Enquêtes sur les marchés publics

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Dossier no PR-2019-060

Valley Associates Global Security Corporation

c.

Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux

Décision rendue
le lundi 29 juin 2020

Motifs rendus
le jeudi 23 juillet 2020

 



EU ÉGARD À une plainte déposée par Valley Associates Global Security Corporation aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.);

ET À LA SUITE D’une décision d’enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

ENTRE

VALLEY ASSOCIATES GLOBAL SECURITY CORPORATION

Partie plaignante

ET

LE MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

Institution fédérale

DÉCISION

Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur (Loi sur le TCCE), le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte n’est pas fondée.

Néanmoins, aux termes de l’article 30.16 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal accorde à Valley Associates Global Security Corporation une indemnité raisonnable pour les frais engagés pour la préparation de sa plainte, indemnité qui doit être versée par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux. Conformément à la Ligne directrice sur la fixation des frais dans une procédure de plainte portant sur un marché public (Ligne directrice), le Tribunal détermine provisoirement que le degré de complexité de la présente plainte correspond au degré 2 et que le montant de l’indemnité est de 2 750 $. Si l’une ou l’autre des parties n’est pas d’accord en ce qui a trait à la détermination provisoire du degré de complexité ou du montant de l’indemnité, elle peut déposer des observations auprès du Tribunal, en conformité avec l’article 4.2 de la Ligne directrice. Il relève de la compétence du Tribunal de fixer le montant définitif de l’indemnité.

Susan D. Beaubien

Susan D. Beaubien
Membre présidant

L’exposé des motifs suivra à une date ultérieure.


 

Membre du Tribunal :

Susan D. Beaubien, membre présidant

Personnel de soutien :

Peter Jarosz, conseiller juridique

Partie plaignante :

Valley Associates Global Security Corporation

Conseiller juridique de la partie plaignante :

Vincent Routhier

Institution fédérale :

ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux

Conseillers juridiques de l’institution fédérale :

Susan Clarke
Roy Chamoun
Nicholas Howard
Benjamin Hiemstra

Veuillez adresser toutes les communications au :

Greffier
Secrétariat du Tribunal canadien du commerce extérieur
15e étage
333, avenue Laurier Ouest
Ottawa (Ontario)  K1A 0G7

Téléphone : 613-993-3595
Télécopieur : 613-990-2439
Courriel : tcce-citt@tribunal.gc.ca

 


EXPOSÉ DES MOTIFS

APERÇU

[1]  Valley Associates Global Security Corporation (Valley) a déposé une plainte [1] auprès du Tribunal concernant un appel d’offres pour la fourniture d’un « équipement de recherche à haut risque » et l’issue de cet appel d’offres.

[2]  La procédure du marché public était administrée par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (TPSGC) pour le compte du ministère de la Défense nationale (MDN). Une demande de propositions (invitation no W8476-195904/A) a été publiée le 15 avril 2019 et a pris fin le 30 juillet 2019 (DP) [2] .

[3]  TPSGC a attribué le contrat à Med-Eng Holdings (Med-Eng), le soumissionnaire retenu, le 9 décembre 2019. Selon les estimations de Valley, la valeur du contrat s’établissait à 23 342 842,23 $ [3] , mais TPSGC a confirmé par la suite au Tribunal que la valeur du contrat attribué à Med-Eng s’élève à 6 793 514,95 $ [4] .

[4]  Valley affirme que la soumission de Med-Eng est non conforme. Elle soutient aussi que la procédure du marché public était inéquitable, ce qui a suscité une crainte de parti pris et de partialité. Plus particulièrement, Valley fait valoir que Med-Eng est intervenue dans la procédure du marché public par des « voies détournées et de façon secrète » [traduction] pour que des modifications à des spécifications clés de la DP soient apportées à un stade avancé de la procédure du marché public. Par conséquent, Valley affirme, d’une part, que la procédure du marché public était inadéquate et inéquitable, et, d’autre part, qu’elle a subi un préjudice, car elle n’a pas été en mesure de réagir lorsque les modifications ont été apportées aux spécifications de l’appel d’offres. Valley soutient aussi avoir subi un préjudice du fait que le processus d’évaluation était inadéquat [5] .

[5]  Valley a demandé sans succès à TPSGC de réparer le préjudice [6] . Le 13 février 2020, Valley a déposé la présente plainte [7] .

[6]  Le Tribunal a examiné la plainte de Valley, conformément au paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE. Le 20 février 2020, le Tribunal a décidé d’enquêter sur la plainte déposée par Valley. L’avis de la décision a été publié dans la Gazette du Canada le 29 février 2020.

HISTORIQUE DE LA PROCÉDURE

[7]  À l’appui de sa plainte, Valley a présenté une déclaration sous serment de son président, Michael Martin [8] .

[8]  TPSGC a déposé le Rapport de l’institution fédérale (RIF) [9] , accompagné d’une déclaration sous serment de Neil Schubert [10] , un gestionnaire de projet et ingénieur au MDN. M. Schubert, responsable technique et gestionnaire de projet adjoint chargé de l’appel d’offres en question, a participé à toutes les phases de l’appel d’offres, notamment à titre de membre de l’équipe responsable de l’évaluation des soumissions [11] .

[9]  Valley a présenté une réponse au RIF [12] . TPSGC s’est opposé à la réponse de Valley, car celle-ci soulevait de nouvelles questions qui n’étaient pas définies dans la plainte originale, affirmant essentiellement que Valley fractionnait sa preuve [13] . Avec l’autorisation du Tribunal [14] , TPSGC a déposé une brève contre-réponse en se limitant aux prétendues nouvelles questions soulevées [15] .

[10]  Valley [16] et TPSGC [17] ont présenté leurs observations écrites sur le fond de l’affaire.

[11]  Compte tenu des prolongations de la procédure demandées par les parties et des limites liées à l’état d’urgence dans le cadre de la pandémie de COVID-19, le Tribunal a prorogé le délai de façon à ce que la présente enquête soit effectuée en 135 jours, conformément à l’alinéa 12c) du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics.

CONTEXTE FACTUEL

[12]  La question en litige en l’espèce porte sur le déroulement d’une procédure de marché public pour l’acquisition de matériel défini comme de l’« équipement de recherche à haut risque et outils de détection multi-menaces » (équipement de RHR) à des fins d’utilisation par le MDN, ainsi que le service de soutien afférant au produit.

[13]  Le marché public s’inscrit dans le cadre d’une évaluation continue des besoins en matière d’équipement pour l’Armée canadienne concernant la capacité de recherche à haut risque, qui a été commencé en 2012 par le Directeur – Besoins en ressources terrestres (DBRT) de l’Armée. Il existe plusieurs types d’équipement opérationnel requis pour la capacité de recherche à haut risque, dont l’équipement de RHR [18] .

[14]  L’équipement de RHR est décrit comme un ensemble d’outils de recherche hautement spécialisés conçus pour permettre au personnel des Forces canadiennes d’effectuer des recherches afin de trouver des menaces d’explosion soupçonnées dans des situations à haut risque [19] , comme des engins explosifs improvisés qui pourraient être cachés ou dissimulés [20] . Destiné à être utilisé dans les situations à haut risque, l’équipement de RHR est conçu de façon à permettre à l’utilisateur d’être très mobile tout en assurant la sûreté et en réduisant au minimum les encombrements opérationnels [21] .

[15]  En 2014-2015, M. Schubert a collaboré avec le DBRT pour définir les exigences de l’équipement de RHR, en tenant compte des besoins de l’Armée, des produits offerts sur le marché et des contraintes budgétaires [22] . Le processus de définition des exigences de l’équipement de RHR englobait des analyses, des démonstrations de produits, des essais et des évaluations par les utilisateurs potentiels [23] .

[16]  À la suite de ces démarches, un Énoncé des travaux a été préparé en septembre 2015 pour encadrer l’acquisition éventuelle de l’équipement de RHR [24] . L’Énoncé des travaux prévoyait des exigences obligatoires pour certaines des composantes individuelles de l’équipement de RHR [25] .

[17]  L’Énoncé des travaux a été publié sur le site Web achatsetventes.gc.ca. Les fournisseurs éventuels ont été invités à fournir des commentaires sur les exigences de l’équipement de RHR. La période de la demande de renseignements (DR) s’étendait du 3 novembre 2016 au 30 janvier 2017 [26] .

[18]  Med-Eng et un tiers, The Deltic Group Inc. (Deltic), ont répondu à la DR. Valley n’a présenté aucune observation [27] .

[19]  Les réponses à la DR ont donné lieu à d’autres révisions de l’Énoncé des travaux. M. Schubert affirme que ces changements ont été apportés en consultation avec le DBRT et prévoyaient notamment une échelle d’assaut et un ouvre-porte hydraulique. Ces changements auraient été apportés pour que les spécifications puissent être respectées en utilisant des composantes « standards » [traduction] offertes sur le marché [28] .

[20]  Le projet est entré dans sa phase de mise en œuvre en septembre 2017. Une équipe [29] , composée notamment de M. Schubert (à titre de responsable technique du MDN) et de l’autorité contractante de TPSGC ont préparé la demande de propositions (DP). M. Schubert affirme que la DP se fondait sur les exigences de l’équipement de RHR définies lors des consultations avec le DBRT et sur les réponses à la DR [30] .

[21]  Selon la DP, les soumissionnaires éventuels pouvaient démontrer la conformité technique aux exigences obligatoires en présentant les résultats des essais sur le terrain de l’équipement ou en attestant que l’équipement était conforme [31] . Malgré la complexité technique des exigences obligatoires et des conditions prévues d’utilisation de l’équipement (utilisation militaire dans des situations à haut risque), la plupart des critères pouvaient être respectés au moyen d’une attestation de conformité seulement, sans autre essai ou vérification par le MDN ou TPSGC [32] .

