PROMAXIS SYSTEMS INC.


PROMAXIS SYSTEMS INC.
c.
MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX
Dossier no PR-2010-001

Décision et motifs rendus
le lundi 30 août 2010


TABLE DES MATIÈRES


EU ÉGARD À une plainte déposée par Promaxis Systems Inc. aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47;

ET À LA SUITE D’une décision d’enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

ENTRE

PROMAXIS SYSTEMS INC.

Partie plaignante

ET

LE MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

Institution fédérale

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que plainte n’est pas fondée.

Aux termes de l’article 30.16 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur accorde au ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux le remboursement des frais raisonnables qu’il a engagés pour répondre à la plainte, ces frais devant être payés par Promaxis Systems Inc. En conformité avec la Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure de plainte portant sur un marché public, l’indication provisoire du degré de complexité de la présente plainte donnée par le Tribunal canadien du commerce extérieur se situe au degré 1, et l’indication provisoire du montant de l’indemnisation se chiffre à de 1 000 $. Si l’une ou l’autre des parties n’est pas d’accord en ce qui a trait à l’indication provisoire du degré de complexité ou à l’indication provisoire du montant de l’indemnisation, elle peut déposer des observations auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur, en conformité avec l’article 4.2 de la Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure de plainte portant sur un marché public. Le Tribunal canadien du commerce extérieur se réserve la compétence de fixer le montant définitif de l’indemnisation.

André F. Scott
André F. Scott
Membre présidant

Dominique Laporte
Dominique Laporte
Secrétaire

Membre du Tribunal : André F. Scott, membre présidant

Directeur : Randolph W. Heggart

Enquêteur principal : Michelle Mascoll

Conseiller juridique pour le Tribunal : Nick Covelli

Partie plaignante : Promaxis Systems Inc.

Conseillers juridiques pour la partie plaignante : Martin G. Masse
Corinne E. Brûlé

Partie intervenante : L-3 Communications MAS (Canada) Inc.

Institution fédérale :Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux

Conseillers juridiques pour l’institution fédérale : Susan D. Clarke
Ian McLeod

Veuillez adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

1. Le 16 avril 2010, Promaxis Systems Inc. (Promaxis) déposait une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur 1 à l’égard d’un marché public (invitation no W8484-096157/B) passé par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (TPSGC) au nom du ministère de la Défense nationale (la Défense) en vue de la prestation de services de maintenance de publications.

2. Promaxis allègue que TPSGC a incorrectement déclaré sa soumission non conforme à deux exigences techniques obligatoires. Plus particulièrement, Promaxis allègue que TPSGC a incorrectement décidé qu’un des traducteurs proposés par Promaxis ne disposait pas de la cote de sécurité de niveau secret appropriée.

3. Promaxis demande, à titre de mesure corrective, que le Tribunal recommande à TPSGC de résilier le contrat adjugé à L-3 Communications MAS (Canada) Inc. (L-3) et de procéder à une nouvelle évaluation de sa soumission. Promaxis demande également, si TPSGC conclut que le contrat aurait dû lui être adjugé, que TPSGC lui adjuge le contrat et la dédommage pour les profits qu’elle aurait réalisés entre le 1er avril 2010 et la date à laquelle le contrat lui serait adjugé. Subsidiairement, Promaxis demande d’être dédommagée, entre autres, pour les profits qu’elle aurait réalisés si TPSGC avait mené la procédure de passation du marché conformément aux obligations commerciales du Canada et lui avait adjugé le contrat. De plus, Promaxis demande le remboursement des frais raisonnables qu’elle a engagés pour la préparation et le traitement de la plainte.

4. Le 23 avril 2010, aux termes du paragraphe 30.13(2) de la Loi sur le TCCE et de l’article 101 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur 2 , le Tribunal informait les parties qu’il avait décidé d’enquêter sur la plainte étant donné que cette dernière répondait aux exigences du paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE et aux conditions énoncées au paragraphe 7(1) du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics 3 .

5. Le 28 avril 2010, TPSGC confirmait qu’un contrat avait été adjugé à L-3.

6. Le 6 mai 2010, le Tribunal accordait à TPSGC une prorogation de délai pour lui permettre de déposer un rapport de l’institution fédérale (RIF). Le Tribunal accordait une nouvelle prorogation le 17 mai 2010.

