FORREST GREEN RESOURCE MANAGEMENT CORP.


FORREST GREEN RESOURCE MANAGEMENT CORP.
c.
AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA
Dossier no PR-2009-154

Décision et motifs rendus
le jeudi 12 août 2010


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À une plainte déposée par Forrest Green Resource Management Corp. aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47;

ET À LA SUITE D’une décision d’enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

ENTRE

 

FORREST GREEN RESOURCE MANAGEMENT CORP.

Partie plaignante

ET

 

L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA

Institution fédérale

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte n’est pas fondée.

Aux termes de l’article 30.16 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur accorde à l’Agence des services frontaliers du Canada le remboursement des frais raisonnables qu’elle a engagés pour répondre à la plainte, ces frais devant être payés par Forrest Green Resource Management Corp. En conformité avec l’article 4.1 et l’annexe A de la Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure de plainte portant sur un marché public, l’indication provisoire du degré de complexité de la présente plainte donnée par le Tribunal canadien du commerce extérieur est le degré 1, et l’indication provisoire du montant de l’indemnisation est de 1 000 $. Si l’une ou l’autre des parties n’est pas d’accord en ce qui a trait à l’indication provisoire du degré de complexité ou à l’indication provisoire du montant de l’indemnisation, elle peut déposer des observations auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur, en conformité avec l’article 4.2 de la Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure de plainte portant sur un marché public. Le Tribunal canadien du commerce extérieur se réserve la compétence de fixer le montant définitif de l’indemnisation.

Jason W. Downey
Jason W. Downey
Membre présidant

Dominique Laporte
Dominique Laporte
Secrétaire

Membre du Tribunal :

Jason W. Downey, membre présidant

   

Directeur :

Randolph W. Heggart

   

Enquêteurs principaux :

Cathy Turner
Michelle Mascoll

   
   

Conseiller juridique pour le Tribunal :

Nick Covelli

   

Partie plaignante :

Forrest Green Resource Management Corp.

   

Conseillers juridiques pour la partie plaignante :

Riyaz Dattu
Kevin Glass
Devin Doyle

   

Institution fédérale :

Agence des services frontaliers du Canada

   

Conseiller juridique pour l’institution fédérale :

Agnieszka Zagorska

Veuillez adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier Ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel :

EXPOSÉ DES MOTIFS

PLAINTE

1. Le 7 avril 2010, Forrest Green Resource Management Corp. (Forrest Green) déposait une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur 1 à l’égard d’un marché public (invitation no 1000279086) passé par l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) en vue de la prestation de services relatifs à des rapports de solvabilité.

2. Forrest Green allègue que l’ASFC n’a pas évalué sa proposition conformément aux dispositions des documents d’appel d’offres. Forrest Green demande, à titre de mesure corrective, que le Tribunal recommande à l’ASFC de lancer une nouvelle invitation. Elle demande aussi le remboursement des frais raisonnables qu’elle a engagés pour la préparation et le traitement de la plainte de même que les frais de préparation de sa soumission.

3. Le 15 avril 2010, le Tribunal avisait les parties qu’il avait décidé d’enquêter sur une partie de la plainte puisque celle-ci répondait aux exigences du paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE et aux conditions énoncées au paragraphe 7(1) du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics 2 .

4. Le Tribunal n’a pas rendu d’ordonnance de report d’adjudication du contrat aux termes du paragraphe 30.13(3) de la Loi sur le TCCE étant donné que les éléments de preuve au dossier indiquaient qu’un contrat avait déjà été passé. Dans une lettre datée du 20 avril 2010, l’ASFC confirmait au Tribunal qu’un contrat avait été adjugé à Equifax Canada Inc. (Equifax).

5. Le 10 mai 2010, l’ASFC déposait un rapport de l’institution fédérale (RIF) auprès du Tribunal en application de l’article 103 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur 3 .

