SERVICE STAR BUILDING CLEANING INC.

Décisions


SERVICE STAR BUILDING CLEANING INC.
Dossier no PR-2001-063

TABLE DES MATIÈRES


Ottawa, le jeudi 23 mai 2002

Dossier no PR-2001-063

EU ÉGARD À une plainte déposée par Service Star Building Cleaning Inc. aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47;

ET SUITE À une décision d'enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte n'est pas fondée.



Zdenek Kvarda

Zdenek Kvarda
Membre présidant


Michel P. Granger

Michel P. Granger
Secrétaire

L'exposé des motifs suivra à une date ultérieure.
 
 

Date de la décision :

Le 23 mai 2002

Date des motifs :

Le 7 juin 2002

   

Membre du Tribunal :

Zdenek Kvarda, membre présidant

   

Gestionnaire de l'enquête :

Paule Couët

   

Conseiller pour le Tribunal :

Clarissa Lewis

   

Partie plaignante :

Service Star Building Cleaning Inc.

   

Institution fédérale :

Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux

   

Conseiller pour l'institution fédérale :

Ian McLeod

 
 
Ottawa, le vendredi 7 juin 2002

Dossier no PR-2001-063

EU ÉGARD À une plainte déposée par Service Star Building Cleaning Inc. aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47;

ET SUITE À une décision d'enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

EXPOSÉ DES MOTIFS

PLAINTE

Le 18 février 2002, Service Star Building Cleaning Inc. (Service Star) a déposé une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur 1 à l'égard du marché public (invitation no 31184-010894/A) passé par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (TPSGC) au nom du Conseil national de recherches du Canada (CNRC) et portant sur des services de nettoyage et d'entretien.

Service Star a allégué que TPSGC a adjugé le contrat d'une façon irrégulière, contrairement aux dispositions des documents d'appel d'offres. Plus précisément, elle a allégué que TPSGC a fait réévaluer toutes les soumissions par une deuxième équipe d'évaluateurs, contrairement aux dispositions de la demande de propositions (DP) et aux exigences régissant un nouvel appel d'offres. La réévaluation a été effectuée parce que toutes les soumissions avaient initialement été déclarées irrecevables; elles avaient toutes échoué relativement à au moins une des deux exigences portant sur le seuil global d'au moins 75 p. 100 de la note totale et sur le seuil d'au moins 60 p. 100 de la note maximum par critère. Service Star a de plus allégué ce qui suit : la réévaluation a été effectuée en se fondant sur des critères autres que ceux énoncés dans la DP; l'équipe qui a effectué la réévaluation était au courant des renseignements sur les prix contenus dans les propositions; la réévaluation a été effectuée en se fondant sur des renseignements autres que ceux inclus dans les propositions; il a été donné à l'adjudicataire l'occasion de modifier le prix de sa soumission.

Service Star a demandé au Tribunal de recommander que lui soit versée une indemnité au montant de 650 000 $, en reconnaissance de sa perte de profits (10 p. 100 de la valeur du contrat) durant la période de cinq ans du contrat, ou, subsidiairement, que TPSGC résilie le contrat en cours, lance un nouvel appel d'offres et verse à Service Star 10 p. 100 du prix du contrat jusqu'à ce que ce dernier soit de nouveau adjugé. En outre, elle a demandé à recevoir le remboursement des frais qu'elle a engagés relativement à la préparation et au dépôt de la plainte.

Le 26 février 2002, le Tribunal a avisé les parties qu'il avait décidé d'enquêter sur la plainte, puisque cette dernière répondait aux exigences du paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE et aux conditions énoncées au paragraphe 7(1) du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics 2 .

Le 26 mars 2002, TPSGC a déposé un rapport de l'institution fédérale (RIF) auprès du Tribunal en application de l'article 103 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur 3 . Le 10 avril 2002, Service Star a déposé des observations sur le RIF auprès du Tribunal. Le 19 avril 2002, le Tribunal a demandé d'autres renseignements à TPSGC. Le 25 avril 2002, TPSGC a répondu à la demande du Tribunal. Service Star a présenté des observations sur ces autres renseignements le 30 avril 2002.