7. Le 3 juin 2010, TPSGC déposait un RIF auprès du Tribunal conformément au paragraphe 103(2) des Règles.

8. Le 4 juin 2010, aux termes de l’article 30.17 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal accordait à L-3 le droit d’intervenir dans l’enquête. Toutefois, L-3 n’a pas donné suite.

9. Le 15 juin 2010, conformément au paragraphe 104(1) des Règles, Promaxis déposait ses commentaires sur le RIF.

10. Ni les parties ni l’intervenant n’ont demandé la tenue d’une audience. Les renseignements au dossier étant suffisants pour déterminer le bien-fondé de la plainte, le Tribunal a décidé qu’une audience n’était pas nécessaire et a statué sur la plainte sur la foi des représentations écrites.

PROCÉDURE DE PASSATION DU MARCHÉ PUBLIC

11. Le 8 janvier 2010, TPSGC publiait la demande de propositions (DP) en cause.

12. La DP prévoit ce qui suit :

PARTIE 1 – RENSEIGNEMENTS GÉNÉRAUX

[...]

2. Sommaire

[...]

Il y a une exigence de sécurité associée à cette exigence. Pour plus de renseignements, consultez la partie 6 – Exigence relative à la sécurité, exigence financière et autres exigences, et la partie 7 – Clauses du contrat subséquent. Les soumissionnaires devraient également consulter le document « Exigences de sécurité dans les demandes de soumissions de TPSGC – Instructions pour les soumissionnaires » (http://www.tpsgc-pwgsc.gc.ca/app-acq/lc-pl/lc-pl-fra.html#a31) sur le site Web des Documents uniformisés d’approvisionnement ministériels.

[...]

PARTIE 4 – PROCÉDURES D’ÉVALUATION ET CRITÈRES DE SÉLECTION

[...]

1.1.1 Critères techniques obligatoires

[...]

O.5 [...]

Le soumissionnaire doit proposer au minimum le nombre de ressources suivant pour chaque catégorie de personnel :

[...]

Deux (2) traducteurs ayant une cote de sécurité de niveau secret [...].

O.7 Le soumissionnaire doit également respecter les exigences de sécurité mentionnées au paragraphe 3, Exigence relative à la sécurité, de la partie 7 – Clauses du contrat subséquent, à la date de clôture des soumissions . Afin de démontrer sa conformité, l’offrant doit :

[...]

b) fournir les renseignements suivants à l’égard de chaque personne proposée par le soumissionnaire (y compris les sous-traitants) qui devront avoir accès à des renseignements protégés ou classifiés, OTAN non classifiés ou OTAN classifiés, ou à des biens protégés ou classifiés ou à des lieux de travail dont l’accès est réglementé :

- nom de l’individu tel qu’il apparaît sur le formulaire de demande de cote de sécurité;
- niveau de cote de sécurité obtenu (p. ex. cote de fiabilité, secret, OTAN secret);
- numéro d’identification – ce numéro est fourni par la Direction de la sécurité industrielle canadienne [DSIC] de TPSGC lors de la délivrance d’une cote de sécurité à une personne.

[...]

PARTIE 6 – EXIGENCE RELATIVE À LA SÉCURITÉ, EXIGENCE FINANCIÈRE ET AUTRES EXIGENCES

1. Exigence relative à la sécurité

1. À la date de clôture des soumissions , les conditions suivantes doivent être respectées :

a) le soumissionnaire (y compris les sous-traitants) doit détenir une attestation de sécurité d’organisme valide conformément au paragraphe 3 de la partie 7 – Clauses du contrat subséquent;

b) les personnes proposées par le soumissionnaire (y compris les sous-traitants) nécessitant l’accès à des renseignements ou à des biens classifiés ou protégés ou à des lieux de travail dont l’accès est réglementé doivent respecter les exigences relatives à la sécurité indiquées au paragraphe 3 de la partie 7 – Clauses du contrat subséquent;

c) le soumissionnaire doit donner le nom de toutes les personnes (y compris les sous-traitants) nécessitant l’accès à des renseignements ou des biens classifiés ou protégés ou à des lieux de travail dont l’accès est réglementé.