6. Le 31 mai 2010, en vertu de l’article 104 des Règles, Forrest Green déposait ses observations sur le RIF.

7. Les renseignements au dossier étant suffisants pour déterminer le bien-fondé de la plainte, le Tribunal a décidé qu’une audience aux termes du paragraphe 105(1) des Règles n’était pas nécessaire et, en vertu de l’alinéa 25c), a statué sur la plainte sur la foi des représentations écrites.

PROCÉDURE DE PASSATION DU MARCHÉ PUBLIC

8. Le 23 décembre 2009, l’ASFC publiait une demande de proposition (DP) en vue de la prestation de services relatifs à des rapports de solvabilité.

9. Les 25 et 27 janvier 2010, Forrest Green transmettait des courriels à l’ASFC exprimant ses préoccupations à l’égard des exigences obligatoires.

10. Le 8 février 2010, l’ASFC publiait la modification no 2 à la DP, qui comprenait des modifications aux critères techniques obligatoires, à l’énoncé des travaux et à l’offre financière/les principes de paiement.

11. Dans cette deuxième modification à la DP, l’ASFC réduisait le nombre estimatif de vérifications mensuelles de la solvabilité, le faisant passer d’une moyenne de 1 700 à une moyenne de 1 4004 .

12. La date de clôture des soumissions était le 22 février 2010.

13. L’ASFC a reçu trois propositions. Forrest Green et Equifax ont satisfait aux exigences obligatoires de la DP, contrairement à un autre soumissionnaire. Le 18 mars 2010, l’ASFC informait Forrest Green que le contrat avait été adjugé à Equifax.

14. Le 22 mars 2010, Forrest Green transmettait un courriel à l’ASFC afin de savoir de quelle façon le prix total du contrat avait été calculé.

15. Le 23 mars 2010, l’ASFC répondait à Forrest Green de la façon suivante : « Le prix du contrat comprend un coussin de sécurité pour permettre des demandes supplémentaires au besoin et il vise une période de trois ans. Il ne correspond pas aux 1 700 demandes mentionnées dans la DP, car il s’agissait d’une estimation à des fins de financement »5 [traduction].

16. Dans un courriel transmis en réponse le même jour, Forrest Green demandait si le contrat avait été adjugé en fonction de volumes historiques, données auxquelles seule Equifax aurait eu accès, plutôt qu’en fonction des volumes décrits dans la DP. L’ASFC a répondu ce qui suit : « Les volumes historiques ne sont pas plus élevés que ceux qui sont décrits. Nous estimons encore que le nombre de 1 700 demandes par mois est valide, mais il est beaucoup plus facile et efficace de se préparer aux imprévus, car les problèmes administratifs sont réduits d’autant »6 [traduction].

17. Le 7 avril 2010, Forrest Green déposait sa plainte auprès du Tribunal.

QUESTIONS PRÉLIMINAIRES

18. Selon certaines allégations figurant dans la plainte déposée par Forrest Green, la DP était mal conçue, ne contenait pas les définitions appropriées et était parsemée de difficultés et d’inexactitudes.

19. Forrest Green allègue aussi qu’elle a dû affronter une « discrimination systémique » [traduction] dans le cadre de marchés antérieurs et que cela était de nouveau le cas à l’égard de la DP en cause, car l’ASFC préférait « ancrer » [traduction] le contractant titulaire aux institutions fédérales.

20. Le Tribunal abordera ces questions de façon préliminaire.

21. Le paragraphe 6(1) du Règlement prévoit que le fournisseur potentiel qui souhaite déposer une plainte auprès du Tribunal « [...] doit le faire dans les 10 jours ouvrables suivant la date où il a découvert ou aurait dû vraisemblablement découvrir les faits à l’origine de la plainte ».

22. Selon le paragraphe 6(2) du Règlement, « [l]e fournisseur potentiel qui a présenté à l’institution fédérale concernée une opposition [...] et à qui l’institution refuse réparation peut déposer une plainte auprès du Tribunal dans les 10 jours ouvrables suivant la date où il a pris connaissance, directement ou par déduction, du refus, s’il a présenté son opposition dans les 10 jours ouvrables suivant la date où il a découvert ou aurait dû vraisemblablement découvrir les faits à l’origine de l’opposition ».

