CANADIAN COMPUTER RENTALS

Décisions


CANADIAN COMPUTER RENTALS
Dossier no : PR-2000-003

TABLE DES MATIÈRES


Ottawa, le jeudi 3 août 2000

Dossier no : PR-2000-003

EU ÉGARD À une plainte déposée par Canadian Computer Rentals aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47;

ET EU ÉGARD À une décision d'enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte est fondée.

Aux termes des paragraphes 30.15(2) et (3) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur recommande, à titre de mesure corrective, que le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux et le Bureau du Directeur général des élections du Canada mettent en place une équipe d'évaluation, composée de nouveaux évaluateurs qui ne sont pas au fait des détails spécifiques de l'évaluation antérieure, pour procéder à une nouvelle évaluation des six propositions reçues en réponse à l'invitation à soumissionner n05005-9-0492/C. La nouvelle équipe d'évaluation appliquera la méthode et les critères d'évaluation énoncés dans la Demande de propositions (numéro d'invitation 05005-9-0492/C).

Si la proposition de Canadian Computer Rentals est retenue, le Tribunal canadien du commerce extérieur recommande que le contrat adjugé à IBM Canada limitée soit résilié et adjugé à Canadian Computer Rentals. À titre de solution de rechange, le Tribunal canadien du commerce extérieur recommande que le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux accorde à Canadian Computer Rentals une indemnité en reconnaissance des profits qu'elle a perdus en étant privée du contrat. Le calcul des profits perdus sera fondé sur le prix proposé par Canadian Computer Rentals dans la proposition qu'elle a soumise en réponse à l'invitation à soumissionner no 05005-9-0492/C.

Aux termes du paragraphe 30.16(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur accorde à Canadian Computer Rentals le remboursement des frais raisonnables qu'elle a engagés pour le dépôt et le traitement de sa plainte.


Richard Lafontaine

Richard Lafontaine
Membre présidant


Michel P. Granger

Michel P. Granger
Secrétaire
 
 

Date de la décision :

Le 3 août 2000

   

Membre du Tribunal :

Richard Lafontaine

   

Agent d'enquête :

Paule Couët

   

Conseillers pour le Tribunal :

Gilles B. Legault

 

Dominique Laporte

   

Partie plaignante :

Canadian Computer Rentals

   

Institution fédérale :

Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux

   

Conseillers pour l'institution fédérale :

Susan D. Clarke

 

Christianne Laizner

 
 

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le 4 mai 2000, Canadian Computer Rentals (CCR) a déposé une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur 1 à l'égard du marché public (numéro d'invitation 05005-9-0492/C) passé par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (le Ministère) relativement à la location de matériel2 et d'éléments de services3 requis par le Bureau du Directeur général des élections du Canada (Élections Canada) pour tenir des consultations populaires fédérales (élections générales, référendums et élections partielles). Le contrat porte sur une période de 48 mois et contient une disposition de renouvellement facultatif pour une période de 12 mois.

CCR a soutenu que le Ministère a fait preuve de négligence dans l'examen de sa proposition et, par conséquent, a conclu à tort que la proposition de CCR ne répondait pas aux exigences décrites au paragraphe 2.2 de l'annexe « H » de la Demande de propositions (DP) concernant l'homologation Microsoft NT Server 4.0. CCR a demandé, à titre de mesure corrective, que son offre fasse l'objet d'un nouvel examen en conformité avec les critères d'évaluation énoncés dans la DP.

Le 9 mai 2000, le Tribunal a avisé les parties qu'il avait décidé d'enquêter sur la plainte, puisqu'elle satisfaisait aux exigences du paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE ainsi qu'aux conditions énoncées au paragraphe 7(1) du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics 4 . Le 13 juin 2000, le Ministère a déposé un rapport de l'institution fédérale (RIF) auprès du Tribunal en application de l'article 103 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur 5 . Le 29 juin 2000, CCR a déposé ses commentaires sur le RIF auprès du Tribunal. Le 7 juillet 2000, le Tribunal a invité le Ministère à répondre aux commentaires de CCR. Le Ministère a répondu, par écrit, le 11 juillet 2000, et, le 13 juillet 2000, CCR a déposé auprès du Tribunal ses commentaires sur la réponse du Ministère.

