Enquêtes sur les marchés publics

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Dossier no PR-2018-015

SoftSim Technologies Inc.

c.

Conseil national de recherches Canada

Décision rendue
le mercredi 3 octobre 2018

Motifs rendus
le jeudi 11 octobre 2018

 



EU ÉGARD À une plainte déposée par SoftSim Technologies Inc. aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.);

ET À LA SUITE D’une décision d’enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

ENTRE

SOFTSIM TECHNOLOGIES INC.

Partie plaignante

ET

CONSEIL NATIONAL DE RECHERCHES CANADA

Institution fédérale

DÉCISION

Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte n’est pas fondée.

Aux termes de l’article 30.16 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur accorde au Conseil national de recherches Canada le remboursement des frais raisonnables qu’il a engagés pour répondre à la plainte, ces frais devant être payés par SoftSim Technologies Inc. Conformément à la Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure de plainte portant sur un marché public, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine provisoirement que le degré de complexité de la présente plainte correspond au degré 1 et que le montant de l’indemnité est de 1 150 $. Si l’une ou l’autre des parties n’est pas d’accord en ce qui a trait à la détermination provisoire du degré de complexité ou du montant de l’indemnité, elle peut déposer des observations auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur, en conformité avec l’article 4.2 de la Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure de plainte portant sur un marché public. Il relève de la compétence du Tribunal de fixer le montant définitif de l’indemnité.

Peter Burn

Peter Burn
Membre présidant








L’exposé des motifs suivra à une date ultérieure.


 

Membres du Tribunal :

Peter Burn, membre présidant

Personnel de soutien :

Sarah Perlman, conseillère juridique

Partie plaignante :

SoftSim Technologies Inc.

Institution fédérale :

Conseil national de recherches Canada

Conseiller juridique pour l’institution fédérale :

Ian McLeod

Kathryn Hamill

Roy Chamoun

Veuillez adresser toutes les communications au :

Greffier
Secrétariat du Tribunal canadien du commerce extérieur
15e étage
333, avenue Laurier Ouest
Ottawa (Ontario) K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel : tcce-citt@tribunal.gc.ca

 


EXPOSÉ DES MOTIFS

[1]  Le 20 juillet 2018, SoftSim Technologies Inc. (SoftSim) a déposé une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal), en vertu du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur [1] , concernant une demande de propositions (DP) (invitation no 18-22022) publiée par le Conseil national de recherches Canada (CNRC) pour l’approvisionnement d’un (1) gestionnaire de projet [2] .

[2]  Le 24 juillet 2018, le Tribunal a accepté d’enquêter sur la plainte, puisque celle-ci répondait aux exigences du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le TCCE ainsi qu’aux conditions énoncées au paragraphe 7(1) du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics [3] .

[3]  Le Tribunal a enquêté sur la plainte, conformément aux articles 30.13 à 30.15 de la Loi sur le TCCE.

[4]  Pour les motifs qui suivent, le Tribunal conclut que la plainte n’est pas fondée.

RÉSUMÉ DE LA PLAINTE

[5]  SoftSim allègue que le CNRC a commis une erreur dans son évaluation de trois critères techniques cotés de la DP, à savoir le critère coté C1 concernant la formation postsecondaire en GI/TI ou en gestion de projet, le critère coté C3 concernant la gestion de projet de GI/TI à plusieurs parties prenantes, et le critère coté C4 concernant l’expérience en matière de projets de recherche fondamentale ou appliquée comportant des volets de GI/TI. Selon SoftSim, sa proposition aurait dû obtenir le nombre maximal de points pour chaque critère et a, par conséquent, été incorrectement jugée irrecevable.

[6]  À titre de mesure corrective, SoftSim demande la réévaluation de sa soumission.

