BELL MOBILITÉ

Décisions


BELL MOBILITÉ
c.
MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX
Dossier no PR-2004-004

Décision rendue
le mercredi 14 juillet 2004

Motifs rendus
le vendredi 16 juillet 2004


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À une plainte déposée par Bell Mobilité aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47;

ET À LA SUITE D'une décision d'enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

ENTRE

 

BELL MOBILITÉ

Partie plaignante

ET

 

LE MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

Institution fédérale

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte n'est pas fondée.

Aux termes de l'article 30.16 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur accorde au ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux le remboursement des frais raisonnables qu'il a engagés pour répondre à la plainte, ces frais devant être payés par Bell Mobilité. Le degré de complexité de la présente plainte est provisoirement le degré 2 pour le Tribunal canadien du commerce extérieur, et le montant des frais à adjuger est provisoirement fixé à 2 400 $. Si l'une ou l'autre des parties n'est pas d'accord avec l'indication provisoire du degré de complexité ou du montant des frais adjugés, elle peut déposer des observations auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur, conformément à sa Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure portant sur un marché public. Le Tribunal canadien du commerce extérieur se réserve la compétence de fixer le montant final des frais qu'il adjugera.

Pierre Gosselin
Pierre Gosselin
Membre présidant

Richard Lafontaine
Richard Lafontaine
Membre

Ellen Fry
Ellen Fry
Membre

Hélène Nadeau
Hélène Nadeau
Secrétaire

L'exposé des motifs sera publié à une date ultérieure.

Membres du Tribunal :

Pierre Gosselin, membre présidant

 

Richard Lafontaine, membre

 

Ellen Fry, membre

   

Agent principal d'enquête :

Cathy Turner

   

Conseillers pour le Tribunal :

Nick Covelli

 

John Dodsworth

   

Partie plaignante :

Bell Mobilité

   

Conseillers pour la partie plaignante :

Ronald D. Lunau

 

Phuong Ngo

   

Intervenante :

TELUS Mobilité, une division de TELUS Corporation

   

Conseiller pour l'intervenante :

Gordon Cameron

   

Institution fédérale :

Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux

   

Conseillers pour l'institution fédérale :

Christianne M. Laizner

 

Susan D. Clarke

 

Ian McLeod

Adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : (613) 993-3595
Télécopieur : (613) 990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

PLAINTE

1. Le 15 avril 2004, Bell Mobilité (Bell) a déposé une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur 1 à l'égard d'un marché public (invitation no EN994-025180/D) passé par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (TPSGC) pour la fourniture de dispositifs et de services sans fil mobiles.

2. Bell a allégué que TPSGC n'a pas évalué sa soumission selon les critères d'évaluation énoncés dans l'appel d'offres, en violation du paragraphe 506(6) de l'Accord sur le commerce intérieur 2 . Bell a demandé, à titre de mesure corrective, que le Tribunal recommande que TPSGC évalue de nouveau la proposition de Bell, conformément aux critères formulés dans les documents d'appel d'offres et que si, à la suite de cette réévaluation, TPSGC décide que Bell a présenté la proposition qui l'emporte, TPSGC résilie le contrat adjugé à Tele-Mobile Company et adjuge le contrat à Bell et que, de plus, TPSGC indemnise Bell pour les profits qu'elle a perdus pendant la période précédant l'adjudication du contrat à Bell. Bell a en outre demandé le remboursement des frais qu'elle a engagés pour la préparation et le traitement de la plainte.

3. Le 23 avril 2004, le Tribunal a avisé les parties qu'il avait décidé d'enquêter sur la plainte, puisque celle-ci répondait aux exigences du paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE et aux conditions énoncées au paragraphe 7(1) du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics 3 . Le Tribunal n'a pas rendu d'ordonnance de report d'adjudication, conformément au paragraphe 30.13(3) de la Loi sur le TCCE, étant donné que les éléments de preuve au dossier indiquaient qu'un contrat avait déjà été adjugé. Le 27 avril 2004, TPSGC a informé le Tribunal qu'un contrat avait été adjugé à Tele-Mobile Company. Le 7 mai 2004, le Tribunal a autorisé TELUS Mobilité, une division de TELUS Corporation (TELUS), à intervenir dans l'affaire. Le 18 mai 2004, TPSGC a déposé un rapport de l'institution fédérale (RIF) auprès du Tribunal en application de l'article 103 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur 4 . Le 31 mai 2004, Bell et TELUS ont déposé des observations sur le RIF. Le 9 juin 2004, Bell a déposé des observations sur l'exposé de TELUS.

4. Comme il y avait suffisamment de renseignements au dossier pour déterminer le bien-fondé de la plainte, le Tribunal a décidé qu'une audience n'était pas nécessaire et a statué sur la plainte sur la foi des renseignements au dossier.

PROCÉDURE DE PASSATION DU MARCHÉ PUBLIC

5. Le 3 décembre 2003, TPSGC a publié une demande de propositions (DP) pour la fourniture de dispositifs et de services sans fil mobiles pour divers ministères. La date de clôture pour la réception des soumissions était fixée au 5 février 2004.

6. La DP prévoit en partie ce qui suit :

A. INSTRUCTIONS ET INFORMATION À L'INTENTION DES SOUMISSIONNAIRES

A.9.3 Les propositions doivent (O) être complètes à la date de clôture de la DP.

