Enquêtes sur les marchés publics

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Dossier PR-2021-056

Denis Belanger

c.

Conseil d’examen du prix des médicaments brevetés

Décision et motifs rendus
le lundi 7 mars 2022

 



EU ÉGARD À une plainte déposée par Denis Belanger aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur;

ET À LA SUITE D’une décision d’enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

ENTRE

DENIS BELANGER

Partie plaignante

ET

LE CONSEIL D’EXAMEN DU PRIX DES MÉDICAMENTS BREVETÉS

Institution fédérale

DÉCISION

Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte n’est pas fondée. Chaque partie assumera ses propres frais en l’espèce.

Randolph W. Heggart

Randolph W. Heggart
Membre présidant


 

Membre du Tribunal :

Randolph W. Heggart, membre présidant

Personnel du Secrétariat du Tribunal :

Emilie Audy, conseillère juridique
Matthew Riopelle, agent du greffe
Stephanie Blondeau, agente du greffe

Partie plaignante :

Denis Belanger

Institution fédérale :

Conseil d’examen du prix des médicaments brevetés

Conseillers juridiques de l’institution fédérale :

Isabel Jaen Raasch
Tim Jolly

Veuillez adresser toutes les communications à :

La greffière adjointe
Téléphone : 613-993-3595
Courriel : tcce-citt@tribunal.gc.ca

 


EXPOSÉ DES MOTIFS

RÉSUMÉ DE LA PLAINTE

[1] Denis Belanger (DB) a déposé une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur [1] (Loi sur le TCCE) à l’égard d’une demande de proposition (DP) (appel d’offres SN21002) publiée par le Conseil d’examen du prix des médicaments brevetés (CEPMB) en vue de la prestation de services de recherche dans la documentation scientifique.

[2] DB soutient que le processus de passation du marché était discriminatoire et non transparent et que CEPMB a, de façon irrégulière, divulgué des renseignements confidentiels. Plus précisément, DB a soulevé les motifs de plainte suivants :

(1) Divulgation de renseignements confidentiels du soumissionnaire;

(2) Gestion discriminatoire et non transparente de la soumission financière;

(3) Gestion discriminatoire de la soumission technique, puisqu’un des soumissionnaires avait déjà préparé un rapport à l’égard du médicament et de l’indication qui faisaient maintenant l’objet de l’exemple de rapport que devaient fournir les soumissionnaires actuels, en conformité avec le critère d’évaluation coté C1;

(4) Évaluation discriminatoire et non transparente de la soumission technique quant aux notes attribuées à DB relativement aux critères d’évaluation cotés C1 (exemples de rapports), C3 (équipe) et C4 (capacité des ressources).

(5) Évaluation discriminatoire de la soumission technique quant aux notes attribuées à DB relativement au critère d’évaluation coté C5 (approche de la gestion des ressources).

[3] À titre de mesure corrective, DB demande que le contrat spécifique soit résilié et adjugé à DB, et que DB reçoive une indemnité en reconnaissance du profit qu’elle a perdu, soit 50 p. 100 de la valeur totale du contrat.

[4] Le 14 décembre 2021, aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal a décidé d’enquêter sur une partie de la plainte, soit le quatrième motif, qui se rapporte aux notes attribuées relativement aux critères d’évaluation C1, C3 et C4.

[5] Le Tribunal a enquêté sur le bien-fondé de la plainte aux termes des articles 30.14 et 30.15 de la Loi sur le TCCE. Pour les motifs qui suivent, le Tribunal conclut que la plainte n’est pas fondée.

contexte

Processus de passation du marché public

[6] La DP, qui indiquait que la date de clôture des soumissions était le 9 juillet 2020, a été publiée sur le site Web Achatsetventes.gc.ca [2] le 27 mai 2021, à 14 h (HAE). Une modification de la DP a été publiée le 23 juin 2021.

[7] Le 22 septembre 2021, DB a reçu un courriel du CEPMB dans lequel il était indiqué que deux contrats seraient attribués aux soumissionnaires retenus, soit le Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux et le Service régional d’information pharmacothérapeutique de l’Outaouais (SRIPO) [3] .

[8] Le 24 septembre 2021, DB a envoyé un courriel au CEPMB, lui faisant part de certaines préoccupations liées à l’aspect financier de sa DP ainsi qu’aux notes qui lui avaient été attribuées [4] . Le même jour, le CEPMB a répondu qu’un compte-rendu écrit lui serait transmis au cours de la semaine suivante.

