CSI CONSULTING INC.

Ordonnances et motifs de demandes de frais ou d'indemnisation


CSI CONSULTING INC.
c.
MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX
Dossier no PR-2003-070

Ordonnance rendue
le mercredi 22 mars 2006


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À une plainte déposée par CSI Consulting Inc. aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47;

ET À LA SUITE D’une décision rendue par le Tribunal canadien du commerce extérieur, aux termes des articles 30.15 et 30.16 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, recommandant le versement à CSI Consulting Inc., en reconnaissance de l’occasion qu’elle avait perdue, d’une indemnité d’un montant égal au tiers du profit qu’elle aurait raisonnablement réalisé si elle avait été le soumissionnaire retenu dans le cadre de l’invitation no V7587-03-0001/A et accordant à CSI Consulting Inc. le remboursement des frais raisonnables qu’elle avait engagés pour le dépôt et le traitement de la plainte;

ET À LA SUITE D’une décision rendue par la Cour d’appel fédérale dans le dossier A-299-04 confirmant la recommandation et l’adjudication du Tribunal canadien du commerce extérieur.

ENTRE

 

CSI CONSULTING INC.

Partie plaignante

ET

 

LE MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

Institution fédérale

ORDONNANCE ET RECOMMANDATION

INTRODUCTION

Dans une décision rendue le 3 mai 2004, le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal), aux termes du paragraphe 30.16(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur 1 , a accordé à CSI Consulting Inc. (CSI) le remboursement des frais raisonnables qu’elle avait engagés pour le dépôt et le traitement de la plainte. Aux termes des paragraphes 30.15(2) et 30.15(3), le Tribunal a recommandé, à titre de mesure corrective, le versement à CSI d’une indemnité d’un montant égal au tiers du profit qu’elle aurait raisonnablement réalisé si le contrat lui avait été accordé. Les Lignes directrices sur les frais dans une procédure portant sur un marché public (Lignes directrices sur les frais de 1999) et les Lignes directrices sur les indemnités dans une procédure portant sur un marché public — révisées (Lignes directrices sur les indemnités de 2001) s’appliquent à la réclamation de frais et à l’indemnité de CSI.

Le 28 septembre 2005, CSI a soumis au Tribunal sa réclamation de frais au montant de 41 218,49 $ (incluant la TPS). Le Tribunal a demandé des renseignements justificatifs supplémentaires et, le 15 octobre 2005, CSI a présenté une nouvelle réclamation de frais au montant de 33 394,41 $ (incluant la TPS). Le 26 octobre 2005, le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (TPSGC) a déposé des observations sur les réclamations de CSI. Le 8 novembre 2005, CSI a déposé ses observations finales.

Le 4 novembre 2005, CSI a soumis au Tribunal sa demande d’indemnité au montant de 125 533,33 $. Le 16 novembre 2005, TPSGC a déposé ses observations initiales et a demandé que CSI produise d’autres renseignements. Le 17 novembre 2005, le Tribunal a demandé à CSI de déposer d’autres renseignements au sujet de sa demande d’indemnité, ce que CSI a fait le 24 novembre 2005. Le 7 décembre 2005, TPSGC a déposé ses observations finales sur les observations de CSI. Le 20 janvier 2006, CSI a déposé ses observations finales.

FRAIS LIÉS À LA PLAINTE

CSI a réclamé un total de 23 454,56 $2 (incluant la TPS) pour des frais juridiques facturés par trois cabinets. Ce montant représente 78,0 heures au taux horaire de 250,00 $ (cabinet no 1), 8,9 heures au taux horaire de 269,14 $ (cabinet no 2), 7,4 heures au taux horaire de 103,81 $ (cabinet no 2) et 2 minutes au taux horaire de 220,00 $ (cabinet no 3). Elle a aussi réclamé 3 660,80 $ (incluant la TPS) pour les débours, 5 350,00 $ (incluant la TPS) pour des conseils indépendants en approvisionnement en vue de la rédaction de certaines parties de la plainte et 851,13 $ (incluant la TPS) pour les dépenses de deux employés qui ont dû se déplacer dans le cadre de la procédure relative à la plainte.

