MONTAGE-DMC EBUSINESS SERVICES, A DIVISION OF AT&T CANADA

Décisions


MONTAGE-DMC EBUSINESS SERVICES, A DIVISION OF AT&T CANADA
Dossier no PR-2003-013


TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le vendredi 12 septembre 2003

Dossier no PR-2003-013

EU ÉGARD À une plainte déposée par Montage-DMC eBusiness Services, A Division of AT&T Canada, aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47;

ET À LA SUITE D'une décision d'enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte n'est pas fondée.

Aux termes de l'article 30.16 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur accorde à l'Agence des douanes et du revenu du Canada le remboursement des frais raisonnables qu'elle a engagés pour répondre à la plainte, lesdits frais devant être payés par Montage-DMC eBusiness Services, A Division of AT&T Canada.

Meriel V.M. Bradford
Meriel V.M. Bradford
Membre présidant

Richard Lafontaine
Richard Lafontaine
Membre

James A. Ogilvy
James A. Ogilvy
Membre

Michel P. Granger
Michel P. Granger
Secrétaire

Date de la décision et des motifs :

Le 12 septembre 2003

   

Membres du Tribunal :

Meriel V.M. Bradford, membre présidant

 

Richard Lafontaine, membre

 

James A. Ogilvy, membre

   

Agent principal d'enquête :

Peter Rakowski

   

Conseiller pour le Tribunal :

Michèle Hurteau

   

Partie plaignante :

Montage-DMC eBusiness Services, A Division of AT&T Canada

   

Intervenante :

Cognos Incorporated

   

Conseillers pour l'intervenante :

Ronald D. Lunau

 

Catherine Beaudoin

   

Institution fédérale :

Agence des douanes et du revenu du Canada

   

Conseiller pour l'institution fédérale :

David M. Attwater

EXPOSÉ DES MOTIFS

PLAINTE

Le 30 avril 2003, Montage-DMC eBusiness Services, A Division of AT&T Canada (Montage), a déposé une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur 1 . La plainte portait sur un marché passé par l'Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC) (invitation n1000160306) pour la fourniture d'un accord d'octroi de licence et de soutien visant un logiciel d'exploitation des données commerciales.

Montage a soutenu que, en contravention des accords commerciaux, l'ADRC n'avait pas appliqué correctement les critères d'évaluation publiés étant donné qu'elle avait incorrectement conclu que la proposition de Montage n'était pas conforme. Montage a également soutenu que l'ADRC n'avait pas formulé clairement les critères d'évaluation et qu'elle avait inclus des termes qui étaient ambigus ou qui donnaient lieu à plus d'une interprétation raisonnable quant aux exigences portant sur les « prix unitaires fermes » et sur les « achats différentiels ». Montage a également soutenu que l'ADRC n'avait pas suivi la séquence du processus d'évaluation énoncé dans les documents d'appel d'offres et qu'elle n'avait pas assuré à tous les fournisseurs canadiens un accès égal au marché public.

Montage a demandé que le contrat adjugé soit résilié et que les propositions soient réévaluées. Elle a également demandé que si, à la suite de la réévaluation, sa proposition est celle qui obtient la plus haute cote, le contrat spécifique lui soit adjugé. Comme alternative, Montage a demandé un dédommagement d'un montant égal à sa perte de profits et d'occasion, et le remboursement des frais qu'elle a engagés pour répondre à l'appel d'offres ainsi que des frais relatifs à la présente procédure.

Le 7 mai 2003, le Tribunal a avisé les parties qu'il avait décidé d'enquêter sur la plainte, aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le TCCE et du paragraphe 7(1) du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics 2 . Le 23 mai 2003, le Tribunal a accordé à Cognos Incorporated (Cognos) le statut d'intervenante et, le 26 mai 2003, à la suite d'une requête de l'ADRC, le Tribunal a prorogé le délai de dépôt du rapport de l'institution fédérale (RIF). Le 9 juin 2003, l'ADRC a déposé un RIF auprès du Tribunal en application de l'article 103 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur 3 . Le 16 juin 2003, Cognos a déposé ses commentaires sur le RIF et, le 19 juin 2003, Montage a déposé ses commentaires sur le RIF.

