Enquêtes sur les marchés publics

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EU ÉGARD À une plainte déposée par PricewaterhouseCoopers LLP aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur;

ET À LA SUITE D’une décision d’enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

ENTRE

PRICEWATERHOUSECOOPERS LLP

Partie plaignante

ET

LE MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

Institution fédérale

DÉCISION

Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur (Loi sur le TCCE), le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte n’est pas fondée.

Aux termes de l’article 30.16 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal accorde au ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux une indemnité raisonnable pour les frais engagés dans sa réponse à la plainte, indemnité qui doit être versée par PricewaterhouseCoopers LLP. Conformément aux Lignes directrices sur la fixation des frais dans une procédure de plainte portant sur un marché public (Lignes directrices), le Tribunal détermine provisoirement que le degré de complexité de la présente plainte correspond au degré 1 et que le montant de l’indemnité est de 750 $. Si l’une ou l’autre des parties n’est pas d’accord en ce qui a trait à la détermination provisoire du degré de complexité ou du montant de l’indemnité, elle peut déposer des observations auprès du Tribunal, en conformité avec l’article 4.2 des Lignes directrices. Il relève de la compétence du Tribunal de fixer le montant définitif de l’indemnité.

L’exposé des motifs suivra à une date ultérieure.


 

Membres du Tribunal :

Peter Burn, membre présidant

Personnel du Secrétariat du Tribunal :

Alain Xatruch, conseiller juridique principal
Isaac Turner, conseiller juridique
Matthew Riopelle, agent du greffe
Geneviève Bruneau, agente du greffe

Partie plaignante :

PricewaterhouseCoopers LLP

Conseillers juridiques de la partie plaignante :

Martin G. Masse
Erika Woolgar

Institution fédérale :

Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux

Conseillers juridiques de l’institution fédérale :

Don Karl Roberto
Meryam Miftah-Idrissi
Dawn Pritchard

Partie intervenante :

Ernst & Young LLP

Conseillers juridiques de la partie intervenante :

Vincent DeRose
Jennifer Radford
Stephanie Desjardins

Veuillez adresser toutes les communications à :

La greffière adjointe
Téléphone : 613-993-3595
Courriel : tcce-citt@tribunal.gc.ca

 


EXPOSÉ DES MOTIFS

RÉSUMÉ DE LA PLAINTE

[1] PricewaterhouseCoopers LLP (PwC) a déposé une plainte auprès du Tribunal canadien du commerce extérieur, aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur [1] (Loi sur le TCCE), relativement à une demande de propositions (DP) (appel d’offres WS3057891067) publiée par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (TPSGC), au nom du ministère de la Défense nationale (MDN), dans le cadre de l’arrangement en matière d’approvisionnement (AMA) pour des services professionnels centrés sur les tâches et les solutions (SPTS) (E60ZT-16TSSB/D). L’appel d’offres visait la prestation d’évaluations des risques liés à l’identification de la chaîne d’approvisionnement (ERICA) de certains systèmes de défense du MDN et des Forces armées canadiennes.

[2] PwC allègue que TPSGC n’a pas évalué sa soumission conformément aux critères d’évaluation publiés du critère technique coté 3 (CT3), a ignoré des renseignements pertinents fournis dans sa soumission, ou s’est appuyé sur des hypothèses erronées concernant les renseignements fournis dans sa soumission, de sorte qu’elle a obtenu, à tort, une note de zéro pour ce critère technique. Selon PwC, si ce n’avait été de l’évaluation erronée de TPSGC, elle aurait obtenu une note globale beaucoup plus élevée que celle d’Ernst & Young LLP (E&Y), le soumissionnaire retenu, et PwC aurait donc obtenu le contrat [2] .

[3] À titre de mesure corrective, PwC a demandé que le Tribunal recommande l’annulation du contrat attribué à E&Y et qu’un nouveau contrat soit plutôt attribué à PwC. À titre subsidiaire, PwC a demandé au Tribunal de recommander que TPSGC réévalue sa soumission technique en ce qui a trait au CT3 et que, si sa soumission obtenait la note la plus élevée, le contrat lui soit attribué. À titre très subsidiaire, PwC a demandé que le Tribunal recommande qu’elle soit indemnisée pour sa perte de profits et les frais associés à la préparation de sa soumission. PwC a également demandé qu’on lui adjuge les frais qu’elle a engagés à l’égard de sa plainte.

