RAYTHEON CANADA LIMITED

RAYTHEON CANADA LIMITED
c.
MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX
Dossier no PR-2015-026

Décision et motifs rendus
le mardi 19 janvier 2016

TABLE DES MATIÈRES

 

EU ÉGARD À une plainte déposée par Raytheon Canada Limited aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.);

ET À LA SUITE D’une décision d’enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

ENTRE

RAYTHEON CANADA LIMITED Partie plaignante

ET

LE MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX Institution fédérale

DÉCISION

Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte n’est pas fondée.

Aux termes de l’article 30.16 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal accorde au ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux le remboursement des frais raisonnables qu’il a engagés pour répondre à la plainte, ces frais devant être payés par Raytheon Canada Limited. Conformément à la Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure portant sur un marché public, l’indication provisoire du degré de complexité de la présente plainte donnée par le Tribunal canadien du commerce extérieur se situe au degré 3, et l’indication provisoire du montant de l’indemnisation se chiffre à 4 700 $. Si l’une ou l’autre des parties n’est pas d’accord en ce qui a trait à l’indication provisoire du degré de complexité ou à l’indication provisoire du montant de l’indemnisation, elle peut déposer des observations auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur, en conformité avec l’article 4.2 de la Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure portant sur un marché public. Le Tribunal canadien du commerce extérieur se réserve la compétence de fixer le montant définitif de l’indemnisation.

Peter Burn
Peter Burn
Membre présidant

Membre du Tribunal : Peter Burn, membre présidant

Conseillers juridiques pour le Tribunal : Eric Wildhaber
Rebecca Marshall-Pritchard

Partie plaignante : Raytheon Canada Limited

Conseillers juridiques pour la partie plaignante : Brenda C. Swick
Michael J. Brzezinski
Nathan I. Lean

Institution fédérale : ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux

Conseillers juridiques pour l’institution fédérale : Alexandre Kaufman
Susan D. Clarke
Ian McLeod
Roy Chamoun

Veuillez adresser toutes les communications au :

Greffier
Secrétariat du Tribunal canadien du commerce extérieur
15e étage
333, avenue Laurier Ouest
Ottawa (Ontario)  K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel : tcce-citt@tribunal.gc.ca

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

  1. Le 9 septembre 2015, Raytheon Canada Limited (Raytheon) a déposé une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur[1] au sujet d’un marché (invitation no W8476-112965/B) passé par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (TPSGC) au nom du ministère de la Défense nationale (MDN) visant la fourniture d’un projet d’équipement intégré du soldat (PEIS).
  2. Le PEIS vise l’acquisition et le soutien de « [...] plus de 4 000 ensembles de communications portables, avec les accessoires requis, l’équipement de soutien, la gestion du contrat, la formation ainsi que le soutien logistique et technique [...]. Le [PEIS] est un ensemble d’équipement militaire que les soldats portent avec leur charge de combat. Il comprend des accessoires d’armes et des composantes électroniques qui permettent aux soldats de rester en contact avec leur équipe après être sortis du véhicule sur le champ de bataille. Il comprend également une radio, un ordinateur semblable à un téléphone intelligent pour exécuter un logiciel de gestion de combat, un GPS et un casque d’écoute. »[2] [traduction]
  3. Raytheon allègue que TPSGC :
  • n’a pas évalué sa soumission équitablement (motif 1);
  • a évalué la « disponibilité » [traduction] de son équipement du PEIS plutôt que son « rendement » [traduction] (motif 2);
  • n’a pas mené la procédure de passation du marché d’une manière équitable, notamment en tardant à annoncer les résultats (motif 3);
  • n’a pas appliqué certaines dispositions relatives à l’intégrité (motif 4).
  1. Raytheon demande que les soumissions soient réévaluées et que le contrat spécifique soit résilié. De plus, Raytheon demande une indemnisation pour perte de profits et le remboursement des frais relatifs à sa plainte et à la préparation de sa soumission.
  2. Le 15 septembre 2015, le Tribunal a avisé les parties que la plainte avait été acceptée à des fins d’enquête puisqu’elle satisfaisait aux exigences du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le TCCE et aux conditions énoncées au paragraphe 7(1) du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics[3].
  3. Le 30 septembre 2015, Raytheon a déposé une requête visant la production de questionnaires thématiques remplis par les soldats évaluateurs à l’étape 2 de l’évaluation de la performance avec acceptation par l’utilisateur (ÉPAU). L’ÉPAU est le processus d’évaluation mené par les équipes de soldats d’infanterie des Forces canadiennes relativement à l’acceptabilité opérationnelle de l’équipement du PEIS.
  4. Le 2 octobre 2015, le Tribunal a enjoint à TPSGC de produire les questionnaires thématiques au plus tard le 13 octobre 2015, ce qu’il a fait.
  5. Les 9 et 20 octobre 2015, Raytheon a demandé que M. Jimmy J. Jackson ait accès au dossier confidentiel pour qu’il puisse préparer un rapport d’expert.
  6. Le 15 octobre 2015, TPSGC s’est opposé à ce que M. Jackson ait accès au dossier confidentiel.
  7. Le 20 octobre 2015, le Tribunal a rejeté la demande de Raytheon.
  8. Le 23 octobre 2015, TPSGC a déposé un rapport de l’institution fédérale (RIF) conformément à l’article 103 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur[4]. Le même jour, Raytheon a déposé un rapport rédigé par M. Jackson.
  9. Raytheon a déposé ses observations sur le RIF le 4 novembre 2015.
  10. Le 16 novembre 2015, TPSGC a déposé sa réponse aux observations de Raytheon au sujet du RIF, dans laquelle il a indiqué que Raytheon a soulevé de nouveaux arguments qui méritaient une réponse.
  11. Le 25 novembre 2015, Raytheon a fourni de nouvelles observations en réponse à la réponse de TPSGC aux observations de Raytheon sur le RIF.
  12. Étant donné que les renseignements au dossier étaient suffisants pour déterminer le bien-fondé de la plainte, le Tribunal a décidé qu’une audience n’était pas nécessaire et a statué sur la plainte sur la foi des renseignements versés au dossier.

