THE MASHA KRUPP TRANSLATION GROUP LTD.

THE MASHA KRUPP TRANSLATION GROUP LTD.
c.
AGENCE DU REVENU DU CANADA

Dossier no PR-2016-041

Décision rendue
le mercredi 15 mars 2017

Motifs rendus
le lundi 20 mars 2017

TABLE DES MATIÈRES

 

EU ÉGARD À une plainte déposée par The Masha Krupp Translation Group Ltd. aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.);

ET À LA SUITE D’une décision d’enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

ENTRE

THE MASHA KRUPP TRANSLATION GROUP LTD. Partie plaignante

ET

L’AGENCE DU REVENU DU CANADA Institution fédérale

DÉCISION

Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte déposée par The Masha Krupp Translation Group Ltd. est en partie fondée.

Aux termes des paragraphes 30.15(2) et (3) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur recommande, à titre de mesure corrective, que l’Agence du revenu du Canada lance dès que possible un nouvel appel d’offres pour le marché faisant l’objet de la plainte, conformément aux accords commerciaux applicables. Le Tribunal recommande également que CLS Lexi-Tech demeure le titulaire du contrat actuel jusqu’à ce que la procédure du nouvel appel d’offres soit terminée et qu’un nouveau contrat soit adjugé.

De plus, le Tribunal canadien du commerce extérieur recommande que soit versé à The Masha Krupp Translation Group Ltd. une indemnité pour perte d’opportunité d’un montant correspondant au profit que la partie plaignante aurait raisonnablement réalisé pendant la période où CLS Lexi-Tech était titulaire du contrat jusqu’à ce qu’un nouveau contrat soit adjugé, divisé par le nombre de soumissionnaires ayant satisfait aux critères obligatoires de l’appel d’offres.

Le montant de l’indemnité doit être négocié entre les parties. Les parties remettront au Tribunal canadien du commerce extérieur, dans les 40 jours suivant la date de la présente décision, un calendrier approximatif du déroulement de la procédure du nouvel appel d’offres ainsi qu’une date approximative pour l’achèvement des négociations. Si les parties parviennent à une entente sur le montant de l’indemnité, elles en aviseront le Tribunal canadien du commerce extérieur. Si les parties ne parviennent pas à une entente sur le montant de l’indemnité, elles pourront déposer des observations à cet effet auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur. Il relève de la compétence du Tribunal canadien du commerce extérieur de fixer le montant définitif de l’indemnité.

Chaque partie assumera ses frais.

Rose Ritcey
Rose Ritcey
Membre présidant

L’exposé des motifs suivra à une date ultérieure.

Membre du Tribunal : Rose Ritcey, membre présidant

Personnel de soutien : Jidé Afolabi, conseiller juridique
Kalyn Eadie, conseiller juridique

Partie plaignante : The Masha Krupp Translation Group Ltd.

Conseillers juridiques pour la partie plaignante : Ronald Caza
Alyssa Tomkins

Institution fédérale : Agence de revenu du Canada

Conseiller juridique pour l’institution fédérale : Julie Greenspoon

Partie intervenante : CLS Lexi-Tech

Conseillers juridiques pour la partie intervenante : Vincent DeRose
Jennifer Radford
Daniel Hohnstein

Veuillez adresser toutes les communications au :

Greffier
Secrétariat du Tribunal canadien du commerce extérieur
15e étage
333, avenue Laurier Ouest
Ottawa (Ontario) K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel : tcce-citt@tribunal.gc.ca

EXPOSÉ DES MOTIFS

  1. Le 31 octobre 2016, The Masha Krupp Translation Group Ltd. (MKTG) a déposé une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) en vertu du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur[1]. La plainte portait sur une demande de propositions (DP) (invitation no 1000329852) publiée par l’Agence du revenu du Canada (ARC) pour des services de traduction et de révision, en vue de l’attribution d’un contrat subséquent évalué à 35 millions de dollars échelonnés sur sept ans.
  2. MKTG se plaint que l’ARC a adjugé le contrat à un soumissionnaire non conforme, n’a pas communiqué avec les personnes qu’elle avait fournies en référence comme l’exigeait la DP et a évalué les soumissions en suivant un processus qui n’était pas conforme aux exigences de la DP et qui comportait un élément injuste de subjectivité. À titre de mesure corrective, MKTG demande que le contrat subséquent lui soit adjugé ou, subsidiairement, d’être indemnisée pour sa perte de profit; ou, subsidiairement encore, que les soumissions soient réévaluées ou qu’un nouvel appel d’offres relatif au contrat subséquent soit lancé.

DISPOSITIONS PERTINENTES DE LA DP

  1. Le 19 mai 2016, l’ARC a publié la DP, qui prenait fin le 28 juin 2016. Le site Web du gouvernement du Canada sur les approvisionnements, achatsetventes.gc.ca, indiquait clairement que la DP serait régie par les modalités de l’Accord sur le commerce intérieur[2].
  2. La DP exigeait la soumission de propositions techniques ainsi que de propositions financières. L’évaluation des propositions techniques exigeait, dans un premier temps, que les soumissions répondent à un ensemble de critères obligatoires et, dans un deuxième temps, qu’elles soient notées conformément à cinq critères cotés, pour ainsi donner lieu à une note totale pour le mérite technique. Les propositions financières allaient être évaluées uniquement pour les soumissions qui satisfaisaient à toutes les exigences des première et deuxième étapes[3].
  3. La partie 3 de la DP (Directives sur la présentation de la soumission) prévoit en partie ce qui suit :

    Section I :  Proposition technique (un exemplaire papier et une copie électronique)

    Dans leur soumission technique, les soumissionnaires devraient démontrer leur compréhension des exigences contenues dans la demande de soumissions et expliquer comment ils répondront à ces exigences.

    [Traduction]

  1. De plus, la partie 4 de la DP (Procédures d’évaluation et méthodes de sélection) prévoit en partie ce qui suit :

    Étape 4 – Méthode de sélection

    [...]

    1. Pour être déclarée recevable, une soumission doit :

    a. respecter toutes les exigences de la demande de soumissions; et

    b. satisfaire à tous les critères obligatoires; et

    c. obtenir le nombre minimal de 70 points exigés pour l’ensemble des critères d’évaluation techniques cotés. L’échelle de cotation compte 100 points.

    [...]

    3. La sélection sera faite en fonction du meilleur résultat global sur le plan du mérite technique et du prix. Une proportion de 50 % sera accordée au mérite technique et une proportion de 50% sera accordée au prix.

    [...]

    Étape 7 – Conditions préalables à l’attribution du contrat

    Le soumissionnaire recommandé aux fins de l’attribution d’un contrat doit respecter les exigences présentées à la partie 5 « Attestations et renseignements supplémentaires » et à la partie 6 « Exigences relatives à la sécurité, exigences financières et autres exigences » de la présente DP.

    [Traduction]

  1. De plus, la partie 6 de la DP (Exigences relatives à la sécurité, exigences financières et autres exigences) prévoit en partie ce qui suit :

    6.1 Exigences relatives à la sécurité

    1. Avant l’attribution d’un contrat, les conditions suivantes doivent être respectées :

    a) le soumissionnaire doit détenir une attestation de sécurité d’un organisme valable tel qu’indiqué à la partie 7 – Modèle de contrat;

    b) les individus proposés par le soumissionnaire qui doivent avoir accès à des renseignements ou à des biens de nature protégée ou classifiée ou à des établissements de travail dont l’accès est réglementé doivent posséder une attestation de sécurité tel qu’indiqué à la partie 7 – Clauses du contrat subséquent;

    [...]

    Appendice 1 : Critères d’évaluation obligatoires

    [...]

    1. Maturité de l’entreprise

    [...]

    Le soumissionnaire doit avoir exécuté trois projets de traduction volumineux au cours des cinq années précédant la date de clôture de la soumission. Chacun de ces projets doit entrer dans la catégorie de texte spécialisé (niveau 2) selon la description figurant au Tableau A3 de l’Annexe A.

    Le soumissionnaire doit fournir un résumé de chacun des projets, indiquant ce qui suit :

    • ministère/organisation;
    • compte de mots du document source;
    • brève description du texte;
    • date de début et date de fin du projet;
    • rôles et responsabilités de l’entrepreneur dans le projet de traduction;
    • références : noms des personnes-ressources, numéros de téléphone actuels et adresses courriel.

