MÉTRO EXCAVATION INC. ET ENTREPRISE MARISSA INC.

Décisions


MÉTRO EXCAVATION INC. ET ENTREPRISE MARISSA INC.
Dossier no : PR-99-016

TABLE DES MATIÈRES


Ottawa, le vendredi 5 novembre 1999

Dossier no : PR-99-016

EU ÉGARD À une plainte déposée par les sociétés Métro Excavation inc. et Entreprise Marissa inc. aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47;

ET EU ÉGARD À une décision d’enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes de l’article 30.14 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte n’est pas fondée.

Arthur B. Trudeau
_________________________
Arthur B. Trudeau
Membre


Michel P. Granger
_________________________
Michel P. Granger
Secrétaire






Date de la décision : Le 5 novembre 1999

Membre du Tribunal : Arthur B. Trudeau

Gestionnaire de l’enquête : Randolph W. Heggart

Agent d’enquête : Dominique Laporte

Avocat pour le Tribunal : Philippe Cellard

Parties plaignantes : Métro Excavation inc. et Entreprise Marissa inc.

Avocat pour les plaignantes : Sylvain Trudel

Intervenante : Verreault Navigation inc.

Avocat pour l’intervenante : Peter E. Kirby

Institution fédérale : Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux

EXPOSÉ DES MOTIFS

INTRODUCTION

Le 8 juillet 1999, les sociétés Métro Excavation inc. et Entreprise Marissa inc. (Métro/Marissa) ont déposé une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur [1] à l’égard du marché public (numéro d’invitation EE517-9-0001/A) du ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (le Ministère) pour le ministère des Pêches et Océans portant sur la fourniture de services de dragage d’entretien annuel dans une partie sédimentaire de la voie navigable du fleuve Saint-Laurent, en aval de Québec, dans le tronçon de chenal communément appelé « Traverse Nord ».

Métro/Marissa soutiennent que leur offre respecte intégralement l’esprit du devis et que, par conséquent, le rejet de leur offre par le Ministère contrevient à l’article 504(3) de l’Accord sur le commerce intérieur [2] et constitue une exclusion injustifiable du processus d’appel d’offres. Métro/Marissa soutiennent en outre que le refus constant du Ministère d’analyser sérieusement et objectivement leur soumission ainsi que les déclarations de ce dernier dans la présente affaire démontrent que le Ministère enfreint les articles 504(2)(a) et (b) [3] et, d’autre part, l’article 504(3) de l’ACI, en ce qu’il exerce de la discrimination entre les produits et services offerts par Métro/Marissa par rapport à ceux offerts par la société Verreault Navigation inc. (Verreault). Métro/Marissa soutenaient initialement que le Ministère a rédigé ses spécifications techniques de façon à favoriser les produits et services de l’adjudicataire, ceci au détriment des produits et services de Métro/Marissa. Dans ses commentaires sur le rapport de l’institution fédérale, Métro/Marissa ont toutefois révisé leur position et soutiennent qu’elles ne contestent pas la légitimité de l’exigence par le Ministère d’un certain type de drague.

Métro/Marissa affirment que le contrat leur revenait de droit en tant que soumissionnaires conformes les moins-disantes et demandent, à titre de mesure corrective, que le contrat leur soit adjugé.

Le 15 juillet 1999, le Tribunal a avisé les parties qu’il avait décidé d’enquêter sur la plainte, puisque cette dernière remplissait les conditions d’enquête énoncées à l’article 7 du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics [4] . Le 3 août 1999, le Tribunal octroyait à Verreault le statut d’intervenant. Le 31 août 1999, le Ministère a déposé auprès du Tribunal un rapport de l’institution fédérale en application de la règle 103 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur [5] . Le 21 septembre 1999, Métro/Marissa et Verreault ont déposé leurs commentaires sur le rapport de l’institution fédérale.

Étant donné que les renseignements figurant au dossier permettaient de déterminer le bien-fondé de la plainte, le Tribunal a décidé qu’une audience n’était pas nécessaire et a statué sur la plainte à partir des renseignements au dossier.

