CALIAN LTD.

Décisions


CALIAN LTD.
c.
MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX
Dossier no PR-2006-008

Décision et motifs rendus
le vendredi 21 juillet 2006


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À une plainte déposée par Calian Ltd. aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47;

ET À LA SUITE D’une décision d’enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

ENTRE

 

CALIAN LTD.

Partie plaignante

ET

 

LE MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

Institution fédérale

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte est fondée.

Aux termes des paragraphes 30.15(2) et 30.15(3) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur recommande, à titre de mesure corrective, que le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux n’exerce pas l’option de renouvellement du contrat pour les deux périodes supplémentaires d’un an et, si le besoin existe toujours, qu’il lance plutôt une nouvelle invitation concurrentielle pour le besoin, en conformité avec les dispositions des accords commerciaux pertinents.

Aux termes de l’article 30.16 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur accorde à Calian Ltd. le remboursement des frais raisonnables qu’elle a engagés pour la préparation et le traitement de la plainte, ces frais devant être payés par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux. L’indication provisoire du degré de complexité de la présente plainte donnée par le Tribunal canadien du commerce extérieur est le degré 2, et l’indication provisoire du montant de l’indemnisation est de 2 400 $. Si l’une ou l’autre des parties n’est pas d’accord en ce qui a trait à l’indication provisoire du degré de complexité ou à l’indication provisoire du montant de l’indemnisation, elle peut déposer des observations auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur, en conformité avec la Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure portant sur un marché public. Le Tribunal canadien du commerce extérieur se réserve la compétence de fixer le montant final de l’indemnisation.

Pierre Gosselin
Pierre Gosselin
Membre présidant

Elaine Feldman
Elaine Feldman
Membre

Serge Fréchette
Serge Fréchette
Membre

Hélène Nadeau
Hélène Nadeau
Secrétaire

Membres du Tribunal :

Pierre Gosselin, membre présidant

 

Elaine Feldman, membre

 

Serge Fréchette, membre

   

Directeur :

Randolph W. Heggart

   

Enquêteur principal :

Michael W. Morden

   

Conseiller juridique pour le Tribunal :

Eric Wildhaber

   

Partie plaignante :

Calian Ltd.

   

Conseiller juridique pour la partie plaignante :

Justine Whitehead

   

Institution fédérale :

Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux

   

Conseillers juridiques pour l’institution fédérale :

David M. Attwater

 

Susan D. Clarke

 

Christianne M. Laizner

 

Ian McLeod

Veuillez adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

PLAINTE

1. Le 25 avril 2006, Calian Ltd. (Calian) a déposé une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur 1 . Cette plainte portait sur le marché (invitation no W0114-050005/A) passé par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (TPSGC) pour la prestation de services de formation relativement aux connaissances élémentaires de conduite militaire et à l’entretien des véhicules pour le ministère de la Défense nationale (MDN).

2. Calian a allégué que Valcom Consulting Group Inc. (Valcom), un de ses concurrents, avait incorrectement utilisé des membres actifs du personnel des Forces canadiennes (FC) rattachés à l’unité qui avait mis au point l’énoncé de travail (ÉT) associé à l’invitation en question pour qu’ils agissent en son nom, à titre de recruteurs et de responsables de l’examen des curriculum vitæ dans le cadre de l’invitation en question. Calian a allégué que, en outre, ces membres des FC avaient activement tenté de convaincre les employés éventuels de ne pas travailler avec elle et que, en raison de cette relation, Valcom avait obtenu des renseignements auxquels les autres soumissionnaires n’avaient pas accès. Elle a allégué qu’il y avait donc nettement conflit d’intérêts et qu’il était raisonnable d’avoir des doutes quant à l’impartialité de la procédure de passation du marché public. À titre de mesure corrective, Calian a demandé au Tribunal de conclure que les activités de Valcom avaient entraîné un conflit d’intérêts, que le comportement de Valcom suffit pour que la soumission de cette dernière soit déclarée non conforme et que Calian devrait obtenir le remboursement des frais qu’elle a engagés pour déposer sa plainte auprès du Tribunal.

3. Le 2 mai 2006, le Tribunal a avisé les parties qu’il avait accepté de faire enquête sur la plainte, puisque celle-ci répondait aux exigences du paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE et aux conditions énoncées au paragraphe 7(1) du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics 2 . Le 2 mai 2006, aux termes du paragraphe 30.13(3) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal a ordonné à TPSGC de reporter l’adjudication du marché jusqu’à ce qu’il ait terminé son enquête et ait déterminé le bien-fondé de la plainte. Le 4 mai 2006, TPSGC a informé le Tribunal qu’un contrat avait été adjugé à Valcom avant la réception de l’ordonnance de report d’adjudication. Le 29 mai 2006, le Tribunal a donc rendu une ordonnance annulant l’ordonnance de report d’adjudication. Le 29 mai 2006, TPSGC a déposé le rapport de l’institution fédérale (RIF). Le 8 juin 2006, Calian a déposé ses observations sur le RIF.

4. Étant donné qu’il y avait suffisamment de renseignements au dossier pour lui permettre de déterminer le bien-fondé de la plainte, le Tribunal a décidé qu’il n’y avait pas lieu de tenir d’audience publique et a statué sur la plainte sur la foi des renseignements au dossier.

PROCÉDURE DE PASSATION DU MARCHÉ

5. L’ÉT, qui renferme les exigences techniques de la demande de propositions (DP), était la responsabilité du Centre d’instruction au combat (CIC) du MDN situé à la base des Forces canadiennes (BFC) Gagetown, au Nouveau-Brunswick. La section qui a diffusé l’ÉT se trouvait à la BFC Kingston, en Ontario, mais elle avait demandé les suggestions de chacun des quatre Secteurs de la Force terrestre (Atlantique, Québec, Centre et Ouest) et de la composante Logistique du quartier général du CIC. La DP faisait partie d’une initiative plus vaste d’adjudication de contrats, soit le Training Capacity Enhancement Project (projet TCEP), qui renferme trois éléments principaux : l’instruction sur la conduite de véhicules à roues, l’instruction au tir sur véhicule blindé léger et le soutien administratif à l’instruction. En août 2005, l’ébauche de l’ÉT pour l’ensemble du projet TCEP a été fournie à Calian, à Valcom et à toutes les autres entreprises intéressées connues. En novembre et en décembre 2005, le MDN a rédigé l’ÉT pour l’instruction sur la conduite de véhicules à roues ainsi que les critères d’évaluation, et les a transmis à TPSGC. Le 10 février 2006, la DP a été diffusée par l’intermédiaire du MERX. Entre sa publication et la date de clôture pour la réception des soumissions, soit le 27 mars 2006, huit modifications de la DP ont été diffusées.

6. La DP renfermait les dispositions suivantes, qui sont pertinentes en l’espèce :

1. Instructions, clauses et conditions uniformisées

[...]

Les instructions et conditions uniformisées 9403 (04/12/10) sont incorporées par renvoi à la demande de soumissions et en font partie intégrante.

1.1 Conditions générales

Conditions générales 9676 (2005-12-16) – Les conditions du service doivent s’appliquer à tout contrat résultant de la présente DP.

[...]

2.4 Clauses du guide des CCUA [Clauses et conditions uniformisées d’achat]

[...]

Emploi civil de personnel militaire A9107T (2005/06/10)

[...]