    2. Capacités de l’entreprise

    [...]

    Le soumissionnaire doit démontrer qu’il dispose d’au moins 25 traducteurs qualifiés à l’interne qui ont la capacité de traiter le volume de travail de l’ARC d’approximativement 70 000 mots par jour et compte tenu de la nature des textes de l’ARC (selon la description figurant au Tableau A3 de l’Annexe A)[4].

    [Nos italiques, traduction]

  1. L’appendice 2 de la partie 6 de la DP indique comment les cinq critères cotés seront évalués. Pour ce qui est du premier critère coté, c’est-à-dire la maturité de l’entreprise, les trois projets désignés au premier critère obligatoire « seront évalués en fonction de la satisfaction du client »[5] [traduction], comme l’indique la grille d’évaluation de l’appendice 2 :

    Critères d’évaluation

    Évaluation de la réponse du soumissionnaire

    1. Maturité de l’entreprise

    (Maximum de 18 points)

    Évaluation de projets – Trois projets de traduction présentés dans l’Appendice 1 : Critères d’évaluation obligatoires, à la section 1 : Maturité de l’entreprise, qui ont été exécutés par le soumissionnaire, seront évalués en fonction de la satisfaction du client.

    La satisfaction du client sera mesurée en fonction de l’échelle suivante :

    0 – service médiocre; retards dans les délais et piètre qualité.

    1 – très mauvais service, certains retards dans les délais et/ou piètre qualité.

    2 – service plutôt mauvais, respect des délais, mais piètre qualité.

    3 – service moyennement satisfaisant, respect des délais et qualité d’ensemble acceptable. Cependant, le processus lié aux mesures correctives était insatisfaisant.

    4 – service satisfaisant, respect des délais et assurance de la qualité.

    5 – service très satisfaisant, dépassant les attentes du client au chapitre des délais et de la qualité.

     

    Satisfaction du client – Qualité du travail et respect des délais de livraison

    (maximum de 6 points par projet)

    0 points – Les références du soumissionnaire mentionnent que les délais préétablis de livraison du projet n’ont pas été respectés et/ou font part de la piètre qualité des services de traduction (cote 0 ou 1 sur une échelle de 0 à 5).

    3 points – Les références du soumissionnaire mentionnent que les délais préétablis de livraison du projet ont été respectés, cependant les services de traduction étaient de piètre qualité (cote 2 sur une échelle de 0 à 5).

    4 points – Les références du soumissionnaire mentionnent que les délais préétablis de livraison du projet ont été respectés et que la qualité d’ensemble des services de traduction n’était pas entièrement satisfaisante mais acceptable. Toutefois, les mesures correctives n’étaient pas satisfaisantes (cote 3 sur une échelle de 0 à 5).

    5 points – Les références du soumissionnaire confirment le respect des délais de livraison du projet et la qualité satisfaisante des services de traduction (cote 4 sur une échelle de 0 à 5).

    6 points – Les références du soumissionnaire confirment le respect des délais de livraison du projet et l’excellente qualité des services de traduction. Le service a dépassé les attentes du client (cote 5 sur une échelle de 0 à 5).

    [Traduction]

  1. Enfin, le processus d’invitation permettait aux soumissionnaires de poser des questions, auxquelles l’ARC a fourni des réponses détaillées. Ces réponses ont pris la forme de modifications en vue de compléter les modalités de la DP. Une de ces réponses, celle de la question 7, précisait que les exigences de la DP ne pouvaient être remplies par un fournisseur de services extérieur ou des ressources indépendantes[6].

CONTEXTE DE LA PLAINTE

  1. MKTG a présenté sa soumission le 28 juin 2016.
  2. Le 21 septembre 2016, l’ARC a adjugé le contrat subséquent à CLS Lexi-tech Ltd. (CLS). L’ARC en a informé MKTG par courriel le 27 septembre 2016. De plus, le courriel indiquait que MKTG avait reçu un total 97,50 points, alors que CLS avait reçu un total de 98,43 points.
  3. Le 30 septembre 2016, par courriel, MKTG a informé l’autorité contractante que CLS avait communiqué avec l’une de ses traductrices afin de l’embaucher. Selon MKTG, cela démontrait que CLS n’avait pas le nombre requis de traducteurs qualifiés au moment de l’adjudication du contrat. MKTG a indiqué qu’elle présenterait une opposition formelle à l’adjudication du contrat à CLS.
  4. Le 4 octobre 2016, au moyen d’une lettre, MKTG s’est formellement opposée à l’adjudication du contrat à CLS, affirmant qu’il était « bien connu dans l’industrie de la traduction que le modèle d’entreprise de CLS fait appel à des traducteurs externes » [traduction] et que, par conséquent, CLS n’aurait pas pu satisfaire aux exigences de la DP qui portent sur le recours à des employés.
  5. À la suite de l’opposition de MKTG, l’ARC a tenu une réunion de compte rendu avec cette dernière le 11 octobre 2016.
  6. MKTG a indiqué que, durant la réunion de compte rendu, on l’a avisé qu’elle avait reçu une note parfaite de 100 relativement à sa proposition financière, qui a donné lieu à une note de 50 points – le maximum possible – pour cette partie de la DP. De plus, MKTG a été avisée qu’elle avait reçu la note de 95 sur 100 points relativement à sa proposition technique, qui a donné lieu à une note de 47,50 points. MKTG a été informée que 3 des 5 points qu’elle a perdus relativement à sa proposition technique se rapportaient au premier critère coté, la maturité de l’entreprise, pour lequel elle avait reçu une note de 15 sur 18 points[7].
  7. Selon MKTG, durant la réunion de compte rendu, un agent de l’ARC a indiqué que quatre évaluateurs avaient parlé directement à chacune des trois personnes qu’elle avait fournies en référence, mais a ensuite été corrigé par un deuxième agent de l’ARC, qui lui a indiqué que, en fait, trois évaluateurs avaient parlé à chacune des trois personnes fournies en référence[8].
  8. Lors de la réunion de compte rendu, MKTG a demandé une copie de sa grille d’évaluation, que l’ARC a refusé de lui fournir[9].
  9. MKTG a indiqué que, tout de suite après la réunion de compte rendu, elle a communiqué avec les trois personnes fournies en référence dans sa soumission, et deux d’entre elles ont indiqué que l’ARC n’avait jamais communiqué avec elles, alors que la troisième a indiqué n’avoir aucun souvenir d’avoir été contactée[10].
  10. Le 12 octobre 2016, MKTG a transmis une autre lettre d’opposition à l’ARC, dans laquelle elle demandait qu’on lui explique pourquoi les personnes fournies en référence avaient indiqué ne pas avoir été contactées ou n’avoir aucun souvenir d’avoir été contactées par l’ARC.
  11. Le 17 octobre 2016, au moyen d’une lettre, l’ARC a répondu à MKTG. L’ARC a affirmé que toutes les soumissions reçues avaient été évaluées conformément aux critères énumérés dans la DP, en fonction des renseignements présentés par les soumissionnaires, et qu’elle ne pouvait évaluer les soumissions en appliquant des critères qui n’étaient pas mentionnés dans l’invitation à soumissionner. De plus, l’ARC a fourni des renseignements détaillant la date et l’heure à laquelle les personnes fournies en référence par MKTG avaient été contactées, ainsi que le nombre et l’identité des évaluateurs qui avaient communiqué avec elles[11]. L’ARC a également écrit que chacune des personnes fournies en référence par MKTG s’est fait poser les questions énoncées à l’appendice 2 de la partie 6 de la DP, et que la soumission de MKTG avait ensuite été notée par l’équipe d’évaluation de l’ARC, dont la note technique finale était fondée sur les réponses données par les personnes fournies en référence[12].
  12. Le 31 octobre 2016, MKTG a déposé sa plainte auprès du Tribunal.
  13. Le 4 novembre 2016, le Tribunal a accepté d’enquêter sur la plainte de MKTG et a contraint l’ARC de lui fournir les coordonnées des personnes-ressources de CLS.
  14. Le 7 novembre 2016, l’ARC a fourni au Tribunal les coordonnées des personnes-ressources de CLS.
  15. Le 24 novembre 2016, le Tribunal a écrit à CLS pour l’informer de la plainte et pour lui donner l’occasion, conformément à l’article 30.17 de la Loi sur le TCCE, de solliciter le statut d’intervenante. CLS a demandé le statut d’intervenante le 25 novembre 2016 et le Tribunal le lui a octroyé le 28 novembre 2016.
  16. Le 29 novembre 2016, l’ARC a déposé son rapport de l’institution fédérale (RIF) auprès du Tribunal. Le RIF contenait un affidavit souscrit par l’un des évaluateurs de l’ARC, qui énonçait le processus d’évaluation suivi relativement à la DP et à la soumission de MKTG[13]. Elle a également fourni les grilles d’évaluation relatives aux soumissions de MKTG et de CLS[14].
  17. Le 30 novembre 2016, remarquant un retard à transférer la plainte à l’intervenante et agissant dans l’intérêt de l’équité procédurale, le Tribunal a prorogé le délai de MKTG et de CLS pour déposer les commentaires sur le RIF et, conformément à l’alinéa 12c) du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics[15], a prolongé le délai pour la publication de la décision à 135 jours à compter du dépôt de la plainte.
  18. Le 14 décembre 2016, CLS a déposé ses commentaires sur le RIF auprès du Tribunal.
  19. Le 19 décembre 2016, les commentaires publics et confidentiels de MKTG sur le RIF ont été déposés auprès du Tribunal et signifiés aux parties[16]. Les commentaires de MKTG sur le RIF comportaient des transcriptions du contre-interrogatoire de l’affiant dont l’affidavit était inclus dans le RIF[17].
  20. Le 20 décembre 2016, l’ARC a écrit au Tribunal pour dire que MKTG avait soulevé de nouveaux motifs de plainte dans ses commentaires sur le RIF, en particulier des motifs liés au processus d’évaluation et à l’attestation de sécurité des employés de CLS[18]. Par conséquent, l’ARC a demandé au Tribunal de ne pas tenir compte de ces motifs.
  21. Le 21 décembre 2016, CLS a écrit au Tribunal, essentiellement pour présenter les mêmes observations que l’ARC, à savoir que MKTG avait soulevé de nouveaux motifs de plainte dans ses commentaires sur le RIF, que le Tribunal devait refuser d’examiner[19].
  22. Le 23 décembre 2016, MKTG a répondu que l’ARC et CLS avaient mal interprété ses motifs de plainte initiaux et que ses commentaires sur le RIF ne comportaient pas de nouveaux motifs. MKTG a souligné que l’ARC ne s’était pas opposée aux questions liées à ces motifs durant le contre-interrogatoire d’un agent de l’ARC. De plus, MKTG a fait valoir que l’ARC ne pouvait s’opposer à ce qu’elle présente d’autres arguments fondés sur les renseignements figurant dans le RIF, notamment puisque l’ARC avait précédemment refusé de lui fournir la grille d’évaluation[20].
  23. Le 28 décembre 2016, l’ARC a encore une fois écrit au Tribunal, pour affirmer cette fois que les commentaires de MKTG concernant l’insuffisance de sa communication constituaient une nouvelle question en litige; elle a indiqué que l’ACI n’exige aucunement la tenue d’une réunion de compte rendu lorsqu’un contrat n’est pas adjugé à un soumissionnaire et a fait valoir que MKTG avait reçu des renseignements complets et précis quant à savoir pourquoi sa soumission avait été rejetée[21].
  24. Le 29 décembre 2016, le Tribunal a écrit aux parties pour indiquer que, en application du paragraphe 30.14(1) de la Loi sur le TCCE, il limiterait son étude à l’objet de la plainte déposée par MKTG et, par conséquent, il n’examinerait aucune observation supplémentaire sur la question de l’interprétation des motifs de plainte[22].

