144314 CANADA INC./NEXYS

Décisions


144314 CANADA INC./NEXYS
c.
MINISTÈRE DES RESSOURCES HUMAINES ET DU DÉVELOPPEMENT SOCIAL
Dossier no PR-2008-011

Décision et motifs rendus
le jeudi 24 juillet 2008


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À une plainte déposée par 144314 Canada Inc./Nexys aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47;

ET À LA SUITE D’une décision d’enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

ENTRE

 

144314 CANADA INC./NEXYS

Partie plaignante

ET

 

LE MINISTÈRE DES RESSOURCES HUMAINES ET DU DÉVELOPPEMENT SOCIAL

Institution fédérale

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte est fondée.

Aux termes des paragraphes 30.15(2) et 30.15(3) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur recommande, à titre de mesure corrective, que le ministère des Ressources humaines et du Développement social, dans les 30 jours de la date de publication de la présente décision, fasse réévaluer la proposition présentée par 144314 Canada Inc./Nexys selon la méthode d’évaluation des critères pondérés, et s’il y a possibilité, par l’équipe d’évaluation initiale. Le Tribunal canadien du commerce extérieur recommande en outre que, aux termes du plan d’évaluation concernant l’exigence obligatoire O-3, on considère que 144314 Canada Inc./Nexys a fourni une preuve suffisante qu’elle était en affaires avant janvier 2002.

S’il s’avère que la proposition de 144314 Canada Inc./Nexys est l’une des trois propositions gagnantes, le Tribunal canadien du commerce extérieur recommande que le ministère des Ressources humaines et du Développement social soit accorde un contrat à 144314 Canada Inc./Nexys soit lui accorde une indemnisation en reconnaissance des profits qu’elle a perdus en étant privée du contrat. Le calcul des profits perdus sera fondé sur le prix proposé par 144314 Canada Inc./Nexys dans la proposition qu’elle a présentée en réponse à l’invitation no 9606-07-0007. Le cas échéant, le Tribunal canadien du commerce extérieur recommande que les parties élaborent une proposition conjointe d’indemnisation afin de la lui présenter dans les 60 jours suivant la publication de la présente décision. Si les parties sont incapables de s’entendre sur le montant de l’indemnisation, elles devront séparément faire rapport au Tribunal canadien du commerce extérieur dans le même délai de 60 jours, après quoi le Tribunal canadien du commerce extérieur rendra sa recommandation à cet égard.

Si, à la suite de l’évaluation, la proposition de 144314 Canada Inc./Nexys n’obtient pas la note de passage requise, le Tribunal canadien du commerce extérieur recommande également que, sur demande, le ministère des Ressources humaines et du Développement social communique à 144314 Canada Inc./Nexys des renseignements pertinents concernant les raisons du rejet.

Aux termes de l’article 30.16 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur accorde à 144314 Canada Inc./Nexys le remboursement des frais raisonnables qu’elle a engagés pour la préparation et le traitement de la plainte, ces frais devant être payés par le ministère des Ressources humaines et du Développement social. L’indication provisoire du degré de complexité de la présente plainte donnée par le Tribunal canadien du commerce extérieur est le degré 1, et l’indication provisoire du montant de l’indemnisation est de 1 000 $. Si l’une ou l’autre des parties n’est pas d’accord en ce qui a trait à l’indication provisoire du degré de complexité ou à l’indication provisoire du montant de l’indemnisation, elle peut déposer des observations auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur, en conformité avec la Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure de plainte portant sur un marché public. Le Tribunal canadien du commerce extérieur se réserve la compétence de fixer le montant final de l’indemnisation.

Diane Vincent
Diane Vincent
Membre présidant

Rose Ritcey
Rose Ritcey
Secrétaire intérimaire

Membre du Tribunal :

Diane Vincent, membre présidant

   

Directeur :

Randolph W. Heggart

   

Gestionnaire de l’enquête :

Michael W. Morden

   

Enquêteur :

Josée B. Leblanc

   

Conseiller juridique pour le Tribunal :

Reagan Walker

   

Partie plaignante :

144314 Canada Inc./Nexys

   

Conseiller pour la partie plaignante :

Marc Letremble

   

Institution fédérale :

Ministère des Ressources humaines et du Développement social

   

Conseiller juridique pour l’institution fédérale :

Bernard Letarte

Veuillez adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

1. Le 25 avril 2008, 144314 Canada Inc./Nexys (Nexys) a déposé une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur 1 . La plainte portait sur le marché public (invitation no 9606-07-0007) passé par le ministère des Ressources humaines et du Développement social (RHDSC) en vue de la prestation de services de traduction et de révision dans les deux langues officielles.

2. Nexys a allégué que RHDSC a incorrectement rejeté sa proposition avant l’étape de l’examen des critères pondérés. Précisément, Nexys a allégué que sa proposition renfermait l’information demandée concernant la date de la création de la compagnie alors que RHDSC a dit avoir requis un document de preuve à cet égard et que Nexys a omis de l’inclure dans sa proposition, ce qui a conduit au rejet de sa proposition.

