SOUTHERN CALIFORNIA SAFETY INSTITUTE, INC.

Décisions


SOUTHERN CALIFORNIA SAFETY INSTITUTE, INC.
Dossier no PR-2003-047


TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le lundi 22 décembre 2003

Dossier no PR-2003-047

EU ÉGARD À une plainte déposée par Southern California Safety Institute, Inc. aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47;

ET À LA SUITE D'une décision d'enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte est fondée en partie.

Aux termes des paragraphes 30.15(2) et 30.15(3) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur recommande, à titre de mesure corrective, que le ministère des Transports élabore et mette en _uvre des procédures qui garantissent que, sur demande, les renseignements pertinents seront fournis rapidement aux soumissionnaires non retenus, comme l'exige l'alinéa 1015(6)b) de l'Accord de libre-échange nord-américain.

Ellen Fry
Ellen Fry
Membre présidant

Zdenek Kvarda
Zdenek Kvarda
Membre

James A. Ogilvy
James A. Ogilvy
Membre

Michel P. Granger
Michel P. Granger
Secrétaire

L'exposé des motifs sera publié à une date ultérieure.

Date de la décision :

Le 22 décembre 2003

Date des motifs :

Le 14 janvier 2004

   

Membres du Tribunal :

Ellen Fry, membre présidant

 

Zdenek Kvarda, membre

 

James A. Ogilvy, membre

   

Agent principal d'enquête :

Cathy Turner

   

Conseiller pour le Tribunal :

Roger Nassrallah

   

Partie plaignante :

Southern California Safety Institute, Inc.

   

Institution gouvernementale :

Ministère des Transports

Ottawa, le mercredi 14 janvier 2004

Dossier no PR-2003-047

EU ÉGARD À une plainte déposée par Southern California Safety Institute, Inc. aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47;

ET À LA SUITE D'une décision d'enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

EXPOSÉ DES MOTIFS

PLAINTE

Le 22 septembre 2003, Southern California Safety Institute, Inc. (SCSI) a déposé une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur 1 à l'égard du marché public (invitation no T8080-02-0503) passé par le ministère des Transports (Transports Canada) portant sur la conception, l'élaboration et la prestation de cours.

SCSI a allégué que Transports Canada avait violé les dispositions de l'Accord de libre-échange nord-américain 2 en évaluant, d'une façon irrégulière, les propositions de SCSI et du titulaire du contrat. SCSI a soutenu que les points attribués à sa soumission par Transports Canada ne reflètent pas l'étendue et la portée de son expérience directement pertinente à l'invitation. Elle a également soutenu qu'elle ne comprend pas la raison pour laquelle l'adjudicataire a obtenu une note presque parfaite quand on compare les antécédents de chaque entreprise et de chaque équipe. De plus, SCIS a allégué que la réplique qu'elle a reçue de Transports Canada en réponse à sa contestation de l'offre n'était pas « juste », étant donné que cette réplique ne comprenait pas d'explication en réponse aux questions particulières de SCSI et qu'elle ne faisait aucune rectification aux points d'évaluation attribués.

À titre de mesure corrective, SCSI a demandé au Tribunal de recommander que les soumissions soient réévaluées par un groupe d'experts en sécurité aérienne indépendant venant de l'extérieur. À titre de solution de rechange, SCSI a demandé que le marché soit relancé avec des spécifications plus claires et plus appropriées et avec des mesures de mérite plus objectives pour chaque critère d'évaluation afin de réduire le degré de subjectivité. À titre d'autre solution de rechange, SCSI a demandé que le Tribunal recommande à Transports Canada d'expliquer les résultats de l'évaluation en termes suffisamment détaillés pour que l'évaluation soit compréhensible. De plus, SCSI a demandé au Tribunal de rendre une ordonnance de report d'adjudication de tout contrat relatif à l'invitation jusqu'à ce que le Tribunal ait déterminé le bien-fondé de la plainte.