La quantité des renseignements au dossier étant suffisante pour déterminer le bien-fondé de la plainte, le Tribunal a décidé qu'une audience n'était pas nécessaire et a statué sur la plainte sur la foi des renseignements au dossier.

PROCÉDURE DE PASSATION DU MARCHÉ PUBLIC

Selon le RIF, la DP a été publiée le 10 janvier 2001, et diffusée par l'entremise du MERX4 le 19 janvier 2001. Dans le cadre d'une modification, la date de clôture des soumissions a été prorogée du 30 mars 2001 au 11 avril 2001. Au total, trois modifications ont été diffusées durant la période d'invitation à soumissionner. Cinq propositions ont été reçues en réponse à la DP.

Les dispositions suivantes de la DP sont pertinentes à l'espèce :

4.1 Processus d'évaluation
Le processus d'évaluation comporte trois (3) phases, décrites dans les sections suivantes.
4.1.1 Phase 1 - Critères obligatoires
Seules les propositions jugées conformes à TOUTES les exigences obligatoires seront acceptées et seront évaluées plus en profondeur, conformément aux critères d'évaluation cotés par points.
4.1.2 Offre technique cotée
Seuil global
Les propositions auxquelles on attribuera moins de 75 % de la note totale (100) seront jugées irrecevables et ne seront pas étudiées plus en profondeur.
Le Comité d'évaluation de TPSGC n'examinera pas les offres financières tant que la phase 2 ne sera pas terminée.
4.1.3 Phase 3 - Mode de sélection
Pour être jugée recevable, votre proposition doit :
(a) Respecter toutes les exigences obligatoires de la présente DDP;
(b) Obtenir la note minimum exigée de 60 % de la note totale pour chaque critère technique (alinéas 4.2.1 à 4.2.6); et
(c) Obtenir la note minimum exigée de 75 % de la note totale.
Les propositions qui ne répondent pas aux conditions exprimées en (a), (b) et (c) ci-dessus ne seront pas étudiées plus en profondeur. On recommandera d'attribuer à un marché au soumissionnaire qui aura déposé la proposition recevable la moins-disante.

Une des propositions a été jugée non conforme aux exigences obligatoires et n'a donc pas été étudiée plus en profondeur. Le 25 avril 2001, les quatre autres propositions ont été communiquées à l'équipe d'évaluation technique5 . Le 4 juin 2001, après l'évaluation technique, les quatre propositions ont été jugées comme ne satisfaisant pas à au moins un des deux seuils minimums énoncés dans la DP. Plus précisément, les résultats attribués à Service Star et à Domus Building Cleaning Company Limited (Domus) n'atteignaient pas le seuil global de 75 p. 100 de la note totale. Le 6 juin 2001, étant donné que toutes les propositions étaient irrecevables du fait des résultats attribués par l'équipe d'évaluation technique, l'agent des approvisionnements a préparé une demande de nouvel appel d'offres. Le 8 juin 2001, la demande de nouvel appel d'offres a été approuvée, à certaines conditions. Selon le RIF, la cotation technique de l'équipe d'évaluation a soulevé des questions dans l'esprit des gestionnaires de TPSGC et des gestionnaires du CNRC. Le 13 juin 2001, après un examen plus en profondeur, les gestionnaires de TPSGC ont décidé que les questions soulevées à la suite de l'évaluation technique étaient telles qu'il serait prudent de soumettre les propositions à une réévaluation par une nouvelle équipe d'évaluation. La nouvelle équipe comprendrait des représentants de TPSGC ayant une vaste expérience des services de nettoyage et d'entretien et des méthodes d'évaluation retenues dans la DP.