3. À titre de mesure corrective, Nexys a demandé que RHDSC réévalue sa proposition en fonction des critères pondérés, qu’il reprenne les évaluations des soumissionnaires et qu’il résilie au besoin les contrats attribués. S’il y a lieu, Nexys a demandé qu’une nouvelle demande de propositions (DP) soit publiée ou qu’une indemnité lui soit versée. Elle a demandé le remboursement des frais liés à la plainte et à la préparation de sa proposition. Aussi, elle a demandé que le Tribunal ordonne à RHDSC de différer l’adjudication d’un contrat jusqu’à ce que le Tribunal se prononce sur la validité de la plainte.

4. Le 5 mai 2008, le Tribunal a avisé les parties qu’il avait décidé d’enquêter sur la plainte, puisque celle-ci répondait aux exigences du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le TCCE et aux conditions énoncées au paragraphe 7(1) du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics 2 . Il a aussi rendu, aux termes du paragraphe 30.13(3) de la Loi sur le TCCE, une ordonnance de report d’adjudication de contrat portant sur ce marché public jusqu’à ce que le Tribunal se soit prononcé sur la validité de la plainte. Le 16 mai 2008, RHDSC a informé le Tribunal que trois contrats avaient été adjugés. Le 20 mai 2008, le Tribunal a annulé l’ordonnance de report d’adjudication de contrat rendue le 5 mai 2008. Le 30 mai 2008, RHDSC a déposé le rapport de l’institution fédérale (RIF). Nexys n’a pas présenté de commentaires sur le RIF.

5. Les renseignements au dossier étant suffisants pour déterminer le bien-fondé de la plainte, le Tribunal a décidé qu’une audience n’était pas nécessaire et a statué sur la plainte sur la foi des renseignements au dossier.

PROCÉDURE DE PASSATION DU MARCHÉ PUBLIC

6. Le 14 janvier 2008, RHDSC a diffusé, par l’entremise du MERX3 , une DP visant la conclusion de contrats portant sur la prestation de services de traduction et de révision dans les deux langues officielles et dont la date de fermeture était le 22 février 2008. Trois modifications ont été apportées par la suite à cette DP. Selon RHDSC, 10 propositions ont été reçues, y compris celle de Nexys. Le 11 avril 2008, RHDSC a fait parvenir une lettre à Nexys dans laquelle il indiquait que sa soumission n’avait pas été retenue parce qu’elle n’avait pas respecté toutes les exigences obligatoires. La lettre statuait qu’après avoir revu la documentation fournie, Nexys n’avait pas respecté l’exigence obligatoire O-34 (exigence O-3). Cette lettre comprenait également le nom des trois soumissionnaires dont la proposition avait été retenue. Le même jour, Nexys a communiqué avec RHDSC pour lui demander plus d’information et lui signifier son désaccord au motif invoqué pour le rejet sommaire de sa proposition. Elle lui a aussi demandé quelles mesures elle devait prendre pour contester cette décision. Le 18 avril 2008, Nexys a de nouveau communiqué avec RHDSC, qui a alors transmis une confirmation écrite de sa réponse du 11 avril 2008, à savoir que la proposition de Nexys avait été rejetée parce qu’elle n’avait pas respecté l’exigence O-3 et il n’avait donc pas poursuivi l’évaluation des critères pondérés. Nexys a alors fait valoir à RHDSC que sa proposition contenait une indication de la date de la création de la compagnie et qu’il n’était pas prévu de document particulier à cet égard dans le libellé de l’exigence O-3. Elle a signifié son opposition au rejet de sa proposition au motif invoqué.

7. Le 25 avril 2008, Nexys a déposé sa plainte auprès du Tribunal.

HISTORIQUE

8. Aux termes du paragraphe 30.14(1) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal doit, dans son enquête, limiter son étude à l’objet de la plainte. De plus, à la conclusion de l’enquête, le Tribunal doit déterminer la validité de la plainte en fonction des critères et procédures établis par règlement pour le contrat spécifique. En outre, l’article 11 du Règlement prévoit que le Tribunal doit déterminer si le marché public a été passé conformément aux accords commerciaux pertinents, en l’occurrence l’Accord sur le commerce intérieur 5 .

9. Concernant l’évaluation des propositions, le paragraphe 506(6) de l’ACI prévoit ce qui suit :

[...] Les documents d’appel d’offres doivent indiquer clairement les conditions du marché public, les critères qui seront appliqués dans l’évaluation des soumissions et les méthodes de pondération et d’évaluation des critères.

10. Concernant la plainte, la DP contenait les dispositions suivantes :

SECTION « C »

CRITÈRES D’ÉVALUATION – EXIGENCES OBLIGATOIRES

1. EXIGENCES OBLIGATOIRES

Les critères obligatoires énumérés ci-dessous seront évalués sur la base conforme ou non-conforme.

Toute proposition ne satisfaisant pas aux exigences obligatoires qui suivent sera éliminée, ne fera l’objet d’aucun examen ultérieur et sera jugée irrecevable .

Pour être prises en considération, les propositions doivent être conformes à toutes les spécifications et exigences qui suivent et doivent contenir la documentation pertinente permettant de démontrer leur conformité. Les soumissions qui ne tiendront pas compte d’un point quelconque seront jugées irrecevables et ne feront l’objet d’aucun examen ultérieur.

[…]

2. CRITÈRES D’ÉVALUATION OBLIGATOIRES

Numéro de l’exigence

Description

[...]

[...]

O-3

Le soumissionnaire DOIT compter un minimum de cinq années complètes d’expérience dans la prestation de services de traduction et de révision depuis l’an 2002. Il devra en fournir la preuve, document renfermant la date de création de la compagnie, lors de la remise de sa soumission.