PROCÉDURE DE PASSATION DU MARCHÉ PUBLIC

Le 3 juin 1999, un avis de projet de marché (APM) a été diffusé par l’intermédiaire du Service électronique d’appels d’offres canadien (MERX). L’APM précisait que le marché était visé par l’ACI. Les instructions générales de l’appel d’offres prévoyaient notamment ce qui suit :

2 Information générale

.1 Type d’équipement exigé

Drague à succion autoporteuse à élindes traînantes.

Période de travail

Du 21 juillet 1999 au 31 octobre 1999

12 Protection et précautions

.1 Effectuer les travaux de manière à ne pas nuire aux opérations normales des usagers de la voie navigable du St-Laurent [sic]

Sous la section « Mesurage », au point 6 de la rubrique « Limites horizontales », l’appel d’offres indique notamment que la largeur du chenal est de 305 m dans la Traverse Nord.

La section « Dragage » de l’appel d’offres prévoyait les dispositions suivantes :

1.5 Entrave à la navigation

.1 Aucune drague, mât de charge, chaland, remorqueur, pipeline, ne devra en aucun moment nuire au trafic des navires.

1.9 Matériel flottant

.1 L’Entrepreneur devra fournir tout l’équipement de dragage d’une capacité suffisante pour draguer, transporter et disposer tout le volume des matériaux mentionné au contrat et à l’intérieur de la période de travail déterminée dans ce devis. Si l’Entrepreneur a l’intention d’utiliser un équipement auxiliaire de dragage, il devra l’indiquer dans les documents de soumission. Tout l’équipement nécessaire à l’exécution du contrat de dragage doit être à la satisfaction de l’Ingénieur.

.3 L’Entrepreneur devra démontrer dans sa soumission avec référence à l’appui que l’équipement qu’il propose est capable d’exécuter le travail à l’intérieur de la période indiquée au devis.

La date de clôture de l’appel d’offres était le 21 juin 1999. Deux offres ont été reçues en réponse à cette invitation, soit celle de Métro/Marissa, les soumissionnaires les moins-disantes, et celle de l’intervenante, Verreault. Par suite de l’évaluation de la soumission de Métro/Marissa, le Ministère a déterminé que cette dernière n’était pas conforme au devis, car, à son avis, l’équipement proposé n’était pas une drague à succion autoporteuse à élindes traînantes. Le 23 juin 1999, le Ministère a octroyé le contrat à Verreault et, le 25 juin 1999, a fait parvenir une lettre à Métro/Marissa énonçant, en partie, ce qui suit :

Votre firme ne répond pas à une des exigences principales du devis qui porte sur le type d’équipement. Il est mentionné aux instructions générales du devis, section 01005 - article 2, que le type d’équipement exigé est une drague à succion autoporteuse à élindes traînantes. L’équipement que vous proposez (barges et remorqueurs) ne constitue pas une drague autoporteuse.

Votre soumission ne peut donc pas être retenue.

Le 25 juin 1999, Métro/Marissa ont fait parvenir une lettre faisant part de leur désaccord à l’égard de la décision du Ministère :

Nous venons à l’instant de recevoir votre conclusion pour l’octroi du contrat en titre.

Nous ne comprenons pas et n’acceptons pas votre décision car nous affirmons plus que jamais respecter intégralement l’esprit du devis.

Le 5 juillet 1999, des représentants de Métro/Marissa ont rencontré le personnel du Ministère et leur ont remis une lettre précisant le type d’équipement employé pour les travaux de dragage de même que les modifications envisagées à celui-ci. Le 7 juillet 1999, le Ministère procédait à la signature du contrat avec Verreault.