[4] Ayant déterminé que la plainte satisfaisait aux conditions énoncées au paragraphe 7(1) du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics [3] (Règlement), le Tribunal a décidé, conformément au paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le TCCE, d’enquêter sur la plainte.

[5] Le Tribunal a enquêté sur le bien-fondé de la plainte, comme l’exigent les articles 30.13 à 30.15 de la Loi sur le TCCE. Pour les motifs qui suivent, le Tribunal conclut que la plainte n’est pas fondée.

PROCÉDURE DU MARCHÉ PUBLIC

[6] Le 16 juillet 2021, TPSGC a invité 27 détenteurs d’AMA pour des SPTS, y compris PwC et E&Y, à présenter une proposition en réponse à la DP [4] . L’appel d’offres a pris fin le 23 septembre 2021. TPSGC a reçu trois soumissions conformes, y compris celles présentées par PwC et E&Y.

[7] Conformément à la section 4.2.1.1 de la DP, pour être déclarées conformes, les soumissions devaient satisfaire à toutes les exigences de l’appel d’offres et à tous les critères d’évaluation obligatoires, et obtenir un nombre minimum de points pour les critères techniques cotés [5] . C’est la soumission conforme obtenant la note combinée la plus élevée pour le mérite technique et le prix qui serait recommandée pour l’attribution du contrat.

[8] La DP comprenait quatre critères techniques cotés qui, ensemble, permettaient d’obtenir un maximum de 100 points [6] . En vertu du CT3, les soumissionnaires devaient démontrer qu’ils avaient déjà analysé un système complexe, où la valeur du système servait d’indicateur de sa complexité. Ce critère, qui a été modifié par TPSGC le 29 juillet 2022, se lit comme suit [7] :

[Traduction]

[9] Dans sa soumission technique, PwC a identifié un « Programme de visibilité des fournisseurs » [traduction] pour une branche des forces armées américaines comme projet complexe qui répondait au CT3. Sa soumission décrivait le projet en partie comme suit [8] :

Une importante branche des forces armées américaines manquait de transparence dans l’ensemble de son vaste réseau de fournisseurs de systèmes d’armes. Le nombre d’heures par personne nécessaires pour construire et visualiser les niveaux 1 à 6 était inefficace et non viable. Le client voulait une façon plus efficace de répertorier tous les fournisseurs, de déterminer les fournisseurs assujettis à des restrictions, de surveiller la santé continue des fournisseurs en temps réel et d’être averti des changements de statut des fournisseurs qui poseraient un risque pour les opérations.

Le client a choisi de mettre en œuvre une solution de résilience opérationnelle avec un budget annuel de 8 milliards de dollars qui fournit une plateforme automatisée pour assurer :

[Traduction; caractères gras dans l’original]

[10] Le 19 novembre 2021, TPSGC a demandé des précisions à PwC au sujet de sa réponse au CT3. Sa demande a été formulée en partie comme suit [9] :

[PwC] doit indiquer au Canada où, dans sa soumission, elle indique la valeur en dollars du système complexe (un seul projet ou un cycle production) pour lequel [PwC] a effectué des analyses.

Votre soumission indique un budget annuel de 8 milliards de dollars pour la fourniture d’une plateforme automatisée afin d’assurer la visibilité de tous les fournisseurs de divers systèmes, l’éclairage et la surveillance des risques liés à la chaîne d’approvisionnement ainsi que l’évaluation de ces risques. Étant donné que ce critère coté utilise la valeur d’un système comme indicateur de la complexité du système pour lequel une évaluation des risques liés à l’identification de la chaîne d’approvisionnement a été effectuée, [PwC] est invitée à préciser où se trouvent, dans sa soumission, la valeur du ou des systèmes visés par une évaluation des risques liés à l’identification de la chaîne d’approvisionnement.

[Traduction]

[11] TPSGC a également indiqué clairement que sa demande de précisions ne devait pas être interprétée comme une invitation pour PwC à modifier ou à adapter sa proposition de quelque façon que ce soit [10] .

