SPACESAVER CORPORATION

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SPACESAVER CORPORATION
Dossier no PR-98-028

TABLE DES MATIÈRES


Ottawa, le mardi 27 avril 1999

Dossier no PR-98-028

EU ÉGARD À une plainte déposée par la société Spacesaver Corporation aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.), modifiée;

ET EU ÉGARD À une décision d'enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

O R D O N N A N C E

INTRODUCTION

Dans une décision rendue le 11 janvier 1999, le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) a accordé à la société Spacesaver Corporation (Spacesaver), en application du paragraphe 30.16(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur 1 (la Loi sur le TCCE), le remboursement des frais raisonnables qu'elle a engagés pour le dépôt et le traitement de sa plainte. Aux termes des paragraphes 30.15(2) et (3) de la Loi sur la TCCE, le Tribunal a recommandé, à titre de mesure corrective, que le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (le Ministère) verse à Spacesaver un dédommagement en reconnaissance de l'occasion que cette dernière a perdue et du fait qu'elle aurait pu en tirer profit.

Le 8 février 1999, Spacesaver a soumis au Tribunal une demande de remboursement des frais liés à sa plainte s'élevant à 2 393,57 $, de dédommagement pour l'occasion perdue s'élevant à 11 667,90 $ et de dédommagement pour l'occasion perdue par son mandataire en ce qui a trait à sa commission ainsi que les frais de main-d'_uvre pour l'installation s'élevant à 7 416,08 $. Le 26 février 1999, le Ministère a fait parvenir des commentaires écrits au Tribunal concernant les montants réclamés par Spacesaver. Le 19 mars 1999, Spacesaver a répondu aux commentaires du Ministère.

FRAIS LIÉS À LA PLAINTE

Dans sa demande du 8 février 1999, Spacesaver a allégué que les « frais connexes » sont associés à la participation à une réunion avec le Ministère à Edmonton (Alberta) et à la période de temps subséquente qu'il a fallu consacrer à la préparation de la demande. Les coûts connexes comprennent un montant de 1 200 $, qui représente trois jours à 400 $ par jour, et des déboursements de 1 193,57 $.

La demande de remboursement de Spacesaver concernant trois jours à 400 $ par jour, contrairement à ce que prétend le Ministère, n'a pas trait uniquement au voyage à Edmonton. Elle représente la totalité du temps que Spacesaver a dû consacrer au dépôt et au traitement de sa plainte.

Spacesaver a retiré la partie des frais connexes ayant trait à des fournitures de bureau au montant de 182,48 $. L'argument qu'a soulevé Spacesaver concernant son utilisation du tarif de transport aérien le moins coûteux est convaincant et le Tribunal accorde la totalité des coûts du voyage.

En résumé, le Tribunal accorde à Spacesaver la somme de 2 211,09 $ quant aux frais raisonnables qu'elle a engagés pour le dépôt et le traitement de sa plainte.

DÉDOMMAGEMENT POUR LE MANQUE À GAGNER

Le Tribunal est conscient qu'il est difficile de décider quel montant de dédommagement est raisonnable. Comme l'a déclaré M. le juge en chef de la Colombie-Britannique McEachern dans l'affaire Begusic c. Clark, Wilson & Co., « [t]he assessment of damages is not a precise science; it is not even a calculation 2  » ([l']évaluation des dommages ne relève pas d'une science précise; ce n'est même pas un calcul).

En se demandant selon quels principes le montant du dédommagement devrait être établi, le Tribunal a décidé d'invoquer ceux qui régissent l'évaluation des dommages-intérêts dans la common law. Il est évident que des dommages peuvent être évalués dans des causes portant sur des appels d'offres, auxquels ressemble bien entendu la procédure de passation du marché public en litige dans la présente affaire3 .

Les tribunaux ont décidé que, dans les causes portant sur des appels d'offres, les principes qu'il convient d'utiliser pour déterminer l'ampleur des dommages-intérêts sont ceux qui sont invoqués dans les causes de bris de contrat4 . Le Tribunal remarque que le fardeau général de la preuve incombe à Spacesaver, qui doit établir et prouver les profits qu'elle aurait pu réaliser et à l'égard desquels elle réclame un dédommagement «on a reasonable preponderance of credible evidence 5 » (suivant la prépondérance raisonnable d'éléments de preuve crédibles).