2. Pour plus de renseignements sur les exigences de sécurité, les soumissionnaires doivent consulter le document « Exigences de sécurité dans les demandes de soumissions de TPSGC – Instructions pour les soumissionnaires » (http://www.tpsgc-pwgsc.gc.ca/app-acq/lc-pl/lc-pl-fra.html#a31) sur le site Web des Documents uniformisés d’approvisionnement ministériels.

[...]

PARTIE 7 – CLAUSES DU CONTRAT SUBSÉQUENT

[...]

3. Exigence relative à la sécurité

[...]

2. Les employés de l’entrepreneur nécessitant l’accès à des renseignements ou des biens PROTÉGÉS ou CLASSIFIÉS ou à des lieux de travail dont l’accès est réglementé doivent CHACUN détenir une attestation de sécurité du personnel valide de niveau COTE DE FIABILITÉ ou SECRET, selon le cas, requise, attribuée ou approuvée par la [Direction de la sécurité industrielle canadienne], TPSGC.

[Traduction]

13. Le document en ligne intitulé « Exigences de sécurité dans les demandes de soumission de TPSGC – Instructions pour les soumissionnaires »4 , auquel renvoient le paragraphe 2 de la partie 1 et le paragraphe 1.2 de la partie 6 de la DP, prévoit ce qui suit :

5. Si le soumissionnaire désire proposer les services d’une personne qui a obtenu une cote de fiabilité ou une autorisation de sécurité délivrée par un ministère ou un organisme gouvernemental autre que la DSIC de TPSGC, il doit communiquer avec la DSIC et demander un transfert ou un duplicata de cette cote ou autorisation. La DSIC expliquera alors au soumissionnaire quelle est la marche à suivre.

Il faut noter que le temps requis pour compléter les enquêtes de sécurité peut varier selon le niveau de sécurité demandé. S’il est obligatoire de répondre aux exigences en matière de sécurité à la date de clôture des soumissions, le soumissionnaire doit noter que toutes les exigences en matière de sécurité doivent être satisfaites avant la date de clôture, incluant tout transfert ou duplicata de cote de fiabilité ou d’autorisation de sécurité.

14. Le 14 janvier 2010, Promaxis envoyait un courriel à TPSGC dans lequel elle demandait si TPSGC considérerait que les exigences de sécurité seraient respectées si une demande de cote de sécurité de niveau secret avait été faite mais n’avait pas été reçue5 . Le 15 janvier 2010, TPSGC répondait qu’il ne considérerait pas que cela constituait un respect de l’exigence. TPSGC a répondu que l’exigence technique obligatoire O.7 énonce que le soumissionnaire doit respecter les exigences de sécurité prévues dans la DP à la date de clôture des soumissions6 .

15. Le 26 janvier 2010, Promaxis déposait auprès de la DSIC une demande de duplicata de la cote de sécurité de niveau secret attribuée par la Défense au traducteur proposé7 . Promaxis n’a pas mentionné que la date de clôture de la DP approchait.

16. La DSIC recevait la demande le 27 janvier 2010 et lui attribuait un numéro d’identification.

17. Le 28 janvier 2010, la DSIC demandait le transfert du dossier d’attestation de sécurité pour étude à la Défense.

18. Le même jour, TPSGC publiait la modification no 3 à la DP, laquelle reportait la date de clôture des soumissions du 29 janvier au 3 février 2010.

19. Le 29 janvier 2010, la Défense avisait la DSIC que le traducteur proposé disposait d’une cote de sécurité de niveau secret qu’elle lui avait attribuée et confirmait qu’elle localiserait et transférerait le dossier à la DSIC en temps voulu.

20. Le 2 février 2010, TPSGC publiait la modification no 5 à la DP, laquelle reportait encore une fois la date de clôture cette fois au 5 février 2010.

21. Le 5 février 2010, date de clôture des soumissions, TPSGC recevait six propositions, dont celle de Promaxis8 . Dans sa proposition, Promaxis soumettait les renseignements relatifs à la cote de sécurité attribuée par la Défense au traducteur proposé9 .

22. Le 8 février 2010, la DSIC procédait à une évaluation initiale de la demande de Promaxis à l’égard du traducteur proposé et lui attribuait le statut « en suspens ».