3. Communications – en période d’invitation

Afin d’assurer l’intégrité du processus d’appel à la concurrence, toutes les demandes de renseignements et autre communication ayant trait à la demande de soumissions [...] doivent être adressées UNIQUEMENT à l’autorité contractante dont le nom est indiqué [...] dans la demande de soumissions [...] Le défaut de se conformer (pour cette raison uniquement) pourrait entraîner le rejet de la soumission.

[...]

7. La clause A9107T (2005/06/10) des CCUA stipule ce qui suit :

L’article 19.42 des Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes est reproduit ci-dessous :

19.42 EMPLOI CIVIL

« 1. Sous réserve de l’alinéa (3), aucun officier ou militaire du rang en service à plein temps ne doit occuper un emploi civil ni exploiter une entreprise civile lorsque, selon le cas, de l’avis de son commandant, cet emploi ou cette entreprise :

a) est ou sera vraisemblablement préjudiciable aux intérêts des Forces canadiennes;

b) jette ou jettera vraisemblablement le discrédit sur les Forces canadiennes;

c) dans le cas de militaires de la force régulière, est à temps continu.

[...]

3. Sauf qu’il ne doit pas occuper un emploi civil ni exploiter une entreprise civile qui jette ou jettera vraisemblablement du discrédit sur les Forces canadiennes, le présent article ne s’applique pas à un officier ou militaire du rang qui est :

a) soit en congé précédant immédiatement sa libération;

b) soit en congé sans solde. »

[...]

8. Selon TPSGC, trois soumissions ont été reçues en réponse à la DP et leur évaluation s’est terminée le 30 mars 2006. Le 2 mai 2006, le contrat a été adjugé à Valcom.

9. La chronologie des événements suivante est pertinente en l’espèce :

• 7 février 2006 — Calian a communiqué avec TPSGC, alléguant un conflit d’intérêts impliquant Valcom. Selon Calian, TPSGC lui avait conseillé à ce moment-là de soulever la question directement auprès du MDN.

• 8 février 2006 — Calian a discuté de ces mêmes questions avec l’agent de négociation des contrats de TPSGC. Selon TPSGC, Calian n’a pas voulu fournir de précisions et TPSGC lui a dit de mettre ses remarques par écrit.

10 février 2006 — La procédure de passation de marché public est lancée par suite de l’affichage de l’avis de projet de marché.

• 28 février 2006 — Le MDN a envoyé à TPSGC un courriel faisant état des communications de Calian avec le personnel du MDN.

• 6 mars 2006 — M. Jerry Johnston, vice-président de Calian, Services d’impartition, a écrit à l’autorité contractante de TPSGC, alléguant que deux membres actifs des FC recrutaient du personnel pour Valcom et qu’ils essayaient aussi de convaincre les employés éventuels de ne pas travailler pour Calian. Cette lettre affirmait que Calian avait porté ces allégations à l’attention du MDN et avait demandé qu’il soit interdit à Valcom de présenter une soumission, puisque cette dernière était peut-être au courant de renseignements d’initiés grâce à son association avec les deux membres des FC.

• 8 mars 2006 — Dans une lettre datée de ce jour-là, TPSGC a accusé réception de la lettre de Calian du 6 mars 2006.

• 21 mars 2006 — Dans une lettre datée de ce jour-là, TPSGC a informé M. Johnston que le MDN avait procédé à une enquête sur la question et avait conclu qu’il ne semblait pas y avoir de conflit d’intérêts de la part de Valcom. TPSGC a aussi informé M. Johnston que, s’il avait des questions, il devrait communiquer avec le lieutenant-commander McNeil, au MDN, et lui a également fourni l’adresse et le numéro de téléphone de celui-ci.

• 23 mars 2006 — Dans une lettre datée de ce jour-là, M. Johnston a écrit de nouveau à TPSGC, demandant des renseignements sur le rôle de TPSGC en ce qui avait trait à l’enquête et à d’autres questions relatives à son processus d’enquête, plus précisément au sujet de la DP en question, et à ses pratiques en général.

• 24 mars 2006 — L’autorité contractante de TPSGC a accusé réception de la lettre de M. Johnston du 23 mars 2006.

• 4 avril 2006 — Dans un courriel daté de ce jour-là, M. Johnston a demandé à l’autorité contractante de TPSGC quand il pouvait s’attendre à recevoir une réponse à sa lettre du 23 mars 2006.

• 7 avril 2006 — En réponse au courriel du 4 avril 2006 de M. Johnston, l’autorité contractante de TPSGC l’a informé qu’elle n’était pas au bureau et qu’elle n’avait pu répondre. Elle lui a dit également qu’elle ne savait pas quand il obtiendrait une réponse, ni si cette réponse viendrait de son bureau ou de celui du sous-ministre de TPSGC.

• 7 avril 2006 — M. Johnston a envoyé un courriel au sous-ministre de TPSGC lui demandant quand il pouvait s’attendre à avoir une réponse à sa lettre du 23 mars 2006.

• 10 avril 2006 — Dans une lettre datée de ce jour-là, M. Chris Maltas, directeur régional, région de l’Ontario de TPSGC, Approvisionnements et rémunération, a écrit à M. Johnston en réponse à la lettre de Calian du 23 mars 2006. Cette lettre informait Calian que le MDN était d’avis qu’il ne semblait pas y avoir de conflit d’intérêts et que TPSGC ne poursuivrait pas l’enquête sur cette question. Cette lettre informait aussi Calian du mécanisme des plaintes du Tribunal.

10. Le 25 avril 2006, Calian a déposé sa plainte auprès du Tribunal.

POSITION DES PARTIES

Position de TPSGC

11. TPSGC a fait valoir que la plainte de Calian n’avait pas été déposée dans le délai prévu à l’article 6 du Règlement. Il a soutenu que le fournisseur potentiel doit présenter une opposition à l’institution fédérale pertinente, ou de déposer une plainte auprès du Tribunal, dans les 10 jours ouvrables suivant la date à laquelle il a connu ou aurait dû vraisemblablement connaître les faits à l’origine de son opposition ou de sa plainte. Il a soutenu que, lorsqu’une opposition est faite comme il se doit et refusée par la suite, le fournisseur potentiel dispose de 10 jours ouvrables à partir de la date de ce refus pour déposer sa plainte auprès du Tribunal.

12. Selon TPSGC, Calian lui a parlé pour la première fois le 7 février 2006, date à laquelle elle a téléphoné au bureau de TPSGC et a parlé avec un membre du personnel du présumé conflit d’intérêts mettant en cause les membres des FC qui travaillaient censément pour Valcom. Le 8 février 2006, Calian a parlé de cette question directement avec l’agent de négociation des contrats. TPSGC a fait valoir que, dans ni l’une ni l’autre des conversations téléphoniques mentionnées dans la lettre de Calian du 6 mars 20063 , des précisions n’avaient été fournies sur les activités que Calian mettait en question ou sur les personnes impliquées. Il a prétendu avoir conseillé les deux fois à Calian de présenter ses remarques par écrit.

13. TPSGC a fait valoir que la Cour d’appel fédérale a décidé que, « [...] [p]our que la procédure informelle de règlement des plaintes soit efficace, l’opposition doit être formulée avec suffisamment de précision pour permettre au Ministère d’y donner suite [...] »4 . Il a soutenu que ses conversations avec Calian n’étaient pas suffisamment précises pour qu’il agisse et ne peuvent donc pas être considérées comme des oppositions. Il a donc soutenu que Calian ne lui avait pas présenté d’opposition jusqu’à ce qu’elle soit soulevée dans la lettre du 6 mars 2006, qu’il avait reçue le 7 mars 2006. Selon TPSGC, puisque Calian connaissait les motifs de son opposition dès le 7 février 2006, son objection du 6 mars 2006 n’a pas été présentée dans le délai prévu au paragraphe 6(2) du Règlement.

