Enquêtes sur les marchés publics

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Dossier no PR-2021-048

Pye & Richards – Temprano & Young Architects Inc.

Décision prise
le mardi 26 octobre 2021

Décision et motifs rendus
le mardi 9 novembre 2021

 


EU ÉGARD À une plainte déposée aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.).

PAR

PYE & RICHARDS – TEMPRANO & YOUNG ARCHITECTS INC.

CONTRE

LE MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES, DU COMMERCE ET DU DÉVELOPPEMENT

DÉCISION

Aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur a décidé de ne pas enquêter sur la plainte.

Peter Burn

Peter Burn
Membre présidant

 


EXPOSÉ DES MOTIFS

[1] En vertu du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur [1] , tout fournisseur potentiel peut, sous réserve du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics [2] , déposer une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur concernant la procédure des marchés publics suivie relativement à un contrat spécifique et lui demander d’enquêter sur cette plainte. En vertu du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le TCCE, après avoir jugé la plainte conforme au paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE et sous réserve du Règlement, le Tribunal détermine s’il y a lieu d’enquêter.

RÉSUMÉ DE LA PLAINTE

[2] La présente plainte de Pye & Richards – Temprano & Young Architects Inc. (PRTY) porte sur un marché public passé par le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement (MAECD) en vue d’obtenir des services professionnels et techniques d’architecture et d’ingénierie pour la mise à niveau des missions canadiennes à l’étranger (appel d’offres no 20-173640).

[3] Dans sa plainte au Tribunal, PRTY soutient que le MAECD a fait preuve de partialité à l’égard des promoteurs n’ayant aucune expérience de travail acquise dans le cadre de projets du MAECD et que cela a effectivement fait en sorte que d’avoir de l’expérience antérieure auprès du MAECD était une condition de participation. Plus précisément, PRTY soutient que le MAECD a favorisé le titulaire actuel du contrat, soit le soumissionnaire retenu dans le cadre de l’appel d’offres en question, J.L. Richards & Associates Limited [3] .

[4] En outre, PRTY fait valoir que les évaluateurs du MAECD ont déduit des points lorsqu’ils ont noté sa soumission parce qu’à leur avis, elle ne connaissait pas le fonctionnement interne du MAECD et n’avait pas d’expérience de travail acquise dans le cadre de projets du MAECD, en particulier ceux relatifs aux missions canadiennes à l’étranger. L’argument de PRTY est essentiellement le suivant : les commentaires d’un évaluateur à l’égard de PRTY et de « la perception selon laquelle elle manquait d’expérience ou de connaissance de la politique et des procédures du [MAECD] [4] » [traduction] témoignent de la partialité de cet évaluateur, qui a à son tour influencé les autres évaluateurs, ce qui a entraîné une diminution de la moyenne des points accordés à PRTY.

[5] PRTY estime que le MAECD a également fait preuve de partialité dans la façon même dont la procédure de marché public était structurée. PRTY est d’avis que « le processus d’évaluation est imprégné de partialité systémique [5] » [traduction]. À cet égard, PRTY présente diverses suggestions ou demandes de haut niveau concernant la façon dont elle estime que le marché public devrait être structuré ou aurait dû l’être.

HISTORIQUE DE LA PROCÉDURE

[6] L’appel d’offres a été publié le 14 janvier 2021 et a pris fin le 26 février 2021.

[7] PRTY a présenté une soumission au plus tard à la date de clôture.

[8] Le 6 mai 2021, le MAECD a envoyé une lettre de refus à PRTY l’informant que sa soumission n’avait pas obtenu les notes totales les plus élevées dans la section des exigences cotées (ES5) et la section Proposition de prix (ES6). La lettre indiquait qu’un contrat avait été adjugé à J.L. Richards & Associates Limited, dont la valeur, soit 1 700 000,00 $CAN, a été confirmée par la suite par le MAECD [6] .

[9] Le 6 mai 2021, PRTY a demandé un compte rendu officiel.

[10] Le 19 mai 2021, le MAECD a demandé à la partie plaignante de détailler toute question précise dont elle souhaitait être informée. Le même jour, PRTY a demandé les renseignements suivants : les points attribués pour chaque section de l’évaluation; le nombre de soumissions; et le classement de ses notes techniques et financières par rapport aux autres propositions. PRTY a indiqué qu’elle voulait obtenir ces renseignements pour évaluer si le fait de ne pas avoir travaillé auparavant pour le MAECD avait été le facteur déterminant dans le classement des soumissionnaires.

