VALCOM CONSULTING GROUP INC.

Décisions


VALCOM CONSULTING GROUP INC.
c.
MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX
Dossier no PR-2007-007

Décision rendue
le mercredi 20 juin 2007

Décision sur les frais rendue
le lundi 25 juin 2007

Motifs rendus
le mardi 18 septembre 2007


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À une plainte déposée par Valcom Consulting Group Inc. aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47;

ET À LA SUITE D’une décision d’enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur;

ET À LA SUITE D’une audience tenue le 20 juin 2007 aux termes du paragraphe 105(1) des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur.

ENTRE

 

VALCOM CONSULTING GROUP INC.

Partie plaignante

ET

 

LE MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

Institution fédérale

DÉCISION DU TRIBUNAL

Bien-fondé de la plainte

(Prononcée à l’audience à Ottawa, Ontario, le mercredi 20 juin 2007)

Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte n’est pas fondée.

Frais

Aux termes de l’article 30.16 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur accorde au ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux le remboursement des frais raisonnables qu’il a engagés pour répondre à la plainte, ces frais devant être payés par Valcom Consulting Group Inc. L’indication provisoire du degré de complexité de la présente plainte donnée par le Tribunal canadien du commerce extérieur est entre les degrés 2 et 3, et l’indication provisoire du montant de l’indemnisation est de 3 250 $. Si l’une ou l’autre des parties n’est pas d’accord en ce qui a trait à l’indication provisoire du degré de complexité ou à l’indication provisoire du montant de l’indemnisation, elle peut déposer des observations auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur, en conformité avec la Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure de plainte portant sur un marché public. Le Tribunal canadien du commerce extérieur se réserve la compétence de fixer le montant final de l’indemnisation.

Ellen Fry
Ellen Fry
Membre présidant

Serge Fréchette
Serge Fréchette
Membre

Zdenek Kvarda
Zdenek Kvarda
Membre

Hélène Nadeau
Hélène Nadeau
Secrétaire

L’exposé des motifs suivra à une date ultérieure.

Lieu de l’audience :

Ottawa (Ontario)

Date de l’audience :

Le 20 juin 2007

   

Membres du Tribunal :

Ellen Fry, membre présidant

 

Serge Fréchette, membre

 

Zdenek Kvarda, membre

   

Directeur :

Randolph W. Heggart

   

Enquêteur principal :

Cathy Turner

   

Conseiller juridique pour le Tribunal :

Alain Xatruch

   

Agent du greffe :

Marija Renic

   

Partie plaignante :

Valcom Consulting Group Inc.

   

Conseillers juridiques pour la partie plaignante :

Paul Lalonde

 

Martha L. Harrison

 

Judith Parisien

 

Rajeev Sharma

   

Partie intervenante :

Calian Ltd.

   

Conseillers juridiques pour la partie intervenante :

Justine Whitehead

 

Nicholas P. McHaffie

   

Institution fédérale :

Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux

   

Conseillers juridiques pour l’institution fédérale :

Christianne M. Laizner

 

Susan D. Clarke

 

Ian McLeod

Veuillez adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

PLAINTE

1. Le 16 avril 2007, Valcom Consulting Group Inc. (Valcom) a déposé une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur 1 à l’égard d’un marché public (invitation no W0114-060900/A) du ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (TPSGC) au nom du ministère de la Défense nationale (MDN) portant sur la prestation au personnel militaire d’une formation en conduite de véhicules à roues.

2. Valcom a allégué que la procédure de passation du marché public avait été compromise par des conflits d’intérêts et par l’existence d’une crainte raisonnable de partialité à la fois de la part de l’autorité contractante (TPSGC) et de l’autorité technique (MDN).

