MARITIME FENCE LTD.


MARITIME FENCE LTD.
c.
AGENCE PARCS CANADA
Dossier no PR-2009-027

Ordonnance et motifs rendus
le vendredi 1er avril 2011


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À une plainte déposée par Maritime Fence Ltd. aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47;

ET À LA SUITE D’une décision du Tribunal canadien du commerce extérieur, rendue aux termes des paragraphes 30.15(2) et 30.15(3) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, dans laquelle il recommandait que Maritime Fence Ltd. soit indemnisée en reconnaissance des profits qu’elle avait perdus en étant privée du contrat en question.

ENTRE

 

MARITIME FENCE LTD.

Partie plaignante

ET

 

L’AGENCE PARCS CANADA

Institution fédérale

ORDONNANCE

Le Tribunal canadien du commerce extérieur recommande, par les présentes, que l’Agence Parcs Canada indemnise Maritime Fence Ltd. en lui accordant 346 573,62 $ en reconnaissance des profits qu’elle a perdus parce qu’elle a été privée du contrat en question.

Serge Fréchette
Serge Fréchette
Membre présidant

Dominique Laporte
Dominique Laporte
Secrétaire

EXPOSÉ DES MOTIFS

INTRODUCTION

1. Dans une décision rendue le 23 novembre 2009 aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur 1 , le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) déterminait que la plainte déposée par Maritime Fence Ltd. (MFL) était fondée. Aux termes des paragraphes 30.15(2) et 30.15(3), il recommandait, à titre de mesure corrective, que l’Agence Parcs Canada (Parcs Canada) verse une indemnité à MFL en reconnaissance des profits qu’elle avait perdus en étant privée du contrat en question — un contrat pour l’enlèvement et l’installation de glissières flexibles ainsi que l’installation de panneaux de signalisation sur poteaux de bois dans les parcs nationaux Banff, Kootenay et Jasper. Le Tribunal recommandait que les parties négocient le montant de l’indemnisation, mais il se réservait la compétence de fixer le montant définitif de l’indemnité.

2. Le 25 mars 2010, MFL déposait un exposé auprès du Tribunal, car les parties n’étaient pas parvenues à s’entendre sur le montant de l’indemnisation. L’exposé de MFL était soutenu par un affidavit et un rapport sur la perte de profits préparés par M. Bradley McCormack, ingénieur et employé de MFL, qui était le gestionnaire de projet affecté aux travaux prévus et avait préparé la proposition de MFL en réponse à l’invitation de Parcs Canada. Parcs Canada déposait une réponse auprès du Tribunal le 1er avril 2010. Cette réponse était soutenue par un rapport préparé par M. Steve Pittman, comptable agréé et expert en évaluation d’entreprises. Le 9 avril 2010, MFL déposait des observations supplémentaires.

3. MFL réclame une indemnité de 391 318 $ en reconnaissance des profits qu’elle a perdus en étant privée du contrat en question. Pour sa part, Parcs Canada offre de verser à MFL une indemnité de 195 763 $.

INDEMNISATION POUR PERTE DE PROFITS

4. La Loi sur le TCCE et le Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics 2 ne prévoient pas de directives en matière d’indemnisation3 . Les Lignes directrices sur les indemnités dans une procédure portant sur un marché public (les Lignes directrices) du Tribunal, révisées en juin 2001, prévoient toutefois ce qui suit :

2.2 L’indemnité accordée ne se fonde pas sur des hypothèses ou des conjectures. Le Tribunal reconnaît que, pour préciser le montant de certaines indemnités, il lui sera nécessaire de faire des projections. Cependant, dans tous les cas, les demandes d’indemnité doivent être accompagnées de données économiques, financières ou autres éléments probants fiables.

[...]

3.1.2 Pour déterminer le montant de l’indemnité à recommander, le Tribunal tentera, dans la mesure qu’il estime indiquée dans les circonstances et compte tenu de toute autre mesure corrective qu’il a recommandée, de placer la partie plaignante dans la position où cette dernière se serait trouvée, n’e[û]t été l’infraction du gouvernement.

3.1.3 Les profits perdus s’entendent des profits que la partie plaignante aurait tirés du contrat spécifique si ce dernier lui avait été adjugé. Le Tribunal peut recommander une indemnité en reconnaissance des profits perdus lorsqu’il est clair que, n’e[û]t été l’infraction du gouvernement, le marché aurait été adjugé à la partie plaignante.

[...]

3.2.1 Le montant de l’indemnité accordée pour perte de profits ou d’occasion peut être réduit en conformité avec les principes énoncés dans les présentes.

[...]

3.2.3 Minimisation des dommages-intérêts – Le Tribunal tient compte aussi des mesures que la partie plaignante aurait pu prendre pour éviter les pertes subies à la suite de l’infraction du gouvernement. Ce principe est souvent désigné par l’expression « obligation de limiter » les dommages-intérêts. Pour décider du montant de l’indemnité à recommander, le Tribunal demande à la partie plaignante de décrire les mesures qu’elle a prises pour réduire ou minimiser les pertes de profit qu’elle a subies ou est susceptible de subir à la suite de l’infraction du gouvernement. L’indemnité recommandée par le Tribunal peut être réduite lorsqu’une partie plaignante n’a pas agi de façon raisonnable à cet égard.

3.2.4 Montant lié aux éventualités – Même si les parties plaignantes prévoient tirer un profit de l’exécution d’un contrat spécifique, l’exploitation d’une entreprise commerciale est rarement, sinon jamais, dénuée de risques et peu de contrats sont assortis d’un seuil de profit garanti. La recommandation du Tribunal peut être ajustée à la baisse pour tenir compte de divers risques qui pourraient être rattachés à l’exécution du contrat, y compris aux plans contractuel, commercial et des ressources humaines, notamment. Le montant de l’ajustement à la baisse dépend du risque relatif associé à l’exécution du contrat spécifique en question.

