IMPERIAL PARKING CANADA CORPORATION


IMPERIAL PARKING CANADA CORPORATION
Dossier no PR-2008-037

Décision prise
le vendredi 28 novembre 2008

Décision et motifs rendus
le lundi 22 décembre 2008


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À une plainte déposée aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47

PAR

IMPERIAL PARKING CANADA CORPORATION

CONTRE

CORPORATION PLACE DU CANADA

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur a décidé de ne pas enquêter sur la plainte.

Serge Fréchette
Serge Fréchette
Membre présidant

Hélène Nadeau
Hélène Nadeau
Secrétaire

EXPOSÉ DES MOTIFS

1. En vertu du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur 1 , tout fournisseur potentiel peut, sous réserve du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics 2 , déposer une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) concernant la procédure des marchés publics suivie relativement à un contrat spécifique et lui demander d’enquêter sur cette plainte. De plus, en vertu du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le TCCE, après avoir jugé la plainte conforme au paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE et sous réserve du Règlement, le Tribunal détermine s’il y a lieu d’enquêter.

2. L’alinéa 7(1)b) du Règlement exige que la plainte porte sur un contrat spécifique et l’alinéa 7(1)c) exige que le Tribunal détermine si les renseignements fournis par la partie plaignante démontrent, dans une mesure raisonnable, que la procédure du marché public n’a pas été suivie conformément au chapitre dix de l’Accord de libre-échange nord-américain 3 , au chapitre cinq de l’Accord sur le commerce intérieur 4 ou à l’Accord sur les marchés publics 5 , selon le cas.

3. En août 2007, la Corporation Place du Canada (CPC) a publié une demande de proposition (DP) (invitation no PMS 230807), lançant un appel d’offres pour la gestion du parc de stationnement de la Place du Canada situé au 999, Canada Place, Vancouver (Colombie-Britannique). Imperial Parking Canada Corporation (Impark) a allégué que sa proposition avait été incorrectement rejetée et qu’un contrat à fournisseur unique avait été incorrectement adjugé à un concurrent qui n’avait pas participé au processus d’invitation à soumissionner.

4. Impark a allégué que la CPC, une filiale à part entière de l’Administration portuaire Vancouver-Fraser (APVF), avait agi à titre de mandataire du ministère des Transports et de l’APVF. En tirant cette conclusion, elle a soutenu que le ministre des Transports a le contrôle ultime de l’APVF et que, par conséquent, le ministre des Transports a aussi le contrôle ultime de la CPC. Elle a soutenu que les marchés entrepris par le ministre des Transports, en réalité par le ministère des Transports, sont visés par l’ACI et l’ALÉNA. Impark a de plus soutenu que l’APVF est un regroupement récemment établi de trois autorités portuaires, lesquelles sont toutes visées par l’ACI. Impark a fait valoir que, puisque l’APVF participe de façon déterminante aux activités de la CPC, les marchés de la CPC sont, de façon similaire, visés par l’ACI. Impark a fait valoir que, si les marchés comme celui-ci ne relèvent pas de la compétence du Tribunal, le ministère des Transports et l’APVF pourraient se soustraire à leurs obligations en lançant tous les appels d’offres par l’entremise de filiales.

5. L’article 30.1 de la Loi sur le TCCE définit un contrat spécifique comme un « [c]ontrat relatif à un marché de fournitures ou services qui a été accordé par une institution fédérale — ou pourrait l’être — , et qui soit est précisé par règlement, soit fait partie d’une catégorie réglementaire. »

6. L’article 3 du Règlement prévoit ce qui suit :

3. (1) Pour l’application de la définition de « contrat spécifique » à l’article 30.1 de la [Loi sur le TCCE], est un contrat spécifique tout contrat relatif à un marché de fournitures ou services ou de toute combinaison de ceux-ci, [...] et visé [...] à l’article 1001 de l’ALÉNA, à l’article 502 de l’Accord sur le commerce intérieur.