3. Valcom a demandé, à titre de mesure corrective, que le Tribunal recommande que TPSGC mette fin au contrat avec Calian Ltd. (Calian) et qu’il décerne le contrat à Valcom. À titre subsidiaire, Valcom a demandé que le Tribunal recommande que TPSGC l’indemnise pour les bénéfices qu’elle aurait reçus aux termes du contrat. Également à titre subsidiaire, Valcom a demandé que le Tribunal recommande que TPSGC recommence l’appel d’offres et confie la proposition à une nouvelle équipe l’évaluation. Valcom a aussi demandé le remboursement des frais qu’elle avait engagés pour la préparation et le traitement de la plainte et pour la préparation de sa soumission.

4. Le 25 avril 2007, le Tribunal a avisé les parties qu’il avait décidé d’enquêter sur la plainte, puisque cette dernière répondait aux exigences du paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE et aux conditions énoncées au paragraphe 7(1) du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics 2 .

5. Le 27 avril 2007, TPSGC a avisé le Tribunal qu’un contrat avait été attribué à Calian. Le 14 mai 2007, le Tribunal a autorisé Calian à intervenir dans l’affaire. Le 22 mai 2007, TPSGC a déposé auprès du Tribunal un rapport de l’institution fédérale (RIF) en application de l’article 103 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur 3 . Le 1er juin 2007, Valcom et Calian ont toutes deux déposé leurs observations sur le RIF. Le 7 juin 2007, Valcom a déposé ses observations sur l’exposé de Calian.

6. Le 11 juin 2007, le Tribunal a informé les parties qu’il tiendrait une audience concernant tous les liens possibles entre M. Frank Delanghe, M. Lorne Mitton, le MDN, TPSGC, Co Tal Co Inc. (Co Tal Co), Calian et Valcom. L’audience a eu lieu le 20 juin 2007. Le Tribunal s’est prononcé séance tenante sur le bien-fondé de la plainte en indiquant que ses motifs et sa décision sur les frais seraient rendus à une date ultérieure.

PROCÉDURE DE PASSATION DU MARCHÉ PUBLIC

7. Le 22 janvier 2007, TPSGC a publié une demande de propositions (DP) portant sur la prestation au personnel militaire d’une formation en conduite de véhicules à roues. La date de clôture des soumissions était fixée au 5 mars 2007. TPSGC a indiqué qu’il avait reçu trois propositions à la suite de la DP. Selon TPSGC, l’évaluation technique a eu lieu entre le 12 et le 16 mars 2007. Les propositions présentées par Valcom et Calian ont toutes deux été jugées conformes. Le 23 mars 2007, TPSGC a informé Valcom qu’il avait adjugé un contrat à Calian.

8. Valcom a allégué avoir reçu le 3 avril 2007 des renseignements selon lesquels la procédure de passation du marché public avait été compromise à l’étape de la préparation des soumissions. Le 9 avril 2007, Valcom a présenté une opposition à TPSGC au sujet de l’adjudication du contrat. Le 16 avril 2007, Valcom a déposé sa plainte auprès du Tribunal.

ANALYSE DU TRIBUNAL

9. Aux termes du paragraphe 30.14(1) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal doit, dans son enquête, limiter son étude à l’objet de la plainte. En outre, à la fin de l’enquête, le Tribunal doit déterminer la validité de la plainte en fonction des critères et procédures établis par règlement pour le contrat spécifique. De plus, l’article 11 du Règlement prévoit que le Tribunal doit déterminer si le marché public a été passé conformément aux accords commerciaux pertinents, qui sont, en l’espèce, l’Accord sur le commerce intérieur 4 , l’Accord de libre-échange nord-américain 5 et l’Accord sur les marchés publics 6 .

10. Valcom a prétendu que les deux personnes clés responsables de l’invitation avaient compromis le processus de soumission à cause d’un conflit d’intérêts réel ou apparent et d’une crainte raisonnable de partialité. Valcom a fait valoir que ce conflit d’intérêts et cette crainte raisonnable de partialité pourraient avoir donné lieu à un traitement inapproprié des questions soulevées par Valcom pendant le processus de soumission, à un traitement inapproprié des renseignements soumis par Valcom, à une influence indue sur les barèmes de prix et à l’omission de la part de la Couronne de disqualifier Calian à titre de soumissionnaire non conforme du fait que celle-ci n’avait pas divulgué le conflit d’intérêts.

