BOSIK VEHICLE BARRIERS LTD.

Décisions


BOSIK VEHICLE BARRIERS LTD.
c.
MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX
Dossier no PR-2003-082

Décision rendue
le jeudi 6 mai 2004

Motifs rendus
le jeudi 13 mai 2004


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À une plainte déposée par Bosik Vehicle Barriers Ltd. aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47;

ET À LA SUITE D'une décision d'enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

ENTRE

 

BOSIK VEHICLE BARRIERS LTD.

Partie plaignante

ET

 

LE MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

Institution fédérale

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte n'est pas fondée.

Aux termes de l'article 30.16 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur accorde au ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux le remboursement des frais raisonnables qu'il a engagés pour répondre à la plainte, ces frais devant être payés par Bosik Vehicle Barriers Ltd. L'indication provisoire du degré de complexité de la présente plainte pour le Tribunal canadien du commerce extérieur est le degré 1, et l'indication provisoire du montant de l'indemnisation est de 1 000 $. Si l'une ou l'autre des parties n'est pas d'accord en ce qui a trait à l'indication provisoire du degré de complexité ou de l'indication provisoire du montant de l'indemnisation, elle peut déposer des observations auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur, en conformité avec sa Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure portant sur un marché public. Le Tribunal canadien du commerce extérieur se réserve le droit de fixer le montant final de l'indemnisation.

Ellen Fry
Ellen Fry
Membre présidant

Susanne Grimes
Susanne Grimes
Secrétaire intérimaire

L'exposé des motifs suivra à une date ultérieure.

Membre du Tribunal :

Ellen Fry, membre présidant

   

Agent d'enquête :

Michael W. Morden

   

Conseiller pour le Tribunal :

Reagan Walker

   

Partie plaignante :

Bosik Vehicle Barriers Ltd.

   

Conseiller pour la partie plaignante :

Paul Donovan

   

Intervenante :

SPX Canada Ltd.

   

Conseillers pour l'intervenante :

Mark N. Sills

 

Jennifer L. Egsgard

   

Institution fédérale :

Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux

   

Conseillers pour l'institution fédérale :

David M. Attwater

 

Christianne M. Laizner

 

Susan D. Clarke

 

Ian McLeod

Adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : (613) 993-4717
Télécopieur : (613) 990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

PLAINTE

1. Le 22 mars 2004, Bosik Vehicle Barriers Ltd. (Bosik) a déposé une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur 1 . La plainte portait sur le marché (invitation no W0103-031TAY/A) passé par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (TPSGC), au nom du ministère de la Défense nationale (MDN), pour la fourniture, l'installation, la mise à l'essai et le bon fonctionnement de barrières de route élévatrices à la Base des Forces canadiennes (BFC) Esquimalt.

2. Bosik a allégué que le soumissionnaire retenu, SPX Canada Ltd. (SPX), n'était pas conforme à l'une des exigences obligatoires de la demande de propositions (DP). Plus précisément, Bosik a soutenu que SPX a proposé un produit qui ne satisfaisait pas au critère du temps d'actionnement énoncé dans la DP.

3. Bosik demande, à titre de mesure corrective, que TPSGC résilie le contrat adjugé à SPX et le lui adjuge à elle, puisqu'elle est le seul soumissionnaire techniquement conforme. À titre de mesure corrective de rechange, elle a demandé à recevoir une indemnité en reconnaissance de la perte de profits ou d'occasion qu'elle a subie parce qu'elle a été privée de l'occasion d'exécuter le contrat. Bosik a aussi demandé que lui soit accordé le remboursement des frais raisonnables qu'elle a engagés pour la préparation de la présente soumission et relativement à sa plainte. Enfin, Bosik a demandé que le Tribunal applique à la plainte la procédure expéditive prévue à l'article 107 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur 2 .