BIEN-FONDÉ DE LA PLAINTE

Position de Métro/Marissa

Métro/Marissa soutiennent que la décision du Ministère de rejeter leur proposition, pour le motif que le navire proposé, le John F. Kennedy, ne constitue pas une drague autoporteuse à élindes traînantes, est fondée sur une conclusion de faits erronée, inéquitable et arbitraire. À l’appui de leurs affirmations, Métro/Marissa soutiennent que le John F. Kennedy est bel et bien une drague, car il est dûment certifié à ce titre par le Registrateur des navires de la Garde côtière canadienne. Métro/Marissa soumettent de plus que dans une lettre qu’elles ont fait parvenir au Ministère en complément de sa soumission, elles décrivaient le système de propulsion du John F. Kennedy ainsi que le système de succion et le mode de transport des matériaux dragués. Métro/Marissa allèguent notamment que leur drague et les autres équipements connexes constituent une façon plus moderne et plus efficace d’exécuter les exigences du devis que le Port Méchin proposé par Verreault. Métro/Marissa soutiennent que lors d’une rencontre avec le Ministère, celui-ci a justifié sa décision en se basant uniquement sur des références partielles, démontrant ce qu’est une drague suceuse porteuse avec simplement des dessins d’exemples à l’appui. Métro/Marissa sont d’avis qu’il ressort d’autres sources de référence qu’une drague suceuse porteuse peut être de la nature de celle qu’elles proposent.

De plus, Métro/Marissa soutiennent qu’elles ont fait part au Ministère des avantages de leur drague de même que de l’expérience de leur personnel. Métro/Marissa soumettent que rien dans le document d’appel d’offres ne vient limiter l’utilisation d’un remorqueur additionnel à la drague autoporteuse, ou encore empêche que cette dernière soit multidirectionnelle ou que les matériaux dragués soient transférés sur des chalands tirés par des remorqueurs. Dans ses commentaires sur le rapport de l’institution fédérale, Métro/Marissa notent que le Ministère n’a visité que sommairement leur drague et n’a pas inspecté le reste des équipements en sa possession. Métro/Marissa soumettent que leur drague peut accumuler et transporter à son bord des matières draguées mais qu’elles ont choisi d’utiliser des barges avec fond ouvrant traînées par des remorqueurs, lesquelles, soutiennent-elles, ont l’avantage de ne pas interrompre l’opération de dragage. Métro/Marissa concluent donc que leur drague est également autoporteuse. Métro/Marissa avancent qu’il appert des documents de soumission que le John F. Kennedy, une fois modifié, deviendrait une drague à succion autoporteuse à élindes traînantes et qu’il doit donc être qualifié ainsi.

Position du Ministère

Contrairement aux allégations de Métro/Marissa, le Ministère soutient qu’il n’a pas exclu de façon injustifiée la soumission des parties plaignantes. Le Ministère soutient que l’évaluation des offres s’est faite à partir des documents fournis par les soumissionnaires à la date de clôture des soumissions, de même qu’à la suite d’une inspection visuelle de l’équipement proposé. Le Ministère soumet qu’il a agi de bonne foi et de manière équitable et que la décision de rejeter la soumission de Métro/Marissa a été prise en se basant sur le fait que celle-ci ne répondait pas à l’une des principales exigences indiquées dans les spécifications, à savoir la nécessité de disposer d’une drague à succion autoporteuse à élindes traînantes.

Le Ministère indique que l’exigence du document d’appel d’offres visant une drague à succion autoporteuse à élindes traînantes était raisonnable et justifiée compte tenu des conditions de navigation maritime et des considérations environnementales propres à la Traverse Nord. Le Ministère soumet en effet que les facteurs tels que la conjonction des vents, le changement des marées et du courant induit par l’effet de la marée et par la rencontre des eaux douces et salées font que ce secteur représente des conditions de navigation particulières pouvant changer rapidement. Le Ministère précise aussi que la Traverse Nord est empruntée par des navires à tonnage important, moins manœuvrables, et qui occupent plus d’espace dans la voie navigable.