TPSGC a soutenu que les 78 heures demandées par le premier cabinet juridique avaient toutes été travaillées par le même avocat et qu’aucune pièce au dossier ne confirmait le nombre d’années d’exercice du droit de ce dernier. TPSGC a soutenu que le seul taux horaire admissible est celui prévu à l’annexe B des Lignes directrices sur les frais de 1999 pour un avocat ayant le nombre d’années d’expérience déclarées par ce dernier. TPSGC a aussi soutenu que le nombre de 78 heures réclamé était excessif et injustifié étant donné la faible complexité de la plainte. Il a souligné que, durant toute la procédure, l’avocat de CSI avait saisi l’occasion de présenter de longues observations répétitives et excessives. Quant aux frais demandés par le deuxième cabinet juridique, TPSGC a prétendu que les frais avaient été réclamés à l’égard d’un travail distinct et exécuté avant « le dépôt et le traitement de la plainte » pour lesquels le Tribunal a accordé le remboursement à CSI. Il a aussi souligné que le travail facturé par le deuxième cabinet était le même que celui facturé par le premier cabinet. TPSGC n’a pas présenté d’observations sur les 2 minutes facturées par le troisième cabinet.

TPSGC a soutenu que les dépenses réclamées pour les employés de CSI avaient été engagées dans le cadre de leurs attributions habituelles et, en conformité avec l’alinéa 5.2.3 des Lignes directrices sur les frais de 1999, que leur remboursement ne devrait pas être accordé. Il a aussi soutenu que les deux déplacements semblaient avoir eu lieu les 9 mars et 2 mai 2004, à savoir après la décision du Tribunal du 3 mars 2004, et après que l’avocat de CSI eut déposé ses observations finales. TPSGC n’a pas présenté d’observations sur la réclamation de 5 350,00 $ pour des conseils indépendants en approvisionnement.

En réponse aux observations de TPSGC, CSI a soutenu que l’avocat du cabinet no 1 avait exercé le droit pendant 14 ans et, en raison de son expérience de la politique et du droit commercial à l’échelle internationale ainsi que de ses années de pratique, ce dernier devrait avoir droit au taux horaire maximum autorisé par le Tribunal pour un conseiller juridique (200,00 $), ce qui, a-t-elle fait remarquer, est inférieur au taux horaire courant sur le marché, lequel taux se situe entre 260,00 $ et 350,00 $. CSI a soutenu que la violation des accords commerciaux par TPSGC ne lui avait pas laissé d’autre choix que celui d’engager des frais pour déposer une plainte auprès du Tribunal puis de se défendre lorsque TPSGC avait interjeté appel de la décision du Tribunal. CSI a soutenu que l’affaire gravitait autour de trois questions distinctes, c’est-à-dire la partialité, l’autorisation de sécurité et les critères obligatoires non énoncés, et que le nombre d’heures réclamé n’était pas excessif.

CSI a aussi soutenu que les frais engagés par le cabinet no 2 n’étaient ni antérieurs ni distincts par rapport « au dépôt et au traitement de la plainte » et que le remboursement devrait donc être accordé. Elle a prétendu que le travail effectué par ce cabinet était extrêmement pertinent et important et que le cabinet l’avait guidée quant à l’information qu’il fallait obtenir de TPSGC. Elle a soutenu que cette information constituait une partie intégrante de ses pièces à l’appui de la plainte dont elle avait saisi le Tribunal. Elle a souligné que, le 28 novembre 2005, le cabinet no 2 avait appris qu’il représentait IT/NET Consultants Inc. (IT/NET), l’adjudicataire du marché dans la plainte en question; CSI avait par la suite transmis le travail accompli par le cabinet no 2 au cabinet no 1, qui avait poursuivi l’affaire.

En ce qui a trait aux dépenses réclamées pour les employés, CSI a soutenu qu’elle n’avait pas réclamé les heures consacrées par son cadre et son employé relativement à la procédure. Elle a soutenu que, en raison de la complexité et du fort volume de faits qu’il fallait recueillir et discuter en préparation de la réclamation, CSI avait dû engager des dépenses de déplacement pour tenir des réunions et examiner le matériel pertinent à la procédure et en discuter à Toronto et à Ottawa.

