VITA-TECH LABORATORIES LTD.

Décisions


VITA-TECH LABORATORIES LTD.
c.
MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX
Dossier no PR-2005-019

Décision et motifs rendus
le mercredi 18 janvier 2006


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À une plainte déposée par Vita-Tech Laboratories Ltd. aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47;

ET À LA SUITE D'une décision d'enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

ENTRE

 

VITA-TECH LABORATORIES LTD.

Partie plaignante

ET

 

LE MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

Institution fédérale

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte n'est pas fondée.

Aux termes de l'article 30.16 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur accorde au ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux le remboursement des frais raisonnables qu'il a engagés pour répondre à la plainte, ces frais devant être payés par Vita-Tech Laboratories Ltd. L'indication provisoire du degré de complexité de la présente plainte donnée par le Tribunal canadien du commerce extérieur est le degré 2, et l'indication provisoire du montant de l'indemnisation est de 2 400 $. Si l'une ou l'autre des parties n'est pas d'accord en ce qui a trait à l'indication provisoire du degré de complexité ou à l'indication provisoire du montant de l'indemnisation, elle peut présenter des observations auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur, en conformité avec sa Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure portant sur un marché public. Le Tribunal canadien du commerce extérieur se réserve la compétence de fixer le montant final de l'indemnisation.

Ellen Fry
Ellen Fry
Membre présidant

Hélène Nadeau
Hélène Nadeau
Secrétaire

Membre du Tribunal :

Ellen Fry, membre présidant

   

Directeur de la recherche :

Randolph W. Heggart

   

Agent principal d'enquête :

Michael W. Morden

   

Agent d'enquête :

Josée St-Amand

   

Conseiller pour le Tribunal :

Nick Covelli

   

Partie plaignante :

Vita-Tech Laboratories Ltd.

   

Conseillers pour la partie plaignante :

Jack Hughes

 

Gerry H. Stobo

   

Partie intervenante :

Can Test Ltd.

   

Conseiller pour la partie intervenante :

Brian J. Wallace, c.r.

   

Institution fédérale :

Mnistère des Travaux publics et des Services gouvernementaux

   

Conseillers pour l'institution fédérale :

Susan D. Clarke

 

Christianne M. Laizner

 

Ian McLeod

   

Adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : (613) 993-3595
Télécopieur : (613) 990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

PLAINTE

1. Le 13 septembre 2005, Vita-Tech Laboratories Ltd. (Vita-Tech) a déposé une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur 1 . La plainte portait sur le marché (invitation no 01948-050015/E) passé par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (TPSGC) portant sur des services de dépistage des drogues équines après les courses pour l'Agence canadienne du pari mutuel (ACPM), une agence du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire.

2. Vita-Tech a allégué que TPSGC ne lui avait pas fourni suffisamment de renseignements pour expliquer pourquoi sa soumission avait été déclarée irrecevable, avait incorrectement évalué sa proposition, avait accordé un avantage déloyal à un laboratoire qui fournissait déjà les services requis et n'avait pas accordé aux soumissionnaires un délai de soumission suffisant.

3. Le 21 septembre 2005, le Tribunal a avisé les parties qu'il avait accepté la plainte à deux motifs, puisque ceux-ci répondaient aux exigences du paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE et aux conditions énoncées au paragraphe 7(1) du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics 2 . Les motifs de plainte acceptés étaient l'allégation selon laquelle TPSGC n'avait pas fourni à Vita-Tech suffisamment de renseignements concernant l'évaluation de sa proposition et l'allégation selon laquelle TPSGC avait incorrectement évalué sa proposition. Le Tribunal a accepté ce deuxième motif de plainte uniquement en ce qui a trait aux articles 1.A, 1.B et 2.A des critères à cotation numérique figurant à la section C.2.2 de la demande de propositions (DP). Il a décidé que le troisième motif de plainte, à savoir que TPSGC avait accordé un avantage déloyal à un fournisseur de services en place, et le quatrième motif de plainte, au sujet du délai de soumission, avaient été déposés après le délai prévu à l'article 6 du Règlement et qu'il n'avait donc pas compétence pour enquêter sur la plainte à ces motifs.

4. Le 13 octobre 2005, le Tribunal a autorisé Can Test Ltd. (Can Test) à intervenir dans l'affaire. Le 17 octobre 2005, TPSGC a déposé le rapport de l'institution fédérale (RIF). Les 25 et 31 octobre 2005, Can Test et Vita-Tech ont déposé leurs observations respectives sur le RIF.

5. Le Tribunal a constaté que les observations de Vita-Tech sur le RIF contenaient une explication technique nouvelle, plus détaillée, de la prétendue évaluation incorrecte de sa proposition. Il a donc demandé à TPSGC de réagir à cette nouvelle information, ce que TPSGC a fait le 22 novembre 2005. Vita-Tech a déposé ses observations finales sur la réponse de TPSGC le 25 novembre 2005. En plus de traiter des articles précis visés dans la demande de réponse du Tribunal, les deux parties ont déposé des observations portant sur d'autres aspects de la plainte. Dans sa lettre du 2 décembre 2005, le Tribunal a avisé les deux parties qu'il ne tiendrait compte que des observations qui entraient dans la portée de sa demande.

6. La quantité de renseignements au dossier étant suffisante pour déterminer le bien-fondé de la plainte, le Tribunal a décidé qu'une audience n'était pas nécessaire et, conformément à l'alinéa 25c) des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur 3 , a statué sur la plainte sur la foi des renseignements au dossier.

PROCÉDURE DE PASSATION DU MARCHÉ PUBLIC

7. La DP qui fait l'objet de la plainte était la deuxième de deux DP diffusées en vue de l'acquisition, pour l'ACPM, de services de dépistage des drogues équines par analyse d'échantillons de sang et d'urine prélevés après les courses. La première DP visait l'attribution de deux contrats, par division du besoin global de l'ACPM en deux ensembles de travaux - un contrat principal pour environ 60 p. 100 des travaux et un contrat secondaire pour les autres 40 p. 100. D'après TPSGC, Can Test a présenté la seule proposition recevable en réponse à la première DP et le contrat principal lui a été attribué. Vu qu'il restait 40 p. 100 des travaux à attribuer par contrat, TPSGC a lancé la deuxième DP, qui fait l'objet de la présente plainte. Le 7 juillet 2005, TPSGC a télécopié la deuxième DP directement aux trois soumissionnaires qui avaient participé à la première invitation à soumissionner, la date de réception des soumissions étant fixée au 26 juillet 2005. La DP précisait que la méthode de sélection en vue de l'adjudication du contrat était fondée sur la proposition recevable la moins disante.