A.11 Modifications apportées aux propositions des soumissionnaires

A.11.1 Après la date et l'heure de clôture de la DP, on n'acceptera pas les modifications apportées aux propositions des soumissionnaires.

A.18.1 Exigences obligatoires :

A.18.1.1 La présente invitation renferme des exigences obligatoires. Tous les éléments de cette invitation qui sont des exigences obligatoires sont identifiés précisément par les mots « doit », « doivent », « obligatoire » ou « O ». Une section entière de cette invitation peut être désignée obligatoire.

A.18.1.2 Les propositions doivent satisfaire à toutes et à chacune des exigences obligatoires. Si une proposition ne satisfait pas à une exigence obligatoire, elle sera déclarée non conforme et ne sera pas examinée davantage.

[Traduction]

B. MODÈLE DE PRÉSENTATION ET CONTENU DES PROPOSITIONS

B.3 Volume 1 - Proposition technique

B.3.3 Énoncé de conformité

B.3.3.1.3 En ce qui concerne les éléments obligatoires de la DDP, le soumissionnaire doit indiquer dans l'énoncé de conformité si la proposition est :

a. CONFORME : cette mention signifie que le soumissionnaire respecte ou s'engage à respecter l'article, la clause, les modalités et les conditions correspondants en tous points;

b. NON CONFORME : cette mention signifie que le soumissionnaire ne peut pas ou ne veut pas respecter l'article, la clause, la caractéristique, les modalités et les conditions correspondants en tous points;

B.3.3.1.6 Dans l'énoncé de conformité, les réponses se rapportant à l'Énoncé des travaux doivent comprendre un énoncé justificatif à l'appui de la réponse, et ce, pour tous les paragraphes de l'EDT assortis de la mention « justifier »; cet énoncé doit démontrer comment le soumissionnaire satisfait à l'exigence visée. Lorsque le soumissionnaire doit faire appel à d'autres documents de sa proposition pour justifier sa réponse, il devrait préciser l'endroit exact où se trouve ce document et indiquer le titre ainsi que les numéros de page et de paragraphe.

C. ÉVALUATION ET SÉLECTION DE L'ENTREPRENEUR

C.1 Généralités

C.1.1 Les soumissionnaires doivent noter, par les présentes, qu'à défaut de répondre à toutes les exigences obligatoires dans la mesure précisée et selon les modalités indiquées, leur proposition devra (O) être jugée non conforme dans l'évaluation.

7. L'annexe A de la DP, « Services et produits mobiles sans fil, Énoncé des travaux » (ÉT), prévoit en partie ce qui suit :

5. Soutien offert aux utilisateurs finaux et compte rendu des problèmes

5.1. Soutien aux utilisateurs finaux

5.1.4. L'entrepreneur doit (O) assurer le soutien aux utilisateurs finaux selon l'horaire minimum suivant :

· en semaine : de 8 h à 21 h;

· les samedis : de 10 h à 18 h.

(Cet horaire de service est établi d'après l'heure locale.)

Justifier.

8. Selon TPSGC, trois fournisseurs ont présenté des propositions. La proposition de Bell mentionne en partie ce qui suit :

CONFORME

HEURES DU SERVICE À LA CLIENTÈLE

Alliance mobilité Bell (AMB)

Bell Mobilité

     
 

Région de l'Ouest

Région du Centre

Région de l'Est

Lundi à vendredi

8 h 30 à minuit

8 h 30 à 21 h

8 h 30 à 21 h

Samedi

8 h 30 à 18 h

8 h 30 à 18 h

8 h 30 à 18 h

Dimanche

Fermé

Fermé

Fermé

Saskatchewan Mobility

Lundi à vendredi 8 h 30 à 21 h

Samedi 8 h 30 à 18 h

Dimanche Fermé

Alliant Mobility

       
 

N.-É.

N.-B.

T.-N.-L.

Î.-P.-É.

Lundi à vendredi

24 heures

24 heures

8 h à 20 h

8 h à 21 h

Samedi

24 heures

24 heures

8 h à 20 h

8 h 30 à 18 h

Dimanche

24 heures

24 heures

Fermé

Fermé

MTS Mobility - Manitoba

Lundi à vendredi 8 h à 21 h

Samedi 8 h à 18 h

Dimanche Fermé

[Traduction]

9. Le 16 février 2004, TPSGC a demandé à Bell de préciser si la ligne téléphonique sans frais d'interurbain offrirait, conformément à la section 5.1.1 de l'ÉT, le soutien aux utilisateurs finaux, partout au pays, selon l'horaire suivant :

- en semaine : de 8 h à 21 h;

- les samedis : de 10 h à 18 h.

(Cet horaire de service est établi d'après l'heure locale.)

