NICO-ARRET INC.

Décisions


NICO-ARRET INC.
N° du greffe de la Commission: E91PRF6641-021-0003

TABLE DES MATIÈRES


AFFAIRE INTÉRESSANT

Une plainte de Nico-Arret Inc. du 1032, rue Berthe Louard Montréal (Québec)

N° du greffe de la Commission: E91PRF6641-021-0003

Plainte retenue

ET

La Loi de mise en oeuvre de l'Accord de libre-échange, partie II, art. 15, L.C. 1988, ch. 65.

3 mai 1991

DÉCISION DE LA COMMISSION

Il s'agit en l'espèce de l'achat par le ministère des Approvisionnements et Services (MAS) de 860 500 petits drapeaux canadiens fixés à des bâtonnets. Cet achat a été fait pour le compte du Secrétariat d'État du Canada (SÉ), qui utilisera ces drapeaux dans le cadre des prochaines célébrations de la Fête nationale du Canada. Ils doivent être livrés en diverses quantités à divers endroits indiqués dans le dossier de l'appel d'offres.

Le plaignant, la société Nico-Arret Inc. (Nico-Arret), de Montréal, conteste l'adjudication du marché, d'un montant de 91 374,50 $, à la société Canadiana Textile Screen Prints Ltd. (Canadiana) pour les raisons suivantes :

(a) son prix était sensiblement moins élevé que celui de Canadiana;

(b) même si les échantillons pr 9‚alables qu'il avait fournis ne correspondaient pas aux spécifications, il avait offert de soumettre un produit fini dans un délai de quatre jours; et

(c) sa soumission a été rejetée pour des motifs injustifiés et irresponsables.

Le plaignant a demandé des mesures correctives sous forme d'annulation de cette demande de proposition.

La question de la compétence : dépôt tardif

Avant d'évoquer les faits relatifs à ce marché, il faut aborder une question qui porte sur la compétence de la Commission, à savoir que la plainte a été «...déposée... plus tard que 10 jours après la date de la découverte des motifs de la plainte ou la date à laquelle ceux-ci auraient dû vraisemblablement être découverts.» [1]

Le ministère des Approvisionnements et Services, dans son Rapport de l'institution fédérale, fait remarquer ce qui suit : [TRADUCTION] «Le MAS a informé le plaignant, dans un message envoyé par télécopieur le 7 février 1991, de l'adjudication du marché et des motifs du refus de sa proposition... La plainte n'a été déposée auprès de la CRMP que le 19 février 1991. Le MAS fait valoir respectueusement que la CRMP n'a pas compétence pour statuer sur cette plainte, étant donné qu'elle a été déposée après l'expiration du délai fixé.»

Toutefois, la Commission «...peut examiner une plainte qui n'est pas déposée dans le délai applicable prévu au présent article, si des motifs valables justifient le non-respect du délai ou si elle juge que la plainte soulève des points importants qui touchent le mécanisme d'adjudication.» [2]

La Commission a siégé le 20 février 1991 (voir l'annexe 2 du Rapport d'enquête) et a estimé que des motifs valables pouvaient justifier le non-respect du délai et, surtout, que la plainte soulevait des points importants qui touchent le mécanisme d'adjudication, à savoir l'application arbitraire des conditions obligatoires.

Sur le premier point, le retard est dû au fait que l'acheminement de la documentation demandée à la Commission par le plaignant (un dossier d'information utile pour la préparation des plaintes, qu'on ne peut pas obtenir facilement d'autres sources) a été retardé par le mauvais temps. La Commission avait confié à un service de messageries, le 14 février 1991, un jeudi, le jour même de la réception de la demande, la livraison de ce dossier à la société Nico-Arret, mais la Commission a appris par la suite que le service de messageries n'a livré le colis que le lundi 18 février 1991. Nico-Arret a rédigé sa plainte le lendemain - le mardi 19 février 1991 - et l'a fait parvenir par télécopieur à la Commission le même jour. Pour ces raisons, elle est arrivée avec un jour de retard (la période de 10 jours pour le dépôt d'une plainte avait pris fin le dimanche, mais elle avait été prolongée jusqu'au jour ouvrable suivant, le lundi 18 février 1991).

En ce qui concerne le deuxième point, la Commission a estimé que la plainte soulevait une question importante touchant le mécanisme d'adjudication, à savoir le caractère arbitraire de l'acceptation ou du rejet des soumissions, dans les cas où il n'avait pas été satisfait aux conditions obligatoires.