[22]  La DP a été publiée le 15 avril 2019 et a pris fin le 17 juin 2019 [33] . La DP comptait 293 pages au total. Environ 250 pages de la DP portaient sur une description détaillée des exigences techniques et des spécifications de divers types d’articles individuels et de systèmes qui forment l’équipement de RHR [34] .

[23]  Plusieurs demandes de prolongation de l’appel d’offres ont été présentées par les soumissionnaires éventuels, y compris Valley. En définitive, la date de clôture de l’appel d’offres a été reportée au 30 juillet 2019 [35] .

[24]  Du 15 avril au 15 juillet 2019, TPSGC a reçu 62 demandes de clarification de la part de soumissionnaires éventuels. TPSGC a publié 13 modifications officielles au contrat [36] .

[25]  Le 19 juin 2019, Med-Eng a présenté une opposition à TPSGC concernant les spécifications d’une composante en particulier de l’équipement de RHR, à savoir le système d’ouvre-porte hydraulique (SOPH). Selon Med-Eng, seul un système commercial en particulier (Libervit Door Raider System) respectait les spécifications du SOPH [37] .

[26]  Selon Med-Eng, le recours obligatoire au Libervit Door Raider System ferait pratiquement de l’appel d’offres un marché à fournisseur unique [38] . En effet, Med-Eng n’aurait apparemment pas été en mesure de fournir le système Libervit. Par conséquent, Med-Eng a demandé que le SOPH fasse l’objet d’un marché distinct ou que les spécifications du SOPH soient assouplies de façon à ce que les soumissionnaires puissent se livrer concurrence pour obtenir le contrat en proposant des ouvre‑portes hydrauliques provenant d’autres fabricants d’équipement d’origine (FEO) que Libervit [39] .

[27]  Avant de recevoir la communication de Med-Eng, M. Schubert croyait que les produits de Libervit étaient facilement accessibles [40] .

[28]  Med-Eng a également demandé que d’autres changements soient apportés aux spécifications relatives au SOPH, y compris que la force d’étalement soit réduit de 60 kN à 20 kN [41] .

[29]  Selon M. Schubert, les renseignements fournis par Med-Eng ont amené l’équipe de projet du MDN/de TPSGC à se demander si le marché était ouvert et concurrentiel. L’équipe de projet a examiné les spécifications relatives au SOPH avec l’Armée [42] .

[30]  Peu après, un autre soumissionnaire éventuel (Deltic) a fait part de ses préoccupations concernant le SOPH, lesquelles correspondaient essentiellement à celles de Med-Eng. Deltic a affirmé que certaines exigences, notamment la force d’étalement et les dimensions de poids, ne pouvaient être satisfaites que par le Libervit Door Raider System, un système que Deltic était incapable de se procurer. Deltic a demandé que la spécification relative au SOPH soit assouplie afin que d’autres systèmes concurrentiels puissent être envisagés ou substitués, ou que l’acquisition du SOPH fasse l’objet d’un marché concurrentiel distinct [43] .

[31]  Les propos de Deltic ont contribué à renforcer les préoccupations à l’interne suscitées par les affirmations de Med-Eng au sujet de la rigueur des spécifications relatives au SOPH [44] . Après des discussions à l’interne, l’Armée a confirmé que certains changements aux spécifications du SOPH pourraient être apportés pour rendre la procédure du marché public plus concurrentielle, tout en respectant les besoins opérationnels de l’Armée [45] .

[32]  Par conséquent, l’exigence obligatoire O42 de la DP a été modifiée pour assouplir la spécification de la force d’étalement en la faisant passer de 60 kN à 50 kN (ce qui est inférieur à la réduction de 20 kN demandée par Med-Eng). La longueur requise du câble de télécommande a été réduite de 150 m à 130 m [46] . D’autres changements ont été apportés aux spécifications techniques, notamment un changement au temps maximal de charge de la batterie et la permission d’utiliser un cylindre à entraînement pneumatique-hydraulique en plus de l’outil d’ouverture hydraulique pour ce qui est du SOPH, entre autres [47] .

[33]  Tous ces changements aux spécifications relatives au SOPH étaient considérés comme acceptables par l’Armée, compte tenu de ses besoins opérationnels [48] .

[34]  M. Schubert a informé TPSGC de la décision de l’Armée de modifier les spécifications relatives au SOPH pour favoriser la concurrence [49] . Par conséquent, TPSGC a publié la modification no 11 à la DP le 3 juillet 2019 et a reporté la date de clôture de l’appel d’offres au 16 juillet 2019 [50] .

[35]  Valley soutient que la modification no 11 constitue le premier changement important apporté aux exigences de l’appel d’offres, bien que 62 demandes de clarification aient été présentées auparavant par les soumissionnaires entre le 15 avril 2019 et le 15 juillet 2019 [51] . Elle affirme en outre que la modification n11 équivaut à une nouvelle version de 155 pages de l’Énoncé des travaux publiée quelques jours avant la date de clôture de l’appel d’offres sans autre contexte ni autre information permettant d’expliquer pourquoi le changement a été apporté.

[36]  Après avoir examiné la modification no 11, Valley a conclu que les spécifications révisées relatives au SOPH correspondaient à un système fabriqué par Holmatro [52] . Selon Valley, le système Holmatro, conçu pour être utilisé par les escouades tactiques des services de police, doit être utilisé de pair avec un autre équipement de soutien complet, ce qui n’est pas mentionné dans la version révisée des spécifications de la DP.

[37]  À titre de comparaison, Valley décrit le système Libervit comme étant un système « intégral » [traduction] qui est utilisé par les forces de l’OTAN et exclusivement par le COMFOSCAN. Le système Libervit englobe toutes les composantes nécessaires pour l’exécution du type de missions décrites dans la DP [53] .

[38]  Valley soutient que le système Holmatro en soi n’est pas en mesure de répondre aux spécifications obligatoires de la DP. Par exemple, le système Holmatro ne peut ouvrir que deux ou trois portes (selon le type de cadre) [54] , contrairement au système Libervit qui permet d’ouvrir de six à huit portes au moyen d’un seul cylindre d’air, comme l’exige la DP. Pour compenser ce manque à gagner, Valley affirme que le personnel du MDN devra transporter du matériel supplémentaire (non prévu par la modification no 11) qui excède les restrictions de travail obligatoires prévues par l’Énoncé des travaux [55] .

[39]  Par conséquent, la publication de la modification no 11 a amené Valley à poser certaines questions et à présenter des demandes de clarification [56] . Ces questions et demandes ont été reçues par TPSGC et transmises à M. Schubert, mais l’identité de l’auteur de ces demandes n’a apparemment pas été communiquée à M. Schubert à ce moment-là [57] .

[40]  Dans ses demandes de clarification, Valley s’est dite préoccupée du fait que les spécifications modifiées visent de l’équipement inadéquat pour l’utilisation sur le terrain et pourrait compromettre la sécurité opérationnelle du personnel des Forces armées. Elle a également demandé à obtenir la confirmation qu’un essai sur le terrain de l’équipement proposé serait réalisé dans le cadre du processus d’évaluation des soumissions, plutôt que soit présentée une attestation de conformité. Valley a également demandé une autre prolongation de la date de clôture de l’appel d’offres [58] .

[41]  M. Schubert affirme que les risques et les avantages de la présentation d’attestations de conformité avaient déjà été analysés. Comme le MDN souhaitait se procurer de l’équipement « standard » [traduction], les attestations de conformité étaient jugées acceptables, d’autant plus que les essais d’évaluation de la phase 2 devaient avoir lieu à un stade ultérieur du processus d’évaluation, pour les équipements pouvant présenter un risque de défaillance potentiellement plus élevé [59] .

[42]  Cependant, en réponse à la demande de Valley, la date de clôture de l’appel d’offres a de nouveau été reportée au 30 juillet 2019 dans le cadre de la modification no 12 à la DP [60] .

[43]  Après la publication de la modification no 12, M. Martin a communiqué avec Holmatro et a été informé que Med-Eng collaborait avec le MDN pour faire modifier les spécifications relatives au SOPH de sorte que le système Holmatro puisse être proposé en tant que partie intégrante de l’équipement de RHR [61] .

[44]  M. Schubert a affirmé qu’il n’avait eu aucun contact direct avec Med-Eng ou Deltic durant la procédure du marché public, hormis pour recevoir leurs oppositions et demandes de clarification écrites [62] adressées à TPSGC [63] , lesquelles ont donné lieu à la publication de la modification no 11.

[45]  À la date de clôture de l’appel d’offres, TPSGC avait reçu les soumissions de Valley, Med‑Eng et Deltic [64] .

[46]  Les soumissions ont été évaluées en deux phases par une équipe d’évaluateurs. Durant la première phase, les soumissions ont été évaluées en fonction de leur conformité aux exigences obligatoires prévues dans la DP. Pour certaines exigences, les soumissionnaires ont dû présenter une attestation de conformité (AC) dans laquelle le soumissionnaire devait décrire de quelle façon l’équipement proposé respectait l’exigence. Pour d’autres exigences, la DP prévoyait que les soumissionnaires devaient fournir un rapport d’essai, à savoir des documents sur les essais prouvant la conformité de l’équipement proposé aux spécifications.

[47]  À l’issue de la première phase de l’évaluation, les trois soumissions ont été jugées conformes aux modalités de la DP [65] .

[48]  Dans le cadre de la deuxième phase de l’évaluation, le MDN devait mettre à l’essai différents échantillons fournis par les soumissionnaires [66] . Seul un petit sous-ensemble de l’équipement de RHR décrit dans la demande devait être mis à l’essai [67] . Les essais se sont terminés en novembre 2019 et les trois soumissionnaires ont réussi [68] .