Les renseignements au dossier permettant de déterminer le bien-fondé de la plainte, le Tribunal a décidé qu'une audience n'était pas nécessaire et a statué sur la plainte sur la foi des renseignements au dossier.

PROCÉDURE DE PASSATION DU MARCHÉ PUBLIC

La DP dans la présente plainte a été diffusée le 16 février 2000, sous la forme d'une lettre explicative aux soumissionnaires qui avaient participé à l'invitation à soumissionner précédente, portant le numéro 05005-9-0492/B6 . L'Accord de libre-échange nord-américain 7 , l'Accord sur les marchés publics 8 et l'Accord sur le commerce intérieur 9 ont été mentionnés en tant qu'accords commerciaux applicables.

Le paragraphe 2.2 de l'annexe « H » de la DP indique, notamment, ce qui suit :

Homologation Windows NT
doit détenir l'homologation Microsoft NT Server 4.0 (au niveau du logo). L'homologation doit être établie entre Microsoft et l'assembleur final du système (identifié par la marque de commerce affichée sur l'unité du système et dans la totalité des guides d'aide et de la documentation). Une preuve d'homologation pour chaque offre de système doit être soumise sous la forme d'une copie du rapport d'homologation Microsoft NT complet. La réponse à l'appel d'offres doit comprendre ce ou ces rapports.

[Traduction]

L'article 1.0 de l'annexe « E » de la DP indique, notamment, ce qui suit :
ÉVALUATION DE LA PROPOSITION
L'équipe d'évaluation d'Élections Canada et de TPSGC examinera et évaluera la proposition. Les étapes suivantes seront exécutées dans l'ordre jusqu'à ce que toutes les étapes soient terminées et que la soumission soit jugée recevable; ou jusqu'à ce que l'exécution d'une des étapes suivantes mène à la conclusion que la soumission n'est pas recevable, ladite proposition étant alors rejetée et n'étant pas considérée plus avant.

[Traduction]

L'article 1.0 de l'annexe « E » de la DP décrit ensuite six étapes ainsi qu'il suit : 1) la confirmation que la proposition écrite est complète; 2) la confirmation de la conformité du soumissionnaire aux exigences obligatoires; 3) l'évaluation des exigences cotées et l'attribution des points et le calcul des résultats; 4) l'établissement du prix de la soumission, uniquement aux fins d'évaluation; 5) la détermination et le classement des propositions recevables, selon le prix évalué; 6) l'évaluation du système proposé par le soumissionnaire classé au premier rang.

L'article 5.0 de l'annexe « E » de la DP indique ce qui suit :
MÉTHODE DE SÉLECTION DE L'ENTREPRENEUR
ÉVALUATION - PRIX ÉVALUÉ LE PLUS BAS
Sous réserve de l'évaluation de la proposition susmentionnée, le soumissionnaire retenu sera l'entreprise qui offre le prix évalué LE PLUS BAS, comme il est précisé en détail à la section intitulée Évaluation de la proposition.
Les propositions seront évaluées conformément aux critères énoncés à la section Évaluation de la proposition ci-dessus. Pour être jugée recevable, une proposition doit satisfaire à toutes les exigences obligatoires énoncées dans la DP et seules les propositions qui obtiennent une note d'au moins 70 p. 100 et qui réussissent ainsi l'étape Évaluation du produit seront considérées aux fins d'adjudication du contrat.

[Traduction]

Six propositions ont été reçues avant la date de fermeture fixée au 22 février 2000.

Selon le RIF, la proposition de CCR10 a été jugée techniquement non conforme parce que l'équipe d'évaluation n'a pas pu trouver le document d'homologation Microsoft NT Server 4.0 (au niveau du logo) exigé au paragraphe 2.2 de l'annexe « H » de la DP. L'annexe 1 de la proposition de CCR, intitulée « Homologations » ne contenait pas de cette homologation.