[...]

4.1 Le fardeau de la preuve du bien-fondé d’une demande d’indemnité incombe à la partie plaignante4 .

5. Le but de l’exercice d’indemnisation se veut donc de chercher à placer MFL dans la situation dans laquelle elle se serait trouvée si le contrat lui avait été adjugé. Comme le Tribunal l’a indiqué dans des ordonnances d’indemnisation antérieures, ses recommandations ne doivent pas présenter un caractère de profit fortuit mais elles doivent plutôt être le reflet des pertes réelles subies en raison de l’infraction du gouvernement5 .

Formule de détermination du profit

6. Dans la décision qu’il a rendue le 23 novembre 2009, le Tribunal indiquait que le calcul du montant de la perte de profits serait fondé sur le montant total de la soumission présentée par MFL dans sa proposition en réponse à l’invitation et la valeur totale des travaux effectués pour Parcs Canada aux termes du contrat adjugé.

7. Pour calculer sa perte de profits, MFL a estimé son revenu brut (calculé en multipliant les quantités associées aux travaux réellement effectués par les prix indiqués dans sa proposition), duquel elle a déduit tous les frais applicables (calculés en multipliant les prix unitaires sur lesquels elle a fondé sa proposition par les quantités associées aux travaux réellement effectués), y compris les coûts indirects.

8. Parcs Canada est d’accord avec l’approche globale de MFL à l’égard du calcul de sa perte de profits. Cependant, il est en désaccord avec certains des éléments du calcul, notamment le coefficient d’imputation des coûts indirects appliqué et l’absence d’une déduction des profits tirés de projets locaux que MFL n’aurait pas réalisés si elle s’était fait adjuger le contrat en question. Le Tribunal fait remarquer que l’écart de près de 200 000 $ entre la perte de profits calculée par chacune des parties s’explique principalement par ces deux éléments.

9. Le Tribunal procédera d’abord à l’estimation du revenu que MFL aurait tiré si elle s’était vue adjuger le contrat. Il estimera ensuite le total des frais que MFL aurait engagés pour toucher ce revenu. Enfin, il déterminera si le montant de la perte de profits consécutive devrait être réduit pour tenir compte des profits tirés des projets locaux que MFL n’aurait pas réalisés si le contrat lui avait été adjugé.

Revenu brut

10. L’appel d’offres (AO) publié par Parcs Canada exigeait des soumissionnaires qu’ils remplissent un « Formulaire de soumission et d’acceptation » ainsi que l’appendice 1 de ce formulaire (appendice 1). Selon l’appendice 1, les soumissionnaires devaient remplir un « Tableau des prix unitaires » présentant les prix unitaires et globaux de quatre groupes de travaux indiqués dans l’AO. À ces prix s’ajoutait un montant, défini par l’AO et fixé à 100 000 $, de « coût de revient de base » permettant d’en arriver au « montant estimatif total » du soumissionnaire. Les soumissionnaires devaient ensuite transférer le montant estimatif total à un champ prédéfini du « Formulaire de soumission et d’acceptation », auquel une somme forfaitaire pour les travaux non indiqués dans le « Tableau des prix unitaires » était ajoutée pour en arriver au « montant total de la soumission ». L’AO prévoyait également le versement, par Parcs Canada, de primes pour avance lorsque les travaux figurant à chacune des trois étapes du contrat étaient achevés avant les dates d’achèvement précisées.

11. Pour estimer le revenu que MFL aurait tiré du contrat si celui-ci lui avait été adjugé, le Tribunal examinera les montants qu’elle a présentés dans sa proposition et les travaux réellement effectués pour Parcs Canada aux termes du contrat adjugé.

Somme forfaitaire

12. Le « Formulaire de soumission et d’acceptation » précisait que la somme forfaitaire visait les travaux qui ne figuraient pas au « Tableau des prix unitaires » de l’appendice 1. Selon la note sous le « Tableau des prix unitaires », ces travaux comprenaient notamment les travaux de mobilisation et de démobilisation.

13. Dans sa proposition, MFL indiquait une somme forfaitaire de 40 000 $6 . Cette somme n’était pas contestée par Parcs Canada et ne pouvait pas non plus être modifiée en fonction des travaux réellement effectués pour Parcs Canada aux termes du contrat adjugé.

14. Le Tribunal convient donc que MFL aurait reçu une somme forfaitaire de 40 000 $ si le contrat lui avait été adjugé.

Travaux assujettis à une disposition de prix unitaire

15. Le « Tableau des prix unitaires » de l’appendice 1 de l’AO prévoit ce qui suit :

 

Référence à la spécification

Catégorie de main-d’œuvre, d’usine ou de matériel

Unité de mesure

Quantité estimative
(a)

Prix unitaire, TPS/TVH en sus
(b)

Total estimatif, TPS/TVH en sus
c (a x b)

1

01 35 33

Enlèvement des glissières flexibles et des poteaux – autoroute 93 sud

mètres

920

 $

 $

2

01 35 33

Enlèvement des glissières flexibles et des poteaux – autoroute 93 nord

mètres

8 413

 $

 $

3

01 35 34

Fourniture et installation de glissières flexibles et de poteaux (autoroute 93 nord)

mètres

5 835

 $

 $

4

01 35 34

Fourniture et installation de glissières flexibles et de poteaux – route Norquay

mètres

600

 $

 $

5

01 21 00

Coût de revient de base

Coût de revient de base

1

100 000,00 $

100 000,00 $

MONTANT ESTIMATIF TOTAL :
Transférez le montant à l’alinéa 1)b) de la clause BA03

 

[Traduction]

16. Selon un rapport sur la ventilation des coûts que Parcs Canada a fourni à MFL7 , les travaux réellement effectués aux termes du contrat pour chacun des quatre éléments indiqués au « Tableau des prix unitaires » étaient les suivants : numéro 1 (enlèvement — autoroute 93 sud) : 0 m; numéro 2 (enlèvement — autoroute 93 nord) : 8 367,22 m; numéro 3 (fourniture et installation — autoroute 93 nord) : 7 747,90 m; numéro 4 (fourniture et installation — route Norquay) : 815 m.

