DOMINION DIVING LTD.

DOMINION DIVING LTD.
c.
MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX
Dossier no PR-2015-048

Décision rendue
le mardi 29 mars 2016

Motifs rendus
le lundi 2 mai 2016

TABLE DES MATIÈRES

 

EU ÉGARD À une plainte déposée par Dominion Diving Ltd. aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.);

ET À LA SUITE D’une décision d’enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

ENTRE

DOMINION DIVING LTD. Partie plaignante

ET

LE MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX Institution fédérale

DÉCISION

Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte n’est pas fondée.

Serge Fréchette
Serge Fréchette
Membre présidant

L’exposé des motifs suivra à une date ultérieure.

Membre du Tribunal : Serge Fréchette, membre présidant

Conseiller juridique pour le Tribunal : Jidé Afolabi

Partie plaignante : Dominion Diving Ltd.

Institution fédérale : ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux

Veuillez adresser toutes les communications au :

Greffier
Secrétariat du Tribunal canadien du commerce extérieur
15e étage
333, avenue Laurier Ouest
Ottawa (Ontario)  K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel : tcce-citt@tribunal.gc.ca

EXPOSÉ DES MOTIFS

  1. Le 21 décembre 2015, Dominion Diving Ltd. (Dominion) a déposé une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur[1]. La plainte porte sur une demande de propositions (DP) (invitation no W3554-166143/A) émise par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (TPSGC), au nom du ministère de la Défense nationale (MDN), pour la main-d’œuvre, le matériel, les outils et l’équipement nécessaires en vue d’effectuer des plongées pour « installer, mettre de niveau et aligner les socles de la station de démagnétisation [...] à l’arsenal CSM, Halifax (Nouvelle-Écosse) »[2] [traduction].
  2. Dominion soutient que TPSGC a mal interprété une des exigences obligatoires, n’a pas procédé à l’évaluation des soumissions de manière équitable et a adjugé le contrat à un soumissionnaire dont la soumission ne satisfaisait pas à une des exigences obligatoires. À titre de mesure corrective, Dominion demande à ce que la soumission retenue soit rejetée et que le contrat lui soit adjugé.

PORTIONS PERTINENTES DE LA DP

  1. La DP a été émise par TPSGC le 3 novembre 2015. La date de clôture de l’appel d’offres était le 19 novembre 2015.
  2. Un certain nombre d’articles de la DP ont trait à la plainte. De première importance est l’article 4.2, qui stipule ce qui suit :

4.2 Méthode de sélection

Une soumission doit respecter toutes les exigences de la demande de propositions pour être recevable. La soumission recevable la moins-disante sera recommandée pour l’adjudication d’un contrat[3].

[Traduction]

  1. La section II de l’article 3.1 a trait directement aux allégations de Dominion et stipule ce qui suit :

3.1 Instructions pour la préparation des soumissions

[...]

Section II : Attestations

Les soumissionnaires doivent fournir les attestations requises en conformité avec la partie 5. Si ces documents ne sont pas fournis en même temps que la soumission, ils seront demandés par l’autorité contractante tel que spécifié dans la partie 6[4].

[Traduction]

  1. Par conséquent, les articles des parties 5 et 6 sont appliqués en vertu de la section II de l’article 3.1. Les articles pertinents de la partie 5 sont les articles 5.1 et 5.2, qui stipulent ce qui suit :

5.1 Général

Pour qu’un contrat leur soit adjugé, les soumissionnaires doivent fournir les attestations requises et la documentation connexe. Une soumission sera jugée non recevable si les attestations requises et la documentation connexe ne sont pas complètes et fournies tel que demandé.

L’authenticité des attestations fournies par les soumissionnaires pourra être vérifiée durant la période d’évaluation des soumissions (avant l’adjudication d’un contrat) ainsi qu’après l’adjudication d’un contrat. L’autorité contractante aura le droit de demander des renseignements supplémentaires pour s’assurer de l’authenticité des attestations avant l’adjudication d’un contrat. La soumission ne sera pas recevable s’il est constaté que le soumissionnaire a fait de fausses déclarations, sciemment ou non. Le défaut de fournir les attestations et la documentation connexe ou de donner suite à la demande de renseignements supplémentaires de l’autorité contractante rendra la soumission non recevable.

5.2 Attestations préalables à l’adjudication d’un contrat

Les attestations énumérées ci-dessous devraient être fournies en même temps que la soumission mais peuvent aussi l’être après. Si l’une de ces attestations n’est pas fournie comme demandé, l’autorité contractante en informera le soumissionnaire et lui donnera un délai afin qu’il se conforme aux exigences. Le défaut de répondre à la demande de l’autorité contractante et de se conformer aux exigences dans les délais prévus rendra la soumission non recevable.

[...]

6. ISO 9001, certification selon l’article 6.7[5]

[Traduction]

  1. L’article pertinent de la partie 6 est l’article 6.7, qui stipule ce qui suit :

6.7 ISO 9001 : 2000 Systèmes de management de la qualité

Avant l’adjudication d’un contrat et dans les 24 heures après réception d’un avis écrit de l’autorité contractante, le soumissionnaire retenu doit fournir sa certification ISO 9001 : 2000.

La documentation et les procédés des soumissionnaires qui ne sont pas certifiés ISO pourront faire l’objet d’une évaluation en ce qui concerne la gestion de la qualité par le responsable de l’assurance de la qualité avant l’adjudication d’un contrat[6].

[Traduction]

  1. De plus, l’annexe F, intitulée « ÉNONCÉ DES OBLIGATIONS DE L’ENTREPRENEUR », donne des renseignements supplémentaires en ce qui concerne les articles mentionnés ci-dessus. Les articles 1.4 et 1.5 de l’annexe F stipulent ce qui suit :

1.4 L’entrepreneur doit mettre en œuvre un système de gestion de la qualité adapté aux travaux à exécuter. Il est recommandé que ce système soit fondé sur la norme ISO 9001 : 2008 – Systèmes de management de la qualité – Exigences. L’entrepreneur n’est pas tenu de détenir une certification correspondant à cette norme; toutefois, le système de gestion de la qualité de l’entrepreneur doit satisfaire à chacune des exigences de la norme.