11. Si les allégations de Valcom s’avéraient fondées, il pourrait y avoir violation des dispositions portant sur la non-discrimination énoncées dans les accords commerciaux.

12. Dans Prudential Relocation Canada Ltd. 7 , le Tribunal a établi le test pour analyser une allégation de crainte raisonnable de partialité :

[...]

Dans Cougar Aviation Ltd. c. Canada, la Cour d’appel fédérale a conclu que, aux termes de l’ACI, la compétence du Tribunal pour statuer sur une plainte n’était pas limitée aux plaintes de partialité réelle, mais incluait celles portant sur des allégations de crainte raisonnable de partialité. Le critère appliqué par le Tribunal pour déterminer si les circonstances de l’espèce donnaient lieu à une crainte raisonnable de partialité est le critère énoncé par le juge de Grandpré, dans son opinion dissidente dans Committee for Justice and Liberty c. Office national de l’énergie, qui était confirmé par la Cour suprême du Canada dans Bell Canada c. Association canadienne des employés de téléphone, laquelle opinion dissidente stipulait ce qui suit :

[À] quelle conclusion en arriverait une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique[?] Croirait-elle que, selon toute vraisemblance, [cette personne], consciemment ou non, ne rendra pas une décision juste?

[...]

[Renvois omis]

13. Par conséquent, le Tribunal examinera les liens pertinents entre les deux personnes clés et leur participation à la procédure de passation du marché public afin de déterminer si une personne renseignée, qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique, conclurait que la probabilité que les décideurs dans la procédure de passation du marché public ne rendraient pas une décision juste était plus grande que la probabilité du contraire.

Consultant contractuel — M. Delanghe

14. À l’audience, le Tribunal a appris que, entre le 10 octobre 2006 et le 7 avril 2007, M. Delanghe avait travaillé sous contrat pour Co Tal Co qui, à son tour, était un sous-traitant de DAMA Consulting Services Limited (DAMA)8 . M. Delanghe a agi à titre de coordonnateur général de projet pour l’invitation et a participé à la préparation de la DP et à tout le processus d’appel d’offres. Les éléments de preuve présentés n’indiquaient pas si M. Delanghe avait participé d’une façon ou d’une autre au processus d’évaluation.

15. Valcom a allégué que M. Delanghe était en conflit d’intérêts à cause de son emploi chez Co Tal Co qui, à son tour, avait un intérêt dans le succès de Calian, un concurrent de Valcom, et que M. Delanghe avait donc un intérêt dans le succès de Co Tal Co et un intérêt dans le succès de Calian.

16. Valcom a allégué que, dans le cadre de ses fonctions, M. Delanghe aurait participé au processus de questions et réponses pendant la période d’invitation et qu’il avait vraisemblablement participé à l’élaboration des réponses aux questions des soumissionnaires. Valcom a prétendu que la question et réponse no 11, qui se reflète dans la modification no 004, et les questions et réponses nos 3, 4 et 5, qui se reflètent dans la modification no 0069 , donnent raisonnablement à croire que le conflit d’intérêts a influé sur les décisions prises au cours du processus d’invitation.

17. Valcom a allégué que l’une des exigences fondamentales de l’invitation précédente (pour laquelle Valcom avait assuré le service) stipulait que les soumissionnaires devaient présenter le curriculum vitæ des personnes chargées de la formation. Selon Valcom, cette exigence servait à démontrer qu’une entreprise avait les ressources qualifiées nécessaires à l’exécution du travail. Dans les circonstances, Valcom a allégué qu’il serait hautement douteux que la Couronne demande au départ une telle preuve de capacité dans l’invitation précédente mais qu’elle l’exclut dans l’invitation subséquente. Dans le contexte du processus de questions et réponses pour l’invitation en l’espèce, Valcom a demandé pourquoi cette exigence avait été supprimée puisqu’elle donnait à Calian l’avantage de présenter une capacité hypothétique sans avoir à démontrer qu’elle avait effectivement accès à du personnel qualifié.

