SUNNY JAURA S/N JAURA ENTERPRISES

SUNNY JAURA s/n JAURA ENTERPRISES
c.
MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX
Dossier no PR-2015-058

Décision et motifs rendus
le jeudi 9 juin 2016

TABLE DES MATIÈRES

 

EU ÉGARD À une plainte déposée par Sunny Jaura s/n Jaura Enterprises aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.);

ET À LA SUITE D’une décision d’enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

ENTRE

SUNNY JAURA S/N JAURA ENTERPRISES Partie plaignante

ET

LE MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX Institution fédérale

DÉCISION

Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte n’est pas fondée.

Aux termes de l’article 30.16 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur accorde au ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux le remboursement des frais raisonnables qu’il a engagés pour répondre à la plainte, ces frais devant être payés par Sunny Jaura s/n Jaura Enterprises. En conformité avec la Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure portant sur un marché public, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine provisoirement que le degré de complexité de la plainte correspond au degré 1 et que le montant de l’indemnité est de 1 150 $. Si l’une ou l’autre des parties n’est pas d’accord en ce qui a trait à la détermination provisoire du degré de complexité ou du montant de l’indemnité, elle peut déposer des observations auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur, en conformité avec l’article 4.2 de la Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure portant sur un marché public. Il relève de la compétence du Tribunal canadien du commerce extérieur de fixer le montant définitif de l’indemnité.

Rose Ritcey
Rose Ritcey
Membre présidant

Membre du Tribunal : Rose Ritcey, membre présidant

Conseiller juridique pour le Tribunal : Alexandra Pietrzak

Agent du greffe : Sara Pelletier

Partie plaignante : Sunny Jaura s/n Jaura Enterprises

Conseillers juridiques pour la partie plaignante : Geoffrey Bowman
Alexander Baer

Institution fédérale : ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux

Conseillers juridiques pour l’institution fédérale : Nicole Girard
Roy Chamoun
Susan Clarke
Ian McLeod

Veuillez adresser toutes les communications au :

Greffier
Secrétariat du Tribunal canadien du commerce extérieur
15e étage
333, avenue Laurier Ouest
Ottawa (Ontario)  K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel : tcce-citt@tribunal.gc.ca

EXPOSÉ DES MOTIFS

RÉSUMÉ

  1. Le 9 février 2016, Sunny Jaura s/n Jaura Enterprises (Jaura) a déposé une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal), aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur[1], concernant une demande de propositions (DP) (invitation no W0127-15PO26/A) émise par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (TPSGC) au nom du ministère de la Défense nationale (MDN) pour la prestation de services d’hôtellerie.
  2. Jaura allègue que TPSGC a incorrectement conclu que sa soumission n’était pas conforme aux termes de la DP. Plus particulièrement, Jaura soutient que les évaluateurs ont incorrectement concluent que le Motel 6 proposé dans sa soumission ne comportait pas de salle de conférence.
  3. À titre de mesure corrective, Jaura demande que les contrats soient résiliés et qu’ils lui soient adjugés, ou, subsidiairement, que TPSGC l’indemnise pour la perte de profit qu’elle aurait réalisé si les contrats lui avaient été adjugés. De plus, Jaura demande le remboursement des frais raisonnables encourus pour le dépôt de sa plainte.