PROCÉDURE DE PASSATION DU MARCHÉ PUBLIC

[7]  La DP a été publiée par le CNRC le 20 juin 2018 en vertu d’un arrangement en matière d’approvisionnement (AA) pour des services professionnels en informatique centrés sur les tâches (SPICT). L’appel d’offres s’adressait à tous les fournisseurs préqualifiés détenteurs d’un AA pour des SPICT pour le palier 1 dans la région de la capitale nationale, SoftSim y comprise. La date de clôture était le 6 juillet 2018.

[8]  À la date de clôture de la DP, le CNRC avait reçu trois propositions, dont une soumise par SoftSim.

[9]  L’évaluation technique a été effectuée au complet entre le 11 et le 13 juillet 2018. SoftSim a reçu 55 points sur 85. Par conséquent, la soumission de SoftSim a été jugée non conforme, puisque la note de passage obligatoire pour les critères techniques cotés était de 80 p. 100 (ou 68 points sur 85) [4] .

[10]  Le 17 juillet 2018, le CNRC a informé SoftSim que sa soumission n’était pas conforme et qu’aucun contrat ne lui serait adjugé [5] .

[11]  Le même jour, SoftSim a demandé au CNRC la tenue d’une réunion de compte rendu. Le 18 juillet 2018, le CNRC a fourni à SoftSim un compte rendu par courriel, lequel révélait la note attribuée pour chaque critère, ainsi que les notes des évaluateurs.

[12]  Le CNRC n’a attribué aucun point sur 10 à SoftSim pour le critère C1 parce qu’elle n’a pas réussi à expliquer en quoi la formation de la ressource proposée se rapportait à la GI/TI ou à la gestion de projet. SoftSim a reçu 20 points sur 30 pour le critère C3 parce que, dans deux des projets soumis, les parties prenantes étaient précisées mais pas définies, et parce qu’aucune durée n’était associée aux sous-projets pertinents. Enfin, le CNRC n’a attribué aucun point sur 10 à SoftSim pour le critère C4 étant donné qu’elle n’a pas expliqué comment les projets cités pouvaient être considérés comme des projets de recherche fondamentale ou appliquée [6] .

[13]  SoftSim allègue que l’évaluation n’était pas exacte et que les évaluateurs avaient fait preuve de partialité au détriment de la ressource qu’elle avait proposée.

PROCÉDURE DE LA PLAINTE

[14]  Le 20 juillet 2018, SoftSim a déposé la présente plainte auprès du Tribunal.

[15]  Le 24 juillet 2018, le Tribunal a informé les parties qu’il avait accepté d’enquêter sur la plainte, puisque celle-ci répondait aux exigences du paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE ainsi qu’aux conditions énoncées au paragraphe 7(1) du Règlement.

[16]  Le 20 août 2018, le CNRC a déposé son Rapport de l’institution fédérale (RIF) auprès du Tribunal, conformément à l’article 103 des Règles.

[17]  SoftSim a déposé ses observations en réponse au RIF le même jour.

[18]  Puisque les renseignements au dossier étaient suffisants pour statuer sur le bien-fondé de la plainte, le Tribunal n’a pas jugé nécessaire de tenir une audience et a ainsi rendu sa décision en se fondant sur les documents versés au dossier.

DISPOSITIONS PERTINENTES DE LA DP

[19]  La partie 3 de la DP donnait des instructions pour la préparation des soumissions. Ces instructions prévoyaient, dans les sections pertinentes, ce qui suit :

3.2 SECTION I : SOUMISSION TECHNIQUE

[...]

v.  Ressources proposées : La soumission technique doit comprendre un (1) curriculum vitæ par ressource. La même personne ne peut être proposée pour plus d’une catégorie de ressources. La soumission technique doit démontrer que chaque personne proposée satisfait aux exigences de qualification décrites (y compris les exigences en matière d’éducation, d’expérience de travail et d’accréditation professionnelle). En ce qui a trait aux ressources proposées :

[...]

