CIDE INC.


CIDE INC.
Dossier no PR-2010-067

Décision prise
le mardi 5 octobre 2010

Décision et motifs rendus
le mercredi 20 octobre 2010


TABLE DES MATIÈRES


EU ÉGARD À une plainte déposée aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47

PAR

CIDE INC.

CONTRE

L’AGENCE CANADIENNE DE DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur décide de ne pas enquêter sur la plainte.

Serge Fréchette
Serge Fréchette
Membre présidant

Dominique Laporte
Dominique Laporte
Secrétaire

EXPOSÉ DES MOTIFS

1. En vertu du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur 1 , tout fournisseur potentiel peut, sous réserve du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics 2 , déposer une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) concernant la procédure des marchés publics suivie relativement à un contrat spécifique et lui demander d’enquêter sur cette plainte. En vertu du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le TCCE, après avoir jugé la plainte conforme au paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE et sous réserve du Règlement, le Tribunal détermine s’il y a lieu d’enquêter.

2. La plainte porte sur un marché public (invitation no 2009-A-032561-1) passé par l’Agence canadienne de développement international (ACDI) en vue de la formation initiale et du perfectionnement professionnel destinés aux agents de la Police nationale d’Haïti (PNH).

3. CIDE Inc. (CIDE) allègue que la demande de propositions avait des failles, du fait qu’il n’y était pas mentionné que la PNH ne serait pas responsable des coûts liés à la détermination du caractère approprié des locaux qui devaient être choisis par la PNH. De plus, CIDE allègue que la proposition financière de sa soumission a incorrectement reçu une note de zéro.

4. Le paragraphe 6(1) du Règlement prévoit que le fournisseur potentiel qui souhaite déposer une plainte auprès du Tribunal « [...] doit le faire dans les 10 jours ouvrables suivant la date où il a découvert ou aurait dû vraisemblablement découvrir les faits à l’origine de la plainte ».

5. Selon le paragraphe 6(2) du Règlement, « [l]e fournisseur potentiel qui a présenté à l’institution fédérale concernée une opposition [...] et à qui l’institution refuse réparation peut déposer une plainte auprès du Tribunal dans les 10 jours ouvrables suivant la date où il a pris connaissance, directement ou par déduction, du refus, s’il a présenté son opposition dans les 10 jours ouvrables suivant la date où il a découvert ou aurait dû vraisemblablement découvrir les faits à l’origine de l’opposition ».

6. Autrement dit, une partie plaignante dispose de 10 jours ouvrables suivant la date où elle prend connaissance des faits à l’origine de l’opposition, ou suivant la date où elle aurait dû vraisemblablement les découvrir, soit pour présenter une opposition auprès de l’institution fédérale, soit pour déposer une plainte auprès du Tribunal. Si une partie plaignante présente une opposition auprès de l’institution fédérale dans le délai prévu, celle-ci peut ensuite déposer une plainte auprès du Tribunal dans les 10 jours ouvrables à partir du moment où elle a pris connaissance, directement ou par déduction, du refus de réparation de l’institution fédérale.

7. La période de soumission à l’égard de l’invitation en question a pris fin le 12 juin 2009. Le 8 février 2010, CIDE était avisée par lettre que sa proposition technique s’était classée deuxième et que l’ACDI négociait à ce moment les modalités d’un contrat avec le soumissionnaire retenu. Cette lettre demandait aussi à CIDE de proroger la période de validité de sa soumission dans l’éventualité où les négociations en cours avec le soumissionnaire retenu échoueraient. CIDE a consenti à cette demande.

8. Le 13 mai 2010, CIDE participait à une séance d’information avec l’ACDI. Le Tribunal fait remarquer que selon les renseignements contenus dans la plainte de CIDE, c’est à cette date que CIDE a appris que sa proposition financière avait reçu une note de zéro. Le 20 mai 2010, CIDE recevait un courriel de l’ACDI dans lequel étaient données certaines raisons pour lesquelles sa proposition financière avait reçu une note de zéro.

