BLUEDROP PERFORMANCE LEARNING INC.


BLUEDROP PERFORMANCE LEARNING INC.
c.
MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX
Dossier no PR-2008-017

Ordonnance et motifs rendus
le jeudi 19 février 2009


TABLE DES MATIÈRES

EU ÉGARD À une plainte déposée par Bluedrop Performance Learning Inc. aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47;

ET À LA SUITE D’une décision du Tribunal canadien du commerce extérieur, rendue aux termes des paragraphes 30.15(2) et 30.15(3) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, dans laquelle il recommandait que Bluedrop Performance Learning Inc. soit indemnisée en reconnaissance des profits qu’elle aurait pu tirer du contrat à partir de la date de l’adjudication du contrat à 2054629 Ontario Inc. s/n Acron Capability Engineering Inc. jusqu’à la date de l’adjudication ultérieure à Bluedrop Performance Learning Inc.

ENTRE

 

BLUEDROP PERFORMANCE LEARNING INC.

Partie plaignante

ET

 

LE MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

Institution fédérale

ORDONNANCE

Le Tribunal canadien du commerce extérieur recommande, par la présente, que le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux indemnise Bluedrop Performance Learning Inc. en lui accordant 130 324,69 $ en reconnaissance des profits qu’elle aurait pu tirer du contrat à partir de la date de l’adjudication du contrat à 2054629 Ontario Inc. s/n Acron Capability Engineering Inc. jusqu’à la date de l’adjudication ultérieure à Bluedrop Performance Learning Inc.

Pasquale Michaele Saroli
Pasquale Michaele Saroli
Membre présidant

Hélène Nadeau
Hélène Nadeau
Secrétaire

EXPOSÉ DES MOTIFS

1. Dans la décision qu’il a rendue le 25 septembre 2008, le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal), aux termes des paragraphes 30.15(2) et 30.15(3) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur 1 , a recommandé que le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (TPSGC) indemnise Bluedrop Performance Learning Inc. (Bluedrop) en reconnaissance des profits qu’elle aurait pu tirer du contrat à partir de la date de l’adjudication du contrat à 2054629 Ontario Inc. s/n Acron Capability Engineering Inc. (Acron) jusqu’à la date de l’adjudication ultérieure à Bluedrop. Dans cette décision, le Tribunal a ordonné aux parties d’élaborer une proposition conjointe d’indemnisation. Étant donné que les parties n’ont pas pu s’entendre sur le montant de l’indemnisation, Bluedrop a déposé auprès du Tribunal, le 27 novembre 2008, un exposé sur la question de l’indemnisation. Le 8 décembre 2008, TPSGC a déposé un exposé en réponse et, le 15 décembre 2008, Bluedrop a déposé ses observations en réponse à l’exposé de TPSGC. Le 19 décembre 2008, TPSGC a déposé des observations additionnelles en réponse aux observations en réponse de Bluedrop du 15 décembre 2008. Le 23 décembre 2008, Bluedrop a déposé ses observations finales.

INDEMNISATION

2. Pour déterminer le montant des profits perdus, le Tribunal a tenu compte des Lignes directrices sur les indemnités dans une procédure portant sur un marché public (les Lignes directrices), qui prévoient ce qui suit :

[...]

2.2 L’indemnité accordée ne se fonde pas sur des hypothèses ou des conjectures. Le Tribunal reconnaît que, pour préciser le montant de certaines indemnités, il lui sera nécessaire de faire des projections. Cependant, dans tous les cas, les demandes d’indemnité doivent être accompagnées de données économiques, financières ou autres éléments probants fiables.

[...]

3.1.2 Pour déterminer le montant de l’indemnité à recommander, le Tribunal tentera, dans la mesure qu’il estime indiquée dans les circonstances et compte tenu de toute autre mesure corrective qu’il a recommandée, de placer la partie plaignante dans la position où cette dernière se serait trouvée, n’eut été l’infraction du gouvernement.

[...]

4.1 Le fardeau de la preuve du bien-fondé d’une demande d’indemnité incombe à la partie plaignante2 .

[...]

