MIRTECH INTERNATIONAL SECURITY INC.

Décisions


MIRTECH INTERNATIONAL SECURITY INC.
Dossier no : PR-96-036

TABLE DES MATIÈRES


Ottawa, le mardi 3 juin 1997

Dossier no : PR-96-036

EU ÉGARD À une plainte déposée par la société Mirtech International Security Inc. aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.), modifiée;

ET EU ÉGARD À une décision d’enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes de l’article 30.14 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte n’est pas fondée.

Lyle M. Russell
_________________________
Lyle M. Russell
Membre


Michel P. Granger
_________________________
Michel P. Granger
Secrétaire






Date de la décision : Le 3 juin 1997

Membre du Tribunal : Lyle M. Russell

Gestionnaire de l’enquête : Randolph W. Heggart

Avocat pour le Tribunal : John L. Syme

Plaignant : Mirtech International Security Inc.

Institution fédérale : Ministère des Travaux publics et des
Services gouvernementaux

CONCLUSIONS DU TRIBUNAL

INTRODUCTION

Le 11 mars 1997, Mirtech International Security Inc. (Mirtech) a déposé une plainte aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur [1] (la Loi sur le TCCE) concernant le marché public passé par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (le Ministère) (numéro d’invitation TPD 19PW1-6-C010/000/A) portant sur la fourniture, l’installation et l’entretien d’un système de sécurité intégré pour le Projet de regroupement de l’administration centrale du ministère de la Justice, à l’Édifice commémoratif de l’Est et à la Tour St. Andrew.

Mirtech a allégué que sa proposition a injustement été déclarée non conforme aux exigences et qu’un marché avait été adjugé à la société Marcomm Fibre Optics Inc. (Marcomm), dont la soumission était considérablement plus élevée que celle qu’elle avait soumise. Mirtech a allégué, sur la foi des renseignements qu’elle a reçus, que sa proposition a été rejetée parce qu’elle n’est pas située dans la région d’Ottawa (Ontario) et parce qu’elle ne connaissait pas personnellement l’expert-conseil en sécurité, un représentant de la JSI Systems Engineering Division (JSI), qui n’était pas familier avec le système proposé par Mirtech.

Mirtech a demandé, à titre de mesure corrective, que le marché lui soit adjugé à titre de soumissionnaire qualifié le moins disant.

ENQUÊTE

Le 12 mars 1997, le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) a déterminé que les conditions d’enquête précisées à l’article 7 du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics [2] (le Règlement) avaient été remplies relativement à la plainte et, en conformité avec l’article 30.13 de la Loi sur le TCCE, a décidé d’enquêter sur l’affaire.

Le 9 avril 1997, le Ministère a déposé auprès du Tribunal un rapport de l’institution fédérale (le RIF) en application de l’article 103 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur [3] . Le 28 avril 1997, Mirtech a déposé ses observations sur le RIF auprès du Tribunal. Le 6 mai 1997, le Ministère a déposé des observations supplémentaires auprès du Tribunal. Mirtech a également soumis des observations supplémentaires le 20 mai 1997.

Les renseignements au dossier permettant de déterminer le bien-fondé de la plainte, le Tribunal a décidé qu’une audience n’était pas nécessaire et a statué sur la plainte à partir des renseignements au dossier.

PROCÉDURE DE PASSATION DU MARCHÉ PUBLIC

Un système d’examen des offres à deux enveloppes a été appliqué au marché public en cause. Les propositions des soumissionnaires portant sur les besoins techniques et de gestion de projet devaient être incluses dans une enveloppe marquée « A », et les propositions portant sur les prix ainsi que les formules de soumission remplies devaient être incluses dans une enveloppe marquée « B ». Le contenu de l’enveloppe « A » devait être évalué en premier lieu, et uniquement les soumissions conformes aux plans du mérite technique et de la gestion de projet passeraient à la deuxième étape pour déterminer le soumissionnaire retenu, soit l’ouverture de l’enveloppe « B », contenant la proposition de prix. Dans ce cas particulier, pour être conforme, une proposition devait obtenir au moins 35 points sur 50 à la fois dans la catégorie technique et dans la catégorie gestion de projet.