La Commission a communiqué cette décision aux parties concernées par la présente plainte dans des messages envoyés par télécopieur le 21 février 1991 (voir l'annexe 2 du Rapport d'enquête).

Les exigences relatives au dépôt de la plainte ayant été respectées, la Commission a demandé qu'elle fasse l'objet d'une enquête. L'adjudicataire (Canadiana) a été dûment informé de la plainte. Il n'a pas demandé à intervenir dans cette affaire.

L'enquête

Les allégations formulées dans la plainte, ainsi que la réponse du gouvernement à ces allégations et les observations du plaignant à propos de la réponse du gouvernement, ont fait l'objet d'une enquête au moyen d'entrevues et d'un examen des documents figurant dans le dossier du marché tenu par le MAS.

Un certain nombre de particuliers ont été interviewés en personne ou par téléphone pour confirmer diverses affirmations faites dans les documents ou y figurant. Ce sont : M. P. Battaglini, du MAS, Direction des produits de consommation et de la gestion des transports (agent de négociation des contrats), et M. G. Cookshaw, du MAS, Bureau du secrétaire général (Coordonnateur des plaintes à la CRMP), tous les deux de Hull (Québec); M. Pierre Beauchamp, Nico-Arret (Président), de Montréal (Québec); et M. C. Milton, Canadiana (Président), de Mississauga (Ontario).

Suivant une nouvelle procédure, qui a été notifiée par la Commission dans le numéro de la semaine du 18 février 1991 de la publication intitulée «Marchés Publics», un exemplaire du Rapport d'enquête préliminaire a, avant sa présentation à la Commission, été envoyé à la fois à l'institution fédérale et au plaignant pour qu'ils le commentent. Les deux parties ont soumis de brèves observations par écrit, lesquelles ont été ajoutées au Rapport d'enquête et prises en compte par la Commission dans la préparation de la présente décision.

Le Rapport d'enquête contient également un certain nombre d'annexes comprenant des documents que le personnel d'enquête a jugé pertinents pour la rédaction du rapport. La présente décision ne mentionne pas expressément tous ces documents justificatifs, qui ont néanmoins été mis à la disposition des parties et, sous réserve des dispositions de la Loi sur l'accès à l'information, toute autre personne peut les consulter.

Comme il a été possible au cours de l'enquête de recueillir suffisamment de renseignements pour que la Commission puisse, à son avis, statuer sur les questions soulevées dans la plainte, il a été décidé qu'aucune audience n'était nécessaire. Pour arriver à ses conclusions, la Commission a examiné le rapport de son personnel enquêteur ainsi que les observations formulées au sujet de celui-ci par les parties, et elle a fondé ses constatations et conclusions sur les faits qui y sont exposés, dont les éléments pertinents figurent dans la présente décision.

Le marché

Le marché porte sur l'achat de 860 500 petits drapeaux canadiens faits d'un matériau portant le nom de «Tyvek», en deux dimensions (3 po. x 6 po. et 4½ po. x 9 po.), fixés à des bâtonnets. Le processus d'adjudication a commencé par la publication d'un Avis de projet de marché (APM) dans la publication intitulée «Marchés publics», le 7 décembre 1990, la date de clôture étant fixée au 16 janvier 1991. Il y était indiqué que la livraison devait se faire pour le 25 mars 1991.

Il était précisé dans le dossier de l'appel d'offres que des échantillons préalables des drapeaux proposés devaient accompagner la soumission [TRADUCTION] «...dans le cadre de l'évaluation technique visant à confirmer la capacité du soumissionnaire de satisfaire aux exigences techniques.» On précisait également que [TRADUCTION] «La non-présentation de l'échantillon avec la soumission... peut avoir pour conséquence que la soumission soit déclarée irrecevable.» (Nous soulignons)

Il était également indiqué dans la DDP que le Ministre «...acceptera de conclure un marché pour l'exécution de la proposition la plus acceptable évaluée conformément aux facteurs indiqués dans la présente DDP...»

La DDP précisait en outre que «Les propositions seront évaluées suivant une combinaison des facteurs prix et livraison et, le cas échéant, on négociera les modalités de livraison...»