[11] Le 25 mai 2021, le MAECD a fourni à la partie plaignante les renseignements suivants : sa note par rapport à chacun des trois critères techniques cotés; ses notes technique et financière totales et sa note globale (technique et financière combinée); et son classement en tant que soumissionnaire ayant obtenu la deuxième note globale la plus élevée. Le même jour, PRTY a répondu en demandant des renseignements supplémentaires sur les points suivants : la note globale du soumissionnaire retenu; la raison pour laquelle la proposition de PRTY n’avait pas obtenu une note plus élevée à l’égard de deux des critères cotés; et la question de savoir s’il en était ainsi parce que l’entreprise « n’avait pas d’expérience récente auprès du [MAECD] ou à l’échelle internationale [7] » [traduction].

[12] Le 8 juin 2021, l’avocat de PRTY a envoyé au MAECD une « lettre d’opposition », demandant des renseignements supplémentaires sur les évaluations des soumissions, notamment une explication supplémentaire de la note qu’elle avait reçue, ainsi que des renseignements sur la note et la proposition de prix du soumissionnaire retenu.

[13] Le 11 juin 2021, l’avocat du MAECD a accusé réception de la correspondance de PRTY et a indiqué qu’une réponse serait apportée, mais en termes très généraux et vagues : « Nous examinerons la correspondance et nous vous répondrons bientôt [8] » [traduction, nos italiques].

[14] Le 28 juin 2021, le MAECD a envoyé un courriel de suivi à PRTY, présentant ses excuses pour le retard et indiquant que le MAECD « s’efforçait de répondre le plus tôt possible au sujet de la lettre d’opposition de votre client » [traduction].

[15] Le 7 septembre 2021, plus de deux mois après avoir reçu du MAECD, pour la première fois, l’assurance d’une réponse rapide à ses questions, PRTY a fait un suivi auprès du MAECD, demandant une réponse à sa lettre du 8 juin 2021, au plus tard le 17 septembre 2021.

[16] Le 9 septembre 2021, le MAECD a envoyé à PRTY une lettre contenant des renseignements supplémentaires sur la notation de sa soumission, y compris les fiches de notation individuelles et consensuelle.

[17] Le 10 septembre 2021, PRTY a demandé des renseignements supplémentaires au MAECD, à savoir : 1) la note la plus haute attribuée au soumissionnaire retenu; 2) le prix évalué du marché public; et 3) la note consensuelle de la proposition retenue à l’égard de chaque exigence cotée.

[18] Le 13 septembre 2021, l’avocat du MAECD a répondu à PRTY en disant qu’il répondrait à la partie plaignante après avoir examiné sa demande.

[19] Le 17 septembre 2021, PRTY a déposé une première plainte auprès du Tribunal (dossier no PR‑2021-044).

[20] Le 23 septembre 2021, le Tribunal a décidé que la plainte de PRTY était prématurée parce que PRTY n’avait pas encore reçu de refus de réparation de la part du MAECD, malgré le temps que le ministère prenait pour répondre [9] . Le Tribunal a fait observer que sa décision n’empêchait pas PRTY de déposer une nouvelle plainte dans les dix jours ouvrables suivant la réception d’une réponse de la part du MAECD si elle se considérait encore lésée ou, à défaut, si le MAECD ne fournissait pas une réponse dans un délai raisonnable [10] .

[21] Le 28 septembre 2021, PRTY a demandé au MAECD de répondre, au plus tard le 15 octobre 2021, à sa demande de renseignements supplémentaires du 10 septembre 2021 [11] .

[22] Le 18 octobre 2021, le MAECD a fourni une réponse à PRTY, discutant entre autres de la qualité de sa proposition globale ainsi que des mérites de la proposition du soumissionnaire retenu par rapport à la sienne [12] .

[23] Les 21 et 22 octobre 2021, PRTY a déposé une deuxième plainte auprès du Tribunal. Elle fait valoir que la réponse du MAECD du 18 octobre 2021 n’avait pas répondu à ses allégations de partialité en faveur des soumissionnaires ayant acquis une expérience antérieure auprès du MAECD [13] .