Bluedrop

3. Dans son exposé du 27 novembre 2008, Bluedrop, pour l’essentiel, a affirmé que l’indemnisation devait refléter trois éléments distincts : 1) les profits que Bluedrop a perdus pendant qu’Acron exécutait le travail; 2) les coûts supplémentaires que Bluedrop a dû assumer parce qu’il lui a fallu embaucher une deuxième équipe d’employés lorsque le contrat lui a été adjugé; 3) les profits que Bluedrop perd et continuera de perdre durant la période où elle exécute le travail. Dans ses observations en réponse du 15 décembre 2008, et après avoir examiné l’exposé en réponse de TPSGC du 8 décembre 2008, Bluedrop a modifié les montants indiqués dans sa demande d’indemnisation en modifiant ses calculs du profit perdu relativement à la durée du contrat exécuté par Acron et en retirant sa demande concernant le profit perdu pendant la durée du contrat exécuté par Acron.

4. En ce qui a trait aux profits perdus pendant la durée du contrat exécuté par Acron, Bluedrop a demandé un montant de 234 225,96 $. Pour arriver à ce montant, Bluedrop a tenu compte de divers facteurs, également appliqués par TPSGC, que le Tribunal estime pertinents aux fins de la détermination de l’indemnisation en l’espèce. Ces facteurs sont les suivants :

a) la durée de la période visée par l’indemnisation;

b) le bon taux quotidien (devant servir au calcul du revenu brut);

c) le coût de la rémunération et des avantages sociaux connexes des employés;

d) les frais généraux;

e) les frais de réinstallation;

f) les frais d’acquisition d’équipement.

Durée de la période visée par l’indemnisation

5. En ce qui a trait à la durée de la période visée par l’indemnisation, Bluedrop a soutenu que le montant de l’indemnité devrait être fondé sur le nombre de jours-personnes durant ce qui aurait été la période d’application du contrat si ce dernier avait été correctement adjugé à Bluedrop. À cet égard, Bluedrop a soutenu qu’une des conséquences accessoires des actions hautement irrégulières de TPSGC et d’Acron a été de retarder l’adjudication du contrat, de sorte qu’il a été adjugé le 16 mai 2008, plutôt qu’à la date prévue du 1er avril 2008. La demande de propositions (DP) en cause comprenait une disposition qui garantissait 1 320 jours-personnes à la société adjudicataire pendant la première année du contrat. Ce nombre était cependant fondé sur l’adjudication du contrat le 1er avril 2008, et sa fin le 31 mars 2009. Bluedrop a fait valoir que le contrat n’a pas été adjugé avant le 16 mai 2008, car Acron n’avait pas été capable d’obtenir le personnel nécessaire et, de ce fait, n’était pas, pour l’essentiel, prête à assumer les fonctions prévues au contrat après l’avoir remporté de manière irrégulière. Bluedrop a soutenu qu’elle ne doit pas être pénalisée à cause de l’incapacité d’Acron d’obtenir son personnel à temps pour commencer le contrat à la date prévue. Bluedrop a soutenu qu’une des prémisses du calcul des profits perdus doit donc être qu’un contrat garantissant 1 320 jours-personnes lui aurait été adjugé. Bluedrop a souligné que, puisque son propre contrat, adjugé en application de la décision du Tribunal, garantit 522 jours-personnes, le nombre « perdu » de jours-personnes qui devrait fonder le montant de sa perte de profits est de 798 jours-personnes (1 320 moins 522).

6. Bluedrop a reconnu qu’une modification avait été apportée pour réduire le nombre de jours-personnes à 1 000, mais elle a ajouté que cette diminution avait découlé des défaillances d’Acron relativement à sa capacité de commencer l’exécution du contrat, que la modification avait été diffusée à peine quelques semaines avant que le Tribunal ne rende sa décision dans l’affaire et, donc, après que TPSGC ait admis les allégations principales contenues dans la plainte de Bluedrop, que l’ampleur des travaux, compte tenu à la fois de la partie exécutée par Acron et de la partie exécutée par Bluedrop, dépasserait 1 000 jours-personnes, ce qui indique que le ministère de la Défense nationale (MDN) avait besoin de plus que les 1 000 jours-personnes indiqués dans la modification.

7. Bluedrop a soutenu que, comme il l’a souligné dans l’ordonnance qu’il a rendue dans Re plainte déposée par Averna Technologies Inc. 3 , le Tribunal, notamment, en conformité avec les Lignes directrices, « tentera [...] de placer la partie plaignante dans la position où cette dernière se serait trouvée, [n’eût] été l’infraction du gouvernement ». Elle a donc soutenu que le total de 798 jours-personnes « perdus » représente plus fidèlement le travail qu’elle aurait exécuté et les profits qu’elle aurait tirés que ne le fait l’argument de TPSGC selon lequel le montant de l’indemnisation devrait se limiter au nombre réel de jours-personnes travaillé par Acron.