PROCÉDURE DE PASSATION DU MARCHÉ PUBLIC

  1. La demande de propositions (DP) a été publiée le 2 avril 2013.
  2. Le 1er août 2013, Raytheon a présenté sa proposition en réponse à la DP.
  3. Le 27 juillet 2015, Raytheon a été avisée que sa soumission n’avait pas été acceptée et qu’un contrat avait été adjugé à Rheinmetall Canada inc. (Rheinmetall).
  4. Le 10 août 2015, Raytheon a présenté son opposition à TPSGC.
  5. Le 4 septembre 2015, TPSGC a répondu à Raytheon par écrit.
  6. Le 9 septembre 2015, Raytheon a déposé sa plainte auprès du Tribunal.

ANALYSE DU TRIBUNAL

  1. Le paragraphe 30.14(1) de la Loi sur le TCCE dispose que le Tribunal doit limiter son étude à l’objet de la plainte. Au terme de l’enquête, le Tribunal détermine la validité de la plainte en fonction des critères et procédures établis par règlement pour un contrat spécifique. Aux termes de l’article 11 du Règlement, le Tribunal détermine si la procédure du marché public a été suivie conformément aux exigences des accords commerciaux applicables, soit en l’espèce l’Accord sur le commerce intérieur[5].
  2. Pour les motifs qui suivent, le Tribunal conclut qu’aucun des motifs de plainte soulevés par Raytheon n’est fondé.

Motif 1 : Évaluation inéquitable—Le motif n’est pas fondé

  1. Raytheon fonde son allégation selon laquelle l’évaluation n’est pas fiable et est inéquitable sur un seul élément de preuve qui démontrerait que les résultats de l’ÉPAU ne résistent pas au test de l’analyse statistique. Un rapport qu’elle a présenté indique que les résultats de l’ÉPAU ne peuvent être reproduits[6]. Raytheon affirme essentiellement qu’il s’est sûrement passé quelque chose d’incorrect, sans même présenter le moindre élément de preuve qui indiquerait en quoi consiste ce quelque chose, en supposant que des « vices cachés » [traduction] ont sûrement compromis l’évaluation. Raytheon reconnaît que « les renseignements ne sont pas suffisants pour permettre de déterminer précisément quels sont ces vices cachés »[7] [traduction].
  2. La liste des hypothèses que Raytheon avance concernant les erreurs qui auraient pu être commises est longue : (i) l’évaluation était sûrement arbitraire ou imprécise; (ii) la façon dont le processus d’ÉPAU a été mené était sûrement inéquitable; (iii) les soldats évaluateurs n’avaient sûrement pas les compétences d’évaluation nécessaires; (iv) l’évaluation était sûrement ambiguë et incohérente; (v) les soldats évaluateurs ont sûrement fondé leur évaluation sur des critères non divulgués et (vi) les soldats évaluateurs ont sûrement été influencés, inconsciemment, par des préjugés personnels[8]. TPSGC a également subdivisé la liste des six arguments précédents et arrive à un total de 14[9].
  3. Avant d’examiner les réponses que TPSGC a formulées à l’égard de ces hypothèses, le Tribunal remarque que Raytheon n’indique pas pourquoi elle n’a fourni aucun élément de preuve à l’exception de la déclaration suivante : « Le RIF se rapporte à certaines [des hypothèses (i) à (vi)] [...] et tente de les discréditer au motif qu’elles sont tardives ou non étayées [...] les résultats non fiables de l’ÉPAU, l’étape tardive à laquelle Raytheon a su [que] les résultats n’étaient pas fiables ainsi que les conséquences de ces résultats non fiables sur l’équité et l’intégrité globale du processus d’ÉPAU répondent entièrement aux arguments techniques de TPSGC. »[10] [traduction]
  4. Le Tribunal n’est pas d’accord avec Raytheon. Il estime plutôt que TPSGC a fourni des réponses convaincantes et complètes à tous les arguments de Raytheon[11]. Plus fondamentalement, le Tribunal estime que Raytheon a confondu des allégations non fondées avec une preuve d’irrégularité et que, dans tous les cas, toutes ses allégations à l’égard de ce motif de plainte sont inopportunes.
  5. Comme TPSGC l’a souligné à juste titre, toutes les allégations de Raytheon à l’égard de ce motif de plainte renvoient à des aspects de l’évaluation qui étaient énoncés dans les documents relatifs à l’invitation et qui faisaient dans tous les cas l’objet d’une discussion approfondie ou de renseignements supplémentaires à différentes étapes menant à l’ÉPAU[12]. Ces renseignements étaient notamment les suivants[13] : la manière dont les soldats seraient choisis pour évaluer le PEIS dans le cadre de l’ÉPAU[14] et formés (y compris pour contrôler les sources d’influence par TPSGC[15] ou formés par les soumissionnaires eux-mêmes pour d’autres sujets)[16]; la façon dont les équipes seraient assignées[17]; le fait qu’ils utiliseraient des équipements de remplacement comme le Garmin Rino[18]; la manière dont les « observateurs de facteurs humains » seraient utilisés[19]; la pondération des critères cotés obligatoires de l’ÉPAU[20] et les exigences obligatoires à satisfaire pour avoir une note à l’ÉPAU qui n’est pas plus de 20 pour cent inférieure à la note la plus élevée[21].
  6. Il s’ensuit que Raytheon connaissait, ou aurait raisonnablement dû connaître, l’un ou l’autre des motifs de plainte concernant ces questions à un certain moment durant la soumission ou, au plus tard, dix jours ouvrables suivant la fin des activités d’ÉPAU en 2013. Par conséquent, toutes les oppositions de Raytheon concernant ce motif de plainte n’ont pas été déposées dans le délai prescrit à l’article 6 du Règlement.
  7. De plus, le Tribunal est satisfait de la réponse de TPSGC à la suggestion de Raytheon selon laquelle les questionnaires thématiques ont eu une incidence inadéquate sur l’ÉPAU et estime par conséquent que ce n’est pas le cas[22].
  8. De même, le Tribunal n’accorde pas foi à l’allégation de Raytheon selon laquelle un avantage indu aurait été accordé à Rheinmetall parce qu’elle avait conclu un contrat pour la fourniture d’un logiciel sans lien avec le PEIS[23]. Il n’y a simplement aucun lien démontré entre les deux.