Le 30 septembre 2003, le Tribunal a avisé les parties qu'il avait décidé d'enquêter sur la plainte, puisque cette dernière répondait aux exigences du paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE et aux conditions énoncées au paragraphe 7(1) du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics 3 . Le Tribunal n'a pas rendu d'ordonnance de report d'adjudication, conformément au paragraphe 30.13(3) de la Loi sur le TCCE, étant donné que les éléments de preuve au dossier indiquaient qu'un contrat avait déjà été adjugé. Le 6 octobre 2003, Transports Canada a avisé le Tribunal qu'un contrat avait été adjugé à Jacques Whitford Environment Limited (Jacques Whitford). Le 22 octobre 2003, Transports Canada a déposé un rapport de l'institution fédérale (RIF) auprès du Tribunal en application de l'article 103 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur 4 . SCSI a déposé ses observations sur le RIF auprès du Tribunal le 3 novembre 2003. Le 19 novembre 2003, le Tribunal a demandé à Transports Canada de fournir des renseignements et de la documentation supplémentaires. Le 26 novembre 2003, Transports Canada a déposé les renseignements et la documentation demandés. SCSI a déposé ses observations sur l'exposé de Transports Canada le 4 décembre 2003.

La quantité des renseignements au dossier étant suffisante pour déterminer le bien-fondé de la plainte, le Tribunal a décidé qu'une audience n'était pas nécessaire et a statué sur la plainte sur la foi des renseignements au dossier.

PROCÉDURE DE PASSATION DU MARCHÉ PUBLIC

Le 9 mai 2003, Transports Canada a diffusé une demande de proposition (DP) portant sur la conception, l'élaboration et la prestation d'un cours sur les systèmes de gestion de la sécurité pour Transports Canada. La date de clôture pour la présentation des propositions était le 24 juin 2003. Transports Canada a reçu 11 propositions.

Selon Transports Canada, au cours de l'évaluation technique, et lorsque cela s'est avéré nécessaire, des lettres ont été envoyées à certains soumissionnaires pour leur demander de clarifier leurs propositions. À la suite des évaluations relatives aux aspects techniques et aux coûts, Transports Canada a envoyé une lettre le 31 juillet 2003 à tous les soumissionnaires non retenus, y compris SCSI, les informant qu'il avait accepté la proposition de Jacques Whitford.

Le 14 août 2003, les représentants de Transports Canada et de SCSI ont tenu une séance d'information téléphonique. Le 15 août 2003, SCSI a envoyé une lettre à Transports Canada demandant des instructions sur le dépôt d'une contestation formelle de l'offre. Le 20 août 2003, Transports Canada a fourni les renseignements requis à SCSI. Le 29 août 2003, SCSI a déposé une contestation formelle de l'offre auprès de Transports Canada. Un représentant de Transports Canada a répondu par écrit à la requête de SCSI le 8 septembre 2003. Le 22 septembre 2003, SCSI a déposé sa plainte auprès du Tribunal.

POSITIONS DES PARTIES

Position de SCSI

SCSI a soutenu que, bien que les trois compagnies de l'équipe gagnante soient manifestement compétentes dans leurs domaines respectifs, un examen des renseignements publiés sur le site Web de chacune d'elles ne donne aucune indication qu'elles aient de l'expérience ou des antécédents au sein de l'industrie aéronautique ou même du secteur des transports. De plus, elle a soutenu qu'un examen des annonces des cours que ces compagnies ont présentés n'indique aucun cours portant sur l'élaboration et l'évaluation des systèmes de gestion de la sécurité en aéronautique, ni sur les facteurs humains et organisationnels qui touchent la sécurité aéronautique.

SCSI a obtenu un total de 125 points sur un maximum possible de 200 points pour le critère coté no 2 portant sur l'étendue de l'expérience de l'équipe de concepteurs/collaborateurs et instructeurs proposée par le soumissionnaire. Elle a soutenu que certaines des ressources proposées avaient élaboré et offert des cours pour SCSI directement applicables aux critères décrits par Transports Canada, et que ce renseignement était expressément indiqué dans sa proposition. SCSI a du mal à comprendre comment elle a pu perdre 75 points par rapport au soumissionnaire retenu, qui, selon SCSI, doit avoir obtenu approximativement 196 points pour ce critère, sans avoir d'antécédents dans le domaine de la sécurité aérienne. En réponse à l'exposé de Transports Canada dans le RIF, SCSI a soutenu que la DP n'exige pas que chaque instructeur ait de l'expérience « à la fois de l'élaboration et de la prestation des trois [...] types de cours de formation demandés » [traduction]. SCSI a observé que la DP exige l'élaboration d'un cours de formation et non de trois. SCSI a fait valoir que l'observation de Transports Canada selon laquelle l'un des instructeurs proposés est unilingue n'est pas pertinente, étant donné que SCSI était censée avoir déjà satisfait à l'exigence obligatoire de bilinguisme anglais-français. De plus, SCSI a soutenu qu'elle croyait comprendre que le critère coté no 2 portait sur l'équipe et sur la composition de l'équipe plutôt que sur l'exigence que tous les membres de l'équipe ait la même capacité à tout faire avec le même degré d'expertise.