8. D'après TPSGC, trois soumissions ont été reçues en réponse à la deuxième DP, et leur évaluation s'est terminée le 11 août 2005. Le 15 août 2005, le contrat pour les autres 40 p. 100 des travaux a été adjugé à Can Test. Le 16 août 2005, TPSGC a avisé les soumissionnaires dont la proposition n'avait pas été retenue que le contrat avait été adjugé. Le 29 août 2005, Vita-Tech a téléphoné à TPSGC pour s'opposer aux résultats de la procédure d'invitation. Le même jour, TPSGC a télécopié à Vita-Tech une copie de l'appréciation collective de son évaluation technique. Le 30 août 2005, Vita-Tech a communiqué avec TPSGC, par courrier électronique, pour faire opposition à l'évaluation et demander un réexamen officiel de la décision de ne pas lui adjuger le contrat. Le 30 août 2005, TPSGC a confirmé, par courrier électronique, que la proposition de Vita-Tech n'avait pas satisfait au critère obligatoire selon lequel le soumissionnaire devait obtenir un résultat global de 75 p. 100 pour les critères à cotation numérique.

9. Le 13 septembre 2005, Vita-Tech a déposé sa plainte auprès du Tribunal.

POSITION DES PARTIES

Position de Vita-Tech

10. Vita-Tech a exprimé son désaccord sur l'observation de TPSGC selon laquelle l'Accord de libre-échange nord-américain 4 ne s'appliquait pas au marché public. Elle a soutenu que TPSGC avait donné une mauvaise interprétation de l'alinéa 1018(2)a) de l'ALÉNA, qui porte sur les mesures « nécessaires à la protection de la moralité publique, de l'ordre public ou de la sécurité publique ». Vita-Tech a soutenu que le paragraphe 1018(2) doit se lire conjointement avec le paragraphe 1018(1) qui, selon elle, prévoit que les gouvernements peuvent prendre des mesures qu'ils estiment nécessaires à la protection des « [...] intérêts essentiels de [leur] sécurité, se rapportant à l'achat d'armes, de munitions ou de matériel de guerre, ou aux achats indispensables à la sécurité nationale ou aux fins de la défense nationale. » Elle a soutenu que rien dans la DP ne traite des exceptions prévues au paragraphe 1018(1) et que l'ALÉNA s'applique donc à la DP qui fait l'objet de l'espèce. Vita-Tech a ajouté que la DP n'avait pas informé les soumissionnaires que TPSGC avait l'intention d'invoquer les dispositions de l'article 1018 et a prétendu que le Tribunal ne devait pas permettre à TPSGC de soustraire rétroactivement un marché public à l'application d'un accord commercial.

11. En ce qui a trait au manque de renseignements, Vita-Tech a soutenu que l'appréciation collective fournie par TPSGC le 29 août 2005 ne communiquait aucun renseignement utile sur la question de savoir pourquoi sa proposition avait été déclarée non conforme. Elle a soutenu que l'appréciation collective n'était qu'une liste de contrôle d'articles qui indiquait si la proposition était recevable, ou non, par rapport à la DP, mais n'éclairait aucunement sur les raisons pour lesquelles sa proposition n'avait pas été retenue. Elle a aussi soutenu que la réponse de TPSGC à sa demande de réexamen était insatisfaisante et ne répondait pas à la norme requise pour qu'une procédure de passation d'un marché public soit équitable et transparente. Plus précisément, relativement aux articles 1.A, 1.B et 2.A des critères à cotation numérique figurant à la section C.2.2 de la DP, Vita-Tech a soutenu qu'aucun renseignement n'avait été communiqué pour expliquer l'échec de sa soumission. Elle a soutenu que maintenant, après avoir examiné les observations de TPSGC dans le cadre de la présente procédure de plainte, elle peut se faire une idée des raisons pour lesquelles sa proposition avait été rejetée et des sections visées par le rejet, même si elle n'est pas d'accord sur l'appréciation. Elle a prétendu que, sans une telle compréhension, on ne peut s'attendre que les soumissionnaires s'engagent dans une démarche quelconque de règlement d'une plainte potentielle avant de s'adresser au Tribunal.

12. Vita-Tech a soutenu que TPSGC aurait dû lui attribuer un plus grand nombre de points puisqu'il connaissait les similitudes entre les drogues et l'accréditation récente de Vita-Tech par le Conseil canadien des normes (CCN). Elle a ajouté que TPSGC avait reconnu dans le RIF que, puisque Vita-Tech était un laboratoire nouvellement accrédité, « on ne pouvait attendre qu'elle produise des données de validation à l'appui de ses affirmations en ce qui concerne la liste complète des drogues »5 [traduction] et que les évaluateurs allaient tenter de redresser cette absence évidente d'équité en procédant à l'appréciation en se fondant sur le rendement de Vita-Tech dans l'analyse de trois séries d'échantillons de teneur inconnue dans le cadre du processus d'accréditation du CCN, et que les données nécessaires à la validation pour les « drogues représentatives » seraient extrapolées, dans tous les cas possibles, pour les appliquer aux drogues pertinentes. Vita-Tech a soutenu que, bien que TPSGC ait accepté que les données nécessaires à la validation de certaines drogues s'appliquent à l'évaluation de méthodes de dépistage des drogues dans les groupes présentant une nature pharmacologique connexe, il n'a pas procédé à une telle extrapolation dans plusieurs cas, ce qui a fait perdre un nombre déraisonnable de points à Vita-Tech à l'article 1.A des critères à cotation numérique figurant à la section C.2.2 de la DP.