[49]  Comme les trois soumissions ont été jugées conformes à la DP, mais que celle de Med-Eng était la moins-disante, le contrat a été attribué à Med-Eng le 4 décembre 2019. Dans une lettre datée du 9 décembre 2019, Valley a été informée que sa soumission était conforme, mais que le contrat était attribué à un soumissionnaire moins-disant [69] .

[50]  À la demande de Valley, une réunion de compte rendu a eu lieu le 16 décembre 2019. Durant cette réunion, Valley a fait part de ses préoccupations à TPSGC concernant la procédure du marché public. Le 19 décembre 2019, Valley a écrit à TPSGC pour lui fournir un résumé de la discussion à la réunion, lequel se fondait sur les notes prises par les représentants de Valley à la réunion [70] .

[51]  Dans sa réponse à Valley du 31 janvier 2020, TPSGC a contesté la description faite par Valley du déroulement de la réunion de compte rendu [71] .

[52]  Valley a déposé sa plainte auprès du Tribunal [72] et a présenté simultanément des demandes d’accès à l’information, demandant que soient fournis les documents relatifs à la procédure du marché public [73] .

POSITIONS DES PARTIES

[53]  La plainte de Valley est fondée sur trois motifs :

a)  le contrat d’acquisition de l’équipement de RHR a été attribué à un soumissionnaire (Med-Eng) dont la soumission ne respectait pas dans une large mesure les spécifications techniques obligatoires;

b)  la procédure du marché public était inéquitable et elle a donné lieu à une crainte de parti pris et de partialité, en raison de communications ex parte entre le MDN, TPSGC et d’autres soumissionnaires;

c)  la procédure du marché public était inéquitable, car Valley n’a pas eu une occasion raisonnable de réagir aux modifications aux spécifications prévues dans l’appel d’offres (modification no 11) [74] , favorisant ainsi un autre soumissionnaire.

[54]  Valley soutient que la modification no 11 présente trois lacunes. Premièrement, les motifs à l’origine de la modification aux spécifications relatives au SOPH n’ont pas été énoncés ou étaient autrement obscurs. Deuxièmement, Valley ne disposait pas d’un délai suffisant pour composer avec les changements importants apportés dans la modification no 11. Troisièmement, Valley affirme que les spécifications révisées ne tenaient pas compte des coûts liés à l’équipement nécessaire pour compenser ou pallier les lacunes du système Holmatro et dont Med-Eng tirait avantage.

[55]  TPSGC fait valoir que la plainte de Valley n’est pas fondée pour les motifs suivants :

a)  la soumission de Med-Eng a été raisonnablement évaluée comme étant conforme;

b)  la plainte de Valley concernant le parti pris allégué et le manque de temps pour réagir à la modification no 11 est hors délai;

c)  Le Canada n’avait aucun parti pris en faveur ou à l’encontre d’un soumissionnaire. Les spécifications relatives au SOPH ont été modifiées pour favoriser une plus grande concurrence et pour obtenir un meilleur rapport qualité-prix;

d)  Valley n’a subi aucun préjudice en raison de la modification no 11, laquelle a assoupli les exigences de l’appel d’offres. De plus, Valley a obtenu exactement la prorogation du délai qu’elle avait demandé [75] .

ANALYSE

[56]  Selon les paramètres définis par la loi, le Tribunal doit limiter son enquête à ce qui suit :

Objet de la plainte

30.14 (1) Dans son enquête, le Tribunal doit limiter son étude à l’objet de la plainte.

Décision

(2) Le Tribunal détermine la validité de la plainte en fonction des critères et procédures établis par règlement pour le contrat spécifique ou la catégorie dont il fait partie.

[57]  L’article 11 du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics énonce ce qui suit :

Lorsque le Tribunal enquête sur une plainte, il décide si la procédure du marché public a été suivie conformément aux exigences de l’Accord sur les marchés publics, de l’ALÉCC, de l’ALÉCP, de l’ALÉCCO, de l’ALÉCPA, de l’ALÉCH, de l’ALÉCRC, de l’AÉCG, de l’ALÉC, de l’ALÉCU ou du PTP, selon le cas.

[58]  À l’appui de sa plainte, Valley invoque les dispositions suivantes des accords commerciaux : l’article 502.1, l’alinéa 507.3b, l’alinéa 509.2b, l’alinéa 509.7b, l’article 515.4 et l’alinéa 515.5b de l’ALEC, l’article 1007, l’article 1008, l’article 1009, l’article 1015.4 et l’article 1007 de l’ALENA et l’article 19.4, l’alinéa 19.73(b), l’article 19.9, l’article 19.14 et l’article 19.16 de l’AECG [76] .

[59]  La plainte de Valley est fondée sur trois motifs :

(a)  le contrat a été attribué à un fournisseur dont la soumission était en grande partie non conforme;

(b)  la procédure du marché public n’était pas équitable parce qu’elle était entachée de partialité ou d’une crainte de partialité;

(c)  Valley a subi un préjudice, car elle n’a pas bénéficié d’un délai raisonnable pour réagir aux changements apportés aux spécifications de l’appel d’offres.

Motif 1 : Le contrat a été attribué à un fournisseur dont la soumission était en grande partie non conforme

[60]  Le premier motif de plainte de Valley est que le contrat pour la fourniture de l’équipement de RHR a été attribué à un soumissionnaire dont la soumission est « non conforme » (c.‑à‑d. Med-Eng).

[61]  Valley soutient que la soumission de Med-Eng est « non conforme » parce que, en ce qui concerne les besoins opérationnels prévus, certaines composantes de l’équipement de RHR fournies par Med-Eng sont mal adaptées, ou autrement inadéquates ou incompatibles.

[62]  Valley expose ses préoccupations quant à la fonctionnalité et à la pertinence de certains aspects de l’équipement de RHR proposé. Certaines de ces préoccupations découlent, du moins en partie, des demandes par téléphone que Valley a adressées aux fabricants des composantes en question [77] . En l’occurrence, elles constituent des ouï-dire et il faut faire preuve de prudence dans leur appréciation.

[63]  Le Tribunal estime que la plainte de Valley porte essentiellement sur un prétendu manque de diligence raisonnable de la part du MDN dans le choix et la définition 1) des critères de l’équipement visé par la DP et dans 2) l’évaluation des paramètres et des critères en vue de l’analyse du rendement de l’équipement proposé par rapport aux spécifications de la DP.

[64]  Selon ces prétentions, la plainte revient à dire que les spécifications et les modalités de l’appel d’offres auraient dû être formulées de façon plus précise et plus rigoureuse et que les critères d’évaluation prévus étaient trop souples dès le départ. L’argument de Valley mène à la conclusion que ces lacunes ont fait en sorte que l’équipement acheté par le MDN représente une mauvaise optimisation des ressources et/ou qu’il est non fonctionnel au point où la sûreté de l’Armée pourrait être compromise.

[65]  Valley soutient aussi que, compte tenu des limites du système Holmatro, de l’équipement supplémentaire sera nécessaire pour compenser le rendement moins élevé que procure le système Holmatro. Les spécifications révisées ne tiennent pas compte des coûts supplémentaires de cet équipement. Essentiellement, Valley affirme que les spécifications révisées sont incomplètes ou autrement inadéquates, car elles ne permettent pas de définir l’équipement correspondant sur le plan opérationnel à ce qui était décrit dans l’Énoncé des travaux original.

[66]  L’entité acheteuse peut, à sa discrétion, définir les spécifications de l’appel d’offres de façon à répondre à ses besoins opérationnels légitimes [78] . Cependant, cette discrétion doit être raisonnablement exercée. Les exigences de l’appel d’offres ne doivent pas être discriminatoires, impossibles à satisfaire ou autrement déraisonnables [79] .

[67]  Bien que Valley soit clairement d’avis que l’équipement demandé tel que révisé et décrit dans la modification no 11 est inadéquat, le MDN ne souscrit pas à ce point de vue. Ce n’est pas parce que Valley a une opinion défavorable au sujet de l’équipement demandé que le MDN a agi de manière déraisonnable dans le choix de l’équipement faisant l’objet du marché public. L’appel d’offres était structuré de façon à obtenir des composantes standards que l’on croyait offertes sur le marché. Or, cette spécification n’est pas intrinsèquement discriminatoire ou impossible à remplir.

[68]  Dans ces circonstances, il n’appartient pas au Tribunal de déterminer ou de remettre en question le bien-fondé de la décision du MDN de prévoir un équipement précis dans le cadre d’un appel d’offres.

[69]  Par conséquent, le Tribunal doit s’en remettre à l’expertise et au jugement du MDN pour définir les besoins opérationnels et l’équipement nécessaire pour répondre à ces besoins dans le cadre du marché public. Cet exercice englobe vraisemblablement l’appréciation et la pondération de nombreux facteurs, notamment les besoins opérationnels, la fréquence prévue à laquelle l’équipement sera utilisé et le coût. Dans le cadre de cette démarche, il faut décider d’exclure ou de reporter l’achat d’équipement supplémentaire ou correctif pour compléter l’équipement acheté. Il n’appartient pas au Tribunal de se substituer au MDN et de restructurer ces variables. Cet exercice serait incompatible avec la norme de la décision raisonnable.

[70]  Le droit de définir les spécifications des biens achetés englobe la modification des spécifications durant la procédure du marché public, moyennant un avis à tous les soumissionnaires éventuels. En l’occurrence, toutes les demandes de clarification et tous les changements, dont la modification no 11, ont été dûment publiés et communiqués à tous les soumissionnaires.

[71]  Valley affirme aussi que la mise à l’essai effective de l’équipement proposé révélerait ses lacunes inhérentes en raison de l’incapacité de celui-ci à respecter les normes de rendement opérationnel. Or, comme le MDN a choisi d’accepter aux fins de l’évaluation des soumissions les attestations de conformité pour la plupart des composantes, plutôt que des rapports d’essai, il ne sera pas possible de vérifier si l’équipement de RHR est adéquat avant l’achat et la livraison.