4. Le 31 mars 2004, le Tribunal a avisé les parties qu'il avait décidé d'enquêter sur la plainte, puisque cette dernière répondait aux exigences du paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE et aux conditions énoncées au paragraphe 7(1) du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics 3 . Le Tribunal a aussi avisé les parties que, conformément au paragraphe 107(4) des Règles, il appliquerait la procédure expéditive en l'espèce. Le 7 avril 2004, SPX, l'adjudicataire du contrat, a demandé l'autorisation d'intervenir dans l'affaire au Tribunal, qui la lui a accordée. Le 13 avril 2004, TPSGC a déposé son rapport de l'institution fédérale (RIF) auprès du Tribunal. Le 15 avril 2004, le Tribunal a demandé des renseignements complémentaires à TPSGC au sujet du RIF, et les a reçus le 16 avril 2004. Bosik et SPX ont déposé leurs observations sur le RIF le 21 avril 2004. Le 22 avril 2004, Bosik a déposé une version publique de ses observations sur le RIF, ainsi que ses observations sur les renseignements complémentaires déposés par TPSGC. Le Tribunal remarque que ni TPSGC ni SPX n'ont demandé au Tribunal de réexaminer sa décision d'appliquer la procédure expéditive.

5. La quantité des renseignements au dossier étant suffisante pour déterminer le bien-fondé de la plainte, le Tribunal a décidé qu'une audience n'était pas nécessaire et a statué sur la plainte sur la foi des renseignements au dossier.

PROCÉDURE DE PASSATION DU MARCHÉ PUBLIC

6. TPSGC a diffusé la DP, au nom du MDN, le 22 décembre 2003, la date de clôture pour la réception des soumissions étant fixée au 16 janvier 2004.

7. La page 5 de la partie 2 de DP, sous la rubrique « Évaluation », prévoyait en partie ce qui suit :

Méthode de sélection : Pour être jugée recevable, une soumission doit satisfaire à TOUTES les exigences de l'invitation, y compris les exigences OBLIGATOIRES. Les soumissions qui ne répondent pas à toutes les exigences seront éliminées. On recommandera la soumission recevable au prix global le plus bas aux fins de l'adjudication d'un contrat ou de l'établissement d'une offre à commandes, selon le cas.

[Traduction]

8. La page 6 de la partie 2 de la DP, que chaque soumissionnaire devait retourner avec sa proposition, prévoyait en partie ce qui suit :

 

EXIGENCES OBLIGATOIRES

SATISFAITES

Les soumissionnaires doivent proposer des barrières de route élévatrices homologuées pour une vitesse de collision :

1

Minimum de 30 m/h (48 km/h)

-OUI

non

2

Toutes les barrières doivent pouvoir être actionnées à distance par un seul commutateur, soit indépendamment soit après actionnement

-OUI

non

3

Toutes les barrières doivent être assorties d'un feu d'arrêt à commande indépendante et d'un signal d'avertissement sonore

-OUI

non

4

Toutes les barrières doivent être assujetties à une fonction de surpassement manuel pour qu'il soit possible de les commander manuellement en cas de panne d'électricité

-OUI

non

5

Le temps d'actionnement ne doit pas dépasser 3 secondes

-OUI

non

6

Toutes les barrières doivent être montées en surface et s'éjecter immédiatement à l'actionnement

-OUI

non

7

Toutes les barrières doivent fonctionner sur 110 volts

-OUI

non

8

Le bras des barrières à bras montant doit être de 12 pieds

-OUI

non

UNE SOUMISSION QUI NE TRAITE PAS D'UNE EXIGENCE OBLIGATOIRE OU N'Y SATISFAIT PAS SERA DÉCLARÉE IRRECEVABLE ET ÉLIMINÉE.

   

Signature du représentant autorisé pour l'homologation

Date

 

NOM ET TITRE DU POSTE AU SEIN DE LA SOCIÉTÉ (CARACTÈRES D'IMPRIMERIE)

Toute soumission qui ne renferme pas l'information demandée et nécessaire
à une évaluation complète par l'autorité contractante
sera déclarée irrecevable et éliminée

[Traduction]

9. D'après TPSGC, trois propositions ont été reçues, y compris une proposition de Bosik et une autre de SPX. La troisième proposition a été déclarée non conforme pour des raisons techniques non divulguées. TPSGC a déterminé que SPX avait présenté la proposition recevable la moins-disante et, le 30 janvier 2004, il a adjugé le contrat à SPX et a informé les autres fournisseurs potentiels en conséquence.

10. Le 12 février 2004, le Tribunal a décidé d'enquêter sur une plainte4 de Bosik concernant un autre élément de la procédure de passation du marché public. Le 5 mars 2004, à titre d'intervenante, SPX a déposé des documents à l'appui de sa position relativement à cette plainte. SPX a soutenu que, à la suite de la modification no 3 à la DP, il lui avait fallu remplacer le produit qu'elle proposait par un système de barrière portatif homologué MP5000 (Delta Model MP5000 Portable Barrier-Crash Certified Barrier System). Le 22 mars 2004, Bosik a déposé sa plainte auprès du Tribunal, alléguant que le MP5000 ne satisfaisait pas au critère obligatoire relatif à l'actionnement.