[12] Le 24 novembre 2021, PwC a fourni la réponse suivante à la demande de précisions de TPSGC [11] :

Le montant de 8 milliards de dollars américains indiqué dans notre réponse au CT3 renvoie au budget annuel d’exploitation du système intégré de guerre (SIG) du Bureau de l’administration des programmes (BAP) du Department of Defense (Marine) des États-Unis, pour lequel PwC a effectué des évaluations des risques liés à l’identification de la chaîne d’approvisionnement (ERICA) sur 66 plateformes d’armes de catégorie d’acquisition I à IV (ACAT I à IV). À titre de référence, ces plateformes représentent, ensemble, 30 655 fournisseurs dont la valeur combinée est estimée à 135 milliards de dollars américains. Par exemple, le système d’armes pour destroyers de classe Zumwalt (DDG 1000) a un coût unitaire total d’environ 4 milliards de dollars américains et un coût d’environ 23 milliards de dollars pour l’ensemble du programme, et le système de combat Aegis a un coût total d’environ 2 milliards de dollars. Vous trouverez ci-joint un document non classifié illustrant la portée du SIG du BAP et des plateformes pour lesquelles PwC a effectué des ERICA dans les catégories d’acquisition identifiées à titre de référence supplémentaire.

[Traduction]

[13] Le 24 décembre 2021, TPSGC a avisé PwC qu’un contrat de 8 238 168,75 $ (taxes comprises) avait été attribué à E&Y [12] . Il a également informé PwC que sa soumission n’avait obtenu aucun point pour le CT3. TPSGC a fourni à PwC la feuille de notation cumulative pour ce critère, qui comprenait les commentaires suivants de l’équipe d’évaluation technique [13] :

Le soumissionnaire n’a pas démontré qu’il satisfait à cette exigence. Bien qu’il ait indiqué que le projet 2 répondait à l’exigence à la page 34 de la soumission, il ne fournit pas la valeur du ou des systèmes pour lesquels il a effectué des évaluations des risques liés à l’identification de la chaîne d’approvisionnement. Le soumissionnaire indique que le client a choisi, pour le projet 2, de mettre en œuvre une solution de résilience opérationnelle avec un budget annuel de 8 milliards de dollars qui fournit une plateforme automatisée pour assurer [...] (résumant la capacité de la plateforme automatisée à l’égard des évaluations des risques liés à l’identification de la chaîne d’approvisionnement).

La valeur à utiliser comme indicateur de la complexité du système n’est pas représentative de la valeur d’un système où la solution d’évaluations des risques liés à l’identification de la chaîne d’approvisionnement est appliquée, mais plutôt du budget annuel alloué à la mise en œuvre de la solution d’évaluations des risques liés à l’identification de la chaîne d’approvisionnement.

Le soumissionnaire énumère les types de systèmes pour lesquels la plateforme automatisée a appuyé les évaluations des risques liés à l’identification de la chaîne d’approvisionnement, comme : les systèmes d’armes, le commandement et le contrôle des armes, les armes de surface de navires, les capteurs de surface, etc. Toutefois, il ne fournit pas la valeur de ces systèmes ni la valeur des projets d’acquisition ou de soutien de ces systèmes.

Le Canada a demandé des précisions au soumissionnaire afin de déterminer où se trouvait, dans la soumission, la valeur du ou des systèmes. Le soumissionnaire a renvoyé à la même section de la soumission et a fourni des renseignements supplémentaires qui ne pouvaient pas être utilisés puisqu’ils ne faisaient pas partie de la soumission initiale.

[Traduction]

[14] Le 12 janvier 2022, PwC a envoyé une lettre à TPSGC, s’opposant à la décision de l’équipe d’évaluation technique et à l’attribution du contrat à E&Y [14] . Selon PwC, étant donné que sa soumission démontrait qu’elle avait analysé un système complexe qui satisfaisait aux exigences de CT3 et indiquait que ce système avait une valeur supérieure à 5 milliards de dollars, elle aurait dû obtenir la totalité des 30 points pour ce critère et, par conséquent, le contrat aurait dû lui être attribué.

[15] Le 8 février 2022, TPSGC a répondu à l’opposition de PwC en déclarant que sa décision du 24 décembre 2021 demeurait inchangée, refusant ainsi à PwC toute réparation [15] . TPSGC a indiqué que la soumission technique de PwC indiquait la valeur de la plateforme automatisée utilisée pour effectuer les évaluations des risques des systèmes complexes plutôt que la valeur des systèmes complexes évalués. Il a également indiqué que, bien que PwC ait fourni des valeurs supplémentaires pour les systèmes complexes qui ont été évalués à l’aide de sa plateforme automatisée en réponse à la demande de précisions de TPSGC, ces valeurs n’ont pas pu être utilisées parce qu’elles n’avaient pas été fournies dans la soumission initiale et que, si elles avaient été utilisées, elles auraient été considérées comme une modification à la soumission.