E.  Pour ce qui est des exigences pour lesquelles on demande un nombre précis d’années d’expérience (deux ans, par exemple), le Canada ne tiendra pas compte de cette expérience si la soumission technique ne donne pas les dates précises (mois et année) de l’expérience alléguée (c.-à-d. la date de début et la date de fin). Le Canada n’évaluera que la période durant laquelle la ressource a travaillé sur un ou plusieurs projets (de la date de début à la date de fin); il ne tiendra pas compte des dates de début et de fin globales durant lesquelles la ressource a pris part à un ou plusieurs projets;

F.  Pour que le Canada tienne compte de l’expérience de travail, la soumission technique ne doit pas seulement indiquer le titre du poste occupé par la personne; elle doit également démontrer que cette personne a acquis l’expérience nécessaire en expliquant ses responsabilités et les tâches effectuées par la personne lorsqu’elle occupait le poste. Si la ressource proposée a travaillé en même temps sur plusieurs projets, toute période de travail se chevauchant ne sera prise en compte qu’une fois pour toute exigence qui se rapporte à la durée de l’expérience de la personne.

[Traduction]

[20]  La partie 4 de la DP traitait des procédures d’évaluation et de la méthode de sélection. La DP comportait les critères techniques obligatoires et les critères techniques cotés auxquels devait répondre le soumissionnaire. Les articles 4.2a) et b) prévoyaient ce qui suit :

Critères techniques obligatoires

Chaque soumission fera l’objet d’un examen pour en déterminer la conformité aux exigences obligatoires de l’appel d’offres. Tous les éléments de l’appel d’offres qui constituent des exigences obligatoires sont désignés par les termes « doit », « doivent » ou « obligatoire ». Les soumissions qui ne respectent pas toutes les exigences obligatoires, sans exception, seront jugées irrecevables et rejetées.

Critères techniques cotés

Chaque soumission sera cotée en attribuant une note aux exigences cotées, qui sont indiquées dans l’appel d’offres par le terme « coté » ou par une référence à une note. Les soumissions incomplètes et qui ne contiennent pas tous les renseignements exigés dans l’appel d’offres seront cotées en conséquence.

[Traduction]

[21]  L’article 4.4 de la DP prévoyait la méthode de sélection suivante :

Pour être recevables, les soumissions doivent :

satisfaire à tous les premiers critères d’évaluation obligatoires et indiquer clairement dans leur proposition l’endroit où l’on peut obtenir des renseignements à l’appui de chaque critère;

Méthode d’évaluation : Note la plus haute sur le plan des critères obligatoires et du mérite technique (70 p. 100) et du prix (30 p. 100) (une moyenne des critères cotés sera faite);

obtenir le minimum global requis de 80 p. 100 des points pour les critères qui font l’objet d’une cotation numérique précisés dans le présent appel d’offres;

Les soumissions qui ne satisfont pas aux conditions a), b) et c) ci-dessus seront rejetées.

[Traduction]

[22]  Comme cela a été mentionné ci-dessus, dans sa plainte, SoftSim conteste l’évaluation faite par le CNRC de trois critères techniques cotés de la DP, à savoir les critères C1, C3 et C4, qui énoncent ce qui suit à l’annexe A, « Énoncé des travaux et critères d’évaluation » :

Critère

Description

Nombre maximal de points

Lignes directrices pour l’évaluation

Critères cotés

Preuve de conformité

Le soumissionnaire doit fournir un curriculum vitæ de toutes les ressources proposées en faisant ressortir les qualifications et l’expérience dans le domaine pertinent, et en démontrant HORS DE TOUT DOUTE que les qualifications de la personne proposée satisfont aux exigences énoncées dans les exigences obligatoires.

C1

Le soumissionnaire devrait démontrer que la ressource proposée a terminé des études postsecondaires dans une institution reconnue dans un domaine en lien avec la GI/TI ou la gestion de projet.

10

Aucun diplôme fourni = 0 point
Copie du diplôme collégial ou universitaire fournie = 10 points

[...]