La quantité des renseignements au dossier étant suffisante pour déterminer le bien-fondé de la plainte, le Tribunal a décidé qu'une audience n'était pas nécessaire et a statué sur la plainte sur la foi des renseignements au dossier.

PROCÉDURE DE PASSATION DU MARCHÉ PUBLIC

Le 18 décembre 2002, l'ADRC a diffusé une demande de propositions (DP) par l'entremise du MERX, le Service électronique d'appel d'offres du Canada. La DP a été diffusée dans le but d'acquérir un accord d'octroi de licence et de soutien visant un logiciel d'exploitation de données commerciales.

La section 3.3.3 de la DP prévoit en partie ce qui suit :

On utilisera la méthode qui suit pour évaluer les propositions reçues. Le processus d'évaluation comprendra les étapes suivantes :

Étape 1 : Modalités et proposition technique - Évaluation des exigences obligatoires

a) La conformité de chaque proposition avec les exigences obligatoires de la DP sera examinée en veillant à ce que :

i) toutes les exigences obligatoires énoncées aux sections 1, 2, 4 et 5 du texte principal de la présente DP et de l'ÉB [Agence des douanes et du revenu du Canada, Énoncé des besoins (opérationnels et techniques)] soient respectées;

ii) l'exposé narratif technique de chacun des articles démontre et corrobore que la proposition satisfait aux exigences obligatoires de l'ÉB;

iii) une proposition financière soit incluse, conformément à l'annexe « C ». Cela sera également vérifié pendant l'étape de l'évaluation financière;

iv) tous les documents et renseignements obligatoires exigés dans la présente DP, y compris l'ÉB soient soumis.

b) À toute étape de l'évaluation, si une exigence obligatoire n'est pas respectée, la proposition sera considérée comme étant non conforme et sera éliminée. Une proposition sera considérée non conforme si elle n'est pas appuyée par les renseignements nécessaires et suffisants détaillant comment elle est conforme aux exigences obligatoires.

[Traduction]

L'exigence obligatoire M-106 énoncée à la section 3.11.1 de l'annexe A de la DP prévoit ce qui suit :

Le soumissionnaire doit offrir l'achat différentiel de licences jusqu'à un plafond défini par le modèle d'octroi de licence de l'entreprise, plafond qui constituera le seuil à partir duquel le modèle d'octroi de licence de l'entreprise entrera en vigueur.

[Traduction]

La période d'invitation à soumissionner a pris fin le 6 février 2003. Cinq propositions ont été reçues, provenant de quatre entreprises différentes. Le 6 février 2003, l'agent de négociation a procédé à un examen initial des propositions pour vérifier leur conformité avec les exigences obligatoires. Deux propositions, dont celle de Montage, ont été jugées non conformes aux exigences obligatoires.

Le 14 avril 2003, le contrat a été adjugé à Cognos. À la même date, Montage a été informée que sa proposition avait été jugée non conforme à l'exigence obligatoire d'offrir un prix unitaire ferme par utilisateur unique, conformément à l'annexe C de la DP.

Le 24 avril 2003, une réunion d'information a été tenue avec Montage et, le 30 avril 2003, Montage a déposé sa plainte auprès du Tribunal.

POSITIONS DES PARTIES

Position de l'ADRC

L'ADRC a soutenu que la proposition de Montage a été déclarée non conforme d'une manière conforme aux critères d'évaluation énoncés dans la DP. Selon l'ADRC, le processus d'évaluation, énoncé à la section 3.3.3 de la DP, comporte cinq étapes. L'étape 1, au paragraphe 3.3.3(a), prévoit en partie ce qui suit :

La conformité de chaque proposition avec les exigences obligatoires de la DP sera examinée en veillant à ce que :

(iii) une proposition financière soit incluse, conformément à l'annexe « C ». Cela sera également vérifié pendant l'étape de l'évaluation financière.

[Traduction]

L'ADRC a soutenu que l'étape 1 du processus d'évaluation comprenait un examen des propositions financières pour s'assurer que ces dernières soient complétées en conformité avec l'annexe C de la DP. L'ADRC a également soutenu que le paragraphe 3.3.3(b) de la DP prévoit que les propositions peuvent être considérées non conformes à toute étape de l'évaluation si elles ne sont pas conformes à une exigence obligatoire. Ainsi, selon l'ADRC, l'agent de négociation s'est livré à un examen initial des propositions financières, conformément au sous-paragraphe 3.3.3(a)(iii), pour s'assurer qu'elles étaient conformes à l'annexe C.