17. Les parties conviennent qu’en principe le revenu que MFL aurait tiré des travaux faisant l’objet d’une disposition de prix unitaire devrait être calculé en multipliant les prix unitaires présentés par MFL pour chacun des quatre éléments indiqués au « Tableau des prix unitaires » par les quantités associées aux travaux réellement exécutés en application du contrat adjugé. Cependant, les parties ne s’entendent pas sur la façon dont l’élément numéro 1 (enlèvement—autoroute 93 sud) devrait être traité.

18. Parcs Canada fait remarquer que bien que l’AO comprenne des travaux d’enlèvement des glissières sur l’autoroute 93 sud, ces travaux n’ont pas été exigés et n’ont pas été effectués par le soumissionnaire retenu. Il soutient donc que si MFL s’était fait adjuger le contrat, elle n’aurait pas non plus réalisé ces travaux ni tiré de revenu de cet élément.

19. MFL soutient qu’elle comprend que le soumissionnaire retenu n’a pas effectué ces travaux parce que le contrat a finalement été adjugé à une date ultérieure à la date limite pour l’achèvement de la première étape du contrat. Elle soutient que le retard est attribuable à Parcs Canada, qui l’a d’abord informée qu’elle était le soumissionnaire le moins-disant, pour ensuite indûment adjuger le contrat à son concurrent. Elle soutient également que Parcs Canada a désigné un autre entrepreneur pour la réalisation des travaux en suivant une procédure d’appel d’offres différente, alors que MFL aurait effectué les travaux si le contrat lui avait été dûment adjugé.

20. Même si le Tribunal a recommandé que l’indemnité pour perte de profits soit calculée en partie en se fondant sur la valeur totale des travaux effectivement réalisés pour Parcs Canada aux termes du contrat adjugé, les motifs de la décision qu’il a rendue le 23 novembre 2009 montraient clairement que l’objectif était de s’assurer que MFL serait indemnisée pour la valeur des travaux supplémentaires qui s’ajouteraient pendant l’exécution du contrat8 . Le but n’était pas de priver MFL d’une indemnité pour les travaux qui n’ont pas été réalisés par le soumissionnaire retenu en raison d’un retard qui a finalement été causé par l’infraction de Parcs Canada. Le fait de priver MFL d’une telle indemnité irait à l’encontre de l’objectif de l’exercice d’indemnisation et des Lignes directrices du Tribunal, lesquelles prévoient que, pour déterminer le montant de l’indemnité à recommander, le Tribunal tente « [...] de placer la partie plaignante dans la position où cette dernière se serait trouvée, n’e[û]t été l’infraction du gouvernement ».

21. À la lumière des éléments de preuve au dossier, le Tribunal est raisonnablement convaincu que, n’eût été l’infraction de Parcs Canada, MFL aurait effectué les travaux d’enlèvement des glissières sur l’autoroute 93 sud. Les spécifications jointes à l’AO séparaient les travaux à réaliser aux termes du contrat en trois étapes distinctes. Selon ces spécifications, la première étape des travaux, qui comprenait l’enlèvement des glissières sur l’autoroute 93 sud, devait être achevée au plus tard le 12 juin 20099 . Le Tribunal fait remarquer que d’après les taux de productivité estimatifs de MFL, la réalisation de ces travaux aurait nécessité moins d’une journée10 . L’ouverture des soumissions a eu lieu le 27 mai 2009, et le 28 mai 2009 MFL était informée que sa soumission était la moins-disante. Le 5 juin 2009, cependant, Parcs Canada communiquait avec MFL pour l’informer que le contrat allait être adjugé à son concurrent. Selon MFL, le 9 juin 2009, Parcs Canada l’informait que le contrat n’avait pas encore été adjugé. Le Tribunal est donc d’avis que si le contrat avait été dûment adjugé à MFL peu de temps après l’ouverture des soumissions, MFL aurait eu suffisamment de temps pour mobiliser son personnel et son équipement sur le chantier et pour achever les travaux de la première étape bien avant le 12 juin 2009, la date limite d’achèvement.

22. Par conséquent, pour estimer le revenu que MFL aurait tiré des travaux assujettis à une disposition de prix unitaire, le Tribunal multipliera les prix unitaires communiqués par MFL pour chacun des quatre éléments indiqués au « Tableau des prix unitaires » par les quantités associées aux travaux réellement exécutés en application du contrat pour les éléments numéros 2, 3 et 4 et par le volume estimé des travaux pour l’élément numéro 1. Ainsi, le revenu estimé s’élève à 877 871 $.

« Coût de revient de base »

23. La définition du terme « coût de revient de base » figurant dans les spécifications jointes à l’AO prévoit ce qui suit11  :

1.3 COÛT DE REVIENT DE BASE

.1 Incluez dans le prix contractuel un coût de revient de base de 100 000,00 $.

.2 N’incluez pas dans le prix contractuel des provisions d’urgence additionnelles pour les produits, l’installation, les coûts indirects ou le bénéfice.

.3 Le coût de revient de base indiqué au tableau des prix unitaires n’est pas une somme due à l’entrepreneur. Il s’agit plutôt d’une somme prévue pour le paiement de travaux divers non visés par le tableau des prix unitaires aux termes des conditions générales du contrat.