POSITION DES PARTIES

Position de Bosik

11. Bosik a soutenu que la fiche technique du MP50005 précise que la vitesse de montée du MP5000 est « ajustable dans la fourchette de 5 à 12 secondes » [traduction]. Cette caractéristique, selon Bosik, dépasse la vitesse de montée autorisée maximale qui « ne doit pas dépasser 3 secondes », énoncée à l'exigence obligatoire no 5, à la page 6 de la DP.

12. D'après Bosik, étant donné que TPSGC a dû demander à SPX de lui fournir des éclaircissements relativement à ce critère, la proposition de SPX ne satisfaisait pas à l'exigence énoncée à la page 6 de la DP qui prévoit que : « Toute soumission qui ne renferme pas l'information demandée et nécessaire à une évaluation complète par l'autorité contractante sera déclarée irrecevable et éliminée ». Bosik a soutenu que la proposition de SPX aurait dû être rejetée à ce motif.

13. Bosik a aussi soutenu que l'éclaircissement fourni au sujet des « ajustements en usine » [traduction] n'a pas prouvé que le MP5000 pouvait satisfaire au critère du temps d'actionnement minimum. Bosik a soutenu que la proposition de SPX et l'éclaircissement subséquent traitaient uniquement de ce que le produit pourrait peut-être faire et non de la question de savoir s'il pouvait satisfaire à l'exigence obligatoire. Bosik a aussi soutenu que, si les ajustements en usine précisés dans l'éclaircissement ont été proposés après le dépôt de la soumission, ils ne devraient donc pas être inclus, puisqu'ils ont eu pour effet de réparer des lacunes de la soumission originale.

14. D'après Bosik, à la lumière des dispositions énoncées aux pages 5 et 6 de la DP, la soumission de SPX aurait dû être éliminée après l'examen de cet élément par TPSGC. Elle a ajouté que seule sa soumission aurait donc dû être déclarée techniquement conforme et que le contrat aurait dû lui être adjugé. Bosik a aussi affirmé que, étant donné les circonstances du présent marché public, l'adjudication du contrat à tout autre qu'elle contrevenait aux accords commerciaux.

Position de TPSGC

15. TPSGC a soutenu que la proposition de SPX avait été déclarée conforme aux exigences essentielles de la DP et, de ce fait, que le contrat lui avait été adjugé. TPSGC a soutenu que la proposition de SPX indiquait qu'elle satisfaisait à toutes les spécifications et traitait expressément de chacun des éléments obligatoires de la DP, y compris l'élément se rapportant à l'actionnement. D'après TPSGC, il aurait demandé et reçu confirmation de SPX, le 28 janvier 2004, que le MP5000 pouvait être ajusté en usine à une vitesse d'actionnement de trois secondes.

16. TPSGC a soutenu que les spécifications jointes à la plainte de Bosik n'étaient que des « spécifications générales » du MP5000 et non les spécifications effectives des barrières proposées par SPX. D'après TPSGC, l'inclusion des mots « vitesse de montée standard » [traduction] implique clairement qu'il est possible d'ajuster la montée à une autre vitesse que la vitesse standard. TPSGC a soutenu que des spécifications générales qui ne sont pas incluses dans une proposition ne peuvent révéler si une proposition satisfait aux exigences d'une DP.

17. TPSGC a aussi soutenu que le Tribunal imposait des obligations non nécessaires aux évaluateurs en s'appuyant sur des renseignements qui n'étaient pas inclus dans la proposition de SPX pour déterminer si la barrière proposée satisfaisait aux exigences obligatoires énoncées dans la DP. TPSGC a ajouté qu'utiliser des renseignements qui n'étaient pas inclus dans une proposition revenait à procéder à une nouvelle évaluation de la proposition après l'avoir réparée ou détruite. TPSGC a fait valoir que le Tribunal a soutenu de façon constante6 qu'une proposition ne peut être complétée après la clôture des soumissions et doit être évaluée uniquement à partir de son contenu et de tout éclaircissement pertinent. D'après TPSGC, les évaluateurs ne peuvent être tenus de respecter une norme qu'ils ne peuvent atteindre sans contrevenir aux accords commerciaux, et le Tribunal n'a pas le pouvoir d'utiliser des renseignements qui n'étaient pas inclus dans la proposition de SPX et dont ne disposaient donc pas les évaluateurs.