POSITIONS DES PARTIES

MKTG

  1. MKTG soutient qu’« [...] il est évident et bien connu dans l’industrie de la traduction que CLS Lexi-tech ne pouvait avoir satisfait aux exigences obligatoires de disposer de 25 traducteurs qualifiés à l’interne qui ont la capacité de traiter le travail de traduction de l’ARC conformément à la DP »[23] [traduction]. Selon MKTG, l’incapacité de CLS de satisfaire aux exigences obligatoires de la DP était « presque évidente au vu de la soumission »[24] [traduction]. De plus, MKTG affirme que, environ trois heures après avoir été avisée par l’ARC qu’elle avait obtenu le contrat, CLS a envoyé un courriel à l’une des traductrices principales de MKTG pour tenter de la convaincre de quitter son emploi au sein de MKTG[25].
  2. S’appuyant sur l’arrêt Tercon Contractors Ltd. c. Colombie-Britannique (Transports et Voiries)[26] de la Cour suprême du Canada, MKTG est d’avis que, pour l’ARC, « [...] avoir connaissance ou fermer les yeux intentionnellement mène aux mêmes violations et conséquences. Le fait que le soumissionnaire ait affirmé respecter les exigences n’est pas pertinent, puisque cela aurait pour effet de faire primer la forme sur le fond [...] »[27] [traduction]. Par conséquent, MKTG affirme que puisque l’ARC savait ou aurait dû savoir qu’elle adjugeait le contrat à un soumissionnaire non conforme, une telle action ou omission est contraire au paragraphe 506(6) de l’ACI, qui prévoit ce qui suit :

    Dans l’évaluation des offres, une Partie peut tenir compte non seulement du prix indiqué, mais également de la qualité, de la quantité, des coûts de transition, des modalités de livraison, du service offert, de la capacité du fournisseur de satisfaire aux conditions du marché public et de tout autre critère se rapportant directement au marché public et compatible avec l’article 504[28]. Les documents d’appel d’offres doivent indiquer clairement les conditions du marché public, les critères qui seront appliqués dans l’évaluation des soumissions et les méthodes de pondération et d’évaluation des critères.

  1. MKTG soutient également qu’il est « très étrange » [traduction] qu’aucune des trois personnes qu’elle avait fournies en référence n’ait été en mesure de confirmer que l’ARC avait communiqué avec elle. Comme l’indique MKTG, « il me semble que, logiquement, une entrevue structurée pour un contrat important serait quelque chose dont une personne se souviendrait habituellement »[29] [traduction]. Comme l’ARC n’a pas voulu donner à MKTG les notes des évaluateurs relativement à sa soumission, cette dernière fait valoir qu’une enquête était nécessaire pour évaluer le témoignage des trois personnes fournies en référence. MKTG se dit également préoccupée par le fait que l’ARC pourrait avoir subséquemment tenté d’influencer indûment le point de vue des personnes fournies en référence.
  2. De plus, MKTG affirme que « sans égard à la question de savoir si l’ARC a communiqué ou non avec les personnes fournies en référence au moment des faits » [traduction], l’ARC a appliqué les critères d’évaluation d’une manière subjective qui était incompatible avec les critères énoncés dans la DP, ce qui porte à croire que les soumissionnaires n’ont pas été traités également[30]. Selon MKTG, le « [...] processus qui aurait été suivi en l’espèce laisse place à l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire déraisonnable ou discriminatoire de la part des évaluateurs »[31] [traduction].
  3. MKTG renvoie à la lettre du 17 octobre 2016 de l’ARC, dans laquelle il est indiqué que les évaluateurs, et non les personnes fournies en référence par MKTG, ont noté le travail de MKTG relativement aux trois projets de traduction[32]. De plus, MKTG fait référence au fait que, à deux reprises, l’ARC a corrigé ses explications concernant le nombre et l’identité des évaluateurs qui avaient communiqué avec les personnes fournies en référence par MKTG[33]. MKTG souligne là encore que l’ARC lui a refusé l’accès aux notes des évaluateurs concernant sa soumission, ce qui aurait permis d’examiner le processus d’évaluation suivi par l’ARC[34].
  4. Dans ses commentaires sur le RIF, MKTG a soulevé un quatrième motif de plainte, à savoir que CLS ne respectait pas les exigences de la DP en ce que sa soumission ne comprenait pas de renseignements sur la façon dont elle satisferait à l’exigence énoncée à la partie 6 de la DP avant l’adjudication du contrat subséquent. Le Tribunal souligne que la date la plus récente à laquelle MKTG aurait pu être au courant de ce motif de plainte est le 30 novembre 2016, soit la date de la transmission de la version confidentielle du RIF de l’ARC. Conformément à l’article 6 du Règlement, il incombait à MKTG de soulever le motif de plainte dans les dix jours ouvrables suivant cette date; en l’occurrence, au plus tard le 14 décembre 2016. Comme le motif de plainte a été soulevé le 19 décembre 2016, le Tribunal estime que ce motif n’a pas été présenté en temps opportun[35].