[9] Les 1er et 8 octobre 2021, DB a fait un suivi auprès du CEPMB relativement aux préoccupations qu’elle avait soulevées dans son courriel du 24 septembre 2021.

[10] Le 15 octobre 2021, le CEPMB a fourni à DB un compte-rendu écrit lié à sa soumission [5] .

[11] Le 18 octobre 2021, DB a envoyé un courriel au CEPMB, lui demandant de fournir les notes accordées à chaque section de sa soumission [6] . Le même jour, DB lui a transmis un compte-rendu écrit modifié comportant les notes accordées.

[12] Le 1er novembre 2021, DB a signalé son opposition par courriel, demandant à CEPMB de publier un nouvel appel d’offres pour ce contrat [7] . Encore une fois, DB a notamment soulevé ses préoccupations quant à l’aspect financier de sa soumission et aux notes qui lui avaient été attribuées. Le 3 novembre 2021, le CEPMB a accusé réception de l’opposition de DB [8] .

[13] Le 5 novembre 2021, DB a envoyé un courriel à CEPMB, soulevant d’autres préoccupations liées au critère d’évaluation R1, selon lequel les soumissionnaires devaient fournir un exemple de rapport à l’égard d’un médicament présélectionné (Imfinzi), ce qu’un des soumissionnaires avait déjà fait.

[14] Le 25 novembre 2021, le CEPMB a répondu aux préoccupations de DB [9] .

Procédure de plainte

[15] Le 7 décembre 2021, DB a déposé sa plainte auprès du Tribunal. Le Tribunal a décidé d’enquêter sur une partie de la plainte le 14 décembre 2021, se limitant à l’examen du quatrième motif de plainte, relatif aux notes attribuées relativement aux critères d’évaluation C1, C3 et C4 [10] .

[16] Le 16 décembre 2021, DB a demandé au Tribunal de revoir sa décision de ne pas enquêter relativement aux premier, deuxième et troisième motifs de plainte [11] . Dans une lettre en date du 17 décembre 2021, le Tribunal a informé DB que sa décision était définitive puisqu’il avait déjà réglé ces aspects de la plainte et que, sauf dans certaines circonstances exceptionnelles, il lui était interdit en vertu de la loi de revoir sa décision [12] .

[17] Le 10 janvier 2022, le CEPMB a déposé son Rapport de l’institution fédérale (RIF) [13] .

[18] Le 18 janvier 2022, DB a déposé ses commentaires sur le RIF [14] .

[19] Le 20 janvier 2022, le CEPMB a déposé sa réponse suite aux commentaires de DB sur le RIF [15] . Le même jour, DB a répliqué aux commentaires de CEPMB [16] .

[20] Les renseignements au dossier étant suffisants pour permettre de déterminer le bien-fondé de la plainte, le Tribunal a décidé qu’une audience n’était pas nécessaire et a statué sur la plainte sur la foi des renseignements au dossier.

MOTIFS DE PLAINTE NON ACCEPTÉS AUX FINS D’ENQUÊTE

[21] DB a soulevé cinq motifs de plainte. Comme il a déjà été indiqué, le Tribunal a décidé d’enquêter sur une partie de la plainte, se limitant à l’examen du quatrième motif de plainte. Par conséquent, il a décidé de ne pas enquêter sur les autres motifs de plainte.

Motif 1 : divulgation de renseignements confidentiels du soumissionnaire

[22] DB soutient que les renseignements contenus dans les lettres de refus envoyées aux soumissionnaires non retenus leur ont permis de calculer le taux horaire facturé par les deux soumissionnaires retenus [17] . DB fait valoir qu’il s’agit d’une violation des accords commerciaux applicables, car cela empêche une concurrence loyale entre les fournisseurs et divulgue des renseignements confidentiels.

[23] Ce motif de plainte est au mieux spéculatif. DB ne soutient pas que ses propres renseignements confidentiels ont été divulgués. Il suppose, d’une part, que les renseignements divulgués concernant les soumissionnaires qui se sont vu attribuer des contrats seraient confidentiels sans présenter aucune preuve à l’appui de cette position et, d’autre part, que ces soumissionnaires ont proposé des prix de la même façon que DB et que leurs tarifs horaires pourraient donc être calculés. Enfin, sauf sur autorisation expresse de le faire, DB n’a pas qualité pour déposer une plainte au nom des autres soumissionnaires.