ANALYSE

Compte tenu des observations qui précèdent, le Tribunal accordera ce qui suit : le remboursement de 78 heures pour les frais juridiques, une partie des débours, le remboursement de tous les frais pour les conseils spécialisés en approvisionnement et aucun remboursement des dépenses réclamées pour les employés.

En ce qui a trait aux frais juridiques, le Tribunal accordera le remboursement de la totalité des 78 heures réclamées par le cabinet qui a représenté CSI durant toute la procédure devant le Tribunal. Toutefois, le montant admissible sera établi en conformité avec l’annexe B des Lignes directrices sur les frais de 1999 et non pas en fonction du taux horaire réclamé par CSI. L’annexe B précise que le taux horaire applicable pour un avocat comptant entre 13 et 20 années d’exercice du droit est de 125,00 $ à 150,00 $. Étant donné qu’au moment où il a représenté CSI, l’avocat comptait 14 années d’expérience, le Tribunal accordera le taux horaire inférieur de 125,00 $ pour un montant de 9 750,00 $, excluant la TPS. Il constate qu’une partie des 78 heures facturées par cet avocat comprenait du temps pour « Examen du dossier du marché public » [traduction] et « Préparation d’un projet de plainte »3 [traduction], et n’accordera donc aucune partie de la réclamation pour les frais juridiques eu égard au cabinet no 2. CSI a déclaré que ce cabinet, qui s’était récusé relativement à sa représentation de CSI en raison de conflit d’intérêts, avait effectué un important travail d’établissement de la plainte. Toutefois, étant donné la réclamation de frais eu égard au cabinet no 1, le Tribunal n’est pas d’avis que TPSGC devrait être tenu d’indemniser CSI deux fois pour ce qui semble avoir été un même travail. Quant à la réclamation pour les deux minutes facturées par le cabinet no 3, le Tribunal ne peut faire le rapprochement entre le contenu de cette réclamation et la procédure et, par conséquent, n’y fera pas droit.

En ce qui a trait aux débours, le Tribunal constate que la réclamation comportait trois éléments : les photocopies, les services de messagerie ainsi que la reliure et la séparation de la plainte4 . Il accordera le remboursement des frais liés à la totalité des 9 684 pages photocopiées, mais au taux prévu à l’annexe B des Lignes directrices sur les frais de 1999 (0,10 $ la copie) et non pas au taux réclamé par CSI (0,25 $ la copie), pour un total de 968,40 $, excluant la TPS. Le Tribunal constate que les frais de messagerie documentés représentent un montant total de 202,66 $ (excluant la TPS) et il accordera le remboursement de ce montant. Il accordera le montant de 660,50 $, excluant la TPS, réclamé pour la reliure et la séparation de la plainte.

En ce qui a trait aux dépenses réclamées pour les employés, le Tribunal fait observer que, dans sa décision du 3 mai 2004, il avait accordé à CSI le remboursement des frais qu’elle avait engagés pour « le dépôt et le traitement de la plainte ». Les frais réclamés par CSI pour les déplacements de ses employés avaient été engagés après cette date et donc après la clôture de la procédure. Le Tribunal n’accordera pas le remboursement de ces frais.

Le Tribunal constate que TPSGC n’a pas présenté d’observations sur le bien-fondé du montant réclamé par CSI pour les conseils spécialisés en approvisionnement pour préparer sa plainte et il accordera le remboursement du plein montant demandé à cet égard.

Au total, le Tribunal accorde le remboursement d’un montant de 9 750,00 $ pour les frais juridiques, d’un montant de 1 831,56 $ pour les débours et d’un montant de 5 000,00 $ pour les conseils spécialisés en approvisionnement (dans tous les cas excluant la TPS), soit un montant total de 16 581,56 $. En incluant la TPS, le montant total admissible est de 17 742,27 $.

INDEMNITÉ POUR PERTE D’OCCASION

CSI a soutenu que le montant du profit qu’elle avait perdu parce que le contrat en question ne lui avait pas été adjugé, divisé par trois comme l’avait recommandé le Tribunal dans sa décision, était de 125 533,33 $.