O-4

Ces références doivent indiquer le nom du client, y compris le nom et le numéro de téléphone de la personne-ressource pour chaque client.

Les soumissionnaires DOIVENT fournir trois (3) références pour des travaux de traduction effectués au cours des cinq (5) dernières années depuis janvier 2002. Chaque référence doit comprendre le nom du client, y compris le nom et le numéro de téléphone de la personne-ressource pour chaque client. Les soumissionnaires doivent fournir un échantillon d’une traduction de l’anglais vers le français et un échantillon d’une traduction du français vers l’anglais effectuées pour les clients donnés en référence. Les échantillons doivent contenir deux (2) pages chacun.

[...]

[...]

2. MANDATORY EVALUATION CRITERIA

Requirement Number

Description

[...]

[...]

M-3

The Bidder MUST have had a minimum of five full years of experience in the delivery of translation and revision services since 2002. The Bidder shall provide proof of this experience, in a document containing the date of creation of the Company, when submitting the bid.

M-4

These references shall indicate the name of the client, including the name and telephone number of the contact person for each client.

The Bidder MUST provide three references for translation work done during the last five years, since January 2002. Each reference shall include the client’s name, including the name and the telephone number of the contact person for each client. The Bidder shall submit a sample of a translation from English to French and a sample of a translation from French to English done for the clients given in reference. Each sample shall consist of two pages.

[...]

[...]

SECTION « D »

CRITÈRES D’ÉVALUATION – MÉTHODE DE SÉLECTION FONDÉE SUR LES CRITÈRES PONDÉRÉS

1. CRITÈRES D’ÉVALUATION PONDÉRÉS

Méthode de sélection

Pointage combiné le plus élevé pour le mérite technique (80%) et le prix (20%).

Les propositions seront évaluées conformément aux critères d’évaluation contenus dans les «Critères d’évaluation». Seules les propositions qui répondront à toutes les exigences obligatoires et qui obtiendront un minimum total de 60% dans l’évaluation des critères pondérés seront considérées propositions recevables.

[…]

SECTION « F »

ATTESTATION

[…]

2. ATTESTATION DU SOUMISSIONNAIRE

« Par la présente, nous attestons que tous les renseignements fournis aux présentes sont exacts. De plus, nous sommes convaincus que les membres du personnel que nous avons proposés dans le cadre de cette proposition sont en mesure de répondre de manière satisfaisante à l’exigence décrite aux présentes. […] »

De même, en apposant ci-après la signature officielle d’un représentant autorisé de l’entreprise, le soumissionnaire confirme qu’il accepte l’ensemble des conditions relatives au contrat de services professionnels applicable à ces travaux.

Signature du représentant autorisé de l’entreprise Date

[…]

Nexys

11. Le 11 avril 2008, Nexys a soutenu avoir reçu par télécopieur une lettre6 de RHDSC dans laquelle on lui signifiait que sa proposition avait été rejetée parce qu’elle ne respectait pas l’exigence O-3 de la DP. Dans cette lettre, libellée en anglais, on y énonçait ce qui suit :

Further to the Department’s Request for Proposal for the above-mentioned services, your proposal was deemed non-compliant in meeting all mandatory criteria. Therefore, this is to regrettably inform you that your proposal was not rated as the successful bid. The successful bidders were: RTG Protech Inc., R&R International Translations and Lexi-Tech International Inç.

In our review of the documentation provided, the following mandatory requirement was not met:

Section C - Mandatory Criteria M-3 :

The Bidder MUST have a minimum of five full years of experience in the delivery of translation and revision services since 2002. The Bidder shall provide proof of this experience, in a document containing the date of creation of the company, when submitting the bid .7

12. Selon Nexys, sa plainte repose sur une interprétation différente de la deuxième phrase de l’exigence O-3 qui est formulée ainsi :

Le soumissionnaire DOIT compter un minimum de cinq années complètes d’expérience dans la prestation de services de traduction et de révision depuis l’an 2002. Il devra en fournir la preuve, document renfermant la date de création de la compagnie, lors de la remise de sa soumission.

[Nos italiques]

13. Nexys a soutenu que cette phrase est grammaticalement incorrecte et qu’elle l’a interprétée de la façon suivante : « […] Il devra en fournir la preuve, le […] document renfermant la date de création de la compagnie, lors de la remise de sa soumission […] »8 .

14. Nexys a soutenu qu’elle a indiqué à trois reprises dans sa proposition la date de création de la compagnie, soit 1985, et qu’elle a attesté que les renseignements fournis étaient exacts en apposant sa signature officielle à sa proposition. Elle estime avoir respecté l’exigence O-3 du fait que sa proposition renfermait, en trois endroits distincts, une indication de la date de création de la compagnie9 . Et toujours selon Nexys, l’exigence O-3 ne précisait d’aucune façon la nature d’un éventuel document, non plus qu’un document particulier distinct, qui aurait pu servir à prouver la date de la création de la compagnie.

15. Nexys a soutenu que, non seulement l’exigence O-3 était sujette à interprétation quant à la nature du document renfermant la date de création de la compagnie et la manière dont celle-ci devait être démontrée, mais elle revêtait un caractère discriminatoire du fait que le cabinet de traduction dont les services devaient être retenus aux termes du processus de la DP aurait fort bien pu être un individu, auquel ne pourrait s’appliquer la condition concernant la date de création de la compagnie.