Le 10 juillet 2001, la nouvelle équipe d'évaluation a terminé l'évaluation des quatre propositions. En se fondant sur les mêmes critères énoncés dans la DP et appliqués par la première équipe d'évaluation, la nouvelle équipe a jugé que les quatre propositions satisfaisaient aux exigences relativement aux résultats minimums requis et étaient donc recevables. Le 12 juillet 2001, l'agent des approvisionnements a avisé le CNRC que Domus était le soumissionnaire ayant déposé la proposition la moins disante. Le CNRC a convenu de procéder à l'adjudication du contrat le 13 juillet 2001. Le 16 juillet 2001, tous les soumissionnaires ont été informés des résultats de l'invitation à soumissionner. Le 6 septembre 2001, Service Star a déposé une demande d'accès à de l'information pertinente à la présente invitation à soumissionner, et le Bureau d'accès à l'information a répondu à la demande susmentionnée le 8 février 2002. Le 4 octobre 2001, Service Star a demandé à recevoir un compte rendu écrit en guise d'information finale relativement à sa proposition technique et une comparaison des résultats attribués à sa proposition technique et des résultats attribués à la proposition retenue. TPSGC a répondu le 9 octobre 2001. Par la suite, Service Star a présenté des demandes en vertu de la Loi sur l'accès à l'information 6 à TPSGC et au CNRC. Elle a déposé sa plainte auprès du Tribunal le 18 février 2002.

POSITION DES PARTIES

Position de TPSGC

En réponse à la première allégation selon laquelle TPSGC a agi contrairement aux dispositions de la DP lorsqu'il a institué une deuxième équipe d'évaluation pour procéder à une réévaluation des parties techniques des propositions et lorsqu'il n'a pas accepté les résultats attribués par la première équipe d'évaluation, TPSGC a soutenu avoir agi d'une manière prudente conformément à son obligation de surveillance du processus d'invitation à soumissionner.

Selon le RIF, les gestionnaires de TPSGC ont été étonnés que les propositions tant de Service Star que de Domus n'avaient pas reçu des résultats suffisamment élevés pour être déclarées recevables. Service Star était l'entrepreneur titulaire et avait dispensé des services satisfaisants. Domus avait été l'entrepreneur précédent relativement aux mêmes travaux et avait dispensé des services satisfaisants dans le cadre de son contrat. Le fait que ni l'une ni l'autre des propositions en provenance de ces fournisseurs expérimentés n'ait été jugée comme satisfaisant à la norme minimum a suscité des doutes dans l'esprit des représentants de TPSGC et justifiait un examen plus en profondeur et une vérification. Dans de telles circonstances, les représentants de TPSGC ont conclu qu'il serait prudent d'obtenir un deuxième avis auprès d'une nouvelle équipe d'évaluation comptant une expérience plus vaste des services de nettoyage et d'entretien, qui appliquerait le processus d'évaluation établi dans la DP. TPSGC a soutenu que les dispositions de la DP étaient entièrement compatibles avec sa responsabilité de surveillance du processus d'invitation à soumissionner et que la DP ne faisait aucunement mention qu'il était tenu d'accepter, sans question, vérification ni examen, tout résultat qu'allait lui communiquer l'équipe d'évaluation.

TPSGC a soutenu que Service Star n'a pas produit d'élément de preuve à l'appui de son allégation selon laquelle la réévaluation a été effectuée en se fondant sur des critères différents de ceux énoncés dans la DP. Il a soutenu que les résultats différents attribués par l'équipe qui comptait une plus vaste expérience pertinente ont confirmé le caractère problématique des résultats issus de l'évaluation initiale. TPSGC a soutenu qu'il ne fallait pas nécessairement en conclure que les deux équipes avaient appliqué des critères différents.

En réponse à l'allégation selon laquelle des renseignements sur les prix contenus dans les propositions ont été divulgués à l'équipe chargée de la réévaluation, TPSGC a soutenu que cette allégation n'était pas appuyée par des éléments de preuve. Il a soutenu que, conformément à la pratique habituelle, l'agent des approvisionnements a séparé et placé en lieu sûr les parties financières des propositions et que les détails des propositions financières n'ont pas été divulgués avant la fin de la réévaluation des propositions techniques, le 10 juillet 2001. TPSGC a ajouté que Service Star semblait fonder ses arguments sur des inférences qu'elle avait établies à partir de certains messages électroniques échangés entre les représentants de TPSGC. Il a soutenu que les messages électroniques susmentionnés répondaient à d'autres messages et traitaient d'autres questions qui n'étaient pas décrites dans le texte desdits messages électroniques et, par conséquent, qu'ils ne donnaient pas le contexte intégral des événements et des discussions. Selon TPSGC, les allégations en question ne s'appuient que sur l'attribution des pires interprétations possibles à certains passages des messages électroniques susmentionnés. Dans le RIF, TPSGC a donné le contexte desdits messages électroniques.