[Traduction]

10. Le 18 février 2004, Bell a répondu à la demande de TPSGC en affirmant qu'elle allait offrir à TPSGC des numéros sans frais pour toutes les régions, comme l'indiquait sa proposition, et que les centres d'appels fourniraient un soutien aux utilisateurs finaux pendant les heures mentionnées5 . Le 24 février 2004, TPSGC a demandé à Bell de préciser en quoi les heures prévues pour le service à la clientèle dans chacune des régions et indiquées dans sa proposition respectent les exigences obligatoires en matière de soutien aux utilisateurs finaux, ce à quoi Bell a répondu qu'elle est conforme. Le 26 février 2004, Bell a affirmé ce qui suit : « Bell Mobilité a fait une erreur de frappe lorsqu'elle a écrit que notre service à la clientèle est ouvert de 8 h 30 à 17 h. Elle aurait dû dire ce qui suit : Bell Mobilité et Alliance mobilité Bell (AMB) assureront le service à la clientèle pour les utilisateurs finaux de TPSGC de 8 h à 21 h en semaine et de 10 h à 18 h, les samedis. Bell Mobilité satisfait donc entièrement à la clause 5.1.4 de l'annexe A - ÉT » [traduction]. Le 12 mars 2004, TPSGC a avisé Bell que sa proposition avait été jugée non conforme et qu'un marché avait été adjugé à TELUS. Le 24 mars 2004, TPSGC a expliqué à Bell les raisons pour lesquelles sa proposition avait été jugée non conforme. Le 25 mars 2004, Bell a présenté à TPSGC une opposition ayant trait à l'évaluation de sa proposition. Le 30 mars 2004, TPSGC a avisé Bell qu'il avait confirmé sa conclusion de non-conformité. Le 15 avril 2004, Bell a déposé sa plainte auprès du Tribunal.

POSITION DES PARTIES

Position de Bell

11. Bell a soutenu qu'il était apparent, au vu de sa proposition, que l'information fournie comportait une divergence non intentionnelle. Elle a allégué qu'en répondant « CONFORME » à l'exigence de soutien aux utilisateurs finaux pendant les heures mentionnées dans la DP, Bell disait clairement qu'elle respecterait l'exigence énoncée. Bell a reconnu que les heures d'activité mentionnées dans le tableau fourni ne correspondaient pas toujours à celles de la section 5.1.4 de l'ÉT. Bell a prétendu toutefois que cela vient d'une erreur d'écriture commise au moment où les heures d'activité ont été insérées dans le tableau. Bell a soutenu avoir repéré cette erreur et expliqué le manque de cohérence à TPSGC. Bell a de plus soutenu que, à la fin du processus d'éclaircissement, il ne pouvait y avoir aucun doute que Bell avait toujours eu l'intention d'observer l'exigence en cause.

12. Bell a soutenu que toutes les erreurs commises dans une proposition n'entraînent pas nécessairement le rejet d'un soumissionnaire, même si une erreur a trait à une exigence obligatoire. Elle a allégué que l'erreur, dans la présente affaire, était mineure et de peu d'importance et qu'elle ne devrait donc pas avoir eu de conséquence aussi grave, c.-à-d. une conclusion de non-conformité. Elle a soutenu que la décision de TPSGC dans la présente affaire est particulièrement sévère du fait que l'exigence obligatoire ayant entraîné le rejet de Bell est une des exigences de l'invitation auxquelles il est le plus facile de satisfaire et que l'intention et la capacité de Bell de respecter cette exigence n'ont jamais été sérieusement mises en doute. Selon Bell, TPSGC s'est soumis, et a soumis Bell, à des contraintes déraisonnables en appliquant pour évaluer la proposition de Bell une démarche indûment rigide et inflexible. Bell a soutenu que cette façon de procéder avait fait injustement rejeter sa proposition pour des motifs mineurs qui ne correspondent pas au fond de sa proposition ni à sa capacité d'offrir le service qu'exige l'invitation à soumissionner.

13. Bell a fait valoir que l'intégrité et l'équité de la procédure de passation d'un marché public ne sont pas bien servies lorsque des soumissionnaires admissibles sont rejetés par suite de petites erreurs ou de petites incohérences facilement expliquées. Bell a soutenu qu'on peut supposer que l'objectif des demandes d'éclaircissement de TPSGC était d'obtenir de Bell des explications à propos des renseignements incohérents.

14. Bell a soutenu que, en ce qui concerne les exigences obligatoires, il s'agit de savoir si elles ont été respectées de façon substantielle, et non si elles l'ont été de façon stricte. Elle a allégué qu'il n'existe pas de règle absolue selon laquelle toute erreur relative à une exigence obligatoire entraîne le rejet d'une proposition et qu'il doit y avoir une certaine souplesse dans le processus. Bell a soutenu qu'il aurait fallu se demander s'il aurait été injuste d'accepter l'éclaircissement donné et si cela aurait nui à l'intégrité du processus. Bell a fait référence pour appuyer sa position à une plainte6 présentée par la Société d'énergie Mechron Limitée. Bell s'est également appuyée sur une décision antérieure de la Cour d'appel fédérale7 , qui affirme que les exigences obligatoires ne doivent pas être interprétées de manière isolée et disjointe. Comme le Tribunal l'a décidé dans R.E.D. Electronics Inc. 8 , elles doivent plutôt « être interprétées comme un ensemble en tenant compte de l'objet et des objectifs globaux de la [DP] »9 . Bell a soutenu que la même approche raisonnable devrait être appliquée pour l'interprétation de la réponse d'un soumissionnaire à une exigence obligatoire, c.-à-d. l'intention du soumissionnaire doit être tirée de l'ensemble du document, et aucune partie de la proposition ou de la réponse d'éclaircissement ne doit être dissociée de l'ensemble et prise isolément.