1.5 Le système de gestion de la qualité de l’entrepreneur doit comprendre, au minimum, les procédés suivants :

  • détecter la non-conformité des travaux accomplis ou du matériel produit par rapport à ses normes ou aux nôtres;
  • enregistrer tous écarts à l’égard des normes et les corriger;
  • détenir une méthode pour analyser les données de non-conformité aux normes et prendre des mesures correctives et préventives;
  • enregistrer toutes les mesures correctives et les appliquer afin d’améliorer ses pratiques;
  • mettre à jour toute la documentation liée à ses pratiques;
  • continuellement réviser et évaluer ses pratiques pour s’assurer qu’elles correspondent aux normes en vigueur;
  • gérer et contrôler les travaux exécutés par ses sous-traitants;
  • s’assurer que l’équipe de gestion examine les résultats de toute évaluation en vue d’une amélioration constante, y compris les résultats des évaluations effectuées par FMF Cape Scott;
  • gérer les connaissances et la compétence de ses employés en s’assurant qu’ils aient la qualification et la formation requises[7].

[Traduction]

  1. Enfin, la partie 7 contient des clauses et des conditions du contrat subséquent. Dominion et TPSGC font tous deux références à certains articles de la partie 7; ainsi, pour en faciliter la consultation, ces articles sont cités ci-dessous :

7.8 Attestations

L’authenticité des attestations fournies par l’entrepreneur avec sa soumission est une condition pour l’adjudication du contrat et pourra faire l’objet d’une vérification pendant la durée du contrat. Si l’entrepreneur ne respecte pas toutes les attestations ou s’il est constaté que des attestations qu’il a fournies comprennent de fausses déclarations, faites sciemment ou non, le contrat pourra être résilié pour manquements contractuels, conformément aux dispositions du contrat en la matière.

7.15 ISO 9001 : 2000 – Systèmes de management de la qualité

Pour l’exécution des travaux décrits dans le contrat, l’entrepreneur doit satisfaire aux exigences suivantes : ISO 9001 : 2000 – Systèmes de management de la qualité – Exigences, publié par l’Organisation internationale de normalisation (ISO), édition en vigueur au moment de la présentation de la soumission, à l’exception de l’exigence 7.3 Conception et développement.

L’objet de la présente clause n’est pas d’exiger que l’entrepreneur soit certifié ISO 9001 : 2000, mais bien que le système de gestion de la qualité de l’entrepreneur satisfasse à chacune des exigences de la norme[8].

[Traduction]

CONTEXTE

  1. Dominion a présenté une soumission datée du 19 novembre 2015.
  2. Le 30 novembre 2015, TPSGC a adjugé le contrat à RMI Marine Ltd. (RMI), étant donné que, selon TPSGC, RMI avait fait la soumission valable la moins-disante.
  3. Le 3 décembre 2015, Dominion a demandé la tenue d’une réunion de compte rendu.
  4. Le 4 décembre 2015, TPSGC a répondu à Dominion, indiquant que deux soumissions avaient été reçues et que RMI satisfaisait à toutes les conditions de l’appel d’offres. La réponse de TPSGC comprenait aussi l’offre de prix de RMI. Le même jour, Dominion a présenté par écrit une opposition à TPSGC affirmant que RMI n’était pas une entreprise certifiée ISO et que, par conséquent, sa soumission n’était pas conforme.
  5. Le 7 décembre 2015, TPSGC a répondu par écrit à Dominion, indiquant que la DP offrait une alternative à la certification ISO et que RMI avait fourni la preuve, à la satisfaction du MDN, qu’elle satisfaisait à cette alternative.
  6. Dominion a par la suite présenté par écrit une deuxième opposition à TPSGC le 14 décembre 2015, avant de déposer la présente plainte auprès du Tribunal le 21 décembre 2015. Puisque la plainte satisfaisait aux exigences du paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE et aux conditions énoncées au paragraphe 7(1) du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics[9], le Tribunal a accepté, le 29 décembre 2015, d’enquêter sur la plainte.
  7. Le 29 janvier 2016, TPSGC a déposé son Rapport de l’institution fédérale (RIF).
  8. Le 9 février 2016, Dominion a déposé ses commentaires sur le RIF.
  9. Étant donné que les renseignements au dossier étaient suffisants pour déterminer le bien-fondé de la plainte, le Tribunal a décidé que la tenue d’une audience n’était pas nécessaire et a statué sur la plainte sur la foi de ces renseignements.

POSITION DES PARTIES

TPSGC

  1. Dans sa réponse à la plainte, TPSGC affirme que la certification ISO n’était pas une exigence de la DP. TPSGC soutient plutôt que la DP « stipulait qu’un soumissionnaire pouvait être soit certifié ISO 9001 : 2000, soit fournir de la documentation et des procédés satisfaisant à un système de gestion de la qualité »[10] [traduction].
  2. À l’appui de sa position, TPSGC affirme que l’article 5.2(6), « ISO 9001, certification selon l’article 6.7 », doit être interprété conjointement avec l’article 6.7, qui offre aux soumissionnaires deux options pour satisfaire à l’article 5.2(6) – soit fournir sa certification ISO 9001 : 2000, soit que le système de gestion de la qualité du soumissionnaire fasse l’objet d’une évaluation par un responsable de l’assurance de la qualité. Selon TPSGC, les exigences en ce qui concerne le système de gestion de la qualité sont énoncées à l’article 1.5 de l’annexe F[11].
  3. TPSGC affirme que RMI « n’a pas dit dans sa soumission qu’elle détenait une certification ISO » [traduction], mais que RMI a plutôt affirmé « qu’elle possédait un système de gestion de la qualité »[12] [traduction]. La documentation ayant trait à ce système de gestion de la qualité a été déposée en tant que pièce confidentielle avec le RIF.
  4. TPSGC affirme de plus que, selon la deuxième option énoncée à l’article 6.7, l’évaluation du système de gestion de la qualité de RMI a été faite par « le Bureau des systèmes de gestion, Installation de maintenance de la flotte Cape Scott »[13] [traduction], du MDN, en vertu de laquelle le superviseur intérimaire des systèmes de gestion relevant de ce Bureau a conclu que, après « révision de la documentation de RMI portant sur la gestion de la qualité [...], son système de la gestion de la qualité était acceptable »[14] [traduction]. TPSGC affirme que le Bureau des systèmes de gestion du MDN constitue le responsable de l’assurance de la qualité dont il est fait référence à l’article 6.7 et que, de plus, ce responsable « a déterminé, de façon raisonnable, que le système de gestion de la qualité de RMI satisfaisait à l’exigence obligatoire »[15] [traduction].
  5. TPSGC soutient de plus que la jurisprudence appuie son interprétation des articles pertinents de la DP et son évaluation de la soumission de RMI. Plus particulièrement, en faisant référence aux dossiers nos PR-99-020[16] et PR-2013-044[17], TPSGC affirme qu’il lui incombait d’évaluer la conformité des soumissionnaires avec les exigences obligatoires de la DP de façon approfondie et rigoureuse. De plus, en faisant référence entre autres aux dossiers nos PR-2012-012[18] et PR-2011-043[19], TPSGC affirme qu’une grande crédibilité doit être accordée à son évaluation et que la règle à appliquer en matière d’évaluation est celle de son caractère « raisonnable », c’est-à-dire une évaluation dont l’explication est défendable, mais si le Tribunal ne la trouve pas nécessairement convaincante.
  6. En dernier lieu, TPSGC soutient que la soumission de Dominion n’était pas conforme à une autre exigence obligatoire concernant la détention d’une attestation de sécurité valide aux termes de l’article 6.1[20]. Par conséquent, selon TPSGC, « la partie plaignante ne satisfaisait pas aux conditions requises pour que le contrat lui soit adjugé et, pour cette raison, la mesure corrective qu’elle demande, que le contrat lui soit adjugé, ne peut lui être accordée »[21] [traduction]. TPSGC soutient que, puisque la soumission de Dominion n’était pas conforme, si le Tribunal détermine que la plainte de Dominion est fondée, le lancement d’un nouvel appel d’offres doit être la mesure corrective appropriée[22].
  7. TPSGC demande le remboursement de ses frais conformément à la Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure de plainte portant sur un marché public (la Ligne directrice).