HISTORIQUE DE LA PROCÉDURE

  1. Le 15 décembre 2015, TPSGC a émis une DP pour la prestation de services d’hôtellerie au nom du MDN. La date de clôture de l’appel d’offres était le 25 janvier 2016.
  2. Le 22 janvier 2016, Jaura a présenté une soumission en réponse à la DP.
  3. Le 5 février 2016, TPSGC a avisé Jaura que sa soumission avait été jugée non conforme, étant donné que le Motel 6 proposé ne comportait pas de salle de conférence. TPSGC a informé Jaura que des contrats avaient été adjugés au Holiday Inn Express Twentynine Palms, au Best Western Joshua Tree Hotel & Suites et au Fairfield Inn & Suites Twentynine Palms[2].
  4. Le 5 février 2016, Jaura a écrit à TPSGC pour contester l’adjudication des contrats, affirmant que les deux établissements proposés dans sa soumission (Motel 6 et Holiday Inn Express) comportaient des salles de conférence de huit places. À ce titre, Jaura a insisté pour que les contrats soient résiliés et qu’ils lui soient adjugés.
  5. Le 8 février 2016, TPSGC a répondu à Jaura que, dans le cadre de l’évaluation technique, des évaluateurs du MDN avaient communiqué avec le représentant du Motel 6 qui l’avait avisé que ce motel ne comportait pas de salle de conférence. TPSGC a affirmé que les contrats ne seraient pas résiliés.
  6. Le 8 février 2016, Jaura a écrit une autre fois à TPSGC pour contester sa décision, soutenant que les évaluateurs techniques auraient dû communiquer avec elle plutôt qu’avec le représentant du Motel 6. Jaura a expliqué qu’aucune publicité n’est faite au sujet de la salle de conférence du Motel 6 et que, pour cette raison, « quand des personnes appellent pour savoir s’il y a une salle de conférence, elles se font répondre NON, il n’y a pas de salle de conférence »[3] [traduction].
  7. Le 9 février 2016, Jaura a déposé sa plainte auprès du Tribunal.
  8. Le 12 février 2016, le Tribunal a informé les parties qu’il avait accepté d’enquêter sur la plainte étant donné que celle-ci satisfaisait aux exigences du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le TCCE et aux conditions énoncées au paragraphe 7(1) du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics[4].
  9. Le 8 mars 2016, TPSGC a déposé son Rapport de l’institution fédérale (RIF) auprès du Tribunal, conformément à l’article 103 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur[5].
  10. Le 9 mars 2016, Jaura a demandé la prorogation du délai pour déposer ses commentaires sur le RIF afin de consulter un conseiller juridique.
  11. Le 10 mars 2016, le Tribunal a accueilli la demande de Jaura, lui accordant jusqu’au 18 avril 2016 pour déposer ses commentaires sur le RIF.
  12. Le 18 avril 2016, Jaura a déposé ses commentaires sur le RIF.
  13. Étant donné que les renseignements au dossier étaient suffisants pour que le Tribunal puisse examiner la plainte en profondeur et se prononcer, il a conclu qu’une audience n’était pas nécessaire et a procédé à un jugement sur pièces.

DISPOSITIONS PERTINENTES DE LA DP

  1. La plainte a trait à l’évaluation du critère obligatoire suivant :

    ANNEXE A

    Énoncé des besoins

    [...]

    TÂCHES/BESOINS

    L’entrepreneur fournira cent quarante (140) chambres d’hôtel pour héberger un maximum de cent quatre-vingt-dix (190) membres du personnel qui arriveront le 18 février et qui repartiront le 8 mars 2016.

    Les exigences pour chaque chambre d’hôtel sont les suivantes :

    [...]

    • L’hôtel doit fournir une salle de conférence avec une table et des chaises pouvant accueillir huit personnes chaque jour, de 18 h à 21 h;

    [...]

    [Nos italiques, traduction]
  1. De plus, l’article 4.2 de la DP stipule ce qui suit :

    Une soumission doit satisfaire à toutes les exigences de l’appel d’offres pour être jugée recevable. La soumission recevable la moins-disante sera recommandée pour l’adjudication d’un contrat.

    Si aucun soumissionnaire ne peut offrir toutes les chambres requises, plus d’un contrat sera adjugé.

    [Traduction]
  1. L’équipe d’évaluation était composée d’évaluateurs de TPSGC et du MDN, et comprenait un responsable technique du MDN[6].