.4 Ces travaux peuvent notamment inclure :

.1 l’enlèvement de panneaux et de poteaux déjà en place

.2 l’ajout de glissières

.3 l’ajout de panneaux

.5 Le prix contractuel, et non le coût de revient de base, comprend les coûts indirects et le bénéfice de l’entrepreneur relativement aux travaux.

[Traduction]

24. Selon le rapport sur la ventilation des coûts que Parcs Canada a fourni à MFL12 , les travaux effectivement exécutés en application du contrat comprenaient des travaux réalisés pour trois éléments non visés par le « Tableau des prix unitaires ». Parcs Canada a versé un montant total de 26 137,79 $ relativement au « coût de revient de base » pour ces activités.

25. Dans son rapport sur la perte de profits, MFL semble prétendre qu’en plus du revenu qu’auraient généré les travaux supplémentaires effectués en application du contrat et non visés par le « Tableau des prix unitaires », elle aurait tiré un revenu de 100 000 $ de l’installation de panneaux et de travaux divers compris dans le « coût de revient de base ».

26. Parcs Canada soutient que le « coût de revient de base » avait pour objectif de couvrir les coûts des travaux supplémentaires imprévus qui auraient pu devoir être réalisés une fois le projet mis en œuvre et ne constituait pas un montant garanti qui serait payé à l’entrepreneur. Parcs Canada allègue que d’inclure le revenu que MFL aurait tiré des travaux supplémentaires réalisés aux termes du contrat (c.-à-d. les travaux non visés par le « Tableau des prix unitaires ») et la somme de 100 000 $ revient à un double comptage et ne devrait pas être permis.

27. Comme l’indique la définition donnée plus haut, le « coût de revient de base » n’était pas une somme due à l’entrepreneur, mais plutôt une somme prévue pour le paiement de travaux divers non visés par le « Tableau des prix unitaires ». Le Tribunal convient donc que d’inclure le revenu tiré des travaux effectivement réalisés qui ne figuraient pas au « Tableau des prix unitaires » et un montant de 100 000 $ revient à un double comptage. Il est clair qu’en l’espèce, le seul paiement que Parcs Canada a vraiment effectué relativement au « coût de revient de base » pour des travaux non visés par le « Tableau des prix unitaires » était la somme de 26 137,79 $ susmentionnée. Il serait purement spéculatif de prétendre que Parcs Canada aurait fait d’autres paiements relativement au « coût de revient de base » si MFL s’était fait adjuger le contrat.

28. Dans son rapport sur la perte de profits, MFL estimait qu’elle aurait tiré un revenu de 25 218,16 $ des travaux effectivement réalisés aux termes du contrat qui n’étaient pas comptabilisés dans le « Tableau des prix unitaires »13 . Le Tribunal convient que MFL aurait reçu cette somme si le contrat lui avait été adjugé.

Primes pour avance

29. Les spécifications jointes à l’AO prévoyaient le versement de primes pour avance lorsque les travaux indiqués à chacune des trois étapes du contrat étaient achevés avant les dates limites d’achèvement précisées14 . Les alinéas 1.4.1c), 1.4.2c) et 1.4.3c) de la section 01 29 01 des spécifications prévoient ce qui suit :

Si l’entrepreneur a achevé les travaux indiqués à l’étape 1 du contrat [...] avant le 12 juin 2009, Parcs Canada lui versera [...] 2 000,00 $ par jour civil où il a achevé les travaux et n’est plus sur les lieux avant la date d’achèvement précisée du 12 juin 2009. Le montant maximum que versera Parcs Canada à l’entrepreneur est de 6 000,00 $. [...]

Si l’entrepreneur a achevé les travaux indiqués à l’étape 2 du contrat [...] avant le 25 juin 2009, Parcs Canada lui versera [...] 2 000,00 $ par jour civil où il a achevé les travaux et n’est plus sur les lieux avant la date d’achèvement précisée du 25 juin 2009. Le montant maximum que versera Parcs Canada à l’entrepreneur est de 6 000,00 $. [...]

Si l’entrepreneur a achevé les travaux indiqués à l’étape 3 du contrat [...] avant le 27 août 2009, Parcs Canada lui versera [...] 2 000,00 $ par jour civil où il a achevé les travaux et n’est plus sur les lieux avant la date d’achèvement précisée du 27 août 2009. Le montant maximum que versera Parcs Canada à l’entrepreneur est de 10 000,00 $. [...]

[Nos italiques, traduction]

30. MFL soutient que, compte tenu de l’efficacité prévue et du fait qu’elle avait reçu toutes les primes offertes relativement à un appel d’offres semblable de Parcs Canada en 2008, elle aurait vraisemblablement reçu le montant total des primes offertes, soit 22 000 $, si le contrat lui avait été adjugé.

31. Bien que Parcs Canada semble reconnaître que MFL aurait obtenu les primes pour avance si elle s’était fait adjuger le contrat, il soutient que le montant maximum offert était de 20 000 $.

32. Comme l’indiquent clairement les alinéas 1.4.1c), 1.4.2c) et 1.4.3c) de la section 01 29 01 des spécifications, les montants maximums payables pour chacune des trois étapes du contrat étaient de 6 000 $, 6 000 $ et 10 000 $, soit un total de 22 000 $. Le Tribunal est d’avis que, selon les taux de productivité estimatifs de MFL pour le projet15 , celle-ci aurait probablement achevé toutes les étapes des travaux dans le délai exigé pour obtenir le montant maximum de primes si le contrat lui avait été adjugé. Le Tribunal convient donc que MFL aurait reçu 22 000 $ en primes si elle s’était fait adjuger le contrat.