L'ADRC a soutenu que l'agent de négociation avait examiné la proposition de Montage et qu'il avait déterminé qu'elle n'était pas conforme à l'annexe C de la DP et que cela constituait une violation de l'exigence obligatoire M-106 parce qu'elle ne suivait pas la structure des prix de l'annexe C. L'ADRC a soutenu que la proposition n'avait pas été transmise à l'équipe d'évaluation technique. L'ADRC a également soutenu que le paragraphe 3.3.3(g) de la DP exigeait des soumissionnaires qu'ils fournissent un « prix ou taux » (c.-à-d. un prix ou un taux unique) pour tous les articles de l'annexe C. L'ADRC a soutenu que l'exigence d'un prix unitaire ou de lot unique est confirmée par les en-têtes des colonnes « PRIX UNITAIRE FERME » [traduction] et « PRIX UNITAIRE OU DE LOT FERME » [traduction] à l'annexe C. Selon l'ADRC, la proposition de Montage prévoyait deux taux différents pour les articles 1 et 3 à 6 de l'annexe C et, par conséquent, elle a été déclarée non conforme aux exigences obligatoires de la DP. Selon l'ADRC, Montage a révisé l'annexe C en ajoutant une nouvelle colonne, intitulée « Prix évalué » [traduction], et elle a dit à l'ADRC ce que devrait être le prix évalué. De plus, la proposition de Montage utilisait deux méthodes distinctes pour calculer le prix évalué.

L'ADRC a prétendu que la proposition de Montage démontrait qu'elle avait clairement compris comment les propositions seraient évaluées, puisque sa proposition financière additionnait les prix évalués pour calculer le prix évalué total. L'ADRC a soutenu que, aux termes du paragraphe 3.3.3(h) de la DP, le coût par point était calculé en « divisant le prix évalué total par le nombre total de points attribués » [traduction] et elle a déclaré qu'aucun soumissionnaire n'avait demandé de clarification quant à la structure des prix de l'annexe C de la DP.

L'ADRC a également soutenu que le paragraphe 2.6.1(d) de la DP garantit que le coût annuel pour la maintenance et le soutien aux termes de la licence d'entreprise, avec plus de 8 000 utilisateurs de licence, est relativement inférieur ou égal au coût annuel de maintenance et de soutien payé par l'ADRC avant l'obtention de la licence d'entreprise. Le paragraphe 2.6.1(d) se lit ainsi :

Il est obligatoire que le coût unitaire pour la maintenance et le soutien des articles 7, 8 et 9 de l'annexe « C » soit égal ou inférieur aux coûts les plus bas des articles 3, 4, 5 ou 6 multipliés par 8 000.

[Traduction]

Selon l'ADRC, aux fins d'évaluation, le paragraphe 2.6.1(d) de la DP obligeait l'ADRC à multiplier par 8 000 le prix unitaire ferme offert par un soumissionnaire pour les articles 3 à 6 et à comparer le résultat aux prix annuels cités par le soumissionnaire pour les articles 7, 8 et 9. De l'avis de l'ADRC, les soumissionnaires ont raisonnablement bien compris que le paragraphe 2.6.1(d) signifiait qu'ils devaient soumettre un prix unitaire ferme et unique pour tous les articles dénommés. De même, la formule pour calculer le prix évalué total utilisée pour calculer le coût par point constituait une indication supplémentaire de l'exigence de soumettre un prix unitaire ferme unique pour tous les articles de l'annexe C de la DP. De plus, l'ADRC a soutenu que, quand on considère le paragraphe 3.3.3(g) dans le contexte global de la DP, il est raisonnable de l'interpréter comme exigeant soit un prix unitaire ferme et unique, soit un prix de lot ferme et unique, soit un taux per diem unique pour chaque article de l'annexe C. L'ADRC a donc soutenu que la proposition de Montage avait correctement été déclarée non conforme à l'exigence obligatoire de fournir un prix unitaire ferme et unique pour l'article 1 et un prix annuel ferme et unique par identificateur d'utilisateur pour les articles 3 à 6 de l'annexe C.