En ce qui concerne le critère coté no 3 portant sur les résumés de projets et les références de clients, SCSI a obtenu une note de 150 points sur un maximum possible de 200 points. Elle a soutenu qu'elle a fourni des renseignements, au-delà de ce qui était demandé, sur cinq clients clés choisis pour refléter l'étendue de son approche et de sa portée internationales dans le domaine de la formation en sécurité aérienne. Elle a fait valoir que, étant donné qu'elle a fourni des éléments de preuve qu'elle avait exécuté des contrats représentant plusieurs millions de dollars et portant sur la prestation de cours sur la sécurité aérienne pour des clients satisfaits du domaine de l'aéronautique, elle ne comprend pas comment elle a pu perdre 50 points sur ce critère par rapport au soumissionnaire retenu qui, selon SCSI, n'a pu démontrer aucune expérience semblable au niveau de l'entreprise. En ce qui concerne l'exposé de Transports Canada dans le RIF selon lequel la soumission de SCSI ne fournissait pas le degré de détail nécessaire à l'évaluation de la complexité du projet, SCSI a soutenu que la DP demandait des résumés de projets, qu'elle avait fournis; cependant, elle se trouve maintenant pénalisée pour n'avoir pas fourni suffisamment de détails. Elle a soutenu que la DP ne précisait pas le niveau de détail.

En ce qui concerne le critère no 4 portant sur la gestion du projets proposés, SCSI a obtenu 130 points sur un maximum possible de 200 points. SCSI a soutenu qu'elle a manifestement perdu 70 points pour ne pas avoir traité suffisamment des questions de validation, d'évaluation de l'impact, d'assurance de la qualité et de plans de secours. Elle a également soutenu que, étant donné qu'elle fait appel à des experts reconnus en la matière, la question de la qualité est rarement soulevée parce qu'elle élabore « la qualité et la capacité de qualité » [traduction]. Elle a soutenu que nulle part dans l'invitation elle n'avait vu d'obligation de présenter un plan de secours. En réponse à l'exposé de Transports Canada dans le RIF concernant l'approche systémique à la formation (ASF), SCSI a soutenu qu'elle avait parlé de l'ASF dans sa proposition afin de démontrer qu'elle comprenait cette approche. SCSI a également soutenu qu'elle avait indiqué dans sa proposition qu'elle comprenait que l'effort de validation vise à évaluer l'ensemble de l'impact de la formation sur les participants et sur leur rendement au travail. SCSI a soutenu que le processus de validation est bien connu. Elle a soutenu que nulle part dans les documents de la DP relatifs au critère no 4 il n'est question de « précision sur comment l'étape de la validation/impact serait mise en _uvre » [traduction]. Elle a fait valoir qu'en fait, le mot « validation » n'apparaît pas du tout.

En ce qui concerne le critère coté no 5 portant sur la bonne compréhension du soumissionnaire quant aux besoins de Transports Canada, SCSI a obtenu 40 points sur un maximum possible de 50 points. Elle a soutenu que, pendant la séance d'information téléphonique, on lui avait dit qu'elle ne comprenait pas complètement les besoins de Transports Canada, que Transports Canada avait suffisamment de ressources et que les observations de SCSI quant aux ressources insuffisantes n'étaient pas correctes. SCSI a soutenu qu'elle ne comprenait pas la réponse fournie par Transports Canada pendant la séance d'information.

En ce qui concerne le critère coté no 6 portant sur la bonne connaissance de l'industrie aéronautique canadienne, SCSI a obtenu 85 points sur un maximum possible de 100 points. SCSI a soutenu que, durant la séance d'information téléphonique, on ne lui avait donné aucune indication claire expliquant pourquoi sa soumission avait perdu des points à cet égard. Elle a soutenu qu'elle avait offert des cours spéciaux en gestion des risques à l'intention des cadres d'Air Canada et que son comité consultatif comprend des individus provenant de divers secteurs de l'industrie aéronautique canadienne. Elle a fait valoir qu'un examen des sites Web décrivant les clients et les cours des trois membres de l'équipe du soumissionnaire retenu ne révèle aucune expérience de travail avec l'industrie aéronautique canadienne.

En réponse à l'exposé de Transports Canada dans le RIF selon lequel la DP demandait de la formation dans le domaine des transports et non pas de l'aéronautique, SCSI a soutenu que le critère coté no 5 souligne « principalement » l'aviation civile et les résultats souhaités par Transports Canada relativement à ce projet. Elle a également soutenu que le critère coté no 6 demande exclusivement de l'expérience de travail avec l'industrie aéronautique canadienne, en particulier dans le domaine des systèmes de gestion de la sécurité.