TPSGC a soutenu que le montant réclamé était fondé sur les hypothèses erronées que les périodes visées par l’option de renouvellement facultatif du contrat étaient chacune d’un an, alors que deux des trois périodes étaient en fait de six mois, et que l’option avait été exercée pour toutes les périodes de renouvellement facultatif, ce qui n’était pas le cas. Il a soutenu que, en raison d’un financement insuffisant, le contrat avait pris fin sans qu’aucune option de renouvellement facultatif pour une période donnée n’ait été exercée. TPSGC a soutenu que la réclamation de CSI devait donc se fonder seulement sur le profit qu’elle aurait tiré au cours de l’année initiale du contrat et ne comprendre aucun montant pour un profit qu’elle aurait pu tirer au cours de toute période de renouvellement facultatif.

À l’étude des états financiers soumis par CSI, TPSGC a soutenu que le profit réclamé pour le contrat en question était fondé sur des coûts de main-d’œuvre qui n’étaient pas justifiés et qui étaient, d’une manière incohérente, inférieurs aux taux facturés pour le même personnel à l’occasion du contrat précédent5 , ce qui avait eu pour effet d’augmenter artificiellement la composante représentant le profit eu égard au taux horaire inclus par CSI dans sa proposition. Il a aussi fait observer que le montant total de CSI pour le « Coût des ventes — sous-traitants » [traduction] pour l’année en question était, en pourcentage, considérablement supérieur au taux réclamé par CSI pour le contrat en question. TPSGC a soutenu que, à cause de cet écart, le montant réclamé par CSI était déraisonnable, n’était pas corroboré par ses états financiers et ne devrait pas être accepté par le Tribunal.

En ce qui a trait à la marge bénéficiaire réclamée par CSI, TPSGC a soutenu que les états financiers de CSI établissaient « l’existence d’une incohérence marquée entre le seuil proposé de rentabilité réclamé par CSI Consulting relativement au contrat en question et les seuils de profit réalisés par la société au cours des récentes années »6 [traduction]. Le calcul du montant véritable de profit que CSI aurait réalisé devrait être fondé sur ses états financiers, qui font ressortir une marge bénéficiaire considérablement moindre.

En réponse à TPSGC, CSI a soutenu que les actions de TPSGC se rapportant à une entreprise, en l’espèce IT/NET, n’étaient pas pertinentes à la réclamation de CSI. Elle a soutenu que, étant donné qu’elle proposait du personnel possédant une vaste connaissance du projet, à un prix de beaucoup inférieur au prix proposé par IT/NET, elle aurait dû remporter le marché en premier lieu. Dans de telles circonstances, elle a prétendu que le financement aurait suffi pour l’exercice des options de renouvellement facultatif et que sa réclamation pour perte de profit devait donc être fondée sur le profit qu’elle aurait réalisé pour la totalité de la période prévue au contrat et non pas uniquement pour la période initiale.

CSI a aussi soutenu que TPSGC n’avait pas tenu compte de la structure des coûts du contrat en question, s’attachant plutôt à extrapoler les coûts de CSI à partir des états financiers des années précédentes. Elle a déclaré que ses projets appliquent des modèles de coûts et des marges de rentabilité qui leur sont propres et que les données présentées au Tribunal relativement à ce projet particulier sont celles qui doivent prédominer.

En ce qui a trait à l’allégation de TPSGC au sujet de l’« incohérence marquée », CSI a affirmé que ces préoccupations ne représentent rien de plus qu’une simple expression d’opinion qui doit être rejetée. Elle a fait observer l’absence de description ou d’analyse des étapes accomplies pour examiner la réclamation de CSI, de liste comprenant l’une quelconque des hypothèses sous-tendant cette analyse et de note énonçant quelle était précisément cette incohérence marquée ou quelles conclusions particulières avaient effectivement été dégagées. CSI a soutenu que TPSGC devait faire la preuve au Tribunal que ses observations étaient exactes et qu’il ne l’avait pas fait en l’espèce.

Enfin, CSI a soutenu que le montant estimatif soumis par TPSGC relativement à ce que sa marge bénéficiaire devrait être était tellement bas qu’il supposait que CSI n’était pas en affaires dans le but de faire de l’argent. Elle a déclaré que l’estimation était basse dans une mesure si déraisonnable que le fait que TPSGC avait avancé de tels montants montrait que l’analyse de ce dernier comprenait des fautes graves.