14. En outre, TPSGC a soutenu que, même si la lettre de Calian du 6 mars 2006 devait être considérée comme la présentation de son opposition, cette opposition avait été rejetée dans la lettre de TPSGC du 21 mars 20065 , qui disait ce qui suit :

Le ministère de la Défense nationale (MDN) a effectué à l’interne un examen des questions que vous avez soulevées; son enquête est maintenant terminée. Le MDN est d’avis qu’il ne semble pas y avoir de conflit d’intérêts de la part de Valcom.

[Traduction]

15. TPSGC a soutenu que, dans cette lettre, il n’acceptait pas d’étudier davantage l’opposition de Calian ni n’indiquait que le MDN poursuivait son enquête. Il a soutenu que rien dans la lettre suivante de Calian, celle du 23 mars 2006, n’indiquait que Calian croyait qu’il pourrait encore lui accorder la réparation qu’elle demandait par son opposition. Il a soutenu qu’au contraire, cette lettre semblait indiquer que Calian avait renoncé à son opposition.

16. TPSGC a fait valoir que, s’il invitait Calian, dans sa lettre du 21 mars 2006, à adresser ses questions au MDN, cela ne signifiait pas que son refus n’était pas définitif. Selon TPSGC, des conclusions différentes pourraient dissuader les agents de négociation des contrats de TPSGC de communiquer avec les soumissionnaires, après le rejet d’une opposition, pour leur fournir des renseignements supplémentaires. TPSGC a ajouté que, lorsqu’il rejette une opposition, rien ne l’oblige à orienter le soumissionnaire vers les procédures de contestation des offres prévues dans la Loi sur le TCCE, comme il l’a tout de même fait dans sa lettre du 10 avril 2006. Il a soutenu que Calian disposait de 10 jours ouvrables à partir du 21 mars 2006 pour déposer sa plainte auprès du Tribunal et que, puisque Calian avait déposé la plainte le 25 avril 2006, elle ne l’avait pas fait dans le délai précisé dans le Règlement.

17. TPSGC a également soutenu que Calian avait induit le Tribunal en erreur à propos des instructions et conditions uniformisées de TPSGC qui s’appliquaient à l’invitation à soumissionner. Selon TPSGC, Calian a prétendu que la condition générale 9676 (2005-12-16) — Services (CG 9676), y compris sa clause « Conflits d’intérêts »6 , était intégrée à la DP. D’après TPSGC, la condition 9403 (04/12/10) des Instructions et conditions uniformisées, qui ne comporte pas de dispositions sur le conflit d’intérêts et la non-discrimination, était intégrée à la DP. TPSGC a soutenu que la CG 9676 ne s’applique qu’au contrat résultant de l’invitation à soumissionner, et non à l’invitation.

18. TPSGC a fait valoir que, dans une affaire antérieure, le Tribunal avait écrit ce qui suit : « [...] Le Tribunal conclut que la clause [en question] [...] traite de ce qui pourrait se passer après l’adjudication du contrat, un domaine qui ne relève pas de sa compétence et, par conséquent, il ne traitera pas de cette question [...] »7 . Il a prétendu que l’examen et l’application de la CG 9676 à l’invitation à soumissionner ne relèvent même pas de la compétence du Tribunal en l’espèce.

19. TPSGC a soutenu que la DP avait été structurée de façon à rendre les membres actifs des FC accessibles aux soumissionnaires, reconnaissant qu’une bonne partie des connaissances nécessaires peut être fournie par des membres actifs et d’anciens membres des FC. Il a ajouté que la clause A9107T (2005/06/10) des CCUA était incluse pour cette raison. D’après TPSGC, cette clause implique clairement que les membres actifs des FC peuvent, dans certaines circonstances, occuper un emploi civil chez un soumissionnaire ou se livrer à des activités au nom d’un soumissionnaire. TPSGC a soutenu que, en outre, les soumissionnaires avaient été informés par la modification no 007 à la DP qu’il n’était pas question dans la clause A9107T (2005/06/10) des CCUA des membres des FC qui peuvent être libérés à 30 jours d’avis. Il a également fait remarquer que, à la page 16 de la DP, l’énoncé des besoins prévoit que des commandes subséquentes seraient effectuées au moins 30 jours ouvrables avant la date de commencement du cours « [...] afin de laisser à l’entrepreneur suffisamment de temps pour se préparer aux exigences locales particulières [...] ». Il a fait valoir que les deux membres désignés des FC pouvaient être libérés des FC à 30 jours d’avis et n’étaient donc pas liés par la clause A9107T (2005/06/10) des CCUA.

20. Au sujet des activités des membres désignés, TPSGC a fait valoir que les allégations de Calian reposent entièrement sur un courriel du début de novembre 20058 , auquel est mêlé un des membres désignés des FC et que Calian n’avait fourni aucun élément de preuve en ce qui concerne la soi-disant participation de l’autre membre désigné des FC. Il a fait valoir que les membres désignés des FC n’avaient pas accès à des « renseignements d’initiés » ni la possibilité d’en obtenir, à supposer que cette information ait existé. Il a ajouté que Calian n’avait pas révélé quels « renseignements d’initiés » auraient pu être donnés à Valcom ni expliqué comment cette information a empêché ou aurait pu empêcher la concurrence ou a créé ou aurait pu créer un avantage concurrentiel en contravention des accords commerciaux. TPSGC a fait valoir que les deux membres étaient stationnés à la BFC Gagetown au moment où les travaux relatifs à l’ébauche de l’ÉT pour l’instruction sur la conduite de véhicules à roues ont commencé, mais que ni l’un ni l’autre n’avait effectué de travail en ce qui avait trait à l’ÉT. Il a de plus fait valoir que ni l’un ni l’autre des deux membres ne travaillait dans l’escadron de chars du CIC, qui était responsable de l’ÉT, que Calian et Valcom avaient toutes deux reçu une ébauche de l’ÉT pour l’ensemble du projet TCEP en août 2005, que le membre des FC responsable de l’ÉT pour l’instruction sur la conduite de véhicules à roues avait rigoureusement contrôlé l’accès à cet ÉT après la diffusion de son ébauche en août 2005 et que ni l’un ni l’autre des membres désignés n’avait eu accès aux ébauches de l’ÉT. Il a ajouté que la direction du projet TCEP était passée de la BFC Gagetown, où les membres désignés étaient en poste, à la BFC Kingston plus de sept mois avant la diffusion de l’ÉT en février 2006.

21. Selon TPSGC, le fait que la proposition technique de Calian avait obtenu la note la plus élevée était incompatible avec l’idée que Calian ne pouvait pas l’emporter ou que Valcom avait eu un avantage concurrentiel injuste. TPSGC a fait valoir que la note technique de Calian (sur 100) dépassait de plus de 10 points celle de Valcom, mais que le contrat avait été adjugé à Valcom parce que sa note pour la « meilleure valeur » était plus élevée que celle de Calian. La « meilleure valeur » a été déterminée selon les procédures d’évaluation expliquées à l’annexe G de la DP; ces procédures tiennent compte des points techniques et du prix des soumissions.

22. TPSGC a demandé le remboursement des frais qu’il a engagés, si le Tribunal rejette la plainte pour des motifs de compétence ou après enquête sur le bien-fondé des allégations de Calian. Si la plainte est fondée en partie seulement, il a demandé que le remboursement des frais ne soit accordé à aucune partie.