Agence du revenu du Canada

  1. Selon l’ARC, MKTG n’a présenté aucun élément de preuve à l’appui de sa prétention selon laquelle il est évident et bien connu dans l’industrie de la traduction que CLS ne pouvait avoir satisfait à l’exigence obligatoire de la DP de disposer d’au moins 25 traducteurs qualifiés à l’interne[36]. De plus, l’ARC fait valoir qu’une jurisprudence bien établie appuie la proposition qu’une institution fédérale est habilitée à se fonder sur les renseignements figurant dans les propositions soumises[37]. De plus, l’ARC renvoie à la partie 4.1 de la DP, qui prévoit en partie ce qui suit :

    [l]es soumissionnaires ne devraient pas supposer que l’équipe d’évaluation connaît nécessairement l’expérience et les capacités du soumissionnaire ou de toute ressource proposée; toute expérience pertinente doit être démontrée dans la proposition écrite du soumissionnaire.

  1. En ce qui concerne la prétention de MKTG selon laquelle CLS a tenté de convaincre l’une de ses traductrices principales de quitter son emploi au sein de MKTG, l’ARC souligne que le courriel envoyé par CLS – par l’intermédiaire du site de réseautage professionnel LinkedIn – ne précisait aucun projet en particulier, ne décrivait pas les besoins de CLS et ne demandait pas non plus de curriculum vitæ. Pour ces motifs, l’ARC soutient que le courriel constitue de la simple spéculation plutôt qu’une preuve d’incitation[38].
  2. De plus, s’appuyant sur la jurisprudence du Tribunal, l’ARC est d’avis que tout renseignement matériel porté à son attention après l’attribution du contrat subséquent – comme les renseignements concernant la non-conformité alléguée de CLS – est un renseignement qui excède la portée de la « procédure des marchés publics » tel qu’elle est définie à l’article 30.11 de la Loi sur le TCCE ainsi qu’au paragraphe 514(2) de l’ACI et, par conséquent, est un renseignement lié à l’administration du contrat, qui outrepasse le mandat du Tribunal[39].
  3. En ce qui a trait à la prétention selon laquelle les évaluateurs de l’ARC n’ont pas procédé à une vérification des références, l’ARC a présenté de la correspondance par courriel démontrant que ses évaluateurs avaient effectué une vérification des références. L’ARC a également présenté des lettres de la part des trois personnes fournies en référence par MKTG, dans lesquelles chacune, essentiellement après mûre réflexion, se souvient qu’on ait communiqué avec elle dans le cadre de la vérification des références[40]. L’ARC signale que MKTG était au courant des lettres d’au moins deux de ses personnes fournies en référence avant le dépôt de sa plainte, mais qu’elle ne les avait pas incluses dans sa plainte[41].

CLS

  1. Dans ses commentaires sur le RIF, CLS a repris la position adoptée par l’ARC, à savoir que la plainte de MKTG concernait uniquement les deux motifs de plainte, soit que l’ARC n’a pas communiqué avec les personnes fournies en référence par MKTG et que CLS ne respecte pas les exigences de la DP.
  2. En ce qui concerne le premier motif, CLS a répété les observations formulées par l’ARC – soit qu’il existe diverses lettres qui permettent de conclure que les personnes fournies en référence par MKTG ont non seulement été contactées, mais qu’elles se rappellent également avoir été contactées, et que MKTG était au courant de l’existence de ces lettres avant le dépôt de sa plainte.
  3. Pour ce qui est du deuxième motif, CLS a fourni des renseignements détaillés concernant le nombre de traducteurs à son service. De plus, CLS souligne que le nombre de traducteurs employés qu’elle a proposé dans sa soumission, qui faisait partie de la version confidentielle du RIF de l’ARC, était considérablement supérieur aux 25 requis par la DP. À l’appui de ses affirmations, CLS a fourni un affidavit souscrit par l’un de ses gestionnaires principaux et, de plus, a indiqué au Tribunal qu’elle serait disposée à fournir des copies des contrats de travail écrits des traducteurs proposés dans sa soumission.
  4. En réponse à la prétention de MKTG selon laquelle CLS a tenté d’inciter l’une de ses traductrices principales à quitter son emploi au sein de MKTG, CLS a indiqué que ses pratiques d’embauche ne ciblent généralement pas des personnes précises. En fait, selon CLS, un avis est publié sur divers sites, dont LinkedIn, et les candidats intéressés sont ensuite invités à présenter une déclaration d’intérêt détaillée.

ANALYSE DU TRIBUNAL

Interprétation des motifs de plainte

  1. Compte tenu des observations des parties sur ce que constituent les motifs de plainte dans la présente enquête, avant d’effectuer son analyse de la plainte elle-même, le Tribunal doit d’abord déterminer quels sont les motifs de plainte.
  2. Toutes les parties conviennent que la plainte de MKTG comporte au moins deux motifs, à savoir que l’ARC a adjugé le contrat à un soumissionnaire non conforme et qu’elle n’a pas communiqué avec les personnes fournies en référence par MKTG. Le Tribunal est d’accord pour dire que ces motifs sont valides et qu’il les examinera plus loin dans sa décision.
  3. Toutefois, comme nous l’avons déjà indiqué, l’ARC et CLS ont toutes deux affirmé que MKTG avait présenté de nouveaux motifs de plainte dans ses commentaires sur le RIF et que le Tribunal ne devrait pas tenir compte de ces motifs.
  4. L’ARC s’est fondée sur la décision du Tribunal dans les affaires Lanthier Bakery Ltd. c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux[42] et Storeimage c. Musée canadien de la nature[43]. Selon l’ARC, dans ces décisions, le Tribunal a bien expliqué que les plaignants ne peuvent pas modifier l’objet d’une plainte ou y faire des ajouts après que le Tribunal a décidé d’enquêter. À cet égard, l’ARC a fait valoir que la plainte de MKTG, telle qu’elle a été déposée, ne contient que deux motifs : le fait que CLS ne pouvait avoir satisfait aux exigences de la DP et le fait que l’ARC n’a pas communiqué avec les personnes fournies en référence par MKTG[44]. CLS a présenté les mêmes arguments dans ses observations[45].
  5. En réponse à ces arguments, MKTG a souligné à quel endroit dans sa plainte elle avait soulevé la question du caractère subjectif de l’évaluation[46]. MKTG a également fait valoir que les affaires Lanthier et Storeimage se distinguent de la présente affaire, car dans le premier cas le plaignant a invoqué la violation d’un accord commercial distinct et dans le deuxième cas le plaignant a formulé certaines allégations relativement à une partie distincte de la proposition en cause. En outre, MKTG a soutenu qu’elle avait le droit de soulever de nouveaux arguments à l’appui des motifs existants de sa plainte reposant sur des éléments de preuve dont elle a eu connaissance dans le RIF, surtout compte tenu du fait que certains de ces éléments de preuve étaient les feuilles d’évaluation la concernant, qu’on aurait à tort refusé de lui communiquer lors de la réunion de compte rendu[47].
  6. À la lecture de la plainte de MKTG, le Tribunal est d’avis que la question de savoir si l’ARC a suivi un processus subjectif pour évaluer les soumissions est un motif valide, car MKTG l’a mentionné clairement dans sa plainte. De fait, ce motif de plainte est soulevé aux paragraphes 62 à 72 de la plainte[48], où MKTG a expliqué, en parlant de l’évaluation du critère coté pour les références liées à la maturité de l’entreprise, que « les renseignements limités fournis [par l’ARC] jusqu’à maintenant sont suffisants pour faire craindre que les critères énoncés dans la DP [n’]ont [pas] été respectés » [traduction] et que « la nature subjective de l’approche adoptée par l’ARC à l’égard du critère R1 fait craindre que les soumissionnaires n’ont pas été traités sur un pied d’égalité »[49] [traduction].
  7. Le Tribunal fait remarquer que, dans ses observations sur le RIF, MKTG a été en mesure de corroborer ce motif de plainte en se fondant sur les renseignements divulgués dans le RIF de l’ARC. Bien que l’article 7 du Règlement exige que le plaignant présente des faits suffisants pour établir une preuve prima facie[50], les renseignements recueillis pendant l’enquête peuvent servir d’éléments de preuve additionnels. Cette possibilité revêt une importance capitale, car le processus d’examen des marchés publics est un processus d’établissement des faits en soi.
  8. En outre, le Tribunal fait remarquer que certains des renseignements utilisés par MKTG pour fournir une corroboration supplémentaire se trouvaient dans les notes d’évaluation relatives à sa soumission et auraient dû, pour des raisons d’équité et de transparence, lui être transmis lors du compte rendu. Bien que l’ARC ait raison d’affirmer que l’ACI n’exige pas la tenue d’un compte rendu, le Tribunal souligne que la clause 1.4 de la DP prévoit que les soumissionnaires peuvent demander un compte rendu. Par ailleurs, sur le portail du gouvernement du Canada à l’intention des soumissionnaires éventuels, achatsetventes.gc.ca, il est indiqué ce qui suit : « En conformité avec la Politique sur les marchés du Conseil du Trésor et [l]es divers accords commerciaux, tout fournisseur peut demander un compte rendu »[51]. La clause 10.8.21 de la Politique sur les marchés du Conseil du Trésor est ainsi libellée :