23. Autrement dit, une partie plaignante dispose de 10 jours ouvrables suivant la date où elle prend connaissance des faits à l’origine de l’opposition, ou suivant la date où elle aurait dû vraisemblablement les découvrir, soit pour présenter une opposition auprès de l’institution fédérale, soit pour déposer une plainte auprès du Tribunal. Si une partie plaignante présente une opposition auprès de l’institution fédérale dans le délai prévu, celle-ci peut ensuite déposer une plainte auprès du Tribunal dans les 10 jours ouvrables à partir du moment ou elle a pris connaissance, directement ou par déduction, du refus de réparation par l’institution fédérale.

24. Le Tribunal fait remarquer que l’ASFC a répondu aux questions de Forrest Green au sujet des exigences de la DP avant la clôture des soumissions. Le Tribunal fait également remarquer que la DP semble avoir été modifiée à la suite de correspondance et de commentaires de Forrest Green.

25. Le Tribunal est d’avis que rien n’obligeait Forrest Green à présenter une proposition ou à rédiger sa proposition ou ses questions d’une façon particulière7 .

26. Selon le Tribunal, si Forrest Green était d’avis que la DP était toujours problématique au moment de la clôture des soumissions, le 22 février 2010, elle avait, pour satisfaire aux exigences de l’article 6 du Règlement, jusqu’au 8 mars 2010 (c.-à-d. 10 jours ouvrables après le 22 février 2010) pour présenter une opposition à l’ASFC ou pour déposer une plainte auprès du Tribunal.

27. Selon la plainte, Forrest Green n’a pas présenté d’opposition à l’ASFC dans le délai requis en relation avec ces motifs de plainte et cette plainte a été déposée auprès du Tribunal le 7 avril 2010, soit après le délai prévu.

28. Dans IBM Canada Ltd. c. Hewlett-Packard (Canada) Ltd. 8 , la Cour d’appel fédérale a examiné l’approche du Tribunal sur cette question et a confirmé comme suit sa validité :

[18] Dans les affaires de marchés publics, le temps représente une condition essentielle. [...]

[...]

[20] [...] Les fournisseurs potentiels ne doivent donc pas attendre l’attribution d’un contrat avant de déposer toute plainte qu’ils pourraient avoir concernant la procédure. On s’attend à ce qu’ils soient vigilants et qu’ils réagissent dès qu’ils découvrent ou auraient vraisemblablement dû découvrir un vice de procédure. [...]

[21] Le Tribunal a précisé clairement, dans le passé, que les plaintes fondées sur l’interprétation des termes d’une DP devaient avoir été présentées dans les dix jours suivant le moment où l’ambiguïté ou le manque de clarté qu’on allègue était devenu ou aurait dû normalement devenir apparent.

29. Par conséquent, le Tribunal conclut que la plainte, sur ces motifs, n’a pas été déposée en temps opportun.

30. En ce qui concerne les commentaires de Forrest Green selon lesquels cette dernière a fait l’objet de « discrimination par le passé » [traduction] ou, de façon générale, d’une « attitude inéquitable » [traduction] de la part des entités acheteuses, le Tribunal se déclare forum non conveniens pour régler ces difficultés antérieures. Comme il est prévu au paragraphe 30.14(1) de la Loi sur le TCCE, lorsqu’il mène une enquête, le Tribunal doit limiter son étude à l’objet de la plainte.

ANALYSE DU TRIBUNAL

31. Aux termes de l’article 30.14 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal doit, lorsqu’il a décidé d’enquêter, limiter son étude à l’objet de la plainte et, à la fin de l’enquête, déterminer la validité de la plainte en fonction des critères et procédures établis par règlement pour le contrat spécifique.

32. L’article 11 du Règlement prévoit que le Tribunal doit établir si le marché public a été passé conformément aux accords commerciaux applicables, soit, en l’espèce, l’Accord sur le commerce intérieur 9 .