23. Le 12 février 2010, lors de l’évaluation des soumissions, l’agent de négociation des marchés de TPSGC communiquait avec la DSIC afin de confirmer que le personnel proposé par Promaxis, y compris le traducteur proposé, disposait des cotes de sécurité requises. La DSIC répondait alors que le statut de la demande relative au traducteur proposé était « en suspens »10 . Par conséquent, l’agent de négociation des marchés de TPSGC a déterminé que la proposition de Promaxis respectait toutes les exigences techniques obligatoires à l’exception d’O.5 et O.7.

24. La DSIC recevait enfin le dossier de sécurité de la Défense pour le traducteur proposé le 2 mars 2010.

25. Le 12 mars 2010, la DSIC avisait Promaxis qu’elle ne pouvait donner suite à sa demande jusqu’à ce qu’une preuve de citoyenneté canadienne soit fournie.

26. Le 24 mars 2010, TPSGC adjugeait un contrat à L-3.

27. Le 26 mars 2010, Promaxis apprenait l’adjudication du contrat et le rejet de sa proposition pour cause de non-conformité.

28. Le 30 mars 2010, en réponse à une demande de Promaxis, TPSGC lui fournissait une copie de la grille d’évaluation de sa proposition.

29. Plus tard à la même date, Promaxis écrivait à TPSGC pour signaler son opposition à la détermination de non-conformité de sa proposition et plus précisément à la détermination que le traducteur proposé ne remplissait pas les exigences de sécurité énoncées dans la DP.

30. Le 31 mars 2010, TPSGC avisait Promaxis que l’affaire ferait l’objet d’un examen.

31. Également le 31 mars 2010, la DSIC accordait enfin à Promaxis sa demande de duplicata de la cote de sécurité attribuée parla Défense au traducteur proposé.

32. Le 1er avril 2010, après avoir examiné l’affaire de paire avec la DSIC, TPSGC écrivait à Promaxis, l’avisant qu’il y avait eu examen et que TPSGC confirmait sa décision selon laquelle la proposition de Promaxis n’était pas conforme aux exigences de sécurité de la DP11 .

33. Dix jours ouvrables plus tard, soit le 16 avril 201012 , Promaxis déposait sa plainte auprès du Tribunal.

ANALYSE DU TRIBUNAL

34. Le paragraphe 30.14(1) de la Loi sur le TCCE exige que, dans son enquête, le Tribunal limite son étude à l’objet de la plainte. Au terme de l’enquête, le Tribunal doit déterminer la validité de la plainte en fonction du respect des procédures et des autres exigences prescrites à l’égard du contrat désigné. L’article 11 du Règlement prévoit que le Tribunal doit décider si la procédure du marché public a été suivie conformément aux accords commerciaux applicables, à savoir, en l’espèce, l’Accord sur le commerce intérieur 13 .

35. Le paragraphe 506(6) de l’ACI prévoit que « [l]es documents d’appel d’offres doivent indiquer clairement les exigences du marché public, les critères qui seront appliqués dans l’évaluation des soumissions et les méthodes de pondération et d’évaluation des critères ».

36. Promaxis soutient que TPSGC a procédé à la passation du marché d’une manière incompatible avec le paragraphe 506(6) de l’ACI 1) en interprétant erronément l’exigence technique obligatoire O.5 comme exigeant une cote de sécurité de niveau secret attribuée par la DSIC, 2) en ne tenant pas compte de l’élément de preuve selon lequel le traducteur proposé par Promaxis disposait d’une cote de sécurité de niveau secret qui respectait les exigences techniques obligatoires O.5 et O.7 et 3) en ne reconnaissant pas que l’exigence d’obtention de la cote de sécurité requise ne s’appliquait qu’une fois le contrat adjugé.

37. TPSGC soutient que les exigences de sécurité prévues dans la DP doivent être prises dans leur ensemble, comme c’est généralement le cas des dispositions d’invitations. TPSGC soutient que les exigences obligatoires prises dans leur ensemble prévoient les exigences de sécurité suivantes :

1) le traducteur proposé doit détenir une cote de sécurité de niveau secret;

2) la cote de sécurité de niveau secret doit être une cote attribuée par la DSIC;

3) la cote de sécurité requise de la DSIC doit avoir été obtenue et être en vigueur à la date de clôture des soumissions.