L'ADRC a expressément nié que la DP était ambiguë quant à son exigence d'un prix unitaire ou de lot unique. L'ADRC a soutenu que, considérée dans le contexte, la DP ne permet pas raisonnablement plus d'un prix par article de l'annexe C de la DP. L'ADRC a soutenu que, comme alternative, toute ambiguïté dans la DP est apparente au vu même de son libellé et que, par conséquent, la plainte de Montage relative à l'ambiguïté avait été déposée après la date limite de dépôt imposée par l'article 6 du Règlement.

L'ADRC a soutenu que la proposition de Montage n'offrait pas d'achats différentiels des licences de logiciel, mais obligeait l'ADRC à payer l'accès illimité, comme une licence d'entreprise, avec l'achat de la première licence. Selon l'ADRC, la proposition de Montage requiert une acquisition unique de toutes les licences de logiciel. Au lieu d'offrir l'achat différentiel de licences de logiciel, Montage vend une licence d'entreprise.

Enfin, l'ADRC a demandé le remboursement des frais qu'elle a engagés pour répondre à la plainte.

Position de Montage

Montage a fait valoir que, au moment d'évaluer sa proposition, l'ADRC avait appliqué les critères d'une façon non conforme aux critères énoncés dans les documents d'appel d'offres. Elle a soutenu que l'ADRC n'avait pas formulé clairement certaines exigences obligatoires et n'avait pas suivi le processus d'évaluation prescrit. Enfin, Montage a soutenu que l'ADRC avait procédé à l'évaluation d'une manière qui n'assurait pas un accès égal à tous les fournisseurs.

Montage a soutenu que sa proposition comprend un prix unitaire ferme et un prix de lot ferme et que l'exigence fondamentale en l'espèce est énoncée au paragraphe 2.6.1(a) de la DP, qui obligeait les soumissionnaires à citer « des prix unitaires fermes, des prix de lot fermes ou des taux per diem fermes pour tous les articles énumérés à l'annexe "C" » [traduction]. Montage a soutenu également qu'il était correct d'interpréter la signification simple de cette disposition comme exigeant un prix unitaire à l'intérieur duquel le prix est fixe ou certain. Selon Montage, sa proposition aurait permis à l'ADRC de satisfaire tous ses besoins d'exploitation et de licence.

Montage a également soutenu que, si l'ADRC exigeait un prix unitaire ferme et unique par utilisateur unique, comme il était indiqué dans le RIF, l'ADRC aurait dû l'énoncer clairement dans la DP. Selon Montage, le RIF insère le mot « unique » à la suite des références à « prix unitaires fermes », ce qui met en évidence l'absence de ce terme dans la DP et qui illustre la signification de cette absence. Montage a soutenu que, si l'ADRC avait besoin d'un prix unique par utilisateur unique, elle aurait dû le préciser dans la DP. Le fait qu'elle ne l'a pas précisé n'est pas un motif pour rejeter une soumission conforme à l'exigence de « prix unitaires fermes ».

Montage a soutenu que, selon une règle fondamentale d'interprétation des contrats, dans les cas où il y a un doute quant à la signification d'un terme donné, le terme en question doit être interprété contra preferentem, c.-à-d. contre la partie qui a rédigé la disposition.

Montage a soutenu que, en l'espèce, la signification de « prix unitaires fermes » et « prix de lot fermes » est claire et que sa proposition est conforme à ces exigences. Cependant, Montage a soutenu que, si le Tribunal jugeait que la signification était ambiguë, il devrait appliquer la règle contra preferentem et se prononcer contre l'ADRC sur cette question.

Selon Montage, le prix de sa proposition était fixé à un montant établi, ce qui permettait à l'ADRC de savoir à l'avance le coût exact d'acquisition des licences, et l'ADRC a structuré les critères d'évaluation de façon à ce que la valeur de l'évaluation utilisée pour calculer le coût le plus bas par point soit fondée sur la quantité précisée à l'annexe C de la DP.

Montage a soutenu que sa proposition offrait des achats différentiels et qu'elle prévoit des achats différentiels. Selon Montage, l'ADRC substitue le terme « achat différentiel » pour « établissement des prix différentiels » dans le RIF.

