DAVCO WELDING LTD.

DAVCO WELDING LTD.
Dossier no PR-2017-018

Décision prise et rendue
le jeudi 29 juin 2017

Motifs rendus
le mercredi 12 juillet 2017

TABLE DES MATIÈRES

 

EU ÉGARD À une plainte déposée aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.).

PAR

DAVCO WELDING LTD.

CONTRE

CONSTRUCTION DE DÉFENSE CANADA

DÉCISION

Aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur décide de ne pas enquêter sur la plainte.

Jean Bédard
Jean Bédard
Membre présidant

L’exposé des motifs suivra à une date ultérieure.

EXPOSÉ DES MOTIFS

1. En vertu du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur[1], tout fournisseur potentiel peut, sous réserve du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics[2], déposer une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) concernant la procédure des marchés publics suivie relativement à un contrat spécifique et lui demander d’enquêter sur cette plainte. En vertu du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le TCCE, après avoir jugé la plainte conforme au paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE et sous réserve du Règlement, le Tribunal détermine s’il y a lieu d’enquêter.

CONTEXTE

2. La présente plainte déposée par Davco Welding Ltd. (Davco) concerne une demande d’offre à commandes (DOC) (invitation no WR16ST08) pour la prestation de services de levage de charges lourdes à la garnison Wainwright (Alberta) émise par Construction de Défense Canada (CDC).

3. Le 20 mars 2017, CDC a émis la DOC, dont la date de clôture était le 11 avril 2017.

4. Le 31 mars 2017, CDC a émis la modification no 2 concernant la DOC, qui indiquait que « les frais de mobilisation et de démobilisation seront négociés après l’adjudication de l’offre à commandes. Les frais comprendront les préparatifs et le transport aller-retour, y inclus le déplacement, les permis, les véhicules pilotes, etc., à partir des installations de l’entrepreneur à la garnison Wainwright » [traduction].

5. Le ou autour de la semaine du 17 avril 2017, Davco a appris qu’une offre à commande ne lui avait pas été adjugée. Le ou autour de la semaine du 1er mai 2017, Davco a appris qu’une offre à commande avait été adjugée à une entreprise située à Cold Lake (Alberta), à environ 230 km de la garnison Wainwright[3].

6. Le 11 mai 2017, Davco a communiqué avec CDC pour lui poser plusieurs questions. Plus particulièrement, Davco a demandé à CDC pourquoi la modification no 2 avait été émise, car elle supprimait des coûts potentiellement substantiels du calcul du prix total de l’offre, et comment des négociations sur les frais de mobilisation et de démobilisation pouvaient avoir lieu de façon équitable, ouverte et transparente une fois l’offre à commande adjugée[4].

7. Le 26 mai 2017, après deux demandes subséquentes de Davco, CDC a répondu à ses questions. En ce qui concerne la modification no 2, CDC a répondu que les frais de mobilisation et de démobilisation avaient été supprimés car ils gonflaient excessivement le taux horaire de l’équipement de levage lourd requis sur les lieux pour de longues périodes de temps, et que le personnel de CDC négocierait des frais de mobilisation et de démobilisation avantageux et équitables[5].

8. Le 29 mai 2017, Davco a répondu à CDC que les frais de mobilisation et de démobilisation n’auraient pas dû être supprimés du calcul du prix total de l’offre car cela signifie que les frais généraux véritables ne sont pas reflétés dans les prix. Selon Davco, le fait d’avoir supprimé les frais de mobilisation et de démobilisation signifie qu’une offre à commandes pourrait être adjugée en fonction de taux horaires bas à une entreprise éloignée de la garnison Wainwright, mais que cela pourrait signifier de forts coûts excédentaires pour le gouvernement à cause de frais de mobilisation et de démobilisation élevés[6].

9. Le 31 mai 2017, CDC a répondu qu’elle tiendrait compte des commentaires de Davco dans ses futures procédures de marchés publics[7].

10. Le 1er juin 2017, Davco a demandé que CDC lance un nouvel appel d’offres car l’offre à commandes actuelle n’avait pas été adjugée de façon équitable étant donné que le prix des offres ne reflétait pas tous les frais des travaux[8].

11. Le 19 juin 2017, CDC a répondu au courriel de Davco du 1er juin. CDC affirmait que l’offre à commandes avait été adjugée selon les modalités énoncées dans les documents de l’appel d’offres et que le marché public ne ferait pas l’objet d’un nouvel appel d’offres[9].