[72]  Si l’analyse de Valley est juste, le MDN pourrait (ou non) avoir pris une décision d’achat peu judicieuse. Le cas échéant, le bien-fondé de cette décision sera révélé lorsque l’équipement sera livré et utilisé. Si le rendement de l’équipement n’est pas satisfaisant ou ne répond pas aux besoins opérationnels, le MDN devra envisager d’avoir recours aux mesures de redressement qui s’offrent à lui et les faire valoir.

[73]  Essentiellement, Valley affirme que ce résultat hypothétique devrait être évité en demandant au Tribunal d’aller au-delà de l’attestation de conformité fournie par les soumissionnaires.

[74]  En définissant les critères d’évaluation de l’équipement à fournir, le MDN a établi un seuil peu élevé en demandant que soient fournies des attestations de conformité plutôt que des rapports d’essai. Selon M. Schubert, ce choix s’explique par le fait que l’équipement en question est formé de composantes « standards » [traduction] qui ne doivent pas faire l’objet d’essais [80] .

[75]  Le Tribunal peut examiner le processus d’évaluation pour s’assurer qu’il a été mené de façon raisonnable et équitable. Ce faisant, toutefois, le Tribunal ne doit pas reformuler l’Énoncé des travaux ou les critères d’évaluation pour exiger des essais au lieu des attestations de conformité prévues dans l’appel d’offres.

[76]  La norme de la décision raisonnable s’applique à l’examen de l’évaluation des soumissions réalisée dans le cadre d’une procédure de marché public [81] . Comme le Tribunal le précise dans Samson & Associates :

Le Tribunal fait généralement preuve de déférence à l’égard des évaluateurs pour ce qui est de leur évaluation des propositions. Par conséquent, il a indiqué à maintes reprises qu’il interviendra relativement à une évaluation uniquement dans les cas où elle serait réputée déraisonnable et qu’il ne substituera pas son jugement à celui des évaluateurs à moins que les évaluateurs ne se soient pas appliqués à évaluer la proposition d’un soumissionnaire, qu’ils aient donné une interprétation erronée de la portée d’une exigence, qu’ils n’aient pas tenu compte de renseignements cruciaux fournis dans une soumission, qu’ils aient fondé leur évaluation sur des critères non divulgués ou que l’évaluation n’ait pas été effectuée d’une manière équitable du point de vue de la procédure. En outre, le Tribunal a déjà indiqué que la décision d’une entité publique sera jugée raisonnable si elle est fondée sur une explication défendable, même si elle n’est pas convaincante aux yeux du Tribunal [82] .

[Notes omises]

[77]  Le Tribunal estime que rien ne permet de conclure que les critères d’évaluation n’ont pas été raisonnablement pris en considération et appliqués par l’équipe d’évaluation [83] . Lorsqu’une attestation de conformité était exigée, elle était bien inscrite dans le formulaire d’évaluation.

[78]  Valley considère manifestement que le recours à des attestations de conformité ne constitue pas un paramètre adéquat pour apprécier la fonctionnalité opérationnelle, du moins pour ce qui est de certains équipements proposés. Même en supposant que ce soit le cas (et le Tribunal n’est parvenu à aucune conclusion du genre), l’évaluation en soi ne devient pas déraisonnable parce qu’elle repose sur une norme d’évaluation dont le seuil a été établi à un niveau peu élevé par les responsables de l’appel d’offres.

[79]  Par conséquent, les évaluateurs ne se sont pas montrés déraisonnables ni inéquitables sur le plan de la procédure en acceptant les attestations de conformité. En effet, il s’agissait de la norme établie. Comme l’appel d’offres n’a pas été formulé de façon à en exiger davantage, le Tribunal ne peut pas remettre en question l’exactitude technique des déclarations formulées dans les attestations de conformité.

[80]  Si, ultérieurement, le contenu ou les déclarations des attestations de conformité sont jugés non conformes aux faits parce que l’équipement ne fonctionne pas comme prévu, cette lacune pourra être attribuable, au moins en partie, à la norme établie comme critère d’évaluation au moment où l’appel d’offres a été préparé à l’origine, et non à une application déraisonnable de la norme au stade de l’évaluation.

[81]  Le Tribunal ne peut pas modifier rétroactivement la norme en concluant que l’équipe d’évaluation aurait dû évaluer les soumissions en utilisant une autre norme plus élevée en ce qui concerne le rendement ou la fonctionnalité de l’équipement. En fait, cette démarche permettrait l’application de critères différents ou non divulgués, ce qui, par conséquent, serait inéquitable sur le plan de la procédure.

[82]  Dans sa réponse au RIF, Valley a développé son argumentation et a affirmé que d’autres spécifications et leur évaluation, notamment pour ce qui est du système d’aide à la vision portable (AVP), présentaient les mêmes lacunes [84] . TPSGC a contesté ces arguments, affirmant que Valley a fractionné sa preuve [85] .

[83]  Le Tribunal conclut que les motifs énoncés précédemment s’appliquent également aux autres éléments de la plainte de Valley concernant les spécifications de l’appel d’offres, comme le système d’AVP, et qu’ils sont décisifs. Compte tenu de cette conclusion, le Tribunal n’est pas tenu de déterminer si les observations de Valley présentées le 27 avril 2020 constituent une réponse appropriée.

Motif 2 : La procédure du marché public était inéquitable, car elle était entachée d’une crainte de parti pris et de partialité

[84]  Ce motif de la plainte de Valley est lié aux circonstances qui ont donné lieu à la modification no 11.

[85]  Dès le début de l’appel d’offres, publié le 5 avril 2019, TPSGC a reçu de nombreuses demandes de clarification de la part de soumissionnaires éventuels. Il semble que ces demandes aient été envoyées par TPSGC à M. Schubert, à titre de gestionnaire de projet du MDN chargé de ce marché en particulier, à des fins d’examen et de commentaires. Dans la déclaration sous serment de M. Schubert, il est sous-entendu que l’identité de l’auteur de la demande de clarification ne lui aurait pas nécessairement été révélée [86] .

[86]  Cependant, cette procédure ne semble pas avoir été suivie en ce qui concerne l’opposition présentée par Med-Eng le 15 juin 2019.

[87]  Med-Eng a affirmé que les spécifications du SOPH faisaient de l’appel d’offres un marché à fournisseur unique et, par conséquent, celui-ci était illégal :

La façon dont l’EDT est formulé à la page A13 contrevient aux accords commerciaux applicables, ce qui porte atteinte à l’intégrité du système d’approvisionnement du Canada [87] .

[Traduction]

[88]  À l’appui de cet argument, Med-Eng a joint une copie de la correspondance envoyée à Valley, dans laquelle elle demande à cette dernière de lui fournir le système Libervit en vue de sa participation à la procédure du marché public en question. Valley a refusé, affirmant qu’elle comptait présenter sa propre soumission. Med-Eng a ensuite communiqué avec le fabricant européen du système Libervit pour se renseigner sur la possibilité de se procurer le système directement auprès de lui. Le fabricant a refusé de fournir le système à Med-Eng compte tenu du contrat conclu avec Valley, lequel accordait à cette dernière les droits de distribution exclusifs du système Libervit au Canada.

[89]  Peu de temps après, M. Schubert a su qu’un troisième soumissionnaire éventuel (Deltic) affirmait également que l’appel d’offres était dans les faits un marché à fournisseur unique, car seul le système Libervit respectait les spécifications relatives au SOPH. On ignore si, à ce moment-là, d’autres soumissionnaires éventuels avaient manifesté leur intérêt à participer à la procédure du marché public (c.-à-d. selon les demandes de clarification présentées auparavant, sans lien avec la présente affaire).

[90]  Quoi qu’il en soit, TPSGC et le MDN (par l’entremise de M. Schubert) avaient en main la correspondance de deux des trois soumissionnaires éventuels connus. Cette correspondance ne visait pas simplement à présenter une demande ou à fournir une justification pour que soit apportée une modification aux spécifications en partant du principe qu’un autre équipement pouvait être fourni en remplacement du système, si sa valeur était démontrée. Les soumissionnaires allaient beaucoup plus loin, informant le MDN que le troisième fournisseur éventuel (Valley) refusait de fournir l’équipement demandé à des concurrents éventuels et que les spécifications existantes relatives au SOPH conféraient un « avantage inapproprié et injuste » [traduction] au système Libervit [88] .

[91]  Bien que TPSGC et le MDN n’étaient pas tenus d’aviser Valley de la correspondance reçue de Med-Eng et Deltic, l’omission de communiquer cette information, compte tenu du contexte en l’occurrence, était une décision peu judicieuse. Par cette observation, le Tribunal n’affirme pas qu’une entité acheteuse doive consulter tous les soumissionnaires éventuels avant de prendre une décision sur le bien-fondé d’une demande de clarification.

[92]  En l’espèce, deux des trois soumissionnaires éventuels ont affirmé, ex parte, que l’appel d’offres était un marché à fournisseur unique et, par conséquent « inéquitable », car un troisième soumissionnaire éventuel (Valley) refusait de fournir à ses concurrents une composante des biens faisant l’objet du marché. Ces affirmations peuvent être considérées comme une plainte contre le troisième soumissionnaire ou peuvent même être interprétées (du moins dans une certaine mesure) comme une attaque contre un autre soumissionnaire (Valley). Compte tenu des faits de l’espèce, par souci de prudence et de conformité aux pratiques exemplaires, TPSGC aurait dû informer Valley de ce qui était affirmé.