Dominion

  1. Pour sa part, Dominion soutient que l’évaluation de la soumission de RMI par TPSGC n’est pas raisonnable, car l’évaluation est entachée de deux erreurs qui, comme l’a affirmé le Tribunal, sont des raisons suffisantes pour qu’il intervienne dans une évaluation. Premièrement, selon Dominion, les évaluateurs ont mal interprété la portée d’une exigence et, deuxièmement, ils ont fondé leur évaluation sur des critères non divulgués[23].
  2. Concernant la première erreur, Dominion affirme que « TPSGC a mal interprété les exigences de la DP en matière de gestion de la qualité en sollicitant le texte de façon à y inclure une alternative qui ne figure pas dans celle-ci »[24] [traduction]. En ce qui concerne cette affirmation, Dominion soutient que posséder de la documentation ayant trait à un système de gestion de la qualité, tel qu’énoncé dans le deuxième paragraphe de l’article 6.7, n’est « qu’un élément de la norme ISO 9001 : 2008 [...] par opposition à une conformité totale avec la norme »[25] [traduction]. De plus, Dominion soutient que, puisque le verbe « doit » (« must » dans la version anglaise) est utilisé dans le premier paragraphe de l’article 6.7 en ce qui concerne la certification ISO, l’utilisation de ce mot fait en sorte que « l’exigence est impérative et non une question de choix ou laissée à la discrétion du soumissionnaire »[26] [traduction].
  3. Concernant la deuxième erreur, Dominion affirme que la liste de vérification qui figure à l’article 1.5 de l’annexe F ne tient pas compte de chacune des exigences de la norme ISO 9001 et que cette omission constitue ou a permis l’utilisation de critères non divulgués dans l’évaluation des soumissions[27].
  4. Comme deuxième argument, Dominion fait référence à la position prise précédemment par TPSGC dans son refus de réparation. TPSGC avait invoqué l’article 7.15, contenu dans la partie de la DP dans laquelle figure des clauses du contrat subséquent, pour affirmer que RMI s’était conformée à une alternative à la norme ISO. Toutefois, dans son RIF, TPSGC n’a pas indiqué qu’il invoquait toujours l’article 7.15. En ce qui concerne cette question, Dominion affirme qu’une clause d’un contrat subséquent ne peut être invoquée pour interpréter une exigence d’un appel d’offres[28].
  5. Toutefois, en exposant son troisième argument, Dominion elle-même invoque l’article 7.15. Subsidiairement par rapport à son argument précédent, Dominion soutient que, si la norme ISO 9001 n’était pas une exigence absolue, permettant une alternative, néanmoins, aux termes de l’article 7.15, « le système de gestion de la qualité de l’entrepreneur [devait] satisfaire à chacune des exigences de la norme [ISO 9001] »[29] [traduction]. Dominion affirme que, contrairement à cette exigence, RMI n’a pas satisfait à chacune des exigences de la norme ISO 9001 et, en fait, n’a pas prétendu dans sa soumission, telle que présentée à TPSGC, que c’était le cas.
  6. De plus, Dominion affirme que, dans son évaluation de la documentation sur le système de gestion de la qualité qui figurait dans la soumission de RMI, TPSGC s’est limité à la liste de vérification qui figure à l’article 1.5 de l’annexe F[30]. Dominion soutient que cet article n’énonce que le minimum des procédés que doit comprendre le système de gestion de la qualité d’un soumissionnaire, comme, entre autres, l’analyse des données, les mesures correctives et préventives, alors que « [d]’autres points importants, comme les achats, la gestion des objectifs de la qualité, le calibrage et la maintenance, [...] ainsi que d’autres points, ne sont pas abordés [...] »[31] [traduction]. Ainsi, selon Dominion, une évaluation du système de gestion de la qualité faite uniquement en fonction de cet article est inadéquate, car elle ne prend pas en compte tous les procédés que comprend la norme ISO 9001, tel que requis par l’article 7.15.
  7. Dans son quatrième argument, Dominion soutient que le deuxième paragraphe de l’article 6.7 requiert qu’un « responsable de l’assurance de la qualité » soit nommé et que, puisque la DP ne mentionnait pas un tel responsable, le Tribunal doit supposer que TPSGC n’avait pas l’intention d’invoquer cette disposition et que, à ce titre, n’avait pas l’intention d’offrir une alternative en ce qui concerne l’article 5.2(6)[32].
  8. Dans son cinquième argument, Dominion soutient que l’évaluation du système de gestion de la qualité de RMI par le Bureau des systèmes de gestion du MDN, qui, selon Dominion, a été effectuée uniquement par le superviseur par intérim des systèmes de gestion, doit être rejetée par le Tribunal pour un certain nombre de raisons. Dominion avance, premièrement, que TPSGC n’a pas indiqué la procédure qu’il a suivie, s’il y en avait une, pour faire l’évaluation; deuxièmement, Dominion avance qu’il n’y a aucune preuve que le superviseur par intérim des systèmes de gestion possédait les connaissances techniques ou les qualifications requises pour faire une évaluation adéquate; troisièmement, Dominion avance que la séquence des événements amène à conclure que l’évaluation a été faite en une demi-journée, ce qui est insuffisant pour faire une évaluation rigoureuse et déterminer que le système de gestion de la qualité de RMI satisfaisait à chacune des exigences de la norme ISO[33].
  9. En ce qui concerne l’argument selon lequel TPSGC n’a pas indiqué la procédure qu’il a suivie pour faire l’évaluation du système de gestion de la qualité de RMI, Dominion invoque le dossier no PR-97-008[34], dans lequel le Tribunal a conclu que, bien que les experts-conseils qui évaluent des soumissions soient censés exercer leur jugement professionnel, « que cela ne soustrait pas [l’acheteur] de l’obligation [...] de fournir une base qui permette d’exercer un tel jugement professionnel »[35].
  10. En dernier lieu, en ce qui concerne l’argument de TPSGC selon lequel la soumission de Dominion était, de toute façon, non conforme à une autre exigence obligatoire, Dominion soutient que cette affirmation tardive, faite par TPSGC dans son RIF, constitue une « violation de son droit à un compte rendu complet »[36] [traduction]. De plus, Dominion soutient que, aux termes de l’article 30.14 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal doit limiter son étude à l’objet de la plainte, et que, en l’espèce, l’objet de la plainte est « le défaut de TPSGC de n’avoir pas rejeté la soumission non conforme de RMI »[37] [traduction]. De plus, Dominion fait référence à l’article 7.40a)(v)(E) du Guide des approvisionnements de TPSGC[38], qui stipule qu’un compte rendu comprendra, entre autres, « un sommaire des raisons pour lesquelles la soumission [...] faisant l’objet d’un compte rendu n’a pas été retenu[e], conformément aux critères d’évaluation et à la méthode de sélection ». Dominion demande d’être « indemnisée pour avoir été forcée de déposer une plainte pour être informée d’une présumée irrégularité qui figurerait dans sa soumission »[39] [traduction].