(2) Pour l’application de la définition de « institution fédérale » à l’article 30.1 de la [Loi sur le TCCE], sont désignés institutions fédérales :

a) les entités publiques fédérales énumérées dans la liste du Canada de l’annexe 1001.1a-1 de l’ALÉNA, à l’annexe 502.1A de l’Accord sur le commerce intérieur sous l’intertitre « CANADA » ou à l’annexe 1 de l’Accord sur les marchés publics sous l’intertitre « CANADA »;

b) les sociétés d’État énumérées dans la liste du Canada de l’annexe 1001.1a-2 de l’ALÉNA ou à l’annexe 3 de l’Accord sur les marchés publics sous l’intertitre « CANADA »;

[...]

7. En d’autres mots, avant d’examiner la question de savoir si les éléments de preuve dans la plainte démontrent, dans une mesure raisonnable, que la procédure du marché public n’a pas été suivie conformément aux accords commerciaux, le Tribunal doit d’abord décider si le marché vise un « contrat spécifique ». La question à l’étude par le Tribunal, dans la présente affaire, est de savoir si un contrat sera accordé à l’« institution fédérale » et, par conséquent, si la plainte se rapporte à un « contrat spécifique ».

8. Le Tribunal fait remarquer que la CPC, elle-même, n’apparaît pas dans la liste des entités ou entreprises visées par les accords commerciaux. Impark a cependant soutenu que la CPC, en raison de son statut et de ses relations structurelles, agissait à titre de mandataire du ministère des Transports et de l’APVF.

9. Le décret en conseil qui établit l’APVF renvoie aussi à ses lettres patentes6 . Les lettres patentes définissent le mot « filiale » comme suit :

« filiale » La Corporation Place du Canada ou une filiale à cent pour cent de l’administration constituée de temps à autre en vertu de la Loi et des présentes Lettres patentes.

10. La présente définition indique clairement que la CPC est une filiale à part entière de la l’APVF. De plus, l’article 7.2 des lettres patentes décrit les activités de la CPC comme suit :

7.2 Activités de la Corporation Place du Canada. La Corporation Place du Canada est autorisée à mener les activités suivantes :

a) gestion, location ou octroi de permis à l’égard des immeubles fédéraux décrits sous Corporation Place du Canada à l’annexe B pour les utilisations suivantes par les locataires : hôtels, restaurants, bars, entreprises de voyage ou d’excursion et activités liées au tourisme semblables, vente au détail, espace de bureaux, activités de divertissement, services alimentaires, présentations et salons professionnels;

b) production et distribution de vapeur et d’autres services publics;

c) gestion des éléments d’actif et des biens, notamment l’entretien et la réparation des bâtiments ou ouvrages situés sur les immeubles fédéraux décrits à l’annexe B ou dans des Lettres patentes supplémentaires comme étant des immeubles fédéraux;

d) production, coordination, parrainage et accueil d’événements publics et civils;

e) promotion, marketing et exercice de relations publiques pour promouvoir la Place du Canada ou le port.

11. À l’article 4.23 des lettres patentes, l’APVF a la responsabilité de prendre « [...] toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce que les administrateurs de la Corporation Place du Canada, nommés par [l’APVF], soient des candidats approuvés par le ministre. » Les activités de l’APVF sont gérées par la Loi maritime du Canda 7 , dont le paragraphe 28(11) prévoit ce qui suit :

11. Les administrateurs d’une administration portuaire sont tenus de prendre toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce que les filiales à cent pour cent de l’administration n’aient et n’exercent que les pouvoirs et activités autorisés dans les lettres patentes de celle-ci et de plus à ce qu’elles n’exercent aucun de ces pouvoirs ou activités d’une façon incompatible avec les lettres patentes ou la présente loi.