15. Dans sa réponse au RIF, Bell a fait valoir que la définition que le dictionnaire donne du mot « éclaircir » inclut « rendre ou devenir plus clair »10 [traduction]. Elle a soutenu que la définition habituelle que donne le dictionnaire au mot « éclaircissement » est assez flexible pour que l'explication d'aspects existants d'une proposition qui semblent incohérents puisse entrer dans cette définition et que ce genre d'explication n'équivaut pas à présenter de nouveaux renseignements. Bell a ajouté que, bien que TPSGC maintienne que sa décision dans la présente affaire était nécessaire par suite du résultat de la plainte11 déposée par CVDS Inc., CVDS et la présente affaire sont différentes du fait que, dans l'affaire CVDS, la question en était une de non-observation substantielle d'une exigence technique.

16. Dans sa réponse à l'exposé de TELUS, Bell a soutenu que comprendre l'intention du soumissionnaire telle qu'elle se dégage de la proposition dans son ensemble est essentiel au processus d'évaluation. Elle a allégué que, s'il y a des renseignements incohérents dans la proposition, le soumissionnaire devrait avoir le droit d'expliquer et de corriger l'erreur en renvoyant TPSGC à d'autres renseignements qui se trouvent dans la proposition et correspondent à l'intention réelle du soumissionnaire. Bell a soutenu que l'information se trouvant dans une autre partie de la proposition d'un soumissionnaire inclut l'énoncé de la conformité de ce soumissionnaire et que cet énoncé de la conformité fait autant partie d'une proposition d'un soumissionnaire que tout autre aspect de la proposition et qu'il faut lui accorder autant de poids qu'à ces autres aspects. Bell a également soutenu qu'un soumissionnaire qui explique les raisons d'une incohérence et éclaircit la proposition en demandant à TPSGC de la lire dans son ensemble de façon constante, en utilisant les bons renseignements, ne constitue pas une modification à une soumission. Bell a allégué qu'il est important que les évaluateurs déterminent si la proposition est véritablement non conforme ou si elle ne soulève un problème de conformité que parce qu'elle présente des renseignements incohérents. Bell a allégué qu'il existe une distinction entre la situation où un soumissionnaire ne satisfait absolument pas à une exigence obligatoire et un cas où le soumissionnaire satisfait à une exigence obligatoire, mais fournit accidentellement des renseignements incohérents dans sa réponse.

17. Bell a soutenu ne pas avoir remplacé de renseignements ni fourni de renseignements manquants. Elle a soutenu que répondre « CONFORME » à l'exigence, c'est la même chose que de dire qu'elle fournirait le soutien exigé pendant les périodes mentionnées. Bell a soutenu qu'il se trouve ailleurs dans sa proposition des heures qui, dans certains cas, contredisent son énoncé voulant qu'elle respecte l'exigence, et qu'il y avait sans aucun doute dans la proposition un manque de clarté ou de certitude qui avait besoin d'être éclairci.

18. Enfin, à propos de la demande de remboursement de frais de la part de TELUS, Bell a fait valoir que la décision d'intervenir et de présenter des exposés est une décision que TELUS a prise en sachant que le remboursement des frais est rarement accordé, si jamais, aux intervenantes. Elle a également soutenu que le remboursement des frais sur la base procureur-client n'est d'habitude accordé que lorsqu'une partie à un litige s'est livrée à une forme ou à une autre de mauvaise conduite qui a rallongé sans nécessité les procédures et fait augmenter les frais de façon déraisonnable.

Position de TPSGC

19. TPSGC a fait valoir que la section 5.1.4 de l'ÉT exige que les fournisseurs offrent un soutien aux utilisateurs finaux à la Couronne de 8 h à 21 h, heure locale, en semaine, pour toutes les régions et que la proposition présentée par Bell mentionnait que, dans certaines régions, ce service ne commencerait qu'à 8 h 30.

20. TPSGC a soutenu avoir fourni à Bell deux occasions d'expliquer comment il est possible de conclure que sa réponse dans la proposition respecte le critère obligatoire de la section 5.1.4 de l'ÉT, p. ex. en lui signalant d'autres données techniques se trouvant dans une autre partie de la proposition et qui pourraient, associées à la réponse à la section 5.1.4, montrer que le « 8 h 30 » mentionné pourrait en fait être 8 h dans la localité en question. TPSGC a fait valoir que Bell n'était pas en mesure de lui indiquer d'autres données pertinentes se trouvant dans sa proposition. Bell a répondu à la demande d'éclaircissement de TPSGC en disant avoir « fait une erreur d'écriture lorsqu'elle a écrit que [son] service à la clientèle est ouvert de 8 h 30 à 17 h. Elle aurait dû dire ce qui suit : » [traduction], après quoi Bell a fourni l'horaire révisé pour son service aux utilisateurs finaux.

21. TPSGC a soutenu que la position de Bell, selon laquelle l'erreur s'étant produite dans sa proposition était mineure et qu'il ne fallait pas considérer qu'elle équivalait à la non-observation de l'exigence, contredit directement la règle claire et explicite d'observation rigoureuse des exigences obligatoires que le Tribunal a énoncée dans une décision12 concernant IBM Canada Ltée, qui prévoit en partie ce qui suit :

Le Tribunal reconnaît que la conformité des fournisseurs potentiels à toutes les conditions obligatoires des documents d'appel d'offres est une des pierres angulaires de l'intégrité de tout mécanisme de passation des marchés publics. Par conséquent, les entités doivent procéder à une évaluation complète et rigoureuse de la conformité des propositions des soumissionnaires aux conditions obligatoires13 .