ANALYSE DU TRIBUNAL

Libellé des documents de l’appel d’offres

  1. Avant de commencer son analyse, il est important pour le Tribunal de souligner que la rédaction, ou le bricolage, de la DP en l’espèce peut être sans difficulté qualifiée de pesante, de gauche et, dans certains cas, d’ambiguë. Le Tribunal doit émettre l’hypothèse que cela a joué dans la décision de Dominion de déposer une plainte. Néanmoins, une lecture objective des articles pertinents de la DP révèlent que ces déficiences ne vont pas jusqu’au point d’être « trompeuses » [traduction], comme le soutient Dominion[40], de telle sorte que le Tribunal pourrait conclure qu’elles ont constituées des critères non divulgués qui ont servi à évaluer les soumissions, ou qu’elles ont permis l’utilisation de critères non divulgués.
  2. Dans les paragraphes qui suivent, le Tribunal procède à un examen, point par point, des articles pertinents de la DP. La section II, « Attestations », de l’article 3.1, « Instructions pour la préparation des soumissions », stipule ce qui suit :

Les soumissionnaires doivent fournir les attestations requises en conformité avec la partie 5. Si ces documents ne sont pas fournis en même temps que la soumission, ils seront demandés par l’autorité contractante tel que spécifié dans la partie 6.

[Nos italiques]

  1. Le terme « doivent » dans l’article ci-dessus a trait aux attestations, ce qui rendait obligatoire de les fournir. Les attestations qui étaient à fournir étaient celles « requises en conformité avec la partie 5 », ce qui rend la façon de satisfaire à l’exigence et l’exigence elle-même pertinentes. Bien que de fournir les attestations était obligatoire, il convient de noter que le moment où celles-ci étaient censées l’être est moins catégorique – TPSGC en ferait la demande, « tel que spécifié dans la partie 6 », dans les cas où les certifications n’avait pas été jointes aux soumissions. Cela rend la façon de faire la demande, spécifiée dans la partie 6, pertinente et, de plus, signifie que si les attestations ne sont pas jointes à la soumission, celle-ci ne sera jugée non recevable.
  2. L’article 5.1, « Général », stipule ce qui suit :

Pour qu’un contrat leur soit adjugé, les soumissionnaires doivent fournir les attestations requises et la documentation connexe. Une soumission sera jugée non recevable si les attestations requises et la documentation connexe ne sont pas complètes et fournies tel que demandé.

L’authenticité des attestations fournies par les soumissionnaires pourra être vérifiée durant la période d’évaluation des soumissions (avant l’adjudication d’un contrat) ainsi qu’après l’adjudication d’un contrat. L’autorité contractante aura le droit de demander des renseignements supplémentaires pour s’assurer de l’authenticité des attestations avant l’adjudication d’un contrat. La soumission ne sera pas recevable s’il est constaté que le soumissionnaire a fait de fausses déclarations, sciemment ou non. Le défaut de fournir les attestations et la documentation connexe ou de donner suite à la demande de renseignements supplémentaires de l’autorité contractante rendra la soumission non recevable.

[Nos italiques]

  1. L’article ci-dessus réitère que fournir les attestations était obligatoire. En ce qui concerne la façon de satisfaire à l’exigence, que l’article 3.1 a rendu pertinente, l’article ci-dessus fait bien comprendre que fournir les attestations était une condition à remplir pour l’adjudication du contrat. Il renseigne aussi sur le moment où les attestations étaient à fournir – bien que fournir les attestions au même moment que la soumission n’était pas nécessaire, le contrat subséquent ne pouvait être adjugé sans que les attestations n’aient été fournies. En ce qui concerne la vérification des attestations, l’article fait bien comprendre qu’elle peut être faite pendant l’évaluation des soumissions ainsi qu’après l’adjudication du contrat. Étant donné que TPSGC aura vérifié les attestations fournies avant d’adjuger le contrat, il peut être conclu de façon raisonnable que toute vérification faite après l’adjudication du contrat a trait au maintien ou à l’élargissement de ces attestations de façon à respecter les travaux spécifiés dans le contrat.
  2. De plus, l’article 5.2, « Attestations préalables à l’adjudication d’un contrat », stipule ce qui suit :

Les attestations énumérées ci-dessous devraient être fournies en même temps que la soumission mais peuvent aussi l’être après. Si l’une de ces attestations n’est pas fournie comme demandé, l’autorité contractante en informera le soumissionnaire et lui donnera un délai afin qu’il se conforme à l’exigence. Le défaut de répondre à la demande de l’autorité contractante et de se conformer à l’exigence dans les délais prévus rendra la soumission non recevable.

[...]