33. Le paragraphe 506(6) de l’ACI prévoit que « [l]es documents d’appel d’offres doivent indiquer clairement les conditions du marché public, les critères qui seront appliqués dans l’évaluation des soumissions et les méthodes de pondération et d’évaluation des critères ».

34. Forrest Green allègue que le processus d’évaluation n’était pas conforme parce que « [l]a valeur est [...] supérieure à celle qui est indiquée dans la DP » [traduction]. Selon les calculs de Forrest Green, la valeur du contrat révèle que le contrat, ou son évaluation, était fondé sur un nombre de rapports beaucoup plus important que ne l’indiquait la DP.

35. Forrest Green allègue aussi que le contractant titulaire était avantagé parce qu’il connaissait les tendances historiques en relation avec les demandes d’information initiales et secondaires, ce qui lui a permis d’adapter sa proposition en conséquence.

36. Selon Forrest Green, l’ASFC aurait dû partagé les tendances quant aux données avec tout les soumissionnaires et, en refusant ainsi l’accès à cette information, l’ASFC a entaché de confusion la procédure de passation du marché public, ce qui l’a obligée à présenter une soumission désavantageuse.

37. Selon l’article 2.1 de la partie 4 de la DP, les soumissions « [...] doivent satisfaire aux exigences de l’appel d’offres de même qu’à tous les critères d’évaluation technique obligatoires pour être déclarées recevables. La soumission conforme ayant le prix évalué le plus bas sera recommandée aux fins de l’attribution d’un contrat » [traduction].

38. L’annexe « C » de la modification no 2 à la DP indique de quelle façon un soumissionnaire devait présenter sa proposition financière. Elle prévoit notamment ce qui suit :

Le soumissionnaire doit proposer un prix ferme tout inclus par demande pour la période du contrat et la période optionnelle. Les prix comprennent l’accès au système (nom d’utilisateur et mot de passe) pour quelque 400 utilisateurs. Il n’y aura pas de frais en sus pour les utilisateurs supplémentaires qui auraient accès au système.

[Traduction]

Le prix total de la proposition financière devait être égal à la somme du prix total pour la période initiale et du prix total pour la période optionnelle.

39. Le Tribunal conclut que les critères d’évaluation sont clairs, que les exigences obligatoires sont claires et qu’il est tout aussi clair que la soumission conforme affichant le prix d’évaluation le plus bas serait alors recommandée aux fins de l’attribution d’un contrat.

40. Le Tribunal fait d’ailleurs remarquer que la formule d’évaluation a fait l’objet d’une question et d’une réponse au cours de la période d’invitation10 .

41. Dans des décisions antérieures, le Tribunal a clairement indiqué qu’il incombe aux fournisseurs de répondre et de satisfaire aux critères énoncés dans une invitation11 . Le Tribunal a aussi clairement déclaré qu’il incombe aux soumissionnaires de demander des éclaircissements avant de présenter une offre12 .

42. Le Tribunal est d’avis que les modifications à la DP étaient claires. En particulier, la modification no 2 diminuait le nombre moyen de vérifications par mois d’une moyenne de 1 700 à une moyenne de 1 400.

43. Le Tribunal fait remarquer que le terme « moyen » [traduction] est utilisé et que, dans le RIF, l’ASFC a soutenu que « [r]ien ne garantissait le nombre de vérifications de solvabilité à être effectuées chaque mois aux termes du contrat, car elle ne pouvait prédire ses besoins opérationnels » [traduction].

44. Tel que le Tribunal a affirmé par le passé, en général, l’entité acheteuse a le pouvoir de définir ses propres besoins en matière d’approvisionnement. Cependant, le Tribunal a aussi indiqué que, même si l’institution fédérale a le droit de définir les paramètres d’une DP, elle doit le faire d’une façon raisonnable. Elle n’est cependant pas autorisée à établir des conditions impossibles à satisfaire13 .

45. Le Tribunal reconnaît que le courriel du 23 mars 2010 de l’ASFC peut avoir créé une certaine confusion en l’espèce. Dans son courriel, l’ASFC déclare qu’elle « [e]stime encore que le nombre de 1 700 demandes par mois demeure une précision valable [...] » [traduction, nos italiques] alors que la DP avait été modifiée le 8 février 2010 pour dorénavant faire état d’une moyenne de 1 400 vérifications par mois.