[93]  Le Tribunal souscrit à l’argument convaincant de Valley, à savoir que d’accepter de fournir des concurrents dans le cadre d’un marché public auquel Valley elle-même participe pourrait donner l’impression qu’il y a collusion entre les soumissionnaires [89] . Le Tribunal fait aussi remarquer que le dossier ne démontre pas clairement que Med-Eng n’aurait pas été en mesure de se procurer le système Libervit par d’autres moyens, comme l’achat auprès d’un courtier ou l’acquisition de l’équipement par l’entremise d’une filiale ou d’une entité liée. Med-Eng a simplement fait part de son incapacité à obtenir le système Libervit par les voies commerciales les plus directes et les plus pratiques. Elle n’a pas démontré que toutes les autres options possibles étaient soit inaccessibles, soit trop contraignantes [90] .

[94]  Par conséquent, le marché public en question aurait dû être géré de façon plus efficace et plus transparente, même si la décision prise concernant l’appel d’offres n’a eu aucune incidence sur le résultat global.

[95]  Une réponse claire et explicite à la correspondance de Med-Eng, réfutant les prétentions de cette dernière selon lesquelles les accords commerciaux excluent catégoriquement les fournisseurs uniques, aurait permis de dissiper l’impression que le MDN puisse envisager de modifier les spécifications du SOPH autrement que par un examen attentif des besoins opérationnels évalués en fonction du coût et par la volonté de favoriser une concurrence accrue.

[96]  Néanmoins, le Tribunal conclut également que la preuve ne permet pas de démontrer l’existence d’une partialité réelle ou d’une apparence de partialité à l’encontre de Valley durant la procédure du marché public.

[97]  Dans l’arrêt Cougar Aviation Ltd. c. Canada (Ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux), la Cour d’appel fédérale a confirmé que l’équité dans les affaires de marchés publics englobe l’obligation d’agir avec impartialité [91] . Cette obligation consiste à éviter non seulement la partialité réelle, mais aussi la crainte raisonnable de partialité [92] .

[98]  Le critère applicable à la crainte raisonnable de partialité est formulé comme suit :

[À] quelle conclusion en arriverait une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique. Croirait-elle que, selon toute vraisemblance [cette personne], consciemment ou non, ne rendra pas une décision juste [93] ?

[99]  L’évaluation de la crainte raisonnable de partialité dépend du contexte [94] . La bonne foi et l’honnêteté des fonctionnaires responsables de la procédure du marché public sont présumées [95] . Une allégation de parti pris ou de partialité doit être étayée par des éléments de preuve probants [96] . En l’espèce, il n’y en avait pas.

[100]  Le Tribunal a affirmé à maintes reprises qu’une procédure d’appel d’offres n’est pas intrinsèquement inéquitable ou partiale simplement parce que les soumissionnaires éventuels ne sont pas tous sur un même pied d’égalité ou que certains soumissionnaires, en raison de leurs circonstances, disposent d’un avantage par rapport aux autres soumissionnaires [97] .

[101]  Il est également établi qu’une entité acheteuse peut modifier les spécifications de l’appel d’offres en vue d’accroître la concurrence durant la procédure du marché public. Une procédure ouverte et compétitive est souhaitable et constitue la norme présumée. Aucune disposition des accords commerciaux ne vise à interdire ou à éviter une concurrence plus grande ou excessive. Par conséquent, l’assouplissement des spécifications d’un appel d’offres pour accroître la concurrence peut avoir pour effet de modifier l’équilibre qui existait auparavant entre les soumissionnaires. Cependant, ces modifications ne donnent pas lieu à de la partialité ou à de l’iniquité à moins qu’il soit établi que les changements apportés avaient pour but de favoriser un soumissionnaire par rapport à d’autres [98] .

[102]  Aucun élément de preuve convaincant ne permet de croire que la décision de modifier les spécifications relatives au SOPH ait été prise précisément pour s’en prendre à Valley ou la désavantager ou pour favoriser explicitement Med-Eng.

[103]  La modification des spécifications n’a pas disqualifié Valley de l’appel d’offres. Valley pouvait proposer soit le système Holmatro, soit le système Libervit. Rien n’indique que Valley n’ait pas été en mesure d’obtenir ou de fournir le système Holmatro.

[104]  En élaborant sa stratégie en vue de sa participation à l’appel d’offres, Valley aurait pu évaluer si elle pouvait présenter une offre globalement rentable en proposant le système Libervit à prix réduit et en utilisant les autres composantes pour compenser la réduction de prix. En cas contraire, elle pouvait tout de même proposer le système Holmatro. Il est possible que la formulation de l’Énoncé des travaux et des critères n’ait pas incité les soumissionnaires à offrir un contenu à valeur ajoutée. Comme il suffisait de présenter une attestation de conformité pour satisfaire aux critères minimaux, aucun point supplémentaire n’était accordé pour la fourniture d’équipement excédant le seuil établi. Cependant, cette situation est due à la stratégie d’approvisionnement adoptée par l’entité acheteuse et la façon dont elle a choisi de formuler les spécifications de l’appel d’offres et les critères d’évaluation.

[105]  En outre, la soumission de Valley a été jugée conforme lors des deux phases du processus d’évaluation. Dans l’ensemble, Valley s’est classée au deuxième rang parmi les trois soumissionnaires et n’a pas obtenu le contrat en raison du coût – le prix proposé par Valley pour la fourniture de l’équipement de RHR était plus élevé que celui proposé par Med-Eng.

[106]  Par conséquent, l’assouplissement des exigences relatives au système SOPH a peut-être réduit l’avantage concurrentiel dont disposait Valley par rapport aux autres soumissionnaires au début de la procédure. Cependant, Valley n’a aucun droit à un avantage particulier ou au maintien de celui-ci tout au long de la procédure. Comme le Tribunal l’a affirmé dans la décision Almon, les soumissionnaires ne sont pas nécessairement sur un pied d’égalité pour un certain nombre de raisons commerciales légitimes et « [...] le gouvernement n’est pas obligé de compromettre ses besoins opérationnels légitimes pour tenir compte des circonstances particulières d’un fournisseur potentiel ou pour répondre aux besoins des fournisseurs » [99] .

[107]  Tout comme il n’y a aucune violation des accords commerciaux lorsque les exigences de l’appel d’offres sont strictes au détriment d’un soumissionnaire (comme c’était le cas dans la décision Almon), il n’y a aucune violation des accords commerciaux non plus lorsque l’entité acheteuse décide que de l’équipement moins sophistiqué permet tout de même de répondre aux besoins opérationnels, renonçant ainsi à certaines caractéristiques de l’équipement pour réaliser des économies potentielles découlant d’une procédure d’appel d’offres plus concurrentielle.

[108]  Dans ce contexte, le Tribunal conclut que le critère applicable à la partialité et à la crainte raisonnable de partialité n’est pas satisfait – une personne raisonnable ne parviendrait pas à la conclusion que la décision de renoncer à des caractéristiques de l’équipement pour réaliser des économies potentielles est partiale. Il peut s’avérer ou non par la suite qu’il s’agissait d’« économies de bout de chandelle » [traduction], ce qui ne fait toutefois pas en sorte que la décision est discriminatoire et contrevient aux accords commerciaux.

[109]  Le Tribunal est plus préoccupé du fait que Med-Eng a présenté une demande ex parte coercitive selon laquelle si les spécifications relatives au SOPH n’étaient pas modifiées, l’appel d’offres serait un marché public à fournisseur unique, ce qui contreviendrait aux accords commerciaux en soi.

[110]  Il n’est pas rare qu’un soumissionnaire signale à une autorité contractante qu’un marché public prévoit le recours à un fournisseur unique et demande s’il est possible de procéder à une substitution. Cependant, le fait d’affirmer que la procédure du marché public est illégale à moins que les spécifications ne soient modifiées pour satisfaire le soumissionnaire qui présente la demande peut être considéré comme de la coercition.

[111]  Le recours à un fournisseur unique en soi ne contrevient pas nécessairement aux accords commerciaux. Si tel était le cas, il serait interdit en tout temps à la Couronne de se procurer des biens qui peuvent être soumis à un monopole afférant à la propriété intellectuelle ou qui sont autrement exclusifs. Plus précisément, cette protection pourrait s’étendre aux technologies novatrices ou dernier cri. Il ne serait pas dans l’intérêt public que ces biens soient automatiquement mis hors de portée des marchés publics en raison d’une interdiction générale de recourir à un fournisseur unique.

[112]  Par conséquent, les modalités d’un appel d’offres dépendent des circonstances, conformément aux besoins de l’entité acheteuse, laquelle peut à sa discrétion définir les paramètres de la procédure du marché public en fonction de ses besoins. Ce faisant, les dispositions des accords commerciaux doivent être respectées.

[113]  Néanmoins, le contenu de l’opposition de Med-Eng pourrait bien être interprété comme si la prise d’une mesure était nécessaire pour mettre fin au statu quo, qui, comme l’affirme catégoriquement un soumissionnaire éventuel, est illégal. M. Schubert a décrit, en quelques mots seulement, la réaction du MDN à l’opposition de Med-Eng :

Les renseignements fournis par Med-Eng ont amené l’équipe de projet à se demander si le marché était ouvert et concurrentiel, et elle a examiné avec l’Armée le besoin lié au SOPH [100] .

[Traduction]

[114]  Le MDN et TPSGC lancent fréquemment des procédures de marché public. Par conséquent, ils doivent être considérés comme des entités relativement complexes ayant accès à des services de conseils juridiques, au besoin. Cependant, rien n’indique que des conseils juridiques aient été demandés en l’occurrence. Par conséquent, l’affirmation de Med-Eng concernant la contravention aux accords commerciaux a peut-être été acceptée a priori par l’équipe de projet et a servi de fondement à l’examen des spécifications relatives au SOPH. Subsidiairement, l’affirmation de Med‑Eng concernant la contravention aux accords commerciaux aurait pu être jugée non fondée et rejetée d’emblée.

