SNC TECHNOLOGIES INC.

Décisions


SNC TECHNOLOGIES INC.
c.
MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX
Dossier no PR-2005-010

Décision et motifs rendus
le vendredi 16 septembre 2005


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À une plainte déposée par SNC Technologies Inc. aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47;

ET À LA SUITE D'une décision d'enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

ENTRE

 

SNC TECHNOLOGIES INC.

Partie plaignante

ET

 

LE MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

Institution fédérale

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte n'est pas fondée.

Aux termes de l'article 30.16 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur accorde au ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux le remboursement des frais raisonnables qu'il a engagés pour répondre à la plainte, ces frais devant être payés par SNC Technologies Inc. L'indication provisoire du degré de complexité de la présente plainte donnée par le Tribunal canadien du commerce extérieur est le degré 2, et l'indication provisoire du montant de l'indemnisation est de 2 400 $. Si l'une ou l'autre des parties n'est pas d'accord en ce qui a trait à l'indication provisoire du degré de complexité ou à l'indication provisoire du montant de l'indemnisation, elle peut déposer des observations auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur, en conformité avec sa Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure portant sur un marché public. Le Tribunal canadien du commerce extérieur se réserve la compétence de fixer le montant final de l'indemnisation.

Meriel V. M. Bradford
Meriel V. M. Bradford
Membre présidant

Patricia M. Close
Patricia M. Close
Membre

Zdenek Kvarda
Zdenek Kvarda
Membre

Hélène Nadeau
Hélène Nadeau
Secrétaire

Membres du Tribunal :

Meriel V. M. Bradford, membre présidant

 

Patricia M. Close, membre

 

Zdenek Kvarda, membre

   

Directeur de la recherche :

Marie-France Dagenais

   

Agent d'enquête principal :

Cathy Turner

   

Conseiller pour le Tribunal :

Eric Wildhaber

   

Partie plaignante :

SNC Technologies Inc.

   

Conseillers pour la partie plaignante :

Paul D. Conlin

 

Benjamin P. Bedard

 

Richard A. Wagner

   

Intervenante :

Smith Consulting Group

   

Institution fédérale :

Ministères des Travaux publics et des Services gouvernementaux

   

Conseillers pour l'institution fédérale :

Ian McLeod

 

Christianne M. Laizner

 

Susan D. Clarke

Adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : (613) 993-3595
Télécopieur : (613) 990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

PLAINTE

1. Le 20 juin 2005, SNC Technologies Inc. (SNC) a déposé une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur 1 à l'égard d'un marché public (invitation no EP243-020059/B) passé par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (TPSGC) au nom du ministère de la Défense nationale pour la prestation de services d'entrepreneurs qui commercialiseront et vendront des biens militaires excédentaires.

2. SNC a allégué que TPSGC n'avait pas correctement évalué ses propositions en tenant compte de renseignements qui n'étaient pas inclus dans ses propositions. À titre de mesure corrective, SNC a demandé au Tribunal de recommander que TPSGC lui attribue les contrats spécifiques. À titre de solution de rechange, elle a demandé au Tribunal de recommander que TPSGC lui verse une indemnisation en reconnaissance des frais qu'elle avait engagés pour la préparation de sa soumission et des profits qu'elle avait perdus. SNC a également demandé le remboursement des frais qu'elle avait engagés pour la préparation et le traitement de la plainte.

3. Le 27 juin 2005, le Tribunal a avisé les parties qu'il avait décidé d'enquêter sur la plainte, puisque cette dernière répondait aux exigences du paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE et aux conditions énoncées au paragraphe 7(1) du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics 2 .

4. Le 29 juin 2005, TPSGC a avisé le Tribunal qu'aucun contrat n'avait été adjugé à l'égard de l'invitation en question. Le 7 juillet 2005, le Tribunal a autorisé Smith Consulting Group (SCG) à intervenir dans l'affaire. Le 22 juillet 2005, TPSGC a déposé un rapport de l'institution fédérale (RIF) auprès du Tribunal en application du paragraphe 103 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur 3 . Les 3 et 5 août 2005, respectivement, SCG et SNC ont déposé leurs observations sur le RIF.

5. La quantité des renseignements au dossier étant suffisante pour déterminer le bien-fondé de la plainte, le Tribunal a décidé qu'une audience n'était pas nécessaire et, conformément à l'alinéa 25c) des Règles, a statué sur la plainte sur la foi des renseignements au dossier.