46. Le Tribunal reconnaît que ce courriel a tout le potentiel requis pour alimenter les doutes de Forrest Green quant au fait que le contractant titulaire aurait pu bénéficier d’un certain avantage s’il avait su que le nombre de 1 700 vérifications était plus réaliste que le nombre de 1 400.

47. Dans le RIF, il est mentionné que l’agent d’approvisionnement de l’ASFC avait communiqué par téléphone avec Forrest Green le jour même afin de corriger cette erreur de contenu du courriel, tout en précisant que le nombre approprié était bel et bien 1 400 et non 1 700.

48. Forrest Green nie la tenue de cette conversation.

49. Le Tribunal n’est guère impressionné par la fugacité de cette question.

50. Ce courriel a été un facteur fondamental dans la décision du Tribunal d’entreprendre la présente enquête car il s’agissait de nombres différents de ceux que l’on trouvait dans la version finale de la DP.

51. Vu qu’il s’agit d’une conversation verbale, qui est ni étayée par quelconque documentation, ni mentionnée ailleurs par l’une ou l’autre des parties, sauf dans le cadre de leur argumentaire, il est très difficile, sinon impossible, pour le Tribunal d’intégrer correctement ces faits à ses délibérations.

52. Il est malheureux que les faits soient aussi imprécis face à une question aussi essentielle.

53. Quoi qu’il en soit, après un examen approfondi des renseignements au dossier, le Tribunal conclut qu’aucun élément de preuve ne permet d’établir que l’ASFC a fondé son évaluation sur des critères autres que ceux qui figurent dans la DP.

54. Le Tribunal a déclaré par le passé qu’il ne substituerait pas son jugement à celui des évaluateurs, sauf si ces derniers ne s’étaient pas appliqués à bien évaluer une proposition, n’avaient pas tenu compte de renseignements d’importance cruciale contenus dans une proposition, avaient mal interprété la portée d’une exigence, avaient fondé leur évaluation sur des critères non divulgués ou bien n’avaient pas procédé à une évaluation équitable au plan de la procédure14 .

55. En ce qui concerne l’allégation de Forrest Green selon laquelle le contractant titulaire a bénéficié d’un avantage indu, le Tribunal fait remarquer que l’ASFC a utilisé une procédure d’adjudication compétitive et qu’il est tout à fait approprié, en l’espèce, que l’ASFC ne révèle pas de renseignements exclusifs appartenant à ce titulaire. Comme il est mentionné plus haut, la DP était claire. Les processus relatifs aux demandes d’information initiales et secondaires étaient bien expliqués et ne présentaient aucune ambiguïté. Encore une fois, il incombe au soumissionnaire de s’assurer qu’il comprend bien les exigences.

56. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que l’ASFC a évalué la proposition de Forrest Green conformément aux dispositions de la DP. Par conséquent, la plainte n’est pas fondée.

Frais

57. Le Tribunal accorde à l’ASFC le remboursement des frais raisonnables qu’elle a engagés pour répondre à la plainte.

58. Pour décider du montant de l’indemnisation en l’espèce, le Tribunal a tenu compte de l’article 30.16 de la Loi sur le TCCE de même que de la Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure portant sur un marché public (la Ligne directrice), qui fonde l’évaluation du degré de complexité d’une plainte sur trois critères : la complexité du marché public, la complexité de la plainte et la complexité de la procédure.

59. Le marché public était modérément complexe; diverses questions ont été posées à l’ASFC concernant les exigences de la DP et deux modifications ont été publiées. La plainte était simple parce qu’elle ne portait que sur la question du processus d’évaluation. La procédure relative à la plainte était aussi simple, car il n’y a eu ni requêtes ni parties intervenantes. L’indication provisoire donnée par le Tribunal relativement à la présente affaire est que son degré général de complexité correspond au premier degré de complexité prévu à l’annexe A de la Ligne directrice. L’indication provisoire donnée par le Tribunal eu égard au montant de l’indemnisation est de 1 000 $.