Consultant technique — M. Mitton

18. À l’audience, le Tribunal a appris que M. Mitton avait fourni un soutien technique aux fins de l’invitation, aux termes d’un contrat passé avec la Couronne, mais qu’il n’avait pas participé à titre d’évaluateur au processus d’évaluation des soumissions. M. Mitton a rédigé l’énoncé de travail pour la DP en l’espèce, qui était en grande partie une mise à jour d’un précédent énoncé de travail, et il a aussi aidé à répondre aux questions techniques posées par les soumissionnaires pendant le processus d’appel d’offres.

19. Valcom a allégué que, pour l’invitation en l’espèce, les soumissionnaires devaient établir une table de prix unitaires s’appliquant à des modules de formation pour divers véhicules. Cependant, les évaluations ne reposaient pas sur une analyse globale de tous les éléments de cette table. Seuls certains éléments choisis de cette table seraient pris en considération pour l’évaluation financière de la proposition. D’autres éléments, bien qu’ils n’aient pas été évalués dans l’analyse financière de la soumission, feraient partie du contrat éventuel. Même si les soumissionnaires savaient quels éléments seraient sélectionnés aux fins de l’évaluation, l’information stratégique clé, comme l’attribution et le choix réels des cours par le MDN, n’était pas connue des soumissionnaires. Valcom a allégué que, ayant déjà été un entrepreneur auprès du MDN, il savait que le MDN fonctionne généralement à l’aide d’un plan annuel et que, si un soumissionnaire avait eu accès à un tel plan, il y aurait eu des répercussions importantes sur la stratégie du soumissionnaire, notamment, il aurait su pour quels services les prix offerts devaient être plus bas afin de remporter le contrat et pour quels services les prix offerts auraient pu être plus hauts afin que le contrat soit financièrement viable.

20. Valcom a prétendu que, à titre de membres de l’équipe de l’invitation, MM. Mitton et Delanghe connaissaient des renseignements comme le plan annuel d’attribution des cours du MDN et que, compte tenu de leurs liens avec Co Tal Co et Calian, il était également raisonnable de conclure qu’ils avaient un intérêt à transmettre cette information à Calian.

21. TPSGC a prétendu que, en ce qui concerne le plan de cours annuel du MDN, Valcom, en tant que fournisseur attitré des services, avait un avantage naturel par rapport aux soumissionnaires non attitrés parce qu’elle était en mesure d’évaluer l’attribution et le choix des cours à venir.

22. Valcom a prétendu avoir appris pendant le processus d’invitation que des exemplaires de son contrat courant passé avec la Couronne avaient été mis à la disposition d’employés à l’extérieur du bureau de l’autorité technique. Valcom a aussi allégué que, du fait que la Couronne n’avait pas correctement protégé cette information et, compte tenu de l’information que Valcom avait reçue au sujet de MM. Delanghe et Mitton et de leur étroite affiliation avec Co Tal Co et Calian, il était raisonnable de croire que les données délicates sur les prix de Valcom ont pu être fournies à Calian, donnant ainsi à celle-ci un avantage important et indu dans le processus de soumission en l’espèce. Toutefois, Valcom n’a présenté aucune preuve à l’appui de ces allégations.

23. TPSGC a prétendu n’avoir eu aucunement connaissance que les données sur les prix de Valcom avaient été divulguées de façon inappropriée. Elle a aussi fait valoir que le prix total évalué d’un contrat est public dans toutes les invitations.