Le Ministère définit une drague à succion autoporteuse à élindes traînantes comme étant un navire conçu pour draguer, accumuler et transporter à son bord les matériaux dragués et déverser ceux-ci aux sites marins de mise en dépôt. En citant à l’appui différentes sources du domaine maritime, le Ministère indique que le terme autoporteuse signifie que le navire accumule à son bord les sédiments plutôt que dans des contenants externes à la drague. Le Ministère soutient également que la drague à succion autoporteuse à élindes traînantes a l’avantage de pouvoir opérer en mer houleuse et dans des courants relativement forts, en pleine circulation maritime et lors de mauvaises conditions atmosphériques. Le Ministère soutient que l’utilisation d’une drague à succion (pompes montées sur des chalands) a été tentée par le passé et que les résultats ont été désastreux, le dragage n’ayant pas pu être complété à temps et ayant été effectué sur une largeur réduite de la voie maritime. Le Ministère indique aussi qu’une drague à succion autoporteuse à élindes traînantes n’est pas exigée ailleurs dans la voie navigable du Saint-Laurent.

À l’égard du fait que l’équipement proposé ne répondait pas aux exigences de l’appel d’offres, le Ministère soumet que la lettre du 21 juin 1999, jointe à la soumission de Métro/Marissa, explique que les sédiments dragués seront transportés par des barges jusqu’aux lieux de déversement marin. Le Ministère conclut que Métro/Marissa n’avaient pas l’intention d’utiliser le John F. Kennedy pour le transport des matériaux dragués, confirmant par le fait même que la description de l’équipement utilisé n’est pas conforme à la description d’une drague à succion autoporteuse à élindes traînantes. Toujours selon le Ministère, rien n’indique l’intention de la part de Métro/Marissa de transformer le John F. Kennedy en drague à succion autoporteuse à élindes traînantes, ce qui nécessiterait des modifications majeures. Quant au certificat d’immatriculation du John F. Kennedy soumis par Métro/Marissa, le Ministère conclut que ce dernier indiquait qu’il s’agissait simplement d’une drague, et non d’une drague à succion autoporteuse à élindes traînantes, tout en venant aussi préciser que le navire n’était doté d’aucun mode de propulsion. En réponse à l’argument voulant que l’appel d’offres permettait d’avoir recours à des remorqueurs et des barges, le Ministère note que la section à laquelle Métro/Marissa font référence se rapporte à de l’équipement auxiliaire, qui ne remplace en rien l’exigence de base consistant à effectuer les travaux avec une drague à succion autoporteuse à élindes traînantes.

Le Ministère soutient que les pièces supplémentaires présentées par Métro/Marissa après la date limite de la présentation des soumissions ne peuvent être prises en considération et n’ont donc pu faire l’objet d’une évaluation.

Position de l’intervenante, Verreault

Verreault soutient que l’offre de Métro/Marissa ne respectait pas l’une des exigences obligatoires de l’appel d’offres, c’est-à-dire l’utilisation d’une drague à succion autoporteuse à élindes traînantes. Verreault soumet qu’il ressort de plusieurs sources du domaine du dragage que les caractéristiques propres aux dragues à succion autoporteuses à élindes traînantes sont les suivantes : une coque en forme de navire; trois fonctions principales dont le dragage; le transport des matériaux dragués et leur déversement; la capacité d’opérer en mer houleuse; le remplissage à son bord des matériaux dragués qui sont passés dans une trémie tout au long de l’opération. De plus, d’après une source citée par Verreault, ce qui distingue le plus la drague autoporteuse des autres types de dragues est que, durant l’opération de dragage, celle-ci n’est pas confinée à une position mais peut, au contraire, se déplacer librement. En ce qui a trait à la proposition de Métro/Marissa, Verreault soutient que celle-ci consiste à installer deux moteurs et deux systèmes de pompes sur un chaland et que le fait qu’on y fasse référence à trois remorqueurs indique clairement que peu importe les moteurs installés sur le John F. Kennedy, ceux-ci ne seront pas destinés à le rendre capable de naviguer par lui-même au milieu des voies navigables. Tout au plus, soumet Verreault, les moteurs pourraient conférer au John F. Kennedy une certaine manœuvrabilité, mais des remorqueurs seraient nécessaires pour l’amener à sa position et le manœuvrer au-dessus du site de dragage. Verreault considère que l’absence de trémie sur le John F. Kennedy afin de capter les matières draguées est révélatrice, du fait que celui-ci n’aurait pas été utilisé pour le dragage tandis qu’il se déplaçait.