13. Vita-Tech a affirmé ne pas avoir reçu tout le mérite pour avoir fourni les renseignements demandés dans la DP car, dans l'évaluation de certains critères, TPSGC tentait en fait d'obtenir plus de données que celles demandées dans la DP. Elle a fait observer n'avoir découvert cet écart qu'au moment d'examiner les observations soumises par TPSGC dans le cadre de la présente procédure de plainte et avoir découvert la façon dont elle avait perdu certains des points liés à l'article 2.A des critères à cotation numérique figurant à la section C.2.2 de la DP. Vita-Tech a soutenu que, en conformité avec la DP, elle devait faire la preuve de sa « connaissance experte des usages acceptés et de la capacité des méthodes proposées pour le dépistage et la confirmation des drogues figurant sur la liste »6 [traduction], tandis que, d'après le RIF, les évaluateurs cherchaient un « exposé narratif détaillé des méthodes de laboratoire appliquées pour le dépistage des drogues dans l'urine ou le sang du cheval par application de techniques et technologies de dépistage typiques dans le dépistage des drogues comme le prévoyait l'article 2.A pour chacune des drogues énumérées »7 [traduction]. Vita-Tech a soutenu que rien n'indiquait dans les critères d'évaluation qu'un exposé narratif détaillé était nécessaire pour chacune des drogues énumérées, au nombre de plus de 300.

14. Quant aux renseignements figurant sur les feuilles de travail des évaluateurs, Vita-Tech a soutenu qu'il lui avait fallu deviner les raisons sous-tendant l'opinion des évaluateurs. Elle a fait observer que, dans beaucoup de cas, la feuille de travail ne contient qu'un « x » et aucune observation qui pourrait éclairer sur ce que ce « x » signifie. Elle a dit croire, à l'étude de ces feuilles de travail, que TPSGC avait mal interprété le tableau C.3.2 et avait erré dans l'évaluation de l'information qu'il contenait.

15. Vita-Tech a soutenu, relativement à l'article 1.A des critères à cotation numérique figurant à la section C.2.2 de la DP, que TPSGC avait à tort refusé d'accepter toutes les normes de référence d'une source particulière, ayant cru, à tort, que Vita-Tech, lorsqu'elle avait affirmé appliquer ces normes, utilisait des données instrumentales en tant que source. Elle a aussi soutenu que cette information fournie dans le cadre de son processus d'accréditation avait suffi au CCN. Elle a ajouté, relativement à la notation de l'article 1.B, que TPSGC avait interprété d'une façon trop stricte des processus et produits généralement reconnus que Vita-Tech avait inclus dans sa soumission et les avait qualifiés de méthodes de dépistage inacceptables. Vita-Tech a ajouté que des méthodes de rechange valables comportant des trousses d'épreuves avaient été refusées au motif que Can Test n'avait pas accès à ces trousses, même si elles sont généralement mises à la disposition d'autres sociétés, y compris Vita-Tech.

Position de TPSGC

16. En ce qui a trait à l'allégation selon laquelle il n'avait pas fourni suffisamment de renseignements sur les raisons pour lesquelles la proposition de Vita-Tech avait été déclarée irrecevable, TPSGC a soutenu que l'agent de négociation des marchés avait tenté dans toute la mesure du possible de répondre rapidement et complètement aux questions soulevées par Vita-Tech durant toute la procédure de passation du marché public. Il a ajouté avoir affirmé, dans une pièce de correspondance datée du 29 août 2005, au moment de télécopier une copie de l'appréciation collective à Vita-Tech, qu'il était « disponible pour discuter de l'appréciation collective au moment qui lui conviendra »8 [traduction]. TPSGC a soutenu que, aux termes du paragraphe 1018(2) de l'ALÉNA, l'invitation n'est assujettie qu'à l'Accord sur le commerce intérieur 9 et qu'il n'est donc pas lié par les dispositions des autres accords commerciaux concernant les réunions d'information avec les soumissionnaires dont la soumission n'avait pas été retenue. Il a fait valoir qu'il avait toutefois tenu une telle réunion d'information avec l'autre soumissionnaire dont la soumission n'avait pas été retenue et était disposé à en tenir une avec Vita-Tech, mais que cette dernière avait décidé, d'une manière préemptive, de déposer une plainte auprès du Tribunal.

17. TPSGC a soutenu que l'évaluation de la proposition de Vita-Tech avait été effectuée d'une manière complète et correcte. Il a soutenu, relativement à l'article 1.A des critères à cotation numérique figurant à la section C.2.2 de la DP - qui a servi à évaluer les connaissances expertes des soumissionnaires de la portée des groupes de drogues en se fondant sur la nature pharmacologique de ces drogues et la capacité des soumissionnaires de dépister ces drogues dans les échantillons de sang et d'urine des chevaux - que la proposition de Vita-Tech ne contenait pas les renseignements nécessaires pour lui mériter plus de points qu'elle n'en avait reçus. Quant à l'article B - qui a servi à évaluer les connaissances expertes des soumissionnaires sur la portée des groupes de drogues et leur capacité de dépister et de confirmer la présence de drogues dans les concentrations pertinentes au domaine des courses de chevaux - TPSGC a là aussi fait valoir que la proposition de Vita-Tech ne contenait pas suffisamment de renseignements pour pouvoir obtenir un plus grand nombre de points. Relativement à l'article 2.A - qui demandait aux soumissionnaires d'indiquer les techniques ou technologies typiques de dépistage qu'ils proposaient d'appliquer au dépistage et à la confirmation de l'existence de certaines drogues dans des échantillons d'urine et de sang de cheval et de faire la démonstration de leurs méthodologies d'application du type de techniques ou de technologies de dépistage qu'ils proposaient en vue d'un tel dépistage et d'une telle confirmation - TPSGC a soutenu que la proposition de Vita-Tech avait reçu une note convenable, vu le manque de renseignements fournis.

18. TPSGC a soutenu que son évaluation avait analysé la méthodologie de Vita-Tech relativement au dépistage de drogue dans les concentrations précisées pour les 315 drogues énumérées au tableau C.3.2 de la DP10 . La DP exigeait que soient fournies des données à l'appui sous forme de procédures normales d'exploitation (PNE), de protocoles, de guides des méthodes, de formules, de données nécessaires à la validation des méthodes, d'organigrammes, de curriculum vitae du personnel, de plans d'implantation des laboratoires, de listes des stocks d'équipement, des documents de référence et tout autre article, y compris les protocoles pertinents à l'instrumentation, au dépistage, aux méthodes d'analyse quantitative et d'analyse de confirmation nécessaires à l'appui de la capacité déclarée résumée au tableau C.3.211 proposée par les soumissionnaires pour satisfaire le besoin global. D'après TPSGC, parce que les données pertinentes soumises à l'appui par Vita-Tech ne communiquaient pas les données nécessaires au sujet d'une proportion suffisante des 315 drogues énumérées, Vita-Tech n'a reçu qu'une partie des points attribués pour les articles 1.A, 1.B et 2.A des critères à cotation numérique figurant à la section C.2.2 de la DP.