Le 31 mars 2000, un contrat a été adjugé à IBM Canada limitée (IBM). Le 4 avril 2000, le Ministère a informé CCR, par écrit, que sa soumission avait été jugée non conforme. Le 13 avril 2000, CCR a communiqué avec le Ministère pour s'objecter à ce rejet, puisqu'elle croyait que sa soumission incluait l'homologation Microsoft NT requise. Au cours de la même communication, en réponse à une question du Ministère quant à savoir où, dans sa proposition, CCR avait inséré ladite homologation, CCR n'a pas pu, à partir de l'exemplaire de sa proposition qu'elle avait conservé dans ses dossiers, la trouver. Le 18 avril 2000, lors d'une réunion d'information avec les représentants du Ministère et d'Élections Canada, il a été permis à CCR de consulter la copie de sa proposition détenue par la Couronne. Après avoir procédé à une recherche page par page, CCR a découvert l'homologation à la fin de sa proposition, à l'annexe 5, intitulée « Rapport d'essai de système PC 98 - Configuration du bureau » [traduction].

Le 4 mai 2000, CCR a déposé cette plainte auprès du Tribunal.

Après le 4 mai 2000, l'équipe d'évaluation a procédé à une évaluation de la partie cotée de la proposition technique de CCR ainsi que de sa proposition financière. Selon le RIF, au cours de l'évaluation du rapport d'essai du serveur soumis par CCR, l'équipe d'évaluation a découvert qu'il aurait fallu obtenir des éclaircissements pour compléter l'homologation soumise par CCR et pour déterminer si la carte-mère installée dans le serveur aux fins de l'essai afférent à l'homologation Microsoft NT Server 4.0 est la même que celle qui était incluse dans le système proposé par CCR dans sa proposition. Le sommaire d'évaluation des exigences cotées de la proposition de CCR montre que sa proposition a obtenu la note de passage, avec un résultat de 70,5 points sur 100 et, donc, satisfaisait au minimum requis de 70 points. En outre, l'évaluation de la proposition financière de CCR a donné un prix évalué supérieur au prix cité par IBM.

POSITION DES PARTIES

Position du Ministère

Le Ministère a soutenu qu'il incombe au soumissionnaire de présenter une proposition claire, structurée de manière à ce que les évaluateurs puissent trouver rapidement et facilement toute l'information pertinente au besoin. Le Ministère a soutenu que le fait que CCR a dû procéder à une recherche intensive, page par page, dans sa proposition pour trouver l'homologation en question démontre, à lui seul, que le Ministère n'a pas été négligent dans l'examen qu'il a fait de la proposition de CCR.

En outre, le Ministère a soutenu que son évaluation de la proposition de CCR, à la suite de la réunion d'information, a démontré que la proposition de CCR n'aurait pas été classée au premier rang. Par conséquent, la proposition de CCR n'aurait pas été recommandée en vue de l'adjudication du contrat.

Le Ministère a dit avoir agi de bonne foi dans le cadre de ce marché public et regrette que l'homologation n'ait pas été trouvée au moment de l'évaluation des propositions. En outre, le Ministère a soutenu qu'il n'y a pas eu d'application fautive délibérée ou négligente de la méthode d'évaluation et que, pour les raisons ci-dessus, la situation n'a pas causé de dommage à CCR. Le Ministère a demandé d'avoir l'occasion de présenter des observations supplémentaires au sujet des frais.

Dans ses commentaires du 11 juillet 2000, le Ministère a affirmé que l'allégation de CCR, selon laquelle le Ministère a manqué d'objectivité dans son réexamen, est grave et troublante. Le Ministère a soutenu que l'allégation de CCR, selon laquelle une remarque, facétieuse, faite au cours d'une conversation téléphonique signifiait que le Ministère faisait preuve de partialité au détriment de CCR, était une allégation dénuée de fondement, non corroborée et injustifiée.

Position de CCR

CCR a concédé qu'elle aurait pu faire en sorte que le document d'homologation soit plus facile à trouver. Cependant, le fait demeure que le document était compris dans la proposition de CCR, conformément aux directives énoncées au paragraphe 2.2 de l'annexe « H » de la DP. CCR a soutenu que l'affirmation du Ministère, selon laquelle il a fallu faire une recherche « intensive » pour trouver le document, est exagérée.