Bon taux quotidien

8. D’après Bluedrop, TPSGC, dans son exposé du 8 décembre 2008, a appliqué le taux quotidien de -------- $ dans tous ses calculs. Bluedrop a soutenu que ce taux quotidien était simplement le taux négocié avec Bluedrop pour le contrat en vigueur et ne correspondait pas au prix de sa soumission initiale, dans laquelle elle avait soumis un taux quotidien moyen de --------- $, un montant qui tient compte d’un certain nombre de jours d’évaluation non garantis. Bluedrop a soutenu que tout calcul du profit perdu relativement à la durée du contrat exécuté par Acron devrait donc s’appuyer sur ce dernier taux quotidien et non sur le premier, qui a été négocié après le fait.

Coût de la rémunération et des avantages sociaux connexes des employés

9. Dans son deuxième exposé, Bluedrop a admis que son exposé initial concernant ses profits perdus n’incluait pas une ventilation détaillée des paiements qu’elle aurait versés à chaque employé. Elle a donc déposé le tableau ci-après qui indique les salaires et les dépenses pour chaque période de paye concernant les employés qui auraient travaillé dans le cadre du contrat. Elle a soutenu que ses employés sont payés deux fois par mois et auraient reçu 12 chèques de paye pendant la durée du contrat exécuté par Acron , c.-à-d. du 16 mai au 14 novembre 2008 inclusivement. Bluedrop a déclaré que le coût total des salaires et des avantages sociaux aurait été de -------------- $ (------------ $ fois 12 chèques de paye).

Nom de l’employé

Salaire de base par période de paye

AE

Ass.

RPC

IAT

Maladie

REER

Total du coût des salaires et des avantages sociaux qui auraient été engagés par période de paye

---------
---------

------------

--------

--------

----------

-------

--

--

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------
-----------

------------

--------

--------

--------

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--

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--------

--------

-------

--

--

------------

Total

-

-

-

-

-

-

-

--------------

[Traduction]

Frais généraux

10. Bluedrop a soutenu que, pour ce qui concerne ses frais indirects pour l’ensemble de son entreprise, les frais généraux incluent normalement les frais de bureau, le loyer, les frais de réparation et d’entretien, la rémunération des cadres, les taxes municipales, les frais de déplacement, de représentation et de commercialisation et le coût des services publics. Bluedrop a ajouté que, puisque le contrat devait être exécuté à l’extérieur de ses locaux, à la Base des Forces canadiennes Gagetown, ces frais indirects n’auraient pas augmenté par suite de l’exécution du contrat. De plus, Bluedrop a déclaré qu’il n’y aurait pas eu d’autres coûts directs, si ce n’est les salaires et avantages sociaux susmentionnés et les frais de l’équipement informatique énoncés ci-après. Bluedrop a soutenu que ces frais ont été pris en compte lorsqu’elle a formulé et présenté sa soumission, de sorte que con coût proposé était de -------- $ à -------- $ par jour inférieur à ce qu’il aurait été pour une soumission semblable où le travail aurait été effectué dans ses propres locaux.

Frais de réinstallation

11. Dans son deuxième exposé, Bluedrop a également admis que ses premiers calculs des profits ne prenait pas en compte les frais de réinstallation, mais a qualifié de grandement exagérés les résultats formulés par TPSGC. Bluedrop a soutenu que la pratique normale de son entreprise concernant les frais de réinstallation des employés consistait à rembourser ces frais jusqu’à concurrence de ---------- $ par employé et que cinq des six personnes proposées dans sa soumission auraient déménagé au Nouveau-Brunswick. D’après Bluedrop, le montant total des frais de réinstallation n’aurait été que de ---------- $, soit ------------ $ de moins que le montant estimatif indiqué par TPSGC.

Frais d’acquisition d’équipement

12. Bluedrop a soutenu que le coût de son équipement informatique et des logiciels s’élevait à ------------ $, et qu’elle entendait l’amortir sur une période de 36 mois, à -------- $ par mois.