[115]  Par conséquent, on ne sait pas si l’Armée a effectué l’examen des exigences relatives au SOPH en croyant à tort que des mesures correctives devaient être prises parce que le statu quo ne pouvait pas être maintenu. Le cas échéant, l’Armée aurait mal compris ses droits légaux en faisant le mauvais choix fondé sur l’affirmation selon laquelle un marché à fournisseur unique contrevient aux accords commerciaux en soi. Compte tenu de ces circonstances, l’examen des spécifications qui a donné lieu à la modification no 11 était peut-être axé sur la définition de spécifications relatives à l’équipement avec lesquelles l’Armée pouvait composer plutôt que celles qu’elle souhaitait ou dont elle avait besoin.

[116]  D’autre part, l’Armée aurait pu raisonnablement et rationnellement parvenir à la conclusion que les économies de coûts réalisées grâce à une procédure de marché public plus concurrentielle l’emportaient sur les caractéristiques et les avantages additionnels du système Libervit. Les renseignements selon lesquels il n’était pas possible de se procurer le système Libervit de façon concurrentielle auraient pu être considérés comme une occasion de réduire les coûts globaux de l’approvisionnement au moyen de modifications aux spécifications. Comme il est mentionné précédemment, l’Armée est la mieux placée pour évaluer les facteurs pertinents (y compris le type d’utilisation opérationnelle et la fréquence prévue de l’utilisation) pour la définition de ses besoins en matière d’approvisionnement. Dans le contexte général d’un marché public visant de multiples composantes, l’Armée peut fort bien placer plus bas dans sa liste de priorités un SOPH doté des caractéristiques du système Libervit, en particulier lorsque les coûts ou d’autres facteurs sont pris en considération. Au vu des principes établis dans les décisions Almon et Western Star, il s’agit d’un choix légitime.

[117]  Le RIF ne renferme pas la correspondance dans laquelle M. Schubert fait état de l’opposition de Med-Eng au MDN, ni aucun document subséquent produit à l’interne dans le cadre de l’évaluation par le MDN de la possibilité d’apporter une modification liée à cette opposition. Valley a présenté des demandes d’accès à l’information dans lesquelles elle demande à ce que lui soient transmis les documents relatifs à la procédure du marché public en question. Les demandes d’accès à l’information ont été présentées le même jour où Valley a déposé sa plainte auprès du Tribunal [101] . Les documents n’ont toujours pas été transmis à Valley [102] .

[118]  Les documents demandés par Valley pourraient (ou non) révéler que le MDN a modifié le SOPH en croyant à tort que ces changements devaient être apportés selon la loi pour corriger une DP qui aurait autrement « contrevenue » aux accords commerciaux. Sans ces documents, il y a une lacune dans le dossier de preuve. Le Tribunal se livrerait à de la spéculation s’il comblait cette lacune en concluant que la modification no 11 découlait d’un examen non indépendant ou autrement réalisé selon une incompréhension des droits légaux.

[119]  Cependant, il y a des éléments de preuve qui permettent de conclure que les spécifications relatives au SOPH ont été examinées de façon libre et indépendante par le MDN.

[120]  Dans sa plainte, Med-Eng insiste pour que les spécifications relatives au SOPH soient assouplies de façon à permettre que des systèmes autres que ceux des FEO soient admissibles ou que l’acquisition du SOPH soit exclue et fasse l’objet d’une procédure distincte. Par conséquent, il semble qu’une autre façon de modifier les spécifications aurait permis de donner suite à la plainte de Med-Eng. Cette autre façon de procéder n’a pas été retenue par le MDN.

[121]  Par ailleurs, le MDN n’a pas apporté toutes les modifications demandées par Med-Eng. Par exemple, Med-Eng a demandé à ce que la force d’étalement du SOPH soit réduite de 60 kN à 20 kN. La modification no 11 a modifié la spécification relative à la force d’étalement, en la faisant passer à 50 kN.

[122]  Le Tribunal souligne aussi que le MDN avait reçu auparavant une demande de clarification dans laquelle il était demandé que soient modifiées les spécifications d’un élément de l’appel d’offres (qui n’est pas visé par cette plainte) en faisant valoir qu’un marché à fournisseur unique serait requis. La demande a été refusée dans le cadre de la demande de clarification 3 de la modification no 1 :

3 – Demande de clarification

La sollicitation fait spécifiquement appel au cadre NICE et aux accessoires connexes. Cela crée une situation de fournisseur unique pour le fabricant. Envisageriez-vous un système de sac à dos entièrement conforme d’un autre fabricant?

3 – Réponse

Non, le Canada exige un système de transport de charge en service spécifié, tel que décrit dans l’ÉDT [103] .

[123]  Le maintien du cadre NICE malgré le recours à un fournisseur unique laisse entendre que le MDN savait qu’il pouvait, de bonne foi, rejeter les demandes de Med-Eng concernant les spécifications relatives au SOPH, même si, ce faisant, un marché à un fournisseur unique était établi.

[124]  Selon M. Schubert, avant de recevoir la plainte de Med-Eng, il croyait que le système Libervit pouvait être facilement obtenu. Par conséquent, le Tribunal en déduit que les spécifications initiales relatives au SOPH auraient pu être formulées de façon plus souple dès le départ si le MDN avait su que plusieurs soumissionnaires pourraient avoir de la difficulté à se procurer le système Libervit.

[125]  Par conséquent, le Tribunal conclut que, selon la preuve dont il dispose, même si en l’occurrence la procédure du marché public aurait pu être gérée de façon plus efficace et plus transparente, la preuve n’est pas suffisante pour démontrer que, compte tenu de ces lacunes, la procédure a donné lieu à de la partialité à l’encontre de Valley, qu’elle a suscité une crainte raisonnable de partialité ou qu’elle a été autrement inéquitable.

Motif 3 : Un délai raisonnable n’a pas été accordé pour permettre de réagir aux modifications apportées aux spécifications de l’appel d’offres

[126]  Bien que les spécifications relatives à l’équipement de RHR aient été élaborées dans le cadre d’un processus consultatif qui s’est étendu sur environ cinq ans, des modifications importantes ont été apportées à l’un des éléments (le SOPH) à une étape très avancée de la procédure.

[127]  Environ douze jours avant la fin de l’appel d’offres, TPSGC a apporté des modifications importantes aux spécifications relatives à une composante de l’équipement à fournir (le SOPH). Cette modification visait à assouplir les spécifications de façon à permettre à un soumissionnaire éventuel de fournir le système Holmatro ou le système Libervit.

[128]  Valley soutient que, en pratique, ce changement a eu pour effet d’abaisser le seuil de performance technique minimale au point où l’équipement serait mal adapté à l’utilisation opérationnelle prévue, voire inopérant. Pour les motifs énoncés précédemment, le Tribunal n’est pas en mesure d’apprécier le bien-fondé de cette affirmation ni de remettre en question les motifs qui ont poussé le MDN à apporter ce changement.

[129]  De toute évidence, Valley considère que le système Libervit est le meilleur système (pour ne pas dire le seul) permettant d’atteindre les objectifs opérationnels sur le terrain décrits dans la DP. Même si Valley détient les droits de distribution exclusifs du système Libervit au Canada, rien n’indique que les modalités de distribution limitent ou restreignent la capacité de Valley à fournir ou à obtenir des produits similaires, comme le système Holmatro. En fait, selon Valley, le système Holmatro et le système Libervit ne se font pas directement concurrence, car l’un est destiné aux escouades tactiques des services de police et l’autre aux militaires. Dans ce contexte, tous les soumissionnaires éventuels auraient été sur un pied d’égalité, car ils auraient pu proposer de fournir le système Holmatro au MDN. Valley aurait aussi pu proposer le système Libervit dans sa soumission, ce qu’elle a fait.

[130]  Si, comme l’affirme Valley, la modification no 11 était préjudiciable, elle aurait pu déposer une plainte auprès du Tribunal au moment où la modification a été publiée. Valley a plutôt choisi de demander une prorogation du délai, laquelle a été accordée. TPSGC a reporté la clôture de l’appel d’offres à la date précisée dans la demande de Valley.

[131]  Bien que Valley souligne que TPSGC l’ait informé qu’aucun autre report ne serait accordé, cette situation montre simplement que, si Valley jugeait que le délai accordé pour répondre à la modification no 11 était trop limité, elle devait absolument déposer une plainte à ce moment-là.

[132]  Néanmoins, Valley a pu présenter sa soumission en respectant le délai et celle-ci a été jugée conforme lors des deux phases du processus d’évaluation. Au final, le contrat a été accordé à Med‑Eng en fonction du prix. Il se peut fort bien que la différence de prix entre le système Holmatro proposé par Med-Eng et le système Libervit ait été l’un des éléments ayant contribué à l’écart de prix entre les soumissions de Med-Eng et de Valley. Il se peut même qu’il s’agisse d’un élément déterminant. Cependant, l’écart de prix découle de la décision de Valley de proposer le système Libervit à un coût ou à un prix donné, plutôt que de proposer le système Holmatro.

[133]  Le Tribunal conclut que Valley souhaitait fournir le système Libervit parce que, selon elle, il s’agissait d’un équipement supérieur et du système le mieux adapté aux besoins opérationnels du MDN. La modification no 11 n’a ni influencé ni modifié ce point de vue. En fait, Valley a toujours maintenu cette position, même lors du dépôt de la plainte et dans le cadre de celle-ci. Selon elle, les prétendues différences dans les caractéristiques de rendement entre le système Holmatro et le système Libervit permettent d’appuyer sa plainte, à savoir que la procédure du marché public présentait des lacunes.

