MISTRAL SECURITY INC.


MISTRAL SECURITY INC.
c.
MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX
Dossier no PR-2012-035

Ordonnance et motifs rendus
le lundi 24 juin 2013


TABLE DES MATIÈRES


EU ÉGARD À une plainte déposée par Mistral Security Inc. aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47;

ET À LA SUITE DE l'indication provisoire du montant de l'indemnisation donnée par le Tribunal canadien du commerce extérieur.

ENTRE

MISTRAL SECURITY INC. Partie plaignante

ET

LE MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX Institution fédérale

ORDONNANCE

Dans son ordonnance du 3 mai 2013, le Tribunal canadien du commerce extérieur, aux termes de l'article 30.16 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, a accordé à Mistral Security Inc. le remboursement des frais raisonnables qu'elle avait engagés pour la préparation et le traitement de la plainte. L'indication provisoire du montant de l'indemnisation donnée par le Tribunal canadien du commerce extérieur était de 10 000 $. Après avoir examiné les observations de Mistral Security Inc., le Tribunal canadien du commerce extérieur réaffirme par la présente son indication provisoire en lui accordant une indemnisation de 10 000 $ pour les frais qu'elle a engagés pour la préparation et le traitement de la plainte et ordonne au ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux de prendre les dispositions nécessaires pour que le paiement soit effectué rapidement.

Serge Fréchette
Serge Fréchette
Membre présidant

Dominique Laporte
Dominique Laporte
Secrétaire

EXPOSÉ DES MOTIFS

INTRODUCTION

1. Dans une ordonnance rendue le 3 mai 2013, le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal), aux termes de l'article 30.16 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur1, a accordé à Mistral Security Inc. (Mistral) le remboursement des frais raisonnables qu'elle a engagés pour la préparation et le traitement de la plainte. L'indication provisoire du montant de l'indemnisation donnée par le Tribunal était de 10 000 $.

2. Dans son exposé des motifs, le Tribunal a expliqué que Mistral lui avait présenté sa plainte de bonne foi et que le processus d'enquête avait comporté de nombreuses soumissions, y compris une requête de production de documents déposée par Mistral, que le Tribunal a fini par lui accorder. Le Tribunal était aussi d'avis que l'invocation de l'exception de la sécurité nationale par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (TPSGC) à un stade aussi avancé du processus d'enquête a gravement porté atteinte aux droits de Mistral et a obligé celle-ci à consacrer des ressources considérables pour exercer un recours auquel elle n'avait plus accès.

3. Le 22 mai 2013, Mistral a déposé ses observations auprès du Tribunal dans lesquelles elle demande une indemnisation de 38 735,22 $. Dans ses observations, Mistral indique que l'indemnisation demandée représente l'ensemble de ses frais juridiques et de ses coûts en personnel, soutenant que l'indemnisation est raisonnable et appropriée en l'espèce.

4. Mistral soutient que la décision de TPSGC d'invoquer en l'espèce l'exception de la sécurité nationale des accords commerciaux n'était pas nécessaire, étant donné que TPSGC aurait pu atteindre ses objectifs par d'autres moyens. Mistral soutient que la décision de TPSGC d'invoquer sans nécessité l'exception de la sécurité nationale, qui plus est à un stade aussi avancé du processus d'enquête, doit être prise en considération dans la détermination du montant approprié de l'indemnisation. Mistral réaffirme qu'elle croit avoir agi raisonnablement dans la défense de ses intérêts en déposant une plainte auprès du Tribunal puisque l'exception de la sécurité nationale n'avait pas encore été invoquée à ce moment-là. Mistral soutient également avoir supporté des frais en déposant ainsi une plainte et que ces frais doivent lui être remboursés étant donné qu'il était raisonnable pour elle de croire que le Tribunal avait compétence pour se prononcer sur sa plainte, ce qui l'a encouragée à engager les frais juridiques qui accompagnent un tel processus.