PROCÉDURE DE LA PLAINTE

[16] Le 22 février 2022, PwC a déposé sa plainte auprès du Tribunal.

[17] Le 25 février 2022, le Tribunal a informé PwC et TPSGC qu’il avait accepté d’enquêter sur la plainte le 23 février 2022. Le 3 mars 2022, après la confirmation par TPSGC qu’un contrat avait été attribué à E&Y, le Tribunal a informé E&Y qu’il avait décidé d’enquêter sur la plainte de PwC.

[18] Le 16 mars 2022, E&Y a demandé l’autorisation d’intervenir dans l’enquête du Tribunal. Le Tribunal a accordé le statut de partie intervenante à E&Y le 22 mars 2022.

[19] Le 25 mars 2022, TPSGC a déposé son rapport de l’institution fédérale (RIF).

[20] Le 29 mars 2022, PwC a déposé une requête, aux termes de l’article 24 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur [16] , en vue d’obtenir une ordonnance du Tribunal enjoignant à TPSGC de produire certains documents qui n’avaient pas été fournis avec le RIF, lesquels, selon PwC, étaient pertinents à la plainte. Il s’agissait notamment des fiches de notation individuelles et des notes de chaque évaluateur relatives à l’évaluation par TPSGC de la réponse de PwC au CT3.

[21] Le 4 avril 2022, en réponse à la requête de PwC, TPSGC a déposé les fiches de notation individuelles demandées, ainsi que tous les autres documents existants qui étaient conformes à la demande de PwC.

[22] Le 6 avril 2022, PwC a indiqué qu’elle avait identifié deux documents pertinents qui semblaient avoir été omis par inadvertance.

[23] À la même date, TPSGC a déposé un ensemble révisé de documents qui comprenaient l’un des documents manquants identifiés par PwC. Il a également confirmé que le deuxième document potentiellement manquant n’existait pas.

[24] Le 7 avril 2022, PwC a indiqué qu’elle était satisfaite de la divulgation. Par conséquent, le Tribunal n’a pas eu à se prononcer sur la requête.

[25] Le 12 avril 2022, E&Y a déposé ses observations sur la plainte et le RIF.

[26] Le 20 avril 2022, PwC a déposé ses observations sur le RIF et les observations d’E&Y.

[27] Les renseignements au dossier étant suffisants pour déterminer le bien-fondé de la plainte, le Tribunal a décidé qu’une audience n’était pas nécessaire et a statué sur la plainte sur la foi des renseignements écrits au dossier.

ANALYSE

[28] Aux termes du paragraphe 30.14(1) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal doit, lorsqu’il a décidé d’enquêter, limiter son étude à l’objet de la plainte. À la fin de l’enquête, le Tribunal doit déterminer la validité de la plainte en fonction du respect des critères et procédures établis par règlement pour le contrat spécifique.

[29] L’article 11 du Règlement précise que le Tribunal doit déterminer si le marché public a été passé conformément aux exigences énoncées dans les accords commerciaux applicables, lesquels, en l’espèce, comprennent l’Accord de libre-échange canadien (ALEC) [17] .

[30] La plainte de PwC allègue essentiellement que TPSGC n’a pas évalué sa soumission conformément aux critères d’évaluation publiés pour le CT3. Ainsi, l’alinéa 507.3b) de l’ALEC, qui exige qu’une entité contractante « effectue son évaluation sur la base des conditions qu’elle a spécifiées à l’avance dans ses avis d’appel d’offres ou sa documentation relative à l’appel d’offres », est pertinent dans le contexte de la présente enquête. Sont aussi pertinents les articles 515.1 et 515.4 de l’ALEC, qui prévoient qu’une entité contractante doit « trait[er] toutes les soumissions selon des procédures qui garantissent l’équité et l’impartialité du processus de passation des marchés » et que « [p]our être considérée en vue d’une adjudication, une soumission [...], au moment de son ouverture, est conforme aux prescriptions essentielles énoncées dans les avis d’appel d’offres et dans la documentation relative à l’appel d’offres [...] ».