16. Nexys a soutenu qu’il n’était pas fondé de rejeter sa proposition pour le non-respect de l’exigence O-3 du fait que sa proposition renfermait, en trois endroits distincts, une indication de la date de création de sa compagnie. Selon Nexys, sa proposition aurait dû passer à l’étape suivante, soit celle de l’évaluation des critères pondérés.

17. Nexys n’a pas présenté de commentaires sur le RIF.

18. Nexys a demandé que RHDSC réévalue sa proposition en fonction des critères pondérés, qu’il reprenne les évaluations des soumissionnaires et qu’il résilie au besoin les contrats attribués. Si nécessaire, Nexys a demandé qu’une nouvelle DP soit publiée ou qu’une indemnité lui soit versée. Elle a demandé le remboursement des frais liés à sa plainte et à la préparation de sa proposition.

RHDSC

19. RHDSC a soutenu que l’exigence O-3 requérait qu’un document « établissant la date de fondation de la compagnie »10 soit annexé à la proposition. Il donne l’exemple du certificat d’incorporation qui, observe-t-il, a été fourni par les trois soumissionnaires ayant obtenu des contrats. RHDSC a soutenu que la simple mention de la date de création de la compagnie faite à trois reprises par Nexys dans sa proposition ne suffisait pas pour satisfaire à l’exigence O-3. Il a fait valoir que si une telle mention était suffisante, il aurait été inutile d’exiger une preuve, tel que le stipulait le libellé de l’exigence O-3. Il aurait tout simplement indiqué que le soumissionnaire devait indiquer la date de création de sa compagnie dans sa proposition.

20. RHDSC a reconnu que la version française de l’exigence O-3 comportait une déficience grammaticale. Selon lui, les mots « dans un » aurait manifestement dû précéder le mot « document » qui se retrouve dans la deuxième phrase de l’exigence dans sa version française.

21. Toutefois, selon RHDSC, une lecture de la version anglaise aurait immédiatement permis de comprendre que ces deux mots étaient manquants. En somme, RHDSC a soutenu qu’il était raisonnable de comprendre qu’un document distinct indiquant 11 la date de création de la compagnie devait être transmis avec la proposition de chaque soumissionnaire, ce qui, selon lui, a été compris par les autres soumissionnaires. RHDSC a allégué également que si Nexys était d’avis que la DP n’était pas suffisamment claire, elle aurait pu demander des renseignements à l’autorité contractante tel qu’il était mentionné dans la DP12 .

22. Quoi qu’il en soit de la présence ou non d’une attestation de la date de création de la compagnie, RHDSC a soutenu que la proposition de Nexys ne lui a pas permis de conclure qu’elle comptait un minimum de cinq années complètes d’expérience en matière de traduction et de révision depuis 2002. La proposition ne permettant pas de connaître la nature et le nombre de contrats réalisés par Nexys depuis 2002, RHDSC est d’avis que Nexys n’a pas, de toute façon, respecté l’exigence O-3.

23. RHDSC a soumis qu’un examen de la proposition permettrait aussi de constater que l’exigence obligatoire O-4 (exigence O-4) n’avait pas été respectée par Nexys. RHDSC a soumis que Nexys a traité l’exigence O-4 dans l’annexe D de sa proposition où, selon RHDSC, il manquait certains renseignements nécessaires. RHDSC a soutenu que rien n’avait permis de conclure que les traductions présentées par Nexys, tel que demandé à l’exigence O-4, avaient été réalisées avant janvier 2002 et que rien n’avait permis de savoir si Nexys avait effectué des traductions de l’anglais vers le français ou du français vers l’anglais.

24. RHDSC a observé que Nexys avait présenté dans sa proposition seulement certaines parties des documents requis, mais que dans sa plainte auprès du Tribunal, elle avait inclus les mêmes documents en entier. RHDSC a soutenu que, dans le cadre de son enquête, le Tribunal devait se limiter à l’examen des documents qui étaient annexés à la proposition de Nexys lors de sa soumission à RHDSC13 .

25. En conséquence, RHDSC a soutenu que même si le Tribunal devait conclure que la plainte de Nexys était fondée à l’égard de l’exigence O-3, il devait néanmoins conclure que Nexys ne respectait pas l’exigence O-4. Pour ces motifs, RHDSC a soutenu que la plainte de Nexys n’était pas fondée.

26. Selon RHDSC, même si la plainte était fondée en regard de l’exigence O-3, aucune mesure corrective ne devrait être recommandée en l’espèce14 .

ANALYSE DU TRIBUNAL

27. Dans un premier temps, le Tribunal affirme qu’il ne prendra en compte que les documents compris dans la proposition de Nexys lors de son dépôt auprès de RHDSC, dans le format qu’ils avaient à ce moment, et ne tiendra pas compte d’autres documents comportant des parties additionnelles qui ont été déposés dans le cadre de la présente plainte.

28. D’après le Tribunal, la lettre de rejet de RHDSC et l’échange subséquent de correspondance entre les deux parties démontrent que la raison du rejet de la proposition de Nexys était l’absence d’un document établissant la création de Nexys comme compagnie, en réponse à l’exigence O-3 de la DP.