L’article 6.1.2 des « Instructions spéciales aux soumissionnaires » (ISS) des documents initiaux d’invitation à soumissionner stipulait que :

[l]a société doit avoir complété avec succès, au cours des cinq (5) dernières années, au moins trois (3) projets intégrant le contrôle d’accès, la surveillance d’alarme, les communications vocales et la télévision en circuit fermé, d’une valeur globale dépassant 300 000 $, à l’exclusion des conduits et des canalisations. Au moins un des projets doit avoir été complété au cours des trois (3) dernières années.

[Traduction]

Le 22 novembre 1996, Marcomm a écrit au Ministère pour s’informer de la raison d’être de l’article 6.1.2 et a soutenu que, s’il n’était pas modifié, les petites sociétés comme elle seraient injustement exclues du processus d’appel d’offres. Il s’est ensuivi, du 22 novembre au 3 décembre 1996, une discussion en profondeur des dispositions de l’article 6.1.2 entre un certain nombre de représentants de divers paliers de responsabilité au sein du Ministère. Il a été proposé de procéder selon une autre méthode qui, de l’avis du Ministère, protégeait les intérêts de la Couronne tout en réduisant les critères de qualification à un seuil minimum acceptable, compte tenu de l’envergure et de la complexité du projet. Le 18 décembre 1996, le Ministère a publié l’addenda no 5 aux documents d’invitation à soumissionner, modifiant l’article 6.1.2 des ISS ainsi qu’il suit :

1. Sujet : Instructions spéciales aux soumissionnaires

.1 Modifier 6 QUALITÉS REQUISES DES SOUMISSIONNAIRES, 6.1.2 se lit maintenant comme suit :

.1 La société doit avoir complété avec succès, au cours des cinq (5) dernières années, au moins trois (3) projets liés à la sécurité, d’une valeur globale dépassant 250 000 $, à l’exclusion des conduits et des canalisations. De plus, ou dans le cadre de l’un des trois projets susmentionnés, la société doit avoir terminé avec succès, au cours des trois (3) dernières années, un (1) projet intégrant le contrôle d’accès, la surveillance d’alarme, les communications vocales et la télévision en circuit fermé, d’une valeur globale définitive dépassant 100 000 $, à l’exclusion des conduits et des canalisations.

[Traduction]

Selon le Ministère, le premier élément des exigences modifiées de qualification des soumissionnaires garantissait que ces derniers disposeraient de ressources financières et organisationnelles, compte tenu de l’envergure du projet. Le deuxième élément répondait au besoin de garantir que l’adjudicataire soit capable de fournir un système de sécurité intégré. Le Ministère était d’avis que cette nouvelle approche permettrait à Marcomm, ainsi qu’à un nombre indéterminé d’autres sociétés, de soumissionner.

En outre, les ISS prévoyaient, entre autres, à l’article 9.1, que « lorsque le degré de conformité aux exigences ne ressort pas clairement de la réponse du soumissionnaire, l’interprétation la plus restrictive prévaudra sans qu’il soit demandé d’autres renseignements ou éclaircissements au soumissionnaire » [traduction].

À 14 h, le 14 janvier 1997, huit soumissions avaient été reçues, y compris une soumission de Mirtech. L’agent de négociation des contrats et le gestionnaire adjoint du projet ont vérifié que tous les soumissionnaires avaient présenté les deux enveloppes. L’enveloppe « A » de chacun des soumissionnaires a été envoyée aux quatre personnes chargées de l’examen technique qui faisaient partie du Comité d’examen des soumissions en matière de systèmes de sécurité (le Comité d’examen).