Requête de communication de Raytheon

  1. Le Tribunal rejette l’allégation de Raytheon selon laquelle elle a découvert des vices cachés, selon ses propres mots, qui ne peuvent être entièrement révélés qu’au moyen d’une analyse ex post facto par un expert des résultats de l’ÉPAU. Pour cette raison, le Tribunal a rejeté la demande de Raytheon pour que M. Jackson ait accès au dossier confidentiel. Le recours aux services de M. Jackson, proposé par Raytheon, n’était pas nécessaire pour trois raisons.
  2. Premièrement, il est bien établi que le Tribunal examine la procédure de passation du marché public selon la norme de la décision raisonnable et fait généralement preuve de déférence à l’égard des évaluateurs[24]. La proposition de recourir aux services de M. Jackson équivalait à demander que le Tribunal substitue son propre jugement aux extrapolations de M. Jackson, ou engage un « combat d’experts » entre Raytheon et TPSGC, où le Tribunal aurait été prié de choisir entre des extrapolations concurrentes. En règle générale, le Tribunal ne voit aucun avantage à ce que des experts l’aident lorsqu’il examine le caractère raisonnable d’une évaluation, particulièrement dans des circonstances, comme en l’espèce, où les connaissances visent exclusivement à examiner l’évaluation elle-même.
  3. Deuxièmement, Raytheon cherchait essentiellement à ce que M. Jackson étaye les six hypothèses, ou du moins quelques-unes, qu’elle a formulées pour expliquer pourquoi elle a obtenu une telle note à l’ÉPAU. Puisqu’elle n’en a pas démontré la pertinence, la requête de Raytheon, telle qu’elle est formulée, n’a pas convaincu le Tribunal que Raytheon pouvait raisonnablement établir une cause proche ou un lien entre les conclusions découlant de toute analyse par M. Jackson et ces hypothèses. En bref, la proposition de recourir aux services de M. Jackson n’équivalait à rien de plus qu’une recherche à l’aveuglette d’éléments de preuve à peine voilée.
  4. Troisièmement, et plus important encore, le Tribunal estime que la proposition par Raytheon de recourir aux services de M. Jackson constituait une tentative inappropriée de justifier une attitude attentiste[25]. Toutes les allégations formulées par Raytheon à l’égard de ce motif de plainte, ainsi que sa proposition de recourir aux services de M. Jackson, reviennent à une tentative de discréditer les résultats de l’utilisation de la méthode de l’ÉPAU et, surtout, de l’utilisation des questionnaires utilisant une échelle de Likert.
  5. M. Jackson affirme que « la note obtenue aux questionnaires [Likert] [est intrinsèquement subjective et] doit être évaluée pour vérifier si les résultats sont statistiquement fiables et produisent ainsi une évaluation équitable et objective sans vices cachés »[26] [traduction]. Toutefois, M. Jackson affirme également que « la conception et la planification de l’ÉPAU de TPSGC, y compris le recours à un questionnaire subjectif utilisant une échelle de Likert, n’ont rien d’inacceptable. Lorsque l’évaluation subjective utilisant une échelle de Likert est adéquatement exécutée, les résultats globaux peuvent être objectifs. »[27] [traduction]
  6. En l’espèce, le recours aux questionnaires utilisant une échelle de Likert était annoncé dans les documents relatifs à l’invitation. Ces documents ne prévoyaient pas une évaluation du recours aux résultats des questionnaires utilisant une échelle de Likert (essentiellement, une évaluation de l’évaluation). Il incombait à Raytheon d’examiner la méthode d’évaluation publiée lorsqu’elle a été publiée, peut-être en demandant l’avis de M. Jackson à ce moment-là concernant sa « bonne exécution » [traduction].
  7. Si Raytheon voulait s’opposer à l’utilisation de la méthode d’évaluation publiée et demander que la méthode d’évaluation comprenne une analyse statistique des résultats du pointage sur l’échelle de Likert, elle aurait dû le faire il y a longtemps[28]. En bref, l’avis de M. Jackson aurait pu être pertinent à ce moment-là, mais il ne l’est plus. Raytheon n’a pas présenté son opposition à la méthode d’évaluation dans le délai prescrit par l’article 6 du Règlement.
  8. Pour les motifs qui précèdent, la requête est rejetée.