19. TPSGC a prétendu avoir tenu compte de la récente accréditation obtenue par Vita-Tech auprès du CCN pour le dépistage des drogues équines et a affirmé que le nombre maximal de points avait été attribué à Vita-Tech dans les cas où le processus d'accréditation du CCN coïncidait avec les exigences de la DP. Il a soutenu que, même avec l'attribution généreuse de ces points, la proposition de Vita-Tech ne satisfaisait pas au critère obligatoire portant sur l'obtention d'au moins 75 p. 100 des points disponibles. Il a soutenu que, lorsqu'il avait été interrogé au sujet de l'accréditation le 15 juillet 005, il avait informé Vita-Tech que « l'existence d'une procédure antérieure d'évaluation et d'accréditation n'a aucune incidence sur le droit de l'ACPM d'évaluer la capacité de chaque soumissionnaire »12 [traduction].

20. En ce qui a trait à l'allégation selon laquelle certaines trousses de dépistage n'avaient pas été acceptées car Can Test n'y avait pas accès, TPSGC a soutenu que l'accès aux trousses en question avait été refusé à plusieurs reprises à l'ACPM, au nom du secteur canadien des courses. Il a soutenu que, pour être équitable à l'endroit de tous les soumissionnaires, étant donné les pratiques de commercialisation du fabricant de ces trousses, il les avait exclues des moyens utilisés. TPSGC a dit avoir avisé Vita-Tech le 15 juillet 2005 des raisons pour lesquelles ces trousses avaient été exclues13 et que le délai prévu pour déposer une plainte à ce motif était expiré.

21. TPSGC a aussi soutenu que deux soumissions étaient conformes et que, si Vita-Tech avait satisfait au critère portant sur le seuil minimal de points à atteindre, le contrat ne lui aurait quand même pas été adjugé parce que le prix global évalué de sa soumission était le plus élevé des trois propositions soumises.

22. TPSGC a demandé le rejet de la plainte et le remboursement de ses frais conformément à la Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure portant sur un marché public du Tribunal (la Ligne directrice).

Position de Can Test

23. En ce qui a trait à l'allégation selon laquelle TPSGC n'avait pas fourni à Vita-Tech suffisamment de renseignements pour expliquer les raisons pour lesquelles sa proposition avait été déclarée irrecevable, Can Test a soutenu que, même si TPSGC avait agi comme le prétend l'allégation, ce qui, d'après Can Test, ne semble pas avoir été le cas, l'allégation selon laquelle un préjudice quelconque avait de ce fait été porté à Vita-Tech est dénuée de fondement. Elle a soutenu qu'il n'y a aucun lien entre l'échec de la soumission de Vita-Tech et la prétendue omission de TPSGC d'informer cette dernière, après le fait, des raisons pour lesquelles sa soumission n'avait pas été retenue. Elle a soutenu que toutes les allégations portant sur l'évaluation incorrecte de la proposition de Vita-Tech se rapportaient à la procédure d'appel d'offres, qui prenait fin le 26 juillet 2005. D'après Can Test, puisque la plainte n'a été déposée que le 13 septembre 2005, elle a été déposée en dehors du délai prévu de 10 jours. Can Test a ajouté qu'un préjudice lui serait porté si l'on permettait à la plainte de remettre en question le contrat qui lui avait été adjugé.

ANALYSE DU TRIBUNAL

Applicabilité des accords commerciaux

24. Les parties n'ont pas contesté le fait que l'ACI s'applique au présent marché public. À l'étude du chapitre 5 de l'ACI, le Tribunal est convaincu qu'il s'applique.

25. Les parties ne s'entendent pas sur la question de savoir si l'ALÉNA s'applique aussi, mais n'ont toutefois pas présenté d'observations sur l'application possible de l'Accord sur les marchés publics 14 . La question revêt un caractère important au moment de l'examen de l'allégation de Vita-Tech selon laquelle TPSGC ne lui avait pas fourni suffisamment de renseignements concernant l'évaluation de sa proposition. L'ACI ne comporte aucune disposition spécifique obligeant le gouvernement à communiquer de tels renseignements aux soumissionnaires dont la proposition n'a pas été retenue. Toutefois, l'ALÉNA et l'AMP renferment effectivement des dispositions qui obligent les organismes de négociation de contrats à fournir aux soumissionnaires des renseignements sur les raisons pour lesquelles leurs propositions n'ont pas été retenues. L'article 1015 de l'ALÉNA prévoit ce qui suit :

[...]

6. Une entité devra,

a) sur demande, informer les fournisseurs participants, dans les moindres délais, des décisions relatives à l'adjudication des marchés, et les en informer par écrit s'ils en font la demande;

b) sur demande, communiquer aux fournisseurs dont la soumission n'a pas été retenue des renseignements pertinents concernant les raisons du rejet, et les informer des caractéristiques et des avantages relatifs de la soumission retenue, ainsi que du nom de l'adjudicataire.

L'article XVIII de l'AMP prévoit ce qui suit :

[...]

2. Chaque entité, à la demande d'un fournisseur d'une Partie, communiquera dans les moindres délais :

[...]

b) des renseignements pertinents concernant les raisons pour lesquelles la demande de qualification du fournisseur a été rejetée, les raisons pour lesquelles il a été mis fin à sa qualification, et les raisons pour lesquelles il n'a pas été sélectionné;

c) à un soumissionnaire non retenu, des renseignements pertinents concernant les raisons pour lesquelles sa soumission n'a pas été retenue et les caractéristiques et avantages relatifs de la soumission retenue, ainsi que le nom de l'adjudicataire.

[...]

26. Selon TPSGC, le paragraphe 1018(2) de l'ALÉNA exclut un marché public de la portée de l'ALÉNA dans les circonstances de l'espèce. L'extrait pertinent de cette disposition prévoit ce qui suit :

2. À condition que ces mesures ne soient pas appliquées de façon à constituer, soit un moyen de discrimination arbitraire et injustifié entre les Parties où les mêmes conditions existent, soit une restriction déguisée au commerce entre les Parties, aucune disposition du présent chapitre ne sera interprétée comme empêchant une Partie d'adopter ou de maintenir de mesures :

a) nécessaires à la protection de la moralité publique, de l'ordre public ou de la sécurité publique;

b) nécessaires à la protection de la santé et de la vie des personnes et des animaux ou à la préservation des végétaux;

[...]