6. ISO 9001, certification selon l’article 6.7

[Nos italiques]

  1. Réitérant un des énoncés de l’article 3.1, l’article 5.2 fait bien comprendre que les attestations « devraient » (« should be » dans la version anglaise) être fournies en même temps que la soumission, mais qu’elles « peuvent » (« may be » dans la version anglaise) aussi être fournies après – ainsi, l’idéal était de fournir les attestations en même temps que la soumission, mais les fournir après était permis. Eu égard à un autre énoncé de l’article 3.1, cet article fait bien comprendre que TPSGC allait demander les attestations dans le cas où elles n’auraient pas été jointes à la soumission et, de plus, qu’un délai serait accordé au soumissionnaire pour satisfaire à cette demande. Dans les articles 3.1 et 5.2, l’utilisation du futur à valeur d’impératif (« seront », « informera », « rendra », « will » dans la version anglaise) a pour résultat que TPSGC s’est imposé une obligation. En ce qui concerne ce qui était effectivement requis, l’article 5.2, que l’article 3.1 rend pertinent, stipule « ISO 9001, certification selon l’article 6.7 ». Par conséquent, pour comprendre la nature et la portée de l’exigence en matière de certification ISO, il faut se reporter à l’article 6.7.
  2. L’article 6.7, « ISO 9001 : 2000 Systèmes de management de la qualité », stipule ce qui suit :

Avant l’adjudication d’un contrat et dans les 24 heures après réception d’un avis écrit de l’autorité contractante, le soumissionnaire retenu doit fournir sa certification ISO 9001 : 2000.

La documentation et les procédés des soumissionnaires qui ne sont pas certifiés ISO pourront faire l’objet d’une évaluation en ce qui concerne la gestion de la qualité par le responsable de l’assurance de la qualité avant l’adjudication d’un contrat.

[Nos italiques]

  1. Il convient de noter que l’article ci-dessus a trait à un « soumissionnaire retenu ». Interprété à la lumière de l’article 4.2, qui indique qu’« [u]ne soumission doit respecter toutes les exigences de la demande de propositions pour être recevable », l’article ci-dessus ne peut qu’appuyer davantage la conclusion selon laquelle, compte tenu des articles examinés précédemment, les attestations et, dans le cas présent, la certification ISO ne devaient pas obligatoirement avoir été fournies à la clôture de l’appel d’offres, mais plutôt que celles-ci constituaient une condition à remplir pour l’adjudication du contrat. De plus, l’article ci‐dessus spécifie que, si la demande de renseignements dont il est question aux articles 3.1, 5.1 et 5.2 est soumise par TPSGC au soumissionnaire retenu, celui-ci doit répondre dans un délai de 24 heures. Aussi, selon une interprétation des articles 5.1 et 5.2, ainsi que de l’article 4.2, la soumission recevable d’un soumissionnaire retenu pouvait devenir non recevable avant l’adjudication du contrat si toutes les attestations requises n’étaient pas fournies à la demande de TPSGC ou si elles comportaient de fausses déclarations.
  2. Peut-être de prime importance en l’espèce est le fait que l’article 6.7 indique que le soumissionnaire retenu doit fournir « sa certification » ISO 9001, et poursuit en offrant une alternative aux « soumissionnaires qui ne sont pas certifiés ISO ». L’énoncé « doit fournir sa certification » peut être comparé au suivant, qui n’est pas utilisé dans l’article : « doit fournir une certification ». Si ce dernier énoncé constitue une obligation, le premier quant à lui est conditionnel à la détention de la certification par le soumissionnaire. Essentiellement, une interprétation raisonnable de l’article est celle selon laquelle un soumissionnaire retenu détenant une certification ISO 9001 devait la fournir, et que les soumissionnaires en général – y compris le soumissionnaire retenu – qui n’étaient pas certifiés ISO devaient fournir, pour satisfaire à l’article 6.7, de la documentation et des procédés ayant trait à leur système de gestion de la qualité, qui pourraient faire l’objet d’une évaluation par un responsable de l’assurance de la qualité.
  3. Bien entendu, l’option de fournir de la documentation et des procédés ayant trait au système de gestion de la qualité n’est pas formulée explicitement dans la DP. Il s’agit plutôt d’une déduction provenant de l’indication à l’article 6.7 selon laquelle la documentation et les procédés des soumissionnaires qui n’étaient pas certifiées ISO pourraient faire l’objet d’une évaluation « avant l’adjudication d’un contrat » – ce qui doit être évalué doit premièrement être fourni. De plus, en ce qui concerne cette évaluation, l’expression « pourront faire l’objet » dans le deuxième paragraphe de l’article 6.7 appuie la conclusion selon laquelle l’évaluation n’était pas absolument nécessaire et que, par conséquent, un soumissionnaire retenu détenant une certification ISO 9001 devait la fournir, mais qu’un soumissionnaire retenu ne détenant pas cette certification devait fournir de la documentation et des procédés qui feraient, ou non, l’objet d’une évaluation.
  4. De plus, le Tribunal fait observer que, en ce qui concerne les attestations, les mots clés de l’article 5.2(6) sont « ISO 9001, certification selon l’article 6.7 ». Le terme « certification » est assez explicite, en ce qu’il suggère qu’il s’agit d’une preuve de conformité formelle à la norme ISO 9001. À ce titre, cet article est mal coordonné avec le deuxième paragraphe de l’article 6.7, qui essentiellement offre une alternative à cette preuve de conformité formelle. En revanche, une exigence moins explicite en matière de norme ISO, qui aurait été plus en harmonie avec le deuxième paragraphe de l’article 6.7, aurait pu spécifier « ISO 9001 ou normes similaires selon l’article 6.7 ». Néanmoins, en spécifiant « selon l’article 6.7 », l’article 5.2(6) indique que l’exigence catégorique qu’il contient doit être interprétée conformément à l’article 6.7, qui peut aussi en atténuer la portée le cas échéant.
  5. Ainsi, il y a clairement des ambiguïtés dans certaines portions de la DP qui sont pertinentes en l’espèce. Toutefois, comme l’a affirmé le Tribunal, ces ambiguïtés ne constituent pas des critères non divulgués ou n’ont pas favorisé l’utilisation de tels critères dans l’évaluation des soumissions. Elles n’appuient pas non plus la conclusion selon laquelle, en se fondant sur le deuxième paragraphe de l’article 6.7, TPSGC a mal interprété la portée de cette exigence ou d’une autre. Il est important de noter que le critère du Tribunal pour déterminer si une plainte concernant l’évaluation d’une soumission est fondée est le caractère raisonnable de l’évaluation, c’est-à-dire si celle-ci est confortée par une explication défendable. Compte tenu des dispositions de la DP, la conclusion selon laquelle la norme ISO 9001 n’était pas une exigence absolue est raisonnable. La conclusion contraire ne serait raisonnable que si le deuxième paragraphe de l’article 6.7 était complètement absent. Ce paragraphe conforte la conclusion que la mention de la norme ISO 9001 était simplement la meilleure façon d’atteindre l’objectif d’un système de gestion de la qualité. À ce titre, le Tribunal conclut que l’évaluation de TPSGC de la soumission de RMI est raisonnable, puisqu’elle est fondée sur l’explication défendable, et convaincante, que l’article 6.7 offrait une alternative à la certification ISO.
  6. De plus, le Tribunal a affirmé dans des décisions antérieures « qu’il incombait aux soumissionnaires de demander des éclaircissements sur les questions jugées ambiguës ou incertaines »[41]. Cela incombe aux soumissionnaires, que ce soit leur soumission qui soit concernée ou celle d’un compétiteur. En l’espèce, Dominion aurait dû demander des éclaircissements à TPSGC à l’étape de la présentation des soumissions, au moment de la lecture des portions ambiguës de la DP. En outre, le Tribunal a aussi déjà indiqué qu’« [i]l incombe au soumissionnaire qui juge [qu’]une exigence [est] déraisonnable de prendre des mesures pour obtenir réparation dans les délais prescrits par l’article 6 du Règlement »[42]. Ainsi, si les éclaircissements fournis par TPSGC n’ont pas satisfait Dominion, Dominion pouvait déposer une plainte auprès du Tribunal en temps voulu avant la clôture de l’appel d’offres au lieu d’interpréter à sa façon la portée de l’exigence. Des documents d’appel d’offres dont les critères sont ambigus, mais suffisamment intelligibles pour permettre de demander des éclaircissements, ne seront pas considérés par le Tribunal comme constituant des critères non divulgués ou ayant favorisé l’utilisation de tels critères dans l’évaluation des soumissions.