Les accusations de partialité non fondées n’auraient pas dû être formulées

  1. Le Tribunal est très préoccupé par les accusations de partialité formulées sans preuve par Raytheon.
  2. Le Tribunal ne peut conclure à l’existence d’une partialité réelle ni d’aucun signe de partialité raisonnable dans la façon dont l’ÉPAU a été menée. Des accusations de cette nature ne devraient pas être formulées à la légère. Comme l’a affirmé la Cour d’appel de la Colombie-Britannique (le juge Gibbs) dans l’arrêt Adams c. British Columbia (Workers’ Compensation Board)[29] :

13 L’espèce illustre bien la pratique qui semble être devenue générale et commune, qui consiste à accuser des personnes ayant le pouvoir de définir les droits des parties de partialité ou de signes raisonnables de partialité sans preuve extrinsèque pour étayer l’allégation. À mon sens, cette pratique doit être découragée. Une accusation de cette nature est une attaque à l’intégrité de la personne contre qui elle est formulée. La mise à mal et la remise en question de l’intégrité demeurent même lorsque l’allégation est rejetée. Il s’agit du genre d’allégation qui est facilement formulée, mais impossible à réfuter sauf par dénégation générale. Elle ne doit pas être formulée à moins d’être étayée par une preuve suffisante démontrant qu’une personne raisonnable aurait des raisons valables de craindre que la personne contre qui elle est formulée n’examine pas la cause d’une manière impartiale. Comme je l’ai déjà dit, ainsi qu’à d’autres occasions, le soupçon ne suffit pas.

[Traduction]

  1. De la même manière que le juge Gibbs l’a fait remarquer de manière explicite, même si les accusations de partialité formulées par Raytheon contre environ 39 soldats et divers autres membres du personnel visés par l’ÉPAU étaient entièrement non fondées, elles dénigrent très certainement leur travail et leur intégrité personnelle. Nous ne savons pas comment ces accusations les ont affectées personnellement, mais il est honteux qu’ils aient été visés ainsi.
  2. Raytheon est représenté en l’espèce par un groupe d’avocats mené par une avocate chevronnée dans le domaine des marchés publics. Le Tribunal estime regrettable qu’elle n’ait pu persuader son client de formuler cet aspect de sa preuve différemment, ou de ne pas le formuler du tout, compte tenu de l’absence de preuve extrinsèque à l’appui de l’allégation.
  3. La bonne foi doit être présumée et les accusations non fondées découragées. En raison de la nature du travail des fonctionnaires et des membres des Forces canadiennes, et de leur engagement envers le Canada, tant qu’il n’y a pas de motifs sérieux et réels de croire le contraire, le Tribunal espère qu’ils soient tous traités avec respect.

Motif 2 : Évaluation de la « disponibilité » et non du « rendement » du système—Le motif n’est pas fondé

  1. La clause 3.4.3 de l’appendice 2 de l’annexe CB du volume 1 dans la DP prévoit ce qui suit :

3.4.3 Phase 3 – ÉPAU

[...] 

3.4.3.5 L’ÉPAU vise à ce que les utilisateurs évaluent le rendement de chaque système et non la disponibilité des systèmes de la soumission. Ainsi, les protocoles indiqués ci-après serviront à compenser en cas de panne des systèmes de la soumission.

3.4.3.6 Les soumissionnaires devront disposer d’un technicien sur place pour réparer leur [équipement du PEIS], pendant les essais ÉPAU prévus. L’État n’est nullement tenu de téléphoner à des techniciens ou d’en rechercher.