ANALYSE

[24] Aux termes des articles 6 et 7 du Règlement, après avoir reçu une plainte dont le dossier est complet (c.-à-d. une plainte conforme au paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE), le Tribunal doit déterminer si toutes les conditions suivantes sont satisfaites afin de mener une enquête :

i. la plainte a été déposée dans les délais prescrits à l’article 6;

ii. la partie plaignante est un fournisseur potentiel;

iii. la plainte porte sur un contrat spécifique;

iv. les renseignements fournis démontrent, dans une mesure raisonnable, que la procédure du marché public n’a pas été suivie conformément aux accords commerciaux applicables.

[25] Pour les motifs suivants, le Tribunal conclut que la plainte ne démontre pas, dans une mesure raisonnable, qu’il y a eu violation des accords commerciaux. De plus, dans la mesure où les observations de PRTY sur la structure du marché public constituent un motif distinct de plainte, le Tribunal conclut que ce motif de plainte n’a pas été déposé dans les délais prescrits par l’article 6 du Règlement.

Aucune indication raisonnable qu’il y a eu violation des accords commerciaux

[26] PRTY soutient que les résultats de l’évaluation démontrent une partialité de la part du MAECD en faveur du titulaire actuel du contrat qui est finalement devenu le soumissionnaire retenu. PRTY soutient, entre autres, que l’attribution de points sur la base de l’expérience acquise dans le cadre de « projets de taille et de portée similaires » signifiait que les soumissionnaires obtiendraient plus de points si leur expérience comprenait des travaux relatifs à des projets du MAECD, « ce qui désavantagerait tous les autres soumissionnaires par rapport au titulaire actuel du contrat [14] » [traduction].

[27] À titre d’éléments de preuve, PRTY renvoie aux observations de l’un des évaluateurs individuels, à l’égard de l’exigence technique ES5.2 (Expérience du personnel), selon lesquelles « [l]e narratif aurait pu comporter plus de détails sur la portée des travaux aux ambassades» [traduction]. Le même évaluateur a fait observer, à l’égard de l’exigence ES5.3 (Approche envers la prestation des services), que les suggestions de PRTY sur la façon d’optimiser les projets en vertu de cette exigence démontrent que « “le soumissionnaire manque d’un certain niveau de compréhension des exigences [du MAECD] en matière d’activités, de processus et de projets » [traduction]. PRTY fait valoir que ces commentaires démontrent « un état d’esprit d’un ou de plusieurs évaluateurs qui ont perdu l’accent de leur responsabilité d’appliquer rigoureusement les exigences objectives dans le cadre de leur examen des documents présentés par les soumissionnaires, comme l’indiquait la DP » [traduction], et qu’elle a été « punie » [traduction] parce qu’elle n’avait pas une « connaissance interne » des « politiques ou procédures non publiées du MAECD [15] » [traduction].

[28] Le Tribunal a toujours conclu que, même si certaines situations peuvent survenir qui font en sorte que les soumissionnaires bénéficient d’un avantage concurrentiel par rapport à une procédure de marché public particulière, il ne s’ensuit pas nécessairement que l’appel d’offres est partial [16] . Le Tribunal a également déclaré que les avantages concurrentiels peuvent provenir d’un éventail de sources différentes, y compris le fait d’être titulaire d’un contrat, mais qu’il ne s’agit pas, en soi, d’une situation jugée injuste [17] et qu’« “il n’y a pas d’obligation de compenser l’effet lié à la qualité de titulaire dans la formulation des invitations [...] [18] ». De même, dans Almon, la Cour d’appel fédérale a conclu que « le fait qu’un soumissionnaire est plus en mesure qu’un autre de satisfaire aux spécifications d’une DP ne signifie pas nécessairement que les exigences de la DP sont adoptées de façon à favoriser ce soumissionnaire [19] ».

[29] Ces conclusions ne remplacent pas l’interdiction, selon les accords commerciaux, de structurer un marché public afin d’empêcher la participation des non-titulaires de contrats. Toutefois, en l’absence d’éléments de preuve démontrant que les exigences d’un marché public sont « discriminatoires, impossibles à satisfaire ou déraisonnables », le fait qu’un fournisseur potentiel ne soit pas en mesure de les respecter ne signifie pas que les exigences sont incompatibles avec les accords commerciaux applicables [20] .