Clauses du contrat subséquent

  1. Le Tribunal constate que Dominion a fondé un certain nombre de ses arguments sur des dispositions du contrat subséquent qui figurent dans la partie 7 de la DP, ainsi que sur des dispositions contenues dans l’annexe F qui, doit conclure le Tribunal, ont trait au contrat subséquent, puisque qu’il s’agit des « obligations de l’entrepreneur » [traduction] et que cela engage « l’entrepreneur » plutôt que les soumissionnaires. De plus, le Tribunal constate que TPSGC a fondé son refus de réparation sur l’article 7.15, qui constitue une clause du contrat subséquent.
  2. Il est important de noter que, à moins qu’il y ait une indication du contraire ou qu’il peut en être raisonnablement déduit, les clauses de contrats subséquents contenues dans des documents d’appels d’offres ne contiennent habituellement pas d’exigences ayant trait aux étapes de la présentation d’une soumission ou de son évaluation. Ainsi, en ce qui concerne particulièrement les exigences de l’article 7.15, qui ont trait aux normes ISO auxquelles l’adjudicataire doit satisfaire « [p]our l’exécution des travaux décrits dans le contrat », celles-ci ne font pas partie de l’étape de la présentation des soumissions. De plus, l’indication connexe mentionnant que, bien que l’adjudicataire ne soit pas tenu d’être « certifié ISO », son système de gestion de la qualité doit « [tenir] compte de chacune des exigences de la norme » n’est pertinente que dans un contexte d’adjudication de contrat, ce qui ne relève pas de la compétence du Tribunal[43].
  3. Néanmoins, étant donné que les parties ont confondus l’étape de la  présentation des soumissions avec celle des exigences du contrat subséquent, le Tribunal fait remarquer que l’article 7.15 concorde suffisamment avec l’article 6.7, de telle sorte que la certification ISO n’est ni une obligation de l’appel d’offres ni une obligation pour l’exécution du contrat. Toutefois, aux termes de l’article 7.15, l’adjudicataire doit à nouveau satisfaire à chacune des exigences de la norme ISO. L’article 7.15 peut aisément être comparé à l’article 1.4 de l’annexe, qui stipule que l’adjudicataire « [...] doit mettre en œuvre un système de gestion de la qualité adapté aux travaux à exécuter ». Ainsi, il est raisonnable de conclure que l’exigence de satisfaire à chacune des exigences de la norme ISO ne doit pas nécessairement être remplie au moment de l’exécution du contrat, mais peut l’être avant ou au cours de l’exécution du contrat. Ce raisonnement est conforté par l’article 1.5 de l’annexe F, qui énumère les procédés que doit comprendre « au minimum » le système de gestion de la qualité de l’adjudicataire[44].

Responsable de l’assurance de la qualité et processus connexes

  1. En ce qui concerne l’argument de Dominion selon lequel le deuxième paragraphe de l’article 6.7 requiert qu’un responsable de l’assurance de la qualité soit « nommé », le Tribunal doit souligner que cela n’est pas corroboré a priori par les éléments de preuve. Bien que l’article 6.7 fasse référence à un responsable de l’assurance de la qualité, il n’y a aucune indication qu’un responsable doit être formellement nommé pour pouvoir exercer cette fonction. Le Tribunal rejette aussi l’affirmation connexe de Dominion selon laquelle, puisqu’un tel responsable n’a pas été nommé, il peut être conclu que TPSGC n’avait pas l’intention de tenir compte du deuxième paragraphe de l’article 6.7. Une institution fédérale ne peut déroger à des exigences obligatoires contenues dans des documents d’appels d’offres; à ce titre, TPSGC ne pourrait tout simplement pas décider de ne pas tenir compte de telles exigences. Le Tribunal accepte plutôt l’affirmation de TPSGC selon laquelle le Bureau des systèmes de gestion du MDN constituait le responsable de l’assurance de la qualité aux fins de l’appel d’offres.
  2. Dominion affirme aussi que le Tribunal devrait rejeter l’évaluation du système de gestion de la qualité de RMI parce que TPSGC n’a pas divulgué le processus d’évaluation ainsi que les connaissances techniques ou les qualifications d’un évaluateur éventuel et parce que le temps alloué pour les évaluations n’était pas suffisant. L’obligation d’une institution fédérale est d’évaluer les soumissions rigoureusement en utilisant les critères énoncés dans les documents d’appel d’offres. En l’espèce, il était indiqué dans les documents d’appel d’offres que l’évaluation serait faite par un responsable de l’assurance de la qualité, et cette obligation a été respectée. Si Dominion considérait que les documents d’appel d’offres étaient ambigus en ce qui concerne le processus d’évaluation des soumissionnaires ne possédant pas la certification ISO, il lui incombait de demander des éclaircissements. De demander au Tribunal, en l’absence d’éléments de preuve suffisants, de remettre en question l’évaluation du Bureau des systèmes de gestion du MDN, ou ses connaissances ou ses qualifications, consiste à rechercher de l’information compromettante. Ainsi, gardant à l’esprit le critère du caractère raisonnable d’une évaluation, la crédibilité qu’il accorde aux évaluateurs et l’indication du superviseur par intérim des systèmes de gestion du MDN que le Bureau des systèmes de gestion avait examiné les documents de RMI et avait conclu que son système de gestion de la qualité était acceptable, le Tribunal ne voit aucune raison de rejeter l’évaluation.
  3. À l’appui de la conclusion ci-dessus, le Tribunal fait observer que les faits dans Symtron, décision sur laquelle s’est fondée Dominion, peuvent être distingués des faits de l’espèce, en ce sens que Symtron concernait la vérification indépendante de la conformité des soumissions par une société d’experts-conseils, qui avaient été retenus pour recueillir des renseignements et utiliser son jugement professionnel pour tirer des conclusions en se fondant sur les renseignements recueillis. Effectivement, le Tribunal était d’avis dans Symtron que, dans le contexte d’une vérification indépendante de la conformité des soumissions, l’institution fédérale ayant émis l’appel d’offres devait fournir les critères sur lesquels la société d’experts‐conseils avait exercé son jugement professionnel. Dans un processus d’appel d’offres comme en l’espèce, dans lequel il n’y a pas de cueillette de renseignements par une institution fédérale ou sa société d’experts-conseils, l’exercice du jugement professionnel est remplacé par les exigences énoncées dans les documents d’appel d’offres et par l’exigence qui veut, selon la jurisprudence, que les soumissions soient évaluées exclusivement par rapport à ces exigences. En vertu de l’article 7.40a)(v)(D) du Guide des approvisionnements de TPSGC, les soumissionnaires non retenus peuvent obtenir des renseignements généraux sur les points forts relatifs de la soumission retenue, et en vertu de l’article 7.40a)(v)(E) ils peuvent obtenir les raisons pour lesquelles leur soumission n’a pas été retenue.

