Enquêtes sur les marchés publics

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Dossier PR-2021-070

Steeple Incorporated

Décision prise
le lundi 7 février 2022

Décision et motifs rendus
le mercredi 16 février 2022

 


EU ÉGARD À une plainte déposée aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

PAR

STEEPLE INCORPORATED

CONTRE

LE MINISTÈRE DE LA DÉFENSE NATIONALE

DÉCISION

Aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur a décidé de ne pas enquêter sur la plainte.

Peter Burn

Peter Burn
Membre présidant

 


EXPOSÉ DES MOTIFS

[1] En vertu du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur (Loi sur le TCCE), tout fournisseur potentiel peut, sous réserve du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics (Règlement), déposer une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur concernant la procédure des marchés publics suivie relativement à un contrat spécifique et lui demander d’enquêter sur cette plainte. En vertu du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le TCCE, après avoir jugé la plainte conforme au paragraphe 30.11(2) de la Loi sur le TCCE et sous réserve du Règlement, le Tribunal détermine s’il y a lieu d’enquêter.

RÉSUMÉ DE LA PLAINTE

[2] La présente plainte concerne un appel d’offres publié par le ministère de la Défense nationale (MDN) en vue de la fourniture de divers composants et accessoires de véhicules (appel d’offres W8486 228424/A).

[3] La plaignante, Steeple Incorporated (Steeple), allègue dans sa plainte déposée auprès du Tribunal que le MDN a évalué de manière injuste ses pièces de rechange pour les articles 9 et 10, qui, selon elle, ont « une forme, un ajustement et une fonction conformes [...] à une norme de l’industrie [...] par opposition à la pièce indiquée » [traduction] dans la demande de proposition (DP) du MDN, laquelle n’est pas une pièce normalisée et provient d’une entreprise privée [1] .

CONTEXTE

[4] Le 26 novembre 2021, le MDN a publié l’appel d’offres et la date de clôture était fixée au 21 décembre 2021.

[5] L’appel d’offres permettait à de nombreux soumissionnaires de fournir différentes pièces sur un total de 27 articles.

[6] Steeple a présenté une soumission pour les articles 9 à 17 au plus tard à la date de clôture.

[7] Le 21 janvier 2022, le MDN a envoyé à Steeple une lettre de refus, dans laquelle il l’informait que sa soumission n’avait pas atteint « le prix évalué le plus bas [...] selon la méthode de sélection décrite dans l’appel d’offres » [2] . Le contrat a été octroyé à Unisource Technology Inc. pour 31 569 $, à Simex Defence Inc. pour 825 $ et à JHT Defense Inc. pour 2 436 $, pour un montant total de 34 830 $ [3] .

[8] Le 24 janvier 2022, Steeple a demandé si les variantes de pièces qu’elle avait proposées pour les articles cités étaient « acceptables sur le plan technique » ou si le montant de sa soumission était trop élevé [4] .

[9] Le 25 janvier 2022, le MDN a informé Steeple que les pièces de rechange qu’elle proposait pour les articles 9, 10, 14 et 15 avaient été jugées non conformes, alors que les autres articles qu’elle proposait étaient plus coûteux que ceux des autres soumissionnaires [5] . Steeple a alors demandé au MDN de préciser pourquoi les articles 9 et 10 avaient été jugés non conformes par le responsable technique [6] .

[10] Plus tard le même jour, le MDN a indiqué que le responsable technique était chargé d’évaluer les pièces de rechange et que, compte tenu de l’expérience des personnes en place à titre de responsables techniques, le MDN ne « remettrait pas en question leur décision » [7] .

[11] Steeple a répondu par courriel au MDN en lui indiquant qu’elle avait besoin de ces renseignements afin de comprendre quels critères avaient été utilisés pour rejeter ses variantes de pièces pour les articles 9 et 10 [8] .

[12] Le 26 janvier 2022, le MDN a transmis à Steeple la réponse de son responsable technique, qui se lit comme suit : « Selon la directive de la DGSMCA/DISCO, votre fournisseur n’a pas respecté la norme DWG pour l’attribution d’un numéro de nomenclature de l’OTAN. [9] »

[13] Le 1er février 2022, Steeple a déposé une plainte auprès du Tribunal.

ANALYSE

[14] Aux termes des articles 6 et 7 du Règlement, le Tribunal peut ouvrir une enquête si les quatre conditions suivantes sont remplies :

(i) la plainte a été déposée dans les délais prescrits à l’article 6 du Règlement [10] ;

(ii) le plaignant est un fournisseur potentiel [11] ;

(iii) la plainte porte sur un contrat spécifique [12] ;

(iv) les renseignements fournis démontrent, dans une mesure raisonnable, que la procédure du marché public n’a pas été suivie conformément aux accords commerciaux applicables par l’institution fédérale [13] .

[15] L’alinéa 7(1)b) prévoit que la plainte doit « port[er] sur un contrat spécifique ».