27. Le Tribunal fait observer que l'article XXIII de l'AMP renferme la disposition similaire suivante :

[...]

2. Sous réserve que ces mesures ne soient pas appliquées de façon à constituer, soit un moyen de discrimination arbitraire ou injustifié entre les pays où les mêmes conditions existent, soit une restriction déguisée au commerce international, rien dans le présent accord ne sera interprété comme empêchant une Partie quelconque d'instituer ou d'appliquer des mesures : nécessaires à la protection de la moralité publique, de l'ordre public ou de la sécurité publique, à la protection de la santé et de la vie des personnes et des animaux ou à la préservation des végétaux, ou à la protection de la propriété intellectuelle; ou se rapportant à des articles fabriqués ou des services fournis par des personnes handicapées, ou dans des institutions philanthropiques, ou dans les prisons.

[...]

28. Le Tribunal n'est pas d'accord sur la position de TPSGC. L'article 30.11 de la Loi sur le TCCE prévoit que tout fournisseur potentiel peut, sous réserve des règlements, déposer une plainte auprès du Tribunal concernant la procédure des marchés publics suivie relativement à un contrat spécifique. L'expression « contrat spécifique » est définie à l'article 30.1 de la Loi sur le TCCE comme étant un contrat relatif à un marché de fournitures ou services qui a été accordé par une institution fédérale, ou pourrait l'être, et qui soit est précisé par règlement, soit fait partie d'une catégorie réglementaire. Aux termes de l'article 3 du Règlement, est un contrat spécifique tout contrat ou catégorie de contrats relatif au marché passé par une institution fédérale visée à l'article 1001 de l'ALÉNA, à l'article 502 de l'ACI ou à l'article premier de l'AMP.

29. L'article 1001 de l'ALÉNA s'applique aux mesures relatives aux marchés passés par une entité publique fédérale figurant à l'annexe 1001.1a-1 pour l'achat de services en conformité avec l'annexe 1001.1b-2, dont la valeur estimative est égale ou supérieure à 50 000 $US (89 000 $CAN)15 . La liste figurant à l'annexe 1001.1a-1 comprend le ministère de l'Agriculture, dont l'ACPM fait partie, au nombre des entités publiques fédérales acheteuses visées. La section A de l'annexe 1001.1b-2 précise que le chapitre 10 s'applique aux marchés passés par une entreprise publique figurant à l'annexe 1001.1a-1 pour l'achat de services sauf les services énumérés à la section B et les contrats de construction. Ces exceptions n'ont aucun rapport avec le dépistage des drogues équines. Enfin, il ressort clairement des éléments de preuve que la valeur du marché dépasse 1 million de dollars. Par conséquent, l'ALÉNA s'applique au présent marché public.

30. Le Tribunal a procédé à une analyse similaire de l'article premier de l'AMP. Il a conclu que l'entité publique fédérale, les services et un marché de la valeur en question en l'espèce sont tous visés par l'AMP. L'AMP s'applique donc aussi.

31. Par conséquent, le Tribunal est d'avis que l'article 1018 de l'ALÉNA ne l'empêche pas d'appliquer les règles de l'ALÉNA dans une enquête prescrite par la Loi sur le TCCE et le Règlement. Plutôt, dans les cas où le Tribunal exerce sa compétence pour enquêter sur une plainte, l'article 1018 limite l'application des règles de l'ALÉNA visant les marchés publics dans certaines circonstances. Si le Tribunal concluait à une violation des dispositions du chapitre 10 de l'ALÉNA, l'article 1018 limiterait l'application des règles régissant les marchés publics si une telle violation était nécessaire à la protection de la moralité publique ou à la protection de la santé des animaux ou pour atteindre l'un des autres objectifs énumérés et à condition que la mesure d'acquisition pertinente ne soit pas appliquée de façon à constituer soit un moyen de discrimination arbitraire et injustifié soit une restriction déguisée au commerce. Le même principe est vrai pour l'application de l'article XXIII de l'AMP.

32. Le Tribunal fait observer que, relativement à une plainte antérieure concernant le même marché public, il a indiqué que seul l'ACI s'appliquait16 . Sa conclusion était fondée sur les observations d'une portée très limitée déposées à l'étape initiale de la procédure par la partie plaignante dans cette affaire. Le Tribunal avait alors décidé de ne pas enquêter sur la plainte, puisque rien n'indiquait de façon raisonnable qu'il y avait eu violation d'un accord commercial. En l'espèce, les parties ont eu l'occasion de présenter des observations plus approfondies pour aider le Tribunal sur cette question. Le Tribunal fait également observer qu'il n'est pas assujetti à la règle du stare decisis.

Bien-fondé de la plainte

33. Aux termes du paragraphe 30.14(1) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal doit, dans son enquête, limiter son étude à l'objet de la plainte. En outre, à la conclusion de l'enquête, le Tribunal doit déterminer la validité de la plainte en fonction des critères et procédures établis par règlement pour le contrat spécifique. De plus, l'article 11 du Règlement prévoit que le Tribunal doit déterminer si le marché public a été passé conformément aux accords commerciaux applicables qui, comme il a déjà été souligné, sont, en l'espèce, l'ACI, l'ALÉNA et l'AMP.

Dépôt de la plainte dans le délai prévu

34. Can Test a soutenu que la plainte aux deux motifs qui font l'objet de la présente enquête avait été déposée après le délai prévu. Pour déterminer si une plainte est déposée dans le délai prévu, le Tribunal doit appliquer les dispositions de l'article 6 du Règlement, qui prévoit qu'une partie plaignante qui présente une opposition à l'autorité acheteuse - en l'espèce, TPSGC - ou dépose une plainte auprès du Tribunal doit le faire dans les 10 jours ouvrables suivant la date où elle a découvert ou aurait dû vraisemblablement découvrir les faits à l'origine de l'opposition ou de la plainte. Si une partie plaignante a présenté son opposition à TPSGC dans le délai prévu et que TPSGC a rejeté l'opposition, cette partie plaignante peut déposer une plainte auprès du Tribunal dans les 10 jours ouvrables suivant la date où elle a pris connaissance de ce refus. Les deux motifs de plainte qui font l'objet de la présente enquête se rapportent aux résultats de l'évaluation de la proposition de Vita-Tech, dont Vita-Tech n'a pris connaissance que le 16 août 2005. Vita-Tech a ensuite présenté une opposition à TPSGC le 30 août 2005, soit 10 jours ouvrables après avoir pris connaissance des résultats. Le même jour, TPSGC a rejeté l'opposition de Vita-Tech. Cette dernière a ensuite déposé sa plainte auprès du Tribunal le 13 septembre 2005, soit 9 jours ouvrables après avoir pris connaissance du refus de réparation de TPSGC. Par conséquent, le Tribunal est d'avis que la plainte à ces motifs a été déposée dans le délai prévu par le Règlement.