POSITION DES PARTIES

  1. Jaura soutient que TPSGC a incorrectement conclu que sa soumission n’était pas conforme à un critère obligatoire, étant donné qu’il était expressément affirmé dans sa soumission qu’« une salle de conférence avec une table et des chaises pouvant accueillir huit personnes chaque jour, de 18 h à 21 h »[7], était disponible aux deux établissements[8]. Jaura reconnaît que les évaluateurs se sont fait dire qu’il n’y avait pas de salle de conférence au Motel 6 lorsqu’ils ont communiqué avec le représentant du motel[9]. Cependant, Jaura a expliqué que, bien qu’une salle de conférence ne soit pas disponible pour le public en général au Motel 6, elle avait fait des arrangements pour qu’une salle de conférence soit disponible soit en utilisant un salon, soit en convertissant une chambre d’hôtel à cette fin[10]. Par conséquent, Jaura soutient que si le responsable technique avait communiqué avec elle plutôt qu’avec le représentant du Motel 6, elle aurait pu confirmer les renseignements qui figuraient dans sa soumission.
  2. Bien que Jaura ait initialement soutenu que TPSGC avait incorrectement conclu que plusieurs autres soumissions étaient conformes même si elles ne comprenaient pas une « Déclaration de condamnation à une infraction »[11], elle a par la suite décidé de laisser tomber ces allégations[12]. À ce titre, le Tribunal n’a pas examiné ces allégations.
  3. TPSGC reconnaît que, de toutes les soumissions reçues, seule celle de Jaura offerait tout l’hébergement requis pour la période indiquée. Cependant, TPSGC affirme que, dans le cadre de l’évaluation, le responsable technique s’est renseigné auprès de tous les établissements proposés par les soumissionnaires afin de vérifier leur conformité aux termes de la DP. TPSGC soutient que le responsable technique a communiqué avec le représentant du Holiday Inn Express et du Motel 6, dont les coordonnées figuraient dans la soumission de Jaura, et qu’il a été informé que le Motel 6 ne comportait pas de salle de conférence.
  4. Compte tenu de la réponse reçue en ce qui concerne le Motel 6, TPSGC maintient qu’il a agi raisonnablement en concluant que la soumission de Jaura ne satisfaisait pas à cette exigence obligatoire. Étant donné qu’aucun autre soumissionnaire était en mesure d’offrir tout l’hébergement requis, TPSGC affirme avoir correctement adjugé des contrats à trois soumissionnaires qui satisfaisaient à toutes les exigences obligatoires, tel que stipulé à l’article 4.2 de la DP[13].
  5. Pour sa part Jaura soutient que, dans l’évaluation de sa soumission, TPSGC a peut-être utilisé des critères non divulgués pour déterminer ce qui constitue une salle de conférence. Bien que Jaura n’indique aucun argument avancé par TPSGC ou commentaire de la part des évaluateurs à cet effet, elle soutient que TPSGC a peut-être rejeté sa soumission parce que la solution qu’elle proposait (c’est-à-dire convertir une chambre d’hôtel en salle de conférence) ne satisfaisait pas à la définition non divulguée de ce qui constitue une salle de conférence. Si des critères non divulgués ont été utilisés, Jaura soutient que TPSGC n’a pas respecté les termes des accords commerciaux applicables.
  6. Enfin, Jaura soutient que le caractère raisonnable de la façon d’agir de TPSGC n’est pas le critère approprié pour évaluer sa conclusion. Jaura affirme que la Cour suprême du Canada a « confirmé que la bonne foi ne peut être invoquée pour se disculper du non-respect d’un contrat »[14] [traduction]. Étant donné qu’elle s’était organisée pour convertir une chambre du Motel 6 en salle de conférence aux fins de sa soumission, Jaura soutient que la conclusion de TPSGC selon laquelle sa soumission n’était pas conforme est incorrecte et qu’elle doit être déclarée nulle.

ANALYSE

  1. Le paragraphe 30.14(1) de la Loi sur le TCCE exige que, dans son enquête, le Tribunal limite son étude à l’objet de la plainte. Au terme de l’enquête, le Tribunal détermine la validité de la plainte en fonction des critères et procédures établis par règlement pour un contrat spécifique. Aux termes de l’article 11 du Règlement, le Tribunal détermine si la procédure du marché public a été suivie conformément aux exigences des accords commerciaux applicables, soit en l’espèce l’Accord sur le commerce intérieur[15] et l’Accord sur les marchés publics[16].
  2. Les accords commerciaux exigent que l’acheteur fournisse aux fournisseurs potentiels toute l’information nécessaire pour leur permettre de soumettre une soumission valable, y compris les critères qui seront utilisés pour l’évaluation des soumissions et l’adjudication du contrat. Ils prévoient également que, pour être prise en considération pour l’adjudication d’un contrat, une soumission doit être conforme aux exigences obligatoires énoncées dans les documents d’appel d’offres et l’acheteur doit procéder à l’adjudication conformément aux critères et aux exigences obligatoires énoncés dans les documents d’appel d’offres.
  3. Pour commencer, il est important de faire remarquer que Jaura se trompe en affirmant que le caractère raisonnable de la façon d’agir de TPSGC n’est pas le critère approprié pour évaluer sa conclusion. Il est en fait bien établi qu’un acheteur aura respecté ses obligations découlant des accords commerciaux lorsqu’il procède à une évaluation raisonnable conforme aux modalités d’une DP[17]. Comme la Cour d’appel fédérale l’a affirmé, dans ce type d’enquête, le rôle du Tribunal « est de décider si l’évaluation est étayée pas une explication raisonnable, et non de se mettre à la place des évaluateurs et de réévaluer la proposition non retenue »[18]. En s’acquittant de ce rôle, le Tribunal a à maintes reprises affirmé qu’il ne substituera pas son jugement à celui des évaluateurs, sauf si ces derniers ne se sont pas appliqués à bien évaluer la proposition d’un soumissionnaire, n’ont pas tenu compte de renseignements cruciaux contenus dans une proposition ou ont fondé leur évaluation sur des critères non divulgués[19].