En ce qui concerne le critère coté no 7 portant sur la qualité de la proposition, SCSI a obtenu 35 points sur un maximum possible de 50 points. Elle a soutenu que, pendant la séance d'information téléphonique, elle avait reçu deux commentaires de Transports Canada : 1) l'index ne correspondait pas au contenu de la proposition; 2) la proposition ne comprenait pas d'onglets. SCSI a reconnu qu'il y avait une « disjonction » dans la numérotation de son index, mais qu'elle ne voyait pas où la DP demandait des onglets.

SCSI a soutenu qu'elle avait déposé une contestation de l'offre et posé à Transports Canada des questions particulières quant aux résultats de l'évaluation de sa proposition, étant donné qu'elle était en profond désaccord avec les renseignements qui lui avaient été fournis pendant la séance d'information téléphonique. SCSI n'estime pas que la réponse de Transports Canada à sa contestation de l'offre soit « juste », car cette réponse ne comprenait aucune explication en réponse aux questions particulières, et elle ne faisait aucune rectification aux points d'évaluation attribués.

SCSI a soutenu, dans ses observations sur le RIF, que la DP imposait des nombres limités de mots, en particulier dans les critères cotés 4, 5 et 6, et que, lorsqu'on impose un nombre limité de mots, cela amène toujours à s'interroger sur ce qu'il faut inclure et ce qu'il faut laisser tomber. Par exemple, SCSI a soutenu qu'on lui avait reproché pendant la séance d'information téléphonique avec Transports Canada de ne pas avoir inclus un « plan de secours » dans sa proposition. SCSI a également soutenu que, par la suite, on lui avait également reproché dans le RIF de ne pas avoir touché à « des sujets clés tels que le choc culturel des inspecteurs, la résistance aux nouvelles mesures législatives ... et la résistance des inspecteurs au changement dans l'accomplissement de leur travail » [traduction]. SCSI a soutenu que la DP n'avait identifié aucun de ces « sujets clés » comme devant faire l'objet d'une élaboration particulière.

Position de Transports Canada

Transports Canada a soutenu que la DP exigeait que les propositions soient suffisamment détaillées pour permettre une évaluation. Il a soutenu que SCSI n'avait pas fait d'objections aux critères de sélection et n'avait pas soumis d'autres questions. Il a également soutenu que, dans tous les cas, le comité d'évaluation technique n'examinait que les éléments nécessaires à l'évaluation technique tels qu'ils étaient présentés dans la proposition. Il a également soutenu que le comité n'était pas allé chercher des renseignements ou des éléments supplémentaires tels que des sites Web, des annonces ou des brochures de vente, et qu'il n'avait pas pris en considération de tels renseignements ou éléments.

Transports Canada a prétendu que, étant donné qu'il fallait soumettre une proposition technique et une proposition financière dans deux enveloppes séparées, il était impossible pour le comité d'évaluation technique d'assurer un quelconque résultat, car les propositions financières étaient conservées à part jusqu'à ce que tous les points techniques soient attribués. Transports Canada a soutenu que le comité d'évaluation technique n'avait pas été partial dans son évaluation et qu'il n'y avait pas d'instructeur favori. Il a aussi soutenu que la détermination du coût par point n'avait pas été appliquée par le comité d'évaluation technique, mais par un autre groupe au sein de Transports Canada, et que le soumissionnaire retenu était pratiquement inconnu du comité d'évaluation technique avant la soumission de sa proposition.

Transports Canada a soutenu que SCSI met en question le « manque d'expérience en sécurité aérienne du soumissionnaire retenu » [traduction] et porte l'attention sur sa propre expertise en formation uniquement dans le domaine de l'aéronautique. Transports Canada a fait valoir que la DP indiquait un besoin de formation en transport et non en aéronautique, et que ceci était éclairci davantage dans les addenda au document d'appel d'offres. Transports Canada a fait valoir que l'expérience en aéronautique était un atout, mais n'était pas une exigence technique obligatoire. Transports Canada a soutenu que le tableau 2 figurant à l'annexe 1 de la plainte compare SCSI avec le soumissionnaire retenu sur la base de critères non exigés dans la DP.