Calcul résultant

13. Bluedrop a soutenu que, sur la foi des chiffres susmentionnés, sa demande d’indemnisation en reconnaissance des profits perdus est la suivante :

Revenu brut (taux quotidien de ------- $ x 798 jours-personnes perdus)

 

------------- $

Moins :

   

Salaires/avantages sociaux (----------- $ x 12 chèques de paye)

------------- $

 

Réinstallation

----------- $

 

Équipement (--------- $ x 6 mois)

----------- $

 

Total des dépenses

 

------------------

Profits perdus

 

234 225,96 $

14. Au sujet de l’affirmation de TPSGC selon laquelle Bluedrop n’avait pas produit d’éléments de preuve suffisants pour étayer sa demande d’indemnité, Bluedrop a soutenu que des documents, comme les états financiers, ne sont requis que s’ils sont nécessaires pour justifier une demande ou pour aider le Tribunal à arriver à une conclusion juste. Bluedrop a fait valoir que, puisque les travailleurs étaient logés dans les locaux du client et qu’ils n’avaient pratiquement aucun besoin soutenu d’ordre administratif, les états financiers ne seraient pas utiles pour le Tribunal. Bluedrop a aussi fait savoir qu’elle était disposée à divulguer ses plus récents états financiers si le Tribunal était d’avis que l’étude de ces états serait essentielle à son examen de l’affaire. Au sujet de l’affirmation connexe de TPSGC selon laquelle la preuve documentaire était insuffisante pour étayer l’exposé de Bluedrop concernant sa perte de profits, Bluedrop a dit avoir déposé des documents fiables à l’appui de sa demande. Par exemple, les frais de rémunération prévus ont été fournis par le directeur des Opérations et des Ressources humaines de Bluedrop. D’après Bluedrop, ces frais sont des données fiables qui appuient les déclarations avancées dans ses exposés.

15. De plus, Bluedrop a produit une déclaration sous serment de son président à l’appui de ses déclarations financières parce que, selon elle, une partie des calculs des frais ne pouvait être étayée par des documents, ces frais n’ayant pas été engagés puisque le contrat n’avait pas été adjugé à Bluedrop en premier lieu comme il aurait dû l’être. En réponse à l’affirmation de TPSGC selon laquelle le Tribunal ne doit accorder aucun poids aux affirmations énoncées dans l’affidavit parce que le président n’a pas été contre-interrogé, Bluedrop a soutenu que la proposition de TPSGC était contraire au principe de droit largement reconnu selon lequel une déclaration sous serment qui n’a pas été réfutée dans le cadre d’un contre-interrogatoire ou par des éléments de preuve probants contradictoires doit être acceptée comme vraie.

Frais supplémentaires

16. Bluedrop a aussi affirmé avoir droit à l’indemnisation des frais qu’elle a engagés pour embaucher sa deuxième équipe de ressources humaines, après que le contrat lui ait été adjugé. Elle a affirmé que ces frais n’auraient pas été engagés si ledit contrat lui avait été adjugé en premier lieu. Les frais supplémentaires énumérés sont les suivants : ----------- $ pour des services de consultation en ressources humaines; ----------- $ pour les déplacements aux fins d’entrevues; ----------- $ pour des honoraires de gestion connexes à la négociation du contrat et à l’embauche de nouveaux employés. Compte tenu des frais susmentionnés, sa demande totale se chiffre à ------------- $.

TPSGC

17. TPSGC a soutenu que le montant de l’indemnité doit être évalué sur la foi d’éléments de preuve probants fiables et que le fardeau de la preuve incombe à Bluedrop, qui doit établir et prouver les profits qu’elle a perdus, et non pas à TPSGC dans la réfutation d’allégations non étayées par des pièces justificatives. Il a soutenu que Bluedrop, contrairement à la recommandation du Tribunal, a demandé l’indemnisation pour les profits perdus pendant qu’elle serait le fournisseur de services et pendant la durée du contrat exécuté par Acron. TPSGC a soutenu que le Tribunal devrait ne pas tenir compte de toutes les demandes se rapportant à la période durant laquelle Acron n’était pas le fournisseur de services4 .

18. TPSGC a soutenu que le « profit net » doit être interprété comme le revenu net moins les coûts pertinents, ce qui est le calcul indiqué pour déterminer les profits perdus en l’espèce. Il a souligné que le Tribunal, dans des ordonnances antérieures, a reconnu l’applicabilité à la fois des frais directs et des frais indirects5 . Il a déclaré que, compte tenu de la taille du contrat, les frais indirects, comme les coûts indirects de main-d’œuvre et les frais généraux et administratifs, sont des éléments pertinents et importants du calcul des profits perdus.