[30] De l’avis du Tribunal, rien dans la présente plainte n’indique que l’attribution de points fondés sur l’expérience acquise dans le cadre de « projets de taille et de portée similaires » était autre qu’une exigence opérationnelle légitime. Il ne semble pas non plus qu’il ait été impossible pour PRTY de satisfaire à cette exigence étant donné les points élevés que sa proposition a reçus en vertu des exigences ES5.1 et ES5.2 (les deux exigences comportant ce critère).

[31] PRTY a obtenu un nombre élevé de points pour chaque exigence et la deuxième note globale la plus élevée. De l’avis du Tribunal, le fait qu’un autre soumissionnaire ait obtenu un nombre légèrement plus élevé de points et que l’expérience incluse dans sa proposition, qui a obtenu la meilleure note, ait pu être acquise à cause de sa qualité de titulaire n’est pas indicatif d’un parti pris. En fait, étant donné que PRTY a obtenu la deuxième note globale en importance, rien ne semble suggérer qu’on lui aurait refusé le contrat si une autre proposition n’avait pas obtenu une note encore plus élevée. Dans sa lettre du 18 octobre 2021, le MAECD explique de façon convaincante pourquoi une autre proposition a obtenu plus de points. Il fournit à PRTY les mérites de la soumission retenue par rapport à la sienne en ce qui concerne les exigences techniques, y compris la démonstration de l’expérience de travail dans le cadre de projets.

[32] À la lumière des éléments de preuve tirés des dossiers d’évaluation et des renseignements fournis par le MAECD lors de la séance de compte rendu, le Tribunal ne voit pas comment l’expérience de travail acquise dans le cadre de projets du MAECD peut être qualifiée de condition de participation, et non de simple source d’expérience très pertinente aux termes de l’évaluation. Le fait que le soumissionnaire retenu avait déjà effectué du travail dans le cadre de projets d’ambassades et du MAECD peut donc être décrit plus précisément comme un avantage concurrentiel qui, comme il a été mentionné ci-dessus, n’indique pas, en soi, que l’appel d’offres était discriminatoire.

[33] Le Tribunal n’a reçu aucun élément de preuve à l’appui de l’affirmation de PRTY selon laquelle un évaluateur a contaminé d’autres évaluateurs par sa partialité présumée. Le Tribunal fait observer que l’évaluateur dont les commentaires démontrent, selon PRTY, qu’il y a eu partialité a accordé des notes individuelles plus élevées à la proposition de PRTY à l’égard des exigences ES5.2 et ES5.3 que les deux autres évaluateurs. Il est donc difficile de voir sur quel fondement on peut déduire que cet évaluateur a agi comme un « leader d’opinion » [traduction] lorsqu’il a influencé les autres évaluateurs pour obtenir une note de consensus inférieure à ce qu’elle aurait été par ailleurs.

[34] En fait, l’allégation même de partialité formulée par PRTY à l’égard de cet évaluateur n’est en outre pas étayée par quelque preuve que ce soit. Le Tribunal a toujours conclu qu’il ne suffisait pas qu’une partie plaignante déclare simplement qu’il y a partialité, mais qu’elle doit fournir des éléments de preuve suffisants pour appuyer son allégation [21] . De plus, le Tribunal présume de la bonne foi et de l’honnêteté aussi bien des soumissionnaires que des fonctionnaires [22] , de sorte que « le plaignant doit fournir des éléments de preuve suffisants pour réfuter cette présomption [23] ».

[35] Le Tribunal rappelle aux plaignants que les allégations d’irrégularité (comme de partialité) de la part des fonctionnaires ne devraient être portées qu’après examen minutieux de leur pertinence. Le Tribunal reconnaît que la majorité écrasante des fonctionnaires agissent dans l’exercice honorable de leurs fonctions auprès de la Couronne et des Canadiens et respectent le Code de valeurs et d’éthique du secteur public [24] . Des erreurs se produisent. Dans l’ensemble, elles sont rares et, lorsqu’il y en a, elles sont généralement involontaires, selon l’expérience du Tribunal. Les fraudes, les préjugés ou tout autre geste répréhensible tout aussi volontaire et prémédité sont extrêmement rares.

[36] Le Tribunal prend note que les évaluations techniques comportaient des critères de notation indiquant le nombre (ou la fourchette) de points à attribuer selon le niveau de qualité de chaque réponse donnée relativement aux différentes exigences. Le Tribunal conclut qu’ils sont faciles à comprendre.