Le Comité d’examen comprenait six membres, dont les trois membres techniques votants suivants : l’expert-conseil de JSI, l’agent d’autorisation des achats et de négociation des marchés d’entretien du Ministère ainsi que l’ingénieur système/gestionnaire de travaux de construction pour le Projet de regroupement de l’administration centrale du ministère de la Justice. Le Comité d’examen comprenait aussi trois membres non votants : un représentant du ministère de la Justice, soit un conseiller en politiques de la Direction des systèmes de sécurité de la Gendarmerie royale du Canada, le gestionnaire adjoint du Projet de regroupement de l’administration centrale du ministère de la Justice, de la Direction de la Cité parlementaire du Ministère, et l’agent de négociation des contrats du Ministère. Selon le Ministère, les trois membres votants et le représentant du ministère de la Justice ont une vaste expérience et une profonde connaissance des systèmes de sécurité.

Selon le RIF, les membres votants du Comité d’examen ont évalué les propositions individuellement. Avant la première réunion d’évaluation, le Comité d’examen a instruit l’expert-conseil de JSI de limiter les questions aux soumissionnaires à des fins d’éclaircissements uniquement. Aucune information nouvelle ne devait être soumise. Le 23 janvier 1997, les examinateurs techniques votants ont présenté leur feuille de cotes au Comité d’examen. Deux soumissions ont été jugées conformes, y compris celle de Marcomm, dont les cotes dans les catégories du mérite technique et de la gestion de projet dépassaient la cote de passage de 35 points sur 50. Les enveloppes « B » contenant la proposition de prix des deux sociétés susmentionnées ont ensuite été ouvertes, la proposition de Marcomm, à 450 726 $, étant la moins disante des deux. Le 27 janvier 1997, le gestionnaire adjoint du projet et le gestionnaire des soumissions et des marchés ont examiné le processus d’évaluation, comme le prévoit le système à deux enveloppes. Leur examen a débouché sur une demande d’éclaircissements auprès d’un troisième soumissionnaire, à la suite de quoi la proposition de ce dernier a également été jugée admissible à passer à l’étape de l’examen des prix proposés. Marcomm est cependant demeuré le soumissionnaire qualifié le moins disant.

Le 19 février 1997, le Ministère a informé les soumissionnaires non retenus des résultats de l’appel d’offres; le 20 février 1997, il a fait parvenir une lettre d’adjudication du marché à Marcomm, dans laquelle il indiquait qu’il acceptait l’offre de cette dernière. Le ou vers le 25 février 1997, un représentant de Mirtech a parlé avec l’agent de négociation des marchés; ce dernier lui a alors lu un sommaire des motifs de la disqualification de Mirtech, tels qu’ils étaient inscrits au « procès-verbal des réunions d’examen des soumissions en matière de systèmes de sécurité, nos 1 et 2, tenues les 23 et 30 janvier 1997 ». L’agent de négociation des contrats a aussi invité Mirtech à s’entretenir avec l’expert-conseil de JSI pour obtenir un compte rendu technique plus élaboré. Un entretien final officiel a en outre été offert à Mirtech. Le ou vers le 4 mars 1997, l’expert-conseil de JSI a appelé Mirtech, lui offrant une explication de l’évaluation de sa proposition. Cette conversation est à la base du désaccord de Mirtech portant sur l’évaluation technique. (Le Tribunal remarque que JSI nie certaines des observations que lui attribue Mirtech.)