Revenu brut

19. TPSGC a fait valoir qu’Acron a exécuté le travail du 16 mai au 14 novembre 2008, et a fourni -------- jours-personnes de travail. Il a soutenu que, peu importe quel fournisseur a été choisi, ce niveau d’effort est celui qu’il convient de prendre en compte aux fins de l’indemnisation.

20. TPSGC a ajouté que si le contrat avait été adjugé à Bluedrop, son revenu brut pour la partie du contrat que Bluedrop n’a en fait pas exécutée aurait été le suivant :

Jours-personnes travaillés

x

Taux quotidien 6

=

Revenu brut

---------

x

------- $

=

------------ $

Frais applicables

21. TPSGC a soutenu que les frais pertinents peuvent se subdiviser en cinq catégories : les salaires, les avantages sociaux, les frais généraux, l’équipement et la réinstallation.

– Salaires

22. TPSGC a souligné que Bluedrop a, dans son exposé du 27 novembre 2008, évalué ses salaires prévus pour l’année complète de contrat à un montant de --------------- $. TPSGC a donc plaidé que, Acron ayant été l’adjudicataire du contrat pendant six mois, les coûts de main-d’œuvre de Bluedrop aux fins de l’indemnisation devaient être évalués à un montant égal à la moitié du montant susmentionné pour les salaires prévus. TPSGC a donc soutenu que les coûts de main-d’œuvre de Bluedrop auraient été de -------------- $.

– Avantages sociaux

23. TPSGC a soutenu que Bluedrop, à titre d’employeur, serait tenu de payer des avantages sociaux, y compris les cotisations pour le RPC, pour l’AE, pour l’indemnisation des accidentés du travail et pour l’assurance collective. Il a estimé à 12,68 p. 100 des coûts de main-d’œuvre de Bluedrop, soit ------------- $, le pourcentage agrégé raisonnable qui devrait s’appliquer à cette catégorie.

– Frais généraux

24. TPSGC a soutenu que Bluedrop, dans une tentative de gonfler ses profits perdus, n’a pas correctement réclamé ses montants de frais généraux. Pour l’essentiel, TPSGC a soutenu que, dans ses calculs initiaux, Bluedrop avait délibérément sous-estimé sa prévision de frais pour l’année complète de contrat en excluant les frais généraux de cette prévision, tout en surestimant ses frais déclarés pour la partie de l’année du contrat pendant laquelle elle exécutera le travail, et ce, en incluant les frais généraux dans cette partie, ce qui a donné lieu à un montant calculé trop élevé de profits perdus. TPSGC a fait valoir que, dans l’ordonnance qu’il a rendue dans Re plainte déposée par Douglas Barlett Associates Inc. 7 , le Tribunal a déterminé qu’un taux de 10 p. 100 des ventes représentait une mesure raisonnable du montant global des frais généraux. TPSGC a soutenu que le Tribunal devrait retenir le même pourcentage du montant de revenu brut de ------------- $, soit un montant de ------------- $ pour les frais généraux.

– Équipement

25. TPSGC a soutenu que, puisque le soumissionnaire gagnant était tenu de fournir son propre équipement de technologie de l’information (TI) et compte tenu de la nature des services exécutés, il n’est pas déraisonnable d’estimer que Bluedrop aurait engagé des frais d’équipement de TI de 3 500,00 $ par employé, soit 21 000,00 $.

– Réinstallation

26. TPSGC a soutenu que Bluedrop a omis de tenir compte des frais de réinstallation liés à ses ressources initialement proposées qui auraient dû déménager à Oromocto (Nouveau-Brunswick). TPSGC a estimé ces frais de réinstallation à 69 795,00 $, ce montant, selon TPSGC, tenant compte du coût de l’hébergement à l’hôtel et des repas pour chaque ressource durant 30 jours, ainsi que des frais de déménagement d’articles ménagers à Oromocto.

27. TPSGC a souligné que le taux quotidien de Bluedrop était plus élevé pour la première année du contrat, ce qui, selon TPSGC, résultait de la prévision faite par Bluedrop relativement à ses frais d’équipement de TI et de réinstallation.

