Enquêtes sur les marchés publics

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Dossier no PR-2019-050

WW-ISS Solutions Canada

Décision prise
le lundi 16 décembre 2019

Décision et motifs rendus
le lundi 23 décembre 2019

 


EU ÉGARD À une plainte déposée aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.).

PAR

WW-ISS SOLUTIONS CANADA

CONTRE

LE MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES, DU COMMERCE ET DU DÉVELOPPEMENT

DÉCISION

Aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur décide de ne pas enquêter sur la plainte.

Jean Bédard

Jean Bédard, c.r.
Membre présidant

 

 


EXPOSÉ DES MOTIFS

[1]               En vertu du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur[1], tout fournisseur potentiel peut, sous réserve du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics[2], déposer une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) concernant la procédure des marchés publics suivie relativement à un contrat spécifique et lui demander d’enquêter sur cette plainte. En vertu du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le TCCE, après avoir jugé la plainte conforme au paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE et sous réserve du Règlement, le Tribunal détermine s’il y a lieu d’enquêter.

RÉSUMÉ DE LA PLAINTE

[2]               La présente plainte concerne une demande de propositions (DP) (invitation no 19-154326) publiée par le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement (MAECD) pour la prestation d’un service de navette.

[3]               Le plaignant, WW-ISS Solutions Canada (WW-ISS), soutient que le soumissionnaire retenu, Millennium Limousine Service (MLS), n’a pas respecté les exigences obligatoires de la DP lorsqu’il a présenté sa soumission et qu’il n’offre pas actuellement le service conformément à ces exigences obligatoires. En guise de mesure corrective, WW-ISS demande que le contrat spécifique soit résilié et qu’un nouvel appel d’offres soit lancé par TPSGC. Elle souhaite également que les soumissions soient réévaluées, que le plaignant reçoive une indemnité ou qu’une autre mesure corrective non précisée soit accordée. WW‑ISS réclame également une indemnité pour les frais liés au dépôt de sa plainte et à la préparation de sa soumission.

CONTEXTE

[4]               La DP a été publiée le 31 mai 2019, et la date de clôture des soumissions était le 12 juillet 2019. WW-ISS, qui était le fournisseur titulaire, a présenté sa soumission le 11 juillet 2019.

[5]               Le 24 juillet 2019, le MAECD a informé WW-ISS que le contrat ne lui avait pas été attribué et qu’il serait attribué à MLS. WW-ISS a reçu la note globale attribuée à MLS pour sa soumission, qui était d’un point supérieur à la note globale de WW-ISS, mais n’a pas reçu de précisions sur la répartition des points entre les offres techniques et financières, ni aucune autre information concernant l’offre de MLS.

[6]               Le 25 juillet 2019, WW-ISS a communiqué avec le MAECD pour lui demander une réunion de compte rendu. Un compte rendu en personne a eu lieu le même jour. Le 31 juillet 2019, WW-ISS a fait parvenir un courriel de suivi au MAECD soulignant les préoccupations évoquées lors de la réunion, qui portaient essentiellement sur la capacité du soumissionnaire retenu à exécuter le contrat conformément aux exigences de la DP ainsi que sur les présomptions de WW-ISS quant au contenu de la soumission de MLS.

[7]               Les parties pertinentes de la DP stipulaient ce qui suit :

Critères obligatoires

O2 Exigences relatives aux véhicules de navette

Le soumissionnaire doit fournir un minimum de six véhicules avec une capacité minimale de quatre places assises, sans compter celle du chauffeur.

Tous les véhicules proposés doivent figurer dans la catégorie Plugin Hybrid Vehicles (PHEV) [Véhicules hybrides rechargeables (VHR)] ou All-Electric Vehicles (EV) [Véhicules tout électriques (VE)] du site Web suivant : https://www.fueleconomy.gov/feg/findacar.shtml

[...]

Exigences

Attribution des points

E1 – Catégorie de véhicule : VHR ou VE

Le soumissionnaire sera évalué en fonction de la catégorie de véhicules proposés (VHR ou VE).

Aucun des véhicules proposés n’est entièrement électrique (VE) = 0 point

trois des véhicules proposés ou plus sont entièrement électriques (VE) = 20 points

quatre des véhicules proposés ou plus sont entièrement électriques (VE) = 30 points

cinq des véhicules proposés ou plus sont entièrement électriques (VE) = 40 points

six des véhicules proposés ou plus sont entièrement électriques (VE) = 50 points

[...]

ANNEXE « A »

ÉNONCÉ DES TRAVAUX

7. EXIGENCES RELATIVES AUX VÉHICULES

Le MAECD exige soit des véhicules hybrides électriques rechargeables (VHR), soit des véhicules entièrement électriques (VE) qui permettront le transport confortable d’au moins quatre passagers à la fois, sans compter le chauffeur. À titre d’exemple, les véhicules proposés pourraient être, sans toutefois s’y limiter : Chevrolet Bolt, Chrysler Pacifica PHEV, Hyundai Kona Electric, etc.