[134]  Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que Valley était en mesure de réagir et de répondre à la modification no 11 et qu’elle n’a subi aucun préjudice en raison du moment où la modification a été apportée.

[135]  Subsidiairement, même si ce préjudice pourrait être démontré, il est trop tard pour que Valley puisse s’en plaindre.

[136]  Dans les affaires de marchés publics, le temps est un facteur essentiel. Un soumissionnaire qui découvre un vice de procédure grave doit réagir à ce moment-là. S’il attend le résultat du processus, il risque de ne pas respecter les délais prescrits [104] . Comme elle a demandé une prorogation du délai, qu’elle a accepté le délai accordé et qu’elle a déposé sa plainte, Valley a essentiellement renoncé à son droit de se plaindre plus tard, lorsque le contrat ne lui a pas été accordé, compte tenu du désavantage subi en raison d’un délai prescrit.

Sommaire

[137]  Le Tribunal doit respecter les délais prescrits pour régler les litiges en matière de marchés publics [105] . En l’espèce, le délai a été prorogé à la limite de la durée maximale, soit 135 jours. Le Tribunal ne dispose d’aucune autorité ni d’aucun pouvoir discrétionnaire pour proroger ce délai davantage, malgré l’état d’urgence décrété dans le contexte de la pandémie de COVID-19.

[138]  Par conséquent, le Tribunal doit rendre sa décision en fonction de la preuve qui lui a été présentée dans le délai prescrit. Pour les motifs énoncés précédemment, le dossier de preuve n’est pas aussi complet qu’il aurait pu l’être. Le RIF ne tient pas pleinement compte de la perception, du traitement et de l’examen à l’interne de la plainte ex parte de Med-Eng, où il est fait mention du refus de Valley de lui fournir le système Libervit et du fait que les spécifications initiales prévues dans l’appel d’offres contrevenaient en conséquence aux accords commerciaux et étaient illégales.

[139]  Après avoir examiné les dispositions des accords commerciaux citées par Valley dans sa plainte, le Tribunal conclut qu’aucun des agissements ou des évènements mentionnés dans la plainte ne contrevient à ces dispositions.

[140]  Bien que les affirmations de Med-Eng puissent être perçues comme des « conseils » transmis à l’autorité contractante par une partie intéressée, la preuve au dossier dont dispose le Tribunal ne permet pas de démontrer de façon convaincante que le MDN ou TPSGC ont été amenés, par erreur ou sous la contrainte, à modifier l’Énoncé des travaux parce qu’ils croyaient à tort que les spécifications existantes rendaient l’appel d’offres illégal, compte tenu des dispositions des accords commerciaux, et qu’ils ne jouissaient d’aucune discrétion pour ce qui est du maintien des spécifications initiales relatives au SOPH, même si celles-ci donnaient lieu à un marché à fournisseur unique.

[141]  Comme il est mentionné précédemment, des éléments de preuve permettent d’appuyer la conclusion selon laquelle la décision du MDN de modifier les spécifications relatives au SOPH a été prise indépendamment et se fondait sur la possibilité de réduire le coût global de l’achat de l’équipement de RHR au moyen d’un processus plus concurrentiel. Ce faisant, le MDN a peut-être décidé de faire certains compromis, mais cette décision lui appartient. La modification no 11 visait à accroître la concurrence en permettant aux autres soumissionnaires de proposer une solution opérationnelle autre que le système Libervit (qu’elle soit totalement équivalente ou non).

[142]  Pour les motifs énoncés précédemment, il n’y a pas suffisamment d’éléments de preuve pour que le Tribunal puisse conclure au bien-fondé des motifs de plainte de Valley. L’assouplissement des spécifications de l’appel d’offres en vue de favoriser une plus grande concurrence n’a pas donné lieu à de la partialité ou à une crainte raisonnable de partialité. La soumission d’un soumissionnaire retenu n’est pas non conforme parce qu’elle propose de l’équipement conforme aux spécifications modifiées et qui autrement n’aurait pas satisfait aux spécifications initiales. L’évaluation des soumissions n’est pas inéquitable parce que l’application de critères d’évaluation plus rigoureux, mais non prescrits, aurait donné lieu à des résultats différents s’ils avaient été précisés et utilisés.

FRAIS

[143]  Le Tribunal dispose d’un vaste pouvoir discrétionnaire concernant la réclamation de frais dans un litige en matière de marchés publics [106] .

[144]  Le Tribunal tient compte du principe général selon lequel les frais suivent habituellement l’issue de l’affaire [107] et ne sont pas destinés à servir de redressement en guise de solution de rechange pour une partie qui n’a pas eu gain de cause.

[145]  Cependant, la décision d’accorder une indemnité pour des frais (ou non) doit être prise en respectant les principes établis au vu des circonstances de l’espèce [108] .

[146]  Le Tribunal a conclu que la procédure du marché public présentait des lacunes, mais la preuve dont il dispose ne permet pas de démontrer que ces lacunes portent atteinte aux accords commerciaux pertinents ou qu’elles font en sorte que ne soient pas respectées les règles de la procédure du marché public, comme le prévoit la DP.

[147]  Le Tribunal a souligné à maintes reprises qu’il est important que le RIF présente des renseignements complets de façon transparente, sans en faire le tri et sans appliquer de stratégie [109] . Compte tenu des courts délais prescrits pour enquête sur les marchés publics et de la nature sommaire de la procédure, il est impératif que tous les documents pertinents soient communiqués au Tribunal. Le RIF est un facteur important pour le maintien de la confiance générale du public dans la procédure d’un marché public.

[148]  Au vu des faits en l’espèce, TPSGC a été informé très tôt [110] des préoccupations de Valley concernant la procédure du marché public, lesquelles découlaient, du moins en partie, du fait qu’elle avait été mise au courant que les autres soumissionnaires et fabricants ont communiqué ex parte avec le MDN et/ou TPSGC au sujet des spécifications relatives à l’équipement du SOPH. Valley ignorait (et ignore toujours) la portée de ces communications. Il s’agit d’allégations qui, si elles sont prises au pied de la lettre et ne sont pas réfutées de manière convaincante ou pleinement expliquées, peuvent soulever des questions concernant l’intégrité opérationnelle du système d’approvisionnement (du moins en l’espèce) et doivent faire l’objet d’un examen plus approfondi.

[149]  Valley a demandé que lui soient communiqués les documents pertinents au moyen de demandes d’accès à l’information. Comme le MDN et/ou TPSGC possédaient ou contrôlaient ces documents, le Tribunal considère que ces documents auraient dû être fournis dans le RIF. Subsidiairement, le RIF aurait pu expressément traiter des renseignements demandés par Valley, mais ce n’est pas le cas.

[150]  Le Tribunal est conscient des défis et des limites imposées par la pandémie de COVID-19. Les deux parties ont demandé des prorogations de délai pour produire des documents devant le Tribunal compte tenu de la pandémie, et leurs demandes ont été accordées. Au final, TPSGC a remis un RIF détaillé, lequel, comme il est mentionné précédemment, ne tenait pas compte des demandes de Valley pour l’obtention de documents. Dans le RIF, il n’est pas fait mention des documents demandés par Valley et il n’est pas expliqué pourquoi ils n’ont pas été inclus dans le RIF.

[151]  Si les documents demandés par Valley avaient été fournis plus tôt, la preuve documentaire dont dispose le Tribunal aurait pu (ou non) avoir été considérablement différente. Il ne s’agit pas d’une irrégularité procédurale mineure qui n’a rien à voir avec la substance ou le fond de la plainte [111] . Les documents demandés se rapportent directement aux arguments formulés par Valley concernant le deuxième motif de sa plainte. Si la communication avait été plus complète, les délibérations du Tribunal et le résultat potentiel pourraient (ou non) avoir été influencés en conséquence.

[152]  Compte tenu des circonstances inhabituelles de l’espèce et pour souligner l’importance d’une communication complète et en temps opportun des documents pertinents dans le cadre du RIF, le Tribunal estime qu’il convient d’accorder à Valley une indemnité pour les frais liés à l’enquête. Étant donné la complexité des questions étudiées et du volume des documents présentés, le Tribunal détermine provisoirement que le degré de complexité et le montant de l’indemnité correspondent au degré 2.

[153]  Le Tribunal invite les parties à discuter et à parvenir à une entente sur le paiement de l’indemnité, en tenant compte des présents motifs. Si aucune entente ne peut être conclue, les parties peuvent présenter des observations au sujet des frais dans les 15 jours suivants la date du présent exposé des motifs.

Susan D. Beaubien

Susan D. Beaubien
Membre présidant

 



[1]   Plainte, Pièce PR-2019-060-01, p. 1-8.

[2]   Plainte, Pièce PR-2019-060-01, p. 3-4.

[3]   Déclaration sous serment de M. Schubert, Pièce 12, Pièce PR-2019-060-12, p. 1239-1240.

[4]   Pièce PR-2019-060-06, p. 1. La différence de valeur estimée du contrat communiquée à Valley s’explique probablement par la valeur d’un futur contrat de services de soutien d’une durée de dix ans, qui n’a pas encore été attribué.

[5]   Plainte, Pièce PR-2019-060-01, p. 1-22.

[6]   Pièce PR-2019-060-01, p. 105-110, 23-27.

[7]   Plainte, Pièce PR-2019-060-01, p. 1-8.

[8]   Pièce PR-2019-060-01, p. 28.

[9]   Pièce PR-2019-060-12, p. 3 et les suivantes.

[10]   Pièce PR-2019-060-12, p. 50.

[11]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 2, Pièce PR-2019-060-12, p. 50.

[12]   Pièce PR-2019-060-17.

[13]   Pièce PR-2019-060-19.

[14]   Pièce PR-2019-060-21.

[15]   Pièce PR-2019-060-22.

[16]   Pièce PR-2019-060-01, p. 9.