Selon Montage, l'émission de factures distinctes pour chaque utilisateur unique subséquent jusqu'au niveau de l'entreprise n'est pas « déraisonnable »; au contraire, elle est nécessaire pour autoriser l'utilisation de licences par l'ADRC, pour suivre le nombre de licences acquises jusqu'au niveau de l'entreprise et pour que Montage puisse réconcilier l'octroi des licences avec l'éditeur de logiciel, Business Objects.

Selon Montage, le RIF caractérise de façon erronée la structure juridique de l'établissement des prix et de l'octroi des licences fournis dans la proposition de Montage et, en matière de droit, il est incorrect de déclarer que l'ADRC fait l'acquisition d'un accès illimité aux licences et à la maintenance avec l'achat de la première licence. Ainsi, Montage a soutenu que, au contraire, l'ADRC devrait acheter chaque licence subséquente ainsi que la maintenance y afférente avant d'avoir le droit d'utiliser la licence et d'acquérir la maintenance y afférente. Selon Montage, l'ADRC a un avantage financier à procéder à l'acquisition de licences subséquentes jusqu'au niveau de l'entreprise. Cependant, Montage a soutenu que cela ne change rien au fait que sa proposition permettait les achats différentiels.

Montage a soutenu que le RIF avait soulevé de nouveaux motifs de non-conformité eu égard aux paragraphes 2.6.1(d) et 3.3.3(h) de la DP et que le Tribunal n'a pas compétence pour en disposer. Selon Montage, le RIF a soulevé des motifs de non-conformité nouveaux et non préalablement révélés, qui ne lui avaient pas été communiqués et qui ne sont pas pertinents à l'objet de la plainte. Montage a indiqué que l'article 30.14 de la Loi sur le TCCE stipule que, « dans son enquête, le Tribunal doit limiter son étude à l'objet de la plainte ». Montage a soutenu qu'il n'est pas permis à l'ADRC, dans le contexte d'une enquête en cours sur les marchés publics, d'avancer ex post facto des justifications pour déclarer une proposition non conforme alors que la non-conformité alléguée n'a jamais été communiquée au fournisseur, et que le motif allégué de non-conformité n'est pas inclus dans l'objet de la plainte. Montage a soutenu que toutes les références contenues dans le RIF et portant sur le paragraphe 3.3.3(h) relatif à l'« Étape 4 : Validité de la proposition » [traduction] et sur le paragraphe 2.6.1(d) relatif à la formule des coûts pour la maintenance annuelle, devraient être ignorées dans leur totalité.

Comme alternative, si le Tribunal se déclarait compétent pour instruire les plaintes de l'ADRC portant sur les paragraphes 2.6.1(d) et 3.3.3(h) de la DP, Montage a soutenu que sa proposition était conforme à cette disposition. Selon Montage, le coût annuel de la maintenance et du soutien peut être calculé facilement en utilisant la formule précisée au paragraphe 2.6.1(d), et le prix qui en résulte a été inclus dans sa proposition. Montage a aussi soutenu que, dans une affaire précédente portant sur une question semblable, le Tribunal avait conclu que la Couronne ne pouvait pas juger une proposition non conforme en de telles circonstances; cela équivaudrait à laisser la forme l'emporter sur le fond.

Montage a soutenu que l'ADRC n'avait pas suivi le processus d'évaluation décrit dans les documents d'appel d'offres. Selon Montage, l'évaluation des exigences obligatoires énoncées à la section 3.3.3 de la DP obligeait l'ADRC à examiner la conformité des propositions avec toutes les exigences obligatoires de la DP. De plus, Montage a soutenu que, selon la section 3.3.3, si à toute étape de l'évaluation une exigence obligatoire n'est pas respectée, la proposition « serait considérée comme non conforme et serait éliminée » [traduction]. Montage a fait valoir que, si l'ADRC avait appliqué la méthode établie dans la DP, sa proposition n'aurait pas dû être évaluée en fonction des critères des étapes 3 et 4.