En ce qui concerne le critère coté no 2, Transports Canada a soutenu que les soumissionnaires devaient indiquer l'étendue de leur expérience de l'élaboration et de la prestation de cours de formation ayant trait aux systèmes de gestion de la sécurité, à la gestion des risques et aux facteurs organisationnels. Il a soutenu que la proposition de SCSI identifiait trois instructeurs et que, bien que ces instructeurs aient de l'expérience en formation, seulement l'un d'entre eux indiquait de l'expérience particulière de l'élaboration et de la prestation de l'un quelconque des trois types de cours de formation demandés, et que cet instructeur était unilingue. Transports Canada a fait valoir que la liste des instructeurs figurant dans la plainte n'était pas incluse dans la proposition de SCSI et qu'elle ne pouvait donc pas être prise en considération maintenant. Transports Canada a également fait valoir que le fait qu'un instructeur donné soit inclus dans la proposition comme consultant ou comme employé n'était pas un critère coté.

En ce qui concerne le critère coté no 3, Transports Canada a soutenu que les soumissionnaires devaient fournir par écrit des résumés de projets et nommer des clients qui pouvaient attester de leur expérience actuelle et antérieure de la prestation réussie, au cours des cinq dernières années, de services de conception, d'élaboration et de cours de formation relativement au transport. Transports Canada a fait valoir que la DP indiquait clairement que des points seraient attribués pour ce critère coté selon la complexité du projet, sa qualité et ses résultats. Transports Canada a prétendu que, même si la proposition de SCSI décrivait en effet des projets, elle ne fournissait pas le niveau de détails nécessaire pour évaluer la complexité des projets ou leurs résultats durant le processus d'évaluation.

En ce qui concerne le critère coté no 4, Transports Canada a soutenu que les soumissionnaires devaient indiquer la méthode/l'approche qu'ils se proposaient d'utiliser au cours du projet en ce qui a trait à la gestion du projet, à la conception, à l'élaboration, à l'assurance de la qualité et à l'établissement de rapports aux clients. Il a également soutenu que la DP indiquait clairement l'importance accordée à ce que l'approche/méthode soit conforme à l'ASF et à de solides pratiques de gestion de projet, d'assurance de la qualité et d'établissement de rapports aux clients. Transports Canada a soutenu que, bien que la proposition de SCSI ait mentionné toutes les étapes de l'ASF, elle ne comprenait aucune précision sur la façon dont l'étape de validation/impact serait mise en _uvre. Transports Canada a soutenu que la validation est un élément fondamental au succès de la prestation d'un programme de formation. De plus, Transports Canada a soutenu que le contrôle de la qualité et l'assurance de la qualité étaient difficiles à déterminer.

Transports Canada a soutenu qu'il avait examiné la position de SCSI quant au critère coté no 5 et que l'attribution de 10 points supplémentaires que demandait SCSI n'aurait pas modifié le classement de sa proposition. En ce qui concerne le critère coté no 6, Transports Canada a soutenu qu'on avait demandé aux soumissionnaires de décrire leurs connaissances, leur compréhension et leur niveau d'expérience de travail avec l'industrie aéronautique canadienne, principalement eu égard aux inquiétudes portant sur les systèmes de gestion de la sécurité. Transports Canada a fait valoir que la proposition de SCSI n'identifiait pas clairement des sujets clés tels que le choc culturel pour les inspecteurs, la résistance à la nouvelle législation de la part de l'industrie et de la part des inspecteurs, ainsi que la résistance des inspecteurs au changement dans l'accomplissement de leur travail.

En ce qui concerne le critère coté no 7, Transports Canada a soutenu que le critère mesurait la qualité de la proposition et la mesure dans laquelle la proposition était présentée clairement et logiquement et d'une façon qui facilitait une évaluation précise et directe. Transports Canada a soutenu que la proposition de SCSI manquait de contrôle de qualité en ce que la table des matières ne correspondait pas aux systèmes de numérotation, et qu'il était difficile de trouver les renseignements requis à cause de la nature du document.

Enfin, Transports Canada a soutenu que la section « E » de la plainte, intitulée « Déclaration détaillée des faits et arguments » [traduction], amène le lecteur à croire que le montant de la soumission retenue, tel qu'il est indiqué dans la lettre de notification, était erroné. Transports Canada a soutenu que la DP demandait aux soumissionnaires de fournir des prix unitaires fixes pour chacune des huit étapes du projet, mais qu'elle indiquait que les étapes 6, 7 et 8 pouvaient être incluses dans le contrat selon l'option exclusive du ministre des Transports « par le biais d'une modification au contrat ». Transports Canada a également soutenu que, comme il est indiqué dans la DP, le coût par point est fondé sur le montant soumissionné pour les étapes 1 à 8 prises ensemble, que le contrat a été adjugé pour les étapes de 1 à 5 seulement et que le prix dans le contrat est fondé seulement sur les prix unitaires fixes pour ces cinq étapes.