38. Promaxis soutient que l’interprétation de TPSGC selon laquelle toutes les exigences de la DP doivent être lues ensemble constitue un ensemble modifié d’exigences de sécurité obligatoires qui n’apparaît nulle part dans la DP et que TPSGC n’a pas le droit d’interpréter l’exigence technique obligatoire O.5 de manière à exiger que la cote de sécurité de niveau secret soit attribuée par la DSIC.

39. Promaxis soutient que le traducteur proposé détient une cote de sécurité de niveau secret certifiée par la Défense – le ministère client de l’invitation – et qu’il était donc apte à effectuer le travail de traduction prévu par la DP.

40. TPSGC soutient qu’en tant que ministère responsable de la passation du marché, il doit s’assurer que les exigences de sécurité d’une invitation sont respectées, soit au moyen d’une cote de la DSIC ou, si un autre ministère a attribué la cote de sécurité, en examinant la cote de sécurité, en demandant des renseignements ou des documents supplémentaires au besoin et en fournissant une approbation indépendante de la cote de sécurité (duplicata) – un processus pouvant prendre jusqu’à six semaines étant donné les retards du processus de transfert des dossiers.

41. TPSGC soutient qu’en déterminant que la proposition de Promaxis ne respectait pas les exigences obligatoires de la DP, TPSGC a agi de façon raisonnable et conforme à ses responsabilités. TPSGC soutient que le libellé de l’exigence technique obligatoire O.7, du paragraphe 1 de la partie 6 et du paragraphe 3 de la partie 7 de la DP énonce clairement que la cote de sécurité de niveau secret de la DSIC était obligatoire à la date de clôture des soumissions. Lorsque TPSGC a communiqué avec la DSIC le 12 février 2010 afin de vérifier si la cote de sécurité avait été obtenue pour le traducteur proposé, la DSIC l’a avisé que le processus d’étude était en cours et que la cote de sécurité requise n’avait pas été attribuée à la date de clôture des soumissions.

42. Promaxis convient que l’exigence technique obligatoire O.7 exige qu’une cote de sécurité de niveau secret soit « requise, attribuée ou approuvée » par la DSIC, mais soutient que rien dans la DP n’indique qu’une cote de sécurité de la DSIC doit avoir été obtenue ou être en vigueur à la clôture des soumissions. Promaxis soutient également que le paragraphe 3 de la partie 7 de la DP est une exigence relative au personnel de l’entrepreneur et que le traducteur proposé disposait de la cote de sécurité requise lorsque le contrat a été adjugé14 .

43. Le Tribunal est d’avis que les différentes dispositions d’une DP ne doivent pas être lues séparément mais plutôt dans le contexte de l’ensemble de la DP. Une lecture contextuelle d’une disposition d’une DP est nécessaire afin de discerner les intentions de l’entité acheteuse et de favoriser l’atteinte de l’objectif global de l’invitation.

44. Gardant ce principe à l’esprit, le Tribunal fait d’abord observer que le paragraphe 2 de la partie 1 (« RENSEIGNEMENTS GÉNÉRAUX ») de la DP attire l’attention du soumissionnaire sur l’existence d’une « exigence de sécurité » associée à la DP. L’usage du singulier plutôt que du pluriel est significatif, car il indique que toutes les questions de sécurité de la DP sont liées entre elles. La partie 1 renvoie le lecteur expressément aux parties 6 et 7, ainsi qu’au document en ligne, « Exigences de sécurité dans les demandes de soumissions de TPSGC ». Cela présente au lecteur le contexte des questions de sécurité traitées dans la DP.

45. La partie 6 de la DP est intitulée « EXIGENCE RELATIVE À LA SÉCURITÉ, EXIGENCE FINANCIÈRE ET AUTRES EXIGENCES ». Le paragraphe 1 est assorti du sous-titre « Exigence relative à la sécurité ». Le paragraphe prévoit qu’à la «  date de clôture des soumissions  », certaines « conditions [...] doivent être respectées ». Il convient de mentionner certains points au sujet de ce libellé : 1) l’usage du mot « doivent » indique que les conditions sont des exigences obligatoires et 2) ces exigences obligatoires doivent être respectées à la date de clôture des soumissions. Le paragraphe énumère ensuite, parmi les exigences obligatoires devant être respectées à la date de clôture des soumissions, les exigences relatives à la sécurité « indiquées au paragraphe 3 de la partie 7 ». De plus, comme dans la partie 1, il y a renvoi au document en ligne « Exigences de sécurité dans les demandes de soumissions de TPSGC ». Ces renvois croisés confirment la thèse que les conditions de sécurité traitées dans la DP sont liées entre elles et doivent être lues dans leur ensemble.