Compte rendu

35. TPSGC était tenu, à la fois aux termes de l'ALÉNA et de l'AMP, d'expliquer à Vita-Tech les raisons pour lesquelles sa proposition n'avait pas été retenue, si celle-ci le lui demandait.

36. D'après TPSGC, Vita-Tech a téléphoné à TPSGC le 29 août 200517 , et a présenté une opposition portant sur les résultats de l'invitation. Les deux parties s'entendent sur le fait que TPSGC a par la suite envoyé à Vita-Tech, par télécopie le même jour, une copie de l'appréciation collective de sa proposition18 . Cette appréciation renseigne, au niveau général, sur la manière dont la soumission a été évaluée et sur les résultats obtenus par Vita-Tech. Lorsqu'il a télécopié l'appréciation collective à Vita-Tech, TPSGC a offert de « discuter de l'appréciation collective au moment qui lui conviendra »19 [traduction].

37. Par la suite, le 30 août 2005, Vita-Tech a envoyé un message électronique dans lequel elle déclarait qu'elle « demandait un réexamen officiel de la décision de ne pas lui adjuger un contrat »20 [traduction], ce message ayant été suivi d'un message électronique de TPSGC confirmant que Vita-Tech n'avait pas obtenu la note globale obligatoire de 75 p. 100.

38. Le Tribunal estime que TPSGC était tenu d'offrir à Vita-Tech un compte rendu portant sur des renseignements plus détaillés que les renseignements généraux contenus dans l'appréciation collective. Toutefois, il ressort des éléments de preuve que TPSGC a effectivement offert de discuter l'appréciation plus à fond avec Vita-Tech. Les éléments de preuve n'indiquent pas que Vita-Tech a tenté de se prévaloir de cette offre. Le Tribunal fait également observer l'affirmation incontestée de TPSGC selon laquelle il a donné un compte rendu avec MAXXAM Analytics Inc., l'autre soumissionnaire non retenu. Il est donc raisonnable de conclure que Vita-Tech aurait obtenu un compte rendu de TPSGC comportant des renseignements plus détaillés si elle avait accepté l'offre d'en « discuter au moment qui lui conviendra » [traduction]. Le Tribunal conclut donc que le premier motif de plainte est dénué de fondement.

39. Le Tribunal constate que Vita-Tech a prétendu que les feuilles de travail des évaluateurs ne comportaient pas suffisamment de renseignements sur l'attribution des notes par les évaluateurs. Il n'a pas trouvé de disposition dans la DP, ni dans aucun des accords commerciaux, qui précise le niveau de détail qu'il convient d'inscrire dans le cadre de l'évaluation des propositions.

Évaluation

40. En ce qui a trait au motif de plainte selon lequel TPSGC avait incorrectement évalué certaines parties de la proposition de Vita-Tech, le Tribunal ne substituera pas son jugement à celui des évaluateurs sauf si ces derniers ne se sont pas appliqués à l'évaluation de la proposition d'un soumissionnaire, n'ont pas tenu compte de renseignements d'importance cruciale contenus dans une soumission, ont mal interprété la portée d'une exigence, ont fondé leur évaluation sur des critères non divulgués ou n'ont pas, d'une autre manière, procédé à une évaluation équitable au plan de la procédure21 .

41. L'article 506 e l'ACI prévoit ce qui suit :

6. [...] Les documents d'appel d'offres doivent indiquer clairement les conditions du marché public, les critères qui seront appliqués dans l'évaluation des soumissions et les méthodes de pondération et d'évaluation des critères.

42. L'article 1015 de l'ALÉNA prévoit ce qui suit :

[...]

4. L'adjudication des marchés s'effectuera conformément aux procédures suivantes :

[...]

d) l'adjudication des marchés sera conforme aux critères et aux conditions essentielles spécifiées dans la documentation relative à l'appel d'offres [...].

43. Le paragraphe XIII(4) de l'AMP prévoit ce qui suit :

[...]

c) Les adjudications des marchés seront faites conformément aux critères et aux conditions essentielles spécifiées dans la documentation relative à l'appel d'offres.

44. Comme il l'a déjà indiqué, le Tribunal a décidé qu'il enquêterait sur l'allégation uniquement relativement aux articles 1.A, 1.B et 2.A des critères cotés figurant à la section C.2.2 de la DP. Respectivement, ces articles portaient sur l'évaluation, relativement aux soumissionnaires, de « connaissance experte de la portée des groupes de drogues en se fondant sur la nature pharmacologique » [traduction] (1.A), sa « capacité de dépister et de confirmer la présence de drogues dans les concentrations pertinentes au domaine des courses de chevaux » [traduction] (1.B), et sa « connaissance experte des usages acceptés et de la capacité des méthodes proposées pour le dépistage et la confirmation des drogues figurant sur la liste » [traduction] (2.A). Autrement dit, les articles 1.A et 1.B portaient sur l'évaluation de la capacité du soumissionnaire de dépister, dans les échantillons, les drogues figurant sur la liste de 315 drogues, et l'article 2.A se rapportait à l'évaluation de la pertinence de la méthodologie de dépistage proposée par le soumissionnaire.

45. Vita-Tech a prétendu que TPSGC aurait dû lui accorder davantage de points en s'appuyant sur la connaissance générale que pouvait avoir le gouvernement pour ajouter aux renseignements figurant dans sa soumission. Elle a donc prétendu que, lorsqu'elle avait fourni des renseignements dans sa soumission au sujet de certaines drogues, le gouvernement aurait dû appliquer sa connaissance de ces drogues en vue de l'attribution d'autres points relatifs aux drogues semblables ou connexes dont elle n'avait pas spécifiquement traité dans sa soumission. De plus, même si sa soumission ne semblait pas indiquer comment son accréditation du CCN établissait la preuve de l'existence de la capacité évaluée, Vita-Tech a prétendu que TPSGC aurait dû appliquer sa connaissance de ce processus d'accréditation pour fonder l'attribution d'autres points à Vita-Tech.