PROCÉDURE DE PASSATION DU MARCHÉ PUBLIC

6. D'après TPSGC, l'invitation no EP243-020059/B portant sur la prestation de services d'entrepreneurs qui commercialiseront et vendront de l'armement, des munitions et de l'équipement militaires excédentaires a été publiée par l'entremise du MERX, le service électronique d'appel d'offres du Canada, le 19 novembre 2004, et portait initialement le 6 décembre 2004 comme date de clôture; cette date a par la suite été modifiée pour devenir le 10 janvier 2005, puis le 15 février 2005.

7. TPSGC a soutenu que, en réponse à la demande de propositions (DP), 11 propositions avaient été reçues de 2 soumissionnaires. SNC a présenté des propositions relativement aux exigences des groupes de produits 1 à 10, exception faite du groupe de produits 6. SCG, un autre soumissionnaire, a présenté des propositions relativement aux groupes de produits 4 et 5. Aucune proposition n'a été reçue relativement au groupe de produits 6. L'évaluation collective des propositions reçues a été terminée le 2 mars 2005. Toutes les 9 propositions présentées par SNC ont été déclarées conformes aux exigences techniques de la DP.

8. D'après SNC, le 4 mars 2005, deux représentants des ventes ont quitté leur emploi chez elle. Le 9 mars 2005, TSPGC a amorcé la procédure d'autorisation ministérielle en vue de l'adjudication des contrats relatifs à neuf groupes de produits à SNC. D'après TPSGC, le 11 mars 2005, avant la fin de la procédure de passation du marché public et avant l'adjudication du contrat, TPSGC a reçu des renseignements d'une des personnes proposées par SNC à titre de représentant des ventes qui l'informaient que cette personne et l'autre représentant des ventes proposé n'étaient plus au service de SNC. Le 21 mars 2005, TPSGC a communiqué avec SNC pour obtenir une confirmation concernant la disponibilité de ces personnes. Entre le 21 et le 24 mars 2005, TPSGC et SNC ont échangé des courriels concernant la disponibilité des deux personnes proposées.

9. Le 13 avril 2005, TPSGC a informé SNC que toutes ses propositions avaient été déclarées non conformes. Le 22 avril 2005, une réunion d'information a été tenue et TPSGC a alors expliqué le fondement sur lequel s'appuyait son évaluation des propositions de SNC. Le 27 avril 2005, SNC a présenté une opposition à TPSGC relativement à l'évaluation de ses propositions et, le 6 juin 2005, TPSGC a répondu à l'opposition. Le 16 juin 2005, SNC a demandé à TPSGC de réexaminer sa décision et, le 17 juin 2005, TPSGC a donné comme réponse qu'il ne fournirait aucune observation supplémentaire sur l'opposition de SNC. Le 20 juin 2005, SNC a déposé sa plainte auprès du Tribunal.

POSITION DES PARTIES

Position de SNC

10. SNC a soutenu que TPSGC s'est appuyé sur des renseignements provenant d'une tierce partie qui n'étaient pas compris dans ses propositions et qui portaient sur des faits survenus après la clôture des soumissions, et qu'il s'était servi de ces renseignements pour modifier, de façon irrégulière, le fond des propositions de SNC. Elle a soutenu que l'évaluation de ses propositions était déjà terminée lorsque TPSGC a reçu les renseignements provenant de cette tierce partie. Dans ses observations sur le RIF, SNC a soutenu que la décision subséquente de l'autorité contractante, une personne qui, a-t-elle fait valoir, n'était pas un membre de l'équipe d'évaluation, de déclarer les propositions non conformes allait à l'encontre de l'article 501 et du paragraphe 506(6) de l'Accord sur le commerce intérieur 4 , qui stipule que l'évaluation des propositions doit se faire en conformité avec les modalités de la DP.

11. SNC a soutenu que, selon la règle générale régissant l'évaluation des propositions, les évaluateurs doivent arrêter leurs décisions en se fondant sur les renseignements contenus dans les propositions qu'ils ont devant eux. Elle a fait valoir que le Tribunal a déclaré ce qui suit dans Southern California :

Bien que, dans certaines circonstances limitées, les évaluateurs soient autorisés à chercher des clarifications ou la vérification de renseignements contenus dans les propositions, on leur demande généralement de prendre leurs décisions à partir de ce qui se trouve dans les propositions qu'ils ont devant eux5 .