Droit à un compte rendu complet

  1. Dans son dernier argument, Dominion soutient que la conclusion tardive de TPSGC selon laquelle sa soumission n’était pas conforme à une autre exigence obligatoire de la DP constitue une violation du droit de Dominion d’obtenir un compte rendu complet en vertu de l’article 7.40a)(v)(E) du Guide des approvisionnements de TPSGC. Le Tribunal est d’accord avec Dominion sur ce point. Selon cet article, un compte rendu doit comprendre « un sommaire des raisons pour lesquelles la soumission [...] faisant l’objet d’un compte rendu n’a pas été retenu[e], conformément aux critères d’évaluation et à la méthode de sélection ». Cet article est similaire à l’article 1015(6)b) de l’Accord de libre-échange nord-américain[45], qui stipule que l’institution fédérale, « sur demande, communiquer[a] aux fournisseurs dont la soumission n’a pas été retenue des renseignements pertinents concernant les raisons du rejet [...] ». Les renseignements au dossier appuient la conclusion selon laquelle le compte rendu de TPSGC ayant trait à la soumission de Dominion n’a pas satisfait à cette exigence.
  2. Le Tribunal fait remarquer que, même si l’affirmation de TPSGC selon laquelle la soumission de Dominion était non conforme à une autre exigence obligatoire était vrai, les résultats de l’appel d’offres demeureraient tout de même inchangés, en ce sens que RMI serait toujours le soumissionnaire retenu. De plus, si l’affirmation de TPSGC est fausse ou fondée sur une évaluation qui n’est pas raisonnable, les résultats de l’appel d’offres demeureraient inchangés, en ce sens que RMI serait toujours le soumissionnaire retenu. En outre, le Tribunal fait remarquer que Dominion n’a pas affirmé qu’elle n’aurait pas déposé la présente plainte si elle avait été avisée de ce que TPSGC considérait être les insuffisances de sa soumission. Aussi, le Tribunal n’est pas d’accord avec l’affirmation de Dominion selon laquelle elle a été « forcée de déposer une plainte pour être informée d’une présumée insuffisance dans sa soumission »[46]. Dominion a déposé sa plainte pour des raisons autres que la découverte de cette insuffisance alléguée[47]. Ainsi, le Tribunal peut conclure que cette violation des droits de Dominion à un compte rendu ne lui a pas causé de pertes financières. Par conséquent, comme mesure corrective, le Tribunal recommande que TPSGC offre à Dominion un compte rendu conformément à l’article 7.40a)(v)(E) du Guide des approvisionnements de TPSGC et à l’article 1015(6)b) de l’ALÉNA pour répondre à la demande de Dominion du 3 décembre 2015.

Conclusion

  1. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que la plainte n’est pas fondée.

FRAIS

  1. TPSGC demande le remboursement des frais encourus pour répondre à la plainte.
  2. Le Tribunal accorde à TPSGC le remboursement des frais raisonnables qu’il a engagés pour répondre à la plainte.
  3. Pour déterminer le montant de l’indemnité en l’espèce, le Tribunal a tenu compte de la Ligne directrice, qui fonde l’évaluation du degré de complexité d’une plainte selon trois critères : la complexité du marché public, la complexité de la plainte et la complexité de la procédure.
  4. La détermination provisoire du Tribunal est que le degré de complexité de la plainte correspond au degré 2, tel que spécifié à l’annexe A de la Ligne directrice. Le marché était plutôt complexe, étant donné qu’il concernait un service bien défini et l’obligation d’évaluer les soumissionnaires en fonction de critères multiples. La plainte était plutôt complexe, car elle comportait des indications ambiguës. La procédure était plutôt complexe, car des observations mineures au-delà de ce qui est considéré comme normal ont été prises en considération.
  5. Par conséquent, comme le prévoit la Ligne directrice, le Tribunal détermine provisoirement que le montant de l’indemnité est de 2 750 $.

DÉCISION DU TRIBUNAL

  1. Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal détermine que la plainte n’est pas fondée.
  2. Aux termes de l’article 30.16 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal accorde à TPSGC le remboursement des frais raisonnables qu’il a engagés pour répondre à la plainte, ces frais devant être payés par Dominion. En conformité avec la Ligne directrice, le Tribunal détermine provisoirement que le degré de complexité de la présente plainte correspond au degré 2 et que le montant de l’indemnité est de 2 750 $. Si l’une ou l’autre des parties n’est pas d’accord en ce qui a trait à la détermination provisoire du degré de complexité ou du montant de l’indemnité, elle peut déposer des observations auprès du Tribunal, en conformité avec l’article 4.2 de la Ligne directrice. Il relève de la compétence du Tribunal de fixer le montant définitif de l’indemnité.
 

[1].      L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.) [Loi sur le TCCE].