Critères non divulgués

  1. En ce qui concerne l’affirmation de Jaura selon laquelle TPSGC aurait utilisé des critères d’évaluation non divulgués pour déterminer ce qui constitue une salle de conférence, le Tribunal conclut que les arguments de Jaura sont fortement basés sur des suppositions. Plus particulièrement, Jaura affirme ce qui suit :

    Le ton adopté par TPSGC concernant la solution proposée par Jaura dans sa soumission (« “salle de conférence” alléguée ») n’a pas tendance à appuyer la conclusion selon laquelle sa soumission n’était pas conforme. Il a plutôt tendance à appuyer l’idée selon laquelle TPSGC aurait eu quelque chose d’autre en tête lorsqu’il a exigé dans la DP qu’il y ait une « salle de conférence »[20].

    [Traduction]

    Cependant, Jaura n’avance aucun élément de preuve à l’appui de ce motif de plainte, qui n’a été soulevé qu’à l’étape de ses commentaires sur le RIF.

  1. Le Tribunal a précédemment affirmé que des allégations concernant des violations des accords commerciaux applicables doivent être plus que de simples hypothèses[21]. Le fait de seulement affirmer que TPSGC a peut être utilisé dans son évaluation des critères non divulgués sans éléments de preuve à l’appui n’est pas suffisant pour démontrer qu’il y a eu violation des accords commerciaux applicables.
  2. De plus, bien que le Tribunal soit d’accord que la DP ne contenait pas de définition de ce qui constitue une salle de conférence, il n’y a aucune preuve que TPSGC ait utilisé des critères pour limiter ce qui peut être considéré comme une salle de conférence appropriée ou que la soumission de Jaura ait été rejetée parce que la salle de conférence du Motel 6 a été considérée comme inadéquate. Les notes du responsable technique et l’avis d’adjudication du contrat indiquent plutôt clairement que la soumission de Jaura a été jugée non conforme parce que le Motel 6 ne comportait pas de salle de conférence[22].
  3. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut qu’il n’y a aucun élément de preuve qui appuie l’affirmation de Jaura selon laquelle TPSGC aurait utilisé des critères non divulgués dans l’évaluation de sa soumission. Le Tribunal conclut que ce motif de plainte n’est pas fondé.