[24] Par conséquent, le Tribunal n’est pas en mesure d’examiner ce motif de plainte et, même s’il le pouvait, il ne démontrerait toujours pas, dans une mesure raisonnable, qu’il y a eu violation des accords commerciaux applicables, qui est l’une des conditions qui doivent être remplies en vertu de l’article 7 du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics [18] (Règlement) pour enquêter.

Motifs 2 : gestion discriminatoire et non transparente de la soumission financière

[25] Comme deuxième motif de plainte, DB soulève des préoccupations au sujet de l’aspect financier de la DP [19] . Le 31 mai 2021, DB a transmis un courriel à CEPMB dans lequel elle lui demandait la valeur estimative du contrat aux fins de la préparation de l’aspect financier de la soumission. Le 1er juin 2021, le CEPMB a répondu qu’il ne fournissait pas la valeur des contrats.

[26] Aux termes des paragraphes 6(1) et 6(2) du Règlement, un fournisseur potentiel doit présenter une opposition à l’institution fédérale concernée ou déposer une plainte auprès du Tribunal dans les 10 jours ouvrables suivant la date où il a découvert ou aurait dû vraisemblablement découvrir les faits à l’origine de la plainte. De plus, un fournisseur potentiel qui a présenté à l’institution fédérale concernée une opposition dans les délais prescrits et à qui l’institution refuse réparation peut déposer une plainte auprès du Tribunal dans les 10 jours ouvrables suivant la date où il a pris connaissance, directement ou par déduction, du refus.

[27] En l’espèce, DB était au courant de la façon dont sa soumission financière serait évaluée (le fondement de ce motif) dès le 31 mai 2021, lorsqu’il a interrogé le CEPMB sur l’absence d’une valeur estimée du contrat dans la DP. Le lendemain, le CEPMB a confirmé qu’il ne fournirait pas cette information. À ce titre, une plainte aurait dû être déposée dans les 10 jours ouvrables suivant le jour où DB s’est vu refuser réparation.

[28] Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que le deuxième motif de plainte a été déposé au-delà du délai fixé dans le Règlement et que, par conséquent, il ne peut être examiné davantage par le Tribunal.

Motif 3 : gestion discriminatoire de la soumission technique, puisqu’un des soumissionnaires avait déjà préparé un rapport à l’égard du médicament et de l’indication qui faisaient maintenant l’objet de l’exemple de rapport que devaient fournir les soumissionnaires actuels, en conformité avec le critère d’évaluation coté C1

[29] Comme troisième motif de plainte, DB soutient que le critère d’évaluation C1 exigeait que les soumissionnaires fournissent un exemple de rapport à l’égard d’un médicament présélectionné (Imfinzi) et d’une indication [20] , ce qui a donné un avantage injuste au SRIPO, un soumissionnaire qui avait déjà préparé un rapport à l’égard de ce médicament [21] .

[30] Lorsqu’un motif de plainte porte sur les modalités d’un appel d’offres, le Tribunal a conclu par le passé que la date à laquelle le soumissionnaire a obtenu copie des documents liés à l’appel d’offres est celle à laquelle le soumissionnaire a découvert les faits à l’origine de la plainte [22] . En l’absence de preuve contraire, les soumissionnaires sont généralement présumés avoir reçu une copie de l’appel d’offres à la date de sa publication [23] . De même, le Tribunal est d’avis que, lorsque la plainte porte sur une modification des modalités d’un appel d’offres, les soumissionnaires sont généralement présumés avoir reçu copie de la modification à la date de sa publication [24] .

[31] En l’espèce, la DP a été publiée le 27 mai 2021. Le CEPMB a publié la modification 01 le 23 juin 2021, afin de répondre aux questions des soumissionnaires potentiels concernant le critère d’évaluation C1 [25] .

[32] Ainsi, afin de respecter les délais prescrits, DB aurait dû déposer sa plainte pour ce motif auprès du Tribunal ou présenter une opposition à l’institution fédérale dans les 10 jours ouvrables à compter du 27 mai 2021 ou, à tout le moins, 10 jours ouvrables suivant le 23 juin 2021. Par conséquent, le Tribunal conclut que ce motif de plainte est prescrit et qu’il ne peut être examiné davantage.