 

 

 

C3

Le soumissionnaire devrait démontrer que la ressource proposée a acquis de l’expérience dans la gestion de projets de GI/TI à parties prenantes multiples au cours des 10 dernières années.

30

5 points seront attribués pour chaque année complète d’expérience pertinente, jusqu’à un maximum de 30 points.

C4

Le soumissionnaire devrait démontrer que la ressource possède une expérience récente en matière de projets de recherche fondamentale ou appliquée comportant des volets de GI/TI.

10

2 points seront attribués pour chaque année complète d’expérience pertinente, jusqu’à un maximum de 10 points.

[...]

 

 

 

 

Total maximal de points

85

 

 

(Note minimale de passage de 80 p. 100)

 

 

 

[Traduction]

ANALYSE

[23]  Le paragraphe 30.14(1) de la Loi sur le TCCE exige que, dans son enquête, le Tribunal limite son étude à l’objet de la plainte. À la conclusion de l’enquête, le Tribunal doit déterminer le bien-fondé de la plainte, à savoir si les procédures et autres critères prescrits relativement au contrat spécifique ont été respectés.

[24]  L’article 11 du Règlement prévoit également que le Tribunal doit décider si la procédure de passation du marché public a été suivie conformément aux exigences des accords commerciaux pertinents qui sont, en l’espèce, l’Accord sur les marchés publics de l’Organisation mondiale du commerce [7] , l’Accord de libre-échange nord-américain [8] et l’Accord de libre-échange canadien [9] , entre autres [10] .

[25]  L’AMP, l’ALÉNA et l’ALÉC exigent tous que l’entité contractante remette aux fournisseurs potentiels tous les renseignements nécessaires pour leur permettre de préparer et présenter des soumissions recevables, y compris les critères d’adjudication qui seront pris en considération lors de l’évaluation des soumissions et l’adjudication du marché [11] .

[26]  Les accords exigent également que, pour être considérée en vue de l’adjudication, une soumission doit être conforme, au moment d’ouverture des soumissions, aux conditions essentielles spécifiées dans la documentation relative à l’appel d’offres, et exigent que les entités contractantes effectuent l’adjudication des marchés conformément aux critères d’évaluation spécifiés dans la documentation relative à l’appel d’offres [12] .

Positions des parties

[27]  En ce qui concerne le critère C1, SoftSim soutient qu’elle aurait dû obtenir 10 points sur 10 étant donné que la ressource proposée possède une maîtrise ès sciences appliquées (génie électrique) et une maîtrise en ingénierie (gestion en ingénierie) de l’Université d’Ottawa. Dans les documents relatifs à sa plainte, SoftSim soutient que la maîtrise en ingénierie (gestion en ingénierie) comprend des cours obligatoires de gestion de projet et compétences en gestion, ainsi que des cours facultatifs de gestion de projet de l’information, ce qui devrait répondre à l’exigence de formation « dans un domaine en lien avec la GI/TI ou la gestion de projet » [13] [traduction].

[28]  Le CNRC a répondu qu’il était raisonnable que l’équipe d’évaluation n’accorde aucun point pour le critère C1, puisque SoftSim n’avait pas fourni d’éléments de preuve permettant d’établir la soi-disant maîtrise en ingénierie (gestion en ingénierie) de sa ressource ni la manière dont la maîtrise ès sciences appliquées (génie électrique) de cette dernière était liée à la GI/TI ou à la gestion de projet. Le CNRC a fait remarquer que l’explication donnée par SoftSim dans les documents relatifs à sa plainte ne figurait pas dans sa proposition [14] .

[29]  En ce qui concerne le critère C3, le CNRC a attribué 20 points sur 30 à SoftSim, puisque seuls deux des quatre projets présentés par SoftSim comprenaient suffisamment de renseignements pour déterminer clairement les multiples parties prenantes concernées. Quant aux deux autres projets, le CNRC soutient que SoftSim n’a pas expliqué comment chaque entité ou chaque groupe désigné pouvait représenter une partie prenante distincte. En outre, le CNRC a fait remarquer que le critère C3 exigeait que l’expérience soit acquise au cours des dix dernières années. Selon le CNRC, soit SoftSim n’a pas fourni la durée des sous-projets pertinents, soit elle les a réalisés il y a plus de dix ans [15] .