12. SNC a soutenu que l'interdiction d'apporter des modifications de fond aux propositions après la clôture des soumissions vise à s'assurer que tous les soumissionnaires sont traités équitablement et disposent du même délai pour préparer leurs meilleures propositions de sorte que les renseignements qu'elles contiennent sont « gelés » au moment de la présentation des soumissions. SNC a soutenu que permettre à un soumissionnaire de modifier sa proposition après la clôture des soumissions pour y ajouter de nouveaux renseignements avantageux serait injuste pour les autres soumissionnaires dont les propositions auraient déjà été soumises. SNC a déclaré que, nécessairement, les renseignements qui pourraient nuire à un soumissionnaire et qui portent sur des faits survenus après la clôture des soumissions ne peuvent être utilisés de façon à nuire à la proposition d'un soumissionnaire.

13. SNC a soutenu que, pour traiter des événements qui se produisent après la clôture des soumissions, le Tribunal, dans Mechron, a appliqué un raisonnement à deux volets pour évaluer la conformité, en établissant une distinction entre les notions de « conformité de la proposition » et de « conformité du marché »6 . SNC a soutenu que, d'après le raisonnement dans Mechron, la vérification de la proposition doit se limiter aux renseignements qui existaient à la date de la clôture des soumissions et que l'évaluation des soumissions doit déterminer si les renseignements examinés étaient exacts à la date de la clôture des soumissions. SNC a ajouté que, par opposition à une vérification de la conformité de la proposition, l'appréciation de la conformité du marché consiste à évaluer la conformité de l'adjudicataire d'un contrat à la lumière des modalités du contrat subséquent, au moment de son exécution. À l'encontre de la conformité de la proposition, la conformité du marché revêt un caractère dynamique et est évaluée à la lumière de toutes les circonstances au moment de l'évaluation.

14. Dans ses observations sur le RIF, SNC a invoqué une affaire entendue par la Cour suprême du Canada (la Cour), Ontario c. Ron Engineering and Construction (Eastern) Ltd. 7 , à l'appui de son argument selon lequel il serait manifestement injuste de prendre en considération des renseignements qui n'existaient pas au moment de la présentation des propositions. SNC a aussi invoqué l'affaire M.J.B. Enterprises Ltd. c. Construction de Défense (1951) Limitée 8 . Elle a soutenu que, dans l'affaire dont le Tribunal est présentement saisi, une disposition comprise dans la DP qui prétend conférer à TPSGC le pouvoir de procéder à une vérification de la conformité de la proposition en tout temps, même après l'adjudication du contrat, présente un caractère analogue à celui d'une clause de réserve. Elle a ajouté que, comme la Cour l'a déterminé, on ne peut interpréter une clause de réserve comme permettant à la personne qui lance l'appel d'offres de retenir une soumission non conforme si cela n'est pas en harmonie avec le reste du dossier d'appel d'offres. SNC a prétendu que, en l'espèce, un droit de vérifier les renseignements fournis par une tierce partie après la clôture des soumissions et après l'évaluation des soumissions irait non seulement à l'encontre des autres dispositions de la DP, mais également à l'encontre des obligations prévues par l'ACI. Elle a soutenu que l'interprétation indiquée des dispositions de vérification de la DP n'autorise pas TPSGC à vérifier les renseignements fournis par une tierce partie après que les droits des parties ont été fixés à la clôture des soumissions.

15. SNC a soutenu avoir fourni avec ses propositions une attestation selon laquelle, si on devait lui demander de fournir des services dans le cadre d'un contrat subséquent, les personnes qu'elle proposait seraient disponibles pour amorcer l'exécution des travaux. Elle a soutenu que cette attestation était exacte au moment où elle a été rédigée et est demeurée exacte durant tout le temps de l'attribution des cotes d'évaluation aux propositions techniques. Elle a ajouté que le fait que les deux représentants des ventes l'avaient quittée après la clôture des soumissions n'est pas pertinent relativement à la question de la conformité de la proposition et que, même s'il convenait que TPGSC vérifie l'exactitude de l'attestation au moment de la clôture des soumissions, TPSGC a commis une erreur en utilisant les renseignements provenant d'autres sources que ses propositions pour les déclarer non conformes. SNC a soutenu que l'acceptation d'une attestation en provenance d'une personne qui n'était pas employée à cause d'un changement de la situation d'emploi des représentants des ventes après la clôture des soumissions aurait constitué une modification interdite de la soumission. Elle a ajouté que les règles qui interdisent la modification de soumissions l'empêchaient de substituer d'autres représentants des ventes choisis parmi son effectif; toutefois, elle a soutenu que TPSGC semblait disposé à l'autoriser à retenir les services de la nouvelle société qui employait les anciens représentants des ventes ou ces anciens représentants eux-mêmes.