Verreault soutient que la nature des travaux devant être effectués dans la Traverse Nord, de même que les conditions propres à cette dernière, nécessite l’utilisation d’une drague à succion autoporteuse à élindes traînantes, seul équipement capable de draguer efficacement tout en se déplaçant. Verreault soumet de plus que l’offre de Métro/Marissa, qui propose l’utilisation de six appareils flottants, plutôt qu’un seul appareil comme le fait Verreault, alourdit considérablement l’opération et accroît le risque d’accident dans le chenal.

MOTIFS DE LA DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes de l’article 30.14 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal est tenu, lorsqu’il a décidé d’enquêter, de limiter son étude à l’objet de la plainte. En outre, à la fin de l’enquête, il lui faut déterminer le bien-fondé de la plainte en fonction du respect des critères et des procédures établies par règlement pour le marché en question. De plus, l’article 11 du Règlement prévoit notamment que le Tribunal doit déterminer si le marché public a été passé conformément aux exigences de l’ACI.

Le paragraphe 506(6) de l’ACI se lit, en partie, comme suit : « Les documents d’appel d’offres doivent indiquer clairement les conditions du marché public, les critères qui seront appliqués dans l’évaluation des soumissions et les méthodes de pondération et d’évaluation des critères ». Le Tribunal doit donc décider si le Ministère a appliqué correctement les dispositions de l’appel d’offres régissant l’évaluation et, ce faisant, s’est conformé aux dispositions du paragraphe 506(6) de l’ACI. Pour ce faire, le Tribunal doit déterminer s’il était justifié pour le Ministère de déterminer que l’équipement proposé par Métro/Marissa ne remplissait pas l’une des exigences obligatoires de l’appel d‘offres, c’est-à-dire l’utilisation d’une drague autoporteuse à élindes traînantes pour l’exécution des travaux. Après avoir fait une analyse minutieuse des soumissions déposées par les parties, le Tribunal détermine que le Ministère a correctement conclu que la soumission présentée par Métro/Marissa ne remplissait pas l’une des exigences obligatoires de l’appel d’offres, c’est-à-dire l’utilisation d’une drague à succion autoporteuse à élindes traînantes, tel que requis à l’article 2 de la section 01005 des instructions générales du devis. Le Tribunal considère que le Ministère a correctement déterminé que la soumission de Métro/Marissa devait être évaluée sur la base des documents présentés avant la date de clôture de l’appel d’offres et que, par conséquent, les pièces et renseignements supplémentaires fournis par la suite ne pouvaient être considérés. Le Tribunal est d’avis que la lettre du 21 juin 1999, présentée au Ministère par le président de Métro/Marissa, dénote clairement l’intention de ces dernières d’utiliser des barges tirées par des remorqueurs afin de transporter les sédiments dragués jusqu’au lieu de déversement. Le Tribunal considère donc qu’il était justifié pour le Ministère de conclure que Métro/Marissa n’envisageaient pas utiliser le John F. Kennedy pour le transport des matériaux dragués jusqu’aux sites de déversement.