18. D'après TPSGC, la conformité d'un produit est une question qui relève de l'exécution du contrat. TPSGC a soutenu que l'inspection pour vérifier la conformité avec les dispositions du contrat est une question qui relève de l'administration du contrat et que le Tribunal a déclaré de façon constante ne pas avoir compétence pour connaître de telles questions7 . TPSGC a soutenu que le Tribunal a accepté le principe qu'un soumissionnaire peut être déclaré non conforme après l'adjudication d'un contrat8 , par l'application d'une clause sur le rendement du fournisseur.

19. TPSGC a demandé le rejet de la plainte et le remboursement complet des frais qu'il a engagés à la suite du fardeau qui lui a été imposé en raison de l'application de la procédure expéditive.

Position de SPX

20. SPX a dit appuyer toutes les affirmations de TPSGC et y souscrire. Elle a ajouté que sa proposition était conforme aux exigence obligatoires de la DP, que l'adjudication du contrat était conforme aux dispositions des accords commerciaux et que Bosik avait avancé diverses hypothèses erronées au sujet de la proposition de SPX.

21. SPX a aussi soutenu que les allégations non corroborées de Bosik avaient donné lieu à une deuxième enquête qui lui avait été coûteuse et a demandé le remboursement des frais qu'elle a engagés pour participer à la présente procédure. Elle a soutenu que l'article 1.1 de la Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure de plainte portant sur un marché public (Ligne directrice) prévoit que le Tribunal peut « accorder les frais relatifs à toute procédure de plainte dont il doit disposer - même provisionnels - et ces frais sont laissés à l'appréciation du Tribunal et peuvent être fixés ou taxés; désigner les créanciers et les débiteurs des frais, ainsi que les responsables de leur taxation ou autorisation ». D'après SPX, en conformité avec l'article 1.3, le Tribunal pourrait et devrait s'écarter de son taux forfaitaire et accorder à SPX le remboursement de tous ses frais.

22. SPX a soutenu que la plainte devrait être rejetée et que Bosik devrait l'indemniser de tous ses frais. À titre de solution de rechange, SPX a demandé que ses frais soient payés par le gouvernement du Canada.

DÉCISION DU TRIBUNAL

23. Aux termes du paragraphe 30.14(1) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal doit, dans son enquête, limiter son étude à l'objet de la plainte. En outre, à la fin de l'enquête, le Tribunal doit déterminer la validité de la plainte en fonction des critères et procédures établis par règlement pour le contrat spécifique. De plus, l'article 11 du Règlement prévoit que le Tribunal doit déterminer si le marché public a été passé conformément aux accords commerciaux applicables, en l'espèce l'Accord sur le commerce intérieur 9 , l'Accord de libre-échange nord-américain 10 et l'Accord sur les marchés publics 11 .

Questions de compétence

24. Avant de traiter du bien-fondé de la plainte, le Tribunal doit d'abord traiter de la prétention de TPSGC selon laquelle le Tribunal n'a pas compétence pour connaître de la plainte parce qu'elle se rapporte à une question d'administration du contrat. TPSGC a aussi soutenu que le Tribunal n'a pas le pouvoir d'utiliser de l'information qui n'était pas incluse dans la proposition de SPX pour déterminer si ladite proposition était conforme aux exigences essentielles de la DP.

25. Le Tribunal a ouvert une enquête au motif que TPSGC aurait, à tort, évalué la soumission de SPX comme étant conforme et donc adjugé le contrat à SPX d'une manière irrégulière. De ce fait, le Tribunal est d'avis que la présente plainte entre clairement dans le champ d'application du mécanisme de contestation des offres et ne se rapporte pas aux actions subséquentes à l'adjudication du contrat par TPSGC. Par conséquent, le Tribunal conclut que le premier argument de TPSGC sur la question de la compétence est dénué de fondement.