[31] Pour déterminer s’il y a eu manquement aux obligations susmentionnées, le Tribunal fait généralement preuve de déférence à l’égard des évaluateurs pour ce qui est de leur évaluation des soumissions. En règle générale, le Tribunal n’interviendra relativement à une évaluation que si celle‑ci est réputée déraisonnable [18] et il ne substituera pas son jugement à celui des évaluateurs, à moins que les évaluateurs ne se soient pas appliqués à évaluer la proposition d’un soumissionnaire, qu’ils n’aient pas tenu compte de renseignements cruciaux fournis dans une soumission, qu’ils aient donné une interprétation erronée de la portée d’une exigence, qu’ils aient fondé leur évaluation sur des critères non divulgués ou que l’évaluation n’ait pas été effectuée d’une manière équitable du point de vue de la procédure [19] .

[32] De plus, le Tribunal a toujours été d’avis qu’il incombe au soumissionnaire de faire preuve de diligence raisonnable dans la préparation de sa proposition afin de s’assurer qu’elle n’est pas ambiguë et qu’elle peut être bien comprise par l’entité contractante [20] . Le Tribunal a aussi déjà clairement indiqué que, lorsqu’une incertitude demeure relativement à une exigence, il incombe au soumissionnaire de demander des précisions [21] .

[33] Comme il a été indiqué ci-dessus, aux termes du CT3, les soumissionnaires devaient démontrer qu’ils avaient déjà analysé un système complexe, où la valeur du système servait d’indicateur de sa complexité. Ainsi, en pratique, les soumissionnaires devaient 1) identifier un « système » qu’ils avaient déjà analysé et 2) fournir la « valeur » de ce système en dollars canadiens. De leur côté, les évaluateurs devaient déterminer si un « système » qui avait déjà été analysé avait été identifié et, si la valeur de ce système était fournie, déterminer la note correspondante. Le nombre maximal de points était accordé pour un système d’une valeur de 5 milliards de dollars ou plus.

[34] Selon TPSGC, la plainte n’est pas fondée parce que PwC n’a pas fourni, dans sa soumission, la valeur des systèmes complexes qu’elle avait analysés, qu’il n’était pas clair quels systèmes complexes elle avait analysés et que, après la demande de précisions de TPSGC, PwC a fourni des renseignements qui contredisaient les renseignements contenus dans sa soumission et qui constituaient de nouveaux renseignements dont les évaluateurs n’auraient pas pu tenir compte, car cela aurait en fait équivalu à une modification inadmissible de la soumission.

[35] Par conséquent, aux fins de la présente enquête, le Tribunal doit déterminer s’il était justifié pour TPSGC de conclure que PwC n’avait pas fourni, dans sa soumission, la valeur du ou des systèmes qu’il avait déjà analysés et, par conséquent, de ne pas lui accorder de points pour le CT3. Cela implique l’examen de la question de savoir si une « valeur » a été fournie dans la soumission et, le cas échéant, si la valeur visait le système ou les systèmes analysés.

PwC a-t-elle fourni une « valeur » dans sa soumission?

[36] En réponse au CT3, la soumission technique de PwC renvoyait à une « solution de résilience opérationnelle avec un budget annuel de 8 milliards de dollars » [traduction; caractères gras dans l’original]. Il s’agissait du seul montant en dollars inclus dans cette partie de la soumission de PwC. Dans sa réponse à la demande de précisions de TPSGC, PwC a indiqué que ce montant renvoyait au « budget annuel d’exploitation » [traduction] du système intégré de guerre (SIG) du Bureau de l’administration des programmes (BAP) du Department of Defense (Marine) des États-Unis [22] . Elle a également fourni des montants en dollars supplémentaires concernant certaines plateformes et certains systèmes qui, selon elle, faisaient partie du système ou des systèmes qu’elle avait analysés. La question qui se pose est donc de savoir si le « budget annuel d’exploitation » [traduction] d’une solution ou d’un système peut être considéré comme étant la « valeur » de cette solution ou de ce système.