29. RHDSC, dans le RIF, a fait l’analyse de la proposition de Nexys, concernant ses cinq années complètes d’expérience, et met en doute cette expérience15 . Le Tribunal est d’avis qu’il n’y a pas d’éléments de preuve démontrant que cette question aurait été examinée de cette façon au moment du rejet initial de la proposition et que ce rejet se limitait plutôt à l’absence d’un document de preuve de la date de création de la compagnie. Le Tribunal juge qu’une soumission comprenant un document tel qu’un certificat d’incorporation établissant la date de création de la compagnie était suffisant aux yeux de RHDSC pour déterminer la conformité d’une proposition à l’exigence O-3, au moment où il faisait l’évaluation des propositions. Adopter à ce moment-ci une autre interprétation de l’exigence O-3, soit une approche plus exigeante en allant au-delà de la seule exigence de la date d’incorporation, risquerait de discriminer contre Nexys face aux autres soumissionnaires. L’analyse de la conformité ou non de la proposition de Nexys concernant l’exigence O-3 portera donc essentiellement sur la date de la création de la compagnie.

30. Dans ce cas-ci, RHDSC a rejeté la proposition de Nexys en raison de sa non-conformité aux exigences obligatoires et n’a pas procédé à l’évaluation de la proposition selon la méthode des critères pondérés. Dans sa lettre de rejet, RHDSC indique ce qui suit : « […] votre proposition a été déclaré non conforme au motif qu’elle ne satisfaisait pas à tous les critères obligatoires. […] À la suite de notre examen des documents fournis, l’exigence obligatoire suivante n’a pas été respectée : Section C - Critères obligatoires O-3 […] » [traduction]. Dans cette lettre, la seule exigence qui est réputée ne pas être respectée est l’exigence O-3.

31. De l’avis du Tribunal, RHDSC a mal interprété la portée de l’exigence O-3 en l’instance en insistant qu’en fonction de cette exigence, il lui fallait annexer à sa proposition un document distinct indiquant la date de la création de la compagnie Nexys, par exemple un certificat d’incorporation16 .

32. Tel qu’indiqué ci-dessus, l’exigence O-3 prévoit ce qui suit : « Le soumissionnaire DOIT compter un minimum de cinq années complètes d’expérience dans la prestation de services de traduction et de révision depuis l’an 2002. Il devra en fournir la preuve, document renfermant la date de création de la compagnie, lors de la remise de sa soumission. »

33. Pour les deux raisons élaborées ci-dessous, le Tribunal est d’avis que la réclamation d’un document distinct ne se retrouve pas dans le libellé de l’exigence O-3. Le rejet de la proposition sur ce chef ne se conformait donc pas au paragraphe 506(6) de l’ACI, qui prévoit ce qui suit : « [...] Les documents d’appel d’offres doivent indiquer clairement les conditions du marché public, les critères qui seront appliqués dans l’évaluation des soumissions et les méthodes de pondération et d’évaluation des critères. »

Bilinguisme

34. La première raison du Tribunal pour rejeter les arguments de RHDSC est qu’ils sont fondés sur une application erronée des obligations du gouvernement fédéral en matière de bilinguisme.

35. La raison pour laquelle RHDSC insiste sur la présence d’un document distinct attestant la création de Nexys comme compagnie est en fonction de la version anglaise de l’exigence O-3, qui prévoit ce qui suit : « The Bidder MUST have had a minimum of five full years of experience in the delivery of translataion and revision services since 2002. The Bidder shall provide proof of this experience, in a document containing the date of the creation of the company, when submitting the bid » [caractères gras ajoutés].

36. RHDSC a soutenu ce qui suit : « Il est vrai que la version française de l’exigence O-3 comporte une déficience grammaticale, les mots “dans un” aurait manifestement dû précéder le mot “document” qui se retrouve à la deuxième phrase de l’exigence. Toutefois, une lecture de la version anglaise permet immédiatement de comprendre que ces deux mots sont manquants»17 .

37. En effet, si on demandait au Tribunal d’interpréter un texte législatif, l’approche de RHDSC serait correcte. Si se référer à la version anglaise de la loi peut résoudre une ambigüité apparente dans la version française, cela est tout à fait approprié selon le « principe du sens commun » énoncé par la Cour suprême du Canada. Si la version anglaise est plus précise et élimine l’ambigüité de la version française, il incomberait à une cour de l’accepter18 .

38. Cependant, le marché public de RHDSC n’est pas de nature législative. Il relève plutôt de la communication générale de RHDSC. Le Tribunal fait observer que l’invitation à soumissionner a été diffusée en français par l’intermédiaire du MERX et que, selon la version française de la DP, l’autorité contractante et l’unité de réception des soumissions étaient situées dans la région de la capitale nationale19 .

39. Le Tribunal prend connaissance d’office de l’article 22 de la Loi sur les langues officielles 20 qui prévoit ce qui suit: « Il incombe aux institutions fédérales de veiller à ce que le public puisse communiquer avec leur siège ou leur administration centrale, et en recevoir les services, dans l’une ou l’autre des langues officielles. Cette obligation vaut également pour leurs bureaux — auxquels sont assimilés, pour l’application de la présente partie, tous autres lieux où ces institutions offrent des services — situés [...] dans la région de la capitale nationale [...]. »

40. Le Tribunal croit que la diffusion de la DP et la publication de l’avis de marché en français, ainsi que l’échange de courriels en français après la date limite de réception des soumissions, sont la preuve que RHDSC a voulu se conformer à l’article 22 de la Loi sur les langues officielles mentionné ci-dessus en communiquant en français avec ses « clients », y compris avec les fournisseurs potentiels, qui avaient choisi le français comme langue officielle pour communiquer.