    On devrait fournir des explications aux soumissionnaires non choisis qui le demandent. Les explications devraient en principe comprendre une description des facteurs et critères utilisés dans l’évaluation, et on doit respecter le droit de chaque soumissionnaire au caractère confidentiel de tel ou tel renseignement.

  1. La question du caractère confidentiel ne s’applique pas dans le cas où le soumissionnaire demande des documents – par exemple les notes des évaluateurs – qui se rapportent à l’évaluation de sa propre soumission. En outre, on ne peut pas supposer que le critère relatif aux « facteurs et critères » est rempli par la simple réitération, lors de la réunion de compte rendu, des critères énoncés dans la DP. Le compte rendu doit plutôt servir à rassurer les soumissionnaires non retenus au sujet de l’intégrité de la procédure de passation du marché public.

La proposition de CLS n’était pas conforme

  1. Pour ce qui est du premier motif de plainte, le Tribunal convient avec l’ARC que l’affirmation de MKTG – selon laquelle il est évident et bien connu dans l’industrie de la traduction que CLS ne pouvait avoir satisfait aux exigences obligatoires de la DP – n’est pas étayée. Par comparaison, CLS a fourni des renseignements détaillés et convaincants au sujet de sa capacité à répondre aux exigences obligatoires énoncées dans la DP.
  2. De plus, le Tribunal a toujours statué que les institutions fédérales ont le droit de se fier sur les renseignements fournis dans les soumissions[52]. Contrairement à la prétention de MKTG, cette façon de faire ne contrevient pas au paragraphe 506(6) de l’ACI. Cette disposition prévoit qu’une institution fédérale « peut » tenir compte de la capacité du fournisseur de satisfaire aux conditions du marché public, mais elle établit une distinction entre ce qui est permis et ce qui est obligatoire, en prévoyant par la suite que les documents d’appel d’offres « doivent » indiquer clairement les critères qui seront appliqués dans l’évaluation des soumissions et les méthodes de pondération et d’évaluation des critères.
  3. Le Tribunal ne souscrit pas à l’argument selon lequel l’affaire Tercon s’applique en l’espèce. Dans cette affaire, l’entité acheteuse « [...] s’est activement employée à gommer [la réalité] »[53]. Aucun comportement de ce genre n’a eu lieu en l’espèce.
  4. Enfin, on n’a présenté au Tribunal aucun élément de preuve lui permettant de conclure à l’existence d’un lien entre le fait que CLS a communiqué avec une employée de MKTG et la violation des accords commerciaux.
  5. Le Tribunal conclut que ce motif de plainte n’est pas fondé.

L’ARC n’a pas communiqué avec les personnes fournies en référence par MKTG

  1. Pour ce qui est du deuxième motif de plainte, le Tribunal fait remarquer que l’allégation selon laquelle l’ARC aurait omis de communiquer avec les personnes fournies en référence a été réfutée par l’ARC et, en fait, retirée par MKTG. Dans ses observations sur le RIF, MKTG a expliqué qu’elle avait inclus cette allégation dans sa plainte parce qu’elle n’arrivait pas à croire à une simple coïncidence, étant donné que toutes les personnes fournies en référence avaient au départ été incapables de confirmer qu’on avait communiqué avec elles. Par contre, MKTG a par la suite changé d’avis. MKTG a expliqué qu’elle craignait que l’ARC ait indûment influencé la preuve des personnes fournies en référence et a noté qu’elle l’avait indiqué au paragraphe 53 de sa plainte. Après le début de l’enquête, MKTG a parlé aux personnes qu’elle avait fournies en référence, et elle est maintenant convaincue que leur incapacité à se souvenir qu’on avait communiqué avec elles était effectivement une coïncidence[54].
  2. Le Tribunal conclut que ce motif de plainte n’est pas fondé.

Le processus d’évaluation était subjectif

  1. Pour ce qui est du troisième motif de plainte, le Tribunal a toujours affirmé que les institutions fédérales ont la responsabilité d’évaluer si les soumissionnaires satisfont aux exigences obligatoires de l’appel d’offres et que l’évaluation doit être faite de façon rigoureuse et complète[55]. Lorsqu’il examine la question de savoir si cette norme a été respectée, le Tribunal applique le critère du caractère raisonnable, et il fait preuve de beaucoup de déférence à l’égard des évaluateurs en l’absence d’une démonstration que leur évaluation n’était pas raisonnable. Une évaluation n’est pas raisonnable lorsque les évaluateurs ne se sont pas appliqués, n’ont pas tenu compte de renseignements cruciaux fournis dans une soumission, ont donné une interprétation erronée de la portée d’une exigence, ont utilisé des critères non divulgués ou n’ont par ailleurs pas agi d’une manière équitable du point de vue de la procédure[56].
  2. MKTG a fait valoir que l’ARC a introduit un élément de subjectivité dans le processus d’évaluation et qu’elle s’est par conséquent fondée sur des critères d’évaluation non divulgués pour vérifier les références[57]. Le Tribunal conclut que l’ARC a de fait procédé à la vérification des références d’une manière qui n’était pas conforme aux critères d’évaluation énoncés.
  3. La preuve contenue dans l’affidavit déposé à titre d’annexe 1 du RIF de l’ARC prévoit ce qui suit :

    4. Chaque évaluateur a rempli une « grille de notation individuelle » [...] Les évaluateurs se sont par la suite rencontrés et, en se servant de leurs grilles de notation individuelle, ils ont rempli une « grille d’évaluation consensuelle ».

    [...]

    8. [...] Nous avons parlé à [une personne fournie en référence] et à son collègue [une autre personne], de l’ARC, le 6 juillet 2016, vers 9 h 30[58] [...]

    9. [...] Quand la personne fournie en référence a semblé hésiter entre deux notes, nous lui avons offert l’option d’accorder un demi-point (p. ex. 3.5 ou 4.5). Dans les trois cas, les personnes fournies en référence par Masha Krupp lui ont accordé 4 sur 5 [...]

    [Nos italiques, traduction]

  1. Le Tribunal conclut que cet élément de preuve établit que les évaluateurs de l’ARC ont agi de manière irrégulière lorsqu’ils ont permis à une personne qui n’avait pas été fournie en référence de participer à l’exercice[59]. En outre, les évaluateurs ont compromis l’intégrité de l’exercice en offrant la possibilité d’accorder des demi-points dans le contexte de la vérification des références, alors que cette option n’était manifestement pas prévue dans la DP. En fait, les grilles d’évaluation montrent que CLS a reçu un demi‑point, mais pas MKTG[60]. En outre, il y a des éléments de preuve contradictoires en ce qui a trait à la question de savoir si toutes les personnes fournies en référence ont eu la possibilité d’accorder des demi‑points[61].
  2. Le Tribunal conclut que le fait d’accorder des demi-points a mené à une conversion inacceptable de la cote de satisfaction numérique des personnes fournies en référence (sur une échelle de 0 à 5) en résultat final (sur une échelle de 0 à 6). Ainsi, le pouvoir discrétionnaire subjectif des évaluateurs a servi à en arriver à un résultat final.
  3. Toutes ces actions ont compromis l’évaluation de façon irréparable.
  4. Ainsi, le Tribunal conclut que le troisième motif de plainte de MKTG est fondé.