En outre, CCR a affirmé que l'admission du Ministère, dans le RIF, que sa proposition était techniquement conforme (le Ministère nie une telle affirmation), mais que son prix a été évalué à 225 000 $ de plus que la proposition du soumissionnaire retenu résulte d'une procédure viciée. CCR a soutenu que le Ministère, après avoir admis sa négligence durant la tenue de l'évaluation, prétend maintenant enquêter sur ses propres activités. CCR soutient qu'il était simplement trop commode que le Ministère en arrive à conclure que CCR n'aurait pas été retenue de toute façon. CCR a soutenu que le Ministère était clairement partial lorsqu'il a procédé à un nouvel examen de la proposition de CCR, puisqu'il était manifestement dans le meilleur intérêt du Ministère que CCR se classe deuxième. CCR a affirmé que le Ministère a fait en sorte que CCR soit le soumissionnaire classé second. CCR a soutenu que le Ministère a simplement aggravé son erreur négligente initiale en entreprenant cette parodie d'enquête et a, de ce fait, causé à CCR un dommage irréparable tant au plan professionnel qu'au plan commercial.

Dans ses derniers commentaires, reçus par le Tribunal le 13 juillet 2000, CCR a souligné l'omission du Ministère de répondre aux éléments de preuve les plus préjudiciables (c.-à-d. l'appel téléphonique du Ministère à CCR au cours duquel des questions ont été posées sur la partie financière de sa proposition) au lendemain de la réunion d'information. Cet appel téléphonique indique clairement, selon CCR, que le Ministère a procédé à l'analyse financière de la proposition de CCR avant d'évaluer les exigences cotées de sa proposition, ce qui est directement contraire aux règles énoncées à l'annexe « E » de la DP.

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes de l'article 30.14 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal doit, lorsqu'il a décidé d'enquêter, limiter son étude à l'objet de la plainte. En outre, à la fin de l'enquête, le Tribunal doit déterminer la validité de la plainte en fonction des procédures et autres exigences établies par règlement pour le contrat spécifique. De plus, l'article 11 du Règlement prévoit notamment que le Tribunal doit déterminer si le marché a été passé conformément aux accords commerciaux applicables.

Les alinéas 1015(4)a) de l'ALÉNA et XIII(4)a) de l'AMP prévoient, notamment, que pour être considérée en vue de l'adjudication, une soumission devra être conforme, au moment de son ouverture, aux conditions essentielles spécifiées dans les avis ou dans la documentation relative à l'appel d'offres. Le paragraphe 506(6) de l'ACI prévoit, notamment, que les documents d'appel d'offres doivent indiquer clairement les exigences du marché public et les critères qui seront appliqués dans l'évaluation des soumissions.

Les parties s'entendent sur le fait que l'exigence énoncée au paragraphe 2.2 de l'annexe « H » de la DP portant sur l'homologation Microsoft NT Server 4.0 est une exigence obligatoire de cette invitation à soumissionner et que cette exigence est clairement énoncée dans la DP. Le litige porte sur la question de savoir si le Ministère et Élections Canada ont correctement appliqué la méthode d'évaluation et, de ce fait, ont correctement déclaré la proposition de CCR techniquement non conforme pour le motif qu'elle ne répondait pas à l'exigence obligatoire indiquée au paragraphe 2.2 de l'annexe « H ».

Les faits de la présente cause ne sont pas contestés, et ils sont simples et directs. La proposition de CCR, telle qu'elle a été soumise, comprenait l'homologation requise à l'annexe 5, intitulée « Rapport d'essai de système PC 98 - Configuration du bureau » [traduction].