[37] De plus, le Tribunal a toujours conclu que, dans le contexte d’une évaluation fondée sur le consensus, les notes individuelles ne sont pas déterminantes, mais servent plutôt de point de départ à la discussion des évaluateurs lorsqu’ils décident du nombre de points à attribuer pour des critères précis. Les notes consensuelles ne tiendront donc pas toujours compte de la moyenne ou de la médiane des notes individuelles, et les écarts entre les deux ne constituent pas un fondement suffisant pour conclure à l’injustice ou au caractère déraisonnable [25] . Bref, des évaluations de ce genre sont réalisées à la suite du processus itératif utilisé par l’équipe d’évaluation, formée de personnes qui agissent en fonction de l’ensemble et qui adhèrent finalement à une note consensuelle.

[38] Dans la présente plainte, le Tribunal ne voit rien qui laisse entendre que l’expérience acquise dans le cadre de « projets de taille et de portée similaires » était autre qu’une exigence opérationnelle légitime, ou qu’il était nécessaire d’avoir de l’expérience de travail acquise dans le cadre de projets du MAECD pour obtenir des points en vertu des exigences qui incluaient ce critère.

[39] Les dossiers d’évaluation ne contiennent rien non plus qui puisse laisser entendre au Tribunal qu’il y a eu partialité de la part des évaluateurs, ou du MAECD de manière plus générale.

[40] Pour les motifs qui précèdent, le Tribunal rejette ce motif de plainte puisqu’il ne démontre pas, dans une mesure raisonnable, qu’il y a eu violation des accords commerciaux applicables.

Les motifs de plainte relatifs à la structure du marché public ont été déposés en retard

[41] La plainte de PRTY comprend également plusieurs suggestions sur la façon dont le MAECD pourrait structurer différemment les marchés publics comme celui-ci. Il semble que ces mesures soient de nature essentiellement prospective et PRTY reconnaît qu’il « n’est peut-être pas dans le mandat du TCCE de conseiller [le MAECD] sur la façon de structurer ses appels de marchés publics [26] » [traduction]. Toutefois, dans la mesure où ces suggestions constituent un motif de plainte distinct concernant la structure du marché public en cause, le Tribunal conclut qu’elles ont été déposées en retard.

[42] Aux termes des paragraphes 6(1) et (2) du Règlement, un fournisseur potentiel doit présenter une opposition à l’institution fédérale concernée ou déposer une plainte auprès du Tribunal dans les 10 jours ouvrables suivant la date où il a découvert ou aurait dû vraisemblablement découvrir les faits à l’origine de la plainte.

[43] À cet égard, le Tribunal estime que PRTY aurait dû raisonnablement prendre connaissance de ce motif de plainte, au plus tôt, au moment de la publication de la DP (c.-à-d. le 14 janvier 2021) ou, au plus tard, au moment où PRTY a présenté sa soumission au MAECD (c.-à-d. le 19 février 2021) [27] .

[44] Par conséquent, PRTY aurait dû présenter une opposition au MAECD au plus tard dix jours ouvrables à compter du 19 février 2021.

[45] PRTY n’a fait part de son opposition à l’attention du MAECD que le 21 octobre 2021, après que la DP avait déjà été attribuée au soumissionnaire retenu et plusieurs mois après que PRTY aurait dû raisonnablement prendre connaissance de tout motif de plainte concernant la structure de la DP.

[46] Comme l’a déclaré la Cour d’appel fédérale dans IBM Canada, « [l]es fournisseurs potentiels ne doivent donc pas attendre l’attribution d’un contrat avant de déposer toute plainte qu’ils pourraient avoir concernant la procédure. On s’attend à ce qu’ils soient vigilants et qu’ils réagissent dès qu’ils découvrent ou auraient vraisemblablement dû découvrir un vice de procédure [28] ». Il incombe au soumissionnaire de s’assurer d’examiner toute question dans un appel d’offres et de déposer toute plainte en temps opportun.

[47] Par conséquent, le Tribunal conclut que ce motif de plainte a été déposé au-delà du délai fixé dans le Règlement et qu’il ne peut être examiné davantage par le Tribunal. De plus, comme il semble s’appuyer sur les mêmes allégations de partialité en faveur des titulaires de contrats qui ont déjà été abordées dans les présents motifs, même si ce motif de plainte avait été déposé en temps opportun, le Tribunal conclurait, pour les mêmes motifs que ceux qui ont été exposés ci-dessus, qu’il ne démontre pas, dans une mesure raisonnable, qu’il y a eu violation des accords commerciaux.