24. Valcom a prétendu que des renseignements délicats sur les prix avaient dû être discutés entre l’utilisateur final et M. Mitton en faisant référence à de la correspondance jointe à son exposé 10 .

25. Calian a fait valoir qu’elle n’avait pas eu accès aux données confidentielles sur les prix de Valcom, directement ou non.

26. Valcom a allégué l’existence d’un conflit d’intérêts et d’une crainte raisonnable de partialité par rapport à M. Mitton parce que Co Tal Co a aidé à préparer la proposition que M. Mitton a présenté en réponse à une invitation pour un poste de gestionnaire de projet très peu de temps après la fermeture de la DP en l’espèce et que, par conséquent, M. Mitton entretient des liens constants avec Co Tal Co ou a une dette de gratitude envers elle. De plus, M. Mitton a indiqué que, au cours du processus d’invitation en l’espèce, il a discuté du concours pour le poste de gestionnaire de projet avec M. Delanghe, puisqu’il lui avait demandé comment les choses se déroulaient quant à son contrat11 . Valcom prétend que Co Tal Co a un intérêt dans le succès de Calian et que, par conséquent, les liens de M. Mitton avec Co Tal Co signifient que M. Mitton a un intérêt dans le succès de Calian.

27. TPSGC a fait valoir que M. Mitton n’était pas familier avec le processus de rédaction de propositions ni avec le processus de présentation d’une réponse à un concours et que, par conséquent, il s’est renseigné sur plusieurs organisations, dont DAMA et Co Tal Co, susceptibles de l’aider. Selon TPSGC, M. Mitton a choisi Co Tal Co puisqu’il connaissait déjà le président de Co Tal Co.

Liens entre Co Tal Co et Calian

28. Aucune des parties n’a fait valoir que Co Tal Co était un soumissionnaire éventuel de l’invitation en l’espèce. Pour cette raison, tous liens entre M. Delanghe ou M. Mitton et Co Tal Co ne seraient pertinents que s’il y avait aussi des liens pertinents entre Co Tal Co et Calian, le soumissionnaire retenu. Les éléments de preuve ont indiqué que les deux sociétés, Co Tal Co et Calian, estimaient entretenir l’une envers l’autre de bonnes relations d’affaires. Cependant, les éléments de preuve indiquent que, de 2002 à 2005, Co Tal Co et Calian n’ont entretenu des relations d’affaires que pour trois projets : Co Tal Co a servi deux fois de fournisseur à Calian, pour une facture totale de 285 000 $, et Calian a servi une fois de fournisseur à Co Tal Co, pour une facture totale de 125 000 $. Il s’agit de montants infimes par rapport au chiffre d’affaires de Calian12 . Le Tribunal observe que le dernier contrat entre Co Tal Co et Calian était en vigueur de janvier à mars 2005 et a donné lieu à des revenus approximatifs de 8 800 $, la part de Co Tal Co représentant 880 $, soit 10 p. 100.

29. Calian ne considère pas Co Tal Co comme l’un de ses plus importants partenaires commerciaux. Cependant, M. Charles MacDonald, gestionnaire des contrats chez Calian pour la région de Kingston, considère que Co Tal Co a un peu plus d’importance pour Calian que ne le laissent entendre les revenus susmentionnés, en raison de l’utilité de M. Gerry Coady13 à fournir des renseignements commerciaux sur la région de Kingston14 .

30. Le Tribunal a appris que Co Tal Co avait à l’occasion dirigé des fournisseurs potentiels vers Calian, comme d’ailleurs vers d’autres entreprises. Près de 60 p. 100 du chiffre d’affaires de Co Tal Co provient du gouvernement et d’institutions; le reste provient d’entreprises privées comme Calian. Même si Co Tal Co n’a pas passé de contrat avec Valcom, elle a à l’occasion dirigé des ressources vers Valcom15 . Valcom a allégué que, dans au moins un cas, M. MacDonald, un employé de Calian, avait aussi agi au nom de Co Tal Co. Cependant, selon le Tribunal, les éléments de preuve16 n’ont pas appuyé cette allégation.