[Nos italiques]

  1. La phase 3 de l’ÉPAU comprend les trois étapes suivantes : étape 1—Banc de formation dirigé par les soumissionnaires; étape 2—Bancs d’essai supportés par les soumissionnaires; étape 3—Banc d’essai dynamique. L’étape 1 ne comporte aucune évaluation ni aucun test, seulement de la formation.
  2. À l’étape 3, les soldats évaluateurs ont rempli le questionnaire de notation finale. Certains soldats évaluateurs ont rempli les feuilles de commentaires supplémentaires qui comportaient des évaluations de la soi‑disant « disponibilité » de l’équipement du PEIS de Raytheon : ███████████████████████████████████████
    ██████████████████████████████████████████████████████████████████████████████████████
    ████████████████████████[30].
  3. Raytheon affirme que la clause 3.4.3.5 exigeait l’évaluation du rendement de son équipement du PEIS uniquement lorsqu’il était disponible. Raytheon assimile donc « disponible » à « opérationnel » (c’est-à-dire lorsqu’il n’est pas en panne). Le Tribunal n’est pas d’accord.
  4. La thèse de Raytheon à l’égard de ce motif de plainte ne tient pas compte des modalités de la DP dans leur ensemble. D’emblée, elle ne tient pas compte de la deuxième phrase de la clause 3.4.3.5, qui renvoie les lecteurs aux « protocoles indiqués ci-après » qui « serviront à compenser en cas de panne des systèmes de la soumission ». Les « protocoles indiqués ci-après » se trouvent à la clause 3.4.3.6, qui oblige les soumissionnaires à « disposer d’un technicien sur place pour réparer leur [équipement du PEIS], pendant les essais ÉPAU prévus »[31]. Seules les étapes 1 et 2 de l’ÉPAU ont des « essais ÉPAU prévus » qui exigent que les techniciens des soumissionnaires soient sur place pour réparer les équipements du PEIS qui peuvent être en panne.
  5. L’étape 3 ne requiert pas la présence des techniciens des soumissionnaires. En fait, la totalité des tests effectués à l’étape 3 se fait « sans aucun soutien de la part des soumissionnaires (incluant logistique, mentorat et formation) »[32] [souligné dans l’original] et dans un contexte où les soldats évaluateurs « devront se dépanner et s’adapter aux problèmes auxquels ils devront faire face avec les [équipements du PEIS] »[33].
  6. Ainsi, les clauses 3.4.3.5 et 3.4.3.6, interprétées ensemble, prévoient des protocoles visant à pallier les pannes durant les évaluations effectuées à l’étape 2, mais pas durant l’étape 3.
  7. Fondamentalement, Raytheon affirme que son équipement du PEIS ne pouvait être évalué tant que tous les défauts portant sur la « disponibilité » n’avaient pas été éliminés. La thèse de Raytheon à l’égard de ce motif doit être rejetée, puisqu’il ne s’agit pas d’une évaluation, mais d’essais et de développement en vue de la commercialisation.
  8. La DP indiquait en effet que les évaluations effectuées dans le cadre des bancs d’essai « supportés par les soumissionnaires » de l’étape 2 permettraient au technicien d’un soumissionnaire d’intervenir pour tenter de remédier à tout problème de disponibilité. Cependant, l’étape 2 devait également avoir lieu pendant une période précise. Adopter la thèse de Raytheon reviendrait à accepter que, malgré les contraintes de temps sur la durée de l’ÉPAU[34], TPSGC ne pouvait évaluer (ou éliminer) un équipement du PEIS précis tant que cet équipement n’était pas en mesure de passer l’évaluation de l’étape 2 sans connaître de « problèmes de disponibilité ». Cela signifierait qu’un problème ne devrait « jamais » s’avérer irréparable—une interprétation absurde de la DP que le Tribunal ne saurait adopter.
  9. De plus, comme nous l’avons déjà indiqué, la DP ne prévoit aucune intervention quelconque du soumissionnaire à l’étape 3. À cette étape, l’évaluation constitue une mission de combat simulée de 24 heures visant à vérifier si les équipements du PEIS fonctionneraient dans un « scénario opérationnel intégrant des normes d’aptitude au combat durant une période de 24 heures dans le but d’aider le soldat à faire une évaluation sur le niveau d’acceptabilité [des équipements du PEIS] pour [leur] utilisation éventuelle en opérations »[35]. L’étape 3 ne prévoit aucun protocole pour remédier aux pannes de l’équipement du PEIS.
  10. Les délais sont de rigueur dans un combat—simulé ou réel. Durant un combat, le seul protocole à suivre ou la seule mesure à prendre par les soldats en cas de panne liée à la disponibilité du système serait de jeter l’équipement du PEIS non opérationnel et de faire tout ce qu’ils sont formés pour faire lorsque l’équipement ne fonctionne pas comme prévu sur le champ de bataille.
  11. La DP prévoit une évaluation professionnelle des équipements du PEIS des soumissionnaires par des soldats évaluateurs de première ligne[36]. Les soldats évaluateurs savaient qu’ils choisissaient de nouveaux équipements pour les futures missions, où des vies seraient inévitablement en jeu – peut-être même la leur. Le Tribunal croit qu’ils se sont acquittés de leurs fonctions avec la plus grande attention et qu’ils ont effectué une évaluation honnête, franche et professionnelle. Le Tribunal ne dispose d’aucun élément de preuve indiquant le contraire et, par conséquent, estime que les soldats évaluateurs n’ont commis aucune erreur susceptible de révision.
  12. Ce motif de plainte n’est pas fondé.