26. En ce qui a trait au deuxième argument de TPSGC concernant la question de compétence, le Tribunal remarque que son enquête porte sur la question de savoir si TPSGC a évalué la conformité de la proposition de SPX d'une manière régulière compte tenu des dispositions des accords commerciaux applicables. Cette question n'est pas nécessairement la même que celle de la détermination de la conformité, en termes absolus, de la proposition de SPX aux exigences énoncées dans la DP. Aux termes des accords commerciaux, l'institution fédérale, en l'espèce TPSGC, doit adjuger les marchés en conformité avec les critères et les conditions essentielles énoncés dans les documents d'appel d'offres. Le Tribunal est d'accord avec TPSGC sur le fait que, ordinairement, cette obligation est remplie lorsque l'institution fédérale procède à une évaluation raisonnable, de bonne foi, des documents de soumission concurrents présentés en réponse à la DP. Toutefois, relativement à l'enquête sur une évaluation de TPSGC, rien dans les accords commerciaux n'interdit au Tribunal de tenir compte d'autres renseignements pertinents qui ne sont pas inclus dans la soumission de SPX. De ce fait, le Tribunal conclut que le deuxième argument de TPSGC sur la question de la compétence est dénué de fondement.

Bien-fondé de la plainte

27. Le paragraphe 506(6) de l'ACI prévoit en partie ce qui suit :

Les documents d'appel d'offres doivent indiquer clairement les conditions du marché public, les critères qui seront appliqués dans l'évaluation des soumissions et les méthodes de pondération et d'évaluation des critères.

28. Le paragraphe 1015(4) de l'ALÉNA prévoit en partie ce qui suit :

L'adjudication des marchés s'effectuera conformément aux procédures suivantes :

a) pour être considérée en vue de l'adjudication, une soumission devra être conforme, au moment de son ouverture, aux conditions essentielles spécifiées dans les avis ou dans la documentation relative à l'appel d'offres, et avoir été présentée par un fournisseur remplissant les conditions de participation;

d) l'adjudication des marchés sera conforme aux critères et aux conditions essentielles spécifiées dans la documentation relative à l'appel d'offres.

29. Le paragraphe XIII(4) de l'AMP prévoit en partie ce qui suit :

a) Pour être considérées en vue de l'adjudication, les soumissions devront être conformes, au moment de leur ouverture, aux conditions essentielles spécifiées dans les avis ou dans la documentation relative à l'appel d'offres, et avoir été déposées par un fournisseur remplissant les conditions de participation.

c) Les adjudications seront faites conformément aux critères et aux conditions essentielles spécifiées dans la documentation relative à l'appel d'offres.

30. La question dont le Tribunal est saisi est celle de savoir si TPSGC a évalué la proposition de SPX d'une manière régulière lorsqu'il a déterminé que le produit proposé par SPX, le MP5000, satisfaisait à l'exigence obligatoire no 5, « Le temps d'actionnement ne doit pas dépasser 3 secondes ».

31. SPX a traité de l'exigence obligatoire no 5 à la fois dans le libellé de sa soumission12 et dans la documentation sur le produit13 , jointe à sa soumission. Même si cette information pouvait être interprétée comme indiquant que SPX satisfaisait à l'exigence obligatoire no 5, ceci n'était pas tout à fait clair.

32. TPSGC a demandé des éclaircissements à SPX14 concernant l'exigence obligatoire no 5. En réponse, SPX a transmis à TPSGC une lettre du fabricant15 du MP5000. Après réception de l'éclaircissement susmentionné, TPSGC a conclu que SPX satisfaisait à l'exigence obligatoire no 5 énoncée à la page 6 de la DP.

33. D'après le Tribunal, la réponse de SPX constitue un éclaircissement de bonne foi d'un point ambigu de sa soumission et non un changement de fond de sa soumission. Le Tribunal est donc d'accord avec TPSGC sur l'affirmation selon laquelle il était autorisé à tenir compte de cette information dans l'évaluation de la soumission, plutôt que de la rejeter au titre de tentative de « réparation de la soumission » [traduction].

34. Compte tenu de l'information incluse dans la soumission de SPX et dans la réponse de cette dernière à une question d'éclaircissement de sa soumission, le Tribunal n'est pas d'avis que TPSGC a évalué l'exigence obligatoire no 5 d'une manière irrégulière.

35. Le Tribunal remarque que la spécification de produit déposée par Bosik avec sa plainte ne faisait pas partie de la proposition de SPX ou des éclaircissements relatifs à cette proposition et ne faisait donc pas partie de l'information dont les évaluateurs qui ont examiné la proposition auraient régulièrement pu tenir compte.