Position de Calian

23. Calian a fait valoir que son opposition à TPSGC tout comme son dépôt subséquent de la plainte auprès du Tribunal respectaient le délai prévu à l’article 6 du Règlement.

24. Au sujet plus précisément de son opposition, Calian a soutenu que, lorsqu’elle avait communiqué avec TPSGC le 7 février 2006, celui-ci lui avait conseillé de communiquer avec le MDN à propos de ses allégations parce que la DP n’avait pas encore été diffusée et que TPSGC estimait donc qu’il s’agissait d’une question interne au MDN, à propos de laquelle il ne pouvait rien faire. Elle a dit que, pour cette raison, elle avait communiqué avec le MDN, mettant celui-ci au courant de ses préoccupations, et qu’elle avait envoyé au MDN la documentation relative aux activités de l’un des membres désignés des FC, maintenant la pièce 3 de sa plainte au Tribunal. Elle a fait valoir qu’elle avait formulé son opposition lors de ses conversations avec TPSGC les 7 et 8 février 2006, et au moment de faire parvenir l’information au MDN peu après. Elle a soutenu qu’elle avait donc présenté son opposition dans le délai prévu.

25. Calian a également soutenu que TPSGC avait tort de prétendre que sa lettre du 21 mars 2006 devrait être considérée comme un refus de la réparation qu’elle avait demandée. Elle a fait valoir que cette lettre ne pouvait pas raisonnablement être considérée comme un refus, parce que cette lettre ne fournissait ni explication des conclusions de TPSGC ou du MDN à propos du comportement de Valcom, ni réponse à la question de savoir si l’équité de la procédure de passation du marché public avait été compromise parce que Valcom était au courant de « renseignements d’initiés ». Elle a affirmé que la lettre du 10 avril 2006 de TPSGC devrait être considérée comme un refus par le gouvernement d’accorder la réparation demandée. Calian a soutenu que la plainte avait été déposée dans le délai prévu, puisqu’elle avait été déposée dans les 10 jours ouvrables suivant le 10 avril 2006.

26. Calian a soutenu que, d’après les instructions aux soumissionnaires figurant dans la DP, la CG 9676 s’appliquait à tout contrat résultant de la DP9 . Elle a prétendu que cette disposition devait être interprétée à l’aide de l’article 1 de la partie 1 de l’annexe D de la DP, lequel exige du soumissionnaire qu’il « [...] accepte l’ensemble des modalités et conditions figurant dans la présente DP et dans ses annexes [...] ». Elle a soutenu que, si l’argument de TPSGC à propos de l’applicabilité de la CG 9676 était accepté, un contrat pourrait être adjugé à une entité qui contrevient déjà, à la date de l’adjudication du contrat, aux dispositions de celui-ci. Elle a fait valoir qu’il serait dénué de sens d’adjuger un contrat à un soumissionnaire qui, à en juger par des gestes posés avant l’adjudication du contrat, ne pouvait pas respecter la CG 9676. Selon Calian, les circonstances de la présente plainte diffèrent de celles de SNC Technologies auxquelles TPSGC a fait référence, parce que la disposition en question dans cette affaire avait trait au remplacement du personnel après l’adjudication du contrat, alors que la présente affaire a trait à des problèmes qui se sont produits avant l’adjudication.

27. En ce qui concerne ses allégations portant sur le conflit d’intérêts, Calian a fait valoir que l’ensemble des obligations découlant des accords commerciaux exige que la passation de marchés publics soit effectuée de manière équitable, impartiale, non discriminatoire et transparente. Elle a soutenu que la passation du marché public n’avait pas respecté ces obligations. D’après Calian, le refus du MDN et de TPSGC de répondre à ses plaintes au sujet de ce qu’elle considérait comme des conflits d’intérêts évidents de la part de Valcom et des deux membres actifs des FC qui étaient employés par cette entreprise constitue un défaut d’une telle ampleur qu’il porte atteinte à l’intégrité et à l’efficacité du mécanisme d’adjudication. Elle a prétendu qu’il est difficile d’imaginer un conflit d’intérêts plus fondamental que celui qui existe en l’espèce : des membres actifs des FC nouent avec un fournisseur potentiel des relations qui amènent ces mêmes membres des FC à promouvoir activement la soumission et les capacités d’un fournisseur potentiel au détriment d’un autre.

28. Calian a soutenu qu’il n’est pas raisonnable de s’attendre à ce qu’elle ait des renseignements détaillés sur les activités de deux membres actifs des FC, mais maintient avoir été informée, par plus d’une partie, que les membres des FC en question essayaient activement de dissuader le personnel de travailler avec Calian.

29. Calian a soutenu qu’elle ne contestait pas le droit universel du personnel militaire d’avoir un emploi civil tout en travaillant à temps plein dans les FC. Elle a fait valoir que l’article 19.42 des Ordonnances et règlements royaux a été reproduit à la clause A9107T des CCUA et a été inclus dans la DP. Elle a prétendu que l’article 19.42 limite dans certaines circonstances le droit des membres des FC d’occuper un emploi civil. Selon Calian, ces circonstances se présentent lorsque, de l’avis du commandant du membre, l’emploi civil est ou sera vraisemblablement préjudiciable aux intérêts des FC ou jette ou jettera vraisemblablement du discrédit sur les FC. Calian a soutenu que l’article 19.42 n’aurait pas autorisé les membres à avoir un emploi civil dans la présente plainte.

30. Calian a soutenu que le fait que les membres désignés des FC avaient eu accès à de l’information lorsqu’ils s’acquittaient des fonctions officielles qui leur incombaient à propos du présent marché public, information à laquelle le public n’avait pas en général accès, représente un motif de préoccupation grave. Elle a prétendu que les membres désignés des FC avaient tiré sciemment parti de cette information, surtout en faisant l’examen préliminaire des curriculum vitæ pour un concurrent de Calian. Selon Calian, parce que les membres désignés des FC étaient en conflit d’intérêts, Valcom ne respectait donc pas les modalités de la DP et sa soumission aurait dû être réputée non conforme.

31. Calian a fait valoir que les refus du MDN et de TPSGC de reconnaître le conflit d’intérêts réel créé par les gestes posés par Valcom lorsque celle-ci avait utilisé des membres des FC appartenant à l’unité qui avait mis au point l’ÉT, ou de s’occuper de ce conflit, ont rendu l’application de la procédure d’appel d’offres discriminatoire. Elle a ajouté que le MDN et TPSGC avaient donc manqué à leur obligation d’assurer un accès égal à la procédure de passation du marché public, comme l’exigent les accords commerciaux.

32. En ce qui concerne son allégation de crainte raisonnable de partialité, Calian a fait valoir que le Tribunal avait déjà appliqué10 le critère de la « personne bien renseignée » de la façon suivante :

[À] quelle conclusion en arriverait une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique. Croirait-elle que, selon toute vraisemblance, [cette personne], consciemment ou non, ne rendra pas une décision juste11 ?

33. Calian a fait valoir qu’en l’espèce les faits soulèvent une crainte raisonnable de partialité. Elle a soutenu que cette conclusion est fondée sur la possibilité que les membres actifs des FC, agissant pour le compte d’un de ses concurrents, avaient influencé le résultat du marché public en raison de leur proximité au décideur et au processus de prise de décisions. Elle a soutenu que, en outre, la participation active des membres des FC au recrutement du personnel sur la base où le marché public était décidé fait vraiment craindre une influence indue. Elle a également soutenu que la décision du MDN et de TPSGC de ne pas intervenir après avoir reçu la plainte de Calian aggravait ces craintes.