Motif 3 : Le fait d’avoir tardé à annoncer les résultats n’est pas un motif de révision

  1. Raytheon fait valoir que l’invitation s’est déroulée d’une manière inéquitable sur le plan de la procédure parce que les résultats de la procédure de passation du marché public n’ont été annoncés qu’environ 18 mois après l’évaluation de la soumission et que ce délai lui a causé un préjudice financier.
  2. Le Tribunal estime que le temps que TPSGC a pris pour annoncer les résultats de l’invitation n’avait rien d’inéquitable sur le plan de la procédure au point d’être sanctionné par les accords commerciaux. Aucun délai pour adjuger le contrat n’était précisé dans la DP, laquelle prévoyait également que TPSGC pouvait annuler l’invitation complètement[37].
  3. Ce motif de plainte n’est pas fondé. Si Raytheon a la possibilité d’utiliser ce motif à des fins de recours, ce n’est pas devant le Tribunal.

Motif 4 : Les dispositions relatives à l’intégrité soulevées par Raytheon ne s’appliquent pas

  1. Raytheon soutient que TPSGC n’a pas appliqué certaines dispositions relatives à l’intégrité[38].
  2. Le Tribunal souligne que les dispositions relatives à l’intégrité du gouvernement fédéral ont changé plusieurs fois dans les dernières années en raison de l’évolution des politiques publiques[39], mais qu’elles demeurent à l’extérieur de tout cadre législatif ou réglementaire. Par conséquent, le Tribunal est restreint à examiner uniquement les règles de droit applicables du contrat A[40] conclu entre les parties.
  3. Dans une modification datée du 16 juillet 2013, TPSGC a énoncé les dispositions applicables relatives à l’intégrité énoncées dans l’invitation[41]. Ces dispositions ne sont pas celles auxquelles renvoie Raytheon dans sa plainte[42]. Ces dernières ne constituent donc pas les règles de droit applicables du contrat A en l’espèce.
  4. Les dispositions relatives à l’intégrité énoncées dans la modification du 16 juillet 2013, qui sont les règles de droit applicables en matière de contrat entre les soumissionnaires et TPSGC relativement à l’invitation, ne contiennent pas les sanctions que Raytheon cherche à faire infliger à Rheinmettal. En particulier, la portée des dispositions applicables relatives à l’intégrité est limitée à diverses situations où seules les lois canadiennes prévoient des sanctions[43].
  5. Ce motif de plainte n’est pas fondé.

FRAIS

  1. Le Tribunal accorde à TPSGC le remboursement des frais raisonnables qu’il a engagés pour répondre à la plainte.
  2. Pour décider du montant de l’indemnité en l’espèce, le Tribunal a tenu compte de sa Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure portant sur un marché public (la Ligne directrice), qui fonde l’évaluation du degré de complexité d’une plainte selon trois critères : la complexité du marché public, la complexité de la plainte et la complexité de la procédure.
  3. L’indication provisoire du degré de complexité de la présente plainte donnée par le Tribunal est le degré le plus élevé mentionné à l’annexe A de la Ligne directrice (degré 3). La complexité du marché public était élevée, puisqu’il visait la fourniture d’une pièce d’équipement très technique. Le Tribunal conclut que la complexité de la plainte était élevée, puisque les questions n’étaient pas directes et portaient sur la question de savoir si TPSGC a dûment évalué le système proposé par Raytheon selon un processus d’ÉPAU sophistiqué. Enfin, la complexité de la procédure était élevée, malgré que les questions en litige aient été réglées par les parties au moyen d’une preuve documentaire et d’observations écrites et qu’une audience n’ait pas été nécessaire, puisque bon nombre de questions procédurales se sont posées avant que le Tribunal ne rende sa décision.
  4. Par conséquent, conformément à la Ligne directrice, l’indication provisoire du montant de l’indemnisation donnée par le Tribunal est de 4 700 $.

DÉCISION DU TRIBUNAL

  1. Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal détermine que la plainte n’est pas fondée.
  2. Aux termes de l’article 30.16 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal accorde à TPSGC le remboursement des frais raisonnables qu’il a engagés pour répondre à la plainte, ces frais devant être payés par Raytheon. Conformément à la Ligne directrice, l’indication provisoire du degré de complexité de la présente plainte donnée par le Tribunal se situe au degré 3, et l’indication provisoire du montant de l’indemnisation se chiffre à 4 700 $. Si l’une ou l’autre des parties n’est pas d’accord en ce qui a trait à l’indication provisoire du degré de complexité ou à l’indication provisoire du montant de l’indemnisation, elle peut déposer des observations auprès du Tribunal, en conformité avec l’article 4.2 de la Ligne directrice. Le Tribunal se réserve la compétence de fixer le montant définitif de l’indemnisation.
 

[1].      L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.) [Loi sur le TCCE].