BIEN-FONDÉ DE LA PLAINTE

Position de Mirtech

Mirtech n’est pas d’accord avec la déduction, lors de l’évaluation, d’une partie ou de tous les points et ce, pour les motifs ci-dessous :

ÉLÉMENTS

POINTS PERDUS

Manque d’information sur le fonctionnement administratif du système d’accès

4,5 sur 8,0

Indication imprécise de la façon de traiter la fonction armer/désarmer

1,7 sur 10,0

Certaines pièces d’équipement incluses dans les feuilles ne sont pas incluses dans le schéma fonctionnel

1,5 sur 10,0

Le multiplexeur proposé n’est pas muni d’un panneau de commande

1,0 sur 2,0

Le dispositif de panoramique et d’inclinaison ne répond pas aux exigences

1,0 sur 2,0

Manque de personnel local dans la région d’Ottawa

7,0 sur 10,0

Manque de preuves à l’appui des titres et qualités des ressources proposées

7,0 sur 10,0

Aucune précision sur l’équipe de projet

1,7 sur 5,0

La position de Mirtech est que sa proposition a injustement été déclarée non conforme aux exigences et que le marché a été adjugé à un prix considérablement supérieur à celui qu’elle avait proposé. Mirtech soumet que, parce qu’elle n’est pas située dans la région d’Ottawa, l’expert-conseil de JSI ne la connaissait pas personnellement et ne connaissait pas le système qu’elle proposait, et que cette ignorance a joué en sa défaveur.

Mirtech soumet que, même s’il lui incombait, comme aux autres soumissionnaires, de démontrer dans sa proposition que son système était conforme aux exigences, l’expert-conseil de JSI a choisi d’interroger d’autres soumissionnaires en détail au sujet de leur proposition, ce qui leur a donné l’occasion « d’étoffer » toute portion de leur proposition pouvant sembler peu claire. Cependant, l’expert-conseil de JSI n’a sollicité que des éclaircissements limités de la part de Mirtech, celle-ci se trouvant ainsi privée d’une occasion similaire. Mirtech soumet qu’elle ne s’est pas rendu compte que l’expert-conseil de JSI « mettrait en doute » sa déclaration de conformité et que, si on le lui avait demandé, elle aurait expliqué, par exemple, son intention de former des électriciens à l’entretien, durant la période d’environ huit mois nécessaire à l’installation du système de sécurité, pour qu’ils soient totalement qualifiés.

Mirtech met en doute la pertinence du système à deux enveloppes pour l’examen des offres dans ce projet, en raison du temps qu’il faut pour procéder de la sorte et parce que cette méthode élimine les discussions avec le soumissionnaire le moins disant. Elle fait observer que l’expert-conseil de JSI a recommandé à la fois le système à deux enveloppes et le rajustement à la baisse de la norme de qualification des soumissionnaires. Mirtech soumet qu’il faut tenir compte de ces faits. Elle ajoute que, au cours de la période de soumission, la norme de qualification des soumissionnaires a été réduite selon un facteur de neuf. Il est, à son avis, « absolument stupéfiant » qu’un expert-conseil autonome en sécurité recommande une telle baisse de la norme de qualification relativement à un projet où la sécurité est un aspect essentiel. En outre, étant donné que la société, à savoir Marcomm, qui a eu besoin d’un tel rajustement à la baisse de la norme pour être admissible, est également celle à qui le marché a finalement été adjugé, la nature de la relation existant entre l’expert-conseil de JSI et Marcomm peut être mise en question.

Dans une discussion des volets spécifiques de sa proposition où elle a perdu des points lors de l’évaluation, Mirtech soumet que : 1) elle n’aurait pas dû perdre 1,5 point parce qu’elle n’a pas inclus l’unité de commande et le clavier numérique dans les schémas fonctionnels, puisque ceux-ci ne devaient inclure que les principaux composants du système, et que l’unité de commande et le clavier numérique ne sont que des sous-composants; 2) le dispositif de panoramique et d’inclinaison qui a valu à Mirtech de perdre un point était, de l’aveu même du Ministère, acceptable et il est intéressant de noter que les objectifs à focale variable qui coûtent maintenant un point à Mirtech n’ont été mentionnés qu’après qu’il eut été découvert que le dispositif de panoramique et d’inclinaison était correct et après l’adjudication du marché; 3) Mirtech n’aurait dû perdre aucun point quant au délai de réponse aux appels de service puisqu’elle avait clairement indiqué que le service serait assuré par une société située à Ottawa; 4) le nombre de points (7,0) perdus relativement à la gestion de projet est exagéré; de fait, étant donné le contenu de la proposition, Mirtech soumet que la moitié moins aurait été suffisant; 5) contrairement à ce qu’affirme le Ministère, un organigramme indiquant les travailleurs sur place, bien que ne précisant pas la taille de cet effectif, a été fourni; 6) aucun point n’aurait dû être perdu apparemment parce que Mirtech est un fabricant canadien; 7) étant probablement au premier rang des sociétés canadiennes en termes d’expérience et de réalisations antérieures, Mirtech n’aurait dû perdre aucun point à cet égard.