En réponse à l'allégation selon laquelle la réévaluation a été effectuée en se fondant sur des renseignements autres que ceux qui étaient contenus dans les propositions, TPSGC a soutenu qu'il s'agissait là d'une allégation dénuée de fondement. Il a précisé que l'équipe qui a procédé à la réévaluation a demandé que soit confirmé le nombre d'employés qui assuraient la prestation des services, parce qu'elle savait que Service Star dispensait des services satisfaisants dans le cadre de son contrat et était d'avis que le nombre d'employés utilisés pour obtenir un tel résultat satisfaisant constituerait un point de repère aux fins de la réévaluation7 . TPSGC a soutenu que les renseignements communiqués n'ont ni modifié ni changé l'une quelconque des propositions et qu'ils ont simplement constitué une information de base sur un point de repère auquel une équipe d'évaluation diligente pouvait se reporter pour évaluer un aspect des propositions, à savoir le nombre proposé d'employés.

En ce qui a trait à l'allégation selon laquelle il a été permis à Domus, le soumissionnaire le moins disant, de modifier sa soumission après la clôture des soumissions, TPSGC a soutenu que l'allégation était fausse et que Domus n'a présenté qu'une seule soumission. Selon le RIF, les incohérences au niveau des prix dont Service Star a fait mention pouvaient s'expliquer concrètement par divers facteurs : erreur mathématique; écart entre les chiffres de Domus elle-même à la rubrique « Prix total évalué de la proposition » [traduction] et la somme de ses prix unitaires; taxe sur les produits et services; ventilation des prix soumissionnés selon le « Prix ferme » et « Prix au fur et à mesure des besoins »; erreur typographique. TPSGC a soutenu qu'une fois de tels facteurs dûment définis, cette allégation perdait tout son sens.

Le 19 avril 2002, le Tribunal a demandé à TPSGC d'autres renseignements et des réponses à certaines questions. En réponse, TPSGC a expliqué le renvoi fait dans le RIF à certaines questions et à certains événements8 . Il a aussi soutenu que ses gestionnaires ont déterminé que la première équipe d'évaluateurs, qui étaient des représentants du CNRC, n'avait pas pleinement compris les méthodes énoncées dans la DP. En tenant compte d'un tel fait, les gestionnaires de TPSGC ont déterminé que les résultats techniques initiaux semblaient souffrir d'une anomalie suffisante dans les circonstances pour exiger une vérification ultérieure. De plus, d'un point de vue administratif, TPSGC voulait être convaincu que l'évaluation avait été effectuée correctement avant de déterminer que les propositions de tous les soumissionnaires devaient être rejetées. Il a soutenu qu'une telle vérification était particulièrement importante, étant donné que Service Star et Domus avaient toutes deux dispensé des services satisfaisants dans le cadre de contrats antérieurs de nature et de portée similaires.

Position de Service Star

Service Star a présenté ses observations sur le RIF sous quatre rubriques. Au sujet de l'irrégularité de l'évaluation, invoquant à la fois le « Manuel du client » et le « Guide des approvisionnements » de TPSGC, elle a soutenu que, en tant qu'« équipe », TPSGC et le CNRC étaient tenus d'établir les critères d'évaluation avant la publication de l'invitation à soumissionner et que lesdits critères devaient assurer un examen complet et équitable des soumissions.

Service Star a ajouté que le « point de repère » devait être établi par l'agent des contrats de TPSGC et le client, c.-à-d. le CNRC, en se fondant sur un besoin particulier, et à la lumière de l'expérience et des connaissances combinées de ces deux intervenants, en vue d'inclure les normes de l'industrie et des directives. Elle a ajouté que les objectifs mesurables étaient établis avant la diffusion d'une invitation à soumissionner et non en cours d'évaluation technique. Service Star a soutenu que la réponse de TPSGC était une piètre tentative de détourner l'attention des faits. Elle a soutenu que la simple connaissance des niveaux de dotation courants réduisait à néant la pertinence des exigences de l'invitation à soumissionner quant au personnel proposé par l'entrepreneur et que les besoins courants en dotation faisaient partie intégrante de l'invitation en question comme le démontrait l'appendice « F »9 . En outre, Service Star a soutenu que les propositions devaient être évaluées de manière à mesurer à la fois la compétence du soumissionnaire et la valeur de la démarche technique particulière du soumissionnaire et ne devaient pas faire l'objet d'une comparaison avec l'entrepreneur en place. Service Star a ajouté que TPSGC a omis de communiquer, à l'équipe d'évaluation, l'information pertinente au service satisfaisant dispensé par l'adjudicataire.