[30]  SoftSim soutient que sa proposition désignait clairement les parties prenantes concernées [16] . Selon SoftSim, dans le cas des deux projets rejetés par le CNRC, les multiples parties prenantes figuraient dans sa proposition à titre de « RP (responsable de produit) et AO (analyste des opérations) » [traduction], « la Commission de contrôle des changements (CCC), l’équipe des lancements de contrôleurs de réseau de radiocommunication, l’équipe d’arrière-guichet et la gouvernance du projet » [traduction], et « l’équipe des lancements de contrôleurs de réseau de radiocommunication, l’équipe principale des lancements et le VP du sans fil » [17] [traduction]. SoftSim n’a pas abordé l’absence de durées déclarées pour les sous-projets ni le fait que ceux-ci avaient été réalisés il y a plus de dix ans.

[31]  En ce qui concerne le critère C4, le CNRC n’a attribué aucun point sur 10 à SoftSim, puisqu’elle n’a pas expliqué en quoi les projets cités constituent des « projets de recherche » [traduction]. Le CNRC soutient que le mot clé « recherche » [traduction] est utilisé dans la description faite par SoftSim des projets pertinents, mais que les projets sont appelés « initiatives de transformation des activités » [traduction] dans la proposition [18] .

[32]  En réponse, SoftSim a renvoyé à sa proposition et a déclaré que la description des projets pertinents démontrait que la ressource proposée possédait l’expérience requise en matière de projets de recherche [19] .

Analyse du Tribunal

[33]  Le Tribunal fait généralement preuve de beaucoup de déférence à l’égard des évaluateurs pour ce qui est de leur évaluation des propositions. Il n’interviendra dans une évaluation que si celle-ci est déraisonnable [20] et ne substituera son jugement à celui des évaluateurs que si ces derniers ne se sont pas appliqués à évaluer la proposition d’un soumissionnaire, qu’ils ont donné une interprétation erronée de la portée d’une exigence, qu’ils n’ont pas tenu compte de renseignements cruciaux fournis dans une soumission, qu’ils ont fondé leur évaluation sur des critères non divulgués ou que l’évaluation n’a pas été effectuée d’une manière équitable du point de vue de la procédure [21] .

[34]  En outre, il est bien établi qu’il incombe au soumissionnaire d’établir que tous les critères pertinents et toutes les exigences pertinentes ont été satisfaits dans leur soumission [22] . Autrement dit, les soumissionnaires ont la responsabilité de s’assurer que tous les documents à l’appui de leur soumission démontrent clairement la conformité. Il incombe au soumissionnaire de faire attention à ce que sa proposition ne comporte aucune ambiguïté et que les évaluateurs seront en mesure de bien la comprendre [23] .

[35]  Le Tribunal ne voit rien de déraisonnable dans l’évaluation de la soumission de SoftSim en ce qui a trait aux critères C1, C3 et C4.

[36]  En ce qui concerne le critère C1, le Tribunal fait remarquer tout d’abord que la DP exigeait explicitement des soumissionnaires qu’ils fournissent des copies des diplômes pour pouvoir recevoir des points. SoftSim n’a pas fourni une copie de la maîtrise en ingénierie (gestion en ingénierie) obtenue par la ressource proposée et n’a reçu aucun point pour ce diplôme. En outre, le Tribunal a déjà conclu qu’il incombe au soumissionnaire de fournir suffisamment de renseignements et d’éléments de preuve pour démontrer la pertinence d’un diplôme, par exemple en fournissant une copie du programme de cours de l’école ou des relevés de notes [24] . Ces renseignements ne figuraient pas dans la proposition de SoftSim, et elle ne peut maintenant tenter de présenter de nouveaux renseignements pour remédier aux lacunes [25] . À ce titre, le Tribunal conclut qu’il était raisonnable que le CNRC n’attribue aucun point à SoftSim pour ce critère.