DÉCISION DU TRIBUNAL

60. Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal détermine que la plainte n’est pas fondée.

61. Aux termes de l’article 30.16 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal accorde à l’ASFC le remboursement des frais raisonnables qu’elle a engagés pour répondre à la plainte, ces frais devant être payés par Forrest Green.

62. L’indication provisoire du degré de complexité de la présente plainte donnée par le Tribunal est le degré 1, et l’indication provisoire du montant de l’indemnisation est de 1 000 $. Si l’une ou l’autre des parties n’est pas d’accord en ce qui a trait à l’indication provisoire du degré de complexité ou à l’indication provisoire du montant de l’indemnisation, elle peut déposer des observations auprès du Tribunal en conformité avec la Ligne directrice. Le Tribunal se réserve la compétence de fixer le montant définitif de l’indemnisation.


1 . L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47 [Loi sur le TCCE].

2 . D.O.R.S./93-602 [Règlement].

3 . D.O.R.S./91-499 [Règles].

4 . Selon l’ASFC dans son RIF, la diminution du nombre de vérifications de solvabilité était fondée sur le fait que l’ASFC en avait déjà effectué un grand nombre entre le 23 décembre 2009 et le 7 février 2010 à cause de ses besoins opérationnels.

5 . Selon l’ASFC, la valeur maximale du contrat adjugé à Equifax était fondée sur son budget et non sur le volume de vérifications de solvabilité effectuées.

6 . Selon l’ASFC dans son RIF, au para. 12, l’agent des contrats avait expliqué à Forrest Green, dans une conversation téléphonique qui avait eu lieu aux alentours du 23 mars 2010, qu’elle avait commis une erreur en mentionnant 1 700 demandes dans son courriel, car elle avait à tort fait référence à la DP publiée le 23 décembre 2009 et non à la modification no 2 de la DP, laquelle contenait le nombre révisé de 1 400 demandes.

7 . Observations confidentielles sur le RIF au para. 50.

8 . 2002 CAF 284 (CanLII).

9 . 18 juillet 1994, Gaz. C. 1995.I.1323, en ligne : Secrétariat du commerce intérieur <http://www.ait-aci.ca/index_fr/ait.htm> [ACI]. L’annexe 1001.1b-1 de l’Accord de libre-échange nord-américain, l’annexe Kbis-01.1-3 de l’Accord de libre-échange entre le gouvernement du Canada et le gouvernement de la République du Chili et l’annexe 1401.1-4 de l’Accord de libre-échange entre le Canada et la République du Pérou, qui utilisent tous le Système commun de classification pour classifier les services, excluent toutes les catégories de services du groupe L, « Services financiers et connexes ». L’annexe 4 de l’appendice 1 du Canada à l’Accord sur les marchés publics, qui énumère les services visés par l’accord, ne comprend pas les services financiers. Comme tels, les marchés publics sont exclus de ces accords commerciaux. Les deux parties reconnaissent que seul l’ACI s’applique.

10 . Plainte confidentielle, courriel de l’ASFC à Forrest Green.

11 . Voir, par exemple, Re plainte déposée par Thomson-CSF Systems Canada Inc. (12 octobre 2000), PR-2000-010 (TCCE); Re plainte déposée par Canadian Helicopters Limited (19 février 2001), PR-2000-040 (TCCE); Re plainte déposée par WorkLogic Corporation (12 juin 2003), PR-2002-057 (TCCE).

12 . Voir, par exemple, Re plainte déposée par Info-Electronics H P Systems Inc. (2 août 2006), PR-2006-012 (TCCE).

13 . Voir, par exemple, Re plainte déposée par MTS Allstream Inc. (5 août 2005), PR-2004-061 (TCCE) au para. 67.

14 . Voir, par exemple, Re plainte déposée par Excel Human Resources Inc. (faisant affaire sous le nom d’excelITR) (25 août 2006), PR-2005-058 (TCCE), au para. 30.