Les neuf critères d'évaluation suivants étaient énumérés :

- Prix - F.A.B. usine et F.A.B. destination

- Exigences techniques - OBLIGATOIRE

- Exigences d'inspection - OBLIGATOIRE

- Exigences d'emballage - OBLIGATOIRE

- Exigences de livraison - SOUHAITABLE

- Déclaration des biens admissibles - OBLIGATOIRE

- Condition ayant trait aux anciens titulaires de charge publique - OBLIGATOIRE

- Conditions ayant trait à l'Afrique du Sud - OBLIGATOIRE POUR LES ENTREPRENEURS CANADIENS SEULEMENT

- Échantillon préalable - OBLIGATOIRE

Et la DDP répétait l'avertissement :

«Il est ESSENTIEL que toutes les informations pertinentes requises dans la demande de proposition soient fournies et transmises telles qu'indiquées ici. Si vous ne satisfaites pas aux critères d'évaluation, votre proposition risque d'être rejetée.» (Nous soulignons)

Il se dégage de ce qui précède que bien que la DDP fasse état de la recherche de «...la proposition la plus acceptable... conformément aux facteurs indiqués...» (qui étaient au nombre de neuf), elle indique également que «Les propositions seront évaluées suivant une combinaison des facteurs prix et livraison...», qui ne constituent que deux des critères d'évaluation.

L'examen des neuf critêres fait apparaître qu'ils sont tous obligatoires à l'exception du prix et de la livraison. Cela ne peut signifier qu'une chose, à savoir que le soumissionnaire disposait d'une certaine latitude pour fonder sa propre proposition uniquement sur ces deux facteurs. La non-satisfaction de l'une quelconque des conditions obligatoires devrait entraîner le rejet de la soumission.

Toutefois, ce qui est indiqué dans la DDP à propos de ces critères obligatoires est quelque peu trompeur. Il est dit à deux reprises que la non-satisfaction à une condition obligatoire a pour seule conséquence que la soumission «PEUT» être déclarée irrecevable. Le ministère tentait donc de se réserver le droit de déterminer si le non-respect des conditions obligatoires entraînerait ou non l'irrecevabilité de la soumission. Cela n'est pas acceptable. Ou bien un critère est obligatoire ou bien il ne l'est pas.

La DDP n'explique pas les critères en vertu desquels il invoquera cette non-conformité pour prononcer l'irrecevabilité d'une soumission ni les critères en vertu desquels il s'abstiendra de le faire. Cette façon de procéder n'est pas conforme aux exigences de l'Article 1305 (2) (c) (iii) de l'Accord de libre-échange, qui dispose que :

«1305 (2) En ce qui concerne les marchés visés dans le présent
chapitre, chaque Partie devra
(c)pour les décisions touchant... l'évaluation des
soumissions et l'adjudication des contrats,
utiliser des critères
(i) ...
(ii) ...
(iii) qui sont clairement spécifiés à
l'avance;...»

À la date de clôture, huit soumissions avaient été reçues et le ministère les a réparties en deux groupes. Les quatre soumissions les plus élevées ont été mises de côté parce que les prix proposés représentaient tous plus du double de la soumission la plus élevée parmi les quatre autres soumissions. On a donc jugé qu'elles n'offraient pas un prix équitable au gouvernement.

Les quatre soumissions les plus basses ont été classées comme suit :

1. Plaignant - a soumis un échantillon de
(bas soumissionaire) chaque drapeau, mais sans respecter
les spécifications
2. Deuxième soumissionnaire - n'a soumis un échantillon que de l'un
des deux articles requis
3. Troisième soumissionnaire - n'a soumis aucun échantillon
(gagnant) selon le MAS (mais l'entreprise a
affirmé par écrit à la Commission
qu'elle en a soumis)
4. Quatrième soumissionnaire - n'a soumis aucun échantillon.

Bien que la présentation du formulaire de «Déclaration des biens admissibles» fût obligatoire, seulement le troisième bas soumissionnaire parmi les quatre derniers soumissionnaires retenus (l'adjudicataire) l'a envoyé avec sa soumission.

À cette étape, le MAS a envisagé deux options pour la passation du marché en cause (voir le Rapport d'enquête, annexe 13) :

(1) Annuler l'appel d'offres et en lancer un nouveau;

(2) Demander aux soumissionnaires 2, 3 et 4 de fournir les échantillons qu'ils n'avaient pas présentés en même temps que leur soumission (ainsi que d'autres éléments manquants dans leur soumission), puis présenter ces trois soumissions ainsi que celle de Nico-Arret au Secrétariat d'État à des fins d'évaluation technique.