Revenu total

33. En tenant compte des montants susmentionnés, soit une somme forfaitaire de 40 000 $, 877 871 $ pour les travaux faisant l’objet d’une disposition de prix unitaire, 25 218,16 $ pour les travaux divers non visés par le « Tableau des prix unitaires » et 22 000 $ en primes pour avance, le Tribunal conclut que MFL aurait tiré un revenu de 965 089,16 $ si le contrat lui avait été adjugé.

Coûts

34. Le Tribunal doit maintenant estimer le total des coûts que MFL aurait assumés pour toucher le revenu indiqué ci-dessus. Pour ce faire, il examinera les coûts sur lesquels MFL a fondé sa proposition.

35. MFL a joint à son rapport sur la perte de profits une copie d’une feuille de calcul indiquant en détail les coûts prévus du projet, qu’elle a préparée dans le cours normal de ses activités à des fins de réponse à l’invitation16 . Selon MFL, son expérience dans l’exécution de contrats semblables, notamment un contrat conclu en 2008 avec Parcs Canada pour l’enlèvement et l’installation de glissières le long de la promenade des Glaciers dans le parc national Banff (le contrat de 2008), et la stabilité des prix signifiaient qu’elle pouvait prévoir avec un degré élevé de certitude la plupart des coûts.

36. Parcs Canada indique qu’à l’exception des coûts indirects, son calcul des pertes était fondé sur les coûts estimés par MFL dans sa réponse à l’invitation. Cependant, il fait des commentaires sur un certain nombre de différences qu’il a observées entre certains des frais engagés par MFL pour le contrat de 2008 et ses estimations correspondantes pour le contrat en question. Le Tribunal examinera ces questions dans les sections appropriées ci-dessous.

Coûts liés à la somme forfaitaire17

37. MFL soutient que les coûts des travaux de mobilisation et de démobilisation auraient été composés du coût des vols de retour, des sommes versées aux employés pour le temps de déplacement, des salaires, des frais de repas et d’hébergement des chauffeurs apportant le matériel sur le chantier et du coût des permis pour les camions nécessaires pour le transport de l’équipement. Ces coûts, tels que présentés par MFL, auraient totalisé 24 164,68 $.

38. Parcs Canada fait remarquer que les frais de déplacement réels de MFL pour le contrat de 2008 étaient considérablement plus élevés que l’estimation de 10 000 $ de MFL pour le contrat en question. Le Tribunal souligne cependant que MFL estimait que les vols de retour de ses employés coûteraient à eux seuls 10 000 $ et non le total des frais de déplacement. Tous les frais de déplacement associés à la prestation de services de contrôle de la circulation par un tiers étaient inclus dans les calculs des prix unitaires de MFL pour les travaux assujettis à une disposition de prix unitaire. Le Tribunal est donc d’avis que l’estimation des frais de déplacement de MFL est raisonnable et ne nécessite aucun changement.

39. Le Tribunal fait remarquer que même si MFL a mentionné le coût des permis pour les camions dans son rapport sur la perte de profits18 , elle ne l’a pas inclus dans sa feuille de calcul ni dans son calcul de la perte de profits. Bien que MFL ait effectivement acheté les permis pour les camions dès que Parcs Canada l’a informée la première fois qu’elle était le soumissionnaire le moins-disant, le Tribunal est d’avis que ce coût devrait néanmoins être pris en compte dans le calcul de la perte de profits. Dans la décision qu’il a rendue le 23 novembre 2009, le Tribunal refusait de recommander que MFL soit indemnisée pour les dépenses qu’elle avait engagées dès que Parcs Canada l’avait informée qu’elle était le soumissionnaire le moins-disant19 . Le Tribunal soutenait que MFL n’était pas tenue d’engager des dépenses relativement à un contrat qui ne lui avait pas encore été adjugé. Si le coût des permis pour les camions n’était pas inclus dans le calcul de la perte de profits, cela reviendrait, en réalité, à imposer à Parcs Canada une dépense qui, selon le Tribunal, MFL n’était pas tenue d’engager.

40. Le Tribunal conclut donc que MFL aurait assumé des coûts de 24 164,68 $ pour les travaux de mobilisation et de démobilisation liés au projet.

Coûts liés aux travaux assujettis à une disposition de prix unitaire

41. Pour estimer les coûts qu’elle aurait assumés relativement aux travaux assujettis à une disposition de prix unitaire, MFL a d’abord établi les prix unitaires de chacun des quatre groupes d’activités indiqués dans le « Tableau des prix unitaires » en se fondant sur les quantités estimatives associées aux travaux inscrites dans l’invitation. Elle a ensuite multiplié ces prix unitaires par les quantités associées aux travaux réellement effectués aux termes du contrat adjugé.

42. Pour déterminer les prix unitaires, MFL s’est d’abord fondée sur les taux de productivité moyens qu’elle a atteints lors du contrat de 2008 relativement à l’enlèvement et à l’installation de glissières. Sur ce fondement, elle a estimé le nombre de jours dont elle aurait eu besoin pour l’achèvement des travaux du contrat en question. Elle a ensuite utilisé ce nombre de jours pour établir les coûts de la main-d’œuvre, de l’équipement (dépréciation et carburant) et du contrôle de la circulation. Elle s’est servie d’un plus grand nombre de jours pour déterminer les frais de repas et d’hébergement afin de tenir compte du fait qu’elle aurait encore eu à assumer ces frais le dimanche lorsque ses employés n’auraient pas travaillé. Ces frais ont cependant été répartis par la suite sur le nombre estimatif de jours de travail pour obtenir des prix unitaires exacts. En ce qui concerne les coûts des matériaux, MFL a fondé son estimation sur les prix et les devis qu’elle a reçu par le passé. Elle a également tenu compte des frais d’expédition du matériel depuis ses installations au Nouveau-Brunswick jusqu’au chantier en Alberta.