22. TPSGC a soutenu que le Tribunal n'a décrit qu'une seule exception à la règle formulée dans IBM. Le Tribunal a fait remarquer qu'un aspect non conforme qui est simplement « une question de forme plutôt qu'une question de fond » ne doit pas être considéré comme un motif suffisant de conclure que la proposition n'est pas conforme. Dans cette affaire, la DP avait demandé que des prix unitaires soient présentés. Dans IBM, la proposition contenait toutes les données dont il fallait disposer pour obtenir le prix unitaire, mais celui-ci n'avait été ni calculé ni mentionné en tant que tel. Le Tribunal a conclu que, lorsqu'il suffisait de procéder à un calcul pour obtenir les prix unitaires dans la présentation imposée, TPSGC aurait dû s'en charger. Selon le Tribunal, il s'agissait d'une question « de forme plutôt que de fond » et, donc, une exception étroite et limitée à la règle fondamentale de l'observation rigoureuse des exigences obligatoires. TPSGC a soutenu que, étant donné que les données présentées par Bell contenaient des erreurs de fond, cette exception ne s'appliquerait pas.

23. En ce qui concerne l'argument de Bell selon lequel elle a également mentionné « CONFORME » dans sa proposition et que sa réponse aurait dû être traitée comme une incohérence, TPSGC a fait valoir que cet argument contredit de toute évidence les directives explicites que le Tribunal a données à TPSGC dans CVDS. Dans cette affaire, le Tribunal a déclaré ce qui suit :

La présente affaire traite du défaut de Cartel de satisfaire à une exigence obligatoire. Selon la DP, un tel défaut rend la soumission non conforme. La mention de « 10 k » ohms dans la proposition de Cartel était, à tout le moins, ambiguë et il est troublant de lire que TPSGC est d'avis qu'il aurait pu « éclaircir » l'affaire et accepter la soumission comme si elle était conforme. Selon le Tribunal, une telle modification aurait constitué une modification d'un élément fondamental de la soumission. Le Tribunal ne peut admettre l'argument de TPSGC selon lequel la fourniture, par la suite, d'un matériel conforme aux exigences concernant le signal d'entrée, indique que l'erreur qu'a faite Cartel dans sa proposition était sans conséquence aux fins de l'évaluation. Il est d'avis que la livraison éventuelle d'un produit conforme à l'exigence portant sur le signal d'entrée déborde totalement la portée de l'évaluation des propositions et n'a en aucune façon pour effet de rendre conforme une proposition qui ne l'est pas. Le Tribunal est d'avis que les évaluateurs auraient dû déclarer la proposition de Cartel irrecevable en vertu de la clause 15 de la DP, qui stipulait que les soumissions qui ne répondaient pas à toutes les exigences obligatoires seraient déclarées irrecevables14 .

24. TPSGC a dit savoir que les faits pertinents relatifs aux incohérences que comporte la proposition présentée par Bell et aux incohérences de la proposition présentée par Cartel Communications System Inc. (Cartel) étaient très semblables. Il a soutenu que, dans les deux cas, le problème avait trait à une exigence technique précise, une parmi les nombreuses exigences de la DP. Il a ajouté que Bell et Cartel avaient toutes deux déclaré de façon générale que ce qu'elles présentaient était « CONFORME » à l'exigence et que, dans les deux cas, un chiffre technique non conforme s'est retrouvé dans la même page de la proposition que l'énoncé général « CONFORME ». TPSGC a remarqué que, dans les deux cas, les soumissionnaires ont prétendu que l'erreur s'était produite par inadvertance et que les deux soumissionnaires ont affirmé avoir eu l'intention de respecter l'exigence et être en mesure de le faire sur le plan technique. TPSGC a allégué que, compte tenu de ce qui précède, et étant donné la directive claire qu'a donné le Tribunal à TPSGC à propos des circonstances de ce genre, il n'avait d'autre choix que de conclure que la proposition de Bell était non conforme en ce qui a trait à l'exigence obligatoire de la section 5.1.4 de l'ÉT et, par conséquent, de ne pas poursuivre l'examen de la proposition de Bell.

25. Pour les raisons mentionnées précédemment, TPSGC a demandé que le remboursement des frais qu'il a engagés dans la présente affaire lui soit accordé, conformément à la Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure portant sur un marché public (Ligne directrice) du Tribunal.

Position de TELUS

26. TELUS a soutenu que la loi énonce clairement que TPSGC doit évaluer de façon méticuleuse le respect des exigences obligatoires. TELUS a fait valoir que, étant donné qu'une conclusion de non-conformité en ce qui concerne une exigence obligatoire entraîne le rejet d'une proposition, il est raisonnable que TPSGC veille bien à ne pas avoir mal compris la réponse, à ne pas être passé à côté d'une interprétation conforme de la réponse ou de renseignements se trouvant dans une autre partie de la soumission qui éclairciraient la réponse et établiraient sa conformité.

