INTERCALL CANADA


INTERCALL CANADA
Dossier no PR-2009-011

Décision prise
le lundi 1er juin 2009

Décision et motifs rendus
le jeudi 11 juin 2009


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À une plainte déposée aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47

PAR

INTERCALL CANADA

CONTRE

LE MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur a décidé de ne pas enquêter sur la plainte.

Ellen Fry
Ellen Fry
Membre présidant

Hélène Nadeau
Hélène Nadeau
Secrétaire

EXPOSÉ DES MOTIFS

1. En vertu du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur 1 , tout fournisseur potentiel peut, sous réserve du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics 2 , déposer une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) concernant la procédure des marchés publics suivie relativement à un contrat spécifique et lui demander d’enquêter sur cette plainte. En vertu du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le TCCE, après avoir jugé la plainte conforme au paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE et sous réserve du Règlement, le Tribunal détermine s’il y a lieu d’enquêter.

2. La plainte concerne un marché (invitation no EN869-071160/B) passé par le ministère de Travaux publics et des Services gouvernementaux (TPSGC) en vue de la prestation de services complets d’audio-téléconférence et de cyberconférence au nom de sa Direction des services de la technologie de l’information.

3. InterCall Canada (InterCall) allègue que TPSGC avait appliqué injustement et de façon irrégulière les modalités de l’invitation lorsqu’il avait évalué sa proposition et qu’il avait conclu à tort que sa proposition était non conforme.

4. Le 10 novembre 2008, TPSGC publiait une demande de propositions (DP) en vue de la prestation des services susmentionnés. La date fixée pour la réception des soumissions était le 9 février 2009. InterCall avait présenté une soumission dans le délai alloué. Le 11 mai 2009, TPSGC avisait InterCall que sa proposition avait été rejetée pour deux raisons :

parce qu’elle avait inclus une clause de « non-responsabilité » dans sa proposition, InterCall ne satisfaisait pas à une exigence obligatoire selon laquelle les soumissionnaires devaient accepter toutes les clauses de l’invitation à soumissionner;

InterCall n’a pas fourni de données sur les prix dans certains champs obligatoires.

5. L’alinéa 7(1)c) du Règlement exige que le Tribunal détermine si les renseignements fournis par la partie plaignante démontrent, dans une mesure raisonnable, que la procédure du marché public n’a pas été suivie conformément au chapitre 10 de l’Accord de libre-échange nord-américain 3 , au chapitre cinq de l’Accord sur le commerce intérieur 4 , à l’Accord sur les marchés publics 5 ou au chapitre Kbis de l’Accord de libre-échange entre le Canada et le Chili 6 , selon le cas. En l’espèce, bien que l’ACI et l’ALÉCC s’appliquent,7 the Tribunal fait remarquer qu’InterCall allègue seulement que le marché n’a pas été passé conformément aux dispositions de l’ACI.

6. Le paragraphe 506(6) de l’ACI prévoit ce qui suit :

Les documents d’appel d’offres doivent indiquer clairement les conditions du marché public, les critères qui seront appliqués dans l’évaluation des soumissions et les méthodes de pondération et d’évaluation des critères.

7. Le paragraphe Kbis-10(1) de l’ALÉCC prévoit ce qui suit:

1. L’entité exigera que, pour être considérée en vue de l’adjudication, la soumission soit présentée par écrit et qu’au moment de sa présentation, elle réponde aux conditions suivantes :

a. être conforme aux conditions essentielles spécifiées dans la documentation relative à l’appel d’offres; et

b. avoir été présentée par un fournisseur qui remplisse les conditions de participation remises par l’entité à tous les fournisseurs participants.

8. En ce qui concerne le libellé de la clause de non-responsabilité qu’elle admet avoir utilisé dans sa proposition, InterCall fait valoir que TPSGC a fait erreur en le prenant en ligne de compte, car ce libellé n’apparaissait pas dans la partie de sa proposition qui, selon InterCall, devait être la « soumission », en vertu de la DP. InterCall soutient que la partie 3 de la DP, ci-dessous, est rédigée avec soin et exprime précisément ce que devait comprendre une soumission, ainsi que les renseignements précis que TPSGC devait utiliser dans son évaluation :

PARTIE 3 – INSTRUCTIONS POUR LA PRÉPARATION D’UNE SOUMISSION

3.1 Instructions pour la préparation de la soumission

a) Le Canada demande que les soumissionnaires présentent leur soumission sous forme de sections reliées distinctes comme il suit :

i) Section I : Soumission technique [...]

ii) Section II : Soumission financière [...]