[48] Pour les motifs qui précèdent, le Tribunal conclut que la présente plainte ne démontre pas, dans une mesure raisonnable, qu’il y a eu violation des accords commerciaux applicables et, en outre, que les motifs de plainte relatifs à la structure globale du processus de passation du marché public sont en retard.

DÉCISION

[49] Aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal a décidé de ne pas enquêter sur la plainte.

Peter Burn

Peter Burn
Membre présidant

 



[1] L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.) [Loi sur le TCCE].

[2] DORS/93-602 [Règlement].

[3] Pièce PR-2021-048-01 à la p. 7; pièce PR-2021-048-02 à la p. 86.

[4] Pièce PR-2021-048-01 à la p. 10.

[5] Ibid. à la p. 11.

[6] Pièce PR-2021-048-02 à la p. 84; pièce PR-2021-048-01 à la p. 27.

[7] Pièce PR-2021-048-02 à la p. 73.

[8] Ibid. à la p. 75.

[9] Pye & Richards – Temprano & Young Architects Inc. (24 septembre 2021), PR-2021-044 (TCCE) au par. 21.

[10] Ibid. aux par. 22-23.

[11] Pièce PR-2021-048-01 aux p. 22-24.

[12] Ibid. aux p. 25-30.

[13] Ibid. à la p. 9.

[14] Pièce PR-2021-048-02 aux p. 86-87.

[15] Pièce PR-2021-048-01 aux p. 9-10.

[16] M.D. Charlton Co. Ltd. c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (24 avril 2017), PR‑2017-002 (TCCE) aux par. 27-28.

[17] Le Groupe Conseil Bronson Consulting Group c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (23 juin 2017), PR-2016-058 (TCCE) au par. 34.

[18] Ibid. citant Corel Corporation c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (26 octobre 1998), PR‑98-012 et PR-98-014 (TCCE).

[19] Almon Equipment Limited c. Canada (Procureur général), 2012 CAF 318 (CanLII) [Almon] au par. 11.

[20] Almon Equipment Limited (3 janvier 2012), PR-2011-023 (TCCE) au par. 72; voir aussi R.P.M. Tech Inc. c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (25 mars 2015), PR-2014-040 (TCCE) aux par. 26-29; Lions Gate Risk Management Group c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (18 décembre 2020), PR-2020-024 (TCCE) aux par. 44-47, 54-57.

[21] Sunny Jaura s/n Jaura Enterprises (31 janvier 2019), PR-2018-058 (TCCE) aux par. 13, 15; SoftSimTechnologies Inc. (26 mars 2020), PR-2019-068 (TCCE) aux par. 38-39.

[22] SoftSim Technologies Inc. c. Ministère des Affaires extérieures, du Commerce et du Développement (11 juin 2020), PR‑2019‑053 (TCCE) au par. 77; MasterBedroom Inc. c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (28 juin 2017), PR-2017-017 (TCCE) au par. 12; GESFORM International (27 mai 2014), PR‑2014-012 (TCCE) au par. 16.

[23] 2484726 Ontario Inc. s/n Brion Raffoul c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (4 mars 2021), PR-2020-064 (TCCE) au par. 69.

[24] En ligne : <https://www.tbs-sct.gc.ca/pol/doc-fra.aspx?id=25049>.

[25] ACT for Performance Inc. c. Ministère des Affaires extérieures, du Commerce et du Développement (15 juin 2021), PR‑2020‑085 (TCCE) aux par. 162, 168; CGI Information Systems and Management Consultants Inc. c. Société canadienne des postes et Innovapost Inc. (9 octobre 2014), PR-2014-015 et PR‑2014‑020 (TCCE) au par. 144, rejet de la demande de contrôle judiciaire 2015 CAF 272; Deloitte Inc. (25 juillet 2017), PR‑2016‑069 (TCCE); Solutions Moerae Inc. s/n MSI c. Industrie Canada (12 septembre 2016), PR-2016-004 (TCCE) au par. 60.

[26] Pièce PR-2021-048-01 à la p. 11.

[27] Pièce PR-2021-048-02 à la p. 11.

[28] IBM Canada Ltd. c. Hewlett Packard (Canada) Ltd., 2002 CAF 284 [IBM Canada] au par. 20.

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