Positions des parties

[37] PwC soutient que le montant de 8 milliards de dollars indiqué dans sa soumission a été choisi parce qu’il comprenait les coûts du capital et d’exploitation, et qu’il représentait une détermination raisonnable de la valeur du système, puisque les systèmes sont constitués de nombreux éléments ayant une durée de vie utile différente. Elle soutient en outre que, puisque le terme « valeur » n’a pas été défini dans la DP et que le CT3 ne précisait pas la façon dont les soumissionnaires devaient calculer le montant en dollars qui devait être présenté pour représenter la « valeur du système » qui avait été analysé, elle avait le droit de présumer que le terme aurait son sens ordinaire. À son avis, le sens ordinaire de la « valeur » d’un « système » peut signifier de nombreuses valeurs différentes donnant lieu à un éventail de chiffres, comme le coût annuel de la propriété, le coût historique, la valeur comptable actuelle, la valeur de remplacement actuelle, la future valeur de remplacement et le coût total de la propriété. PwC affirme donc qu’en indiquant un budget annuel de 8 milliards de dollars pour l’ensemble du SIG du BAP de la Marine, elle a fourni une « valeur » valide relativement à un « système » qu’il avait déjà analysé.

[38] PwC s’est également opposée à ce que TPSGC considère sa réponse à la demande de précisions comme une « modification importante » [traduction] de sa soumission initiale, de sorte qu’elle constitue une modification de la soumission. Elle a soutenu que les « valeurs additionnelles » [traduction] ou les « nouveaux renseignements » [traduction] inclus dans ses précisions visaient simplement à fournir un contexte supplémentaire concernant la complexité du système et que ces renseignements ne remplaçaient pas les renseignements existants (c’est-à-dire le chiffre de 8 milliards de dollars) qui étaient déjà contenus dans sa soumission initiale. Il affirme donc qu’il était déraisonnable pour TPSGC d’ignorer l’aspect de ses précisions qui répondait directement à sa question.

[39] TPSGC soutient que les évaluateurs ne disposaient pas de suffisamment de renseignements pour établir un lien entre le budget annuel d’exploitation indiqué par PwC dans sa soumission et la valeur d’un système complexe. À cet égard, il soutient que les évaluateurs ne pouvaient pas présumer que le budget annuel d’exploitation ne comprenait pas d’autres coûts plutôt que de représenter la valeur d’un système, ou que le coût d’exploitation d’un système au cours d’une année donnée serait égal ou supérieur à la valeur du système lui-même [23] .

[40] TPSGC ajoute que les renseignements fournis par PwC dans sa réponse à la demande de précisions contredisaient et complétaient les renseignements contenus dans la soumission de PwC. Il soutient que, dans la mesure où les précisions apportées à la soumission ont permis d’identifier de nouveaux systèmes et valeurs qui n’étaient pas mentionnés dans la soumission initiale, il s’agissait de nouveaux renseignements qui constituaient une modification importante de la soumission initiale. Il ajoute que, si PwC avait cru que le budget d’exploitation d’un client qui utilise un système particulier (voire le budget d’exploitation d’un système) était un meilleur indicateur ou un indicateur équivalent de la complexité d’un système, il lui incombait de demander, au cours du processus d’appel d’offres, si le terme « valeur » pouvait être ajusté ou élargi en conséquence.

[41] Adoptant une position similaire à celle de TPSGC, E&Y soutient que le « budget annuel d’exploitation » [traduction] du SIG du BAP de la Marine n’équivaut pas à la valeur d’un système complexe et que TPSGC ne pouvait tenir compte d’aucun des exemples de valeurs de système fournis par PwC dans ses précisions, ce qui équivaudrait à une modification de la soumission. Elle soutient que les modalités de la DP ne permettaient pas aux soumissionnaires de fournir le budget annuel d’exploitation du ministère responsable des systèmes comme indicateur de la valeur réelle des systèmes. E&Y soutient également que, dans la mesure où PwC croyait que l’exigence du CT3 était ambiguë, elle aurait dû demander des précisions au cours du processus d’appel d’offres.

Analyse du Tribunal

[42] Le Tribunal conclut que la décision de TPSGC de ne pas accorder de points à PwC pour le CT3 était justifiée dans les circonstances, puisque, selon le Tribunal, la « valeur » d’un système ne peut raisonnablement être interprétée comme signifiant le budget annuel d’exploitation de ce système. Bien que le Tribunal reconnaisse que, comme l’a noté PwC, le terme « valeur », lorsqu’il est interprété dans le contexte du CT3, peut englober de nombreuses significations différentes, y compris le coût historique (c’est-à-dire le coût d’acquisition), la valeur comptable et la valeur de remplacement d’un système, il est d’avis que le coût d’exploitation d’un système, que ce soit pour une année donnée ou pour toute sa durée de vie, ne représente pas, ou ne peut être réputée de représenter, la « valeur » de ce système. Cela est clairement démontré par le fait que le choix de la période sur laquelle le coût est exprimé est entièrement arbitraire.