[...]

b) Le Canada demande que les soumissionnaires adhèrent aux instructions quant à la forme, décrites ci-dessous, lors de la préparation de leur soumission:

i) utiliser du papier de 8,5 po x 11 po ;

ii) utiliser le même système de numération que celui de l’invitation à soumissionner;

iii) les certificats d’homologation doivent constituer une section distincte de la soumission;

iv) inclure une page couverture pour chaque volume de la soumission, sur laquelle figurent le titre, la date, le numéro d’invitation, le nom du soumissionnaire et les coordonnées et la personne ressource;

v) inclure une table des matières.

[Traduction]

9. InterCall reconnait que le paragraphe suivant apparaissait dans sa soumission :

NON-RESPONSABILITÉ

La présente proposition pour la prestation de services de conférence au client constitue une réponse préliminaire sans force exécutoire, fondée sur l’interprétation d’InterCall des besoins du client en matière de conférence, en date de la présente soumission, et doit servir de point de départ pour les discussions entre les parties. Il n’y a pas eu de vérification légale des modalités de la présente réponse et toutes les modalités devront faire l’objet d’une négociation entre les parties. Ni la DP ni la présente réponse ne prévoit des obligations ou des droits ayant force exécutoire à l’égard de l’une ou l’autre des parties.

[Traduction]

Cependant, elle soutient que, par suite des exigences susmentionnées de la DP, TPSGC n’était absolument pas autorisé à prendre en ligne de compte des renseignements au-delà de ceux stipulés dans la DP, sans égard à ces renseignements ou à leur pertinence pour la soumission. Elle soutient que la clause de non-responsabilité n’était qu’une clause « de style » qui avait été incluses par mégarde dans l’introduction aux documents déposés par InterCall.

10. InterCall fait valoir que la soumission réelle (c.-à-d. sa proposition technique, sa proposition financière et la page couverture) ne renfermait aucun renseignement qui tentait, de quelque façon que ce soit, de modifier les dispositions obligatoires de la DP, y compris celles que TPSGC alléguait avoir violées. InterCall fait aussi valoir que sa soumission technique comprenait l’énoncé suivant :

Section I : Soumission technique

a) Toute exigence dans la DP et l’Énoncé des travaux qui utilise le mot « doit » est une exigence obligatoire. Les soumissions qui ne satisfont pas à toutes les exigences obligatoires seront considérées comme irrecevables.

________________________________________________________________________________

Réponse d’InterCall

InterCall a lu et compris cette exigence8 .

[Traduction]

11. Le Tribunal est d’avis que les instructions pour la préparation de la soumission de la DP n’établissaient aucune limite par rapport à ce qu’InterCall pouvait inclure dans sa soumission. Ces instructions voulaient que les soumissionnaires organisent leur soumission d’une façon particulière et qu’ils incluent un minimum de renseignements obligatoires. Les instructions n’établissait aucune limite par rapport aux renseignements à inclure ou au nombre de pages permis dans la proposition technique. Que la clause de non-responsabilité ait été incluse délibérément, qu’elle ait été ajoutée par mégarde ou qu’il s’agisse d’une erreur administrative, la clause de non responsabilité en question figurait dans la proposition d’InterCall et, de l’avis du Tribunal, TPSGC était tenu de prendre ces renseignements en ligne de compte lors de son évaluation.

12. Le Tribunal fait remarquer que, en plus des sections susmentionnées concernant l’organisation des propositions, la DP prévoyait ce qui suit :

PARTIE 7 – CLAUSES CONTRACTUELLES PAR DÉDUCTION

Les clauses suivantes s’appliquent à tout contrat qui résulte de l’invitation à soumissionner et en font partie. À moins d’un énoncé contraire dans l’invitation à soumissionner, l’acceptation du soumissionnaire de toutes les clauses est une exigence obligatoire de l’invitation à soumissionner. Aucune modification ou autre modalité comprise dans la soumission ne s’appliquera à tout contrat qui en résulte, même si la soumission fait partie de ce contrat. Toute soumission qui comprend des énoncés qui laissent entendre que la soumission est fonction de modifications à ces clauses, ou qui comprend des modalités qui prétendent remplacer ces clauses sera considérée comme irrecevable. Les soumissionnaires qui ont des préoccupations concernant ces clauses doivent les soulever conformément à la disposition concernant les demandes de renseignements de la présente invitation à soumissionner.