28. Le total final des profits perdus indiqué par TPSGC se chiffrait à un montant de 13 366,93 $, réparti comme suit :

Revenu brut

 

-------------- $

Moins :

   

Salaires

-------------- $

 

Avantages sociaux

------------- $

 

Frais généraux

------------- $

 

Frais d’équipement

21 000,00 $8

 

Frais de réinstallation

69 795,00 $

 

Total des frais

 

-------------- $

Profits perdus

 

13 366,93 $

ANALYSE DU TRIBUNAL

Formule de détermination du profit

29. Les deux parties ont présenté des exposés sur lesquels le Tribunal est d’accord, c’est-à-dire que la formule pertinente pour le calcul des profits perdus est la soustraction du « total des frais » du « revenu brut ». La question dont le Tribunal est saisi est donc celle de la détermination correcte des frais, demandes et prévisions qu’il est indiqué d’inclure dans l’une ou l’autre des catégories de frais ou de revenu.

Durée de la période visée par l’indemnisation

30. TPSGC a soutenu que la seule durée qui puisse correctement être prise en compte est celle liée aux -------- jours-personnes qu’Acron a effectués à partir de la date à laquelle le contrat lui a initialement été adjugé (le 16 mai 2008) jusqu’à la date à laquelle le contrat a été adjugé à Bluedrop (le 17 novembre 2008).

31. Bluedrop, d’autre part, a soutenu que la date prévue de l’adjudication du contrat du 1er avril 2008 devait servir comme point de départ dans la détermination de la quantité de travail qu’elle n’a pas été en mesure d’exécuter. Elle a soutenu que la garantie de 1 320 jours-personnes constitue la base de référence de laquelle les 522 jours-personnes garantis à Bluedrop doivent être déduits. Par conséquent, selon Bluedrop, elle devrait recevoir une indemnisation en reconnaissance des 798 jours-personnes garantis qu’elle aurait travaillés pendant la durée du contrat exécuté par Acron. Bluedrop a soutenu qu’elle ne devait pas être punie pour des circonstances propres à Acron.

32. Le Tribunal fait observer que l’annexe « B » de la DP contenait ce qui suit au sujet du nombre de « jours garantis » à la première année du contrat :

[...]

Pour la période initiale à partir du 1er avril 2008 ou de la date de l’adjudication du contrat jusqu’au 31 mars 2009;

1) Main-d’œuvre aux taux fixes, tout compris, suivants :

a) _______ $ par jour pour un nombre garanti de 1 320 jours* __________ $

b) ______ $ par jour (du lundi au vendredi) pour un nombre __________ $

estimatif de 10 jours à fournir seulement sur demande

c) _______ $ par jour (samedi et dimanche) pour un nombre __________ $

estimatif de 10 jours à fournir seulement sur demande

COÛT ESTIMATIF TOTAL 08/09 (a+b+c)** __________ $

[...]

** Le nombre de jours garantis est fondé sur la date d’adjudication estimative du 1er avril 2008. Le nombre de jours garantis proposé sera rajusté en conséquence si la date d’adjudication du contrat est ultérieure au 1er avril 2008.

[...]

[Nos caractères gras, traduction]

33. Le Tribunal n’est pas d’accord sur l’observation de TPSGC selon laquelle le nombre indiqué de jours-personnes à prendre en compte est le nombre réel de jours-personnes durant lesquels Acron a exécuté le contrat, à savoir -------- jours-personnes. Le Tribunal conclut que l’annexe « B » de la DP prévoyait une charge de travail mensuelle de 110 jours-personnes garantis (c.-à-d. 1 320 jours-personnes divisé par 12 mois). Bien que demeurant sujette à son abandon négocié par un soumissionnaire gagnant ou à une réduction par tout autre moyen disponible aux parties dans le cadre du contrat, cette garantie devrait être le point de départ de toute étude de la durée du travail sur laquelle le soumissionnaire gagnant aurait pu compter. Par conséquent, le nombre réel de jours-personnes durant lesquels Acron a exécuté le contrat est un chiffre hautement spécifique aux caractéristiques du contrat qui, à ce moment-là, existait entre Acron et TPSGC.