Service Star a aussi soutenu que l'autorité contractante responsable aurait dû communiquer à la deuxième équipe d'évaluation de l'information, une orientation et des conseils. Elle a ajouté qu'il était impossible de conclure raisonnablement que la deuxième équipe d'évaluateurs offrait « une expérience plus vaste des services de nettoyage et d'entretien et des méthodes d'évaluation retenues dans l'invitation à soumissionner » [traduction]. Service Star a conclu que le vaste écart des résultats des évaluations des deux équipes indiquait l'existence d'une évaluation irrégulière par la deuxième équipe d'évaluation.

En ce qui a trait aux affirmations de TPSGC relativement au rôle de ce dernier pour assurer l'intégrité de la procédure de passation du marché public, Service Star a réitéré certains des faits énoncés dans sa plainte. Elle a soutenu que les faits n'appuyaient pas les actions de la haute direction visant à renverser la recommandation de l'équipe d'évaluation et de quatre représentants de TPSGC. Service Star a de plus fait valoir qu'il ne s'agissait pas là de questions pertinentes à l'intégrité de la procédure de passation du marché public et que, le cas échéant, l'intervention n'a pas eu lieu dès le début, mais après la diffusion de l'invitation à soumissionner, après la date de clôture des soumissions et après le début du travail de la première équipe d'évaluation.

En ce qui a trait aux procédures inopportunes, Service Star a soutenu que TPSGC n'a pas tenu compte de la partie du « Guide des approvisionnements » qui stipule que, lorsque aucune soumission recevable n'est reçue en réponse à une invitation à soumissionner en régime de concurrence, l'invitation à soumissionner doit être annulée. Elle a réitéré que l'équipe d'évaluation n'a pas évalué les propositions en se fondant sur les critères énoncés dans la DP.

En ce qui a trait à l'évaluation des prix, Service Star a soutenu qu'elle ne pouvait accepter l'explication complexe offerte par TPSGC relativement à l'écart des prix. Elle a ajouté que le « Prix total évalué de la proposition » de Domus, tel que l'a rapporté TPSGC dans le RIF, a été présumé mathématiquement erroné et que TPSGC a omis de produire une confirmation écrite ou des éléments de preuve à l'appui du montant corrigé.

Dans ses observations sur les renseignements soumis par TPSGC en réponse à la demande du Tribunal, Service Star a soutenu que la plainte devait faire l'objet d'un examen par le Tribunal et que ledit examen ne devait pas être fondé sur des questions connexes à son contrat précédent. Elle a en outre soutenu que la haute direction a choisi de nier les connaissances spécialisées de TPSGC et du CNRC durant le processus d'évaluation. Service Star a soutenu qu'il n'a pas été établi que TPSGC avait mis en doute les compétences de l'un quelconque des membres de la première équipe d'évaluation ou leur aptitude à comprendre le guide d'évaluation, ainsi que les critères et les méthodes d'évaluation. Elle a ajouté que, si, de fait, l'équipe d'évaluation avait mal interprété les critères ou les méthodes d'évaluation, il incombait à TPSGC, dans l'exercice de sa surveillance, d'expliquer à nouveau les méthodes et d'exiger que les membres procèdent à une réévaluation à la lumière d'une meilleure compréhension. Service Star a maintenu son affirmation selon laquelle une évaluation irrégulière a été effectuée.

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes de l'article 30.14 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal doit, lorsqu'il a décidé d'enquêter, limiter son étude à l'objet de la plainte. En outre, à la fin de l'enquête, il doit déterminer si la plainte est fondée en fonction des critères et procédures établis pour le contrat spécifique. L'article 11 du Règlement prévoit, notamment, que le Tribunal doit déterminer si le marché public a été passé conformément aux accords commerciaux applicables.