Une note en date du 17 janvier 1991, classée au dossier, indique, après avoir exposé les deux possibilités évoquées ci-dessus, que [TRADUCTION] «Les enjeux qui se posent dans les deux cas sont l'équité pour les soumissionnaires et la capacité d'adjuger un marché en donnant au soumissionnaire retenu suffisamment de temps pour faire la livraison dans le délai requis.» Ensuite, dans cette même note, la «livraison» est qualifiée d'«urgente». La Commission considère que la «livraison», qui avait été une condition «souhaitable», a alors, après la date de clôture des soumissions, été traitée comme si elle était devenue un élément obligatoire.

Le MAS a choisi la deuxième possibilité et a envoyé des lettres aux soumissionnaires classés deuxième, troisième et quatrième, les invitant à soumettre sans tarder les échantillons qu'ils n'avaient pas envoyés, même si l'envoi d'échantillons préalables était qualifié de critère obligatoire dans la DDP. Il a également demandé à deux des soumissionnaires de lui faire parvenir la «Déclaration des biens admissibles», qui n'avait pas été soumise... alors qu'il s'agissait, là aussi, d'une condition obligatoire formulée dans la DDP. Le MAS fixa un nouveau délai obligatoire pour l'envoi d'échantillons et ajouta que leur non-soumission au jour et à l'heure indiqués [TRADUCTION] «... peut avoir pour conséquence que votre soumission soit déclarée irrecevable.» Le soumissionnaire qui allait devenir l'adjudicataire a notifié le ministère qu'il enverrait les échantillons avec une journée de retard, ce qui fut effectivement le cas, et le ministère a agi de manière discrétionnaire en ne déclarant pas la soumission irrecevable.

Le ministère n'a pas demandé à la société Nico-Arret de fournir la «Déclaration des biens admissibles», qu'elle n'avait pas non plus envoyée avec sa soumission.

Le fait de qualifier d'«équitable» cette façon de procéder dans le cas des soumissionnaires 2, 3 et 4 dépasse tout entendement. La Commission considère que cette façon de faire est inacceptable parce que, tous les trois, ils n'ont pas satisfait à une condition obligatoire, deux d'entre eux ayant omis de donner suite à deux demandes obligatoires (l'envoi de la Déclaration des biens admissibles ainsi que d'échantillons préalables). En outre, le soumissionnaire qui allait devenir l'adjudicataire n'a pas envoyé les échantillons dans le délai fixé. Manifestement, ces trois soumissions auraient dû d'emblée être jugées irrecevables, tout comme celle de la société Nico-Arret l'a été, au bout du compte.

Le Rapport de l'institution fédérale (voir le Rapport d'enquête, annexe 36) présente de la façon suivante les motifs invoqués par le gouvernement pour expliquer que l'on ait offert aux trois soumissionnaires la possibilité de corriger leur soumission :

[TRADUCTION]

«Nous admettons que les entreprises n'ont pas toutes joint des échantillons à leur soumission et que celles qui ne s'étaient pas conformées à cette exigence ont eu la possibilité de présenter des échantillons après la date limite. Cependant, chaque entreprise a été autorisée à présenter un seul échantillon de chaque article. Nulle entreprise qui avait envoyé des échantillons au préalable ne s'est vue accorder la possibilité d'apporter des rectifications ni de présenter des échantillons retouchés. Avoir permis au plaignant ou encore à toute autre entreprise de présenter d'autres échantillons aurait équivalu à lui donner la chance de corriger tout défaut ayant été relevé dans ses premiers échantillons, ce qui lui aurait procuré l'avantage d'un examen technique effectué par l'État. On lui aurait, ce faisant, donné un avantage concurrentiel, auquel les autres entreprises n'auraient pas eu droit. En autorisant chaque entreprise à ne présenter qu'un seul échantillon, on accordait à l'ensemble des entreprises une chance équitable de démontrer qu'elles s'en tenaient aux exigences techniques obligatoires.»

Le Rapport d'enquête préliminaire envoyé aux parties pour qu'elles le commentent avant sa présentation à la Commission faisait état du traitement différent accordé à ces soumissionnaires. Le ministère a fait valoir les arguments suivants pour mieux expliquer sa position :

[TRADUCTION]

«7)À la page 12 (deuxième paragraphe), le rapport est trompeur. La plaignante n'a reçu d'avis du MAS concernant la présentation d'échantillons parce que, en l'absence d'un avis explicatif accompagnant la soumission, le MAS n'avait pas d'autre choix que de considérer que les échantillons présentés étaient les meilleurs que l'entreprise pouvait produire. Une fois que les échantillons ont été évalués par le Secrétariat d'État et jugés non conformes aux spécifications, la soumission de la plaignante devenait irrecevable. Le fait d'avoir informé la plaignante de cette décision aurait laissé entendre que l'entreprise pouvait présenter des échantillons corrigés. Or, cela aurait constitué un remaniement de la soumission, ce qui aurait été inacceptable au MAS.»