MESURE CORRECTIVE

  1. Ayant conclu que la plainte est fondée en partie, le Tribunal doit maintenant recommander la mesure corrective appropriée.
  2. Pour recommander la mesure corrective appropriée, le Tribunal doit tenir compte de toutes les circonstances concernant un marché public, conformément au paragraphe 30.15(3) de la Loi sur le TCCE. Cela exige de tenir compte de la gravité des irrégularités qu’il a constatées dans la procédure de passation du marché public, de l’ampleur du préjudice causé au plaignant, de l’ampleur du préjudice causé à l’intégrité ou à l’efficacité du mécanisme d’adjudication, de la bonne foi des parties et du degré d’exécution du contrat.
  3. Comme il en a été question précédemment, MKTG a demandé, à titre de mesure corrective, que le contrat adjugé à CLS soit résilié et qu’il lui soit adjugé. Subsidiairement, MKTG a demandé d’être indemnisée pour sa perte de profit pendant la durée du contrat. Également à titre subsidiaire, MKTG a demandé qu’un nouvel appel d’offres soit lancé ou que les soumissions soient évaluées de nouveau.
  4. L’ARC et CLS n’ont pas présenté d’observations sur la question de la mesure corrective.
  5. Le Tribunal ne peut pas accepter l’argument de MKTG selon lequel le contrat lui aurait été adjugé si la vérification des références avait été effectuée correctement. L’incertitude introduite dans le processus de notation par l’approche subjective adoptée par l’ARC pour vérifier les références fait en sorte qu’il est impossible pour le Tribunal de conclure que MKTG se serait effectivement vu accorder plus de points que CLS[62]. Par conséquent, le Tribunal ne peut pas adjuger le contrat à MKTG.
  6. Par contre, le Tribunal estime que les erreurs commises par l’ARC lors de la vérification des références sont graves. Le Tribunal est convaincu qu’aucun élément de preuve ne permet de conclure que les évaluateurs ont agi de façon réfléchie ou avec partialité. Ils semblent plutôt avoir pris certaines libertés inadmissibles dans l’exécution de la tâche qui leur a été confiée. Chose certaine, les évaluateurs auraient peut-être bénéficié de directives plus précises à l’égard de cette étape du processus d’évaluation. Le Tribunal souligne que la vérification des références doit être effectuée en portant la même attention à l’équité et en adhérant aux mêmes formalités que lors de toutes les autres étapes du processus d’évaluation. Puisque cela n’a pas été fait en l’espèce, le Tribunal ne peut qu’insister sur le fait que l’intégrité du processus d’évaluation dans son ensemble a été compromise.
  7. En conséquence, le Tribunal recommande que l’ARC lance dès qu’il sera pratiquement possible de le faire un nouvel appel d’offres pour le marché public faisant l’objet de la plainte, conformément aux accords commerciaux applicables. Puisque la durée totale du contrat, y compris les périodes d’option irrévocables, est de sept ans, le Tribunal est d’avis que le contrat n’a pas été substantiellement exécuté et que sa résiliation ne causera aucun préjudice indu à CLS.
  8. Dans le but de veiller à ce que les opérations de l’ARC ne soient pas perturbées – les services de traduction étant nécessaires aux activités quotidiennes de tout ministère – le Tribunal recommande également que CLS demeure le titulaire du contrat actuel jusqu’à ce que la procédure du nouvel appel d’offres soit terminée et qu’un nouveau contrat soit adjugé.
  9. Étant donné que CLS demeurera titulaire du contrat pendant un certain temps, même si celui-ci a été adjugé en violation des accords commerciaux, le Tribunal recommande également que MKTG reçoive une indemnité. Cette recommandation concorde avec le principe fondamental, énoncé dans les Lignes directrices sur les indemnités dans une procédure portant sur un marché public, selon lequel le Tribunal tentera, dans la mesure qu’il estime indiquée dans les circonstances et compte tenu de toute autre mesure corrective qu’il a recommandée, de placer la partie plaignante dans la position où cette dernière se serait trouvée, n’eût été l’infraction du gouvernement[63].
  10. Une indemnité peut être attribuée pour perte de profit ou perte d’occasion[64]. Bien que MKTG ait demandé une indemnité pour perte de profit, le Tribunal n’accorde généralement ce type d’indemnité que lorsqu’il est clair que le contrat aurait été adjugé au plaignant, n’eût été la violation des accords commerciaux par l’institution fédérale[65]. En l’espèce, étant donné l’incertitude introduite dans le processus de notation par l’approche adoptée par l’ARC pour vérifier les références, le Tribunal ne peut pas conclure que le contrat aurait été adjugé à MKTG.
  11. Lorsque le Tribunal n’est pas en mesure de conclure que le contrat spécifique aurait été attribué au plaignant, mais qu’il conclut que le plaignant a été privé de sa capacité de participer de façon active ou significative à la procédure de passation du marché public en raison de la violation commise par le l’institution fédérale, le Tribunal peut recommander que le plaignant soit indemnisé pour sa perte d’occasion[66]. En l’espèce, il se peut que MKTG ait remporté le contrat, n’eût été la violation des accords commerciaux commise par le gouvernement. L’approche adoptée par l’ARC pour évaluer les références a effectivement privé MKTG de l’occasion de profiter du contrat. En conséquence, MKTG devrait être indemnisée pour la perte d’occasion de profiter du contrat pendant la période où CLS exécute le contrat, c’est-à-dire de la date de l’attribution du contrat jusqu’à la fin du nouveau processus d’appel d’offres.
  12. Également à titre subsidiaire, MKTG a demandé au Tribunal de recommander que les soumissions soient réévaluées. Le Tribunal est d’avis que cette mesure corrective n’est pas indiquée en l’espèce. Premièrement, les notes des évaluateurs ne contiennent pas suffisamment de renseignements au sujet des discussions qu’ils ont eues avec les personnes fournies en référence pour permettre à l’ARC de réévaluer correctement les soumissions en fonction des critères énoncés dans la DP. Deuxièmement, dans un cas, les notes de l’évaluateur portent sur des discussions tenues avec une personne fournie en référence et une autre personne qui n’avait pas été fournie en référence. Il est impossible de déterminer quelle note MKTG aurait reçue si seulement la personne fournie en référence avait participé à la discussion.
  13. Pour calculer l’indemnité pour perte d’occasion, le Tribunal divise les profits que le plaignant aurait réalisés en vertu du contrat par le nombre de soumissionnaires éventuels. L’objectif consiste à quantifier la valeur de l’occasion perdue en raison de la violation commise par le gouvernement, et non d’accorder un gain fortuit au plaignant.
  14. En l’espèce, seulement deux soumissionnaires (MKTG et CLS) ont présenté des soumissions recevables. Un troisième soumissionnaire aurait présenté une soumission irrecevable[67]. Compte tenu de la preuve au dossier, le Tribunal n’est pas en mesure de déterminer si le troisième soumissionnaire a été éliminé en raison de son défaut de satisfaire aux critères obligatoires ou de son défaut d’atteindre la note de passage de 70 % à l’égard des critères cotés. Si c’est le deuxième cas, il est possible que ce troisième soumissionnaire ait lui aussi été touché par les irrégularités dans le processus de vérification des références.
  15. En conséquence, MKTG devrait recevoir une indemnité pour perte d’occasion correspondant au profit qu’elle aurait raisonnablement pu réaliser pendant la période où CLS détient le contrat actuel, c’est‑à‑dire jusqu’à ce que le nouveau processus d’appel d’offres soit terminé, divisé par le nombre de soumissionnaires ayant présenté des soumissions conformes aux critères obligatoires.
  16. Le montant de l’indemnité devra être négocié par les parties. Le Tribunal reconnaît que les parties ne réussiront peut-être pas à s’entendre sur le montant de l’indemnité avant que le nouveau processus d’appel d’offres soit terminé, puisque la période pendant laquelle CLS exécute le contrat pourrait avoir une incidence sur le montant. Néanmoins, le Tribunal désire être tenu au courant des progrès réalisés par les parties dans le cadre des négociations. Par conséquent, le Tribunal demande aux parties de lui remettre, dans les 40 jours de la date de la présente décision, un calendrier approximatif du temps requis pour lancer un nouvel appel d’offres et conclure les négociations. Si les parties parviennent à une entente sur le montant de l’indemnité, elles en informeront le Tribunal. Si elles ne parviennent pas à une entente sur le montant de l’indemnité qui convient, elles pourront présenter des observations à cet effet au Tribunal.