46. Le Tribunal fait observer que la DP a énoncé très clairement que « le soumissionnaire doit expliquer et faire la démonstration de la manière dont il satisfait aux critères ainsi que de la manière dont il comprend et exécutera les travaux requis »22 [traduction]. De plus, TPSGC a indiqué clairement à tous les soumissionnaires que de l'information détaillée était requise dans ce domaine, y compris par l'inclusion des énoncés suivants :

· « Le laboratoire fournira des copies de la méthodologie détaillée (PNE, guides) proposée pour satisfaire à cette exigence, y compris les protocoles pertinents à l'instrumentation, au dépistage, à l'analyse quantitative et à l'analyse de confirmation, ainsi que les protocoles d'élaboration et de validation des méthodes analytiques, et toutes les procédures administratives connexes »23

· « Les données à l'appui incluront des copies des PNE, protocoles, guides des méthodes, formules, données nécessaires à la validation des méthodes, organigrammes, curriculum vitae du personnel, plans d'implantation des laboratoires, listes des stocks d'équipement, documents de référence et tout autre article requis à l'appui de la capacité déclarée du laboratoire résumée au tableau C.3.2. NE PAS OUBLIER D'INCLURE : 1. Organigramme complété 2. PNE de laboratoire et données à l'appui des déclarations énoncées dans l'organigramme 3. Autres documents à l'appui »24

· « TOUS les documents techniques, établis par le laboratoire, qui seront appliqués dans l'exécution des travaux de cette portée par un soumissionnaire retenu doivent être inclus dans la trousse de soumission »25

· « TOUS les documents élaborés par le laboratoire relativement à la portée du dépistage contribueront à l'évaluation de chaque proposition selon la spécification énoncée dans la présente DP. Chaque soumissionnaire pourra faire le nombre requis de copies de ses guides de la qualité, de ses PNE et de tout autre document qu'il utilisera dans l'exécution des travaux si sa proposition est retenue. En l'absence d'une documentation complète relativement au laboratoire, l'équipe d'évaluation technique ne peut procéder à une évaluation complète »26

[Traduction]

47. En ce qui a trait à l'accréditation du CCN, lorsque Vita-Tech a soulevé, dans une pièce jointe à son message électronique du 13 juillet 200527 , le fait qu'elle avait récemment été accréditée par le CCN, TPSGC a souligné ce qui suit : « L'existence d'une procédure antérieure d'évaluation et d'accréditation n'a aucune incidence que ce soit sur le droit de l'ACPM d'évaluer les capacités de chaque soumissionnaire »28 [traduction]. Par conséquent, même si TPSGC a indiqué avoir en fait extrapolé dans une certaine mesure à partir du processus d'accréditation du CCN aux fins de l'évaluation de la soumission de Vita-Tech, il n'était pas raisonnable pour cette dernière de croire que TPSGC était tenu de procéder à une telle extrapolation.

48. En ce qui a trait à l'extrapolation d'autres connaissances, le Tribunal fait observer que TPSGC a effectivement indiqué dans des communications aux soumissionnaires qu'une certaine extrapolation concernant la capacité de dépistage des drogues pouvait être faite. Le Tribunal estime cependant que les communications de TPSGC auraient raisonnablement dû faire comprendre aux soumissionnaires que TPSGC avait l'intention d'appliquer une latitude considérable en ce qui avait trait à l'utilisation de l'extrapolation comme moyen de déterminer si un soumissionnaire satisfaisait à un critère donné. Par exemple, TPSGC a déclaré que ce n'est « qu'en présence d'un échantillon représentatif des données nécessaires à la validation combiné avec des renseignements détaillés sur les méthodes qu'une équipe de réexamen technique peut évaluer le caractère raisonnable des prétentions des soumissionnaires quant à leur méthodologie »29 [traduction]. Le Tribunal fait également observer que Vita-Tech, dans ses observations présentées dans le cadre de la présente procédure de plainte, n'a pas indiqué au Tribunal les endroits dans sa soumission où elle avait tenté de démontrer sa capacité en indiquant comment et pourquoi TPSGC devait extrapoler.

49. À la lumière de ce qui précède, le Tribunal n'est pas d'avis que TPSGC a agi d'une manière déraisonnable dans son choix d'extrapoler, ou pas, l'information aux fins de l'évaluation de la proposition de Vita-Tech.

50. Vita-Tech a aussi prétendu ne pas avoir reçu de points pour certaines parties de sa proposition qu'elle avait suffisamment étayées, et plus particulièrement l'article 2.A, et que TPSGC avait exigé des soumissionnaires qu'ils fournissent plus de renseignements que ne l'exigeait la DP. Comme il a déjà été discuté, la documentation relative à l'appel d'offres énonçait clairement qu'une justification détaillée était exigée. Les observations de Vita-Tech ont renvoyé le Tribunal à peu de renseignements dans sa soumission qui étayaient ses capacités ou établissaient ses connaissances expertes.

51. Outre les arguments ci-dessus, Vita-Tech a allégué que TPSGC avait commis d'autres erreurs dans son évaluation et que ces erreurs avaient eu une incidence néfaste sur son résultat final. Elle a notamment allégué que TPSGC :

· avait refusé d'accepter toutes les normes de référence provenant d'une source particulière, parce que TPSGC croyait à tort que Vita-Tech, lorsqu'elle affirmait appliquer la norme, utilisait en fait des données instrumentales comme source, ce qui a eu une incidence sur les résultats qu'elle a obtenus pour l'article 1.A;

· avait d'une manière injustifiable limité sa capacité d'obtenir de bons résultats à l'article 1.B en interprétant étroitement ce qui pouvait être réputé un processus de dépistage acceptable;

· avait d'une manière injuste interdit l'utilisation de moyens de rechange viables qui auraient permis un dépistage de drogues d'une vaste portée parce que l'entrepreneur principal ne pouvait faire affaire avec un certain fournisseur;

· avait mal interprété certaines parties de l'information fournie au tableau C.3.2 dans le cadre de sa proposition.