12. Le 26 juin 2017, Davco a déposé sa plainte auprès du Tribunal. Davco soutient qu’il est contraire à l’usage de négocier les frais de mobilisation et de démobilisation après l’adjudication de l’offre à commande et que cela a pour résultat un contrat qui ne représente pas un bon rapport qualité-prix pour le gouvernement. De plus, Davco soutient que cette façon de faire donne un avantage indu aux entrepreneurs qui sont éloignés des lieux. À titre de mesure correctrice, Davco demande qu’un nouvel appel d’offres soit lancé de façon à refléter fidèlement la totalité des frais associés aux travaux. Davco demande aussi d’être indemnisée pour les frais de préparation de sa soumission.

ANALYSE

13. Pour les motifs qui suivent, le Tribunal décide de ne pas enquêter sur la plainte.

14. Le paragraphe 7(1) du Règlement énonce trois conditions qui doivent être respectées avant que le Tribunal enquête sur une plainte. L’une de ces conditions prévoit que la plainte doit porter sur un contrat spécifique.

15. Afin d’être considéré comme un contrat spécifique, un contrat pour la fourniture de produits et services doit respecter entre autres les seuils monétaires prescrits par les accords commerciaux.

16. La DOC demandait le taux horaire pour les services de divers types d’équipement de levage lourd et d’un opérateur ainsi que d’autres préposés. Par conséquent, le Tribunal conclut que l’appel d’offres concerne des services de construction[10]. Ainsi, les seuils monétaires applicables sont de 100 000 $ en vertu de l’Accord sur le commerce intérieur[11], de 8 500 000 $ en vertu de l’Accord sur les marchés publics[12] et de 14 300 000 $ en vertu de l’Accord de libre-échange nord-américain[13] ainsi que d’autres accords commerciaux bilatéraux potentiellement applicables[14].

17. Dans sa plainte, Davco indique que la valeur du contrat est de 30 000 $[15]. Toutefois, les sections 1.2 et 1.3 de la DOC prévoient que la valeur maximale pour les deux premières années du contrat est de 60 000 $, et que celle pour la période d’option d’une année additionnelle est de 30 000 $, pour une valeur totale du contrat de 90 000 $. Même en calculant la valeur du contrat de cette façon, celle-ci est inférieure aux seuils monétaires pour les services de construction de tous les accords commerciaux. En conséquence, la plainte ne concerne pas un contrat spécifique, et le Tribunal ne peut enquêter sur la plainte.

18. En outre, le Tribunal conclut aussi que la plainte de Davco n’a pas était déposée dans les délais.

19. Le paragraphe 6(1) du Règlement prévoit qu’une plainte doit être déposée auprès du Tribunal « dans les 10 jours ouvrables suivant la date où [le fournisseur potentiel] a découvert ou aurait dû vraisemblablement découvrir les faits à l’origine de la plainte ». Le paragraphe 6(2) du Règlement prévoit que le fournisseur potentiel qui a présenté à l’institution fédérale concernée une opposition et à qui l’institution refuse réparation peut déposer une plainte auprès du Tribunal « dans les 10 jours ouvrables suivant la date où il a pris connaissance, directement ou par déduction, du refus, s’il a présenté son opposition dans les 10 jours ouvrables suivant la date où il a découvert ou aurait dû vraisemblablement découvrir les faits à l’origine de l’opposition ».

20. En résumé, pour respecter les délais prescrits, une partie plaignante dispose de 10 jours ouvrables suivant la date où elle prend connaissance des faits à l’origine de sa plainte, ou suivant la date où elle aurait dû vraisemblablement les découvrir, soit pour présenter une opposition auprès de l’institution fédérale, soit pour déposer une plainte auprès du Tribunal.

21. La plainte de Davco a trait à la modification no 2, qui a été publiée le 31 mars 2017. Davco reconnaît dans sa plainte qu’elle a pris connaissance de la modification no 2 au moment de sa publication, mais qu’elle n’a pas présenté d’opposition à ce moment-là car elle s’attendait à que CDC exerce son option en vertu de la DOC d’adjuger le contrat à la soumission qui n’a pas obtenu la note la plus haute afin d’obtenir le meilleur rapport qualité-prix[16]. Autrement dit, Davco a assumé que, malgré la formulation claire la modification no 2, CDC prendrait en compte d’une manière ou d’une autre les frais de mobilisation et de démobilisation dans le processus d’évaluation.