Le Tribunal a déterminé que le présent marché public est assujetti à la fois à l'Accord sur le commerce intérieur 10 et à l'Accord de libre-échange nord-américain 11 . Le CNRC est une entité assujettie aux accords susmentionnés, et les services de nettoyage et d'entretien sont visés dans ces accords. La valeur du marché public atteint les seuils pertinents tant de l'ACI que de l'ALÉNA.

Le paragraphe 506(6) de l'ACI prévoit, notamment, ce qui suit : « Les documents d'appel d'offres doivent indiquer clairement les conditions du marché public, les critères qui seront appliqués dans l'évaluation des soumissions et les méthodes de pondération et d'évaluation des critères. » L'alinéa 1015(4)d) de l'ALÉNA prévoit ce qui suit : « l'adjudication des marchés sera conforme aux critères et aux conditions essentielles spécifiées dans la documentation relative à l'appel d'offres ». En l'espèce, le Tribunal doit décider si TPSGC a adjugé de façon irrégulière le contrat à Domus, contrairement aux exigences énoncées dans la DP.

En ce qui a trait à l'allégation selon laquelle TPSGC a agi d'une manière contraire à la DP lorsqu'il a établi une deuxième équipe d'évaluation pour procéder à une réévaluation des parties techniques des propositions et n'a pas accepté les résultats attribués par la première équipe d'évaluation, le Tribunal conclut qu'il s'agit là d'une allégation dénuée de fondement. Il a examiné avec soin les exposés élaborés des parties sur cette question.

Premièrement, le Tribunal accueille la position de TPSGC selon laquelle la responsabilité du déroulement et des résultats de la procédure de passation du marché public lui incombe et qu'il a donc l'obligation de surveiller tous les aspects du processus, y compris la vérification et l'approbation des résultats de l'évaluation. Deuxièmement, le Tribunal peut comprendre comment les résultats inattendus issus de la première évaluation, qui avait été effectuée par les représentants du CNRC, ont pu, en l'espèce, suscité des doutes dans l'esprit des représentants de TPSGC et des gestionnaires du CNRC. Ces derniers connaissaient l'expérience de Service Star et de Domus ainsi que la qualité satisfaisante du travail accompli par ces deux mêmes fournisseurs dans le cadre de contrats précédents avec le CNRC.

Le Tribunal est d'avis que TPSGC a fait preuve de prudence, dans les circonstances de l'espèce, lorsqu'il a examiné les résultats et a demandé une réévaluation par une équipe d'évaluateurs possédant une plus vaste expérience. Il conclut que TPSGC n'a pas agi d'une manière contraire aux dispositions de la DP et des accords commerciaux en l'espèce.

En ce qui a trait au deuxième motif de plainte, à savoir que la réévaluation a été effectuée en se fondant sur des critères autres que ceux énoncés dans la DP, le Tribunal conclut que ce motif de plainte est dénué de fondement. Il a examiné avec soin le dossier et n'a pas trouvé d'élément de preuve que la deuxième équipe d'évaluation n'avait pas procédé à l'évaluation conformément aux critères énoncés dans la DP. Le Tribunal a pris note de l'augmentation du nombre de points attribués aux propositions techniques des soumissionnaires à l'issue de la deuxième évaluation. Il n'est toutefois pas convaincu que les résultats susmentionnés établissent que la deuxième équipe ait appliqué des critères différents. Le Tribunal est d'avis que les résultats de la réévaluation, à l'issue de laquelle tous les soumissionnaires au lieu d'être déclarés irrecevables ont été déclarés conformes, indiquent bien le caractère problématique de la première évaluation.