41. Par conséquent, le Tribunal conclut que la langue de communication entre les parties aux fins du marché était le français et que de s’attendre à ce que Nexys se donne la peine d’obtenir une copie de la version anglaise de la DP pour la comparer à la version française afin de résoudre le problème de l’insignifiante omission dans l’exigence O-3 était pour elle un fardeau imprévisible et, en tenant compte de la Loi sur les langues officielles, déraisonnable.

42. De plus, le Tribunal observe que RHDSC a choisi de rédiger sa lettre de rejet du 11 avril 2008 dans la langue qui n’était pas la langue de la proposition de Nexys21 . Après avoir demandé des explications sur le rejet de sa proposition, Nexys s’est vue offrir le passage de l’exigence O-3 dans sa version anglaise seulement. Le Tribunal observe que ceci est contraire aux obligations de l’article 22 de la Loi sur les langues officielles. Cette façon de procéder a eu pour effet d’ignorer la différence entre les libellés anglais et français, une question centrale dans l’examen de la plainte en question.

Interprétation du contrat

43. La deuxième raison du Tribunal pour rejeter les arguments de RHDSC est qu’ils sont contraires aux règles d’interprétation des contrats.

44. Tel que mentionné ci-dessus, le Tribunal n’a pas, dans la présente plainte, à interpréter un texte législatif, mais plutôt un contrat. Il n’y a aucun doute qu’un contrat unilatéral22 est conclut lors de la présentation d’une proposition en réponse à une invitation à soumissionner ou selon des modalités similaires, à condition que soient respectées ces modalités, comme dans le cas présent23 . Par conséquent, la norme appropriée que doit suivre le Tribunal est celle des règles d’interprétation des contrats.

45. Le Tribunal est d’accord avec Nexys qu’il était tout à fait sensé de simplement ajouté un « le » à l’exigence de sorte que la phrase en question soit énoncée comme suit : « Il devra en fournir la preuve, le document renfermant la date de création de la compagnie, lors de la remise de sa soumission » [nos italiques]. Même si la phrase ainsi formulée ne serait pas grammaticale, elle constituerait une version abrégée acceptable d’exprimer l’exigence de fournir la date de création de la compagnie dans la portion « attestation » de la proposition.

46. Le Tribunal n’est pas d’accord à ce qu’on se soit raisonnablement attendu que Nexys insère les termes « dans un » dans l’exigence O-3 afin de comprendre que la clause exigeait qu’un certificat d’incorporation ou un document équivalent soit fourni. Si cela avait été l’intention de RHDSC, il aurait pu le formuler de façon claire et précise. Le Tribunal constate que l’exigence O-3 contient le mot « renfermant » (« document renfermant la date de création de la compagnie » [nos italiques]), tandis qu’au paragraphe 13 du RIF, RHDSC voudrait que le mot « renfermant » signifie « établissant » (« […] l’exigence O-3 requière qu’un document établissant la date de la compagnie […] » [nos italiques]). Le Tribunal est d’avis que le mot « renfermant » n’a pas la même signification que « établissant ». Ces deux termes ont une portée différente, le premier signifiant qu’une simple information est requise, l’autre signifiant qu’un fait doit être établi. De l’avis du Tribunal, l’interprétation de RHDSC créerait, après le fait, une exigence contractuelle plus onéreuse pour Nexys que celle qui ressort explicitement de la DP. Dans le doute, un contrat s’interprète contre celui qui a stipulé l’obligation24 . En ce sens, le Tribunal rejette l’argument présenté dans le RIF qu’il était raisonnable de comprendre qu’un document distinct indiquant la date de création de la compagnie devait être transmis avec la proposition de chaque soumissionnaire. Il croit plutôt raisonnable que Nexys puisse interpréter avoir respecté une exigence rendue confuse par la partie gouvernementale concernant l’année de la création de sa compagnie.

47. RHDSC argumente qu’une analyse détaillée de la proposition de Nexys indique qu’elle ne contient pas d’information précise quant aux contrats réalisés depuis 2002 et que rien dans ce document ne permet de conclure que Nexys compte un minimum de cinq années d’expérience dans la prestation de services de traduction et de révision depuis 2002. Pour les raisons invoquées plus haut, le Tribunal n’entend pas reformuler les conditions de cette exigence d’une manière autre qu’envisagée par RHDSC lors de l’évaluation des propositions. Toutefois, le Tribunal constate que Nexys a inclus dans sa proposition, en plus de son affirmation, à trois reprises, que la compagnie a été formée en 1985, un document qui vient corroborer que la compagnie était en existence depuis au moins cinq ans. Le Tribunal observe que le Certificat d’enquête de sécurité et profil de sécurité25 émis par TPSGC et qui comporte une référence à la cote de sécurité du requérant indique que cette compagnie existait avant 2002.

CONCLUSION

48. Le Tribunal considère que Nexys a respecté l’exigence O-3 portant essentiellement sur la date de création de la compagnie.