43. Selon MFL, elle a aussi inclus des frais supplémentaires pour les dépenses imprévues. Elle soutient s’être servie d’un taux de productivité raisonnable (ceci ayant eu pour effet d’augmenter le nombre de jours nécessaires à l’achèvement des travaux), d’un taux horaire moyen pondéré pour la main-d’œuvre qui était supérieur aux salaires qu’elle verse en réalité et de coûts matériels majorés et avoir inclus une indemnité journalière supplémentaire pour les repas.

44. Parcs Canada fait remarquer que le coût réel du carburant que MFL a utilisé pour le contrat de 2008 était supérieur à son estimation de 25 000 $ pour le contrat en question, lequel est un projet de plus grande envergure. Bien que le coût du carburant estimé par MFL soit en effet inférieur au coût réel pour le contrat de 2008, de nombreuses raisons pourraient expliquer cette différence, notamment la fluctuation des prix du carburant, le type d’équipement utilisé et la distance à parcourir à partir de l’emplacement des travaux. Le Tribunal ne juge donc pas que l’estimation de 25 000 $ de MFL est déraisonnable dans les circonstances. Parcs Canada fait également remarquer que, bien que le rapport détaillé des coûts de MFL pour le contrat de 2008 montre que des primes ont été versées aux travailleurs, aucune prime de la sorte n’a été ajoutée au coût estimatif de la main-d’œuvre pour le contrat en question. Selon MFL, l’indication de dépenses liées aux primes versées aux travailleurs pour le contrat de 2008 était erronée et ne constituait que des montants payés en raison du report d’une partie du salaire normal de ses travailleurs à la fin du contrat. Le Tribunal juge raisonnable cette explication.

45. Lors de l’examen des estimations de MFL, le Tribunal a constaté qu’une erreur avait été commise relativement aux frais de logement. Bien qu’il soit indiqué dans le rapport sur la perte de profits de MFL que sept chambres auraient été nécessaires par nuit, au coût de 85 $ par chambre par nuit, pendant la durée du projet, les montants qui figurent sur sa feuille de calcul montrent que l’estimation des coûts n’est fondée que sur cinq chambres20 .

46. Par conséquent, après avoir ajusté les frais de logement, recalculé les prix unitaires et multiplié ces derniers par les quantités associées aux travaux réellement effectués aux termes du contrat adjugé pour les numéros 2, 3 et 4 du « Tableau des prix unitaires » et par la quantité estimative des travaux pour le numéro 121 , le Tribunal conclut que MFL aurait engagé des dépenses de -------------- $ relativement aux travaux assujettis à une disposition de prix unitaire.

Coûts liés aux travaux supplémentaires (« coût de revient de base »)

47. Pour estimer les coûts qu’elle aurait assumés par rapport aux travaux supplémentaires non visés par le « Tableau des prix unitaires » et payés relativement au « coût de revient de base », MFL a essentiellement utilisé la même méthode que pour l’estimation des coûts liés aux travaux assujettis à une disposition de prix unitaire.

48. Le Tribunal est d’accord avec cette méthode. Il fait cependant remarquer que MFL a commis des erreurs dans le calcul des frais d’hébergement et de repas. Les montants qui figurent sur sa feuille de calcul montrent que l’estimation des coûts n’est fondée que sur cinq chambres et non sept22 . Ces montants indiquent également seulement neuf indemnités journalières à l’égard de repas plutôt que treize. Le rapport sur la perte de profits de MFL montre clairement que sept chambres par nuit et treize indemnités journalières à l’égard de repas étaient requises23 .

49. Par conséquent, après avoir ajusté les frais de logement et de repas, le Tribunal conclut que MFL aurait assumé des coûts de -------------- $ par rapport aux travaux supplémentaires non visés par le « Tableau des prix unitaires ».

Coût de cautionnement de soumission

50. Dans son rapport sur la perte de profits, MFL soutient avoir obtenu une offre verbale de cautionnement de soumission à un tarif de 5,50 $ par tranche de 1 000 $ de la valeur du contrat24 . Le montant total de sa soumission étant de 836 288 $, MFL estime que le cautionnement de soumission aurait représenté 4 599,58 $.

51. Le Tribunal fait remarquer que, dans sa feuille de calcul, MFL semble avoir utilisé un tarif de cautionnement de 7,50 $ par tranche de 1 000 $ de la valeur du contrat25 . Elle a aussi converti le coût de cautionnement de soumission en un prix unitaire, qu’elle a ensuite multiplié par les travaux effectivement réalisés aux termes du contrat adjugé.

52. Le Tribunal est d’avis que le coût de cautionnement de soumission ne devrait être calculé qu’en se fondant sur le montant total de la soumission et non sur le montant réel de revenus qui auraient été tirés de l’exécution du contrat. Il convient donc que MFL aurait déboursé 4 599,58 $ de cautionnement de soumission, comme l’indique son rapport sur la perte de profits.

Coûts indirects

53. MFL soutient que d’après son revenu brut et ses dépenses d’administration en 2009 (ce qui comprend le revenu qu’elle aurait tiré si le contrat lui avait été adjugé), il convient dans les circonstances d’utiliser un coefficient d’imputation des coûts indirects de --- p. 100 du revenu brut qu’elle aurait tiré. Elle fait remarquer que, bien qu’elle ait enregistré une hausse de revenu en 2009, ses dépenses d’administration ont légèrement diminué en termes absolus et relatifs. Selon MFL, cela s’explique par le fait que les coûts indirects sont des « frais variables par paliers » et que, par conséquent, ils n’augmentent pas de façon directement proportionnelle au revenu, et qu’elle avait réalisé d’importantes économies au cours des dernières années.