Montage a expressément nié que sa proposition n'était pas conforme à toutes les exigences obligatoires de la DP. Montage a poursuivi en indiquant que, quand l'ADRC avait décidé que sa proposition ne satisfaisait pas aux exigences de l'étape 1 du processus d'évaluation, la proposition aurait dû être éliminée ainsi qu'il est clairement stipulé à la section 3.3.3 de la DP. Selon Montage, l'évaluation subséquente de sa proposition en fonction des critères d'évaluation des étapes 3 et 4 n'est pas conforme au paragraphe 506(6) de l'Accord sur le commerce intérieur 4 , à l'alinéa 1015(4)c) de l'Accord de libre-échange nord-américain 5 et à l'article XII(4) de l'Accord sur les marchés publics 6 , et soulève de graves inquiétudes quant à la conduite de l'évaluation en l'espèce.

Position de Cognos

Cognos a soutenu que Montage n'avait pas offert un prix unitaire ferme pour les articles 1 et 3 à 6 de l'annexe C de la DP, comme cela était demandé, mais que la proposition de Montage exigeait essentiellement que l'ADRC achète une licence d'entreprise. Par conséquent, selon Cognos, la proposition de Montage était contraire aux exigences de la DP.

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes du paragraphe 30.14(1) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal doit, dans son enquête, limiter son étude à l'objet de la plainte. En outre, à la fin de l'enquête, il doit déterminer la validité de la plainte en fonction des critères et procédures établis par règlement pour le contrat spécifique. De plus, l'article 11 du Règlement prévoit que le Tribunal doit déterminer si le marché public a été passé conformément aux accords commerciaux applicables, à savoir, en l'espèce, l'ALÉNA, l'ACI et l'AMP.

Montage a allégué que l'ADRC avait enfreint les accords commerciaux des manières suivantes :

· L'ADRC a appliqué des critères d'une façon non conforme aux critères établis dans les documents d'appel d'offres, en violation du paragraphe 506(6) de l'ACI, de l'alinéa 1015(4)d) de l'ALÉNA et de l'alinéa XIII(4)c) de l'AMP.

· Par ailleurs, l'ADRC n'a pas formulé clairement certaines des exigences obligatoires, en violation du paragraphe 506(6) de l'ACI, des alinéas 1013(1)h) et 1013(1)j) de l'ALÉNA et des alinéas XII(2)h) et XII(2)j) de l'AMP.

· L'ADRC n'a pas suivi le processus d'évaluation prescrit, en violation du paragraphe 506(6) de l'ACI, des alinéas 1013(1)h) et 1013(1)j) de l'ALÉNA et de l'alinéa XIII(4)c) de l'AMP.

· L'ADRC a procédé à l'évaluation d'une façon qui n'assurait pas un accès égal à tous les fournisseurs, en violation de l'article 501 de l'ACI.

Le Tribunal traitera de chacun des motifs de plainte soumis par Montage.

En ce qui concerne l'allégation de Montage selon laquelle l'ADRC a appliqué les critères d'une façon non conforme aux critères contenus dans les documents d'appel d'offres, le Tribunal ne voit aucun élément de preuve à l'appui de la conclusion que le critère concernant les « prix unitaires fermes » et les « achats différentiels » indiqués dans la DP avait été appliqué de façon non conforme à la DP. De plus, l'annexe C de la DP, que les soumissionnaires devaient obligatoirement compléter, présente clairement les éléments d'établissement des prix à propos desquels les soumissionnaires devaient fournir des renseignements. Le Tribunal fait également remarquer que le paragraphe 3.3.3(g) de la DP prévoit ce qui suit :

L'omission ou le refus de fournir un prix ou un taux pour l'un des articles de l'annexe « C » sera considéré comme un manquement à une exigence obligatoire de la DP et, par conséquent, la proposition du soumissionnaire sera éliminée.

[Traduction]

Ainsi, l'exigence de fournir un prix pour tous les articles de l'annexe C de la DP est très claire. Montage a changé l'annexe C pour incorporer son propre modèle d'établissement des prix et elle a fourni deux prix à l'annexe C pour l'article 1, « Accord de licence pour un outil d'exploitation de données » [traduction], pour le prix ferme demandé par l'ADRC pour chaque utilisateur unique. Le Tribunal conclut que le modèle d'établissement des prix n'autorisait pas les soumissionnaires à fournir deux prix et que l'exigence de fournir un prix unitaire ferme pouvant être utilisé pour les achats différentiels n'était pas ambiguë. Étant donné la structure de la proposition de Montage en ce qui concerne cette exigence et étant donné les exigences de la DP prises dans leur ensemble, le Tribunal est d'avis que l'ADRC n'a pas agi d'une façon contraire à la DP en déclarant la proposition non conforme. Par conséquent, le Tribunal conclut que la plainte de Montage pour ce motif n'est pas fondée.