[37]  En ce qui concerne le critère C3, le Tribunal conclut qu’il était raisonnable que le CNRC n’accorde aucun point pour deux des quatre projets. Quant aux deux projets retenus, SoftSim a mentionné les différentes entités auxquelles appartenaient les parties prenantes. Quant aux deux projets rejetés, SoftSim a énuméré les équipes concernées, sans indiquer à quelles entités elles appartenaient. Tel qu’indiqué dans sa proposition, les soi-disant parties prenantes citées dans les deux projets rejetés semblent appartenir à différentes équipes de la même entité. SoftSim n’a pas fourni suffisamment de renseignements pour permettre au CNRC de déterminer si les équipes énumérées représentent des parties prenantes distinctes.

[38]  En outre, les deux projets sont subdivisés en un certain nombre de sous-projets, pour lesquels aucune durée n’est précisée. L’article 3.2(v)E) de la DP exigeait du CNRC qu’il évalue la durée des sous-projets pertinents plutôt que celle de l’ensemble du projet, et qu’il ne tienne pas compte de l’expérience qui ne comprenait pas cette information. L’expérience citée par SoftSim pour le critère C3 se rapporte à des sous‑projets précis, mais la seule durée spécifiée est celle de l’ensemble du projet. Le CNRC ne pouvait pas lui-même fournir les durées manquantes des sous-projets. Par conséquent, le Tribunal conclut qu’il était raisonnable que le CNRC n’attribue aucun point à SoftSim pour les deux projets rejetés.

[39]  Le Tribunal fait également remarquer que les évaluateurs ont commis une erreur en attribuant 20 points à SoftSim pour le critère C3. Les lignes directrices pour l’évaluation prévoient cinq points pour chaque année complète d’expérience pertinente. Étant donné que les deux projets retenus ne démontrent qu’un total de 18 mois d’expérience, SoftSim n’aurait dû recevoir que 5 points sur 30.

[40]  Enfin, en ce qui concerne le critère C4, le Tribunal a déclaré qu’une exigence de « démontrer » signifie davantage que simplement indiquer une capacité; un soumissionnaire doit plutôt prouver la façon dont la personne a acquis une soi-disant capacité [26] . En l’espèce, SoftSim était tenue de démontrer une expérience en matière de projets de recherche fondamentale ou appliquée comportant des volets de GI/TI. SoftSim s’est contentée de déclarer que les projets pertinents sont des « projets de recherche » [traduction], mais n’a pas décrit en quoi ils permettent soit de mieux comprendre les principes fondamentaux ou élémentaires, soit d’intégrer les résultats de recherche dans la pratique [27] . Le Tribunal ne voit aucun motif raisonnable qui permette de conclure que la proposition de SoftSim fournissait suffisamment de détails pour démontrer que la ressource proposée possédait de l’expérience en matière de projets de recherche fondamentale ou appliquée.

[41]  En résumé, le Tribunal conclut que l’évaluation du CNRC n’était pas déraisonnable et, par conséquent, s’en remet au jugement de ses évaluateurs. Il incombait à SoftSim de répondre aux exigences de la DP. Elle n’a pas fait. Le Tribunal n’a reçu aucun élément de preuve permettant de montrer que SoftSim aurait dû se voir attribuer un plus grand nombre de points. Elle a d’ailleurs reçu plus de points qu’elle n’aurait dû.

[42]  Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que la plainte n’est pas fondée.

FRAIS

[43]  Aux termes de l’article 30.16 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal accorde au CNRC le remboursement des frais raisonnables qu’il a engagés pour répondre à la plainte, ces frais devant être payés par SoftSim. Conformément à la Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure portant sur un marché public (la Ligne directrice), le Tribunal détermine provisoirement que le degré de complexité de la plainte correspond au degré 1, puisque le marché public concernait des services personnels offerts par une partie et ne se rapportait qu’à trois exigences cotées. En outre, la procédure était simple et ne comportait pas de questions complexes à résoudre. Par conséquent, le Tribunal détermine provisoirement que le montant de l’indemnité est de 1 150 $.