22. Les fournisseurs potentiels ne peuvent retarder le dépôt de leur plainte en fonction de telles suppositions, particulièrement quand cela signifierait, pour que la supposition de Davco soit correcte, que l’institution fédérale a ignoré les termes des documents d’appel d’offres.

23. Les délais prescrits requièrent que les fournisseurs potentiels « soient vigilants et qu’ils réagissent dès qu’ils découvrent ou auraient vraisemblablement dû découvrir un vice de procédure »[17]. La procédure de passation de marchés publics ne permet pas d’accumuler des griefs potentiels et de ne les présenter qu’une fois le contrat adjugé.

24. Par conséquent, le motif de plainte de Davco lui était connu au moment où Davco a pris connaissance de la modification, et Davco aurait dû présenter une opposition à CDC dans les 10 jours ouvrables suivant cette date. Toutefois, le Tribunal n’a aucune preuve que Davco ait présenté une opposition concernant la modification avant le 11 mai 2017, après que Davco eut été informée qu’une offre à commandes ne lei serait pas adjugée. En conséquence, en plus du fait que la plainte de Davco ne porte pas sur un contrat spécifique, elle n’a pas non plus été déposée dans les délais.

DÉCISION

25. Aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal décide de ne pas enquêter sur la plainte.

 

[1].     L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.) [Loi sur le TCCE].

[2].     D.O.R.S./93-602 [Règlement].

[3].     Plainte à la p. 7.

[4].     Plainte, pièce jointe C01.

[5].     Plainte, pièce jointe C04.

[6].     Plainte, pièce jointe C05.

[7].     Plainte, pièce jointe C07.

[8].     Plainte, pièce jointe C08.

[9].     Plainte, pièce jointe C09.

[10].   La Classification centrale des produits des Nations unies (CPC NU) est utilisée pour définir les services de construction dans tous les accords commerciaux sauf l’Accord sur le commerce intérieur. La division 51 de la CPC NU comprend les travaux de construction et contient le code suivant : 5180 – Services de location d’équipement avec opérateur relié à la construction ou à la démolition d’édifices ou aux travaux de génie civil. L’Accord sur le commerce intérieur définit « travaux de construction » de la façon suivante : « La construction, la reconstruction, la démolition, la réparation ou la rénovation d’un bâtiment, d’une structure ou d’un autre ouvrage de génie civil ou d’architecture. Sont également visés par la présente définition la préparation du chantier, les travaux d’excavation et de forage, les études sismiques, la fourniture des produits et des matériaux, la fourniture du matériel et de la machinerie si ceux-ci sont inclus dans les travaux de construction et accessoires à ceux-ci, ainsi que l’installation et la réparation des accessoires fixes du bâtiment, de la structure ou de l’autre ouvrage de génie civil ou d’architecture. Ne sont toutefois pas visés par la présente définition les services professionnels d’experts-conseils se rapportant au marché de travaux de construction, sauf s’ils sont inclus dans le marché public  » [nos italiques].

[11].   18 juillet 1994, Gaz. C. 1995.I.1323, en ligne : Secrétariat du commerce intérieur <http://www.ait-aci.ca/agreement-on-internal-trade/?lang=fr>.

[12].   Accord révisé sur les marchés publics, en ligne : Organisation mondiale du commerce <http://www.wto.org/‌french/docs_f/legal_f/rev-gpr-94_01_f.htm> (entré en vigueur le 6 avril 2014).

[13].   Accord de libre-échange nord-américain entre le gouvernement du Canada, le gouvernement des États-Unis d’Amérique et le gouvernement des États-Unis du Mexique, 17 décembre 1992, R.T.C. 1994, no 2, en ligne : Affaires mondiales Canada <http://international.gc.ca/trade-commerce/‌trade-agreements-accords-commerciaux/agr-acc/nafta-alena/fta-ale/index.aspx?lang=fra> (entré en vigueur le 1er janvier 1994).

[15].   Plainte à la p. 3.

[16].   Plainte à la p, 6.

[17].   IBM Canada Ltd. c. Hewlett Packard (Canada) Ltd., 2002 CAF 284 (CanLII) au par. 20.