Motif 5 : évaluation discriminatoire de la soumission technique quant aux notes attribuées à DB relativement au critère d’évaluation coté C5

[33] Le CEPMB a déterminé que la proposition de DB concernant le critère d’évaluation C5 était incomplète. Selon DB, le CEPMB aurait pu demander qu’il fournisse la partie manquante de sa proposition [26] .

[34] Le Tribunal n’est pas d’accord. En fait, le CEPMB aurait contrevenu aux accords commerciaux s’il l’avait fait. Il revenait au DB de s’assurer que sa proposition était complète et qu’elle satisfaisait à tous les critères obligatoires. Le Tribunal a affirmé à maintes reprises qu’il incombe aux soumissionnaires de s’assurer que leurs propositions démontrent clairement la conformité de leurs soumissions aux critères obligatoires publiés dans les documents d’appel d’offres [27] .

[35] Bien que l’article 4.1 de la DP permette au CEPMB de demander des précisions au soumissionnaire ou de vérifier l’exactitude de certains renseignements, ou de tous les renseignements, fournis dans sa soumission, cet article ne peut pas être interprété de façon à permettre à un soumissionnaire de présenter une partie manquante de sa proposition après la clôture des soumissions. Cela constituerait une « modification de soumission », une pratique expressément interdite en vertu des accords commerciaux [28] .

[36] La Cour d’appel fédérale, dans Francis H.V.A.C., a décrit la règle interdisant la modification de la soumission comme suit :

[22] [...] les soumissionnaires ne peuvent pas apporter de corrections et de modifications importantes à leurs soumissions après la date de clôture. Il faut satisfaire aux exigences figurant dans la DP au moment de la clôture de l’appel d’offres, et une entité d’approvisionnement ne peut pas examiner des renseignements présentés après cette date. Une « modification de soumission », comme on l’appelle, est considérée comme une façon indirecte d’accepter une soumission en retard. L’interdiction des modifications des soumissions facilement compréhensible : permettre la modification d’une soumission après coup saperait le processus de soumission même, puisque cela permettrait qu’une soumission soit modifiée au moment où celles des autres sont connues ou pourraient l’être [...] [29] .

[37] Le Tribunal conclut que rien ne démontre, dans une mesure raisonnable, que l’évaluation de la soumission de DB par le CEPMB relativement au critère d’évaluation R5 n’a pas été effectuée conformément aux exigences des accords commerciaux applicables.

ANALYSe : MOTIF DE PLAINTE RETENU AUX FINS D’ENQUÊTE

[38] Aux termes de l’article 30.14 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal est tenu, lorsqu’il a décidé d’enquêter, de limiter son étude à l’objet de la plainte. À la fin de l’enquête, le Tribunal doit déterminer le bien-fondé de la plainte en fonction du respect des critères et des procédures établis par règlement pour le contrat spécifique.

[39] L’article 11 du Règlement prévoit que le Tribunal doit déterminer si le marché a été passé conformément aux exigences des accords commerciaux applicables qui, en l’espèce, comprennent l’Accord de libre-échange canadien (ALEC) [30] .

[40] Les dispositions pertinentes de l’ALEC sont les paragraphes 502(1), 515(1), 515(4), 516(1) et 517(1). Le libellé de chacun de ces paragraphes figure à l’annexe I des présents motifs.

[41] Le motif de plainte accepté aux fins d’enquête se rapporte à la cotation des critères d’évaluation C1, C3 et C4.

C1. – Exemples de rapports du soumissionnaire

[42] Le critère d’évaluation C1 prévoit ce qui suit : [31]

Le soumissionnaire doit fournir ce qui suit :

  1. les exemples de rapports utilisés dans le cadre de la prestation de services dans les six (6) projets proposés au point O1;

  2. un exemple de rapport préparé selon le format du CEPMB, comme présenté à l’annexe A1 : Modèle de rapport. Cet exemple de rapport porte sur un médicament et une indication présélectionnés, comme indiqué ci-dessous :

i. pour Imfinzi pour le traitement du cancer urothélial localement avancé ou métastatique (informations jusqu’en 2018) qui a évolué sous traitement à base de platine.

Pour les six (6) rapports au point C1. a), le soumissionnaire doit démontrer la similitude des rapports de ces projets avec les exigences de l’énoncé des travaux. Il incombe au soumissionnaire de montrer en quoi ces rapports correspondent à ce qui est demandé dans l’énoncé des travaux.