[2].      Pièce PR-2015-026-24, pièce 1 à la p. 1, vol. 1P. Comme le démontre cet extrait, le « PEIS » renvoie au projet dans son ensemble (y compris les biens et services) et à l’ensemble d’équipement porté par les soldats (équipement du PEIS). L’équipement du PEIS d’un soumissionnaire est appelé « système P (soumission) » dans les documents relatifs à l’invitation; le terme « équipement du PEIS » est utilisé dans le présent exposé des motifs, au lieu de « système P (soumission) ».

[3].      D.O.R.S./93-602 [Règlement].

[4].      D.O.R.S./91-499.

[5].      18 juillet 1994, Gaz. C. 1995.I.1323, en ligne : Secrétariat du commerce intérieur <http://www.ait-aci.ca/‌agreement-on-internal-trade/?lang=fr>.

[6].      Pièce PR-2015-026-25A au par. 21, vol. 1R.

[7].      Pièce PR-2015-026-27A au par. 33, vol. 1R.

[8].      Ibid. au par. 34.

[9].      Pièce PR-2015-026-24 au par. 8, vol. 1P. Le Tribunal qualifie d’hypothèses les six arguments de Raytheon (et emploie le mot « sûrement » dans l’énumération ci-dessus) parce que, au final, ces arguments ne sont pas étayés. Ils constituent des « intuitions » hypothétiques qui ne sont pas étayées par la moindre preuve tangible.

[10].    Pièce PR-2015-026-27A au par. 35, vol. 1R.

[11].    Pièce PR-2015-026-24 aux par. 9-14, vol. 1P. TPSGC a subdivisé les six arguments de Raytheon (qui contenaient en fait d’autres sous-arguments) en une liste plus complète de 14 arguments qui sont examinés aux paragraphes 13(a) à (k), 11 et 12, 16(l) 27 du RIF.

[12].    Tout au long de la procédure de passation du marché public, Raytheon a eu de nombreuses occasions de s’opposer, que ce soit dans le cadre de la publication du projet de DP à l’industrie, de la journée de l’industrie, de la publication de la DP, de la période de questions et réponses relatives à la DP durant la période de soumission, de la conférence des soumissionnaires ainsi que de la réunion de coordination et d’orientation des soumissionnaires relativement à l’ÉPAU. À cela vient s’ajouter les rencontres quotidiennes tenues par les représentants de TPSGC et du MDN tout au long du processus d’ÉPAU ainsi que les nombreuses interactions que les représentants de Raytheon avaient avec les soldats évaluateurs. Cette multitude d’occasions offerte aux soumissionnaires tout au long de la procédure de passation du marché public ne fait aucun doute que Raytheon a eu toutes les chances de s’opposer à l’un ou l’autre des aspects du processus d’ÉPAU ou de son application lorsque les faits à l’origine de sa plainte ont été soulevés.

[13].    L’énumération de ce paragraphe ne comprend pas les allégations formulées par Raytheon et résumées par TPSGC aux paragraphes 11 et 12 et 16(l) du RIF (respectivement, qu’un avantage indu aurait été accordé à Rheinmettal parce que le MDN utilise son logiciel SC2PS et que les questionnaires thématiques seraient utilisés dans l’évaluation finale de l’ÉPAU); le Tribunal se penche sur ces allégations plus loin. Quant à l’allégation d’irrégularité relativement au fait que la soumission de Raytheon a été évaluée par 39 soldats au lieu de 40 (un soldat est tombé malade et n’a pu poursuivre ses fonctions durant l’évaluation), le Tribunal n’a reçu aucun élément de preuve convaincant démontrant que cette situation a eu une quelconque incidence sur l’issue de l’évaluation de Raytheon. Pièce PR-2015-026-01 au par. 70, vol. 1; pièce PR-2015-026-24 aux par. 26-28, vol. 1P.

[14].    Pièce PR-2015-026-24 au par. 13(a), vol. 1P.

[15].    Ibid. au par. 13(e).

[16].    Ibid. au par. 13(b).

[17].    Ibid. au par. 13(c).

[18].    Ibid. au par. 13(d).

[19].    Ibid. aux par. 13(h), 13(i).

[20].    Ibid. au par. 13(j).

[21].    Ibid. au par. 13(k).

[22].    Ibid. au par. 16(l).

[23].    Ibid. aux par. 11-12.

[24].    Samson & Associates c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (19 octobre 2012), PR-2012-012 (TCCE) aux par. 26-27.

[25].    Le Tribunal s’est souvent fondé sur les paragraphes 20 et 28 de l’arrêt IBM Canada c. Hewlett Packard (Canada) Ltd., 2002 CAF 284 (CanLII), de la Cour d’appel fédérale, pour affirmer que le Règlement impose une obligation positive au fournisseur de faire preuve de prudence, de rester vigilant tout au long de la procédure de passation du marché public et de réagir dès qu’il découvre ou aurait vraisemblablement dû découvrir qu’un aspect de la procédure de passation du marché public est vicié (voir par exemple Primex Project Management Ltd. (22 août 2002), PR-2002-001 (TCCE) à la p. 10. Il en est ainsi parce que le Règlement reconnaît que, en matière de marchés publics, les délais sont de rigueur pour assurer le caractère définitif des contrats dans les meilleurs délais possible. Par conséquent, le fournisseur ne peut adopter une attitude attentiste et contester les exigences du marché public seulement lorsque la procédure de passation est terminée et qu’il se retrouve insatisfait des résultats. Cela est important pour que les préoccupations légitimes puissent être abordées ou pour que les vices puissent être réglés en temps réel durant la procédure de passation du marché public, au lieu que le soumissionnaire non choisi formule des allégations après le fait pour tenter d’annuler les résultats.