En résumé, Mirtech soumet qu’elle a fourni la preuve probante que sa proposition était techniquement conforme, ne fût-ce que compte tenu du 0,7 point qu’elle a perdu pour avoir déclaré qu’elle est un fabricant, ce qu’elle est. En vérité, le 0,7 point, ajouté à la cote de 31,3 qu’elle a reçue, donne une cote de 32,0 sur 46,0 pour la proposition de Mirtech, soit un total pondéré de 35,0 sur 50,0, c’est-à-dire la cote de passage. En ce qui a trait à la gestion de projet, Mirtech soumet que de perdre 7,0 points sur 10,0 points à cause d’une réponse tardive occasionnelle à un appel de service est totalement excessif, particulièrement à la lumière du fait que le personnel d’entretien d’Ottawa, que le Ministère a jugé non compétent, serait certainement, à tout le moins, rapidement sur les lieux. De plus, il est tout à fait inapproprié, dans les circonstances, de soustraire 3,0 points au chapitre des curriculum vitae. Pris collectivement, les éléments susmentionnés, évalués correctement, devraient, selon Mirtech, porter sa cote bien au-delà de la cote de passage dans la catégorie gestion de projet.

Position du Ministère

Le Ministère soumet que Mirtech a été éliminée du processus d’évaluation parce qu’elle n’a satisfait ni les exigences techniques ni les exigences en gestion de projet. En fait, Mirtech a obtenu une cote de 34,1 au plan de la conformité technique et de 32,7 au plan de la conformité en gestion de projet, alors qu’une proposition devait obtenir au moins 35 points dans chacune des deux catégories pour être jugée conforme. Le Ministère fait observer que ces cotes représentent la moyenne des résultats accordés par les trois membres votants du Comité d’examen et qu’elles représentent aussi un consensus, puisqu’aucun des membres n’a accordé la cote de passage à Mirtech dans l’une ou l’autre des catégories susmentionnées.

Le Ministère soumet que ce sont les Services immobiliers du Ministère, de concert avec le gestionnaire adjoint du Projet de regroupement de l’administration centrale du ministère de la Justice, qui ont choisi les membres du Comité d’examen. Le Comité d’examen, provenant d’organismes fort différents, comprenait six personnes, représentant le concepteur, le locataire, le propriétaire-exploitant, le gestionnaire de projet et de travaux de construction, et l’autorité contractante. Le Ministère souligne que les trois membres votants du Comité d’examen étaient expérimentés et connaissaient le type de système de sécurité qui devait être fourni et installé.

En outre, le Ministère soumet que l’évaluation et la cotation de la proposition de chaque soumissionnaire s’est fondée uniquement sur le document présenté par ce dernier. La familiarité avec le système de sécurité proposé par un soumissionnaire n’a pas joué dans le processus en cause. Dans un tel contexte, le Ministère souligne qu’il incombait à chacun des soumissionnaires d’inclure dans sa proposition des éléments de preuve montrant que son système était conforme aux exigences.