Pour l’exemple de rapport au point C1. b), le soumissionnaire doit démontrer qu’il comprend les exigences, notamment en ce qui a trait à l’exactitude du rapport. Il incombe au soumissionnaire de présenter toutes les informations de toutes les sections de l’exemple de rapport en utilisant le format du CEPMB (annexe A1 : Modèle de rapport).

[43] DB affirme que le CEPMB n’a pas évalué sa proposition conformément au critère d’évaluation C1.

[44] Essentiellement, le CEPMB a conclu que les exemples de rapport de DB auraient pu être mieux expliqués (c.-à-d. « Meilleure explication sur les différences de dosage » [traduction]) ou clarifiés (c.-à-d. « étant donné que l’émulsion lipidique de soja était le comparateur utilisé dans les essais, il aurait fallu le préciser davantage dans le document » [traduction]; « les comparateurs liés à la chimiothérapie auraient pu être clarifiés davantage, et une discussion sur la gemcitabine et le nab‑paclitaxel détaillée [32] » [traduction]) et que certains renseignements semblaient mal étiquetés ou étaient complètement absents.

[45] Le Tribunal a compétence pour examiner le processus d’évaluation des soumissions et vérifier qu’il a été mené de façon raisonnable et équitable [33] . En général, le Tribunal n’interviendra dans une évaluation que si celle-ci est déraisonnable [34] . Dans Samson & Associates, le Tribunal a affirmé ce qui suit :

Le Tribunal fait généralement preuve de déférence à l’égard des évaluateurs pour ce qui est de leur évaluation des propositions. Par conséquent, il a indiqué à maintes reprises qu’il interviendra relativement à une évaluation uniquement dans les cas où elle serait réputée déraisonnable et qu’il ne substituera pas son jugement à celui des évaluateurs à moins que les évaluateurs ne se soient pas appliqués à évaluer la proposition d’un soumissionnaire, qu’ils aient donné une interprétation erronée de la portée d’une exigence, qu’ils n’aient pas tenu compte de renseignements cruciaux fournis dans une soumission, qu’ils aient fondé leur évaluation sur des critères non divulgués ou que l’évaluation n’ait pas été effectuée d’une manière équitable du point de vue de la procédure. En outre, le Tribunal a déjà indiqué que la décision d’une entité publique sera jugée raisonnable si elle est fondée sur une explication défendable, même si elle n’est pas convaincante aux yeux du Tribunal. [35]

[Notes de bas de page omises]

[46] En l’espèce, le Tribunal est d’avis que l’évaluation par le CEPMB des exemples de rapports était raisonnable et qu’elle tenait compte de toute la partie de la proposition du DB consacrée à ce critère. Les commentaires du CEPMB se rapportent directement aux exemples de rapport fournis; ils ne semblent pas déraisonnables et ils n’indiquent pas que des critères non divulgués ont été utilisés dans l’évaluation. De par leur nature, les évaluations de ce type sont dans une certaine mesure subjectives et le Tribunal ne peut évaluer que le caractère raisonnable du travail en déterminant si le CEPMB a correctement appliqué les critères. Cela semble être le cas en l’espèce.

[47] Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que l’évaluation des exemples de rapport de DB était raisonnable et conforme aux modalités de la DP [36] .

C3. – Équipe du soumissionnaire

[48] Le critère d’évaluation C3 prévoit ce qui suit [37] :

Pour les deux (2) ressources proposées au point O3, le soumissionnaire doit démontrer :

  1. l’expérience en pharmacie clinique de la ressource au-delà des cinq (5) années d’expérience démontrées au point O3;

  2. l’expérience de la ressource en matière de recherche, d’analyse et de production de rapports relativement aux renseignements tirés de la documentation scientifique, au‑delà des deux (2) années d’expérience démontrées au point O3;

  3. que l’expérience démontrée de chaque ressource en matière de recherche, d’analyse et de production de rapports relativement aux renseignements est similaire aux tâches prévues dans l’énoncé des travaux et pertinente à l’égard de ces tâches, et qu’elle comprend notamment :

  1. l’examen des médicaments;

  2. les évaluations critiques et les évaluations de la documentation;

  3. l’observation des pratiques exemplaires.

[49] L’argument principal de DB est que le CEPMB a évalué de façon incorrecte l’« expérience en pharmacie clinique » des ressources proposées.