46. Le paragraphe 3 (« Exigence relative à la sécurité ») de la partie 7 de la DP exige que les « employés de l’entrepreneur » disposent chacun d’une cote de sécurité valable « requise, attribuée ou approuvée » par la DSIC. Le choix du terme « entrepreneur » plutôt que celui de « soumissionnaire » ou d’« offrant » pourrait suggérer que l’exigence de cote de sécurité ne s’applique que lorsque les travaux prévus par le contrat sont entrepris. Toutefois, à la lumière du libellé du paragraphe 1 de la partie 6, il est clair qu’en fait les cotes de sécurité doivent avoir été obtenues « à la date de clôture des soumissions »15 .

47. Le Tribunal souligne également que le libellé du paragraphe 3 de la partie 7 de la DP pourrait laisser entendre que la cote de sécurité pertinente ne doit pas obligatoirement être délivrée ou attribuée par la DSIC. Le paragraphe 3 indique plutôt que la cote de sécurité pourrait être « requise » ou « approuvée » par la DSIC. Lu séparément, ce paragraphe pourrait sembler envisager que les employés en question pourraient détenir une cote de sécurité reconnue par la DSIC mais délivrée ou attribuée par un autre organisme (p. ex. le MDN ou l’OTAN). Cependant, le paragraphe 3 ne peut être lu en faisant abstraction des autres dispositions.

48. L’exigence technique obligatoire O.7 du paragraphe 4 de la DP soutient l’avis du Tribunal selon laquelle les exigences de sécurité ne peuvent être lues séparément, car elle ajoute qu’« afin de démontrer sa conformité » aux exigences relatives à la sécurité mentionnées au paragraphe 3 de la partie 7 à la date de clôture des soumissions, « l’offrant » doit soumettre le niveau de cote de sécurité obtenu de chaque personne et un « numéro d’identification ». Cette liste explique que le numéro d’identification est le numéro fourni par la DSIC « lors de la délivrance » d’une cote de sécurité. Par conséquent, le soumissionnaire doit prouver à TPSGC qu’à la date de clôture des soumissions, chaque individu dispose du niveau de cote de sécurité requis de la DSIC.

49. Cette interprétation est confirmée par le libellé du document en ligne intitulé « Exigences de sécurité dans les demandes de soumissions de TPSGC – Instructions pour les soumissionnaires », lequel est intégré à la DP par un renvoi au paragraphe 2 de la partie 1 et au paragraphe 1 de la partie 6 de la DP. Le paragraphe 5 de ce document concerne précisément la situation dans laquelle se trouve Promaxis, lorsqu’un soumissionnaire souhaite proposer des personnes détenant une cote de sécurité d’un ministère ou d’un organisme autre que la DSIC. Dans un tel cas, le paragraphe prévoit que « [...] le soumissionnaire [...] doit communiquer avec la DSIC et demander un transfert ou un duplicata de cette cote [...] » et que « [s]’il est obligatoire de répondre aux exigences en matière de sécurité à la date de clôture des soumissions, le soumissionnaire doit noter que toutes les exigences en matière de sécurité doivent être satisfaites avant la date de clôture, incluant tout transfert ou duplicata de cote de fiabilité ou d’autorisation de sécurité ».

50. La dernière disposition de la DP ayant une portée sur la présente analyse est l’exigence technique obligatoire O.5 de la partie 4. Lue séparément, l’exigence technique obligatoire O.5 exige seulement que le soumissionnaire propose des traducteurs ayant une « cote de sécurité de niveau secret ». Rien n’indique quand la cote doit être obtenue, mais l’usage du présent laisse entendre que les traducteurs proposés doivent disposer présentement de la cote de sécurité; autrement dit au moment de la soumission. Le ministère ou l’organisme responsable n’est pas non plus mentionné, ce qui, d’après ce seul libellé, suggère que les traducteurs peuvent détenir une cote de sécurité de n’importe quel organisme (p. ex. du MDN) et non nécessairement de la DSIC. Toutefois, une telle lecture de l’exigence technique obligatoire O.5 fait abstraction des autres dispositions relatives à la sécurité de la DP, lesquelles énoncent clairement que les cotes de sécurité en question doivent être délivrées par la DSIC à la date de clôture des soumissions.