34. En outre, même si, en l’espèce, la garantie de 1 320 jours-personnes constitue la position de départ dans l’étude de la durée du travail sur laquelle Bluedrop a droit de s’appuyer, le Tribunal fait observer que des éléments de preuve indiquent que TPSGC a révisé à la baisse le nombre de jours-personnes requis, en l’abaissant à 1 000 jours-personnes, relativement à l’exécution de son contrat par Acron. Malgré cette révision, le Tribunal fait en outre observer que le nombre réel de jours-personnes pendant lesquels Acron a exécuté le contrat, s’il est ajouté au nombre de jours-personnes pendant lesquels Bluedrop exécutera le contrat, donne un chiffre supérieur au chiffre révisé, mais inférieur au nombre initialement garanti à l’annexe « B » de la DP. Par conséquent, au lieu de s’interroger sur les motifs de cet état des choses, le Tribunal estime que ce qui précède suffit pour conclure que TPSGC avait besoin d’au moins 1 000 jours-personnes et d’au plus 1 320 jours-personnes pendant l’année du contrat. La durée réelle du travail depuis le début du contrat d’Acron jusqu’à la fin du contrat de Bluedrop, c.-à-d. du 16 mai 2008 au 31 mars 2009, qui s’étend sur 10 1/2 mois, ou un nombre prévu de 1 155 jours-personnes (c.-à-d. 110 jours-personnes par mois multipliés par 10 1/2 mois) constitue un indicateur convenable à l’appui de la conclusion susmentionnée. Par conséquent, le Tribunal conclut que le montant des profits perdus auquel Bluedrop a droit devrait être calculé en se fondant sur les jours-personnes garantis prévus pour la seule période complète d’application du contrat disponible, ou 1 155 jours-personnes. Étant donné que Bluedrop prévoit travailler 522 jours-personnes durant son contrat (du 17 novembre 2008 au 31 mars 2009), le Tribunal est d’avis que Bluedrop devrait être indemnisée en reconnaissance des profits qu’elle a perdus relativement aux 633 jours-personnes garantis dont elle a été privée pendant l’adjudication irrégulière du contrat à Acron (du 16 mai au 17 novembre 2008).

35. Conformément à sa décision, le Tribunal ne prendra pas en compte la demande de coûts ou de frais associée au travail qui n’aurait pas été directement lié à l’exécution du contrat depuis la date de son adjudication à Acron jusqu’à la date de son adjudication à Bluedrop. Le Tribunal ne prendra donc pas en considération le montant de ----------- $ demandé par Bluedrop relativement à l’embauche des nouveaux employés.

Revenu brut

36. Comme dans le cas de la décision susmentionnée sur la durée qu’il convient de prendre en compte, le Tribunal multipliera 633 jours-personnes par un taux quotidien afin d’établir le revenu brut que Bluedrop aurait touché si le contrat lui avait été adjugé le 16 mai 2008.

37. Après avoir examiné les exposés des deux parties, le Tribunal conclut que le taux quotidien indiqué est le taux dont Bluedrop s’est servi pour fonder sa soumission relativement aux jours-personnes garantis, c.-à-d. -------- $. Le Tribunal décide donc que le revenu brut, aux fins de la détermination des profits perdus par Bluedrop, est de -------------- $ (-------- $ multipliés par 633 jours-personnes).

Total des frais

38. Le Tribunal est d’avis que les quatre éléments suivants doivent être pris en compte dans la détermination du total des frais à déduire du revenu brut susmentionné : 1) salaires et avantages sociaux; 2) frais généraux; 3) frais d’équipement; 4) frais de réinstallation :

1) Salaires et avantages sociaux — Le Tribunal acceptera l’exposé de Bluedrop concernant les salaires et avantages sociaux qu’elle aurait versés si le contrat lui avait été adjugé, c.-à-d. -------------- $.

2) Frais généraux — Le Tribunal est d’accord sur la position de Bluedrop selon laquelle, étant donné la nature du contrat en question (des services entièrement exécutés à l’extérieur de ses locaux), elle n’aurait pas dû assumer des frais généraux à la hauteur des frais généraux constatés dans certaines des décisions antérieures du Tribunal. Toutefois, le Tribunal peut difficilement comprendre comment Bluedrop aurait pu éviter tous les frais généraux seulement en raison de l’exécution du travail à la BFC Gagetown. De l’avis du Tribunal, puisque les employés de Bluedrop ne sont pas des fonctionnaires, une supervision aurait été exercée par des personnes autres que le personnel du MDN, c.-à-d. Bluedrop aurait exercé une certaine mesure de contrôle de gestion sur ses employés. De plus, à tout le moins, Bluedrop aurait engagé certaines dépenses pour assurer le suivi du nombre de jours-personnes travaillés par ses employés, pour envoyer les factures à TPSGC en vue de leur paiement, et ainsi de suite. De telles dépenses auraient été engagées durant toute la durée du contrat exécuté par Acron. Le Tribunal, compte tenu des circonstances de ce contrat particulier, considérera qu’un taux de 5 p. 100 du revenu brut, soit un montant de ------------- $, donne le montant pertinent des frais généraux.