[Nos italiques, traduction]

13. Le Tribunal est d’avis que la DP est claire : si un soumissionnaire laissait entendre que sa soumission était fonction de modifications à des clauses, la soumission devait être jugée irrecevable. D’après une lecture ordinaire de la clause de non-responsabilité d’InterCall, il est apparent qu’InterCall ne considérait pas que sa proposition constituait sa réponse finale à la DP, mais qu’il s’agissait plutôt d’une première étape dans les négociations entre elle et TPSGC. Ces négociations auraient sans doute modifié les modalités de la DP, modifications qui seraient reflétées dans tout contrat ultérieur. Le Tribunal fait remarquer que cette clause de non-responsabilité figurait à la section technique, ainsi que dans les sections financières originale et modifiée de sa proposition. Bien qu’InterCall soutienne maintenant que le clause de non-responsabilité soit extrinsèque, il est évident qu’elle faisait partie de la soumission.

14. Le Tribunal n’accepte pas non plus l’argument d’InterCall selon lequel, même si la clause de non-responsabilité est jugée faire partie de sa soumission, son interprétation dans le contexte du reste de la soumission laisse entendre qu’InterCall avait pleinement l’intention de se conformer à toutes les dispositions de l’invitation telle que rédigées. Au contraire, la clause de non-responsabilité indique clairement que InterCall était d’avis que ni la DP ni sa proposition n’avait force exécutoire, mais qu’elles étaient simplement un point de départ pour les négociations.

15. En ce qui concerne l’argument subsidiaire d’InterCall selon lequel, même si le Tribunal concluait que la clause de non-responsabilité pouvait modifier une exigence obligatoire de l’invitation, en vertu de l’équité procédurale, TPSGC était tenu de demander des éclaircissements à InterCall sur cette question, le Tribunal fait remarquer que la DP n’exigeait pas que TPSGC demande des éclaircissements aux soumissionnaires. De plus, ni l’ACI ni l’ALÉCC n’impose une telle obligation sur l’entité acheteuse.

16. Puisqu’elle ne satisfaisait pas à ce critère obligatoire, la soumission d’InterCall était correctement considérée irrecevable, et le Tribunal n’a pas besoin de se pencher sur la plainte au deuxième motif concernant les données sur les prix.

17. Par conséquent, le Tribunal conclut que la plainte ne démontre pas, dans une mesure raisonnable, que la procédure du marché public n’a pas été suivie conformément aux accords commerciaux pertinents.

18. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal n’enquêtera pas sur la plainte et tient la question pour réglée.

DÉCISION

19. Aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal a décidé de ne pas enquêter sur la plainte.


1 . L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47 [Loi sur le TCCE].

2 . D.O.R.S./93-602 [Règlement].

3 . Accord de libre-échange nord-américain entre le gouvernement du Canada, le gouvernement des États-Unis d’Amérique et le gouvernement des États-Unis du Mexique, 17 décembre 1992, R.T.C. 1994, no 2 (entré en vigueur le 1er janvier 1994).

4 . 18 juillet 1994, Gaz. C. 1995.I.1323, en ligne : Secrétariat du commerce intérieur <http://www.ait-aci.ca/index_fr/ait.htm>.

5 . 15 avril 1994, en ligne : Organisation mondiale du commerce <http://www.wto.org/french/docs_f/legal_f/final_f.htm>.

6 . Accord de libre-échange entre le gouvernement du Canada et le gouvernement de la République du Chili, R.T.C. 1997, no 50 (entré en vigueur le 5 juillet 1997).

7 . Conformément à l’annexe 1001.1b-2 de l’ALÉNA, les services en question sont exclus de cet accord commercial. Les services en question n’entrent pas dans la portée d’application de l’AMP.

8 . Plainte, onglet I à la p. 10.