ANALYSE

Le Tribunal a examiné les réclamations et recommande que TPSGC verse à CSI une indemnité de 41 677 $.

Dans la détermination du montant du profit perdu, le Tribunal s’est appuyé sur l’alinéa 3.1.2 des Lignes directrices sur les indemnités de 2001, qui prévoit ce qui suit :

3.1.2 Pour déterminer le montant de l’indemnité à recommander, le Tribunal tentera, dans la mesure qu’il estime indiquée dans les circonstances et compte tenu de toute autre mesure corrective qu’il a recommandée, de placer la partie plaignante dans la position où cette dernière se serait trouvée, n’eut été l’infraction du gouvernement.

PÉRIODE DU CONTRAT

En ce qui a trait à la période effective pour laquelle sa réclamation de profit perdu sera accordée, le Tribunal n’est pas convaincu par l’argument de CSI selon lequel elle devrait recevoir le profit qu’elle a perdu pendant les périodes visées par l’option de renouvellement facultatif du contrat. Le droit d’exercer une telle option revient à la Couronne; l’argument de CSI selon lequel, si le contrat lui avait été adjugé, la Couronne aurait exercé son option de renouvellement facultatif n’est que pure hypothèse. Le paragraphe 2.2 des Lignes directrices sur les indemnités de 2001, à titre d’un de ses principes directeurs, prévoit ce qui suit : « L’indemnité accordée ne se fonde pas sur des hypothèses ou des conjectures [...] ». Le Tribunal n’est pas d’avis que l’une ou l’autre des parties à la présente procédure puisse savoir ce qui serait arrivé si le contrat avait été adjugé à CSI ou au troisième soumissionnaire conforme. Par conséquent, le Tribunal fonde sa décision sur la période de contrat, qui était de novembre 2003 à octobre 2004, et autorise CSI à réclamer le tiers du profit qu’elle aurait raisonnablement réalisé durant cette période.

QUESTIONS COMPTABLES

Le Tribunal s’est servi des tableaux figurant aux annexes A et B (confidentielle) de la présente ordonnance pour décider de sa recommandation au sujet du montant final d’indemnité admissible. Étant donné le caractère confidentiel des données financières incluses dans les observations afférentes aux réclamations, le Tribunal ne peut publier les chiffres réels qui figurent à l’annexe A de la présente ordonnance. L’annexe B confidentielle est transmise aux parties et contient les chiffres dont il s’est servi.

CSI a soutenu avoir utilisé les montants facturables réels de l’invitation comme montant de recettes brutes dans son calcul pour la période admissible du contrat. De ce montant, elle a déduit ses coûts de main-d’œuvre et ses frais d’administration pour déterminer le profit perdu.

Pour évaluer le caractère raisonnable des coûts que, selon elle, CSI aurait engagés, le Tribunal a dû se pencher sur plusieurs questions comptables fondamentales se rapportant aux observations de CSI, et plus précisément, les questions suivantes :

• Le montant en dollars déclaré pour les recettes brutes (montant total facturable) pour la période de contrat admissible est-il raisonnable?

• La méthode de répartition des coûts est-elle raisonnable (c’est-à-dire les coûts qui sont appliqués au montant des recettes brutes pour calculer le montant du profit perdu sont-ils pertinents et raisonnables)?

• Les estimations en dollars déclarées pour les divers coûts applicables sont-elles raisonnables?

En ce qui a trait à la première question (recettes brutes), le Tribunal conclut que le montant est raisonnable et, par conséquent, accueille l’observation de CSI selon laquelle le montant de ses recettes brutes équivaut au montant en dollars déclaré pour la période admissible du contrat, que le Tribunal a déjà déterminé comme étant d’une durée d’un an. Ce montant figure comme total à la colonne D de l’annexe B.