12. La détermination de l’existence d’une relation mandant-mandataire est une question de fait, et la question est celle de savoir si les actions d’une entité sont prises au nom d’une autre entité. Dans le cas présent, les faits pertinents sont les lettres patentes de l’APVF, qui indiquent que la CPC est une filiale de l’APVF ayant le mandat d’entreprendre des activités précises par l’entremise d’administrateurs nommés par l’APVF, et en vertu la Loi maritime du Canada, qui donne à l’APVF la responsabilité de s’assurer que la CPC agit selon son mandat seulement. De plus, puisque les obligations de la CPC découlent des lettres patentes de l’APVF, on peut conclure que ces obligations contribuent à assurer l’exécution du mandat de l’APVF. Par conséquent, le Tribunal est satisfait que les termes du décret et des lois pertinentes exigent implicitement que la CPC agisse au nom de l’APVF et elle est donc, dans le cadre de toutes ses attributions, un mandataire de l’APVF.

13. Tel qu’indiqué plus haut, le Règlement mentionne seulement les entités du gouvernement fédéral énumérées sous la rubrique « CANADA », à l’annexe 502.1A de l’ACI, en tant qu’institutions fédérales désignées. De façon similaire, le Règlement mentionne seulement les entités du gouvernement fédéral énumérées dans la Liste du Canada à l’annexe 1001.1a-1 de l’ALÉNA en tant qu’institutions fédérales désignées. L’APVF elle-même n’est pas mentionnée dans ces deux annexes; par conséquent, l’APVF, en soi, n’est pas une entité visée aux termes du Règlement. Cependant, le ministère des Transports est énuméré dans ces annexes et, par conséquent, il est essentiel de déterminer si une relation mandant-mandataire peut exister entre l’APVF et le ministre des Transports.

14. L’article 7 de la Loi maritime du Canada prévoit ce qui suit :

7. (1) Sous réserve du paragraphe (3), les administrations portuaires ne sont mandataires de Sa Majesté du chef du Canada que dans le cadre des activités portuaires visées à l’alinéa 28(2)a).

(2) Les filiales à cent pour cent des administrations portuaires ne sont pas mandataires de Sa Majesté du chef du Canada sauf si, sous réserve du paragraphe (3) :

a) d’une part, elles l’étaient au 10 juin 1996;

b) d’autre part, elles le sont en vertu d’une loi autre que la présente loi.

(3) Ni les administrations portuaires ni les filiales à cent pour cent des administrations portuaires ne peuvent emprunter de fonds à titre de mandataires de Sa Majesté du chef du Canada.

De plus, les paragraphes 28(2) et 28(3) prévoient ce qui suit :

(2) L’autorisation donnée à une administration portuaire d’exploiter un port est restreinte aux activités suivantes :

a) les activités portuaires liées à la navigation, au transport des passagers et des marchandises, et à la manutention et l’entreposage des marchandises, dans la mesure prévue par les lettres patentes;

b) les autres activités qui sont désignées dans les lettres patentes comme étant nécessaires aux opérations portuaires.

(3) L’administration portuaire peut exercer directement ou par l’intermédiaire d’une de ses filiales à cent pour cent les activités visées à l’alinéa (2) b); ni l’administration portuaire ni la filiale ne sont mandataires de Sa Majesté du chef du Canada dans le cadre de ces activités.

15. Les dispositions susmentionnées indiquent donc clairement que l’APVF est un mandataire du ministre des Transports en ce qui a trait aux activités énoncées à l’alinéa 28(2)a) de la Loi maritime du Canada et non pas un mandataire du ministre des Transports en ce qui a trait aux activités généralement entreprises par sa filiale à part entière, la CPC, énoncées à l’alinéa 28(2)b). De plus, la Loi maritime du Canada indique effectivement, de façon claire, qu’aucune relation mandant-mandataire n’existe entre le ministre des Transports et des organismes tels que la CPC, à moins qu’une autre loi n’indique une telle relation.

16. Le marché en question concerne la gestion du parc de stationnement à la Place du Canada à Vancouver. Le Tribunal est d’avis que ce service ne peut, de façon raisonnable, être considéré comme des « activités portuaires liées à la navigation, au transport des passagers et des marchandises, et à la manutention et l’entreposage des marchandises » tel que prévu à l’alinéa 28(2)a) de la Loi maritime du Canada et serait plus logiquement visé par la catégorie d’« autres activités » aux termes du paragraphe 28(3). Par conséquent, en réalité, il est clair que l’APVF utilise la CPC aux fins du marché en question pour son propre avantage et qu’il n’existe aucune relation mandant-mandataire entre l’APVF et le ministre des Transports par rapport au marché en question. Par conséquent, le Tribunal conclut que le marché en question n’a pas été entrepris par une institution fédérale désignée à l’annexe 502.1A de l’ACI ou dans la Liste du Canada à l’annexe 1001.1a-1 de l’ALÉNA.