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes du paragraphe 30.14(1) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal doit, dans son enquête, limiter son étude à l'objet de la plainte. En outre, à la fin de l'enquête, il doit déterminer la validité de la plainte en fonction des critères et procédures établis par règlement pour le contrat spécifique. De plus, l'article 11 du Règlement prévoit que le Tribunal doit déterminer si le marché public a été passé conformément aux accords commerciaux applicables, qui sont, en l'espèce, l'Accord sur les marchés publics 5 et l'ALÉNA 6 .

L'alinéa 1015(4)d) de l'ALÉNA prévoit que « l'adjudication des marchés s'effectuera conformément aux procédures suivantes : . . . d) l'adjudication des marchés sera conforme aux critères et aux conditions essentielles spécifiées dans la documentation relative à l'appel d'offres ».

L'alinéa 1015(6)b) de l'ALÉNA prévoit qu'« [u]ne entité devra, [...] b) sur demande, communiquer aux fournisseurs dont la soumission n'a pas été retenue des renseignements pertinents concernant les raisons du rejet, et les informer des caractéristiques et des avantages relatifs de la soumission retenue, ainsi que du nom de l'adjudicataire. »

L'alinéa XIII(4)c) de l'AMP prévoit également que « [l]es adjudications seront faites conformément aux critères et aux conditions essentielles spécifiés dans la documentation relative à l'appel d'offres. »

En ce qui concerne l'allégation de SCSI selon laquelle Transports Canada a évalué, d'une façon irrégulière, sa proposition et celle de Jacques Whitford, le Tribunal a appliqué les principes normalement appliqués à de telles allégations, tels qu'ils sont énoncés dans Polaris 7  :

Dans sa plainte, Polaris a soutenu, entre autres choses, qu'on ne lui avait pas attribué suffisamment de points relativement à plusieurs aspects de sa proposition. Après avoir passé en revue les éléments de preuve au dossier, le Tribunal ne voit pas pourquoi il conclurait que la proposition de Polaris n'a pas été évaluée conformément à la méthode et aux critères énoncés dans les documents d'appel d'offres ou que les évaluateurs n'ont pas correctement porté attention à ces articles au moment de l'évaluation. En l'absence d'éléments de preuve que l'évaluation n'a pas été effectuée d'une manière équitable du point de vue de la procédure, le Tribunal s'en remet normalement au jugement de l'équipe d'évaluation pour l'attribution des points au regard des exigences techniques cotées.8

Dans la plainte en cause, les éléments de preuve n'indiquent pas que Transports Canada n'a pas appliqué les critères et la méthodologie énoncés dans la DP ou que les évaluateurs n'ont pas correctement porté attention à ces articles au moment de l'évaluation, que l'évaluation n'a pas été effectuée d'une manière équitable en faveur de Jacques Whitford ou contre SCSI ou qu'il y a eu toute autre erreur de procédure dans la procédure d'évaluation. Par conséquent, le Tribunal n'estime pas qu'il y a lieu de substituer son jugement à celui de l'équipe d'évaluation pour l'attribution des points au regard des exigences techniques cotées.

À cet égard, le Tribunal observe que SCSI a fait référence à des éléments de preuve provenant de sources extérieures à sa proposition, telles que des sites Web. Bien que, dans certaines circonstances limitées, les évaluateurs soient autorisés à chercher des clarifications ou la vérification de renseignements contenus dans les propositions, on leur demande généralement de prendre leurs décisions à partir de ce qui se trouve dans les propositions qu'ils ont devant eux.

De plus, le Tribunal observe que SCSI a fait porter une portion importante de ses soumissions sur ce qu'elle pensait que Transports Canada aurait dû rechercher (que cela ait été fourni par la DP ou non) plutôt que sur la relation entre les exigences énoncées dans la DP et la manière dont sa proposition serait évaluée. Par exemple, SCSI a dirigé son attention sur les connaissances et l'expérience relatives à l'aéronautique. Cependant, sur les sept critères d'évaluation cotés, seuls les critères nos 5 et 6 comprenaient des exigences ayant trait expressément à l'aéronautique, tandis que le critère no 2 (comme point de bonification) et le critère no 3 avaient trait au transport en général.