16. En réponse à l'allégation de TPSGC selon laquelle l'opposition de SNC aux dispositions de vérification de la DP pendant la procédure d'évaluation n'a pas été déposée dans les délais prévus, SNC a soutenu, dans ses observations sur le RIF, que les renseignements portant sur la vérification irrégulière ne lui avaient pas été communiqués avant la réunion d'information du 22 avril 2005. Elle a dit avoir fait opposition à la vérification dans les 10 jours ouvrables suivant la réunion et avoir déposé une plainte dans les 10 jours ouvrables suivant le refus de TPSGC d'accorder la réparation demandée dans la lettre d'opposition. Elle a ajouté que des dispositions facultatives dans une DP permettent à TPSGC, mais ne l'obligent pas, de se conduire d'une manière qui peut, ou non, contrevenir aux accords commerciaux. SNC a prétendu que, dans de telles circonstances, l'infraction à un accord commercial ne se produit que lorsque TPSGC pose un geste qui va à l'encontre de l'accord commercial et qu'une plainte déposée avant que TPSGC ne pose un geste incompatible serait prématurée.

17. SNC a soutenu que les modalités du contrat faisant partie des modalités de la DP comportent un mécanisme visant à traiter des situations où une personne proposée relativement à l'exécution d'une tâche assujettie à un contrat pourrait n'être plus disponible. Les dispositions contractuelles subséquentes prévues dans la DP comprennent la clause intitulée « Remplacement du personnel » [traduction], qui se trouve dans le guide des Clauses et conditions uniformisées d'achat (guide des CCUA) incorporée par renvoi dans la DP. SNC a soutenu que TPSGC aurait pu négocier le remplacement de représentants des ventes acceptables, conformément aux modalités de la DP, à l'occasion des contrats subséquents.

Position de TPSGC

18. TPSGC a reconnu que SNC avait proposé ses représentants des ventes de bonne foi et que, au moment de la clôture des soumissions, les attestations complétées visant la situation et la disponibilité des ressources étaient authentiques. Toutefois, elle a ajouté que les dispositions de la DP concernant l'attestation obligatoire de la situation et de la disponibilité des ressources prévoient spécifiquement l'éventualité de la vérification desdites attestations durant la procédure d'évaluation, après la clôture des soumissions. Par conséquent, le fait de ne pas confirmer l'obtention de la permission écrite de proposer des non-employés et leur inclusion dans une attestation durant la procédure d'évaluation rendent obligatoirement non conforme la proposition de soumissionnaires. TPSGC a ajouté qu'il n'est pas logique de prétendre qu'il était indu de sa part d'obtenir des renseignements de vérification concernant la proposition d'un soumissionnaire durant la procédure d'évaluation, puisque la DP le prévoit spécifiquement.

19. TPSGC a soutenu que, même s'il avait été poussé à vérifier les propositions de SNC parce qu'il avait reçu une communication de l'une des ressources proposées, les propositions de SNC avaient été évaluées uniquement en tenant compte des renseignements reçus directement de cette dernière dans le cadre de la vérification. Il a soutenu qu'il aurait agi de façon irrégulière s'il n'avait pas tenu compte des renseignements fournis par la personne proposée et que, si le contrat avait été adjugé à SNC sans vérification de la disponibilité des ressources, une telle façon de faire aurait vraisemblablement mené à la possibilité d'une contestation de la part des autres parties que SNC.

20. En ce qui a trait à l'opposition de SNC au sujet de la disposition de la DP concernant la vérification durant la procédure d'évaluation, TPSGC a soutenu que l'opposition n'avait pas été présentée dans les délais prévus. TPSGC a soutenu que la DP prévoit spécifiquement une procédure de vérification durant la « procédure d'évaluation » et précise que la procédure d'évaluation sera menée « avant l'adjudication du contrat ». Il a ajouté que le délai pour déposer une plainte concernant cette procédure était expiré depuis longtemps, puisque sept mois s'étaient écoulés depuis la publication de la DP et quatre mois, depuis la clôture des soumissions.