52. Après avoir examiné attentivement les éléments de preuve concernant toutes les erreurs alléguées par Vita-Tech, le Tribunal ne conclut pas que TPSGC a agi d'une manière déraisonnable en attribuant les résultats à la proposition comme il l'a fait. En ce qui a trait à la première allégation d'erreur susmentionnée, Vita-Tech n'a pas renvoyé le Tribunal à une partie quelconque de sa soumission indiquant que la norme mentionnée par Vita-Tech était effectivement une norme et n'était pas, comme l'avait jugé TPSGC, un résultat de données instrumentales. En ce qui a trait à la deuxième allégation d'erreur, il ne ressort pas des éléments de preuve que TPSGC ait évalué l'article 1.B autrement que d'une manière conforme à la méthodologie prévue dans la DP. Si Vita-Tech entretenait quelque inquiétude ou avait des questions relativement au libellé ou à l'évaluation de cet article, elle aurait dû les signaler à TPSGC à la première lecture de l'article en cause. En ce qui a trait à la troisième allégation d'erreur, le Tribunal fait observer que Vita-Tech a été informée durant la période d'invitation que certaines trousses étaient exclues et que l'allégation n'a donc pas été présentée dans le délai prévu pour déposer une plainte. En ce qui a trait à la quatrième allégation d'erreur, le Tribunal a examiné les feuilles d'évaluation de TPSGC et le tableau C.3.2 de Vita-Tech et n'a pas conclu que les éléments de preuve indiquaient que TPSGC avait mal interprété le tableau, contrairement à ce qui a été allégué.

53. À la lumière de ce qui précède, le Tribunal conclut que le deuxième motif de plainte est dénué de fondement.

54. Étant donné qu'il a conclu qu'il n'y avait pas eu violation du chapitre 10 de l'ALÉNA ou de l'AMP, il n'est pas nécessaire que le Tribunal examine plus à fond l'article 1018 de l'ALÉNA ou l'article XXIII de l'AMP.

Frais

55. Le Tribunal accordera à TPSGC le remboursement des frais raisonnables qu'il a engagés pour répondre à la plainte.

56. La Ligne directrice fonde l'évaluation du degré de complexité d'une plainte sur trois critères : la complexité du marché public, la complexité de la plainte et la complexité de la procédure. La complexité du marché public était moyenne, en ce sens que le marché comprenait un projet de services définis, à commander au fur et à mesure des besoins. La complexité de la plainte était moyenne, en ce sens que la question en litige était une évaluation fondée sur des critères obligatoires et cotés et que les trois accords commerciaux s'appliquaient. Enfin, la complexité de la procédure était élevée, étant donné qu'il y a eu une intervenante, que les parties ont déposé des renseignements complémentaires dépassant la portée normale de la procédure et que l'espèce a exigé le recours au délai de 135 jours. Par conséquent, selon l'indication provisoire donnée par le Tribunal relativement à la présente affaire, le degré de complexité global correspond au degré moyen de complexité prévu à l'annexe A de la Ligne directrice (degré 2). En conformité avec la Ligne directrice, l'indication provisoire du montant de l'indemnisation donnée par le Tribunal est de 2 400 $. Le Tribunal se réserve la compétence de fixer le montant final de l'indemnisation.

DÉCISION DU TRIBUNAL

57. Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal détermine que la plainte n'est pas fondée.

58. Aux termes de l'article 30.16 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal accorde à TPSGC le remboursement des frais raisonnables qu'il a engagés pour répondre à la plainte, ces frais devant être payés par Vita-Tech. L'indication provisoire du degré de complexité de la présente plainte donnée par le Tribunal est le degré 2, et l'indication provisoire du montant de l'indemnisation est de 2 400 $. Si l'une ou l'autre des parties n'est pas d'accord en ce qui a trait à l'indication provisoire du degré de complexité ou à l'indication provisoire du montant de l'indemnisation, elle peut présenter des observations auprès du Tribunal, en conformité avec la Ligne directrice. Le Tribunal se réserve la compétence de fixer le montant final de l'indemnisation.


1 . L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47 [Loi sur le TCCE].

2 . D.O.R.S./93-602 [Règlement].

3 . D.O.R.S./91-499.

4 . Accord de libre-échange nord-américain entre le gouvernement du Canada, le gouvernement des États-Unis mexicains et le gouvernement des États-Unis d'Amérique, 17 décembre 1992, R.T.C. 1994, no 2 (entré en vigueur le 1er janvier 1994) [ALÉNA].

5 . Observations de Vita-Tech sur le RIF, para. 37.

6 . DP, section C.2.2, critères cotés, article 2.A.

7 . Observations de Vita-Tech sur le RIF, para. 35.

8 . RIF, pièce 11.

9 . 18 juillet 1994, Gaz. C. 1995.I.1323, en ligne : Secrétariat du commerce intérieur <http://www.intrasec.mb.ca/index_fr/ait.htm> [ACI].

10 . Le tableau a été fourni à tous les soumissionnaires. Il comprenait une liste de 315 drogues différentes et comportait des espaces vierges en regard de chacune des drogues pour que les soumissionnaires puissent y inscrire les renseignements sur les méthodes qu'ils appliqueraient pour contrôler un échantillon dans le but de dépister cette drogue, sa concentration, etc.

11 . DP, section C.2.0.

12 . RIF, pièce 9 à la p. 3.

13 . RIF, pièce 7.

14 . 15 avril 1994, en ligne : Organisation mondiale du commerce <http://www.wto.org/french/docs_f/legal_f/final_f.htm> [AMP].

15 . Il s'agit du seuil alors applicable. Le seuil a diminué, passant à 84 000 $CAN le 1er janvier 2006.

16 . Re plainte déposée par MAXXAM Analytics Inc. (7 octobre 2005), PR-2005-024 (TCCE).

17 . RIF, para. 25.

18 . Cartable de la plainte 1, onglet 3.

19 . RIF, pièce 11.

20 . Cartable de la plainte 1, onglet 1.

21 . Re plainte déposée par Polaris Inflatable Boats (Canada) Ltd. (23 juin 2003), PR-2002-060 (TCCE).

22 . DP à la p. 12.

23 . Ibid.

24 . DP à la p. 46.

25 . RIF, pièce 7 à la p. 2.

26 . RIF, pièce 9 à la p. 1.

27 . Cartable de la plainte 1, onglet 11.

28 . RIF, pièce 9 à la p. 3.

29 . Ibid.