FRAIS

  1. MKTG a demandé le remboursement des frais qu’elle a engagés pour la préparation de sa soumission et le dépôt de sa plainte. L’ARC a fait valoir que la plainte de MKTG était frivole et trompeuse. Par conséquent, elle a réclamé ses frais liés à la plainte au-delà du niveau généralement accordé par le Tribunal.
  2. Pour ce qui est de la demande présentée par MKTG en vue du remboursement des frais qu’elle a engagés pour la préparation de sa soumission, le Tribunal a déjà statué que ces frais ne sont généralement pas remboursés si le versement d’une indemnité pour perte de profit ou perte d’occasion est recommandé, car cela reviendrait à indemniser le plaignant deux fois[68]. Le Tribunal ne voit pas de circonstances particulières en l’espèce qui pourraient justifier le remboursement des frais engagés par MKTG pour la préparation de sa soumission. En outre, MKTG pourra probablement réutiliser une bonne partie de sa soumission lorsqu’un nouvel appel d’offres sera lancé.
  3. Pour ce qui est des demandes présentées par les parties en vue du remboursement des frais liés à la plainte, le Tribunal fait remarquer que la plainte est fondée en partie seulement. Par conséquent, les deux parties auraient normalement le droit de recouvrer une partie de leurs frais. Par contre, les deux parties ont adopté une conduite qui a compliqué considérablement et inutilement l’instance.
  4. Comme on l’a mentionné dans la section sur l’interprétation des motifs de plainte, la décision de l’ARC de ne pas remettre à MKTG, lors du compte rendu, les grilles d’évaluation la concernant et de les communiquer seulement au moment du dépôt du RIF, a privé MKTG de la capacité de formuler des arguments complets dans le cadre de la plainte et a compliqué l’instance, car le Tribunal a dû se pencher sur la question de savoir si MKTG avait soulevé de nouveaux motifs de plainte.
  5. Par ailleurs, il ressort clairement du dossier que MKTG savait pertinemment, avant le dépôt de sa plainte, que l’ARC avait en fait communiqué avec deux des trois personnes avec qui elle alléguait que l’ARC n’avait pas communiqué[69]. Bien que le Tribunal accepte que la plainte de MKTG fondée sur ce motif n’était pas frivole ni vexatoire, car MKTG craignait que l’ARC ait indûment influencé les souvenirs des personnes fournies en référence, la correspondance provenant de ces personnes et indiquant qu’elles se souvenaient que l’ARC avait communiqué avec elles aurait dû être communiquée au Tribunal dans la plainte.
  6. En conséquence, compte tenu de la conduite des parties, le Tribunal n’accorde aucun frais à ni l’une ni l’autre des parties.

DÉCISION DU TRIBUNAL

  1. Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal détermine que la plainte déposée par MKTG est en partie fondée.
  2. Aux termes des paragraphes 30.15(2) et (3) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal recommande, à titre de mesure corrective, que l’ARC lance dès que possible un nouvel appel d’offres pour le marché faisant l’objet de la plainte, conformément aux accords commerciaux applicables. Le Tribunal recommande également que CLS demeure le titulaire du contrat actuel jusqu’à ce que la procédure du nouvel appel d’offres soit terminée et qu’un nouveau contrat soit adjugé.
  3. De plus, le Tribunal recommande que soit versée à MKTG une indemnité pour perte d’occasion d’un montant correspondant au profit que la partie plaignante aurait raisonnablement réalisé pendant la période où CLS était titulaire du contrat jusqu’à ce qu’un nouveau contrat soit adjugé, divisé par le nombre de soumissionnaires ayant satisfait aux critères obligatoires de l’appel d’offres.
  4. Le montant de l’indemnité doit être négocié entre les parties. Les parties remettront au Tribunal, dans les 40 jours suivant la date de la présente décision, un calendrier approximatif du déroulement de la procédure du nouvel appel d’offres ainsi qu’une date approximative pour l’achèvement des négociations. Si les parties parviennent à une entente sur le montant de l’indemnité, elles en aviseront le Tribunal. Si les parties ne parviennent pas à une entente sur le montant de l’indemnité, elles pourront déposer des observations à cet effet auprès du Tribunal. Il relève de la compétence du Tribunal de fixer le montant définitif de l’indemnité.
  5. Chaque partie assumera ses frais.
 

[1].      L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.) [Loi sur le TCCE].

[2].      18 juillet 1994, Gaz. C. 1995.I.1323, en ligne : Secrétariat du commerce intérieur <http://www.ait-aci.ca/‌agreement-on-internal-trade/?lang=fr> [ACI].

[3].      Pièce PR-2016-041-01, pièce 3 à la p. 11, vol 1.

[4].      Le tableau A3 de l’annexe A sépare les textes de l’ARC en deux grands niveaux pour les besoins des services de traduction et de révision, dont les textes de niveau 1 sont classés comme des textes portant sur l’« administration générale et [les] opérations » et comprennent notamment du matériel de formation, et les textes de niveau 2 sont classés comme des textes « spécialisés » et comprennent notamment des textes juridiques portant sur la fiscalité.

[5].      Pièce PR-2016-041-01 à la p. 67, vol. 1.

[6].      Ibid., pièce 2 à la p. 3.

[7].      Ibid. aux par. 21-24.

[8].      Ibid. au par. 56.

[9].      Ibid. au par. 65.

[10].    Ibid. au par. 26.

[11].    Dans une autre modification apportée aux renseignements fournis durant la réunion de compte rendu, l’ARC a écrit que deux évaluateurs avaient communiqué avec deux personnes fournies en référence par MKTG, alors que trois évaluateurs avaient communiqué avec la troisième personne.

[12].    Pièce PR-2016-041-01B à la p. 3, vol. 1.

[13].    Pièce PR-2016-041-11, annexe A, vol. 1A.

[14].    Ibid., onglets 1, 2 et 22.

[15].    D.O.R.S./93-602 (Règlement).

[16].    Le 14 décembre 2016, MKTG a présenté des commentaires confidentiels sur le RIF qui n’étaient pas conformes aux exigences du Tribunal en matière de confidentialité de documents. MKTG l’a reconnu, mais a indiqué qu’elle désirait discuter de la confidentialité de certains renseignements avec le conseiller juridique de la partie adverse avant de présenter des versions conformes confidentielles et publiques. Le 15 décembre 2016, le Tribunal a avisé MKTG qu’il ne pouvait tenir compte des documents confidentiels non conformes tels qu’ils avaient été déposés et a donné à MKTG jusqu’à midi le 19 décembre 2016 pour déposer ses documents publics et confidentiels présentés dans le format requis, après quoi le Tribunal examinerait toute demande pour rendre publics des renseignements confidentiels, au besoin. Le 16 décembre 2016, l’ARC a avisé le Tribunal qu’une copie des commentaires (insuffisants) sur le RIF ne lui avait pas été signifiée. Le 19 décembre 2016, MKTG a déposé ses commentaires publics et confidentiels sur le RIF et a signifié les versions publiques à l’ARC et à CLS. Le Tribunal a transmis les commentaires confidentiels sur le RIF aux autres parties.

[17].    Pièce PR-2016-041-14, pièce 1, vol. 1.

[18].    Pièce PR-2016-041-19, vol. 1C. L’ARC a demandé à titre subsidiaire qu’elle soit autorisée à présenter d’autres observations sur les motifs de plainte qui, selon elle, étaient nouveaux.

[19].    Pièce PR-2016-041-20, vol. 1C. CLS a également demandé à titre subsidiaire qu’elle soit autorisée à « répondre adéquatement » [traduction] aux motifs de plainte qui, selon elle, étaient nouveaux. De plus, CLS a indiqué que, puisqu’elle n’avait pas été avisée du contre-interrogatoire de l’un des évaluateurs de l’ARC par MKTG, elle se réserve le droit d’interroger elle aussi cet évaluateur.

[20].    Pièce PR-2016-041-21, vol. 1C.

[21].    Pièce PR-2016-041-22, vol. 1C.

[22].    Pièce PR-2016-041-23, vol. 1C. De plus, le Tribunal a appliqué l’article 6 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur, D.O.R.S./91-499, pour conclure que CLS n’a pas automatiquement le droit d’interroger l’évaluateur de l’ARC et que cet interrogatoire ne concerne pas nécessairement le règlement de la plainte.

[23].    Pièce PR-2016-041-01 au par. 13, vol. 1.

[24].    Ibid. au par. 78.