Caractère raisonnable de l’évaluation

  1. Ayant statué sur le premier motif de plainte, le Tribunal doit maintenant déterminer si la conclusion de TPSGC selon laquelle le Motel 6 ne comportait pas de salle de conférence est raisonnable. Jaura reconnaît que, lorsque le responsable technique a communiqué avec le représentant du Motel 6 au cours de l’évaluation, on lui a dit qu’il n’y avait pas de salle de conférence[23]. Jaura ne conteste pas le fait que les évaluateurs, selon les termes des documents d’appel d’offres, pouvaient faire un suivi afin de vérifier si les établissements proposés comportaient une salle de conférence[24]. Jaura affirme plutôt que les évaluateurs auraient dû communiquer avec elle au lieu de communiquer avec les établissements proposés[25].
  2. Le Tribunal a affirmé à maintes reprises que le fardeau de démontrer la conformité de leurs soumissions aux critères obligatoires publiés dans les documents d’appel d’offres incombe aux soumissionnaires[26]. Dans l’annexe C de la soumission de Jaura, la section intitulée « Renseignements et personnes à contacter » [traduction] comprenait non seulement les coordonnées de Jaura, mais aussi celles du Motel 6 et du Holiday Inn Express (nom, adresse, numéro de téléphone et site Web). Ces personnes pouvaient donc s’attendre à ce qu’on communique avec elles à des fins de vérification. La soumission de Jaura ne contenait aucune indication selon laquelle on ne devait pas communiquer directement avec le représentant du Motel 6. Si Jaura ne désirait pas que le responsable technique communique avec le représentant du Motel 6, elle aurait dû l’indiquer clairement dans sa soumission.
  3. La démarche du responsable technique visait à s’assurer que les établissements proposés comportaient les salles de conférence requises. Le Tribunal ne voit rien d’incorrect dans le fait que le responsable technique ait communiqué directement avec le représentant du Motel 6, dont les coordonnées figuraient dans la soumission de Jaura, pour vérifier si c’était bien le cas. Étant donné les renseignements qui figuraient dans la soumission de Jaura et le genre de confirmation désirée, le Tribunal conclut que le responsable technique a agi de manière raisonnable en communiquant avec le représentant du Motel 6 afin de vérifier si l’établissement comportait une salle de conférence[27].
  4. Bien que Jaura ait ultérieurement fourni des renseignements supplémentaires à TPSGC affirmant avoir fait des « arrangements » avec le Motel 6 pour fournir une salle de conférence, ces renseignements ne figuraient pas dans sa soumission. Les éléments de preuve au dossier indiquent que le représentant du Motel 6 soit n’était pas au courant des « arrangements » lors de l’entretien avec le responsable technique, soit a omis de l’informer à cet effet.
  5. Fondamentalement, aucun élément de preuve n’a été présenté au Tribunal démontrant que les « arrangements », s’ils ont été effectués avant la date de clôture de l’appel d’offres, ont été communiqués à TPSGC avant le 8 février 2016, ce qui est après la date de clôture de l’appel d’offres et après que les résultats des évaluations aient été connus[28]. À ce titre, TPSGC ne détenait pas ces renseignements au moment de l’évaluation de la soumission de Jaura. En outre, si TPSGC avait tenu compte de cette information dans son évaluation, qui ne figurait pas dans la soumission de Jaura, cela aurait constitué une modification de la soumission, ce qui est interdit.
  6. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut qu’il n’y a aucune indication que TPSGC ne se soit pas appliqué à bien évaluer la soumission de Jaura, n’est pas tenu compte de renseignements cruciaux contenus dans sa soumission ou ait fondé son évaluation sur des critères non divulgués. Le responsable technique a agi raisonnablement non seulement en communiquant avec le représentant du Motel 6 directement, mais aussi en se fiant aux renseignements qu’il a obtenus. Par conséquent, le Tribunal ne substituera pas son jugement à celui de TPSGC et conclut que ce motif de plainte n’est pas fondé.

Question additionnelle

  1. Dans son RIF, TPSGC a exprimé certaines préoccupations quant à la conduite que Jaura aurait eue en ce qui concerne l’appel d’offres[29]. Jaura a nié ces allégations dans ses commentaires sur le RIF[30]. Le Tribunal ne considère pas que ces allégations soient pertinentes en ce qui a trait à l’espèce.

CONCLUSION

  1. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que la plainte n’est pas fondée.

FRAIS

  1. Aux termes de l’article 30.16 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal accorde à TPSGC le remboursement des frais raisonnables qu’il a engagés pour répondre à la plainte, ces frais devant être payés par Jaura. En conformité avec la Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure portant sur un marché public (la Ligne directrice), le Tribunal détermine provisoirement que le degré de complexité de la plainte correspond au degré 1, étant donné que l’appel d’offres ne concernait qu’un service de base et que la plainte ne portait que sur l’évaluation correcte d’un seul critère obligatoire, De plus, la procédure était simple et n’a pas comporté de questions complexes à résoudre.
  2. À ce titre, le Tribunal détermine provisoirement que le montant de l’indemnité est de 1 150 $. Si l’une ou l’autre des parties n’est pas d’accord en ce qui a trait à la détermination provisoire du degré de complexité ou du montant de l’indemnité, elle peut déposer des observations auprès du Tribunal, en conformité avec l’article 4.2 de la Ligne directrice. Il relève de la compétence du Tribunal de fixer le montant définitif de l’indemnité.

DÉCISION

  1. Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal détermine que la plainte n’est pas fondée.
 

[1].      L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.) [Loi sur le TCCE].