51. Pour les motifs qui précèdent, le Tribunal convient avec TPSGC que la DP exigeait que Promaxis propose un traducteur qui détenait une cote de sécurité de niveau secret délivrée par la DSIC à la date de clôture des soumissions.

52. Cette exigence a été soulignée par TPSGC dans son courriel à Promaxis le 15 janvier 2010, et Promaxis semble l’avoir comprise comme telle, comme en témoigne sa tentative tardive d’obtenir subséquemment de la DSIC un duplicata de la cote de sécurité de niveau secret.

53. Dans des décisions antérieures, le Tribunal a conclu que les entités acheteuses doivent évaluer la conformité des soumissionnaires aux exigences obligatoires de manière complète et rigoureuse16 . Par conséquent, les éléments de preuve au dossier indiquent que TPSGC a agi raisonnablement en décidant que la proposition de Promaxis ne respectait pas les exigences de la DP. Comme Promaxis proposait dans sa soumission un traducteur qui ne disposait pas déjà d’une cote de sécurité de niveau secret de la DSIC à la date de clôture des soumissions, il était plus que raisonnable pour TPSGC de conclure que la soumission de Promaxis ne respectait pas les critères de sécurité obligatoires énoncés dans la DP.

54. Le Tribunal conclut par conséquent que la plainte n’est pas fondée.

Frais

55. Le Tribunal accorde à TPSGC le remboursement des frais raisonnables qu’il a engagés pour répondre à la plainte. Pour décider du montant de l’indemnisation en l’espèce, le Tribunal a tenu compte de sa Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure de plainte portant sur un marché public (la Ligne directrice), laquelle fonde l’évaluation du degré de complexité d’une plainte sur trois critères : la complexité du marché public, la complexité de la plainte et la complexité de la procédure.

56. L’indication provisoire donnée par le Tribunal relativement à la présente plainte est que son degré de complexité correspond au premier degré prévu à l’annexe A de la Ligne directrice. Le marché public n’était pas complexe, car il visait la fourniture de services courants. La plainte n’était pas complexe, car elle portait principalement sur une seule question, celle de déterminer si TPSGC avait incorrectement jugé que la proposition de Promaxis était non conforme parce qu’elle ne respectait pas les exigences obligatoires de la DP. La procédure de la plainte n’était pas complexe, car il n’y a eu aucune requête, un intervenant et aucunes observations supplémentaires déposées par les parties.

57. Par conséquent, conformément à la Ligne directrice, l’indication provisoire du montant de l’indemnisation donnée par le Tribunal se chiffre à 1 000 $.

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal détermine que plainte n’est pas fondée.

Aux termes de l’article 30.16 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal accorde à TPSGC le remboursement des frais raisonnables qu’il a engagés pour répondre à la plainte, ces frais devant être payés par Promaxis. En conformité avec la Ligne directrice, l’indication provisoire du degré de complexité de la présente plainte donnée par le Tribunal se situe au degré 1, et l’indication provisoire du montant de l’indemnisation se chiffre à 1 000 $. Si l’une ou l’autre des parties n’est pas d’accord en ce qui a trait à l’indication provisoire du degré de complexité ou à l’indication provisoire du montant de l’indemnisation, elle peut déposer des observations auprès du Tribunal, en conformité avec l’article 4.2 de la Ligne directrice. Le Tribunal se réserve la compétence de fixer le montant définitif de l’indemnisation.


1 . L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47 [Loi sur le TCCE].

2 . D.O.R.S./91-499 [Règles].

3 . D.O.R.S./93-602 [Règlement].

4 . http://www.tpsgc-pwgsc.gc.ca/app-acq/lc-pl/lc-pl-fra.html#a31, consulté le 20 juillet 2010.