21. Pour ce qui est de l'allégation de SNC selon laquelle les modalités du contrat faisant partie des modalités de la DP prévoient un mécanisme de règlement des situations où une ressource proposée pour l'exécution d'une tâche aux termes d'un contrat devait ne plus être disponible, et son affirmation que les instructions uniformisées tirées du guide des CCUA s'appliquent à l'espèce, TPSGC a soutenu qu'il s'agissait là d'une prétention dénuée de fondement puisque la clause à laquelle SNC a renvoyé, « Remplacement du personnel », s'applique seulement aux contrats, pour permettre le remplacement de ressources après l'adjudication du contrat lorsque, pour des raisons indépendantes de la volonté de l'entrepreneur, les personnes nommées dans le contrat ne sont pas en mesure de fournir les services commandés. TPSGC a ajouté que les instructions contractuelles comprises dans le guide des CCUA n'ont pas pour effet de permettre une modification des soumissions et ne sont pas pertinentes aux circonstances de l'espèce.

22. TPSGC a soutenu que, dans Southern California, le Tribunal a fait la déclaration dont il était question dans le cadre de la détermination de la question de savoir si le renvoi, dans la proposition d'un soumissionnaire, à des éléments provenant de sources extérieures à sa proposition, par exemple des sites Web, devait à bon droit être pris en compte par les évaluateurs. TPSGC a prétendu que les faits dans le contexte susmentionné étaient différents de ceux de l'espèce et que la vérification en cause se rapporte uniquement à des renseignements effectivement contenus dans les propositions de SNC et non pas à des renseignements provenant de sources extérieures. En ce qui a trait à Mechron, TPSGC a soutenu que les observations du Tribunal dans cette affaire ne limitent pas la période d'évaluation de l'exactitude des propositions à la clôture des soumissions, particulièrement lorsqu'une vérification subséquente est prévue dans les documents d'appel d'offres. TPSGC a soutenu plutôt que les observations du Tribunal dans Mechron limitent le délai d'évaluation de la conformité d'une proposition à la période qui précède l'adjudication du contrat et conteste la prétention que la détermination ultime de la conformité d'une proposition est faite au moment de l'essai d'acceptation, après l'adjudication du contrat.

23. Enfin, TPSGC a demandé le remboursement des frais qu'il avait engagés pour répondre à la plainte.

Position de SCG

24. SCG, une intervenante dans la présente affaire, a soutenu que les soumissionnaires pour le présent marché public comprenaient pleinement la nécessité absolue de se conformer à toutes les exigences énoncées dans la DP. Elle a soutenu que l'attestation des membres de l'équipe revêt une importance capitale dans les propositions présentées à l'égard de telles exigences. Elle a ajouté que TPSGC avait agi d'une manière équitable à l'endroit de tous les soumissionnaires.

ANALYSE DU TRIBUNAL

25. Aux termes du paragraphe 30.14(1) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal doit, dans son enquête, limiter son étude à l'objet de la plainte. En outre, à la conclusion de l'enquête, il doit déterminer la validité de la plainte en fonction des critères et procédures établis par règlement pour le contrat spécifique. De plus, l'article 11 du Règlement prévoit que le Tribunal doit déterminer si le marché public a été passé conformément aux accords commerciaux applicables, en l'espèce, l'ACI.

26. L'article 501 de l'ACI prévoit en partie ce qui suit : « le présent chapitre [Marchés publics] vise à établir un cadre qui assurera à tous les fournisseurs canadiens un accès égal aux marchés publics, de manière à réduire les coûts d'achat et à favoriser l'établissement d'une économie vigoureuse, dans un contexte de transparence et d'efficience. »

27. Le paragraphe 506(6) de l'ACI prévoit ce qui suit : « Dans l'évaluation des offres, une Partie peut tenir compte non seulement du prix indiqué, mais également de la qualité, de la quantité, des modalités de livraison, du service offert, de la capacité du fournisseur de satisfaire aux conditions du marché public et de tout autre critère se rapportant directement au marché public et compatible avec l'article 504. Les documents d'appel d'offres doivent indiquer clairement les conditions du marché public, les critères qui seront appliqués dans l'évaluation des soumissions et les méthodes de pondération et d'évaluation des critères. »

28. Le Tribunal se penchera d'abord sur l'interprétation faite par TPSGC de l'opposition de SNC selon laquelle les modalités de la DP concernant la vérification durant la procédure d'évaluation iraient à l'encontre de l'ACI. D'après TPSGC, la présente plainte n'a pas été déposée dans les délais prévus et le délai pour déposer une plainte concernant cette section de la DP est depuis longtemps expiré, puisque la DP a pris fin le 15 février 2005.