31. Par conséquent, le Tribunal ne croit pas, par l’examen des éléments de preuve, qu’il y avait, pendant la période pertinente, entre Co Tal Co et Calian des liens si étroits que Co Tal Co aurait eu ou aurait été susceptible d’avoir un intérêt particulier dans le succès de Calian, ou qui aurait permis à une personne renseignée de conclure que Co Tal Co avait vraisemblablement un intérêt particulier dans le succès de Calian.

Liens entre M. Delanghe et Co Tal Co ou Calian

32. M. Delanghe n’a entretenu aucunes relations d’affaires avec Calian. Il a déclaré ne posséder aucune action de Calian ni de Co Tal Co. M. Delanghe a commencé à travailler pour Co Tal Co et DAMA en octobre 2006, comme il l’a indiqué précédemment. Il a rencontré pour la première fois M. Coady, de Co Tal Co, à l’automne 2006. Selon M. Delanghe, celui-ci est inscrit comme une ressource potentielle auprès de deux autres entreprises, en plus de Co Tal Co. M. Delanghe a été rémunéré par Co Tal Co pour son travail à l’égard de l’invitation en l’espèce et il a rencontré M. Coady environ deux fois par mois pour présenter un rapport et prendre son chèque de paye.

33. Le Tribunal a appris que M. Delanghe n’est pas financièrement obligé de travailler. Il a indiqué qu’il prévoyait prendre des vacances tout l’été et qu’un travail non lié à Co Tal Co, Calian ou DAMA l’attendait à l’automne.

34. Par conséquent, le Tribunal n’estime pas que les éléments de preuve indiquent qu’il existe entre M. Delanghe et Co Tal Co ou Calian des liens d’une étroitesse telle qu’une personne renseignée serait portée à conclure que M. Delanghe avait ou était susceptible d’avoir un intérêt particulier dans le succès de Co Tal Co ou de Calian.

Liens entre M. Mitton et Co Tal Co ou Calian

35. M. Mitton a déclaré ne posséder aucune action dans Calian ou Co Tal Co et n’entretenir aucuns liens avec DAMA. M. Mitton a dit avoir rencontré M. Coady, de Co Tal Co, brièvement entre 1978 et 1982. Il a eu un contrat de courte durée avec Calian à la fin de 2002, de septembre jusqu’au début de 2003. Le Tribunal a appris que M. Mitton avait reçu de petites sommes de Calian pour du travail exécuté dans un passé relativement récent, à savoir 3 600 $ en 2002 et 500 $ en 2005.

36. La première communication d’affaires de M. Mitton avec Co Tal Co est survenue après l’adjudication du contrat dans le cadre de l’invitation en l’espèce, c’est-à-dire à la fin de mars ou au début d’avril 2007. Dans son témoignage, M. Delanghe a indiqué avoir mentionné à M. Mitton que Co Tal Co pourrait l’aider à rédiger les documents aux fins du concours pour le poste de gestionnaire de projet qui allait avoir lieu. M. Mitton travaille actuellement par l’entremise de Co Tal Co.

37. Par conséquent, le Tribunal n’estime pas que les éléments de preuve indiquent qu’il existe entre M. Mitton et Co Tal Co ou Calian des liens d’une étroitesse telle qu’une personne renseignée serait portée à conclure que M. Mitton avait ou était susceptible d’avoir un intérêt particulier dans le succès de Co Tal Co ou de Calian.

Conclusion

38. Compte tenu de ses conclusions précédentes au sujet des liens qui existaient entre l’une ou l’autre ou la totalité des parties suivantes, à savoir M. Delanghe, M. Mitton, Co Tal Co. et Calian, le Tribunal n’est pas en mesure de conclure que, dans les circonstances, la participation de MM. Delanghe et Mitton dans la procédure de passation du marché public en l’espèce a donné lieu à une crainte raisonnable de partialité.