54. Parcs Canada soutient que, d’après son analyse des états financiers passés et de ceux de la période de neuf mois terminée le 31 décembre 2009 de MFL, le coefficient d’imputation des coûts indirects qu’applique MFL est sous-évalué. Il fait valoir qu’il est peu probable que la hausse importante du revenu en 2009 n’ait pas occasionné des coûts indirects supplémentaires. Il soutient également que la période utilisée par MFL pour calculer son coefficient d’imputation des coûts indirects exclut les mois d’hiver pendant lesquels des coûts indirects continuent d’être engendrés, mais que le revenu est probablement inférieur. Il prétend donc qu’un coefficient de --- p. 100 serait plus approprié, étant donné que ce coefficient est inférieur à celui de l’exercice complet terminé le 31 mars 2009, mais supérieur à celui de la période de neuf mois terminée le 31 décembre 2009.

55. Sur la foi des renseignements contenus au dossier, il est évident que MFL a enregistré une hausse de revenu considérable en 200926 . Bien que le Tribunal reconnaisse que les coûts indirects sont des « frais variables par paliers » et que, par conséquent, ils n’augmentent pas de façon directement proportionnelle au revenu, et que MFL peut avoir réalisé d’importantes économies au cours des dernières années, il admet également que le coefficient d’imputation des coûts indirects qui, selon MFL, devrait s’appliquer n’a pas été calculé pour une année complète (c.-à-d. que les mois d’hiver sont exclus) et est inférieur aux coefficients des années antérieures. En outre, le Tribunal fait remarquer que le coefficient d’imputation des coûts indirects proposé par Parcs Canada est légèrement inférieur à ceux appliqués par MFL pour les exercices complets terminés les 31 mars 2007, 2008 et 2009. Cependant, le Tribunal indique également que seuls certains types particuliers de dépenses d’administration auraient été directement associés au contrat en question. Comme le Tribunal l’a déjà souligné, « [...] les dépenses fixes ne devraient pas être déduites des revenus aux fins du calcul de la perte de profits »27 . Dans ces circonstances, le Tribunal conclut donc qu’un coefficient d’imputation des coûts indirects de --- p. 100 est approprié. L’application de ce coefficient au revenu total que MFL aurait tiré si le contrat en question lui avait été adjugé (primes pour avance exclues) établit les coûts indirects à -------------- $.

Coût total

56. En tenant compte des coûts indiqués ci-dessus, soit 24 164,68 $ pour les travaux de mobilisation et de démobilisation liés au projet, -------------- $ pour les travaux assujettis à une disposition de prix unitaire, -------------- $ pour les travaux supplémentaires non visés par le « Tableau des prix unitaires », 4 599,58 $ pour un cautionnement de soumission et -------------- $ en coûts indirects, le Tribunal conclut que MFL aurait encouru des dépenses totales de 618 515,54 $ si le contrat lui avait été adjugé.

Calcul de la perte de profits

57. À la lumière des renseignements susmentionnés, le Tribunal estime qu’un montant de 346 573,62 $, soit des recettes de 965 089,16 $ moins des dépenses totales de 618 515,54 $, représente de façon raisonnable les profits que MFL a perdus parce qu’elle ne s’est pas fait adjuger le contrat en question.

Profits tirés de projets locaux

58. Parcs Canada soutient que le calcul de la perte de MFL ne tenait pas compte des profits tirés de projets locaux qu’elle n’aurait pas réalisés si elle s’était fait adjuger le contrat en question. Selon Parcs Canada, MFL l’a informé que les travailleurs qui auraient exécuté le contrat en question étaient affectés à des contrats au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse. Il présume donc que si MFL s’était vue adjuger le contrat en question, elle n’aurait pas été en mesure de réaliser le même nombre de projets locaux.

59. Parcs Canada estime que le revenu touché par MFL relativement à des projets locaux, revenu qu’elle n’aurait pas tiré si le contrat en question lui avait été adjugé, correspond à celui qu’elle aurait réalisé en exécutant le contrat en question. Il applique ensuite le taux de profit que MFL a indiqué dans ses états financiers préparés à l’interne pour la période de neuf mois terminée le 31 décembre 2009 et un coefficient d’imputation des coûts indirects de 15 p. 100 pour en arriver à des profits de 108 830 $, lesquels devraient, à son avis, être déduits des profits que MFL aurait tirés aux termes du contrat en question.

60. MFL soutient que le principe à suivre en l’espèce est que si la partie plaignante aurait pu exécuter le contrat en question en plus de contrats simultanés ou ultérieurs, la valeur des autres contrats ne devrait pas être déduite du montant qui sera accordé. Elle fait valoir que, dans le cas présent, le montant de la perte de profits qu’elle a subie relativement au contrat en question ne devrait pas être réduit, puisqu’elle a conservé une capacité suffisante en termes de travailleurs, d’équipement et de temps pour exécuter le contrat en question en plus d’autres travaux.

61. MFL indique dans son rapport sur la perte de profits que le contrat en question n’aurait nécessité que l’emploi de 9 de ses quelque 65 travailleurs saisonniers et que, comme l’achèvement du projet était prévu en juin et en juillet, mois pendant lesquels sa charge de travail est allégée, le contrat se serait parfaitement intégré dans son calendrier global. Elle soutient que, si le contrat lui avait été adjugé, elle aurait embauché des travailleurs additionnels pour l’exécution des contrats au Nouveau-Brunswick ou en Nouvelle-Écosse. Elle ajoute que ces travailleurs ont plutôt été embauchés en août, moment où la charge de travail s’est alourdie. En ce qui concerne l’équipement, MFL indique que le contrat en question n’aurait nécessité que l’utilisation de 2 de ses 10 camions de forage et que, parce qu’elle n’a pas exécuté le contrat en question, 3 ou 4 de ses camions de forage sont demeurés à l’atelier en juin et en juillet en raison du manque de travail.