5. Le 5 juin 2013, TPSGC a répondu aux observations de Mistral en indiquant qu'il n'avait aucun commentaire à formuler.

ANALYSE DU TRIBUNAL

6. Le paragraphe 30.16(1) de la Loi sur le TCCE confère au Tribunal le pouvoir d'apprécier et de fixer ou taxer les frais relatifs aux enquêtes qui ont été menées. Il s'agit d'un pouvoir discrétionnaire. Bien que cette disposition indique que ce pouvoir existe « [...] sous réserve des règlements [...] » et bien que l'alinéa 40l) prévoie que « [l]e gouverneur en conseil peut, par règlement : [...] régir l'allocation des frais dans le cadre de l'article 30.16 [...] », il n'existe aucune disposition réglementaire sur cette question.

7. Dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire conféré par la Loi sur le TCCE, le Tribunal a établi la Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure de plainte portant sur un marché public (la Ligne directrice) afin de « [...] guider les parties qui cherchent à recouvrer les frais qu'elles ont encourus lors de leur participation à une procédure de plainte portant sur un marché public »2. Toutefois, le Tribunal ne se considère pas lié par la Ligne directrice et est libre de déroger aux degrés de complexité et aux montants des indemnisations prévus dans la Ligne directrice si les circonstances le justifient. Comme le prévoit d'ailleurs le paragraphe 1.3 de la Ligne directrice, « [...] chaque cas sera étudié séparément; le but de la [...] ligne directrice n'est pas de remplacer, de limiter ou d'altérer le pouvoir discrétionnaire du Tribunal [...] » De surcroît, le paragraphe 4.2.2 permet aux parties de présenter des observations portant notamment sur la « [...] raison qui justifie une dérogation à la ligne directrice ».

8. Ayant examiné les faits de l'espèce ainsi que les observations de Mistral, le Tribunal est d'avis qu'une dérogation aux degrés de complexité et aux indemnisations énoncés dans la Ligne directrice est justifiée. Toutefois, en dépit des circonstances particulières en l'espèce ayant trait à l'indemnisation, le Tribunal ne considère pas qu'il s'agisse d'une situation où l'indemnisation de la totalité des coûts est justifiée.

9. Il est vrai que l'invocation de l'exception de la sécurité nationale par TPSGC à un stade aussi avancé du processus d'enquête a laissé Mistral dans une position où elle a consacré des ressources considérables pour entreprendre un recours auquel elle n'a plus eu accès. Le Tribunal a reconnu cela dans son exposé des motifs accompagnant son indication provisoire du montant de l'indemnisation. Par contre, bien que l'éventualité de l'invocation de l'exception de la sécurité nationale par TPSGC n'ait pas été manifestement prévisible ou même nécessaire en l'espèce, la possibilité qu'une institution fédérale invoque cette exception avant la fin de la procédure du marché public est toujours présente. Cela suppose qu'il y a un certain risque à entreprendre un recours auprès du Tribunal, particulièrement avant qu'un contrat ne soit adjugé, que la partie plaignante doit assumer. Cela est conforme à la position du Tribunal selon laquelle, dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire concernant l'attribution des frais dans une enquête sur un marché public, « [l]es frais accordés représentent normalement une indemnisation partielle »3.

10. Par conséquent, compte tenu de ce qui précède, le Tribunal confirme son indication provisoire du montant de l'indemnisation et accorde à Mistral une indemnisation de 10 000 $.

CONCLUSION

11. Dans son ordonnance du 3 mai 2013, le Tribunal, aux termes de l'article 30.16 de la Loi sur le TCCE, a accordé à Mistral le remboursement des frais raisonnables qu'elle avait engagés pour la préparation et le traitement de la plainte. L'indication provisoire du montant de l'indemnisation donnée par le Tribunal était de 10 000 $. Après avoir examiné les observations de Mistral, le Tribunal réaffirme par la présente son indication provisoire en lui accordant une indemnisation de 10 000 $ pour les frais qu'elle a engagés pour la préparation et le traitement de la plainte et ordonne au ministère des TPSGC de prendre les dispositions nécessaires pour que le paiement soit effectué rapidement.


1 . L.R.C. 1985 (4e supp.), c. 47 [Loi sur le TCCE].

2 . Ligne directrice, para. 1.3.

3 . Ibid., para. 2.1.