9. Le 27 mai 2010, CIDE recevait un courriel d’un employé de l’ACDI, dans lequel n’est faite aucune référence au marché public en cause, dont le titre, les fonctions et la participation à la procédure de passation du marché public en question, le cas échéant, ne sont pas mentionnés. Ce courriel donne certaines étapes que doit suivre un soumissionnaire qui désire en appeler d’une décision de l’ACDI, dans l’éventualité où il serait en désaccord avec le rejet de sa proposition ayant trait à un marché public. Il est indiqué que si un soumissionnaire est insatisfait de la séance d’information et qu’il souhaite déposer une plainte, l’étape initiale consiste à communiquer par écrit avec le vice-président de la direction générale de l’ACDI responsable de l’invitation en question. Par la suite, selon ce courriel, si la question demeurait irrésolue, le soumissionnaire devait faire une demande écrite au vice-président de la Direction générale des ressources humaines et des services corporatifs, qui préside le mécanisme d’appel interne de l’ACDI. L’employé de l’ACDI a aussi affirmé ce qui suit : « Il faut avoir recours à ce mécanisme d’appel interne avant que le Consultant ne fasse quelque démarche que ce soit auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (T[C]CE). » Toutefois, le Tribunal fait remarquer que CIDE n’a pas fourni avec sa plainte les renseignements indiquant comment et quand elle a demandé conseil ni n’a-t-elle inclus des éléments de preuve montrant que l’auteur du courriel était une personne qui était une autorité compétente au sein de l’ACDI à l’égard de cette question. En outre, il n’est pas clair que le courriel de l’ACDI décrit un mécanisme d’appel interne qui s’applique en fait à tous les cas. À cet égard, la conclusion dans le courriel était que le mécanisme d’appel décrit ci-dessus était celui en vigueur à la Direction de l’Europe, du Moyen-Orient et du Maghreb de l’ACDI et que l’auteur « présumait » que les autres directions de l’ACDI « fonctionnaient de la même façon ».

10. Aussi, le 27 mai 2010, CIDE présentait une opposition à l’ACDI contestant la note qui avait été attribuée à sa proposition financière. Le 28 juin 2010, l’ACDI répondait à la lettre de CIDE du 27 mai 2010. Dans sa réponse, l’ACDI indique qu’elle maintient sa décision concernant l’évaluation de la proposition de CIDE.

11. Le 24 août 2010, 38 jours ouvrables plus tard, CIDE faisait parvenir une autre lettre à l’ACDI manifestant son désaccord quant à la note qu’elle avait reçue pour sa proposition financière. Le 8 septembre 2010, l’ACDI répondait à CIDE. Cette lettre affirmait ce qui suit : « La décision finale de l’ACDI concernant votre plainte a été rendue par la direction du programme Haïti et République dominicaine le 28 juin 2010, conformément à la Politique de l’ACVDI sur le Débreffage et divulgation de renseignements aux soumissionnaires suite à l’évaluation des propositions. » Dans sa plainte, CIDE a indiqué qu’elle a reçu cette lettre le 10 septembre 2010.

12. Le 24 septembre 2010, CIDE déposait une plainte auprès du Tribunal. Toutefois, la plainte a été jugée inadéquate, puisqu’elle ne respectait pas le paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE. Le 29 septembre 2010, le Tribunal faisait parvenir une lettre à CIDE l’informant de la décision du Tribunal eu égard à la non-conformité de la plainte quant aux exigences du paragraphe 30.11(2) et indiquant les renseignements supplémentaires nécessaires afin de corriger les irrégularités de la plainte, y compris une copie intégrale du document d’appel d’offres et une copie de toute la correspondance échangée entre CIDE et l’ACDI. Le 30 septembre 2010, CIDE fournissait les renseignements supplémentaires.