[43] Malgré l’importance relative du sens à donner au terme « valeur », aucune des parties n’a présenté au Tribunal une définition de dictionnaire de ce terme. Toutefois, il est bien établi que les cours de justice et les tribunaux peuvent prendre connaissance d’office du sens courant des mots selon le dictionnaire [24] . Le dictionnaire Merriam-Webster définit « value » (valeur) ainsi : « the monetary worth of something » (la valeur monétaire d’une chose) [25] . De même, le Cambridge Dictionary définit ce mot comme « the amount of money that can be received for something » (la somme d’argent qui peut être reçue en échange de quelque chose) [26] .

[44] Selon Tribunal, il est clair que le budget annuel d’exploitation ou le coût annuel d’exploitation d’un système ne peut pas équivaloir à la valeur monétaire ou à la somme d’argent qui peut être reçu pour ce système [27] . En effet, le bon sens voudrait qu’il n’existe pas de lien fixe ou prévisible entre les coûts d’exploitation et la « valeur » d’un système donné. Par exemple, un système dont le coût d’acquisition ou la valeur comptable est élevé peut avoir de faibles coûts d’exploitation, ou l’inverse. Ainsi, bien qu’on puisse soutenir que si le budget annuel d’exploitation d’un système est de 8 milliards de dollars, le système devrait avoir une valeur supérieure à ce montant, TPSGC et ses évaluateurs ne pouvaient simplement pas le présumer. L’évaluation devait dépendre que de ce qui était inclus dans la soumission de PwC.

[45] Le Tribunal fait remarquer que PwC aurait pu facilement demander des précisions à TPSGC quant au sens qui devait être attribué au terme « valeur » dans le CT3 avant d’adopter une interprétation qui ne correspondait pas au sens ordinaire du terme, mais elle a choisi de ne pas le faire. Le Tribunal fait également remarquer qu’en l’absence d’une définition précise du terme « valeur » dans le CT3, si PwC avait fourni la valeur du coût d’acquisition, la valeur comptable ou la valeur de remplacement du ou des systèmes complexes qu’elle alléguait avoir analysés, qui correspondent sans doute tous au sens ordinaire du terme « valeur », TPSGC aurait probablement considéré cette valeur comme étant une « valeur » appropriée aux fins du CT3.

[46] Enfin, le Tribunal reconnaît que, dans sa réponse à la demande de précisions de TPSGC, PwC a fourni des montants en dollars en plus du montant de 8 milliards de dollars indiqué dans sa soumission initiale et que ces montants supplémentaires semblent être des « valeurs » appropriées pour certains systèmes et plateformes qu’elle alléguait avoir analysés et qui, lorsqu’elles sont considérées ensemble, dépassent largement 5 milliards de dollars [28] . Toutefois, étant donné qu’aucun de ces renseignements n’était inclus dans la soumission initiale de PwC, TPSGC a correctement conclu qu’ils ne pouvaient pas pu être utilisés aux fins de l’évaluation, puisque cela aurait constitué une modification inadmissible de la soumission [29] . Comme la Cour d’appel fédérale l’a déjà affirmé, les exigences énoncées dans une DP doivent être respectées au moment de la clôture de l’appel d’offres et l’entité contractante ne peut pas tenir compte des renseignements fournis après cette date [30] .

[47] Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que PwC n’a pas fourni une « valeur » dans sa soumission et que, par conséquent, la décision de TPSGC de ne pas lui accorder de points pour le CT3 était raisonnable. Cela suffit en soi à trancher la présente plainte. Toutefois, comme il en sera question ci-dessous, même si le Tribunal avait conclu que le budget annuel d’exploitation de 8 milliards de dollars indiqué dans la soumission de PwC était une valeur appropriée aux termes du CT3, il conclurait quand même que l’évaluation faite par TPSGC de la soumission de PwC était raisonnable, puisque, selon les renseignements fournis dans la soumission, cette valeur n’était pas celle du système ou des systèmes qu’elle alléguait avoir analysés.

Si une valeur appropriée a été fournie, était-ce pour le ou les systèmes analysés?