[16] L’article 30.1 de la Loi sur le TCCE définit « contrat spécifique » de la façon suivante :

contrat spécifiqueContrat relatif à un marché de fournitures ou services qui a été accordé par une institution fédérale — ou pourrait l’être — , et qui soit est précisé par règlement, soit fait partie d’une catégorie réglementaire.(designated contract)

[17] Le paragraphe 3(1) du Règlement prévoit ce qui suit :

3(1) Pour l’application de la définition de contrat spécifique à l’article 30.1 de la Loi, est un contrat spécifique tout contrat relatif à un marché de fournitures ou de services ou de toute combinaison de ceux-ci, accordé par une institution fédérale — ou qui pourrait l’être — et visé, individuellement ou au titre de son appartenance à une catégorie, à l’article II de l’Accord sur les marchés publics, à l’article Kbis-01 du chapitre Kbis de l’ALÉCC, à l’article 1401 du chapitre quatorze de l’ALÉCP, à l’article 1401 du chapitre quatorze de l’ALÉCCO, à l’article 16.02 du chapitre seize de l’ALÉCPA, à l’article 17.2 du chapitre dix-sept de l’ALÉCH, à l’article 14.3 du chapitre quatorze de l’ALÉCRC, à l’article 19.2 du chapitre dix-neuf de l’AÉCG, à l’article 504 du chapitre cinq de l’ALÉC, à l’article 10.2 du chapitre dix de l’ALÉCU ou à l’article 15.2 du chapitre quinze du PTP.

[18] Pour les motifs suivants, le Tribunal conclut que la plainte ne porte pas sur un contrat spécifique.

La plainte ne porte pas sur un contrat spécifique

[19] Steeple allègue que les variantes de pièces qu’elle a proposées au MDN pour les articles 9 et 10 ont été injustement jugées non conformes et que les numéros de pièces spécifiés dans la DP du MDN correspondent à des pièces qui sont utilisées par une entreprise privée au lieu de renvoyer aux numéros de pièces normalisées et utilisées dans l’industrie [14] .

[20] Les dispositions des accords commerciaux mentionnées au paragraphe 3(1) du Règlement imposent des seuils monétaires qui doivent être respectés afin qu’une procédure de marché public soit couverte par leurs chapitres respectifs [15] . Les seuils en vigueur de chaque accord commercial, pour la période du 1er janvier 2022 au 31 décembre 2023, sont publiés par le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada dans l’Avis sur la politique des marchés 2021-6 - Accords commerciaux : Mise à jour des seuils [16] .

[21] La plainte et l’appel d’offres indiquent clairement que le marché en question portait sur la fourniture de biens, à savoir des pièces de rechange pour des véhicules. De plus, l’appel d’offres indique que seul l’Accord de libre-échange canadien (ALEC) est applicable [17] .

[22] Par conséquent, le Tribunal conclut que le seuil monétaire prévu pour les biens dans l’ALEC est applicable afin de déterminer si le marché public est couvert par l’ALEC. Étant donné que le MDN est un ministère fédéral, le seuil applicable aux institutions fédérales s’applique dans le cadre de la présente analyse.

[23] Le seuil monétaire de l’ALEC pour les biens achetés par une institution fédérale est de 30 300 $.

[24] Dans son courriel envoyé au Tribunal le 1er février 2022, Steeple a indiqué que la valeur des articles achetés dont il est question dans le présent dossier, c’est-à-dire les articles 9 et 10, est de 384 $ [18] .

[25] Le Tribunal conclut donc que, même si la procédure de passation de marché dans son ensemble pourrait se rapporter à un contrat spécifique, compte tenu de sa valeur totale de 34 380 $, la valeur des biens en question (384 $) est bien inférieure au seuil prévu par l’ALEC pour ce type de marché public.

[26] Le Tribunal conclut donc que la procédure de passation de marché en question ne porte pas sur un contrat spécifique au sens de l’article 30.1 de la Loi sur le TCCE et du paragraphe 3(1) du Règlement [19] .

[27] Puisque la valeur des biens en question est inférieure au seuil prévu par l’ALEC, il se peut que le Bureau de l’ombudsman de l’approvisionnement (BOA) ait compétence. Steeple devrait tenir compte du fait qu’il peut encore être possible d’avoir accès au mécanisme de recours du BOA, étant donné que les délais que ce dernier applique sont plus longs que ceux du Tribunal.

DÉCISION

[28] Aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal a décidé de ne pas enquêter sur la plainte.

Peter Burn

Peter Burn
Membre présidant

 



[1] Pièce PR-2021-070-01 à la p. 6.

[2] Ibid. à la p. 18.

[3] Ibid.

[4] Ibid. à la p. 17.

[5] Ibid.

[6] Ibid.

[7] Ibid. à la p. 16.

[8] Ibid.

[9] Ibid. à la p. 15.

[10] Paragraphe 6(1) du Règlement.

[11] Alinéa 7(1)a) du Règlement.

[12] Alinéa 7(1)b) du Règlement.

[13] Alinéa 7(1)c) du Règlement.

[14] Pièce PR-2021-070-01 à la p. 6.

[15] Voir les articles 504(3) et (4) de l’Accord de libre-échange canadien.

[17] Pièce PR-2021-070-01.C à la p. 12.

[18] Ibid. à la p. 43.

[19] Voir, par exemple, Providence Group c. Ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement (1er avril 2021), PR-2020-100 (TCCE).

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