[50] DB conteste l’évaluation technique par le comité d’évaluation de l’expérience en pharmacie clinique de M. Denis Belanger et soutient que les conclusions du comité d’évaluation manquaient de transparence quant à ce qui constitue une telle expérience. DB soutient que la première des deux ressources proposées dans le cadre de sa soumission est M. Belanger et qu’il a plus de 17 ans d’expérience clinique. Selon DB, puisque l’Ordre des pharmaciens de l’Ontario considère les activités d’information pharmacothérapeutique comme des « soins aux patients » [traduction], tout le temps que M. Belanger a passé à de telles activités devrait être considéré comme une expérience en pharmacie clinique admissible.

[51] Le CEPMB soutient que la notation du critère d’évaluation C3 par le comité d’évaluation était raisonnable. Selon le CEPMB, les membres du comité ont évalué l’exigence relative à l’expérience en pharmacie clinique en se fondant sur leur expérience collective et leur expertise partagée en tant que professionnels dans ce domaine et sur ce qu’il croyait être une compréhension commune de ce terme parmi les professionnels du domaine et non pas sur une définition ou une pratique précise dans une administration canadienne donnée [38] .

[52] La DP n’a pas défini l’expression « expérience en pharmacie clinique ». Bien que le processus aurait été plus transparent si elle l’avait fait, la signification de l’expression aurait dû être évidente pour DB lors de l’examen de la DP et des exigences techniques, préalablement à la présentation de sa soumission [39] . Par conséquent, le Tribunal doit déterminer si l’évaluation du CEPMB était raisonnable, étant donné qu’il n’y avait aucune définition sur laquelle s’appuyer pour éclaircir le sens.

[53] Le Tribunal fait observer que le CEPMB a utilisé sa connaissance de ce que l’expérience en pharmacie clinique signifiait pour les professionnels du domaine. Le CEPMB a déterminé que les services d’information pharmacothérapeutique dans un environnement non clinique ne sont pas admissibles à titre d’expérience en pharmacie clinique [40] . Le Tribunal conclut que l’explication du comité était raisonnable dans les circonstances.

[54] DB a présenté des renseignements provenant de l’ Ordre des pharmaciens de l’Ontario et a fait valoir qu’ils démontrent que l’expérience de DB dans l’exercice d’activités d’information pharmacothérapeutique est qualifiée d’expérience en pharmacie clinique. En examinant la documentation dans son ensemble, le Tribunal ne peut parvenir à la même conclusion. Un passage qui semble contredire ce que DB a tenté d’exprimer, particulièrement révélateur, est rédigé comme suit :

Fournir directement aux patients ou à leurs agents, dans le cadre de l’exercice de la profession, de l’information et de l’éducation sur l’usage de médicaments [41] .

[Traduction]

[55] Ce passage semble indiquer que les services d’information pharmacothérapeutique doivent être fournis directement aux patients ou à leurs agents pour être admissibles dans la catégorie de la partie A. D’après les renseignements au dossier, le Tribunal n’est pas certain que DB ait fourni ces services directement aux patients ou à leurs agents.

[56] Dans l’ensemble, le Tribunal conclut que le CEPMB a effectué une évaluation raisonnable de l’expérience en pharmacie clinique de DB en se fondant sur les renseignements que le DB a fournis dans sa proposition.

C4. – Capacité des ressources du soumissionnaire

[57] Le critère d’évaluation C4 prévoit ce qui suit [42] :

Le soumissionnaire doit décrire sa capacité à fournir de multiples ressources en proposant jusqu’à deux (2) ressources supplémentaires qui répondent aux qualifications minimales du point O3 et sont évaluées en fonction des critères suivants :

  1. l’expérience en pharmacie clinique de la ressource au-delà des cinq (5) années d’expérience présentées au point O4;

  2. l’expérience de la ressource en matière de recherche, d’analyse et de production de rapports relativement aux renseignements tirés de la documentation scientifique, au‑delà des deux (2) années d’expérience présentées au point O4;

  3. l’expérience de chaque ressource en matière de recherche, d’analyse et de production de rapports relativement aux renseignements est similaire aux tâches prévues dans l’énoncé des travaux et pertinente à l’égard de ces tâches, et comprend notamment :

  1. l’examen des médicaments;

  2. les évaluations critiques et les évaluations de la documentation;

  3. l’observation des pratiques exemplaires.

[Nos italiques]

[58] DB conteste l’évaluation technique par le CEPMB de l’expérience en pharmacie clinique de l’équipe, puisqu’une autre ressource proposée (Dr E.R.) a 15 ans d’expérience clinique et un autre (Dr B.D.) a 6 ans d’expérience clinique en tant que médecin.