En ce qui a trait à la deuxième question (répartition des coûts), pour arriver à un montant raisonnable pour la perte de profit dans un contrat spécifique, les coûts applicables doivent être déduits des recettes brutes (autrement dit du total facturable) du contrat. Malheureusement, il n’existe aucune méthode établie pour calculer les coûts applicables. Les coûts alloués se divisent toutefois en deux catégories : les coûts directs et les coûts indirects connexes7 . La catégorie des coûts directs comprend des éléments comme les coûts directs des matières et les coûts directs de main-d’œuvre. La catégorie des coûts indirects comprend les coûts associés à l’exécution du contrat, comme un certain amortissement, un certain loyer et des salaires pour la surveillance. CSI a soutenu que ses coûts directs ne comprenaient que des coûts de « Main-d’œuvre ». L’entreprise désigne ses coûts indirects connexes par l’expression « Frais d’administration » [traduction]. Ces deux catégories de coûts représentent la totalité des coûts de CSI. Par conséquent, il n’existe aucun autre élément de coût à prendre en considération pour arriver à une estimation raisonnable du profit perdu.

Ce qui nous amène à la troisième question (estimations en dollars). Une fois les éléments de coûts pertinents qu’il faut appliquer définis, un montant en dollars doit être fixé pour chaque élément. Là encore, il n’existe aucune méthode établie pour calculer ces montants. Toutefois, le Tribunal est d’avis que les états financiers et les autres documents d’une entreprise, comme les normes publiées, peuvent fonder la détermination de montants raisonnables. Il constate que le montant que CSI a déclaré pour les frais d’administration dans sa réclamation de frais semble être raisonnable à la lumière des montants déclarés dans ses états financiers annuels. Toutefois, le Tribunal constate que le montant déclaré par CSI dans sa réclamation de frais pour les coûts de main-d’œuvre est considérablement inférieur au montant qui serait obtenu en se fondant sur ses états financiers. De plus, le montant pour la main-d’œuvre est inférieur au montant qui serait obtenu par application des taux de salaire publiés pour la période du contrat par Développement social Canada (DSC)8 pour la région géographique où CSI est située. Le Tribunal a donc décidé de se servir de ces taux de salaire pour établir des estimations de référence fiables, en dollars, pour les diverses catégories de main-d’œuvre définies par CSI.

CSI a soutenu avoir calculé les coûts de main-d’œuvre en se fondant sur le taux de salaire quotidien applicable à chaque poste multiplié par le nombre de jours que chaque employé aurait été affecté à ce poste durant la période de contrat initial. Les montants totaux des salaires de chaque poste ont ensuite été additionnés pour arriver au coût total de la main-d’œuvre. Les frais d’administration ont été appliqués selon le taux de 16 p. 100 du montant total facturable. En l’espèce, la main-d’œuvre est le seul coût direct défini par CSI. CSI désigne les coûts indirects connexes qui auraient été engagés pour exécuter le travail comme étant les « Frais d’administration ».

Le Tribunal a étudié l’état des résultats de CSI pour l’exercice se terminant le 31 décembre 2004 et a constaté l’absence de toute autre catégorie de coûts directs que ceux de la main-d’œuvre. Il constate que le ratio des coûts de main-d’œuvre sur les produits d’exploitation dans la réclamation de frais est considérablement inférieur à celui constaté dans l’état des résultats. Par conséquent, le Tribunal est d’avis que l’estimation des coûts de main-d’œuvre de CSI dans sa réclamation de frais est peut-être basse. La réclamation de frais ne définit pas les éléments des frais d’administration. Toutefois, le Tribunal constate que le taux de 16 p. 100 appliqué par CSI pour calculer ces coûts dépasse légèrement le taux qui serait obtenu par application de la même méthodologie aux montants qui figurent dans l’état de ses résultats pour l’exercice se terminant le 31 décembre 20049 . Toutefois, le Tribunal accepte comme raisonnable le taux retenu par CSI pour les frais d’administration.

La comparaison du taux horaire facturé, par catégorie, et des normes de l’industrie publiées sur le site Web de DSC amène le Tribunal à constater que, dans le cas de quatre des cinq postes compris dans sa proposition, CSI a déclaré un taux de salaire inférieur au taux de salaire minimum publié par DSC10 . Il s’ensuit que la partie de la réclamation de CSI portant sur les salaires est d’un montant inférieur et que l’élément de profit est proportionnellement plus élevé qu’il serait si CSI facturait le « salaire minimum » ou le « salaire moyen » publié par DSC.