De plus, en ce qui concerne l'autre plainte de Montage selon laquelle l'ADRC n'a pas formulé clairement certaines exigences obligatoires, le Tribunal est d'avis que, si Montage avait des doutes quant à l'une des exigences obligatoires de l'invitation, elle aurait dû les soulever pendant le processus d'appel d'offres. Il est permis de poser des questions à l'étape du processus d'appel d'offres afin que les soumissionnaires potentiels puissent clarifier les exigences de l'invitation. Par conséquent, le Tribunal est d'avis que Montage a eu l'occasion de demander des éclaircissements sur certaines exigences obligatoires et ne l'a pas fait. De plus, le Tribunal est d'avis que Montage n'a pas déposé sa plainte relative à ce motif dans les délais prescrits au paragraphe 6(1) du Règlement. Ainsi, le Tribunal conclut que ce motif de plainte est survenu de façon tardive.

Montage a allégué que l'ADRC avait examiné sa proposition à l'étape 3 du processus d'évaluation, malgré le fait qu'elle l'avait déclarée non conforme à l'étape 1 de l'évaluation. Selon Montage, ceci contrevient au paragraphe 3.3.3(b) de la DP qui stipule qu'une proposition sera éliminée si elle ne satisfait pas à toutes les exigences obligatoires. Par conséquent, Montage a allégué que l'ADRC n'avait pas suivi le processus d'évaluation prescrit. Le Tribunal n'accepte pas l'argument de Montage à cet effet, étant donné que le sous-paragraphe 3.3.3(a)(iii) indique clairement que chaque proposition, y compris une proposition financière, doit être examinée quant à sa conformité avec toutes les exigences obligatoires. Le Tribunal est d'avis que l'exigence de fournir un prix ou un taux est obligatoire et que la proposition a été correctement examinée pour déterminer si elle satisfaisait à l'exigence aux termes du paragraphe 3.3.3(g). Le Tribunal prend note de l'observation de l'ADRC selon laquelle la proposition n'a pas été transmise à l'équipe d'évaluation technique. Le Tribunal n'est pas convaincu que les éléments de preuve au dossier indiquent le contraire. Par conséquent, le Tribunal conclut que ce motif de plainte n'est pas fondé.

Enfin, Montage a allégué que l'ADRC avait procédé à l'évaluation d'une façon qui n'assurait pas à tous les fournisseurs un accès égal aux marchés publics, en violation de l'article 501 de l'ACI. Aucun autre détail n'a été fourni. Après avoir examiné cette allégation, le Tribunal conclut qu'aucun élément de preuve n'appuie ce motif. Le Tribunal conclut donc que ce motif de plainte n'est pas fondé.

Étant donné les conclusions susmentionnées, le Tribunal ne juge pas nécessaire d'examiner les prétentions de l'ADRC concernant les paragraphes 2.6.1(d) et 3.3.3(h) de la DP.

À la lumière de ce qui précède, le Tribunal conclut que la plainte n'est pas fondée.

L'ADRC a demandé le remboursement des frais qu'elle a engagés pour répondre à la plainte. En réponse à la demande de l'ADRC, le Tribunal accorde à l'ADRC le remboursement des frais raisonnables qu'elle a engagés pour répondre à la plainte.

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal détermine que la plainte n'est pas fondée.

Aux termes de l'article 30.16 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal accorde à l'ADRC le remboursement des frais raisonnables qu'elle a engagés pour répondre à cette plainte, lesdits frais devant être payés par Montage.


1 . L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47 [Loi sur le TCCE].

2 . D.O.R.S./93-602 [Règlement].

3 . D.O.R.S./91-499.

4 . 18 juillet 1994, Gaz. C. 1995.I.1323, en ligne : Secrétariat du commerce intérieur <http://www.intrasec.mb.ca/fre/it.htm> [ACI].

5 . 32 I.L.M. 289 (entré en vigueur le 1er janvier 1994) [ALÉNA].

6 . 15 avril 1994, en ligne : Organisation mondiale du commerce <http://www.wto.org/french/docs_f/legal_f/final_f.htm> [AMP].