27. TELUS a soutenu qu'il est évident que les renseignements détaillés fournis dans la soumission de Bell ont été présentés de façon tout à fait intentionnelle et que l'« erreur » était que l'information relative aux heures de soutien n'était pas conforme à l'exigence. TELUS a allégué qu'il n'est pas possible de dire que cette information a été insérée par inadvertance. TELUS a soutenu que, lorsqu'il faut justifier la conformité, c'est l'analyse de cette justification qui permet d'établir s'il y a conformité et non le simple fait que le soumissionnaire ait écrit « CONFORME ».

28. TELUS a soutenu que, bien que Bell essaie de dire que la non-conformité de sa soumission est de « nature procédurale ou technique mineure », [traduction] l'information que Bell a fournie à TPSGC dans sa dernière réponse différait purement et simplement de ce que mentionnait sa proposition, c.-à-d. que Bell a modifié les heures pendant lesquelles elle offrirait des services de soutien. TELUS a allégué que les réponses « 8 h 30 » et « 20 h » n'ont rien d'ambigu et que ces réponses ne sont pas éclaircies lorsqu'on les remplace par « 8 h » et « 21 h »; ces réponses sont plutôt modifiées par la fourniture de nouveaux renseignements qui sont différents.

29. Enfin, TELUS a fait valoir que, lorsqu'un soumissionnaire averti présente une plainte qui va à l'encontre de tout précédent ou principe simplement parce qu'« il n'y a rien à perdre » et, qu'il oblige le Tribunal, le gouvernement et le soumissionnaire retenu à engager les frais nécessaires au traitement de cette plainte, il y a lieu de considérer qu'il s'agit d'une exception à la Ligne directrice du Tribunal. TELUS a allégué qu'accorder le remboursement de frais importants dans ces circonstances est la seule façon d'empêcher les soumissionnaires d'adopter une attitude de « rien à perdre » à l'égard du recours au processus du Tribunal. TELUS a donc demandé le remboursement complet de ses frais juridiques, en fonction de ce qu'un tribunal civil appellerait une base « procureur-client ».

DÉCISION DU TRIBUNAL

30. Aux termes du paragraphe 30.14(1) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal doit, dans son enquête, limiter son étude à l'objet de la plainte. En outre, à la fin de l'enquête, le Tribunal doit déterminer la validité de la plainte en fonction des critères et procédures établis par règlement pour le contrat spécifique. De plus, l'article 11 du Règlement prévoit que le Tribunal doit déterminer si le marché public a été passé conformément aux accords commerciaux applicables, en l'occurrence, l'ACI.

31. Le paragraphe 506(6) de l'ACI prévoit que « [d]ans l'évaluation des offres, une Partie peut tenir compte non seulement du prix indiqué, mais également de la qualité, de la quantité, des modalités de livraison, du service offert, de la capacité du fournisseur de satisfaire aux conditions du marché public et de tout autre critère se rapportant directement au marché public et compatible avec l'article 504. Les documents d'appel d'offres doivent indiquer clairement les conditions du marché public, les critères qui seront appliqués dans l'évaluation des soumissions et les méthodes de pondération et d'évaluation des critères ».

32. Bell a allégué que TPSGC n'avait pas évalué sa soumission conformément aux critères d'évaluation de l'invitation à soumissionner, parce qu'il a rejeté la soumission de Bell du fait que celle-ci ne satisfaisait pas à la section 5.1.4 de l'ÉT.

33. Pour satisfaire au critère obligatoire de la section 5.1.4 de l'ÉT, les soumissionnaires devaient d'abord indiquer dans leur énoncé de conformité s'ils satisfaisaient ou non à ce point puis, étant donné qu'ils devaient « justifier », présenter un texte justifiant leur réponse en montrant en quoi ils satisfaisaient à l'exigence. Dans sa réponse au critère obligatoire de la section 5.1.4, Bell a écrit « CONFORME » puis, pour appuyer sa réponse, a présenté un tableau donnant les diverses heures de son service à la clientèle pour les différentes régions du Canada. Selon les éléments de preuve, la soumission ne renfermait pas d'autres renseignements indiquant comment Bell satisferait au critère obligatoire qui était d'assurer le soutien aux utilisateurs finaux selon l'horaire exigé par TPSGC.

34. Le critère obligatoire de la section 5.1.4 de l'ÉT exigeait que les fournisseurs offrent le soutien aux utilisateurs finaux à la Couronne en semaine de 8 h à 21 h, heure locale, pour toutes les régions. La proposition de Bell indiquait que ce service ne commencerait qu'à 8 h 30 dans quatre des neuf régions, et qu'il se terminerait à 20 h dans une région.

35. Il s'agit de savoir si TPSGC a correctement évalué la conformité de Bell à la section 5.1.4 de l'ÉT.

36. Dans IBM, le Tribunal a déclaré que « les entités doivent procéder à une évaluation complète et rigoureuse de la conformité des propositions des soumissionnaires aux conditions obligatoires ». Le Tribunal a remarqué qu'il existe des exceptions pour des « question[s] de forme plutôt [que] de fond » et que « [b]ien qu'il faille adopter une interprétation stricte des soumissions, en l'absence d'une méthode claire pour présenter les renseignements, une certaine latitude doit, de l'avis du Tribunal, être accordée aux soumissionnaires »15 . À propos des éclaircissements, le Tribunal a déclaré ce qui suit dans Mechron :

Le Ministère fait valoir que, après l'ouverture des soumissions, il a le droit de demander à recevoir et de tenir compte des éclaircissements de la part des soumissionnaires afin de terminer son évaluation des propositions. Le Tribunal accepte cette position. Il est toutefois important de comprendre clairement ce qui constitue un éclaircissement. Selon le Tribunal, un éclaircissement est une explication d'un aspect quelconque d'une proposition qui ne représente pas une révision ou une modification importante de la proposition16 .