62. Comme indiqué ci-dessus, le but de l’exercice d’indemnisation est de tenter de placer la partie plaignante dans la position où cette dernière se serait trouvée, n’eût été l’infraction du gouvernement. Par conséquent, le Tribunal est d’avis que le montant de la perte de profits de MFL ne devrait être réduit que s’il peut être démontré que MFL aurait effectué moins de travaux locaux, n’eût été l’infraction de Parcs Canada.

63. Parcs Canada présume simplement que parce que les travailleurs qui auraient été affectés au contrat en question étaient réaffectés à des contrats au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse, MFL n’aurait pas pu réaliser ces travaux locaux si elle s’était fait adjuger le contrat. Cependant, le Tribunal estime que les renseignements fournis par MFL montrent de façon raisonnable que le nombre de travailleurs à son emploi ne représentait pas un obstacle à la réalisation de travaux supplémentaires. Le nombre de travailleurs qui aurait été nécessaire à l’exécution du contrat en question était relativement petit et, quoi qu’il en soit, MFL aurait pu, comme elle l’affirme, simplement embaucher de nouveaux travailleurs plus tôt, au lieu d’attendre en août. Pour ce qui est de l’équipement nécessaire à l’exécution du contrat en question, MFL a prouvé de façon raisonnable qu’elle avait une capacité plus que suffisante pour réaliser le contrat en question et des travaux locaux supplémentaires. À la lumière de ce qui précède, le Tribunal est d’avis que MFL disposait d’une capacité suffisante en ce qui a trait aux travailleurs, à l’équipement et au temps pour exécuter le contrat et d’autres travaux locaux. Par conséquent, le montant de la perte de profits que MFL a subie en étant privée du contrat en question ne sera pas réduit.

CONCLUSION

64. Le Tribunal recommande, par les présentes, que Parcs Canada indemnise MFL en lui accordant 346 573,62 $ en reconnaissance des profits qu’elle a perdus parce qu’elle a été privée du contrat en question.


1 . L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47 [Loi sur le TCCE].

2 . D.O.R.S./93-602.

3 . Le paragraphe 30.15(2) de la Loi sur le TCCE ne fait que stipuler que le Tribunal peut recommander, lorsqu’il donne gain de cause à un plaignant, que soient prises des mesures correctives, notamment le versement d’une indemnité au plaignant, dont le Tribunal précise le montant.

4 . Dans l’ordonnance qu’il a rendue dans Re plainte déposée par Spacesaver Corporation (27 avril 1999), PR-98-028 (TCCE), le Tribunal indiquait que le fardeau de la preuve incombe à la partie plaignante, « [...] qui doit établir et prouver les profits qu’elle aurait pu réaliser et à l’égard desquels elle réclame dédommagement [...] suivant la prépondérance raisonnable d’éléments de preuve crédibles » [note en bas de page omise].

5 . Voir, par exemple, l’ordonnance du Tribunal dans Re plainte déposée par Douglas Barlett Associates Inc. (7 janvier 2000), PR-98-050 (TCCE).

6 . Pièce B de l’affidavit public de M. McCormack au para. 37.

7 . Ibid., onglet 17.

8 . Voir le paragraphe 42 de l’exposé des motifs du Tribunal.

9 . Voir l’article 1.10.3 de la section 01 11 00 des spécifications.

10 . Pièce B de l’affidavit confidentiel de M. McCormack au para. 31, onglet 18.

11 . Voir l’article 1.3 de la section 01 21 00 des spécifications.

12 . Pièce B de l’affidavit public de M. McCormack, onglet 17.

13 . Pièce B de l’affidavit confidentiel de M. McCormack, onglet 18.

14 . Voir l’article 1.4 de la section 01 29 01 des spécifications.

15 . Pièce B de l’affidavit confidentiel de M. McCormack au para. 31, onglet 18.

16 . Ibid., onglet 6.

17 . Le Tribunal fait remarquer que les frais associés aux coûts indirects et à l’obtention d’un cautionnement de soumission sont traités séparément et ne font donc pas partie des coûts liés à la somme forfaitaire, aux travaux assujettis à une disposition de prix unitaire ou aux travaux supplémentaires payés par rapport au coût de revient de base.

18 . Pièce B de l’affidavit public de M. McCormack au para. 42.

19 . Voir le paragraphe 43 de l’exposé des motifs du Tribunal.

20 . Pièce B de l’affidavit public de M. McCormack au para. 49; pièce B de l’affidavit confidentiel de M. McCormack, onglet 6.

21 . Le Tribunal fait remarquer que, dans sa feuille de calcul, MFL a calculé un prix unitaire pour l’activité numéro 1, mais n’a pas tenu compte de ce chiffre pour en arriver à un montant de profits. Le Tribunal se fonde sur le prix unitaire (ajusté pour les frais de logement, comme mentionné ci-dessus) pour déterminer le total des coûts liés aux travaux assujettis à une disposition de prix unitaire.

22 . Pièce B de l’affidavit confidentiel de M. McCormack, onglet 18.

23 . Pièce B de l’affidavit public de M. McCormack aux paras. 49-50.

24 . Ibid. au para. 55.

25 . Pièce B de l’affidavit confidentiel de M. McCormack, onglet 18.

26 . Ibid., onglets 1-3, 19.

27 . Re plainte déposée par Immeubles Yvan Dumais Inc. (7 juin 2010), PR-2007-079 (TCCE) au para. 72.