Étant donné les observations divergentes des parties, le Tribunal a décidé qu’il était raisonnable de calculer le profit perdu par CSI en appliquant le taux de salaire moyen de DSC comme taux de référence. Il a donc appliqué le taux de salaire moyen de DSC au nombre d’heures soumissionnées, par catégorie, pour la période du contrat (Colonne A). Ces montants ont été combinés sous un poste « Salaire moyen total — selon le site Web de DSC » pour le contrat. Les frais d’administration de CSI ont été ajoutés au « Salaire moyen total — selon le site Web de DSC » pour établir le total des coûts de CSI (Colonne C). Ce total a été soustrait des produits d’exploitation bruts soumis par CSI (Colonne D) pour arriver à ce que le Tribunal estime être un profit équitable et représentatif de 125 030 $ (Colonne E). Ce montant a été divisé par trois (Colonne F) car le Tribunal n’a pas pu déterminer si CSI aurait nécessairement remporté le contrat, étant donné la présence de deux autres soumissionnaires techniquement conformes. Par conséquent, le Tribunal établit le montant de la perte de profit de CSI à 41 677 $.

CONCLUSION

Le Tribunal accorde par la présente à CSI un montant de 17 742,27 $ pour les frais qu’elle a engagés pour le dépôt et le traitement de la plainte et ordonne à TPSGC de prendre les dispositions nécessaires pour que le paiement soit effectué rapidement.

Le Tribunal recommande par la présente que TPSGC verse à CSI une indemnité de 41 677 $ en reconnaissance du profit qu’elle a perdu.

Meriel V. M. Bradford
Meriel V. M. Bradford
Membre présidant

Pierre Gosselin
Pierre Gosselin
Membre

Zdenek Kvarda
Zdenek Kvarda
Membre

Susanne Grimes
Susanne Grimes
Secrétaire intérimaire

ANNEXE A

 

A

B

C

D

E

F

POSTE

Salaire moyen total* — selon le site Web de DSC

Frais d’administration par poste — selon CSI

Total des coûts (Colonne A + Colonne B)

Produits d’exploitation bruts (Total facturable) — selon CSI

Perte de profit par catégorie (Colonne D — Colonne C)

Tiers de la perte de profit (Colonne E divisée par 3)

Gestionnaire de projet TI

           

Réalisateur de logiciel

           

Analyste de systèmes

           

Analyste de systèmes

           

Expert-conseil en assurance de la qualité

           
   

TOTAL

   

125 030

41 677

* Fondée sur le salaire horaire moyen multiplié par 7,5 heures multiplié par le nombre de jours de travail déclarés par CSI.

ANNEXE B

Version confidentielle de l’annexe A.


1 . L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47 [Loi sur le TCCE].

2 . Un des cabinets juridiques, le cabinet no 1, a soumis des factures pour 78 heures de travail, divisées également en deux factures. À cause d’une erreur d’ordre mathématique, une des factures ne portait que 9 000,00 $ plutôt que le montant exact de 9 750,00 $ pour 39 heures de travail au taux horaire de 250,00 $.

3 . Cabinet no 1 — facture 10325 —Révisée.

4 . Cabinet no 1 — facture 10324.

5 . Dans la réponse de CSI à l’invitation en question, le fournisseur titulaire était proposé à titre de sous-traitant de CSI.

6 . Pièce 3 de l’exposé de TPSGC du 7 décembre 2005.

7 . Selon une des sources les plus souvent utilisées par les comptables pour guider la répartition des coûts, T. Charles Horngren et George Foster, COST ACCOUNTING: A Managerial Emphasis, 6e éd., Englewood Cliffs (NJ), Prentice Hall, Inc., 1987.

8 . Ottawa Recueil des salaires de l’assurance-emploi 2004, 30 mai 2005, en ligne : Développement social Canada <http://www.dsc.gc.ca/fr/on/bureaux/2004salaires/ottawa.shtml>.

9 . En se fondant sur l’information financière de CSI, le Tribunal a déterminé qu’une formule tenant compte de toutes les dépenses (autres que les coûts directs) divisées par les recettes donnait un résultat de 14,5 p. 100.

10 . DSC fournit trois taux de salaire moyens : salaire minimum, salaire moyen et salaire maximum.