39. À la lumière de ce qui précède, le Tribunal détermine que la plainte n’est pas fondée.

Frais

40. Le Tribunal accorde à TPSGC le remboursement des frais raisonnables qu’il a engagés pour répondre à la plainte. Dans la détermination du montant des frais qu’il accorde à cette plainte, le Tribunal a tenu compte de sa Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure portant sur un marché public (la Ligne directrice), qui fonde l’évaluation du degré de complexité d’une plainte sur trois critères : la complexité du marché public, la complexité de la plainte et la complexité de la procédure. L’indication provisoire du degré de complexité de la présente plainte donnée par le Tribunal se situe entre les degrés 2 et 3, comme le prévoit l’annexe A de la Ligne directrice. Le marché public était simple puisqu’il concernait la fourniture de services d’instruction pour le MDN. La complexité de la plainte était moyenne en ce sens qu’elle portait sur des conflits d’intérêts concernant deux personnes. La complexité de la procédure était complexe en ce sens qu’il y a eu de multiples exposés de la part des parties et d’une partie intervenante, et le Tribunal a tenu une audience. Par conséquent, comme le prévoit la Ligne directrice, l’indication provisoire donnée par le Tribunal eu égard au montant de l’indemnisation est de 3 250 $.

DÉCISION DU TRIBUNAL

41. Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal détermine que la plainte n’est pas fondée.

42. Aux termes de l’article 30.16 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal accorde à TPSGC le remboursement des frais raisonnables qu’il a engagés pour répondre à la plainte, ces frais devant être payés par Valcom. L’indication provisoire du degré de complexité de la présente plainte donnée par le Tribunal est entre les degrés 2 et 3, et l’indication provisoire du montant de l’indemnisation est de 3 250 $. Si l’une ou l’autre des parties n’est pas d’accord en ce qui a trait à l’indication provisoire du degré de complexité ou à l’indication provisoire du montant de l’indemnisation, elle peut déposer des observations auprès du Tribunal, en conformité avec la Ligne directrice. Le Tribunal se réserve la compétence de fixer le montant final de l’indemnisation.


1 . L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47 [Loi sur le TCCE].

2 . D.O.R.S./93-602 [Règlement].

3 . D.O.R.S./91-499.

4 . 18 juillet 1994, Gaz. C. 1995.I.1323, en ligne : Secrétariat du commerce intérieur <http://www.ait-aci.ca/index_fr/ait.htm> [ACI].

5 . Accord de libre-échange nord-américain entre le gouvernement du Canada, le gouvernement des États-Unis d’Amérique et le gouvernement des États-Unis du Mexique, 17 décembre 1992, R.T.C. 1994, no 2 (entré en vigueur le 1er janvier 1994) [ALÉNA].

6 . 15 avril 1994, en ligne : Organisation mondiale du commerce <http://www.wto.org/french/docs_f/legal_f/final_f.htm>.

7 . Re plainte déposée par Prudential Relocation Canada Ltd. (30 juillet 2003), PR-2002-070 (TCCE), à la p. 13.

8 . Exposé de TPSGC en date du 15 juin 2007, onglet 3.

9 . Plainte, pièce 1.

10 . Observations confidentielles sur le RIF, pièce 4.

11 . Transcription de l’audience publique, 20 juin 2007, à la p. 144.

12 . Transcription de l’audience à huis clos, 20 juin 2007, aux p. 1, 2.

13 . M. Coady est président de Co Tal Co.

14 . Transcription de l’audience publique, 20 juin 2007, à la p. 209.

15 . Transcription de l’audience publique, 20 juin 2007, à la p. 80.

16 . Courrier électronique et pièce jointe publics, présentés à l’audience le 20 juin 2007, de M. Nicholas P. McHaffie, conseiller juridique pour Calian.