49. Le Tribunal observe que RHDSC a mis en doute également la possibilité pour Nexys de respecter l’exigence O-4, en se fondant sur l’analyse des faits présentés dans la DP au sujet de la situation de Nexys et présentés dans le RIF. Cependant, le Tribunal est d’avis que RHDSC avait déjà disposé de ces questions dans sa lettre de rejet et dans la correspondance subséquente et que le Tribunal ne substituera pas son jugement à celui des évaluateurs concernant l’exigence O-4.

50. Le Tribunal observe aussi que RHDSC n’a pas présenté au Tribunal de documents attestant qu’il a bel et bien procédé à l’analyse de la proposition de Nexys en fonction des critères pondérés, au moment de la considération de la proposition de Nexys.

51. En résumé, le Tribunal conclut que le rejet original de la proposition de Nexys ne s’est pas fait sur les autres bases présentées en l’instance, mais sur le simple fait que le certificat d’incorporation était manquant. À la lumière de ce qui précède, le Tribunal conclut que la plainte est fondée.

Mesure corrective

52. Avant de passer aux mesures correctives possibles, il faut commenter l’argument de RHDSC selon lequel aucune mesure corrective ne devrait être recommandée dans les circonstances puisque, d’après RHDSC, Nexys ne respectait pas l’exigence O-4. Le Tribunal est d’avis qu’il ne serait pas approprié d’exercer sa compétence sur la question de l’exigence O-4, l’exigence étant une question pour les évaluateurs de RHDSC. En général, le Tribunal ne substitue pas son jugement à celui des évaluateurs sauf si, selon lui, ces derniers ne se sont pas appliqués à l’évaluation de la proposition d’un soumissionnaire, n’ont pas tenu compte de renseignements d’importance cruciale contenus dans une soumission, ont mal interprété la portée d’une exigence, ont fondé leur évaluation sur des critères non divulgués ou n’ont pas par ailleurs procédé à une évaluation équitable sur le plan de la procédure.

53. Pour recommander une mesure corrective, le Tribunal doit, conformément au paragraphe 30.15(3) de la Loi sur le TCCE, tenir compte de tous les facteurs qui interviennent dans le marché de biens ou de services visé par le contrat spécifique, notamment des suivants :

a) la gravité des irrégularités qu’il a constatées dans la procédure des marchés publics;

b) l’ampleur du préjudice causé au plaignant ou à tout autre intéressé;

c) l’ampleur du préjudice causé à l’intégrité ou à l’efficacité du mécanisme d’adjudication;

d) la bonne foi des parties;

e) le degré d’exécution du contrat.

54. Pour décider de la mesure corrective à recommander en l’espèce, le Tribunal a examiné les facteurs pertinents au marché public, y compris les facteurs susmentionnés.

55. Nexys a demandé au Tribunal de recommander à RHDSC de réévaluer sa proposition en fonction des critères pondérés et de résilier au besoin les contrats attribués. Si nécessaire, elle a demandé qu’une nouvelle DP soit publiée ou qu’une indemnité lui soit versée.

56. Le Tribunal recommande que RHDSC procède à la prochaine étape d’évaluation de la proposition présentée par Nexys, soit l’évaluation en fonction des critères pondérés. Le Tribunal recommande que RHDSC, en faisant l’évaluation, ne prenne en compte que les documents de traduction, dans le format qu’ils avaient au moment où Nexys les a déposés auprès de RHDSC, et ne tienne pas compte d’autres documents comportant des parties additionnelles qui ont été déposés dans le cadre de la présente plainte. Si la proposition de Nexys obtient la note de passage requise et qu’elle s’avère être l’une des trois propositions gagnantes, le Tribunal recommande qu’un contrat soit adjugé à Nexys. Subsidiairement, le Tribunal recommande que Nexys reçoive une indemnisation en reconnaissance des profits qu’elle aurait pu tirer du marché si ce dernier lui avait été adjugé.

Frais

57. Aux termes de l’article 30.16 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal accorde à Nexys le remboursement des frais raisonnables qu’elle a engagés pour la préparation et le traitement de la plainte.

58. Pour décider du montant de l’indemnisation en l’espèce, le Tribunal a tenu compte de sa Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure portant sur un marché public (la Ligne directrice), qui fonde l’évaluation du degré de complexité d’une plainte sur trois critères : la complexité du marché public, la complexité de la plainte et la complexité de la procédure. L’indication provisoire donnée par le Tribunal relativement à la présente affaire est que son degré de complexité correspond au premier degré de complexité prévu à l’annexe A de la Ligne directrice. La complexité du marché était faible, étant donné qu’il concernait la prestation de services de consultants dont l’objet n’était pas en litige. La complexité de la plainte était faible, en ce sens qu’elle était fondée sur une liste simple de caractéristiques faciles à mesurer qui déterminaient la réussite ou l’échec. La complexité de la procédure de la plainte était également faible, étant donné qu’il n’y a pas eu de parties intervenantes, aucune observation supplémentaire n’a été déposée par les parties, le délai de 90 jours a été respecté, et aucune audience publique n’a eu lieu. Par conséquent, comme le prévoit la Ligne directrice, l’indication provisoire donnée par le Tribunal eu égard au montant de l’indemnisation est de 1 000 $.

DÉCISION DU TRIBUNAL

59. Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal détermine que la plainte est fondée.