[59] Le CEPMB a soutenu que la notation du critère d’évaluation C4 par le comité d’évaluation était raisonnable, puisque le critère faisait clairement référence à l’« expérience en pharmacie clinique de la ressource ». Selon le CEPMB, l’expérience du Dr B.D. en tant que médecin ne pouvait pas être considérée comme une expérience en pharmacie.

[60] Le Tribunal est d’accord avec le CEPMB. L’exigence portait précisément sur l’expérience en pharmacie clinique et les points seraient accordés pour l’expérience supérieure au niveau minimal d’expérience de cinq ans. Par conséquent, le Tribunal conclut que l’évaluation du CEPMB relativement à ces deux ressources et les points attribués relativement au critère d’évaluation C4 sont raisonnables et fondés sur les critères d’évaluation associés à ce critère.

Conclusion

[61] Étant donné ce qui précède, le Tribunal conclut que la plainte au motif 4 déposée par DB n’est pas fondée.

FRAIS

[62] L’article 30.16 de la Loi sur le TCCE permet au Tribunal d’accorder le remboursement des frais aux parties plaignantes ou aux institutions fédérales. Quant à savoir si les frais doivent être accordés à la partie ayant gain de cause en l’espèce, le Tribunal est d’avis que même s’il a conclu que la plainte n’était pas fondée pour les motifs énoncés précédemment, le CEPMB n’a pas demandé de recevoir ses frais raisonnables. Dans les circonstances, aucuns frais ne seront accordés.

DÉCISION

[63] Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal conclut que la plainte de n’est pas fondée. Chaque partie assumera ses propres frais en l’espèce.

Randolph W. Heggart

Randolph W. Heggart
Membre présidant


 

ANNEXE I

Article 502: Principes généraux

1. Chaque Partie accorde un accès ouvert, transparent et non discriminatoire aux marchés couverts de ses entités contractantes.

[...]

Article 515: Traitement des soumissions et adjudication des marchés

Traitement des soumissions

1. Une entité contractante reçoit, ouvre et traite toutes les soumissions selon des procédures qui garantissent l’équité et l’impartialité du processus de passation des marchés, ainsi que la confidentialité des soumissions.

[...]

Évaluation et adjudication des marchés

4. Pour être considérée en vue d’une adjudication, une soumission est présentée par écrit et, au moment de son ouverture, est conforme aux prescriptions essentielles énoncées dans les avis d’appel d’offres et dans la documentation relative à l’appel d’offres, et émane d’un fournisseur satisfaisant aux conditions de participation.

[...]

Article 516: Transparence des renseignements relatifs aux marchés

Renseignements communiqués aux fournisseurs

1. Une entité contractante informe dans les moindres délais les fournisseurs participants des décisions qu’elle a prises concernant l’adjudication du marché et, si un fournisseur le lui demande, elle le fait par écrit. Sous réserve de l’article 517, une entité contractante expose, sur demande, à un fournisseur non retenu les raisons pour lesquelles elle n’a pas retenu sa soumission.

[...]

Article 517: Divulgation de renseignements

1. Nonobstant toute autre disposition du présent chapitre, une entité contractante ne communique pas à un fournisseur particulier des renseignements qui pourraient nuire à la concurrence loyale entre fournisseurs.



[1] L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.).

[2] En ligne : <https://achatsetventes.gc.ca/donnees-sur-l-approvisionnement/appels-d-offres/PW-21-00957472>.

[3] Pièce PR-2021-056-01A (protégée) à la p. 487.

[4] Ibid. à la p. 491.

[5] Ibid. à la p. 501.

[6] Ibid. à la p. 504.

[7] Ibid.

[8] Ibid. à la p. 514 in fine.

[9] Ibid. aux p. 520–521.

[10] Pièce PR-2021-056-04; pièce PR-2021-056-05.

[11] Pièce PR-2021-056-08.

[12] Pièce PR-2021-056-09.

[13] Pièce PR-2021-056-012; pièce PR-2021-056-012A; pièce PR-2021-056-012B.

[14] Pièce PR-2021-056-014; pièce PR-2021-056-014A.

[15] Pièce PR-2021-056-015.

[16] Pièce PR-2021-056-016.

[17] Pièce PR-2021-056-01B à la p. 1; pièce PR-2021-056-01A (protégée) à la p. 10.