ANALYSE DU TRIBUNAL

34. Aux termes du paragraphe 30.14(1) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal doit, dans son enquête, limiter son étude à l’objet de la plainte. À la conclusion de l’enquête, le Tribunal doit de plus déterminer la validité de la plainte en fonction des critères et procédures établis par règlement pour le contrat spécifique. L’article 11 du Règlement prévoit aussi que le Tribunal est tenu de déterminer si le marché a été passé conformément aux accords commerciaux applicables, qui, en l’espèce, sont l’Accord sur le commerce intérieur 12 , l’Accord de libre-échange nord-américain 13 et l’Accord sur les marchés publics 14 .

35. Le Tribunal se penchera d’abord sur la question de savoir si la plainte a été déposée dans le délai prévu. Parce que Calian a présenté une opposition à l’institution fédérale, le Tribunal analysera deux éléments distincts : 1) le respect du délai en ce qui concerne la présentation par Calian de son opposition à l’institution fédérale; 2) le respect du délai en ce qui a trait au dépôt de sa plainte.

Respect du délai en ce qui concerne la présentation de l’opposition de Calian

36. Les exigences relatives au délai pour déposer une plainte précédée d’une opposition se trouvent au paragraphe 6(2) du Règlement, qui prévoit ce qui suit :

Le fournisseur potentiel qui a présenté à l’institution fédérale concernée une opposition concernant le marché public visé par un contrat spécifique et à qui l’institution refuse réparation peut déposer une plainte auprès du Tribunal dans les 10 jours ouvrables suivant la date où il a pris connaissance, directement ou par déduction, du refus, s’il a présenté son opposition dans les 10 jours ouvrables suivant la date où il a découvert ou aurait dû vraisemblablement découvrir les faits à l’origine de l’opposition.

37. Le paragraphe 6(2) du Règlement prévoit que lorsqu’un fournisseur potentiel découvre ou aurait dû vraisemblablement découvrir les faits à l’origine de sa plainte et qu’il choisit de présenter une opposition, la première étape pour résoudre le problème consiste à signaler cette opposition à l’institution fédérale concernée. Si cette opposition est par la suite rejetée (ou si le fournisseur potentiel peut déduire que la réparation demandée est refusée), le plaignant dispose ensuite de 10 jours ouvrables à partir de la date à laquelle le refus a été exprimé (ou peut être déduit) pour déposer sa plainte auprès du Tribunal.

38. TPSGC a fait valoir que la plainte de Calian avait été déposée en retard parce que Calian n’avait pas présenté son opposition dans les 10 jours ouvrables après avoir découvert les motifs de sa plainte et parce que, de toute façon, elle avait déposé sa plainte auprès du Tribunal après le délai de 10 jours suivant le refus de la réparation qui avait été demandée.

39. Voici le déroulement des communications entre les parties préparé à partir des exposés des parties.

Date

Événement

7 février 2006

Calian a informé TPSGC qu’elle croyait Valcom en situation de conflit d’intérêts. Selon TPSGC, Calian ne voulait pas fournir de précisions et TPSGC lui avait dit de mettre ses remarques par écrit. D’après Calian, TPSGC lui avait dit de communiquer directement avec le MDN.

8 février 2006

Calian a parlé de nouveau de ces questions avec l’agent de négociation des contrats de TPSGC. Calian n’a pas fourni de précisions supplémentaires.

10 février 2006

L’avis de projet de marché a été affiché par l’intermédiaire du MERX.

28 février 2006

Le MDN a fait parvenir un courriel à l’agent de négociation des contrats de TPSGC l’informant que Calian avait appelé deux fois le personnel du MDN à la BFC Gagetown pour se plaindre des présumés conflits d’intérêts de la part de Valcom.

6 mars 2006 (reçue par courriel à TPSGC le 7 mars 2006)

Calian a écrit à l’agent de négociation des contrats de TPSGC, alléguant que Valcom employait comme personnel de recrutement deux membres actifs des FC qui dissuadaient les employés éventuels de travailler pour Calian et donnaient à Valcom accès à des renseignements auxquels les autres soumissionnaires n’avaient pas accès. Elle a dit avoir suivi les instructions de TPSGC et avoir transmis ces renseignements au MDN. Elle a demandé qu’il soit interdit à Valcom de présenter une soumission.

8 mars 2006

TPSGC a accusé réception de la lettre de Calian du 6 mars 2006.

21 mars 2006

TPSGC a écrit à Calian l’informant que le MDN avait mené une enquête sur la question et était convaincu qu’il ne semblait pas y avoir de conflit d’intérêts de la part de Valcom. Il a également conseillé à Calian de communiquer avec le MDN si elle avait des questions à ce propos.

23 mars 2006

Calian a écrit de nouveau à TPSGC, lui demandant des renseignements sur son rôle en ce qui avait trait à l’enquête et à d’autres questions relatives à son processus d’enquête, plus précisément à propos de la DP en cause, et de ses pratiques en général.

24 mars 2006

TPSGC a accusé réception de la lettre du 23 mars 2006 de Calian.

10 avril 2006

TPSGC a écrit à Calian l’informant que, en raison des conclusions tirées par le MDN, TPSGC n’avait pas l’intention de ne pas poursuivre l’enquête sur les allégations de Calian.

40. TPSGC a prétendu que Calian était devenue consciente des motifs de la plainte au plus tard à la date à laquelle elle avait formulé verbalement ses premières oppositions (les 7 et 8 février 2006). Il a également fait remarquer que près d’un mois s’était écoulé avant que Calian ne mette ses objections par écrit, dans sa lettre du 6 mars 2006. De l’avis de TPSGC, il s’est écoulé plus de temps entre les oppositions orales des 7 et 8 février 2006 et la lettre de Calian du 6 mars 2006 que ce qui est prévu au paragraphe 6(2) du Règlement. Calian a prétendu qu’elle avait suivi le conseil de TPSGC et avait présenté une opposition au MDN peu après avoir fait part de ses oppositions à TPSGC et qu’elle avait donc présenté son opposition dans le délai prévu dans le Règlement.

41. Le Tribunal est d’avis que, à proprement parler, ce que Calian a dit à TPSGC les 7 et 8 février 2006 ne peut pas être considéré comme une opposition à l’invitation, parce que l’invitation à soumissionner n’avait pas encore été diffusée à ces dates.

42. Le Tribunal doit néanmoins tenir compte du fait que Calian a allégué que, les 7 et 8 février 2006, TPSGC lui avait dit de communiquer ses craintes au MDN. Le RIF allègue que TPSGC a dit à Calian de mettre ses observations par écrit. Le Tribunal est d’avis que, bien que ces conversations aient eu lieu avant la diffusion de la DP, TPSGC savait, les 7 et 8 février 2006, que Calian formulait des allégations graves en ce qui concerne l’appartenance de certains membres des FC, qui n’étaient pas désignés, à l’équipe de Valcom.

43. Le Tribunal n’a aucune raison de douter de la parole de Calian, selon laquelle elle a présenté son opposition directement au MDN dans le délai prévu. Ce faisant, le Tribunal remarque que Calian a couru le risque d’être exclue pour avoir contrevenu à l’interdiction de communiquer avec quelqu’un d’autre que TPSGC que renferme la DP15 .

44. Le jour de la diffusion de la DP, soit le 10 février 2006, Calian connaissait les motifs de sa plainte, c’est-à-dire que la DP semblait autoriser le comportement auquel, selon elle, Valcom se livrait; Calian disposait donc de 10 jours ouvrables à partir de cette date, soit jusqu’au 24 février 2006, pour présenter son opposition au gouvernement. Le Tribunal est d’avis que selon le dossier c’est ce que Calian a fait.