3) Frais d’équipement — Le Tribunal est d’accord sur l’affirmation contenue dans les observations finales de TPSGC, datées du 19 décembre 2008, et plus précisément que ces frais devraient être amortis durant la première année du contrat seulement, puisque c’est là la seule période sur laquelle un adjudicataire peut compter lorsqu’il prend ses décisions d’acquisition d’équipement. Cependant, en conformité avec l’unité de base sur lesquelles les parties se sont fondées pour la détermination de la durée du contrat, c.-à-d. des jours-personnes garantis, le Tribunal est d’avis que les frais doivent être amortis sur 1 155 jours-personnes. Bluedrop a déposé des éléments de preuve qui établissent qu’elle a dépensé ------------ $ pour l’équipement de TI de ses ressources. Par conséquent, le Tribunal divisera ce montant par 1 155 jours-personnes, ce qui donne un montant quotidien de ------- $. Le Tribunal multipliera ce montant quotidien par les 633 jours-personnes durant lesquels Bluedrop aurait dû exécuter le travail, ce qui donnera des frais d’équipement d’un montant de ------------ $.

4) Frais de réinstallation — Le Tribunal fait observer que Bluedrop a inclus des éléments de preuve selon lesquels elle ne paie que jusqu’à concurrence de ----------- $ par ressource pour les dépenses de déménagement. Le Tribunal est donc d’avis que cinq des ressources auraient engagé de telles dépenses et que, comme dans le cas du calcul des frais d’équipement, ces frais doivent être répartis au prorata pour ne tenir compte que de la partie des frais qui correspond à la période durant laquelle Bluedrop aurait dû exécuter le travail (c.-à-d. 633 jours-personnes sur 1 155 jours-personnes). Par conséquent, le Tribunal est d’avis qu’un montant de ----------- $ constitue la partie indiquée des frais de réinstallation qu’aurait engagés Bluedrop.

Le total des frais susmentionnés se chiffre à ------------- $.

Calcul des profits perdus

39. À la lumière de ce qui précède, le Tribunal est d’avis que le montant de ------------- $ moins -------------- $, soit 130 324,69 $, représente d’une façon raisonnable le montant des profits que Bluedrop aurait pu tirer du contrat si ce dernier lui avait été adjugé le 16 mai 2008.

CONCLUSION

40. Le Tribunal recommande par la présente que TPSGC verse à Bluedrop une indemnité de 130 324,69 $ en reconnaissance des profits qu’elle aurait pu tirer du contrat à partir de la date d’adjudication du contrat à Acron jusqu’à la date de l’adjudication ultérieure à Bluedrop.


1 . L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47.

2 . Dans l’ordonnance qu’il a rendue dans Re plainte déposée par Spacesaver Corporation (27 avril 1999), PR-98-028 (TCCE), le Tribunal a déclaré que le fardeau de la preuve incombe à la partie plaignante, qui doit prouver les profits qu’elle aurait pu réaliser et à l’égard desquels elle réclame un dédommagement « suivant la prépondérance raisonnable d’éléments de preuve crédibles ».

3 . (10 octobre 2006), PR-2005-035 (TCCE).

4 . Les observations de TPSGC ne reflètent pas les montants et les arguments compris dans l’exposé du 15 décembre 2008 de Bluedrop, dans lequel elle avait apporté certaines modifications aux montants qu’elle avait initialement demandés, y compris tous les profits se rapportant à la durée du contrat exécuté par Bluedrop.

5 . Re plainte déposée par CSI Consulting Inc. (22 mars 2006), PR-2003-070 (TCCE).

6 . TPSGC a utilisé le montant concernant l’indemnisation compris dans l’exposé initial de Bluedrop du 27 novembre 2008.

7 . (7 janvier 2000), PR-98-050 (TCCE).

8 . Dans son exposé du 19 décembre 2008, TPSGC a soutenu que, si le Tribunal estime indiqué d’amortir le coût de l’équipement de TI, cet amortissement devrait s’opérer sur un an, puisque Bluedrop a soumissionné pour un contrat d’un an. Pour l’essentiel, cet argument réduirait le montant que TPSGC a initialement indiqué comme devant être appliqué au contrat de six mois d’Acron (c.-à-d. 10 500,00 $ par rapport à 21 000,00 $) et augmenterait le montant des profits perdus calculé par TPSGC, ce montant passant à 23 866,93 $ (13 366,93 $ + 10 500,00 $).