[18] DORS/93-602.

[19] Pièce PR-2021-056-01B à la p. 5; pièce PR-2021-056-01A (protégée) à la p. 14.

[20] Pièce PR-2021-056-06 à la p. 29.

[21] Pièce PR-2021-056-01B à la p. 9; pièce PR-2021-056-01A (protégée) à la p. 18.

[22] SZM Promotions Inc. s/n Promocenter International (31 août 2021), PR-2021-039 (TCCE) [SZM] au par. 20. Voir aussi Smiths Detection Montreal Inc. (31 juillet 2020), PR-2020-016 (TCCE) [Smiths] au par. 16; Storeimage c. Canadian Museum of Nature (18 janvier 2013), PR-2012-015 (TCCE) au par. 23.

[23] SZM au par. 20. Voir aussi Smiths au par. 16; 101199652 Saskatchewan Ltd. s/n Regina Dry Cleaners (22 avril 2021), PR-2021-004 (TCCE) au par. 30; CTS Defence Inc. c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (11 août 2021), PR-2020-102 (TCCE) [CTS] au par. 37.

[24] CTS au par. 37. Voir aussi 1075773 Ontario Inc. faisant affaire sous le nom de ctc TrainCanada (Re) (23 juillet 2007), PR-2007-026 (TCCE).

[25] Pièce PR-2021-056-01 à la p. 58.

[26] Pièce PR-2021-056-01B à la p. 23; pièce PR-2021-056-01A (protégée) à la p. 32.

[27] Amerigo Tours and Travel Inc. (19 AOÛT 2021), PR-2021-036 (TCCE) au par. 27. Voir aussi Sunny Jaura s/n Jaura Enterprises c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (9 juin 2016), PR-2015-058 (TCCE) au par. 34; Samson & Associates c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (13 avril 2015), PR‑2014‑050 (TCCE) [Samson & Associates] au par. 36; The Masha Krupp Translation Group Limited (25 août 2011), PR-2011-024 (TCCE) au par. 16; Info-Electronics H P Systems Inc. c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (2 août 2006), PR-2006-012 (TCCE).

[28] 10647802 Canada Limited (s/n Outland-Carillion Services) c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (27 août 2018), PR-2018-007 (TCCE) au par. 46.

[29] Francis H.V.A.C. Services Ltd. c. Canada (Travaux publics et des Services gouvernementaux), 2017 CAF 165 (CanLII) [Francis H.V.A.C.] au par. 22.

[30] La section 1.6 de la DP indique que le besoin est assujetti aux dispositions de l’ALEC et des neuf accords commerciaux comportant des chapitres sur les marchés publics. Aux fins de la présente enquête, le Tribunal s’appuiera sur les dispositions de l’ALEC.

[31] Pièce-PR-2021-056-06 à la p. 29.

[32] Pièce PR-2021-056-01B aux p. 15, 16; pièce PR-2021-056-01A (protégée) à la p. 483.

[33] NISIT International Ltd. c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (20 juillet 2020), PR‑2019-067 (TCCE) au par. 75.

[34] Rescue 7 Inc. c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (31 octobre 2018), PR-2018-019 (TCCE) au par. 25; Dynamic Engineering Inc. c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (16 May 2018), PR-2017-060 (TCCE) au par. 27; Star Group International Trading Corporation c. Construction de défense (1951) Limitée (7 avril 2014), PR-2013-032 (TCCE) au par. 26.

[35] Samson & Associates au par. 35.

[36] The Tribunal observe que certains arguments avancés par DB se rapportent à des éléments de la DP qui étaient connus, ou qui auraient dû l’être, au moment où DB a pris connaissance de la DP et de l’exigence technique. Par conséquent, dans la mesure où ces arguments pourraient constituer des motifs de plainte distincts, ils ont été déposés en dehors du délai prescrit à la section 6 du Règlement.

[37] Pièce PR-2021-056-06 à la p. 31.

[38] Pièce PR-2021-056-12 à la p. 21.

[39] Le Tribunal fait remarquer que DB aurait pu demander au CEPMB d’expliquer le sens de ce terme au cour du processus de passation du marché.

[40] Pièce PR-2021-056-12 à la p. 22.

[41] Ontario College of Pharmacists, online: ˂https://www.ocpinfo.com/registration/register-pharmacist/two-part-register/>.

[42] Pièce-PR-2021-056-06 à la p. 32.

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