45. Selon les éléments au dossier, le gouvernement était au courant des craintes de Calian dans le délai prévu après la diffusion de la DP. Dans un courriel daté du 28 février 2006, le lieutenant-commander McNeil témoigne que Calian a appelé le chef d’état-major (CEM) du CIC à la CFB Gagetown « deux fois maintenant pour se plaindre de Valcom »16 [traduction]. Ceci montre que des lignes de communications avaient été établies entre Calian et le MDN avant le 28 février 2006.

46. Le Tribunal est donc convaincu que Calian a communiqué son opposition au MDN au moins une fois pendant la période prévue au paragraphe 6(2) du Règlement, c’est-à-dire avant le 24 février 2006. La démarche effectuée auprès du MDN a été suscitée par la présumée réponse de TPSGC, selon laquelle celui-ci ne pouvait rien faire. En outre, le Tribunal croit que, pendant ce temps, Calian a présenté son opposition au gouvernement de façon suffisamment précise pour que celui-ci connaisse la nature de cette opposition.

47. Que TPSGC ait dit à Calian de communiquer ses craintes directement au MDN n’est pas d’une importance primordiale pour le Tribunal, pour les besoins de la présente enquête. Ce qui est pertinent, c’est le moment où Calian a fait part de ses craintes à TPSGC ou au MDN. Quelles aient été communiquées au premier ou au second n’est pas non plus très important pour le Tribunal.

48. En fait, le Tribunal est d’avis que, lorsque TPSGC passe un marché public au nom d’un ministère client, il agit comme agent de ce ministère. De ce fait, lorsqu’un fournisseur formule une opposition en s’adressant directement à TPSGC, cette opposition est signifiée au ministère client par l’intermédiaire de son agent. À l’inverse, si un fournisseur présente une opposition directement au responsable compétent de la procédure de passation du marché public au ministère client, le Tribunal est d’avis qu’une opposition valide a été présentée. Selon le Tribunal, comme c’est souvent le cas, la ligne de démarcation entre TPSGC et son ministère client est floue, même aux yeux des soumissionnaires les plus avertis. En l’espèce, depuis un certain temps déjà, TPSGC et le MDN agissaient ensemble, sinon comme une seule entité, aux yeux des fournisseurs ou, tout au moins, comme agent et partie principale, comme le montre la suite des événements et des consultations ayant mené à l’affichage de l’invitation à soumissionner sur MERX. Ce qui est important pour les fins du Tribunal, c’est que le fournisseur fasse connaître dans le délai prévu son opposition aux ministères concernés par une procédure donnée de passation d’un marché public.

Respect du délai en ce qui concerne le dépôt de la plainte de Calian

49. TPSGC a soutenu qu’il avait refusé à Calian la réparation qu’elle avait demandée le 21 mars 2006 et que, puisqu’elle n’avait déposé sa plainte auprès du Tribunal que le 25 avril 2006, cette plainte n’avait pas été déposée dans le délai prévu au paragraphe 6(2) du Règlement. Calian a prétendu que la lettre de TPSGC du 21 mars 2006 ne répondait pas aux questions soulevées dans son opposition et que, à la différence de la lettre de TPSGC du 10 avril 2006, n’informait pas Calian que TPSGC « ne poursuivrait pas l’enquête sur cette question » [traduction]. Calian a soutenu que la lettre de TPSGC du 10 avril 2006 constituait le « refus de réparation » prévu au paragraphe 6(2) et que sa plainte avait donc été déposée dans le délai prévu.

50. Le Tribunal estime qu’un fournisseur potentiel doit pouvoir déterminer de façon suffisamment claire qu’il a reçu une communication refusant la réparation qu’il avait demandée. En examinant les deux lettres de TPSGC en question (21 mars et 10 avril 2006), le Tribunal remarque que celle qui est datée du 21 mars 2006 disait simplement que « le MDN et non TPSGC est d’avis qu’il ne semble pas y avoir de conflit d’intérêts de la part de Valcom » [traduction]. Cette lettre conseillait de plus à M. Johnston de communiquer avec le lieutenant-commander McNeil, au MDN, « s’il avait des questions à ce sujet » [traduction]. Le Tribunal estime que l’invitation à communiquer directement avec le MDN donne du poids à l’allégation de Calian (dont il est question au paragraphe 24 ci-dessus) selon laquelle TPSGC lui avait dit les 7 et 8 février 2006 de communiquer directement avec le MDN. Quoiqu’il en soit, cette lettre, selon le Tribunal, informe Calian du résultat d’une enquête du MDN, et non de la décision de TPSGC à propos de l’opposition de Calian. Selon le Tribunal, cette distinction est cruciale, parce que cette lettre fait contraste avec la lettre antérieure de TPSGC, en date du 8 mars 2006, qui accuse réception de « questions très importantes qui nécessiteront un examen » [traduction] et assure M. Johnston que sa « lettre sera portée à l’attention du sous-ministre » [traduction].

51. Parce que la lettre du 21 mars 2006 de TPSGC ne donnait pas les résultats d’une enquête de TPSGC et ne semblait pas avoir été écrite au nom du sous-ministre de TPSGC, le Tribunal croit raisonnable l’interprétation de Calian, selon laquelle son opposition n’avait pas encore été refusée. C’est de toute évidence l’influence de cette interprétation qui a incité Calian à écrire à TPSGC de nouveau le 23 mars 2006. Le lendemain, TPSGC a accusé réception de la lettre de la journée précédente de Calian à propos de l’invitation à soumissionner et de ses « craintes de conflits d’intérêts connexes » [traduction] et a affirmé que TPSGC « examinait les craintes qui avaient été soulevées » [traduction]. Le Tribunal peut facilement comprendre comment cette lettre a contribué aux circonstances déjà décrites en laissant croire à Calian que TPSGC lui-même, et non le MDN cette fois-ci, faisait encore enquête à propos de son opposition, en particulier parce que cette lettre affirme de nouveau que la lettre de M. Johnston « sera portée à l’attention du sous-ministre » [traduction]. Après avoir obtenu ces assurances, M. Johnston semble toutefois avoir senti qu’il n’y aurait pas de réponse, tant et si bien qu’il a fait appel directement au sous-ministre de TPSGC par courriel le 7 avril 2006, pour demander quand il recevrait une réponse. Trois jours plus tard, dans une lettre en date du 10 avril 2006, le directeur régional de la région de l’Ontario, Approvisionnements et rémunération, a écrit à Calian et lui a signifié, de façon claire et appropriée, selon le Tribunal, le refus de l’institution fédérale de donner suite à son opposition, comme il est prévu à l’article 6 du Règlement.

52. Étant donné que la plainte de Calian a été déposée le 25 avril 2006, le Tribunal conclut donc qu’elle a été déposée dans le délai de 10 jours ouvrables17 .

Accords commerciaux

53. Les articles suivants des accords commerciaux s’appliquent à la présente enquête. Les paragraphes 504(1) et 504(2) de l’ACI prévoient un traitement réciproque non discriminatoire dans le cadre des activités de passation de marchés publics du gouvernement fédéral. Ils prévoient ce qui suit :

1. Sous réserve de l’article 404 (Objectifs légitimes), en ce qui concerne les mesures visées par le présent chapitre, chaque Partie accorde :

a) aux produits et aux services des autres Parties, y compris aux produits et services inclus dans les marchés de construction, un traitement non moins favorable que le meilleur traitement qu’elle accorde à ses propres produits et services;

b) aux fournisseurs de produits et de services des autres Parties, y compris aux produits et services inclus dans les marchés de construction, un traitement non moins favorable que le meilleur traitement qu’elle accorde à ses propres fournisseurs de tels produits et services.