Dans la présente affaire, Spacesaver soutient que le montant de sa perte a été établi dans sa soumission du 8 février 1999, sa demande de dédommagement pour l'occasion perdue s'élevant à 11 667,00 $ et de dédommagement pour l'occasion perdue par son mandataire en ce qui a trait à sa commission ainsi que les frais de main-d'_uvre pour l'installation s'élevant à 7 416,08 $.

Examinant d'abord la demande de dédommagement pour l'occasion perdue par son mandataire en ce qui a trait à sa commission et les frais de main-d'_uvre pour l'installation, le Tribunal fait remarquer que, dans sa décision du 11 janvier 1999, il a recommandé, à titre de mesure corrective, le versement à la société Spacesaver Corporation d'une indemnité en reconnaissance de l'occasion que cette dernière a perdue et du fait qu'elle aurait eu la possibilité d'en tirer des profits. La demande de dédommagement soumise par Spacesaver au nom de son mandataire est, de l'avis du Tribunal, hors de la portée de sa recommandation. De fait, ce montant a trait à des frais qui n'ont pas été engagés par Spacesaver. Par conséquent, cette partie du dédommagement n'est pas admise.

Le Ministère a exprimé son souci en ce qui a trait au pourcentage de la marge bénéficiaire brute réclamé par Spacesaver. Selon le Ministère, la norme acceptée d'une marge bénéficiaire raisonnable pour des acquisitions non concurrentielles ou à la suite d'un procédé en régime de concurrence à prix négociés de moins de 50 000 $, que l'on peut retrouver à l'alinéa 10.22(c)ii) du Guide de la politique des approvisionnements du Ministère, est de 10 p. 100. Dans sa réplique, Spacesaver a déclaré que 32,5 p. 100 « est inférieur à toute marge bénéficiaire qu'un fabricant souhaiterait obtenir » Aucun autre élément de preuve n'a été présenté par Spacesaver pour justifier ce pourcentage de marge bénéficiaire brute. Toutefois, pour appuyer sa demande de dédommagement pour l'occasion perdue par son mandataire, Spacesaver a soumis un document confidentiel utilisé par son mandataire pour la préparation de sa soumission. Selon le Tribunal, la soumission et la plainte, qu'un mandataire ait été ou non concerné, ont été présentées par Spacesaver. Compte tenu des éléments de preuve et de l'absence de risques normalement associés à la performance de contrats de ce genre, le Tribunal décide que le dédommagement pour manque à gagner devrait être calculé à un taux de 10 p. 100, comme l'a indiqué le Ministère dans son exposé. Par conséquent, le dédommagement recommandé pour l'occasion perdue d'effectuer un profit est établi à 4 140,82 $.

CONCLUSION

Le Tribunal accorde, par la présente, à Spacesaver le remboursement des frais de 2 211,09 $ relativement au traitement de sa plainte et ordonne au Ministère de prendre les dispositions nécessaires pour que le paiement en soit effectué rapidement. Le Tribunal recommande, par la présente, que le Ministère verse à Spacesaver un dédommagement de 4 140,82 $.



Peter F. Thalheimer

Peter F. Thalheimer
Membre


Michel P. Granger

Michel P. Granger
Secrétaire

1 . L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.).

2 . (1991), 57 B.C.L.R. (2e) 273 (B.C.C.A.); autres motifs donnés dans (1992), 66 B.C.L.R. (2e)253 (B.C.C.A.); le droit d'en appeler à la C.S.C. refusé (1992), 62 B.C.L.R. (2e)xxii (note) (C.S.C.).

3 . La Reine (Ont.) c. Ron Engineering, [1981] 1 R.C.S. 111. Voir aussi l'affaire Canamerican Auto Lease and Rental Ltd. c. Canada, [1987] 3 C.F. 144.

4 . Ibid.

5 . 100 Main Street Ltd. c. W.B. Sullivan Construction Ltd. (1978), 88 D.L.R. (3e) 1 à la p. 22. Voir aussi l'affaire William H. Cotter c. General Petroleums Limited and Superior Oils, Limited, [1951] R.C.S. 154.


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Publication initiale : le 5 septembre 2000