17. En ce qui concerne l’ACI, le Tribunal fait remarquer que, même si les trois administrations portuaires qui ont été regroupées pour former l’APVF (l’Administration portuaire du fleuve Fraser, l’Administration portuaire du North-Fraser et l’Administration portuaire de Vancouver) sont énumérées à l’annexe 502.3 de l’ACI, et que l’article 11 des lettres patentes de l’APVF indique clairement que l’APVF doit respecter l’ACI, le Tribunal n’a pas compétence en ce qui a trait aux marchés passés par ces entités, puisque l’annexe 502.3 n’est pas visé par l’article 30.1 de la Loi sur le TCCE ou par le Règlement.

18. De plus, la Section B de l’annexe 502.3 de l’ACI prévoit ce qui suit :

B. Relation avec l’Accord sur le commerce intérieur

1. Le chapitre cinq (Marchés publics) ainsi que les dispositions des autres chapitres de l’Accord sur le commerce intérieur ne s’appliquent pas à la présente annexe à moins que celle-ci n’en dispose autrement.

2. Les articles et paragraphes suivants de l’Accord sur le commerce intérieur, ou certaines parties de ceux-ci, s’appliquent à la présente annexe : article 505 (Estimation de la valeur des marchés publics); article 509 (Langue); article 512 (Service compétent); article 518 (Définitions); article 1600 a), b) et d) (Comité du commerce intérieur); article 1603.4 (Secrétariat); article 1802 (Peuples autochtones); article 1803 (Culture); article 1805 (Fiscalité); article 1811 (Accession et retrait).

19. L’article 514 de l’ACI, qui donne au Tribunal son autorité en matière de règlement des conflits, n’est pas mentionné à la section B de l’annexe 502.3.

20. Par conséquent, le Tribunal conclut que l’APVF et ses organismes antérieurs ne sont pas désignés en tant qu’« institutions fédérales » aux termes du Règlement et conclut donc que leurs marchés ne peuvent être considérés des « contrats spécifiques » aux termes de la Loi sur le TCCE.

21. Enfin, bien que la mention ne soit pas requise quant à la question de mandat, les documents d’appel d’offres eux-mêmes ne mentionnent ni l’APVF ni le ministère des Transports, et les documents d’appel d’offres n’indiquent pas que la CPC passe le marché de façon autre que de son propre chef.

22. Par conséquent, le Tribunal conclut que la plainte ne se rapporte pas à un contrat dont l’adjudication est prévue par une institution fédérale et que la plainte ne se rapport donc pas à un contrat spécifique.

23. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal n’enquêtera pas sur la plainte et tient la question pour réglée.

DÉCISION

24. Aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal a décidé de ne pas enquêter sur la plainte.


1 . L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47 [Loi sur le TCCE].

2 . D.O.R.S./93-602 [Règlement].

3 . Accord de libre-échange nord-américain entre le gouvernement du Canada, le gouvernement des États-Unis mexicains et le gouvernement des États-Unis d’Amérique, 17 décembre 1992, R.T.C. 1994, no 2 (entré en vigueur le 1er janvier 1994) [ALÉNA].

4 . 18 juillet 1994, Gaz. C. 1995.I.1323, en ligne : Secrétariat du commerce intérieur <http://www.ait-aci.ca/index_fr/ait.htm> [ACI].

5 . 15 avril 1994, en ligne : Organisation mondiale du commerce <http://www.wto.org/french/docs_f/legal_f/final_f.htm>.

6 . Certificat de fusion d’administrations portuaires, C.P. 2007-1885, Gaz. C. 2007.I.3 (Règlement sur la gestion des administrations portuaires).

7 . S.C. 1998, c. 10.