RAMPART AVIATION, LLC


RAMPART AVIATION, LLC
Dossier no PR-2012-036

Décision prise
le lundi 7 janvier 2013

Décision rendue
le mardi 8 janvier 2013

Motifs rendus
le lundi 28 janvier 2013


TABLE DES MATIÈRES


EU ÉGARD À une plainte déposée aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47.

PAR

RAMPART AVIATION, LLC

CONTRE

LE MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

DÉCISION

Aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur décide de ne pas enquêter sur la plainte.

Serge Fréchette
Serge Fréchette
Membre présidant

Eric Wildhaber
Eric Wildhaber
Secrétaire

L’exposé des motifs suivra à une date ultérieure.

EXPOSÉ DES MOTIFS

1. En vertu du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur1, tout fournisseur potentiel peut, sous réserve du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics2, déposer une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) concernant la procédure des marchés publics suivie relativement à un contrat spécifique et lui demander d’enquêter sur cette plainte. En vertu du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le TCCE, après avoir jugé la plainte conforme au paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE et sous réserve du Règlement, le Tribunal détermine s’il y a lieu d’enquêter.

2. La plainte porte sur un marché public (invitation no 8484-128148/A) passé par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (TPSGC) au nom du ministère de la Défense nationale en vue de la fourniture d’un ou de plusieurs aéronefs (aux termes de contrats de location) et de pilotes pour soutenir les opérations de parachutage des Forces canadiennes au Canada et aux États-Unis.

CONTEXTE

3. Le 21 août 2012, un avis de demande de propositions (DP), dont la date de clôture des soumissions était le 21 septembre 2012, a été publié sur MERX. Selon l’avis, le marché public était assujetti à l’Accord sur le commerce intérieur3.

4. Le 21 octobre 2012, TPSGC a avisé Rampart Aviation, LLC (Rampart) que le contrat avait été adjugé à un autre soumissionnaire, en l’informant des motifs pour lesquels Rampart n’avait pas été choisie comme soumissionnaire retenu. Le contrat a été adjugé à Nouveau Air Sky Diving School et à Summit Air Charters L.P., collectivement le « soumissionnaire retenu ».

5. Le 26 octobre 2012, Rampart s’est opposée au résultat de l’invitation à soumissionner pour deux motifs : premièrement, elle soutenait que les exigences de l’invitation avaient été appliquées de manière injuste, et deuxièmement que, conformément à l’invitation, les critères d’évaluation devaient être respectés à la date d’adjudication du contrat et non à une date ultérieure. Rampart soutenait que, à la date de clôture, le soumissionnaire retenu ne satisfaisait pas à une exigence de la DP, soit que l’aéronef soit disponible et qu’il satisfasse à l’ensemble des conditions du contrat, à la date même du contrat4.

6. En ce qui concerne le premier motif, Rampart soutenait que l’aéronef devait effectuer des missions et que, avant de pouvoir effectuer de telles missions, une autorisation temporaire d’exploitation (ATE) serait requise5. Rampart soutenait que le soumissionnaire retenu devait nécessairement avoir une ATE à la date de clôture pour satisfaire à l’exigence mentionnée ci-dessus. Le deuxième motif comportait un certain nombre d’exemples détaillés de défauts allégués de respecter des exigences réglementaires. Par exemple, Rampart déclarait ce qui suit : « [l]’aéronef doit avoir une charge utile minimale de 2 300 kg »6 [traduction] (soit 5 060 lb). Toutefois, selon les documents publics concernant l’aéronef de type B du soumissionnaire retenu, sa capacité maximale est de seulement 4 500 lb. Cela semble contraire à l’exigence obligatoire de la DP suivante : « O1 Le soumissionnaire a fourni des renseignements suffisants dans sa proposition pour démontrer que les types proposés d’aéronefs satisfont aux exigences énoncées à l’annexe 1 »7 [traduction].

7. Le 13 décembre 2012, TPSGC a fait parvenir un courriel à Rampart dans lequel il refusait la réparation demandée par celle-ci dans sa lettre d’opposition datée du 26 octobre 2012. TPSGC a reconnu que l’aéronef de type B du soumissionnaire retenu ne respectait pas l’exigence de poids minimal indiquée dans le paragraphe ci-dessus et a accepté de publier une nouvelle DP pour cette portion du marché public. En ce qui concerne les autres allégations, TPSGC a répondu que la proposition du soumissionnaire retenu était conforme à la DP ou qu’il s’agissait de questions d’administration du contrat.

8. Le 26 décembre 2012, Rampart a déposé une plainte auprès du Tribunal. Rampart y allègue que TPSGC a « appliqué de manière injuste » [traduction] les exigences de la DP et que sa proposition n’a pas été « évaluée équitablement » [traduction] en ce qui a trait aux critères techniques obligatoires de la DP. Dans sa plainte, Rampart demande la « suspension d’exécution » [traduction] ou la résiliation du contrat adjugé au soumissionnaire retenu. Rampart n’a pas demandé le remboursement de ses frais.

9. Rampart indique dans sa plainte que son adresse est à Franklin (Caroline du Nord), aux États-Unis. Le 31 décembre 2012, le Tribunal a demandé à Rampart de prouver que sa société est un « fournisseur canadien » au sens de l’article 518 de l’ACI, c’est-à-dire qu’elle a « [...] un établissement au Canada ».