[2].      Pièce PR-2015-048-09, annexe 1, article 1.2(1)a), vol. 1A.

[3].      Pièce PR-2015-048-09, annexe 1, vol. 1A.

[4].      Pièce PR-2015-048-09, annexe 1, vol. 1A.

[5].      Pièce PR-2015-048-09, annexe 1, vol. 1A.

[6].      Pièce PR-2015-048-09, annexe 1, vol. 1A.

[7].      Pièce PR-2015-048-09, annexe 1, vol. 1A.

[8].      Pièce PR-2015-048-09, annexe 1, vol. 1A.

[9].       D.O.R.S./93-602. [Règlement].

[10].    Pièce PR-2015-048-09 au par. 3, vol. 1A.

[11].    Pièce PR-2015-048-09 au par. 22, vol. 1A.

[12].    Pièce PR-2015-048-09 au par. 27, vol. 1A.

[13].    Pièce PR-2015-048-09 au par. 29, vol. 1A.

[14].    Pièce PR-2015-048-09 au par. 29, vol. 1A.

[15].    Pièce PR-2015-048-09 au par. 4, vol. 1A.

[16].    IBM Canada Ltd. (5 novembre 1999) (TCCE).

[17].    Valcom Consulting Group Inc. c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (9 juillet 2014) (TCCE).

[18].    Samson & Associates c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (19 octobre 2012) (TCCE) [Samson].

[19].    Excel Human Resources Inc. c. Ministère de l’Environnement (2 mars 2012) (TCCE).

[20].    L’article 6.1 stipule ce qui suit : « À la date de clôture de l’appel d’offres, les conditions suivantes doivent être remplies : a) le soumissionnaire doit détenir une attestation de sécurité valide tel que spécifié dans la partie 7 – Clauses du contrat subséquent; [...] ».

[21].    Pièce PR-2015-048-09 au par. 5, vol. 1A. À cet égard, TPSGC fait remarquer, au paragraphe 16 du RIF, qu’il a apporté une modification à la DP, le 6 novembre 2015, en ajoutant une liste de vérification des conditions requises en matière de sécurité. De plus, TPSGC affirme que, conformément à la jurisprudence, il incombe au soumissionnaire de démontrer sa conformité aux exigences obligatoires.

[22].    Pièce PR-2015-048-09 au par. 12, vol. 1A.

[23].    Samson aux par. 26-27.

[24].    Pièce PR-2015-048-11 au par. 2(i), vol. 1A.

[25].    Pièce PR-2015-048-11 au par. 2(ii)a) , vol. 1A. Subsidiairement, Dominion soutient aussi au paragraphe 11 que le deuxième paragraphe de l’article 6.7 fait référence à des systèmes de gestion de la qualité qui ne sont pas visés par la norme ISO.

[26].    Pièce PR-2015-048-11 au par. 8, vol. 1A. À cet égard, Dominion affirme que le Tribunal doit tenir compte de l’article 11 de la Loi d’interprétation, L.R.C. (1985), ch. I-21, qui stipule, dans sa version anglaise, que le terme « shall » (doit) indique l’obligation tandis que le terme « may » (peut) indique la possibilité.

[27].    Pièce PR-2015-048-11 au par. 2(ii)b) , vol. 1A.

[28].    Pièce PR-2015-048-11 au par. 13, vol. 1A. Dans son refus de réparation, TPSGC a par erreur fait référence à l’article « 7.5 ».

[29].    Pièce PR-2015-048-11 au par. 17, vol. 1A.

[30].    Pièce PR-2015-048-11 aux par. 28, 34, vol. 1A.

[31].    Pièce PR-2015-048-11 au par. 32, vol. 1A.

[32].    Pièce PR-2015-048-11 au par. 12, vol. 1A.

[33].    Pièce PR-2015-048-11 aux par. 2(ii)c), 25, 35, vol. 1A.

[34].    Symtron Systems Inc. (10 septembre 1997) (TCCE) [Symtron].

[35].    Pièce PR-2015-048-11 au par. 36, vol. 1A.

[36].    Pièce PR-2015-048-11 au par. 2(iii), vol. 1A.

[37].    Pièce PR-2015-048-11 au par. 41, vol. 1A.

[39].    Pièce PR-2015-048-11 au par. 2(iii), vol. 1A.

[40].    Pièce PR-2015-048-09 au par. 6, vol. 1A.

[41].    Info-Electric H P Systems Inc. c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (2 août 2006), PR-2006-012 (TCCE) au par. 17; Marathon Watch Company Ltd. (19 mai 2010), PR-2010-011 (TCCE); Berlitz Canada Inc. (18 juillet 2003), PR-2002-066 (TCCE); Primex Project Management Ltd. (22 août 2002), PR-2002-001 (TCCE).

[42].    Global Upholstery Co. Inc. c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (6 juillet 2009), PR-2008-052 (TCCE) au par. 14.

[43].    Albatross Aviation Services (8 avril 2005), PR-2004-062 (TCCE); Reicore Technologies Inc. (22 septembre 2009), PR-2009-047 (TCCE); Tyco Electronics Canada ULC (21 mars 2014), PR-2013-048 (TCCE).

[44].    Dans le paragraphe 22 du RIF, TPSGC lie effectivement l’article 6.7 à l’article 1.5 de l’annexe F. Bien que le dernier article ait trait au contrat subséquent, TPSGC fait observer qu’il énonce les exigences minimales d’un système de gestion de la qualité et, ainsi, le critère pour évaluer le système de gestion de la qualité des soumissionnaires qui ne sont pas certifiés ISO, aux termes de l’article 6.7. En effet, il est plausible de conclure que le système de gestion de la qualité de RMI ait été évalué en fonction de l’article 1.5 de l’annexe F. Étant donné la similarité du libellé des deux articles, une telle évaluation est défendable et constitue un cas où il peut être raisonnablement déduit qu’une clause du contrat subséquent contient es exigences ayant trait aux étapes de la présentation des soumissions et de l’évaluation.

[45].    Accord de libre-échange nord-américain entre le gouvernement du Canada, le gouvernement des États-Unis d’Amérique et le gouvernement des États-Unis du Mexique, 17 décembre 1992, R.T.C. 1994, no 2, en ligne : le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement <http://www.international.gc.ca/trade-agreements-accords-commerciaux/agr-... (entré en vigueur le 1er janvier 1994) [ALÉNA].

[46].     Pièce PR-2015-048-11 au par. 2(iii), vol. 1A.

[47].    Pour cette raison, la présente plainte diffère de Discover Training Inc. (17 mai 1999), PR-98-042 (TCCE).