En outre, le Tribunal observe que SCSI a allégué qu'il y a des difficultés dans la manière dont certains termes de la DP sont exprimés. Cependant, le Règlement exige qu'une plainte soit déposée auprès du Tribunal dans les 10 jours ouvrables suivant la date où le fournisseur a découvert ou aurait vraisemblablement dû découvrir les faits à l'origine de la plainte9 . Même si le fondement de ces allégations aurait raisonnablement dû être connu avant la date de clôture des soumissions (24 juin 2003), SCSI n'a portées ces allégations à l'attention du Tribunal que le 22 septembre 2003, date à laquelle elle a déposé sa plainte auprès du Tribunal. Par conséquent, elles ont été déposées trop tard pour faire l'objet d'une enquête par le Tribunal.

Le Tribunal observe qu'il manque une signature à la page 4 du « Rapport des résultats de l'évaluation des soumissions » [traduction] soumis par Transports Canada10 . Cependant, le Tribunal est d'avis que cette omission, appropriée ou non, n'est pas pertinente aux motifs de la plainte de SCSI.

Pour les raisons ci-dessus, le Tribunal conclut que Transports Canada n'a pas violé les accords commerciaux en effectuant l'évaluation des propositions.

En ce qui concerne l'allégation de SCSI selon laquelle la réplique reçue de Transports Canada en réponse à sa contestation de l'offre n'était pas « juste », le Tribunal est d'avis que Transports Canada ne s'est pas pleinement conformé aux exigences de l'alinéa 1015(6)b) de l'ALÉNA. Transports Canada a effectivement fourni à SCSI le nom de l'adjudicataire, comme le prévoit l'alinéa 1015(6)b).

De plus, Transports Canada a soutenu que SCSI avait été mise au courant du contenu du sommaire de la notation de sa proposition, lequel comprend un commentaire sur la notation de SCSI pour chaque critère technique coté, pendant une séance d'information téléphonique le 14 août 200311 . Le Tribunal observe que SCSI ne conteste pas ce fait. Par conséquent, le Tribunal estime que Transports Canada a effectivement fourni les renseignements pertinents portant sur les raisons de ne pas avoir retenu la proposition de SCSI, conformément à l'alinéa 1015(6)b) de l'ALÉNA.

Cependant, Transports Canada n'a fourni presque aucun renseignement à SCSI à propos des « caractéristiques et des avantages relatifs de la soumission retenue », mis à part la valeur du contrat. SCSI a soutenu que, pendant la séance d'information téléphonique, à propos du critère no 2 (c.-à-d. l'expérience de l'équipe de concepteurs et d'instructeurs proposée), lorsque SCSI a demandé à Transports Canada comment l'équipe gagnante pouvait obtenir tant de points pour ce critère, étant donné l'absence d'antécédents en sécurité aérienne de ses membres, la réponse a été : « ils ont donné des cours de gestion des risques » et « vos instructeurs canadiens n'ont pas d'expérience » [traduction]. Transports Canada ne conteste pas ce fait et, à la lumière des éléments de preuve, ce sont les seuls renseignements sur la soumission retenue (que ce soit sur le critère no 2 ou sur l'un quelconque des six autres critères cotés) qui ont été donnés lors de la séance d'information téléphonique.

À la suite de la séance d'information téléphonique, SCSI a envoyé une lettre de 13 pages à Transports Canada le 29 août 2003, dans laquelle elle soulevait un grand nombre de questions à propos de l'évaluation et portant en grande partie sur les avantages pertinents de la proposition gagnante. En réponse, Transports Canada a envoyé une lettre d'une page le 8 septembre 2003 qui ne traitait aucunement de la question de fond qui était de savoir pourquoi la proposition de Jacques Whitford a été choisie et non pas celle de SCSI.

Par conséquent, le Tribunal conclut que Transports Canada a violé l'alinéa 1015(6)b) de l'ALÉNA en ne fournissant pas suffisamment de renseignements pertinents à SCSI concernant les caractéristiques et les avantages relatifs de la soumission retenue.

À la lumière de ce qui précède, le Tribunal conclut que la plainte est fondée en partie.