Le Ministère a soutenu qu'il incombe au soumissionnaire de présenter une proposition claire et structurée d'une telle manière que les évaluateurs peuvent rapidement et facilement trouver toute l'information pertinente au besoin. Le Tribunal est d'avis, cependant, que les propositions des fournisseurs doivent aussi être examinées d'une façon diligente et minutieuse. Après tout, les fournisseurs potentiels investissent un montant considérable de leurs propres ressources d'entreprise pour tenter d'offrir au gouvernement les meilleures propositions possibles et ce, dans des conditions concurrentielles risquées. Le Tribunal est d'avis qu'un tel fait doit être reconnu par les organismes d'approvisionnement et, à tout le moins, transparaître dans l'examen des propositions. Le Tribunal est d'avis que, en l'espèce, CCR a présenté l'information en question d'une manière telle qu'un examen diligent du Ministère et d'Élections Canada aurait donné lieu à la production de l'homologation censément manquante.

Dans ce cas particulier, CCR avait structuré les documents qu'elle offrait à l'appui de sa proposition sous cinq annexes, l'une d'entre elles étant intitulée « Homologations » et une autre, l'annexe 5, étant intitulée « Rapport d'essai de système PC 98 - Configuration du bureau »11 . CCR admet, dans ses commentaires sur le RIF, quelle aurait pu faire en sorte que le document d'homologation soit plus facile à trouver. Le Tribunal fait observer que le paragraphe 2.2 de l'annexe « H » de la DP prévoit que le rapport d'homologation Microsoft NT doit être inclus dans la réponse à l'appel d'offres. Nulle part était-il prescrit que le rapport d'homologation devait être inclus dans une annexe particulière ou que les documents devaient être joints d'une manière spécifique. Le Tribunal est d'avis qu'un examen minutieux et diligent de la proposition de CCR aurait permis au Ministère et à Élections Canada de trouver l'homologation en question. Le Ministère lui-même, dans ses dernières observations, a admis qu'il « aurait dû trouver le document » [traduction]. Le Tribunal est d'accord et est d'avis que le Ministère, dans ce cas, n'a pas procédé à un examen minutieux et diligent de la proposition de CCR. Par conséquent, tant le Ministère qu'Élections Canada ont incorrectement appliqué la méthode et les critères d'évaluation et, de ce fait, ont conclu à tort que la proposition de CCR était non conforme pour le motif qu'elle ne comprenait pas l'homologation exigée au paragraphe 2.2 de l'annexe « H ».

CCR a demandé, à titre de mesure corrective, que sa proposition fasse l'objet d'un nouvel examen en conformité avec les critères d'évaluation énoncés dans la DP. Après la tenue de la réunion d'information et après que le Ministère a découvert que l'homologation en question était, de fait, incluse dans la proposition de CCR, le Ministère a décidé de procéder à une évaluation complète de la proposition de CCR pour l'évaluer au plan des exigences cotées et du prix. Selon le RIF, sous réserve de certains éclaircissements affectant l'homologation présentée par CCR, la proposition de CCR a été jugée comme satisfaisant à la note de passage de 70 points pour les exigences cotées. Cependant, le prix évalué a été jugé supérieur à celui du soumissionnaire retenu. De ce fait, le Ministère a conclu que la situation n'avait causé aucun dommage à CCR.

Le Tribunal n'est pas convaincu que l'évaluation de CCR a été tenue d'une manière juste et équitable. Non seulement ladite évaluation a-t-elle été tenue au moment où le prix et les points obtenus pour les exigences cotées de la proposition d'IBM étaient connus, mais, en outre, le Tribunal n'est pas convaincu que l'évaluation a été effectuée dans l'ordre énoncé dans la DP, c'est-à-dire que l'évaluation des prix a suivi l'attribution des points pour les exigences cotées, étant donné la question du Ministère sur des aspects financiers de la proposition de CCR, le lendemain de la réunion d'information. Un principe établi et fondamental de l'évaluation des offres veut que, pour garantir la justice et l'équité dans l'évaluation et la cotation des propositions, les prix doivent être évalués en dernier lieu pour ne pas influencer la cotation des propositions. Le Tribunal note le silence du Ministère sur ce point dans ses commentaires du 11 juillet 2000.