En ce qui a trait au volet des exigences en gestion de projet, le Ministère soumet que l’exigence selon laquelle le soumissionnaire devait garantir une réponse dans les 4 heures et ce, 24 heures par jour, 7 jours par semaine, à toutes les demandes de service ne constitue pas un facteur de partialité en raison de la situation géographique. Il s’agit d’une exigence fonctionnelle obligatoire de ce projet, qui découle des besoins du ministère de la Justice. Le Ministère soumet que Mirtech n’a pas démontré que le représentant local qu’il proposait pour assurer le service, à savoir un entrepreneur général en électricité, avait l’expérience nécessaire et elle n’a pas démontré non plus, comme solution de rechange, comment le représentant recevrait la formation nécessaire pour satisfaire les exigences stipulées pour le système de sécurité proposé.

Après avoir déclaré qu’il ne cherchait pas à obtenir d’information nouvelle en posant des questions, mais simplement des éclaircissements, et que les cotes d’évaluation ne sont fondées que sur le contenu des propositions, le Ministère soumet, relativement aux huit motifs techniques spécifiques de la plainte soulevés par Mirtech, que la proposition de cette dernière : 1) ne contenait pas toute l'information nécessaire sur les caractéristiques du fonctionnement administratif; 2) ne décrivait pas complètement le système proposé; 3) ne se prêtait pas à l’évaluation des éléments qui n’étaient pas correctement identifiés dans son schéma fonctionnel, ni ne pouvait recevoir le total des points relativement au matériel proposé dans les fiches techniques, puisqu’il s’agissait de matériel normalement utilisé dans de petits édifices commerciaux ou des résidences, plutôt que dans de grands complexes commerciaux; 4) proposait un multiplexeur qui ne répondait pas aux spécifications portant sur les panneaux de commande; 5) bien que satisfaisante du point de vue du dispositif de panoramique et d’inclinaison de la caméra, ne répondait cependant pas aux exigences du devis des objectifs à focale variable; 6) n’indiquait la présence d’aucun bureau d’où serait envoyé du personnel d’entretien compétent, si ce n’est à Concord (Ontario), un lieu d’où le délai de réponse serait inacceptable; 7) ne donnait aucune preuve documentaire que le personnel local proposé pour assurer la réponse initiale aux appels de service avait quelque expérience préalable du système de sécurité proposé ou avait reçu une formation à cet égard; 8) ne comprenait aucun organigramme du projet qui eut indiqué, entre autres choses, la taille du personnel sur place, ou l’emplacement et le nombre d’employés disponibles aux fins d’entretien et de réparation.

En ce qui touche la possibilité de l’existence d’une relation spéciale entre l’expert-conseil de JSI et Marcomm, le Ministère indique que JSI a déclaré n’avoir « jamais eu de relations commerciales, financières ou personnelles avec Marcomm ni avec aucun de ses administrateurs. La seule relation qui a existé en a été une d’expert-conseil auprès du Service correctionnel du Canada pour un petit [...] projet à l’établissement Leclerc, en 1993, dont Marcomm a été l’entrepreneur » [traduction].

Décision du Tribunal

Aux termes de l’article 30.14 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal est tenu, lorsqu’il a décidé d’enquêter, de limiter son étude à l’objet de la plainte. Le Tribunal doit déterminer le bien-fondé de la plainte en fonction du respect des critères et des procédures établis pour le contrat spécifique. De plus, l’article 11 du Règlement prévoit, entre autres, que le Tribunal doit déterminer si le marché public a été passé conformément aux exigences de l’Accord sur le commerce intérieur [4] (l’ACI). Pour arriver à une décision dans la présente affaire, le Tribunal doit déterminer si le Ministère, lorsqu’il a passé le marché public, s’est conformé aux dispositions de l’ACI. Plus précisément, le Tribunal doit décider si le Ministère, lorsqu’il a évalué la proposition de Mirtech, a appliqué les critères établis dans la demande de propositions (la DP) et s’il a appliqué ceux-ci en conformité avec l’ACI.