DÉCISION DU TRIBUNAL

[44]  Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal détermine que la plainte n’est pas fondée.

[45]  Aux termes de l’article 30.16 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal accorde au CNRC le remboursement des frais raisonnables qu’il a engagés pour répondre à la plainte, ces frais devant être payés par SoftSim. Conformément à la Ligne directrice, le Tribunal détermine provisoirement que le degré de complexité de la présente plainte correspond au degré 1 et que le montant de l’indemnité est de 1 150 $. Si l’une ou l’autre des parties n’est pas d’accord en ce qui a trait à la détermination provisoire du degré de complexité ou du montant de l’indemnité, elle peut déposer des observations auprès du Tribunal, en conformité avec l’article 4.2 de la Ligne directrice. Il relève de la compétence du Tribunal de fixer le montant définitif de l’indemnité.

Peter Burn

Peter Burn
Membre présidant







[1] .  L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.) [Loi sur le TCCE].

[2] .  La plainte déposée par SoftSim le 17 juillet 2018 était incomplète. Le 20 juillet 2018, SoftSim a déposé des renseignements supplémentaires en réponse à une demande faite par le Tribunal le 18 juillet 2018, en vertu du paragraphe 30.12(2) de la Loi sur le TCCE. Par conséquent, conformément à l’alinéa 96(1)b) des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur, DORS/91-499 [Règles], et au paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE, la plainte est considérée comme ayant été déposée le 16 mars 2018.

[3] .  D.O.R.S./93-602 [Règlement].

[4] .  Pièce PR-2018-015-11A (protégée) au par. 37, vol. 2.

[5] .  Pièce PR-2018-015-01A (protégée) à la p. 29, vol. 2.

[6] .  Pièce PR-2018-015-01B (protégée) aux p. 3-4, vol. 2.

[7] .  Accord révisé sur les marchés publics, en ligne : Organisation mondiale du commerce <http://www.wto.org/‌french/docs_f/legal_f/rev-gpr-94_01_f.htm> (entré en vigueur le 6 avril 2014) [AMP].

[8] .  Accord de libre-échange nord-américain entre le gouvernement du Canada, le gouvernement des États-Unis d’Amérique et le gouvernement des États-Unis du Mexique, 17 décembre 1992, R.T.C. 1994, no 2, en ligne : Affaires mondiales Canada <http://international.gc.ca/‌trade-commerce/‌trade-agreements-accords-commerciaux/‌agr-acc/nafta-alena/fta-ale/index.aspx?lang=fra> (entré en vigueur le 1er janvier 1994) [ALÉNA].

[9] .  Accord de libre-échange canadien, en ligne : Secrétariat du commerce intérieur <https://www.cfta-alec.ca/wp-content/uploads/2017/06/CFTA-Consolidated-Text-Final-Print-Text-French-.pdf> (entré en vigueur le 1er juillet 2017) [ALÉC].

[10] .  Plusieurs autres accords commerciaux s’appliquent au présent appel d’offres, que nous éviterons d’énumérer ici pour des raisons d’économie. Voir la DP, article 1.2d) (Pièce PR-2018-015-01 à la p. 20, vol. 1).

[11] .  Par exemple, le paragraphe 1013(1) de l’ALÉNA prévoit ce qui suit : « La documentation relative à l’appel d’offres qu’une entité remettra aux fournisseurs devra contenir tous les renseignements nécessaires pour leur permettre de présenter des soumissions valables [...]. La documentation contiendra également : [...] h) les critères d’adjudication, y compris tous les éléments, autres que le prix, qui seront pris en considération lors de l’évaluation des soumissions [...] »; voir aussi les paragraphes X(7) de l’AMP et 509(7) de l’ALÉC.