Compte tenu des circonstances, le Tribunal n'est pas convaincu que l'évaluation qu'a faite le Ministère de la proposition de CCR ait respecté l'ordre des étapes établi dans la DP et qu'elle soit fiable. Par conséquent, le Tribunal recommandera qu'une équipe d'évaluation composée de nouveaux évaluateurs, qui ne sont pas au fait des détails spécifiques de l'évaluation déjà tenue par le Ministère, procède à une nouvelle évaluation des six propositions (le Tribunal propose cette démarche, reconnaissant que, puisque l'évaluation des exigences cotées fait appel au jugement professionnel, il importe, pour des raisons de justice et d'équité, que toutes les propositions soient examinées par les mêmes évaluateurs) reçues en réponse à l'invitation à soumissionner no 05005-9-0492/C. La nouvelle évaluation devra être tenue en conformité avec la méthode et les critères énoncés dans la DP. Ensuite, le Ministère, au besoin, poursuivra la procédure de passation de ce marché public de la manière décrite en plus de détails ci-après, dans la décision du Tribunal.

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal détermine que le marché public n'a pas été passé conformément à l'ALÉNA, à l'AMP et à l'ACI et, par conséquent, que la plainte est fondée.

Aux termes des paragraphes 30.15(2) et (3) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal recommande, à titre de mesure corrective, que le Ministère et Élections Canada mettent en place une équipe d'évaluation, composée de nouveaux évaluateurs qui ne sont pas au fait des détails spécifiques de l'évaluation antérieure, pour procéder à une nouvelle évaluation des six propositions reçues en réponse à l'invitation à soumissionner n05005-9-0492/C. La nouvelle équipe d'évaluation appliquera la méthode et les critères d'évaluation énoncés dans la DP (invitation à soumissionner n05005-9-0492/C) et le Ministère poursuivra la procédure de passation du marché public en conformité avec les dispositions de la DP et des accords commerciaux.

Si la proposition de CCR est retenue, le Tribunal recommande que le contrat adjugé à IBM soit résilié et adjugé à CCR. À titre de solution de rechange, le Tribunal recommande que le Ministère accorde à CCR une indemnité en reconnaissance des profits qu'elle a perdus en étant privée du contrat. Le calcul des profits perdus sera fondé sur le prix proposé par CCR dans la proposition qu'elle a soumise en réponse à l'invitation à soumissionner no 05005-9-0492/C.

Aux termes du paragraphe 30.16(1) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal accorde à la CCR le remboursement des frais raisonnables qu'elle a engagés pour le dépôt et le traitement de sa plainte.

1 . L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47 [ci-après Loi sur le TCCE].

2 . Les volumes estimatifs pour le matériel sont les suivants : 3 500 microordinateurs, 602 imprimantes, 301 serveurs, 301 concentrateurs et du matériel connexe. Source : Demande de propositions à la p. 2.

3 . Y compris l'entreposage, la livraison, la configuration, l'installation, la désinstallation, la documentation, les services de garantie et d'entretien et l'aide technique. Source : Demande de propositions à la p. 2.

4 . D.O.R.S./93-602 [ci-après Règlement].

5 . D.O.R.S./91-499.

6 . La lettre indiquait, notamment, que l'invitation no 05005-9-0492/C annulait et remplaçait le document précédant d'invitation à soumissionner, no 05005-9-0492/B, et qu'elle reprenait toute la teneur de cette dernière.

7 . 32 I.L.M. 289 (entré en vigueur le 1er janvier 1994) [ci-après ALÉNA].

8 . Accord sur les marchés publics, 15 avril 1994, en ligne : Organisation mondiale du commerce <http://www.wto.org/french/docs_f/legal_f/legal_f.htm> [ci-après AMP].

9 . Signé à Ottawa (Ontario) le 18 juillet 1994 [ci-après ACI].

10 . Le Tribunal, dans la présente décision, ne s'est fondé que sur la proposition soumise par CCR au Ministère et non sur celle que CCR a fait parvenir avec sa plainte au Tribunal.

11 . La table des matières de la proposition énumérait les annexes contenues dans le document de manière à en résumer le contenu. L'annexe 5 figurait dans cette énumération sous l'appellation « Rapport d'essai de système PC 98 - Configuration du bureau. Rapport d'essai de système du serveur NT » [soulignement ajouté] [traduction].


[ Table des matières]

Publication initiale : le 6 septembre 2000