[8]               WW-ISS présume que le soumissionnaire retenu doit avoir proposé six véhicules entièrement électriques pour obtenir le maximum de points en vertu de l’exigence E1 et recevoir la note globale qu’il a obtenue. Elle exprime aussi des préoccupations quant à la qualité des véhicules que MLS peut avoir proposés pour satisfaire à cette exigence. WW-ISS se dit également préoccupée par le fait qu’aucune disposition du contrat n’exige explicitement que les véhicules de remplacement soient des hybrides électriques rechargeables ou des véhicules entièrement électriques. WW-ISS réitère sa demande, formulée lors de la réunion de compte rendu, de publier un nouvel appel d’offres.

[9]               Le 1er août 2019, le MAECD a répondu que la DP ne ferait pas l’objet d’un nouvel appel d’offres et que le contrat avec MLS couvrait la totalité des exigences prévues dans la DP.

[10]           Le 1er novembre 2019, MLS a commencé à fournir le service de navette en vertu de son contrat.

[11]           Le 13 décembre 2019, WW-ISS a déposé une plainte auprès du Tribunal. Dans celle-ci, WW‑ISS soutient que MLS utilisait des véhicules à essence pour effectuer le service de navette, et non des véhicules hybrides ou entièrement électriques rechargeables comme l’exige la DP et le contrat subséquent. Le 27 novembre 2019, WW-ISS a présenté des photos de fourgonnettes à essence qui, selon elle, étaient utilisées par MLS pour assurer le service de navette. WW-ISS a également fait valoir que la non-utilisation (alléguée) par MLS des véhicules requis remet en question le respect des exigences de la DP par l’entreprise, notamment en ce qui concerne la présence de personnel de sécurité à l’installation d’entreposage et l’obligation de souscrire une assurance adéquate pour le service de navette. WW-ISS se demande également si le MAECD a vérifié que MLS est effectivement en mesure de fournir le service comme prévu dans son offre.

ANALYSE

[12]           Le 16 décembre 2019, conformément au paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal a décidé de ne pas enquêter sur la plainte pour les motifs suivants.

[13]           Premièrement, le Tribunal conclut que tout motif de plainte que WW-ISS aurait pu avoir concernant la façon dont la soumission de MLS a été évaluée est forclos. Le paragraphe 6(2) du Règlement prévoit qu’un fournisseur potentiel qui a présenté une opposition à l’institution fédérale concernée et à qui l’institution refuse réparation peut déposer une plainte auprès du Tribunal « dans les 10 jours ouvrables suivant la date où il a pris connaissance, directement ou par déduction, du refus, s’il a présenté son opposition dans les 10 jours ouvrables suivant la date où il a découvert ou aurait dû vraisemblablement découvrir les faits à l’origine de l’opposition ».

[14]           Le 25 juillet 2019, WW-ISS a fait part au MAECD de ses préoccupations concernant la soumission de MLS, qui a été présentée dans les dix jours suivants le moment où elle a pris connaissance que MLS était le soumissionnaire retenu. Toutefois, le Tribunal estime que WW-ISS s’est vu refuser réparation le 1er août 2019, lorsque le MAECD a refusé de publier un nouvel appel d’offres. Par conséquent, WW-ISS n’a pas déposé sa plainte concernant l’évaluation de la soumission de MLS dans les 10 jours suivant la date où elle s’est vu refuser réparation, si bien que le Tribunal ne peut pas enquêter sur cet aspect de la plainte.

[15]           Deuxièmement, le Tribunal ne peut pas enquêter quant à savoir si MLS exécute actuellement le contrat qu’elle a conclu avec le MAECD conformément aux exigences du contrat. La Loi sur le TCCE et le Règlement permettent à un fournisseur potentiel de déposer une plainte auprès du Tribunal sur tout aspect d’un processus d’approvisionnement ayant trait à un contrat spécifique. Toutefois, en appliquant ces dispositions, le Tribunal a fait une distinction importante entre le processus d’approvisionnement et l’administration des marchés. Le processus d’approvisionnement commence après que l’institution fédérale ait déterminé son besoin et se poursuit jusqu’à l’attribution du contrat. L’administration des marchés est une phase distincte qui a lieu à la suite du processus d’approvisionnement. Elle traite des questions qui surviennent au cours de l’exécution et de la gestion d’un marché public. Le Tribunal a clairement indiqué que les questions relatives à l’administration des marchés ne relèvent pas de sa compétence[3].

[16]           WW-ISS affirme que le soumissionnaire retenu utilisait des véhicules à essence et n’exécutait donc pas le contrat conformément à ses exigences. La question de savoir si MLS a effectivement violé son contrat avec le MAECD est une question d’administration des marchés. Par conséquent, cet aspect de la plainte ne relève pas de la compétence du Tribunal.

DÉCISION

[17]           Aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal décide de ne pas enquêter sur la plainte.

Jean Bédard

Jean Bédard, c.r.
Membre présidant

 



[1]      L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.) [Loi sur le TCCE].

[2]      DORS/93-602 [Règlement].

[3]      Vidéotron Ltée c. Services partagés Canada (5 octobre 2018), PR-2018-006 (TCCE) au par. 16; Softsim Technologies Inc. (19 décembre 2018), PR-2018-032 (TCCE) au par. 41; Valcom Consulting Group Inc. c. Ministère de la Défense nationale (14 juin 2017), PR-2016-056 (TCCE) au par. 32; HDP Group Inc. (28 décembre 2016), PR-2016-047 (TCCE) au par. 10; ML Wilson Management c. Agence Parcs Canada (6 juin 2013), PR-2012-047 (TCCE) au par. 36.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.