37. Ces principes que le Tribunal applique sont compatibles avec le principe fondamental de transparence de la procédure de passation de marchés publics prévu par l'ACI. L'article 501 de l'ACI prévoit en partie ce qui suit : « le présent chapitre vise à établir un cadre qui assurera à tous les fournisseurs canadiens un accès égal aux marchés publics [...] dans un contexte de transparence et d'efficience ». Le Tribunal est d'avis que, si les soumissionnaires étaient autorisés à apporter des corrections importantes à leur offre, cela pourrait introduire dans l'esprit des fournisseurs un élément de doute quant à la transparence du processus d'appel d'offres.

38. Le Tribunal ne retient pas l'argument de Bell selon lequel il y a incohérence entre l'énoncé de conformité exigé à la section 5.1.4 de l'ÉT et le texte justificatif exigé par la même section. Le Tribunal est d'avis que l'énoncé de conformité (« CONFORME ») n'est pas censé répéter l'exigence stipulée par la DP. Il s'agit simplement d'une indication que le soumissionnaire « respecte ou s'engage à respecter l'article, la clause, les modalités et les conditions correspondant en tous points », comme l'énonce la section B.3.3.1.3 de la DP; l'énoncé de conformité doit être accompagné d'un texte montrant comment le soumissionnaire satisfait à cette exigence17 . Selon le Tribunal, l'énoncé de conformité et le texte ne sont donc pas incohérents, l'un est simplement censé expliquer l'autre.

39. Le Tribunal est d'avis que, par le biais du processus d'éclaircissement déclenché par TPSGC, Bell a tenté de réviser sa proposition, plutôt que de fournir une explication sur l'un de ses aspects existants. Bell a présenté des renseignements différents de ceux qui se trouvaient dans sa proposition. Le Tribunal est d'avis que la modification que Bell a essayé d'apporter à sa proposition au moyen de cette information révisée était une modification de fond.

40. Bell a d'abord fourni des heures d'activité non conformes pour ses trois régions et pour la seule région de Saskatchewan Mobility. Elle a fourni des heures d'activité conformes pour trois des quatre régions d'Alliant Mobility et pour la seule région de MTS Mobility. Non seulement les données non conformes se rapportaient à cinq des neuf régions, mais elles représentaient aussi un nombre important d'heures, soit plusieurs mois au total pour les trois années du marché. De plus, rien dans la soumission n'indique au Tribunal que ces heures représentaient autre chose que les heures d'activité normales de Bell dans plusieurs de ses régions ou qu'elles avaient été fournies par erreur.

41. À la lumière de ce qui précède, le Tribunal est d'avis que les circonstances de la présente affaire ne justifient aucune dérogation à la règle établie dans IBM. Le Tribunal n'est pas convaincu qu'il s'agisse d'une question de forme plutôt que de fond. Si les modifications à la soumission de Bell avaient été autorisées, il se serait agi de modifications substantielles et, si TPSGC avait accepté qu'elles fassent partie de la soumission, cela aurait été contraire au libellé de la DP et aurait contrevenu à l'ACI.

42. Par conséquent, le Tribunal conclut que TPSGC a eu raison de juger la soumission de Bell non conforme au critère obligatoire de la section 5.1.4 de l'ÉT parce que la justification qu'elle avait fournie pour ce point ne correspondait pas à l'horaire exigé pour les services aux utilisateurs finaux.

43. À la lumière de ce qui précède, le Tribunal détermine que la plainte de Bell n'est pas fondée.

44. Le Tribunal accorde à TPSGC le remboursement des frais raisonnables qu'il a engagés pour répondre à cette plainte. Pour décider du montant des frais à adjuger en l'espèce, le Tribunal a tenu compte de sa Ligne directrice, laquelle fonde l'évaluation du degré de complexité d'une plainte sur trois critères : la complexité du marché public, la complexité de la plainte et la complexité de la procédure. L'opinion provisoire du Tribunal est que le degré de complexité de la présente affaire correspond au deuxième niveau de complexité prévu à l'annexe A de la Ligne directrice (degré 2). Ce marché était moyennement complexe, vu qu'il s'agissait de la fourniture de produits sans fil mobiles et de services de soutien aux utilisateurs finaux pour divers ministères, notamment de services d'itinérance et d'interurbain. Les soumissionnaires devaient fournir des renseignements sur les zones de rayonnement de leur réseau existant, ce qui ajoutait à la complexité de la réponse à l'invitation que les soumissionnaires devaient fournir. La présente plainte est moyennement complexe, car elle a trait à des questions relatives à la modification des soumissions. Les parties ont fourni des arguments relativement complexes et ont fait référence à des décisions rendues antérieurement par le Tribunal et la Cour d'appel fédérale. Enfin, il s'agit d'une procédure de complexité moyenne puisque Bell a eu la possibilité de déposer des observations sur l'exposé de TELUS. Il y a eu une intervenante, mais il n'y a pas eu de requête et aucune audience publique n'a été tenue. La plainte a été réglée dans le délai de 90 jours. Par conséquent, comme le prévoit la Ligne directrice, le montant des frais adjugés est fixé provisoirement à 2 400 $.