60. Aux termes des paragraphes 30.15(2) et 30.15(3) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal recommande, à titre de mesure corrective, que RHDSC, dans les 30 jours de la date de publication de la présente décision, fasse réévaluer la proposition présentée par 144314 Canada Inc./Nexys selon la méthode d’évaluation des critères pondérés, et s’il y a possibilité, par l’équipe d’évaluation initiale. Le Tribunal recommande en outre que, aux termes du plan d’évaluation concernant l’exigence O-3, on considère que Nexys a fourni une preuve suffisante qu’elle était en affaires avant janvier 2002.

61. S’il s’avère que la proposition de Nexys est l’une des trois propositions gagnantes, le Tribunal recommande que RHDSC soit accorde un contrat à Nexys soit lui accorde une indemnisation en reconnaissance des profits qu’elle a perdus en étant privée du contrat. Le calcul des profits perdus sera fondé sur le prix proposé par Nexys dans la proposition qu’elle a présentée en réponse à l’invitation no 9606-07-0007. Le cas échéant, le Tribunal recommande que les parties élaborent une proposition conjointe d’indemnisation afin de la lui présenter dans les 60 jours suivant la publication de la présente décision. Si les parties sont incapables de s’entendre sur le montant de l’indemnisation, elles devront séparément faire rapport au Tribunal dans le même délai de 60 jours, après quoi le Tribunal rendra sa recommandation à cet égard.

62. Si, à la suite de l’évaluation, la proposition de Nexys n’obtient pas la note de passage requise, le Tribunal recommande également que, sur demande, RHDSC communique à Nexys des renseignements pertinents concernant les raisons du rejet.

63. Aux termes de l’article 30.16 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal accorde à Nexys le remboursement des frais raisonnables qu’elle a engagés pour la préparation et le traitement de la plainte, ces frais devant être payés par RHDSC. L’indication provisoire du degré de complexité de la présente plainte donnée par le Tribunal est le degré 1, et l’indication provisoire du montant de l’indemnisation est de 1 000 $. Si l’une ou l’autre des parties n’est pas d’accord en ce qui a trait à l’indication provisoire du degré de complexité ou à l’indication provisoire du montant de l’indemnisation, elle peut déposer des observations auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur, en conformité avec la Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure de plainte portant sur un marché public. Le Tribunal canadien du commerce extérieur se réserve la compétence de fixer le montant final de l’indemnisation.


1 . L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47 [Loi sur le TCCE].

2 . D.O.R.S./93-602 [Règlement].

3 . Service électronique d’appel d’offres du Canada.

4 . DP à la p. 20.

5 . 18 juillet 1994, Gaz. C. 1995.I.1323, en ligne : Secrétariat du commerce intérieur <http://www.ait-aci.ca/index_fr/ait.htm> [ACI].

6 . Plainte, pièce B2.

7 . En raison des circonstances de la présente plainte, le Tribunal présente ce passage dans la langue originale choisie par RHDSC.

8 . Plainte, pièce D2.

9 . Pièce B1 (confidentielle) de la proposition de service de Nexys aux pp. 7, 8 et 32 et l’annexe C – Profil de l’entreprise.

10 . RIF, para. 13.

11 . RIF, para. 19.

12 . DP à la p. 6.

13 . RIF, annexe C (confidentielle).

14 . Re plainte déposée par Hickling Arthurs Low Corporation (31 mars 2004), PR-2003-071 (TCCE); Re plainte déposée par Siemens Westinghouse Incorporated (19 mars 2001), PR-2000-039 (TCCE).

15 . RIF, para. 23.

16 . RIF, para. 13.

17 . RIF, para. 18.

18 . R. c. Hinchey, [1996] 3 R.C.S. 1128.

19 . RIF, onglet B.

20 . L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 31.

21 . Plainte, pièce C1.

22 . Black’s Law Dictionary, huitième édition, s.v. « unilateral contract ». Un contrat dans lequel seulement une partie fait une promesse ou s’engage à accomplir quelque chose. « Si A dit à B : “Si vous franchissez à pied le pont de Brooklyn, je vous paierez 100 $”, B ne peut accepter cette offre en promettant de franchir le pont. B doit l’accepter, si tant est, en accomplissant l’action. Parce qu’aucune promesse en retour n’est exigée, B n’est aucunement tenu d’accomplir l’action. Si B accompli l’action, un contrat liant deux parties est créé, mais le contrat est qualifié d’unilatéral parce que seulement une partie est dans l’obligation d’accomplir quelque chose » [traduction].

23 . La Reine (Ont.) c. Ron Engineering, [1981] 1 R.C.S. 111.

24 . Voir, par exemple, l’article 1432 du Code civil du Québec, qui prévoit ce qui suit : « Dans le doute, le contrat s’interprète en faveur de celui qui a contracté l’obligation et contre celui qui l’a stipulée. Dans tous les cas, il s’interprète en faveur de l’adhérent ou du consommateur. » La juge Abella, alors juge de la Cour d’appel de l’Ontario, a décrit la règle contra proferentem comme suit : « C’est une règle qui vise à dispenser la partie qui n’a pas rédigé le contrat d’une interprétation que celle-ci ne pourrait clairement discerner par une simple lecture. Cela empêche la partie qui a rédigé et comprend le contrat d’invoquer une obligation contractuelle dissimulée à l’égard d’un signataire qui ne se doute de rien » [traduction], Lien Trustee v. Toronto-Dominion Plaintiff Bank (1994), 17 O.R. (3d) 363.

25 . Plainte, pièce B3.