[2].      En réponse aux avis de plainte et d’enquête du Tribunal, TPSGC a indiqué qu’un quatrième contrat avait été adjugé au Rodeway Inn Suites. Pièce PR-2015-058-10 à la p. 2, vol. 1.

[3].      Pièce PR-2015-058-13, onglet 10, vol. 1.

[4].      D.O.R.S./93-602 [Règlement].

[5].      D.O.R.S./91-499.

[6].      Pièce PR-2015-058-13A à la p. 2, vol. 1.

[7].      Pièce PR-2015-058-01 à la p. 30, vol. 1.

[8].      Ibid.

[9].      Ibid. à la p. 12.

[10].    Ibid. à la p. 46; pièce PR-2015-058-18 au par. 12, vol. 1.

[11].    Article 5.1.1 de la DP.

[12].    Pièce PR-2015-058-18 a par. 21, vol. 1.

[13].    Comme mentionné ci-dessus, il semble qu’un contrat additionnel ait été adjugé à un quatrième soumissionnaire.

[14].    Pièce PR-2015-058-18 au par. 36, vol. 1.

[15].    18 juillet 1994, Gaz. C. 1995.I.1323, en ligne : Secrétariat du commerce intérieur <http://www.ait-aci.ca/agreement-on-internal-trade/?lang=fr>.

[16].    Accord révisé sur les marchés publics, en ligne : Organisation mondiale du commerce <http://www.wto.org/‌french/docs_f/legal_f/rev-gpr-94_01_f.htm> (entré en vigueur le 6 avril 2014).

[17].    Vireo Network Inc. c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (23 avril 2014), PR-2013-037 (TCCE) au par. 25; BRC Business Enterprises Ltd. c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (27 septembre 2010), PR-2010-012 (TCCE) au par. 43; Global Upholstery Co. Inc. c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (6 juillet 2009), PR-2008-052 (TCCE) aux par. 40-41.

[18].    Saskatchewan Polytechnic Institute c. Canada (Procureur général), 2015 CAF 16 (CanLII) au par. 7.

[19].    Excel Human Resources Inc. (faisant affaire sous le nom excelITR) c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (25 août 2006), PR-2005-058 (TCCE) au par. 30; Northern Lights Aerobatic Team, Inc. c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (7 septembre 2005), PR-2005-004 (TCCE) au par. 51; Marcomm Inc. (11 février 2004), PR-2003-051 (TCCE) au par. 10.

[20].    Pièce PR-2015-058-18 au par. 49, vol. 1.

[21].    1091847 Ontario Ltd. (24 novembre 2010), PR-2010-075 (TCCE) au par. 6; Paul Pollack Personnel Ltd. s/n The Pollack Group Canada (23 septembre 2013), PR-2013-016 (TCCE) au par. 28.

[22].    Pièce PR-2015-058-13, onglets 7, 9, vol. 1.

[23].    Pièce PR-2015-058-01 à la p. 12, vol. 1.

[24].    Comme le fait remarquer TPSGC, le droit de vérifier les renseignements qui figuraient dans une soumission était expressément énoncé dans les Instructions uniformisées, qui étaient incorporées par référence à la DP. Pièce PR‑2015-058-13A à la p. 9, vol. 1.

[25].    Pièce PR-2015-058-18 au par. 57, vol. 1.

[26].    Samson & Associates c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (13 avril 2015), PR‑2014-050 (TCCE) au par. 36; Le Groupe de traduction Masha Krupp ltée (25 août 2011), PR-2011-024 (TCCE) au par. 16; Info-Electronics H P Systems Inc. c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (2 août 2006), PR-2006-012 (TCCE).

[27].    Le Tribunal constate que TPSGC a communiquer avec tous les établissements proposés pour vérifier s’ils comportaient une salle de conférence. Pièce PR-2015-058-13A à la p. 2, vol. 1. À ce titre, il n’y a aucune indication que TPSGC ait fait une distinction en ce qui concerne la soumission de Jaura ou qu’il l’ait traité différemment.

[28].    Pièce PR-2015-058-01 aux pp. 44, 46, 48, vol. 1.

[29].    Pièce PR-2015-058-13A à la p. 11, vol. 1; pièce PR-2015-058-13, pièce jointe 4 à la p. 44, vol. 1.

[30].    Pièce PR-2015-058-18 au par. 23, vol. 1.