45. Le Tribunal a le pouvoir discrétionnaire, aux termes du paragraphe 30.16 de la Loi sur le TCCE, d'adjuger les frais en faveur ou contre des intervenantes. Le Tribunal doit exercer son pouvoir discrétionnaire lorsqu'il adjuge les frais et appliquer les mêmes principes que les tribunaux18 .

46. La jurisprudence de la Cour fédérale du Canada19 montre que les frais sont rarement adjugés en faveur ou contre des intervenantes étant donné la rigueur du critère à appliquer dans le cas des frais adjugés en leur faveur ou contre eux. Dans une affaire où une intervention a été accueillie, la Cour fédérale a néanmoins décidé que les intervenantes n'avaient pas droit aux frais puisque leur participation avait été complètement volontaire20 . Dans d'autres affaires, les frais ont été limités aux questions soulevées par les intervenantes, mais qu'aucune autre des parties ne souhaitait soulever21 . À la connaissance du Tribunal, le remboursement de tous les frais n'a été accordé à une intervenante qu'une seule fois et, dans cette affaire, l'intervenante n'avait pas eu d'autre choix que d'être partie à la procédure, car l'affaire aurait pu déboucher sur une injonction à son encontre22 .

47. Le Tribunal a appliqué les principes susmentionnés dans Bosik 23 . Le Tribunal les a appliqués à la demande de TELUS et il est d'avis qu'il n'y a pas lieu d'accorder à TELUS le remboursement de ses frais dans la présente procédure, car elle a choisi d'être intervenante. Le Tribunal reconnaît que l'intérêt commercial de TELUS dans la présente procédure était considérable et estime que son exposé a été utile. Le Tribunal n'est toutefois pas d'avis que les principes judiciaires pertinents justifient d'accorder à TELUS le remboursement de ses frais en l'espèce. TELUS n'a pas droit au remboursement de ses frais, car elle n'a pas soulevé de questions différant de façon significative de celles que les parties ont soulevées.

DÉCISION DU TRIBUNAL

48. Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal détermine que la plainte n'est pas fondée.

49. Aux termes de l'article 30.16 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal accorde à TPSGC le remboursement des frais raisonnables qu'il a engagés pour répondre à la plainte, ces frais devant être payés par Bell. Le degré de complexité de la présente plainte est provisoirement le degré 2 pour le Tribunal, et le montant des frais adjugés est provisoirement fixé à 2 400 $. Si l'une ou l'autre des parties n'est pas d'accord avec l'indication provisoire du degré de complexité ou du montant des frais à adjuger, elle peut déposer des observations auprès du Tribunal, conformément à sa Ligne directrice. Le Tribunal se réserve la compétence de fixer le montant final des frais qu'il adjugera.


1 . L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47 [Loi sur le TCCE].

2 . 18 juillet 1994, Gaz. C. 1995.I.1323, en ligne : Secrétariat du commerce intérieur <http://www.intrasec.mb.ca/fre/it.htm> [ACI].

3 . D.O.R.S./93-602 [Règlement].

4 . D.O.R.S./91-499.

5 . Plainte, onglet D.

6 . Re plainte déposée par la Société d'énergie Mechron Limitée (18 août 1995), PR-95-001 (TCCE) [Mechron].

7 . Siemens Westinghouse Inc. c. Canada (Ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux) (2000), 260 N.R. 367 (C.A.F.).

8 . Re plainte déposée par R.E.D. Electronics Inc. (26 juillet 1995), 94N6660-021-0024 (TCCE).

9 . Ibid. à la p. 6.

10 . The Canadian Oxford Dictionary, 1998, s. v. « clarify ».

11 . Re plainte déposée par CVDS Inc. (22 janvier 2003), PR-2002-035 (TCCE) [CVDS].

12 . Re plainte déposée par IBM Canada Ltée (5 novembre 1999), PR-99-020 (TCCE) [IBM].

13 . Ibid. à la p. 7.

14 . Supra note 11 à la p. 4.

15 . Supra note 12 à la p. 8.

16 . Supra note 6, version publique à la p. 10.

17 . Voir la DP à la p. 18, section B.3.3.1.6.

18 . Canada (Procureur général) c. Georgian College of Applied Arts and Technology, 2003 C.A.F. 199.

19 . La Cour fédérale du Canada a deux divisions, c.-à-d. la Cour d'appel fédérale et la Cour fédérale.

20 . Grant c. Canada (Procureur général), [1995] 1 C.F. 158 (1re inst.).

21 . C.J.A. c. University of Calgary, [1986] A.C.F. no 463 (C.A.F.); Florence c. Canada (Comité des transports aériens), [1991] A.C.F. no 80 (C.F. 1re inst.).

22 . Glaxo Canada c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (1988), 19 C.P.R. (3d) 374 (C.F. 1re inst.).

23 . Re plainte déposée par Bosik Vehicle Barriers Ltd. (6 mai 2004), PR-2003-082 (TCCE).