Si ce qui a été fait en l'occurrence ne constitue pas une «correction de la soumission», la Commission voit mal ce qui constitue une telle correction.

En dernière analyse, le MAS, de concert avec le Secrétariat d'État, a décidé d'adjuger le marché à la société Canadiana.

La présente affaire porte sur le sens qu'il faut donner au fait que le gouvernement a établi des conditions obligatoires et s'est ensuite accordé la latitude incontrôlée, sans en faire état publiquement, de rejeter une soumission et, ensuite, en se servant de manière incohérente de cette latitude, de donner une seconde chance à trois autres soumissionnaires. Il ne sert à rien de faire valoir qu'en dépit de cette entorse à la procédure, chacun des soumissionnaires n'a eu l'occasion de soumettre qu'un échantillon (en effet, trois d'entre eux ont obtenu deux occasions de présenter cet échantillon). Même si on suivait le raisonnement du ministère, ce dernier laisse de côté le fait que seul le plaignant a fait parvenir ses échantillons (bien qu'ils fussent imparfaits) avant la clôture de l'appel d'offres. Les autres ont obtenu leur seconde chance après la date limite de présentation des soumissions. Ils ont ainsi bénéficié d'une occasion inéquitable, qui n'a pas été offerte également à tous, de modifier leur soumission. D'ailleurs, l'adjudicataire, en plus d'affirmer par écrit à la Commission qu'il avait présenté avec sa soumission des échantillons (que le MAS soutient ne pas avoir reçus), a fourni dans sa proposition (que le MAS a reçue) des détails quant aux imperfections des échantillons qu'il disait soumettre et a fait allusion aux mesures qu'il prendrait pour que les échantillons correspondent aux spécifications. La Commission ne comprend pas pourquoi le gouvernement a traité les soumissions des sociétés Nico-Arret et Canadiana d'une manière aussi différente.

La Commission ne peut que faire des hypothèses sur le nombre total de sociétés, parmi les treize qui ont demandé des dossiers de soumission mais n'en ont pas présenté, qui auraient présenté une proposition si elles avaient su qu'elles pourraient disposer d'un laps de temps supplémentaire pour faire parvenir des échantillons préalables.

La Commission considère donc que les exigences énoncées à l'Article 1305 de l'Accord de libre-échange n'ont pas été respectées et elle accordera au plaignant le remboursement des frais raisonnables qu'il a engagés au titre du dépôt et de l'instruction de sa plainte.

Ce contrat n'aurait jamais dû être adjugé. Les soumissions des quatre sociétés étaient toutes irrecevables. Le gouvernement aurait dû lancer un nouvel appel d'offres, ce qu'il n'a pas fait. Trois sociétés ont obtenu une seconde chance. Il est malheureusement trop tard pour que la Commission puisse inverser le cours des événements, car les biens ont été livrés, mais elle peut au moins accorder au plaignant le remboursement des dépenses qu'il a engagées pour la présentation de sa soumission, le ramenant ainsi à la situation qui était la sienne avant le début du processus d'adjudication de ce marché.

DÉCISION

La Commission décide de reconnaître le bien-fondé de la plainte déposée par la société Nico-Arret Inc. parce que l'adjudication du marché faite par le ministère des Approvisionnements et Services ne respecte pas les exigences énoncées à l'Article 17 de la Loi de mise en oeuvre de l'Accord de libre-échange dans la mesure où il a utilisé, pour l'évaluation des soumissions et l'adjudication du contrat, des critères qui n'ont pas été clairement spécifiés à l'avance.

La Commission accorde au plaignant le remboursement des frais raisonnables qu'il a engagés :

(a) au titre du dépôt et de l'instruction de sa plainte, et

(b) pour la préparation de son offre.

Gerald A. Berger
_________________________
Gerald A. Berger
Président
Commission de révision des marchés publics du Canada


1. Règlements de la Commission de révision des marchés publics du Canada, 23 (1).

2. Règlements de la Commission de révision des marchés publics du Canada, 23 (4).


[ Table des matières]

Publication initiale : le 28 août 1997