[12] .  Par exemple, les alinéas 1015(4)a) et d) de l’ALÉNA prévoient ce qui suit : « L’adjudication des marchés s’effectuera conformément aux procédures suivantes : a) pour être considérée en vue de l’adjudication, une soumission devra être conforme, au moment de son ouverture, aux conditions essentielles spécifiées dans les avis ou dans la documentation relative à l’appel d’offres [...] d) l’adjudication des marchés sera conforme aux critères et aux conditions essentielles spécifiées dans la documentation relative à l’appel d’offres » . Voir aussi les paragraphes XV(4) et (5) de l’AMP et les paragraphes 515(4) et (5) de l’ALÉC.

[13] .  Pièce PR-2018-015-01D (protégée) à la p. 2, vol. 2. SoftSim renvoie au répertoire des cours de l’Université d’Ottawa pour la maîtrise en ingénierie (gestion en ingénierie).

[14] .  Pièce PR-2018-015-11A (protégée) aux par. 57-59 et 61, vol. 2.

[15] .  Ibid. aux par. 65, 68 et 69 et 72 et 73.

[16] .  Pièce PR-2018-015-01D (protégée) à la p. 3, vol. 2.

[17] .  Pièce PR-2018-015-11A (protégée) aux p. 65 et 70, vol. 2.

[18] .  Ibid. au par. 79.

[19] .  Pièce PR-2018-015-01D (protégée) à la p. 2, vol. 2.

[20] .   Comme l’a déclaré le Tribunal dans Entreprise commune de BMT Fleet Technology Ltd. et NOTRA Inc. c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (5 novembre 2008), PR-2008-023 (TCCE) au par. 25, « la détermination [de l’institution fédérale] sera jugée raisonnable si elle est fondée sur une explication défendable, même si elle n’est pas convaincante aux yeux du Tribunal ». Voir aussi Samson & Associates c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (28 avril 2015), PR-2014-050 (TCCE) [Samson] au par. 35.

[21] .   Excel Human Resources Inc. c. Ministère de l’Environnement (2 mars 2012), PR-2011-043 (TCCE) au par. 33.

[22] .  Samson & Associates c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (16 juillet 2015), PR‑2015-002 (TCCE) au par. 49; Valcom Consulting Group Inc. c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (9 juillet 2014), PR-2013-044 (TCCE) au par. 32.

[23] .   Integrated Procurement Technologies, Inc. (14 avril 2008), PR-2008-007 (TCCE); Samson & Associates c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (19 octobre 2012), PR-2012-012 (TCCE) au par. 28; Raymond Chabot Grant Thornton Consulting Inc. et PricewaterhouseCoopers LLP c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (25 octobre 2013), PR-2013-005 et PR-2013-008 (TCCE) au par. 37.

[24] .   Samson, supra note 21 aux par. 40-42.

[25] .   Maxxam Analytics Inc. c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (20 septembre 2007), PR-2007-017 (TCCE) au par. 37; NOTRA Environmental Services Inc. (16 décembre 1997), PR-97-027 (TCCE); Bell Mobilité c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (14 juillet 2004), PR-2004-004 (TCCE); Francis H.V.A.C. Services Ltd. c. Canada (Travaux publics et Services gouvernementaux), 2017 CAF 165 (CanLII) au par. 22.

[26] .   Antian Professional Services Inc. c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (5 août 2008), PR-2008-001 (TCCE) au par. 36.

[27] .  Le dictionnaire Collins définit « recherche fondamentale » comme « la recherche effectuée pour mieux comprendre les principes fondamentaux ou élémentaires de quelque chose » [traduction], et « recherche appliquée » comme « la recherche qui est mise en pratique » [traduction]. Disponible en ligne aux adresses suivantes : https://www.collinsdictionary.com/dictionary/english/fundamental-research et https://www.collinsdictionary.com/dictionary/english/applied-research.

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