Le Tribunal observe aussi que Transports Canada avait l'obligation aux termes de l'article 103 des Règles de fournir au Tribunal « les autres documents pertinents ». Par conséquent, le Tribunal a demandé à Transports Canada de fournir les feuilles d'évaluation des évaluateurs individuels. Dans sa réponse, Transports Canada a indiqué que « les feuilles d'évaluation créées par les évaluateurs individuels n'ont pas été conservées » [traduction]. Le Tribunal trouve regrettable que les feuilles d'évaluation n'aient pas été conservées, car elles auraient été utiles à l'enquête. Dans ce contexte, l'alinéa 1017(1)p) de l'ALÉNA prévoit que « chacune des Parties fera en sorte que ses entités conservent des documents complets sur tous les marchés, y compris un registre de toutes les communications ayant influé sur chaque marché, pendant une période minimale de trois ans à compter de la date d'adjudication, afin qu'il soit possible de vérifier si le processus de passation des marchés aura été appliqué d'une manière conforme au présent chapitre. » À cet égard, le Tribunal observe que, dans Hewlett-Packard 12 , le Tribunal avait conclu que la destruction des feuilles d'évaluation des évaluateurs avait fait l'objet d'une plainte fondée.

À titre de mesure corrective, SCSI a demandé que le Tribunal recommande que les soumissions soient réévaluées par un groupe d'experts en sécurité aérienne indépendant venant de l'extérieur ou, à titre de solution de rechange, que le marché public soit relancé avec des spécifications plus claires et plus appropriées et avec des mesures de mérite plus objectives pour chaque critère d'évaluation afin de réduire le degré de subjectivité. À titre d'autre solution de rechange, SCSI a demandé que le Tribunal recommande à Transports Canada d'expliquer les résultats de l'évaluation en termes suffisamment détaillés pour que l'évaluation soit compréhensible.

Pour recommander une mesure corrective, le Tribunal a pris en considération les dispositions du paragraphe 30.15(3) de la Loi sur le TCCE. Ainsi qu'il a déjà été mentionné, les éléments de preuve n'ont révélé aucun défaut dans l'évaluation des soumissions et, par conséquent, aucun préjudice porté à SCSI ou à d'autres parties intéressées. Dans les circonstances, il n'y a pas lieu de recommander une réévaluation des soumissions ou un nouvel appel d'offres, comme l'a demandé SCSI.

Cependant, le Tribunal estime que le fait de ne pas donner à SCSI les renseignements requis aux termes de l'alinéa 1015(6)b) de l'ALÉNA est une erreur grave. De l'avis du Tribunal, le fait de fournir des renseignements aux soumissionnaires non retenus est un moyen important de démontrer l'intégrité du régime concurrentiel des marchés publics. Étant donné que, au cours de l'enquête du Tribunal, on a fourni une quantité importante de renseignements sur l'évaluation des soumissions, le Tribunal ne juge pas nécessaire de recommander que Transports Canada fournisse d'autres renseignements à SCSI à ce moment-ci. Cependant, il est important que Transports Canada s'assure qu'à l'avenir, il agira en conformité avec l'alinéa 1015(6)b) lorsqu'il répondra à des demandes de soumissionnaires.

Par conséquent, le Tribunal recommande que Transports Canada élabore et mette en place des procédures qui font en sorte que, sur demande, les renseignements pertinents seront fournis aux soumissionnaires non retenus, comme l'exige l'alinéa 1015(6)b) de l'ALÉNA.

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal détermine que la plainte est fondée en partie.

Aux termes des paragraphes 30.15(2) et 30.15(3) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal recommande, à titre de mesure corrective, que Transports Canada élabore et mette en _uvre des procédures qui font en sorte que, sur demande, les renseignements pertinents seront fournis rapidement aux soumissionnaires non retenus, comme l'exige l'alinéa 1015(6)b) de l'ALÉNA.


1 . L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47 [Loi sur le TCCE].

2 . 32 I.L.M. 289 (entré en vigueur le 1er janvier 1994) [ALÉNA].

3 . D.O.R.S. /93-602 [Règlement].

4 . D.O.R.S. /91-499 [Règles].

5 . 15 avril 1994, en ligne : Organisation mondiale du commerce <http://www.wto.org/french/docs_f/legal_f/final_f.htm> [AMP].

6 . SCSI, étant un fournisseur aux États-Unis, n'aurait pas eu qualité à déposer une plainte aux termes de l'Accord sur le commerce intérieur.

7 . Re plainte déposée par Polaris Inflatable Boats (Canada) Ltd. (23 juin 2003), PR-2002-060 (TCCE).

8 . Ibid. à la p. 7.

9 . Article 6 du Règlement.

10 . Onglet 3 des renseignements supplémentaires déposés par Transports Canada le 26 novembre 2003.

11 . Pièce jointe no 5 au RIF.

12 . Re plainte déposée par Hewlett-Packard (Canada) Ltd. (21 février 2002), PR-2001-030 et PR-2001-040 (TCCE).