Quant à savoir si l’équipement proposé par Métro/Marissa pouvait être qualifié de drague autoporteuse à élindes traînantes, le Tribunal est d’avis, s’appuyant sur diverses définitions provenant de sources du domaine de la navigation et du dragage maritime [6] , que ce qui caractérise une drague autoporteuse à élindes traînantes est sa capacité à draguer en se déplaçant librement, à transporter à son bord les matériaux dragués et à les déverser par la suite. Après avoir examiné la soumission de Métro/Marissa, le Tribunal conclut que le Ministère a correctement déterminé que le John F. Kennedy ne constituait pas une drague autoporteuse à élindes traînantes, puisqu’il ne devait pas transporter à son bord les matériaux dragués. Bien que les documents d’appel d’offres permettaient l’utilisation d’équipement auxiliaire, le Tribunal est d’avis que cela ne modifiait pas l’exigence de base du devis consistant à utiliser une drague autoporteuse à élindes traînantes pour effectuer les travaux de dragage.

Métro/Marissa soutenaient initialement que le Ministère avait rédigé ses spécifications techniques de manière à favoriser les produits et services de Verreault au détriment des siens, contrairement aux dispositions prévues à l’article 504(3) de l’ACI. S’il n’avait pas été retiré subséquemment par Métro/Marissa, le Tribunal note que ce motif de plainte n’aurait pas été présenté dans les délais prescrits. L’article 6 du Règlement prévoit les délais pour la présentation d’une opposition auprès d’un organisme gouvernemental ou le dépôt d’une plainte auprès du Tribunal par un fournisseur potentiel. Généralement, un fournisseur potentiel est tenu de présenter son opposition ou de déposer sa plainte dans les 10 jours ouvrables suivant la date où il a découvert ou aurait dû vraisemblablement découvrir les faits à l’origine de la plainte. Dans le cadre de l’appel d’offres en cause, celui-ci a été publié le 3 juin 1999. Le Tribunal est d’avis que, compte tenu du fait que l’exigence pour une drague autoporteuse à élindes traînantes était clairement énoncée dans l’appel d’offres, Métro/Marissa auraient dû, si telle était leur intention, déposer une plainte auprès du Tribunal ou présenter une opposition au Ministère dans les 10 jours ouvrables suivant le 3 juin 1999.

DÉCISION DU TRIBUNAL

À la lumière de ce qui précède, le Tribunal détermine que le marché public a été passé conformément aux dispositions applicables de l’ACI et que, par conséquent, la plainte n’est pas fondée.

Le Ministère a demandé, dans le rapport de l’institution fédérale, qu’on lui donne l’occasion de présenter d’autres exposés sur les frais dans la présente affaire. Le Tribunal détermine que les circonstances de l’affaire ne justifient pas d’accorder des frais contre Métro/Marissa. Bien que la plainte ne soit pas accueillie, elle n’était pas dépourvue de fondement [7] .


1. L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47 [ci-après Loi sur le TCCE].

2. Signé à Ottawa (Ontario), le 18 juillet 1994 [ci-après ACI].

3. L’article 504(2) de l’ACI se lit comme suit: Sous réserve de l’article 404 (Objectifs légitimes), le paragraphe 1 a pour effet d’interdire au gouvernement fédéral d’exercer de la discrimination: a. entre les produits ou services d’une province ou d’une région, y compris entre ceux inclus dans les marchés de construction, et les produits ou services d’une autre province ou région; b. entre les fournisseurs de tels produits ou services d’une province ou d’une région et les fournisseurs d’une autre province ou région.

4. DORS/93-602 à la p. 4547 [ci-après Règlement].

5. DORS/91-499 à la p. 2912 [ci-après Règles].

6. G.E. Breerwood, « Dredging Equipment, Methods and Contracts », dans Dredging 94, vol. 1, 509 à la p. 510; Dredging for Development, 4e éd., International Association of Dredging Companies et The International Association of Ports and Harbors, 1997; Department of U.S. Army Corps of Engineers, Engineering and Design, Dredging and Dredged Material Disposal, Engineering Manual No. 1110-2-5026, 1983; D. Yell et J. Riddell, Dredging, ICE design and practice guide, The Institution of Civil Engineers, aux p. 3-3 et 3-4; Ports and Dredging, No. 110, IHC Holland, 1981.

7. Flolite Industries, Addenda (27 août 1998), (TCCE).


[ Table des matières]

Publication initiale : le 5 novembre 1999