36. Le Tribunal conclut donc que la plainte n'est pas fondée et accorde à TPSGC le remboursement des frais raisonnables qu'il a engagés pour répondre à la plainte, ces frais devant être payés par Bosik.

QUESTIONS DE FRAIS

37. Dans son exposé, SPX a soutenu que, voulant agir prudemment, elle avait décidé de participer à toutes les étapes de la procédure et, ce faisant, avait engagé des dépenses considérables. Elle a donc demandé au Tribunal de lui accorder le remboursement des frais qu'elle a véritablement engagés et d'ordonner à Bosik, ou subsidiairement, au gouvernement du Canada, de l'indemniser de ces frais. Le Tribunal a le pouvoir discrétionnaire, aux termes du paragraphe 30.16 de la Loi sur le TCCE, d'adjuger les frais en faveur ou à l'encontre des intervenantes. Le Tribunal doit exercer son pouvoir discrétionnaire lorsqu'il adjuge les frais et appliquer les mêmes principes que les tribunaux16 .

38. La jurisprudence de la Cour fédérale du Canada17 (la Cour) montre que les frais sont rarement adjugés en faveur ou à l'encontre des intervenantes étant donné la rigueur du critère à appliquer dans le cas des frais en leur faveur ou à leur encontre. Dans une affaire, où une intervention a été accueillie, la Cour a néanmoins décidé que les intervenantes n'avaient pas droit aux frais puisque leur participation avait été complètement volontaire18 . Dans d'autres affaires, les frais ont été limités aux questions soulevées par les intervenantes, mais qu'aucune autre des parties ne souhaitait soulever19 . À la connaissance du Tribunal, le remboursement de tous les frais n'a été accordé à une intervenante qu'une seule fois et, dans cette affaire, l'intervenante n'avait pas eu d'autre choix que d'être une partie à la procédure, étant donné la possibilité que l'affaire débouche sur une injonction à son encontre20 .

39. Le Tribunal a appliqué les facteurs susmentionnés à la demande de SPX et est d'avis qu'il n'y a pas lieu d'accorder à SPX le remboursement de ses frais dans la présente procédure. Même si SPX a fait valoir la position inconfortable d'un adjudicataire à l'occasion d'une plainte en matière de marché public, SPX a reconnu, en ses propres mots, avoir « décidé » d'intervenir afin d'« agir prudemment ». Il s'agit là de circonstances contraires à celles dans Glaxo, où la Cour a conclu que l'intervenante n'avait pas « d'autre choix » que de participer à la procédure. En outre, l'intervention de SPX n'a pas apporté de nouvelles questions fondamentales à la procédure. Elle a offert une certaine mesure d'appui à la position énoncée par TPSGC dans le RIF, mais la majeure partie de son exposé a traité de son admissibilité aux frais. Le Tribunal reconnaît que l'intérêt commercial de SPX dans la présente procédure était considérable et estime que l'exposé de cette dernière a été utile. Toutefois, le Tribunal n'est pas d'avis que les principes judiciaires pertinents justifient d'accorder à SPX le remboursement de ses frais en l'espèce.

40. Pour décider du montant des frais à adjuger en l'espèce, le Tribunal a tenu compte de sa Ligne directrice. L'avis provisoire du Tribunal relativement à la présente affaire est que son degré de complexité correspond au plus bas degré de complexité prévu à l'annexe A de la Ligne directrice (degré 1). La Ligne directrice fonde l'évaluation du degré de complexité d'une plainte sur trois critères : la complexité du marché public, la complexité de la plainte et la complexité de la procédure. La complexité du marché public était passablement faible, en ce sens que les marchandises y étaient définies simplement, même si le marché public comprenait l'installation de marchandises et l'examen de paramètres d'ingénierie de base. La complexité de la plainte était faible, en ce sens qu'elle consistait à résoudre une seule question simple (à savoir si TPSGC avait adjugé le contrat à un soumissionnaire dont la proposition ne satisfaisait pas aux exigences obligatoires énoncées dans la DP) et un aspect unique des accords commerciaux applicables. Enfin, la complexité de la procédure était passablement faible, étant donné qu'il n'y a eu qu'une seule intervenante, qu'il n'y a pas eu de requête, qu'il n'y a pas eu d'audience publique et que la plainte a été réglée dans le délai de 45 jours prévu par la « procédure expéditive ». Par conséquent, comme le prévoit la Ligne directrice, l'indication provisoire du montant en ce qui a trait à l'indemnisation est de 1 000 $.