2. Sous réserve de l’article 404 (Objectifs légitimes), le paragraphe 1 a pour effet d’interdire au gouvernement fédéral d’exercer de la discrimination :

a) entre les produits ou services d’une province ou d’une région, y compris entre ceux inclus dans les marchés de construction, et les produits ou services d’une autre province ou région;

b) entre les fournisseurs de tels produits ou services d’une province ou d’une région et les fournisseurs d’une autre province ou région.

54. L’article 1008 de l’ALÉNA prévoit aussi le traitement réciproque non discriminatoire. Il prévoit ce qui suit :

1. Chacune des Parties fera en sorte que les procédures de passation des marchés suivies par ses entités

a) soient appliquées de façon non discriminatoire, et

b) soient conformes au présent article et aux articles 1009 à 1016.

2. À cet égard, chacune des Parties fera en sorte que ses entités

a) ne communiquent pas à un fournisseur des renseignements se rapportant à tel ou tel marché, d’une manière qui aurait pour effet d’empêcher la concurrence, et

b) ouvrent à tous les fournisseurs le même accès aux renseignements concernant un marché, au cours de la période précédant la publication de tout avis ou de toute documentation relative à l’appel d’offres.

55. Enfin, l’article VII de l’AMP prévoit ce qui suit :

1. Chaque Partie fera en sorte que les procédures de passation des marchés suivies par ses entités soient appliquées de façon non discriminatoire et soient conformes aux dispositions des articles VII à XVI.

2. Les entités ne devront pas donner à un fournisseur des informations concernant un marché déterminé d’une manière qui aurait pour effet d’empêcher la concurrence.

[...]

56. Le Tribunal croit que les questions soulevées en l’espèce constituent une infraction à l’article 504 de l’ACI, à l’article 1008 de l’ALÉNA et à l’article VII de l’AMP.

57. Ces infractions viennent du fait que Valcom a embauché deux membres actifs désignés des FC, employés du MDN, ou a retenu leurs services, que Valcom a tenté activement d’obtenir un contrat du MDN et que les deux membres actifs désignés des FC ont fourni un service relié à la passation du marché. À eux seuls, ces faits créent une situation qui viole l’esprit des accords commerciaux et la lettre des articles susmentionnés.

58. Le Tribunal remarque que les deux membres actifs désignés des FC n’ont pas participé à l’évaluation des propositions. Par conséquent, il ne conclut pas que les circonstances entourant l’affaire ont donné naissance à une crainte raisonnable de partialité, en ce sens qu’elles auraient eu une influence sur le comité d’évaluation.

59. Cependant, de l’avis du Tribunal, il y a conflit d’intérêts, ou tout au moins il semble y avoir conflit d’intérêts, lorsque des membres actifs des FC nouent une relation avec un fournisseur potentiel du MDN, parce que ces membres des FC feront activement valoir la soumission et les capacités d’un fournisseur potentiel plutôt que celles des autres. Le Tribunal désire souligner que ce comportement peut aussi défavoriser le MDN. Ces activités, bien qu’elles semblent permises par les pratiques actuelles du MDN18 , ont donné à Valcom un avantage par rapport à Calian. C’est en ce sens que la pratique du MDN a contrevenu aux dispositions relatives à la non-discrimination des trois accords commerciaux. La présente conclusion est conforme à l’esprit et à l’objet de ces accords qui ont été, comme le Tribunal l’a affirmé à de nombreuses reprises19 , si judicieusement formulés à l’article 501 de l’ACI, qui prévoit ce qui suit : « [...] le présent chapitre vise à établir un cadre qui assurera à tous les fournisseurs canadiens un accès égal aux marchés publics, de manière à réduire les coûts d’achat et à favoriser l’établissement d’une économie vigoureuse, dans un contexte de transparence et d’efficience. »

60. Plus particulièrement, le Tribunal conclut que le conflit d’intérêts visant les membres désignés des FC, à lui seul, soulève des craintes à propos de l’information qu’ils ont pu fournir aux fournisseurs potentiels pour lesquels ils travaillaient et qu’ils n’auraient eu aucun intérêt à fournir à tous les autres fournisseurs potentiels. Pour ne citer qu’un exemple, la connaissance interne actualisée des régimes de formation pourrait permettre à un soumissionnaire de présenter une soumission indûment basse pour les portions de la proposition financière évaluées, tout en ajoutant des profits supplémentaires importants pour les portions de la proposition qui ne font pas l’objet de l’évaluation, mais qui sont plus susceptibles d’être commandés.

61. Le Tribunal n’accepte pas l’argument de TPSGC, selon lequel les membres des FC n’avaient pas accès à des renseignements qui auraient empêché la concurrence ou fourni un avantage concurrentiel injuste à Valcom. Le Tribunal croit plutôt que les conflits d’intérêts que les pratiques du MDN tolèrent et, plus particulièrement, le mécanisme du présent marché public ont suffi à corrompre la procédure de passation du marché. En fait, dans les documents fournis au Tribunal avec le RIF se trouvent des allégations selon lesquelles Calian elle-même s’est efforcée d’embaucher, et a censément embauché, ses propres « assistants internes ». Selon le Tribunal, il est impossible de considérer que cette deuxième faute éventuelle annule la première attribuée à Valcom, ni qu’elle a uniformisé les règles du jeu pour ces soumissionnaires, sans compter pour les autres membres du milieu des fournisseurs. Si ces allégations sont vraies, elles semblent plutôt donner d’autres preuves d’une culture qui autorise les soumissionnaires à embaucher des membres actifs des FC pour améliorer leurs chances de présenter la soumission retenue.

62. Le Tribunal estime que cette embauche, à elle seule, donne au moins une apparence de conflit d’intérêts qui aurait dû suffire à vicier la soumission retenue de Valcom. Il s’agissait d’un traitement discriminatoire, puisque Valcom a eu ou aurait pu avoir eu accès à des renseignements se rapportant au marché public auquel les autres fournisseurs potentiels n’avaient pas accès. Ce genre de résultat est expressément interdit par l’article 1008 de l’ALÉNA. Il est également interdit de façon implicite par les paragraphes 504(1) et 504(2) de l’ACI et par l’article VII de l’AMP, même si la formulation de ces dispositions n’est pas aussi précise que celle de l’article 1008 de l’ALÉNA. Il est évident pour le Tribunal que, en conséquence de ce mécanisme de passation des marchés, Calian a en fin de compte, dans les faits, eu droit à un traitement moins favorable que celui qu’a reçu Valcom, et c’est précisément ce que ces dispositions interdisent.

63. Les conflits d’intérêts ou l’apparence de conflits d’intérêts qui peuvent donner à certains fournisseurs potentiels un avantage par rapport à d’autres ne peuvent être tolérés dans un cadre visant à donner un accès égal à tous les fournisseurs. Le Tribunal conclut donc que la plainte est fondée.

64. Ayant tiré cette conclusion, le Tribunal reconnaît que les accords commerciaux n’interdisent pas expressément l’embauche par des fournisseurs d’anciens employés du gouvernement ou d’anciens membres des FC pour l’exécution d’un contrat. En fait, les dispositions de la DP disent clairement que ce genre d’emploi est envisagé et autorisé. Que ces pratiques constituent une infraction aux accords commerciaux n’est pas en cause dans la présente plainte.

Réparation

65. Ayant conclu que la plainte est fondée, le Tribunal doit maintenant recommander un moyen convenable de réparer le préjudice porté à Calian du fait des lacunes de la procédure de passation du marché public.