5 . Pièce confidentielle 4 de TPSGC.

6 . Pièce confidentielle 5 de TPSGC.

7 . Plainte confidentielle, onglet 16.

8 . RIF, para. 28.

9 . Plainte confidentielle, onglet 15, à la p. 34.

10 . Pièce confidentielle 19 de TPSGC.

11 . Pièce confidentielle 25 de TPSGC.

12 . Le 2 et le 5 avril 2010, respectivement le Vendredi saint et le lundi de Pâques, n’étaient pas des « jours ouvrables » et n’ont donc pas été inclus dans la détermination du délai.

13 . 18 juillet 1994, Gaz. C. 1995.I.1323, en ligne : Secrétariat du commerce intérieur <http://www.ait-aci.ca/index_fr/ait.htm> [ACI]. Les services achetés sont classés dans le Numéro d’identification de biens et services (NIBS) T000G, une sous-catégorie de la catégorie générale T, laquelle comprend les produits de soutien aux communications, entre autres. Conformément à la section A de l’appendice 1001.1b-2 de l’Accord de libre-échange nord-américain entre le gouvernement du Canada, le gouvernement des États-Unis d’Amérique et le gouvernement des États-Unis du Mexique, 17 décembre 1992, R.T.C. 1994, no 2 (entré en vigueur le 1er janvier 1994), tous les services de la catégorie T sont exclus. L’annexe 4 de l’Accord sur les marchés publics, 15 avril 1994, en ligne : Organisation mondiale du commerce <http://www.wto.org/french/docs_f/legal_f/final_f.htm> [AMP], prévoit une liste des services visés; les services compris dans GSIN T000G ne figurent pas à l’annexe 4 et ne sont pas visés par l’AMP. Conformément à la section A de l’annexe Kbis-01.1-4 du chapitre Kbis de l’Accord de libre-échange entre le gouvernement du Canada et le gouvernement de la République du Chili, R.T.C. 1997, no 50 (entré en vigueur le 5 juillet 1997), tous les services de la catégorie T sont exclus. Conformément à la section A de l’annexe 1401.1-4 de l’Accord de libre-échange entre le Canada et la République du Pérou, en ligne : ministère des Affaires étrangères et du Commerce international <http://www.international.gc.ca/trade-agreements-accords-commerciaux/agr-... (entré en vigueur le 1er août 2009), tous les services de la catégorie T sont exclus.

14 . Promaxis a cité l’extrait suivant de la décision du Tribunal dans Re plainte déposée par Quatratech Services Inc. (26 janvier 2000), PR-99-032 [Quatratech], à l’appui de son assertion selon laquelle le libellé du paragraphe 3 de la partie 7 de la DP portait expressément sur les responsabilités de l’entrepreneur et qu’il ne pouvait donc s’agir que d’une exigence applicable après l’adjudication du contrat : « Quant à l’allégation de Quatratech selon laquelle le candidat d’ADGA [Group Consultants Inc.] ne détenait pas, au moment de la présentation des soumissions, les autorisations sécuritaires requises dans les documents d’appel d’offres, le Tribunal fait observer que le paragraphe 1.4 de l’[énoncé des travaux] et l’article 1.3 de l’[arrangement en matière d’approvisionnement] utilisent tous deux le terme « Contractor » (« Entrepreneur ») et, donc, qu’ils ne s’appliquent qu’une fois le contrat adjugé. En outre, l’application de l’article 1.3 de l’[arrangement en matière d’approvisionnement] est strictement limitée au personnel de l’entrepreneur devant avoir accès à des renseignements ou des biens désignés ou classifiés, ou à des lieux de travail où se trouvent de tels renseignements ou biens, et le MDN était en mesure de déterminer quand le candidat devait avoir accès à des renseignements désignés ou classifiés. »

15 . À cet égard, l’espèce peut être distinguée de l’affaire Quatratech. Les documents d’invitation de cette cause ne comprenaient aucune stipulation que les cotes de sécurité requises devaient être obtenues à la clôture des soumissions.

16 . Re plainte déposée par IBM Canada Ltée. (5 novembre 1999), PR-99-020 (TCCE) à la p. 7; Re plainte déposée par Bell Mobilité (14 juillet 2004), PR-2004-004 (TCCE) à la p. 6.