Il est convenu que l’expert-conseil de JSI a initialement recommandé que l’examen des offres se fasse selon un système à deux enveloppes. Cette méthode a clairement été énoncée dans la DP et Mirtech en avait connaissance, ou aurait dû en avoir connaissance, depuis le moment de la publication des documents d’invitation à soumissionner jusqu’au moment du rejet de sa soumission. Mirtech n’a ni fait opposition à la méthode ni remis en question l’influence de l’expert-conseil de JSI qui l’avait proposée. Le Tribunal est convaincu qu’une telle recommandation était bien en deçà des attributions de l’expert-conseil de JSI et qu’elle était convenable dans les circonstances. C’est le Ministère, et non l’expert-conseil de JSI, qui a finalement approuvé cette recommandation et qui a inclus cette méthode dans la DP. Par conséquent, le Tribunal est convaincu que l’expert-conseil de JSI n’a pas en l’espèce exercé d’influence indue. De plus, étant donné la nature délicate de l’information conservée à l’administration centrale du ministère de la Justice, le Tribunal est d’avis que le recours à une méthode à deux enveloppes, qui place l’accent sur la conformité technique plutôt qu’uniquement sur le prix, n’est pas déraisonnable.

En ce qui a trait à la question de la norme de qualification des soumissionnaires énoncée dans la DP, le Tribunal observe que la question a d’abord été soulevée par Marcomm, dans la lettre qu’elle a fait parvenir au Ministère le 22 novembre 1996. En vérité, Marcomm considérait que la norme de qualification, telle qu’elle avait été établie dans la DP initiale, était trop exigeante étant donné les circonstances et, par conséquent, ne servait qu’à limiter la concurrence. Le Ministère a examiné les arguments de Marcomm à ce sujet. Ayant établi que Marcomm avait auparavant fourni des services au Ministère et ayant aussi confirmé que cette société avait, au moins une fois, été jugée inadmissible à soumissionner en raison d’une norme de qualification similaire à celle initialement proposée, le Ministère a décidé d’effectuer la révision de la norme de qualification. À cet égard, le Tribunal observe que, bien qu’il ait été consulté à ce sujet, l’expert-conseil de JSI n’a joué qu’un rôle minime dans la modification de ladite norme. Par conséquent, de l’avis du Tribunal, l’allégation selon laquelle l’expert-conseil de JSI aurait joué un rôle inconvenant ou exercé une influence indue relativement à la modification de la norme de qualification est dénué de tout fondement. En fait, Mirtech reconnaît que le Ministère a le pouvoir de fixer des critères de qualification raisonnables et, de l’avis du Tribunal, c’est précisément ce qu’il a fait.

Mirtech a aussi fait valoir que l’expert-conseil de JSI a choisi d’adopter une méthode d’évaluation selon laquelle peu de questions ont été posées sur les propositions des soumissionnaires. De l’avis de Mirtech, cette méthode a procuré un avantage aux soumissionnaires dont les systèmes étaient connus de l’expert-conseil de JSI, et a joué contre Mirtech. De plus, Mirtech soumet que l’expert-conseil de JSI a de fait posé des questions à certains soumissionnaires. Le Tribunal est d’avis que l’exercice de demande d’éclaircissements ne relevait pas personnellement de l’expert-conseil de JSI, mais qu’il s’agissait plutôt de l’approche décrite par le Ministère à l’article 9.1 des ISS, dont l’application s’étendait à tous les soumissionnaires. De plus, à la demande du Comité d’examen, l’expert-conseil de JSI a sollicité certains éclaircissements de Mirtech, ainsi que des soumissionnaires des premiers rangs. Le Tribunal est donc convaincu que Mirtech a été traitée de la même façon que tous les autres soumissionnaires.