[25].    Ibid. au par. 15.

[26].    [2010] 1 R.C.S. 69 (CanLII).

[27].    Pièce PR-2016-041-01 au par. 82, vol. 1.

[28].    Il convient de souligner que l’article 504 énonce les dispositions relatives à la non-discrimination réciproque de l’ACI.

[29].    Pièce PR-2016-041-01 au par. 54, vol. 1.

[30].    Ibid. au par. 62.

[31].    Ibid. au par. 69.

[32].    Ibid. aux par. 62, 63, 67 et 68. En particulier, MKTG affirme également que l’ARC a indiqué dans sa lettre du 17 octobre 2016 que les évaluateurs ont posé « une série de questions » [traduction] aux personnes fournies en référence, quelque chose qui, selon MKTG, ne peut être fait puisque les critères d’évaluation prévus à l’appendice 2 de la partie 6 de la DP sont très circonscrits. Toutefois, le Tribunal ne trouve aucune indication dans cette lettre selon laquelle « une série de questions » [traduction] a été posée. La lettre indique plutôt qu’on a posé à chaque « [...] personne fournie en référence les questions telles qu’elles apparaissent à la page 32 de la DP [...] » [traduction].

[33].    Pièce PR-2016-041-01 aux par. 56 et 57, vol. 1.

[34].    Ibid. au par. 65.

[35].    De plus, le Tribunal fait remarquer qu’il existe une distinction claire entre les exigences qui font partie du processus d’invitation et celles qui font partie du contrat subséquent. À moins que les documents d’invitation n’indiquent expressément le contraire, ces derniers ne sont pas assujettis aux accords commerciaux et ne peuvent donc pas être examinés par le Tribunal. Voir Tyco Electronics Canada ULC (21 mars 2014), PR-2013-048 (TCCE).

[36].    Pièce PR-2016-041-11 au par. 2, vol. 1A.

[37].    Ibid. au par. 54. L’ARC renvoie au paragraphe 31 de la décision Paul Pollack Personnel Ltd. s/n The Pollack Group Canada (23 septembre 2013), PR-2013-016 (TCCE) [Paul Pollack] du Tribunal : « Même si la DS exigeait que les ressources soient disponibles, le Tribunal constate qu’en l’absence d’autres indications dans la DS sur la manière dont ce critère allait être évalué, le MAECD était justifié, au moment de l’évaluation des soumissions et de l’adjudication du contrat, de se fier aux déclarations faites par Maplesoft à l’égard de la disponibilité de ses ressources proposées. »

[38].    Pièce PR-2016-041-11 aux par. 61-63, vol. 1A.

[39].    3202488 Canada Inc. s/n Kinetic Solutions (3 mars 2011), PR-2010-089 (TCCE) au par. 19; Airsolid Inc. (12 mars 2010), PR-2009-089 (TCCE) au par. 16.

[40].    Pièce PR-2016-041-11, onglets 8, 9 et 10, vol. 1A.

[41].    Il appert que deux des trois personnes fournies en référence avaient écrit à MKTG, alors que la troisième a entretenu une discussion orale avec elle. Pièce PR-2016-041-11, onglets 8, 9 et 10, vol. 1A.

[42].    (6 mai 2015), PR-2014-047 (TCCE) [Lanthier].

[43].    (18 janvier 2013), PR-2012-015 (TCCE) [Storeimage].

[44].    Pièce PR-2016-041-19, vol. 1C.

[45].    Pièce PR-2016-041-20, vol. 1C.

[46].    Le Tribunal a déjà abordé la question du défaut de CLS de se conformer à l’exigence en matière de sécurité.

[47].    Pièce PR-2016-041-21, vol. 1C.

[48].    MKTG a également soulevé la question du caractère subjectif du processus d’évaluation dans le formulaire de plainte du Tribunal, dans la section « Nature fondamentale de la plainte ».

[49].    Pièce PR-2016-041-01 au par. 72, vol. 1.

[50].    Paul Pollack au par. 27.

[51].    https://achatsetventes.gc.ca/pour-les-entreprises/vendre-au-gouvernement.... La clause 3 de la Politique sur les marchés du Conseil du Trésor indique que la politique s’applique aux ministères et aux établissements publics désignés comme ministères aux fins de la Loi sur la gestion des finances publiques. Voir http://www.tbs-sct.gc.ca/pol/doc-fra.aspx?id=14494. L’ARC est un établissement public aux termes de l’annexe II de la Loi sur la gestion des finances publiques. Voir http://laws-lois.justice.gc.ca/fra/lois/f-11/. Par conséquent, l’ARC est visée par la Politique sur les marchés du Conseil du Trésor.

[52].    Paul Pollack au par. 31.

[53].    Tercon au par. 40.

[54].    Pièce PR-2016-041-14 aux par. 87-94, vol. 1B.

[55].    On peut se reporter à la décision dans Survival Systems Training Limited c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (3 septembre 2015), PR-2015-010 (TCCE) [Survival Systems]; IBM Canada Ltd. (5 novembre 1999), PR-99-020 (TCCE); et Secure Computing LLC c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (23 octobre 2012), PR-2012-006 (TCCE).

[56].    On peut se reporter à la décision dans Entreprise commune de BMT Fleet Technology Limited et NOTRA Inc. (5 novembre 2008), PR-2008-023 (TCCE); et Access Corporate Technologies Inc. c. Ministère des Transports (14 novembre 2013), PR-2013-012 (TCCE).

[57].    Pièce PR-2016-041-01 aux par. 3, 40, 62 et 66, vol. 1.

[58].    Bien que les noms des personnes dont il est question ici figurent dans la version publique du RIF, le Tribunal a décidé d’exercer son pouvoir discrétionnaire et de les retrancher de ses motifs. L’identité de ces personnes n’a aucune incidence sur l’issue de l’enquête sur le marché public.

[59].    Ce fait est également mentionné dans les notes des évaluateurs qui se rapportent à la soumission de MKTG.

[60].    Pièce PR-2016-041-11, onglet 2 à la p. 10, vol. 1A; ibid., onglet 22 à la p. 10.

[61].    Pièce PR-2016-041-14B, onglet 2 au par. 13, vol. 1B; ibid., onglet 1 aux par. 699-701.

[62].    Il est évident que MKTG aurait obtenu une note technique plus élevée que CLS si elle avait reçu tous les points pour le premier critère coté. Le problème qui se pose pour le Tribunal est que la question de savoir combien de points MKTG aurait reçus si l’ARC avait procédé correctement à la vérification des références est tout à fait hypothétique.

[63].    Lignes directrices sur les indemnités dans une procédure portant sur un marché public au par. 3.1.2; PTI Services (28 novembre 2001), PR-2001-027 (TCCE) à la p. 3 [PTI Services].

[64].    Lignes directrices sur les indemnités dans une procédure portant sur un marché public aux par. 3.1.4 et 3.1.5.

[65].    Cifelli Systems c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (5 mai 2008), PR-2007-084 (TCCE); Bureau d’études stratégiques et techniques en économique c. Agence canadienne de développement international (4 juin 2009), PR-2007-010R et PR-2007-012R (TCCE); Neosoft Technologies Inc. c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (5 août 2009), PR-2008-061 (TCCE).

[66].    ZENON Environmental Inc. (10 juin 2003), PR-2002-015R (TCCE); ADRM Technology Consulting Group Corp. c. Ministère de la Défense nationale (16 décembre 2016), PR-2016-024 (TCCE) au par. 57; PTI Services, à la p. 4; Huron Consulting (10 février 2003), PR-2002-037 (TCCE) à la p. 8.

[67].    Pièce PR-2016-041-01B à la p. 1, vol. 1; pièce PR-2016-041-11 au par. 15, vol. 1B; pièce PR-2016-041-01, pièce 6, vol. 1.

[68].    Canyon Contracting c. Agence Parcs Canada (19 septembre 2006), PR-2006-016 (TCCE) au par. 31; IBM Canada Ltd. (7 septembre 2000), PR-99-020 à la p. 3.

[69].    Pièce PR-2016-041-11, onglets 8, 9 et 10, vol. 1A. Le courriel de la troisième personne indiquant qu’elle se rappelait que l’ARC avait communiqué avec elle est daté du 25 novembre 2016, soit après le dépôt de la plainte. Par contre, le courriel confirme qu’elle en a parlé à MKTG avant le dépôt de la plainte.