[26].    Pièce PR-2015-026-25A au par. 9, vol. 1R.

[27].    Ibid. au par. 37.

[28].    Le Tribunal fait l’observation suivante. Il n’est pas convaincu que les évaluations d’évaluations, bien que fondées scientifiquement, seraient un ajout valable aux méthodes de passation des marchés publics ni d’une quelconque aide pour vérifier le caractère raisonnable d’une première évaluation. L’idée de créer des évaluations d’évaluations devient rapidement absurde : pourquoi ne pas s’arrêter à une plutôt que d’effectuer une évaluation d’une évaluation d’une évaluation, ainsi de suite jusqu’à l’infini. Il revient au Tribunal et aux cours de justice d’examiner le caractère raisonnable des décisions en matière de marchés publics prises par le gouvernement fédéral. Le Tribunal est loin d’être convaincu que l’absence d’une méthode pour évaluer une méthode d’évaluation (comme l’utilisation précise d’une échelle de Likert) dans une invitation serait sanctionnée dans les accords commerciaux, mais il n’est pas nécessaire de trancher définitivement cette question en l’espèce.

[29].    42 B.C.L.R. (2d) 228 (C.A.).

[30].    Le texte ombragé contient des renseignements qui seraient CONFIDENTIELS selon Raytheon. Pièce PR-2015-026-24A (protégée) au par. 20, vol. 2GG. Le Tribunal n’était pas vraiment convaincu que la demande de confidentialité de Raytheon à l’égard de ces renseignements était justifiée suivant les Lignes directrices sur la confidentialité à l’adresse http://www.citt-tcce.gc.ca/fr/Confidentiality_guidelines_f. Le Tribunal avait également des raisons de mettre en doute cette demande de confidentialité parce qu’elle est survenue dans un contexte où Raytheon a formulé des allégations de partialité non fondées. Toutefois, le Tribunal n’a pas contesté cette désignation pour ne pas compliquer davantage les procédures déjà interminables en l’espèce.

[31].    Il existe quatre autres « protocoles » dans la DP, mais ils se rapportent à l’étape 2, où les techniciens des soumissionnaires peuvent déjà compenser en cas de panne en faisant des réparations suivant la clause 3.4.3.6; dans la mesure où ces protocoles supplémentaires de l’étape 2 concernent la disponibilité (par exemple, en exigeant que les soldats évaluateurs se dépannent dans la mesure du possible), ils prévoient simplement des garanties supplémentaires pour remédier à toute panne, en plus de ce qui est déjà prévu à la clause 3.4.3.6. Pièce jointe 2 de l’attachement 1 de l’appendice 2 de l’annexe CB du volume 1 dans la DP, aux pages 14, 26, 35, 37, pièce PR-2015-026-24, vol. 1P.

[32].    Pièce jointe 3 de l’attachement 2 de l’appendice 2 de l’annexe CB du volume 1 dans la DP, pièce PR-2015-026-24, vol. 1P.

[33].    Ibid.

[34].    L’ÉPAU devait avoir lieu sur une période d’au plus cinq jours.

[35].    Pièce jointe 3 de l’attachement 2 de l’appendice 2 de l’annexe CB du volume 1 dans la DP, pièce PR-2015-026-24, vol. 1P.

[36].    Ibid. : « Le but de cet exercice est de permettre aux soldats évaluateurs d’opérer l’[équipement du PEIS] soumissionné lors d’un scénario opérationnel intégrant des normes d’aptitude au combat durant une période de 24 heures dans le but d’aider le soldat à faire une évaluation sur le niveau d’acceptabilité de l’[équipement du PEIS] pour son évaluation éventuelle en opérations. »

[37].    Pièce PR-2015-026-24, pièce 47, clause 11, vol. 1P.

[38].    Pièce PR-2015-026-01 aux par. 79-80, vol. 1; pièce PR-2015-026-27A au par. 54, vol. 1R.

[39].    En ordre chronologique, de 2012 à 2015, voir les pages Web suivantes relatives aux instructions uniformisées – biens ou services – besoins concurrentiels :

[40].    La Reine (Ont.) c. Ron Engineering, [1981] 1 R.C.S. 111, 1981 CanLII 17 (CSC).

[41].    Pièce PR-2015-026-24, pièce 1, DP, modification no 24, vol. 1P.

[42].    Pièce PR-2015-026-01 aux par. 79-80, vol. 1.

[43].    Il faut comparer le document 2003, (2013-06-01) Instructions uniformisées (applicables par suite de la modification no 024 de la DP) avec le document 2003, (2014-09-25) Instructions uniformisées, et le document 2003, (2015-07-03) Instructions uniformisées (deux documents que Raytheon considère à tort comme applicables).