[17]   Pièce PR-2019-060-12, p. 3.

[18]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 4, Pièce PR-2019-060-12, p. 51. D’autres ont été identifiés par M. Schubert comme étant des véhicules télécommandés de recherche à haut risque, de l’équipement de recherche en pente abrupte et des systèmes de communication en espace clos, une trousse de détection colorimétrique d’explosifs, mais ne sont pas pertinents pour la présente plainte.

[19]   Déclaration sous serment de M. Martin, par. 4, Pièce PR-2019-060-01, p. 28.

[20]   Pièce PR-2019-060-01, p. 23.

[21]   Déclaration sous serment de M. Martin, par. 4, Pièce A - Pièce PR-2019-060-01, p. 28, 35 et les suivantes.

[22]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 4, Pièce PR-2019-060-12, p. 51-52.

[23]   Déclaration sous serment de M. Martin, par. 5, Pièce PR-2019-060-01, p. 28.

[24]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 6, Pièce PR-2019-060-12, p. 51-52.

[25]   Déclaration sous serment de M. Martin, par. 5, Pièce PR-2019-060-01, p. 28.

[26]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 7, Pièce PR-2019-060-12, p. 52.

[27]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 8, Pièce PR-2019-060-12, p. 52.

[28]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 8, Pièce PR-2019-060-12, p. 52.

[29]   L’équipe comprenait également un gestionnaire d’approvisionnement du MDN et un gestionnaire du soutien logistique intégré : Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 9, Pièce PR-2019-060-12, p. 52.

[30]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 8-9, Pièce PR-2019-060-12, p. 52.

[31]   Déclaration sous serment de M. Martin, par. 6-7, Pièce PR-2019-060-01, p. 28-29.

[32]   Déclaration sous serment de M. Martin, par. 6-7, Pièce PR-2019-060-01, p. 28-29.

[33]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 10, Pièce 2, Pièce PR-2019-060-12, p. 52, 177 et les suivantes.

[34]   Déclaration sous serment de M. Martin, par. 8, Pièce PR-2019-060-01, p. 29.

[35]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 11, 24 -25, Pièce PR-2019-060-12, p. 53, 57.

[36]   Déclaration sous serment de M. Martin, par. 8-9, Pièce PR-2019-060-01, p. 29; RIF, Pièce PR-2019-060-12, p. 177-949.

[37]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 12, Pièce PR-2019-060-12, p. 53.

[38]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 12, Pièce confidentielle 5, Pièce PR-2019-060-12, p. 53, 972-979.

[39]   Déclaration sous serment de M. Schubert, Pièce confidentielle 5, Pièce PR-2019-060-12, p. 973-974.

[40]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 13, Pièce PR-2019-060-12, p. 54.

[41]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 12, Pièce PR-2019-060-12, p. 53.

[42]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 14, Pièce PR-2019-060-12, p. 54.

[43]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 15, Pièce confidentielle 6, Pièce PR-2019-060-12, p. 54.

[44]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 16, Pièce PR-2019-060-12, p. 54.

[45]   C’est-à-dire un assouplissement du minimum de force d’étalement. Voir Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 17, Pièce PR-2019-060-12, p. 55.

[46]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 17, Pièce PR-2019-060-12, p. 55.

[47]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 18, Pièce PR-2019-060-12, p. 55.

[48]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 17-18, 22, Pièce PR-2019-060-12, p. 55-56.

[49]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 23, Pièce PR-2019-060-12, p. 56-57.

[50]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 24, Pièce PR-2019-060-12, p. 57.

[51]   Déclaration sous serment de M. Martin, par. 9, Pièce PR-2019-060-01, p. 29.

[52]   Déclaration sous serment de M. Martin, par. 10, Pièce PR-2019-060-01, p. 29.

[53]   Déclaration sous serment de M. Martin, par. 17, Pièce PR-2019-060-01, p. 30.

[54]   Déclaration sous serment de M. Martin, par. 18, Pièce PR-2019-060-01, p. 30.

[55]   Déclaration sous serment de M. Martin, par. 18-19, Pièce PR-2019-060-01, p. 30-31.

[56]   Déclaration sous serment de M. Martin, par. 19, Pièce PR-2019-060-01, p. 30- 31; Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 25-27, Pièce PR-2019-060-12, p. 57-58.

[57]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 25, Pièce PR-2019-060-12, p. 57.

[58]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 25, Pièce PR-2019-060-12, p. 57.

[59]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 26, Pièce PR-2019-060-12, p. 58.

[60]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 25, Pièce PR-2019-060-12, p. 57.

[61]   Déclaration sous serment de M. Martin, par. 12-13, Pièce PR-2019-060-01, p. 29.

[62]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 19, Pièce PR-2019-060-12, p. 55.

[63]   Désigné comme « Contracting Authority » (autorité contractante) dans la Déclaration sous serment de M. Schubert.

[64]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 29, Pièce PR-2019-060-12, p. 58.

[65]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 30-31, Pièce 10, Pièce PR-2019-060-12, p. 59, 1178.

[66]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 34, Pièce PR-2019-060-12, p. 59-60.

[67]   Déclaration sous serment de M. Martin, par. 6, Pièce PR-2019-060-01, p. 28.

[68]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 34, Pièce PR-2019-060-12, p. 59-60. 

[69]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 37, Pièce 12, Pièce PR-2019-060-12, p. 60, 1239.

[70]   Pièce PR-2019-060-01, p. 105.

[71]   Pièce PR-2019-060-01, p. 23.

[72]   Pièce PR-2019-060-01, p. 1.

[73]   Pièce PR-2019-060-01, p. 459-468.

[74]   Pièce PR-2019-060-01, p. 12, 10-22.

[75]   Pièce PR-2019-060-12, p. 5-46.

[76]   Pièce PR-2019-060-01, p. 6.

[77]   Déclaration sous serment de M. Martin, par. 18, 22-25, Pièce PR-2019-060-01, p. 30-32.

[78]   723186 Alberta Ltd. (12 septembre 2011), PR-2011-028 (TCCE), par. 19-21; Daigen Communications (23 août 2011), PR-2011-021 (TCCE), par. 16-17.

[79]   Almon Equipment Limited c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (2 février 2012), PR-2011-022 (TCCE) [Almon], par. 52-55.

[80]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 26, Pièce PR-2019-060-12, p. 58.

[81]   Dynamic Engineering c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (16 mai 2018), PR-2017-060 (TCCE), par. 27; Star Group International Trading Corporation c. Construction de Défense (1951) Limitée (7 avril 2014), PR-2013-032 (TCCE), par. 26.

[82]   Samson & Associates c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (13 avril 2015), PR-2014-050 (TCCE), par. 35.

[83]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 36, Pièce 10, Pièce confidentielle 11, Pièce PR-2019-060-12, p. 60, 1178, 1181-1237.

[84]   Pièce PR-2019-060-17, p. 3-7.

[85]   Pièce PR-2019-060-19.

[86]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 25-26, Pièce PR-2019-060-12, p. 57-58.

[87]   Déclaration sous serment de M. Schubert, Pièce 5, Pièce PR-2019-060-12, p. 973.

[88]   Déclaration sous serment de M. Schubert, Pièce 5, Pièce PR-2019-060-12, p. 973.

[89]   Pièce PR-2019-060-17, p. 10-11.

[90]   Voir Almon, par. 39-55.

[91]   2000 CanLII 16572 (CAF) [Cougar Aviation].

[92]   Cougar Aviation, par. 27-30.

[93]   Committee for Justice and Liberty c. L’Office national de l’énergie, [1978] 1 R.C.S. 369, p. 394, citée dans CAE Inc. c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (7 septembre 2004), PR-2004-007 (TCCE), par. 29.

[94]   Cougar Aviation, par. 31.

[95]   MasterBedroom Inc. (28 juin 2017), PR-2017-017 (TCCE), par. 12; GESFORM International (26 mai 2014), PR-2014-012 (TCCE), par. 15-16.

[96]   Renaissance Aeronautics Associates Inc. (s/n Advanced Composites Training) c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (28 mai 2018), PR-2017-063 (TCCE), par. 38; Tyr Tactical Canada ULC (13 mai 2016), PR-2016-006 (TCCE), par. 26.

[97]   Almon, par. 40-42.

[98]   Western Star Trucks (11 septembre 2000), PR-2000-011 (TCCE) [Western Star], p. 6-7.

[99]   Almon, par. 40-41.

[100]   Déclaration sous serment de M. Schubert, par. 14, Pièce PR-2019-060-12, p. 54.

[101]   Pièce PR-2019-060-01, p. 459-465.

[102]   Pièce PR-2019-060-17, p. 3.

[103]   RIF, Pièce 12, Pièce PR-2019-060-12, p. 472.

[104]   IBM Canada Ltd. c. Hewlett Packard (Canada) Ltd., 2002 CAF 284, par. 18-20.

[105]   Article 12, Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics.

[106]   Article 30.16, Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur; Canada (Procureur général) c. Georgian College of Applied Arts and Technology, 2003 CAF 199 [Georgian], par. 26.

[107]   Georgian, par. 28; Canada (Procureur général) c. Educom TS Inc., 2004 CAF 130 [Educom], par. 11.

[108]   Georgian, par. 26-27, 30.

[109]   Valcom Consulting Group Inc. c. Ministère de la Défense nationale (14 juin 2017), PR-2016-056 (TCCE), par. 42.

[110]   Par exemple, par le contenu de la déclaration sous serment de M. Martin, ainsi que les demandes d’accès à l’information jointes en tant que pièces J et K du document Déclaration sous serment de M. Martin.

[111]   Le Tribunal considère que les circonstances dans ce dossier se distinguent de celles dans, par exemple, Educom; Canada (Procureur général) c. Polaris Inflatable Boats Ltd., 2004 CAF 144.

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