En ce qui a trait à l'allégation selon laquelle la deuxième équipe d'évaluation a pris connaissance des propositions financières, le Tribunal est aussi d'avis que ce motif de plainte est dénué de fondement. Il conclut qu'il n'y a pas d'élément de preuve que la deuxième équipe d'évaluation ait le moindrement été au courant des prix. Le Tribunal est convaincu que la procédure normale qui consiste à séparer les propositions financières et à les déposer en lieu sûr avant la tenue de toute évaluation a été suivie en l'espèce. Il n'a pas trouvé d'élément de preuve du contraire. Le Tribunal a examiné avec soin les messages électroniques, les allégations formulées par Service Star et les explications données dans le RIF. Il est d'avis que cet échange de messages électroniques ne montre pas qu'une personne quelconque était au courant des renseignements sur les prix, à l'exception de l'agent de négociation des contrats de TPSGC, avant la fin de l'évaluation technique. L'emploi de certains termes dans les messages électroniques susmentionnés a d'abord rendu le Tribunal quelque peu perplexe, par exemple l'expression « ouvrir les enveloppes de prix » [traduction], tout comme l'ont fait les renvois à des événements et à des questions qui se sont situés au moment de l'invitation à soumissionner, mais l'examen du dossier et des renseignements soumis par TPSGC en réponse aux questions du Tribunal n'a pas révélé de fait présentant un caractère intrinsèquement suspect. Le Tribunal est convaincu qu'il ne convient pas de tirer une conclusion négative à partir de ces messages électroniques et événements connexes.

Le Tribunal conclut que l'allégation selon laquelle la réévaluation a été effectuée en se fondant sur des renseignements autres que ceux inclus dans les soumissions est dénuée de fondement. Il est d'avis que le fait que la deuxième équipe d'évaluation ait demandé la confirmation du nombre d'employés affectés au contrat ne montre pas que la réévaluation a été effectuée d'une manière irrégulière. Le Tribunal a observé que le nombre d'employés, les titres de poste et le nombre d'heures travaillées faisaient partie de l'information contenue à l'appendice « F » de la DP, à laquelle tous les soumissionnaires avaient accès et qui pouvait constituer une certaine forme de point de repère dans l'évaluation des propositions. Il n'est pas convaincu que la deuxième équipe d'évaluation ait utilisé uniquement des chiffres confirmés par TPSGC pour évaluer les propositions relativement aux critères d'évaluation cotés « Organisation et gestion ».

En ce qui a trait à l'allégation selon laquelle il a été permis à Domus de modifier sa soumission après la clôture des soumissions et il y avait écart entre le prix soumis par Domus et le prix du contrat adjugé, le Tribunal accueille les explications communiquées par TPSGC sur ce point. Il est conscient que Service Star n'a pas accès à l'information sur les prix soumise par Domus. Dans un tel contexte, le Tribunal a examiné avec soin tous les éléments de preuve relatifs à l'établissement des prix soumis par TPSGC, à la lumière des allégations formulées, et il est d'avis que lesdites allégations sont dénuées de fondement. Il n'a pas été établi que Domus avait modifié ses prix et que l'évaluation des propositions financières n'avait pas été effectuée de façon régulière.

À la lumière de ce qui précède, le Tribunal conclut que les allégations susmentionnées sont dénuées de fondement et que le marché public a été passé conformément à la DP et aux accords commerciaux pertinents.

Le Tribunal a aussi décidé que les circonstances de l'espèce ne justifient pas le remboursement des frais par Service Star. Par conséquent, il n'est pas nécessaire de déposer des exposés à ce sujet.

DÉCISION DU TRIBUNAL

À la lumière de ce qui précède, aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal détermine que la plainte n'est pas fondée.

1 . L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47 [ci-après Loi sur le TCCE].

2 . D.O.R.S./93-602 [ci-après Règlement].

3 . D.O.R.S./91-499.

4 . Service électronique d'appel d'offres du Canada.

5 . L'équipe d'évaluation technique était composée de quatre représentants du CNRC.

6 . L.R.C. 1985, c. A-1.

7 . Le 26 juin 2001, en réponse à sa question, l'équipe de réévaluation a été informée que l'entrepreneur titulaire, Service Star, affectait 59 employés à la prestation des services requis.

8 . RIF, paras. 18.

9 . L'appendice « F » de la DP s'intitule « Information sur les employés titulaires ». Il fait état du nombre de personnes employées par Service Star au moment de l'invitation à soumissionner, du titre de leur poste, de la date de leur embauche, des taux horaires et du nombre d'heures travaillées par semaine.

10 . 18 juillet 1994, Gaz. C. 1995.I.1323, en ligne : Secrétariat du commerce intérieur <http://www.intrasec.mb.ca/fre/it.htm> [ci-après ACI].

11 . 32 I.L.M. 289 (entré en vigueur le 1er janvier 1994) [ci-après ALÉNA].


[ Table des matières]

Publication initiale : le 24 juin 2002