13. Selon le paragraphe 6(2) du Règlement, une plainte doit être déposée auprès du Tribunal dans les 10 jours ouvrables suivant la date où le fournisseur potentiel a pris connaissance, directement ou par déduction, du refus de réparation de la part de l’institution fédérale concernée, pourvu que la partie plaignante ait présenté son opposition dans les 10 jours ouvrables suivant la date où elle a découvert ou aurait dû vraisemblablement découvrir les faits à l’origine de la plainte. En l’espèce, l’opposition initiale de CIDE datée du 27 mai 2010 semble avoir été présentée dans les délais prévus. Il semble aussi que CIDE a reçu le refus de réparation le ou autour du 28 juin 2010, c’est-à-dire la date de la lettre de l’ACDI indiquant que celle-ci maintenait sa décision concernant l’évaluation et le rejet de la proposition de CIDE. Toutefois, CIDE allègue que la lettre du 28 juin 2010 ne peut être considérée comme une décision finale en la matière parce que CIDE avait été avisée par un employé de l’ACDI qu’un appel devait être déposé auprès du vice-président de la de la Direction générale des ressources humaines et des services corporatifs de l’ACDI avant que des démarches quelconques ne soient entreprises auprès du Tribunal. Donc, selon CIDE, c’est la lettre de l’ACDI du 8 septembre 2010 qui doit être considérée comme celle l’avisant de la décision finale concernant son opposition. Puisque cette lettre n’a été reçue par CIDE que le 10 septembre 2010, CIDE allègue que la plainte a été déposée dans les délais prescrits à l’article 6 du Règlement.

14. Pour les raisons suivantes, le Tribunal considère que même s’il acceptait l’allégation de CIDE que la lettre de l’ACDI du 8 septembre 2010, reçue par CIDE le 10 septembre 2010, est le document l’avisant du refus de réparation de l’ACDI, il devrait conclure que la plainte n’a pas été déposée dans les délais prescrits à l’article 6 du Règlement. Par conséquent, pour disposer de la présente plainte, il n’est pas nécessaire d’examiner la question de savoir si la lettre de l’ACDI du 28 juin 2010 est en fait la décision finale de l’ACDI et constitue un refus de réparation3 .

15. En effet, l’interprétation de CIDE signifie qu’une plainte qui respectait le paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE aurait dû être déposée au plus tard le 24 septembre 2010 afin de respecter les délais. Toutefois, en l’espèce, conformément au paragraphe 96(1) des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur 4 , la plainte est considérée avoir été déposée le 30 septembre 2010, c’est-à-dire le jour où le Tribunal a reçu les renseignements supplémentaires qui corrigeaient les irrégularités de la documentation déposée auprès du Tribunal le 24 septembre 20105 . Le Tribunal fait remarquer qu’étant donné que la plainte inadéquate a été déposée auprès du Tribunal le 24 septembre 2010 (c.-à-d. le 10e jour ouvrable après que CIDE a reçu la lettre de l’ACDI du 8 septembre 2010), il était pratiquement impossible pour CIDE de corriger les irrégularités et de déposer une plainte conforme au paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE dans les délais prescrits. Par conséquent, même en assumant que CIDE a pris connaissance, directement ou par déduction, du refus de réparation le 10 septembre 2010, le Tribunal conclut que la plainte n’a pas été déposée dans les délais prescrits à l’article 6 du Règlement.

16. Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal n’enquêtera pas sur la plainte et tient la question pour réglée.

DÉCISION

17. Aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal décide de ne pas enquêter sur la plainte.


1 . L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47 [Loi sur le TCCE].

2 . D.O.R.S./93-602 [Règlement].

3 . À cet égard, le Tribunal fait remarquer que s’il considérait que CIDE a reçu son refus de réparation le ou autour du 28 juin 2010, il devrait conclure que la plainte n’a pas été déposée dans les délais, puisqu’il est clair qu’elle n’a pas été déposée dans les 10 jours ouvrables après que CIDE a reçu la lettre de l’ACDI du 28 juin 2010.

4 . D.O.R.S./91-499 [Règles].

5 . Le paragraphe 96(1) des Règles prévoit ce qui suit : « La plainte est considérée avoir été déposée : a) soit à la date où le Tribunal la reçoit; b) soit, dans le cas d’une plainte non conforme au paragraphe 30.11(2) de la Loi, à la date à laquelle le Tribunal reçoit les renseignements relatifs aux points à corriger pour rendre la plainte conforme à ce paragraphe » [nos italiques].