29. La section pertinente de la DP prévoit en partie ce qui suit :

3.0 Instructions concernant la préparation des propositions

La conformité du soumissionnaire aux attestations fournies au Canada peut faire l'objet d'une vérification par le Canada durant la période d'évaluation de la proposition (avant l'adjudication du contrat) et après l'adjudication du contrat. L'autorité contractante aura le droit de demander des renseignements supplémentaires pour vérifier la conformité du soumissionnaire aux attestations pertinentes avant l'adjudication d'un contrat. S'il est déterminé qu'un soumissionnaire a présenté, en connaissance de cause ou non, une attestation fausse, ou ne s'est pas conformé à l'exigence concernant les attestations ou n'a pas répondu à une demande de renseignements supplémentaires faite par l'autorité contractante, la proposition sera déclarée non recevable.

[Traduction]

30. La DP a été publiée le 19 novembre 2004, et la clôture des soumissions a été fixée au 15 février 2005. Pour qu'une opposition ou une plainte de SNC concernant cette section de la DP soit réputée avoir été déposée dans les délais prévus, SNC aurait dû la déposer dans les 10 jours ouvrables suivant le 15 février 2005, au plus tard. Le Tribunal fait observer que l'opposition de SNC a été présentée à TPSGC le 16 juin 2005 et que la plainte déposée auprès du Tribunal l'a été le 20 juin 2005. Étant donné les dates susmentionnées, le Tribunal est d'accord avec TPSGC sur le fait qu'il est maintenant trop tard pour présenter une opposition ou déposer une plainte concernant la question de savoir si les modalités de la DP sont contraires à l'ACI.

31. Le Tribunal porte maintenant son attention sur l'allégation de SNC selon laquelle TPSGC n'a pas correctement évalué ses propositions en tenant compte de renseignements qui ne figuraient pas dans ses propositions.

32. SNC a prétendu que TPSGC avait déjà terminé son évaluation des propositions de SNC lorsque des renseignements avaient été fournis à TPSGC par une tierce partie et qu'il était manifestement injuste de tenir compte de renseignements qui n'existaient pas au moment de la présentation des propositions. Même si TPSGC a reconnu que SNC avait proposé ses représentants des ventes de bonne foi, il a soutenu qu'il ne pouvait pas, à bon droit, ne pas tenir compte des renseignements fournis par la tierce partie.

33. La clause 2.4 de l'annexe C de la DP, « Situation et disponibilité des ressources » [traduction] prévoit en partie ce qui suit :

Le soumissionnaire atteste que, advenant qu'on lui demande de fournir des services en conformité de tout contrat résultant de la présente invitation, les personnes proposées dans sa proposition seront disponibles pour commencer à exécuter les travaux sur demande du chargé de projet et au moment précisé dans les présentes ou convenu avec le chargé de projet.

[Traduction]

34. Au moment où SNC a présenté ses propositions, les deux représentants des ventes en question étaient à son service et l'attestation fournie par SNC avec ses propositions était valable à cet égard. Le 2 mars 2005, TPSGC a évalué les propositions de SNC et, le 9 mars 2005, a amorcé, mais sans la compléter, la procédure d'autorisation en vue de l'adjudication du contrat, avant de tenter d'obtenir une vérification auprès de SNC le 21 mars 2005, relativement à la disponibilité des deux ressources en question. Le Tribunal est d'avis que, d'après les modalités de la DP établies au paragraphe 29 ci-dessus, TPSGC avait le pouvoir de vérifier, avant l'adjudication du contrat, la conformité d'un soumissionnaire par rapport aux attestations présentées avec sa proposition et de demander des renseignements supplémentaires pour vérifier que l'attestation du soumissionnaire était valable jusqu'au moment de l'adjudication du contrat. De l'avis du Tribunal, une telle vérification ne constitue pas, en l'espèce, une modification de la soumission.