Le Tribunal est d’avis que l’expert-conseil de JSI, qui était l’un des trois membres votants du Comité de révision constitué de six personnes compétentes et expérimentées, a assumé ses fonctions et attributions d’une façon équitable et sans exercer d’influence indue. De l’avis du Tribunal, l’expert-conseil de JSI a abordé l’examen et la cotation de toutes les soumissions d’une manière uniforme et cohérente. De plus, le Tribunal est d’avis qu’il n’existe absolument aucun élément de preuve montrant des relations inconvenantes entre l’expert-conseil de JSI et Marcomm.

En ce qui a trait à l’évaluation technique, le Tribunal est convaincu que le Comité d’examen a procédé à un examen complet de la proposition de Mirtech. Ce faisant, le Comité d’examen a appliqué la méthode d’évaluation énoncée dans la DP d’une façon uniforme et il a documenté ses décisions et conclusions d’une matière satisfaisante. Quant à savoir précisément si Mirtech aurait dû obtenir davantage de points pour les huit éléments spécifiques déjà mentionnés, le Tribunal est d’avis que, s’il est convaincu que le Ministère a agi d’une manière équitable en ce qui concerne la procédure, il doit s’en remettre au jugement de ce dernier sur lesdits éléments.

Dans cette affaire, le Tribunal est convaincu que le Ministère a clairement énoncé dans la DP la méthode et les critères d’évaluation, qu’il s’est préparé correctement à l’évaluation des propositions en formant un Comité d’examen, composé de personnes provenant de divers organismes et ayant de l’expérience en systèmes de sécurité ainsi qu’en gestion de la procédure de passation des marchés publics. Le Tribunal est convaincu aussi que le Comité d’examen a mené une évaluation complète de toutes les propositions, d’une façon uniforme et en conformité avec les dispositions de la DP, et qu’il a documenté ses actions, rendant ainsi possible l’examen par une tierce partie indépendante. En ce qui a trait aux huit éléments spécifiques contenus dans la plainte de Mirtech, le Tribunal est convaincu que le Comité d’examen s’est appliqué à les analyser soigneusement et les a jugés en tenant compte des paramètres de la méthode d’évaluation, c’est-à-dire sur la foi du contenu des propositions et selon le système de cotation par points conçu à cette fin. Le Tribunal est convaincu aussi que Mirtech n’a subi aucune discrimination du fait qu’elle n’est pas située dans la région d’Ottawa. Il est manifeste que la proposition de Mirtech a perdu des points au plan des exigences d’entretien et de service continus à cause des arrangements particuliers qu’elle a proposés à cet égard. Le Tribunal est convaincu que les cotes reflètent le jugement du Ministère sur la capacité de Mirtech, telle que présentée dans sa proposition, de satisfaire des exigences rigoureuses en matière de service et que les cotes en question n’impliquent pas l’existence de partialité du Ministère en matière de situation géographique.

Compte tenu des motifs qui précèdent, le Tribunal conclut que le Ministère a correctement déclaré que la soumission de Mirtech n’était pas conforme aux exigences parce qu’elle ne satisfaisait pas la cote de passage obligatoire aux plans du mérite technique et de la gestion de projet. Le Ministère est arrivé à cette décision d’une manière impartiale, équitable et transparente et s’est appuyé, ce faisant, sur les critères d’évaluation et les facteurs de pondération qui avaient clairement été établis dans les documents d’invitation à soumissionner.

DÉCISION DU TRIBUNAL

Compte tenu des explications qui précèdent, le Tribunal détermine, relativement à l’objet de la plainte, que le marché public a été passé conformément à l’ACI et que, par conséquent, la plainte n’est pas fondée.


1. L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.).

2. DORS/93-602, le 15 décembre 1993, Gazette du Canada Partie II, vol. 127, no 26 à la p. 4547, modifié.

3. DORS/91-499, le 14 août 1991, Gazette du Canada Partie II, vol. 125, no 18 à la p. 2912, modifiées.

4. Signé à Ottawa (Ontario) le 18 juillet 1994.


[ Table des matières]

Publication initiale : le 18 juin 1997