10. Le 31 décembre 2012, Rampart a répondu au Tribunal en contestant la nécessité qu’elle soit un « fournisseur canadien » et en demandant au Tribunal de lui indiquer sur quelle disposition sa demande de preuve s’appuie.

11. Le 4 janvier 2013, le Tribunal a renvoyé Rampart à la décision de la Cour suprême du Canada dans Northrop Grumman Overseas Services Corp. c. Canada (Procureur général)8 et a renouvelé sa demande de confirmation et de renseignements concernant l’établissement de Rampart au Canada ou une déclaration selon laquelle elle ne possède pas un tel établissement. Le Tribunal a demandé à ce qu’une réponse lui soit fournie au plus tard le 7 janvier 2013.

12. Le 5 janvier 2013, Rampart a fourni une réponse au Tribunal dans laquelle elle prétendait que, selon Northrop Grumman, les fournisseurs non canadiens peuvent se prévaloir des avantages de l’ACI si le marché public est passé par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux ou par le ministère de la Défense nationale. Rampart n’a jamais fourni de preuve d’un établissement au Canada.

CADRE LÉGISLATIF

13. L’article 11 du Règlement prévoit que le Tribunal doit déterminer si le marché public a été passé conformément aux accords commerciaux pertinents, à savoir, en l’espèce, l’ACI9.

14. Aux termes de l’article 30.11 de la Loi sur le TCCE, un « fournisseur potentiel » peut déposer une plainte relativement à un « contrat spécifique ». Aux termes du paragraphe 3(1) du Règlement, un « contrat spécifique » est un contrat qui est visé par certains accords commerciaux, y compris l’ACI.

15. L’article 502 de l’ACI prévoit que le chapitre cinq « [...] s’applique aux mesures adoptées ou maintenues par une Partie relativement aux marchés publics [...] passés au Canada [...] » [nos italiques].

ANALYSE

16. La Cour suprême du Canada a statué, dans Northrop Grumman, que les fournisseurs non canadiens n’ont pas qualité pour présenter devant le Tribunal des plaintes fondées sur l’ACI. La Cour suprême du Canada confirmait une décision de la Cour d’appel fédérale10 selon laquelle une société américaine sans établissement au Canada n’était pas un fournisseur canadien et que, par conséquent, le Tribunal n’avait pas compétence pour enquêter sur la plainte aux termes de l’ACI.

17. Plus précisément, la Cour d’appel fédérale a déterminé que « [...] l’exigence de l’article 502 liée aux mots “au Canada” [ne serait] respectée [que] par [une] entité répondant aux conditions prévues dans la définition de “fournisseur canadien” »11, cette expression étant définie à l’article 518 de l’ACI comme suit : « [f]ournisseur qui a un établissement au Canada ».

18. Considérant les décisions susmentionnées, le Tribunal a déterminé, dans le dossier no PR-2007-008R12, que si une société n’a pas d’établissement au Canada au moment du processus d’appel d’offres, elle n’est pas un « fournisseur canadien » au sens de l’ACI et, par conséquent, le Tribunal n’a pas compétence pour enquête sur la plainte.

19. Considérant les renseignements fournis dans la plainte de Rampart13 et son incapacité à réfuter la présomption selon laquelle elle n’a pas d’établissement hors des États-Unis14, le Tribunal conclut que Rampart n’a pas d’établissement au Canada. La présente affaire est donc, en tous points, semblable à la décision du Tribunal dans Northrop Grumman.

20. Le Tribunal conclut que Rampart n’est pas un fournisseur canadien au sens de l’ACI et que, par conséquent, elle n’a pas qualité pour présenter devant le Tribunal une plainte fondée sur cet accord.

21. Par conséquent, le Tribunal n’a pas compétence pour enquêter sur la plainte de Rampart.

DÉCISION

22. Aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal décide de ne pas enquêter sur la plainte.


1 . L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47 [Loi sur le TCCE].

2 . D.O.R.S./93-602 [Règlement].

3 . 18 juillet 1994, Gaz. C. 1995.I.1323, en ligne : Secrétariat du commerce intérieur <http://www.ait-aci.ca/index_fr/ait.htm> [ACI].

4 . Voir l’article 2.2 de la partie 1 de la DP.

5 . Voir l’article 3.2 de l’annexe « A », « Énoncé des travaux ».

6 . Lettre d’opposition de Rampart datée du 26 octobre 2012 à la p. 5.

7 . L’article 1.1.1 de la partie 4 de la DP.

8 . [2009] 3 R.C.S. 309 [Northrop Grumman].

9 . Les services requis entrent dans le groupe V, « Services de transport, d’agences de voyage et de déménagement », et, par conséquent, sont exclus de l’application de l’Accord de libre-échange nord-américain conformément à l’annexe 1001.1b-2, de l’Accord sur les marchés publics conformément à l’annexe 4, de l’Accord de libre-échange entre le Canada et le Chili conformément à l’annexe Kbis-01.1-4, de l’Accord de libre-échange Canada-Pérou conformément à l’annexe 1401.1-4B et de l’Accord de libre-échange Canada-Colombie conformément à l’annexe 1401-4B.

10 . Canada (Procureur général) c. Northrop Grumman Overseas Services Corp., [2009] 1 R.C.F. 688.

11 . Ibid. au para. 62.

12 . Re plainte déposée par Northrop Grumman Overseas Services Corporation (2 décembre 2009) (TCCE) au para. 22.

13 . Plainte, pièce 8.

14 . Réponses de Rampart des 3 et 5 janvier 2013.