   Ibid.

[13].   Ibid.

[14].   Paragraphe 30.14(1) de la Loi sur le TCCE.

[15].   Paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le TCCE.

[16].   18 juillet 1994, Gaz. C. 1995.I.1323, en ligne : Secrétariat du commerce intérieur <http://www.ait-aci.ca/index_fr/ait.htm> [ACI]. Aucun des autres accords commerciaux ne s’applique à la DAMA, puisque les services de traduction en sont soit expressément exclus (section B de l’annexe 1001.1b-2 de l’Accord de libre‑échange nord-américain entre le gouvernement du Canada, le gouvernement des États-Unis d’Amérique et le gouvernement des États‑Unis du Mexique, 17 décembre 1992, R.T.C. 1994, no 2 (entré en vigueur le 1er janvier 1994); section B de l’annexe 5 de l’Accord de libre-échange entre le Canada et la République du Panama, en ligne : le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international <http://www.international.gc.ca/trade-agreements-accords-commerciaux/agr-... (entré en vigueur le 1er avril 2013); section B de l’annexe 1401-4 de l’Accord de libre-échange entre le Canada et la République de Colombie, en ligne : le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international <http://www.international.gc.ca/trade-agreements-accords-commerciaux/agr-... (entré en vigueur le 15 août 2011); section B de l’annexe 1401.1-4 de l’Accord de libre-échange entre le Canada et la République du Pérou, en ligne : le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international <http://www.international.gc.ca/trade-agreements-accords-commerciaux/agr-... (entré en vigueur le 1er août 2009); section B de l’annexe Kbis-01.1-4 de l’Accord de libre-échange entre le gouvernement du Canada et le gouvernement de la République du Chili, R.T.C. 1997, no 50 (entré en vigueur le 5 juillet 1997). Le chapitre Kbis, intitulé « Marchés publics », est entré en vigueur le 5 septembre 2008)) ou ne sont pas inclus dans la liste des services (annexe 4 de l’Accord sur les marchés publics, 15 avril 1994, en ligne: Organisation mondiale du commerce <http://www.wto.org/french/docs_f/legal_f/final_f.htm>).

[17].   (2 mars 2012), PR-2011-043 (TCCE) au par. 33.

[18].   Pièce PR-2014-028-15, onglet A à la p. 24, article 2.1.

[19].   Ibid. aux par. 16, 18.

[20].   Ibid. aux par. 21-25, 29.

[21].   Ibid. aux par. 27-28.

[22].   Ibid., onglet E.

[23].   Ibid., onglet C à la p. 2.

[24].   Ibid., onglet A à la p. 25.

[25].   Ibid., onglet A à la p. 3.

[26].   Ibid., onglet A aux pp. 27, 29, 31, 34, 38.

[28].   Pièce PR-2014-028-15, onglet A à la p. 41.

[29].   Ibid., onglet B aux pp. 5-6.

[30].   Ibid. aux par. 33-39.

[31].   Ibid., onglet A aux pp. 5, 9-11. Voir aussi ibid., onglet B à la p. 6 (question et réponse no 17).

[32].   Ibid., onglet B aux pp. 8-9 (question et réponse no 26a)).

[33].   Ibid. au par. 41; ibid., onglet E.

[34].    Ibid., onglet A aux pp. 4-6.

[35].   Pièce PR-2014-028-01.

[36].   IBM Canada Ltd. c. Hewlett Packard (Canada) Ltd., 2002 CAF 284 (CanLII), aux par. 18, 20.

[37].   Pièce PR-2014-028-01 (courriel envoyé à TPSGC le 10 septembre 2014).