35. Entre le 21 et le 24 mars 2005, TPSGC a tenté de vérifier si l'attestation fournie par SNC avec ses propositions était toujours valable, lorsqu'il a demandé si les représentants des ventes proposés par cette dernière seraient disponibles pour exécuter les services. En réponse, SNC a confirmé que les deux personnes en question n'étaient plus à son service et qu'une décision à savoir si leurs services seraient requis serait prise ultérieurement9 . Étant donné que SNC ne serait « plus capable de fournir l'attestation de la disponibilité des ressources proposées » [traduction]10 , TPSGC a déclaré la soumission irrecevable. Le Tribunal conclut que TPSGC a agi en conformité avec les paramètres des paragraphes 2.4 et 3 de la DP lorsqu'il a déclaré les propositions de SNC non conformes.

36. Compte tenu des dispositions susmentionnées de la DP en ce qui a trait à l'attestation de la disponibilité des ressources, le Tribunal conclut que TPSGC a procédé à l'évaluation d'une manière conforme aux dispositions de la DP et qu'il n'a pas contrevenu à l'article 501 et au paragraphe 506(6) de l'ACI.

37. Enfin, le Tribunal examine la question des observations de SNC selon lesquelles les modalités du contrat faisant partie des modalités de la DP, et plus spécifiquement la clause intitulée « Remplacement du personnel », prévoient la négociation visant les ressources de remplacement après l'adjudication du contrat. Le Tribunal conclut que la clause « Remplacement du personnel » traite de ce qui pourrait se passer après l'adjudication du contrat, un domaine qui ne relève pas de sa compétence et, par conséquent, il ne traitera pas de cette question.

38. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal détermine que la plainte de SNC n'est pas fondée.

39. Le Tribunal accorde à TPSGC le remboursement des frais raisonnables qu'il a engagés pour répondre à la plainte. Pour décider du montant de l'indemnisation en l'espèce, le Tribunal a tenu compte de sa Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure portant sur un marché public (la Ligne directrice), qui fonde l'évaluation du degré de complexité d'une plainte sur trois critères : la complexité du marché public, la complexité de la plainte et la complexité de la procédure. L'avis provisoire du Tribunal relativement à la présente plainte est que son degré de complexité correspond au deuxième degré de complexité prévu à l'annexe A de la Ligne directrice (degré 2). Le marché était moyennement complexe, vu qu'il s'agissait de la prestation de services d'entrepreneurs qui commercialiseront et vendront des biens militaires excédentaires appartenant à divers groupes de produits. La plainte était également moyennement complexe, car elle traitait de questions relatives à la procédure d'évaluation. Toutefois, la procédure de la plainte était simple, car le procédé d'enquête a eu recours au délai normal de 90 jours et qu'aucune requête n'a été déposée. Par conséquent, comme le prévoit la Ligne directrice, l'indication provisoire du montant de l'indemnisation est de 2 400 $.

DÉCISION DU TRIBUNAL

40. Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal détermine que la plainte n'est pas fondée.

41. Aux termes de l'article 30.16 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal accorde à TPSGC le remboursement des frais raisonnables qu'il a engagés pour répondre à la plainte, ces frais devant être payés par SNC. L'indication provisoire du degré de complexité de la présente plainte donnée par le Tribunal est le degré 2, et l'indication provisoire du montant de l'indemnisation est de 2 400 $. Si l'une ou l'autre des parties n'est pas d'accord en ce qui a trait à l'indication provisoire du degré de complexité ou à l'indication provisoire du montant de l'indemnisation, elle peut déposer des observations auprès du Tribunal, en conformité avec sa Ligne directrice. Le Tribunal se réserve la compétence de fixer le montant final de l'indemnisation.


1 . L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47 [Loi sur le TCCE].

2 . D.O.R.S. /93-602 [Règlement].

3 . D.O.R.S./91-499 [Règles].

4 . 18 juillet 1994, Gaz. C. 1995.I.1323, en ligne : Secrétariat du commerce intérieur <http://www.intrasec.mb.ca/index_fr/ait.htm> [ACI].

5 . Re plainte déposée par Southern California Safety Institute, Inc. (22 décembre 2003), PR-2003-047 (TCCE) à la p. 7.

6 . Re plainte déposée par Société d'énergie Mechron Limitée (18 août 1995), PR-95-001 (TCCE) à la p. 9.

7 . [1981] 1 R.C.S. 111 [C.S.C.].

8 . [1999] 1 R.C.S. 619 [C.S.C.].

9 . RIF (confidentiel), pièce 6.

10 . RIF à la p. 12, para. 22.