DÉCISION DU TRIBUNAL

41. Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal détermine que la plainte n'est pas fondée.

42. Aux termes de l'article 30.16 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal accorde à TPSGC le remboursement des frais raisonnables qu'il a engagés pour répondre à la plainte, ces frais devant être payés par Bosik. L'indication provisoire du degré de complexité de la présente plainte pour le Tribunal est le degré 1, et l'indication provisoire du montant de l'indemnisation est de 1 000 $. Si l'une ou l'autre des parties n'est pas d'accord en ce qui a trait à l'indication provisoire du degré de complexité ou de l'indication provisoire du montant de l'indemnisation, elle peut déposer des observations auprès du Tribunal, en conformité avec sa Ligne directrice. Le Tribunal se réserve le droit de fixer le montant final de l'indemnisation.


1 . L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47 [Loi sur le TCCE].

2 . D.O.R.S. /91-499 [Règles].

3 . D.O.R.S. /93-602 [Règlement].

4 . Re plainte déposée par Bosik Vehicle Barriers Ltd. (29 mars 2004), PR-2003-076 (TCCE).

5 . Plainte, appendice « G ».

6 . Re plainte déposée par NOTRA Environmental Services Inc. (16 décembre 1997), PR-97-027 (TCCE); Re plainte déposée par Safety Projects International Inc. (24 août 1998), PR-98-007 (TCCE); Re plainte déposée par Métro Excavation inc. (5 novembre 1999), PR-99-016 (TCCE); Re plainte déposée par TELUS Integrated Communications Inc. (2 novembre 2000), PR-2000-017 et PR-2000-035 (TCCE); Re plainte déposée par Computer Talk Technology, Inc. (26 février 2001), PR-2000-037 (TCCE); Re plainte déposée par Foundry Networks (30 août 2001), PR-2001-006 (TCCE); Re plainte déposée par IBM Canada Limitée (10 avril 2003), (TCCE); Re plainte déposée par Southern California Safety Institute, Inc. (22 décembre 2003), PR-2003-047 (TCCE); Re plainte déposée par TPG Technology Consulting Ltd. (28 novembre 2003), PR-2003-065 (TCCE).

7 . Re plainte déposée par Liftow Limited (13 octobre 1999), PR-99-017 (TCCE); Re plainte déposée par Eurodata Support Services Inc. (30 juillet 2001), PR-2000-078 (TCCE); Re plainte déposée par Équipement Industriel Champion Inc. (5 juin 2002), PR-2001-071 (TCCE).

8 . Re plainte déposée par Northern Micro Inc. (12 juillet 1999), PR-99-002 (TCCE).

9 . 18 juillet 1994, Gaz. C. 1995.I.1323, en ligne : Secrétariat du commerce intérieur <http://www.intrasec.mb.ca/fre/it.htm> [ACI].

10 . 32 I.L.M. 289 (entré en vigueur le 1er janvier 1994) [ALÉNA].

11 . 15 avril 1994, en ligne : Organisation mondiale du commerce <http://www.wto.org/french/docs_f/legal_f/final_f.htm> [AMP].

12 . RIF, pièce confidentielle 3.

13 . Documentation confidentielle déposée le 16 avril 2004 par TPSGC.

14 . RIF, pièce confidentielle 2.

15 . RIF, pièce confidentielle 4.

16 . Canada (Procureur général) c. Georgian College of Applied Arts and Technology, 2003 CAF 199.

17 . Pour des raisons de commodité, le Tribunal a employé l'expression « Cour fédérale du Canada » pour collectivement désigner ce qui est maintenant connu en tant que les deux cours fédérales, c.-à-d. la Cour fédérale et la Cour d'appel fédérale. Au moment des décisions invoquées à titre de précédent dans les présentes, l'expression « Cour fédérale du Canada » désignait deux entités alors constituées en tant que deux divisions de la Cour.

18 . Grant c. Canada (Procureur général), [1995] 1 C.F. 158 (1re inst.).

19 . C.J.A. c. University of Calgary, [1986] A.C.F. no 464 (C.A.F.); Florence c. Canada (Comité des transports aériens), [1991] 2 C.F. F-41 (1re inst.).

20 . Glaxo Canada c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (1988), 19 C.P.R. (3d) 374 (C.F. 1re inst.) [Glaxo].