66. À ce sujet, la partie pertinente de l’article 30.15 de la Loi sur le TCCE prévoit ce qui suit :

(2) Sous réserve des règlements, le Tribunal peut, lorsqu’il donne gain de cause au plaignant, recommander que soient prises des mesures correctives, notamment les suivantes :

a) un nouvel appel d’offres;

b) la réévaluation des soumissions présentées;

c) la résiliation du contrat spécifique;

d) l’attribution du contrat spécifique au plaignant;

e) le versement d’une indemnité, dont il précise le montant, au plaignant.

(3) Dans sa décision, le Tribunal tient compte de tous les facteurs qui interviennent dans le marché de fournitures ou services visé par le contrat spécifique, notamment des suivants :

a) la gravité des irrégularités qu’il a constatées dans la procédure des marchés publics;

b) l’ampleur du préjudice causé au plaignant ou à tout autre intéressé;

c) l’ampleur du préjudice causé à l’intégrité ou à l’efficacité du mécanisme d’adjudication;

d) la bonne foi des parties;

e) le degré d’exécution du contrat.

(4) Le Tribunal peut, sous réserve des règlements, accorder au plaignant le remboursement des frais entraînés par la préparation d’une réponse à l’appel d’offres.

67. Le Tribunal estime que créer une situation d’inégalité entre les soumissions est une lacune grave dans la procédure de passation d’un marché public. Bien qu’aucun élément n’indique la mauvaise foi, cela ne diminue pas l’incidence que l’infraction a eue sur tous les fournisseurs sauf, en l’espèce, le soumissionnaire retenu. Le Tribunal est également conscient qu’il semble s’agir d’une pratique tolérée par le MDN et, jusqu’à maintenant, acceptée en grande partie par le milieu des fournisseurs. Par conséquent, le Tribunal a décidé de ne pas recommander la résiliation immédiate du contrat, mais plutôt que celui-ci ne soit pas prolongé pendant les années de renouvellement facultatif et que, si le MDN veut poursuivre le service pendant ces années-là, il doit avoir recours à une nouvelle procédure de passation de marché public.

Frais

68. Conformément à la Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure portant sur un marché public (la Ligne directrice), le Tribunal accorde à Calian le remboursement des frais raisonnables qu’elle a engagés pour la préparation et le traitement de la plainte.

69. La Ligne directrice fonde l’évaluation du degré de complexité d’une plainte sur trois critères : la complexité du marché public, la complexité de la plainte et la complexité de la procédure. La complexité du marché public était moyenne, en ce sens que le marché comprenait un projet de services définis, à commander au fur et à mesure des besoins. La complexité de la plainte était moyenne, puisque la question en litige n’était pas simple et pourrait avoir des répercussions graves sur la conduite de certaines pratiques au MDN. Enfin, la complexité de la procédure était faible, en ce sens qu’il n’y a pas eu de parties intervenantes ni de requêtes, qu’il n’a pas été nécessaire de tenir une audience publique et que le délai de 90 jours a été respecté. Selon l’avis provisoire du Tribunal, le degré de complexité global de la présente plainte correspond donc au degré moyen de complexité prévu à l’annexe A de la Ligne directrice (degré 2). Comme le prévoit la Ligne directrice, l’indication provisoire du montant de l’indemnisation donnée par le Tribunal est de 2 400 $. Le Tribunal se réserve la compétence de fixer le montant final de l’indemnisation.

DÉCISION DU TRIBUNAL

70. Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal détermine que la plainte est fondée.

71. Aux termes des paragraphes 30.15(2) et 30.15(3) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal recommande, à titre de mesure corrective, que TPSGC n’exerce pas l’option de renouvellement du contrat pour les deux périodes supplémentaires d’un an et, si le besoin existe toujours, qu’il lance plutôt une nouvelle invitation concurrentielle pour le besoin, en conformité avec les dispositions des accords commerciaux applicables.

72. Aux termes de l’article 30.16 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal accorde à Calian le remboursement des frais raisonnables qu’elle a engagés pour la préparation et le traitement de la plainte, ces frais devant être payés par TPSGC. L’indication provisoire du degré de complexité de la présente plainte donnée par le Tribunal est le degré 2, et l’indication provisoire du montant de l’indemnisation est de 2 400 $. Si l’une ou l’autre des parties n’est pas d’accord en ce qui a trait à l’indication provisoire du degré de complexité ou à l’indication provisoire du montant de l’indemnisation, elle peut présenter des observations auprès du Tribunal, en conformité avec la Ligne directrice. Le Tribunal se réserve la compétence de fixer le montant final de l’indemnisation.


1 . L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47 [Loi sur le TCCE].

2 . D.O.R.S./93-602 [Règlement].

3 . Plainte, onglet 4 à la p. 2.

4 . Cougar Aviation Ltd. c. Canada (Ministre des Travaux publics et Services gouvernementaux) (28 novembre 2000), A-421-99 (C.A.F.), para. 74.

5 . Plainte, onglet 5.

6 . Clause 28.

7 . Re plainte déposée par SNC Technologies Inc. (16 septembre 2005), PR-2005-010 (TCCE), para. 37 [SNC Technologies].

8 . Plainte, onglet 3.

9 . La clause 28 de la CG 9676 prévoit ce qui suit :

Conflits d’intérêts

L’entrepreneur convient qu’il s’agit d’une condition du contrat que toute personne qui ne se conforme pas aux dispositions du Code régissant la conduite des titulaires de charge publique en ce qui concerne les conflits d’intérêts et l’après-mandat, du Code de valeurs et d’éthique de la fonction publique, ou des Directives et ordonnances administratives de la Défense régissant les conflits d’intérêts et l’après-mandat, ne peut bénéficier directement du présent contrat.

10 . Re plainte déposée par CAE Inc. (7 septembre 2004), PR-2004-007 (TCCE); Re plainte déposée par Prudential Relocation Canada Ltd. (30 juillet 2003), PR-2002-070 (TCCE); Re plainte déposée par Med-Emerg International Inc. (15 juin 2005), PR-2004-050 (TCCE).

11 . [1978] 1 R.C.S. 369 à la p. 394.

12 . 18 juillet 1994, Gaz. C. 1995.I.1323, en ligne : Secrétariat du commerce intérieur <http://www.intrasec.mb.ca/index_fr/ait.htm> [ACI].

13 . Accord de libre-échange nord-américain entre le gouvernement du Canada, le gouvernement des États-Unis mexicains et le gouvernement des États-Unis d'Amérique, 17 décembre 1992, R.T.C. 1994, no 2 (entré en vigueur le 1er janvier 1994) [ALÉNA].

14 . 15 avril 1994, en ligne : Organisation mondiale du commerce <http://www.wto.org/french/docs_f/legal_f/final_f.htm> [AMP].

15 . DP à la p. 5.

16 . RIF confidentiel, pièce 6.

17 . Les 14 et 17 avril 2006, respectivement Vendredi saint et lundi de Pâques, n’étaient pas des « jours ouvrables » et ne sont donc pas inclus dans le calcul du délai.

18 . Clause A9107T (2005/06/10) des CCUA et article 19.42 des Ordonnances et règlements royaux.

19 . Re plainte déposée par Westcam Inc. (19 avril 1999), PR-98-039 (TCCE); Re plainte déposée par Entreprise Aérologique Rafale O Nord (23 mai 2006), PR-2005-054 (TCCE); Re plainte déposée par AT&T Canada Corp. (27 novembre 2000), PR-2000-024 (TCCE).