[48] Comme il est indiqué ci-dessus, la soumission technique de PwC renvoyait à une « solution de résilience opérationnelle avec un budget annuel de 8 milliards de dollars » [traduction; caractères gras dans l’original], et la réponse de PwC à la demande de précisions de TPSGC indiquait que ce montant renvoyait au budget annuel d’exploitation du SIG du BAP de la Marine. La deuxième question qui se pose donc est de savoir si la « solution de résilience opérationnelle » [traduction] était le « système » qui avait été analysé par PwC.

Positions des parties

[49] PwC soutient que l’équipe d’évaluation technique a commis une erreur critique lorsqu’elle a présumé que le budget annuel de 8 milliards de dollars indiqué dans la soumission était lié à la mise en œuvre de la solution d’ERICA par PwC plutôt qu’au système auquel la solution a été appliquée, ce qui, selon elle, était l’ensemble du SIG du BAP de la Marine. À son avis, l’équipe d’évaluation ne pouvait pas déterminer que le SIG du BAP de la Marine n’était pas un « système » qui répondait aux exigences du CT3. À cet égard, PwC soutient que TPSGC a rédigé le CT3 de façon à supprimer la capacité de l’équipe d’évaluation de mener toute évaluation discrétionnaire ou qualitative du ou des systèmes analysés dans le cadre du projet. Elle a ajouté que, une fois qu’un soumissionnaire a identifié le système complexe qu’il a analysé, ses points étaient attribués uniquement en fonction de la valeur du système fourni.

[50] PwC soutient également que TPSGC donne une vision trop restrictive du mot « système » qui est incompatible avec la compréhension courante du mot. Elle soutient qu’une branche du gouvernement ou un programme gouvernemental (c’est-à-dire le SIG du BAP de la Marine) qui gère plusieurs plateformes d’armes par l’entremise d’un réseau étendu de fournisseurs est un « système », conformément à la compréhension ordinaire de ce terme.

[51] TPSGC soutient que, dans sa soumission, PwC a décrit une « solution de résilience opérationnelle » [traduction] qui fournissait une « plateforme automatisée » [traduction] pour exécuter diverses fonctions, mais qu’elle n’a jamais indiqué comment PwC a interagi avec cette solution ou cette plateforme ni quelle analyse elle a effectuée. Il soutient que c’est seulement dans les précisions apportées à la soumission que PwC a déclaré que les 8 milliards de dollars renvoyaient au budget annuel d’exploitation du SIG du BAP de la Marine, à l’égard duquel elle a effectué des ERICA pour 66 plateformes d’armes, ce qui contredisait et modifiait substantiellement les renseignements fournis dans la soumission initiale. De plus, il a noté que, dans sa soumission, les précisions apportées à la soumission, l’opposition et la plainte, PwC a fourni des explications incohérentes ou contradictoires concernant le système complexe qu’elle avait analysé et sa valeur [31] .

[52] TPSGC ajoute que, aux termes d’une simple lecture des précisions apportées à la soumission, il n’est pas possible d’interpréter le SIG du BAP de la Marine comme étant le système complexe visé par les analyses de PwC, puisque les ERICA effectuées visaient 66 plateformes d’armes, et non le SIG du BAP de la Marine. Il a ajouté que des renseignements publics confirment que le SIG du BAP de la Marine n’est pas un système complexe comme l’exige le CT3, mais plutôt le bureau qui livre des systèmes complexes [32] .

[53] E&Y soutient que PwC a omis d’indiquer la valeur d’un « système complexe » dans sa soumission. Elle soutient également que les renseignements supplémentaires fournis par PwC en réponse à la demande de précisions de TPSGC n’étaient pas inclus dans la soumission initiale et que, par conséquent, TPSGC ne pouvait pas en tenir compte.

Analyse du Tribunal

[54] À première vue, la « solution de résilience opérationnelle » [traduction] mentionnée dans la soumission de PwC et pour laquelle un budget annuel de 8 milliards de dollars a été indiqué ne semble pas être le « système » qui a été analysé par PwC et qui a été indiqué en réponse au CT3. Bien qu’il n’y ait rien dans les documents relatifs à l’appel d’offres qui laisse entendre qu’une « solution » ne peut être considérée comme un « système », les renseignements fournis dans la soumission de PwC indiquent que cette solution a fourni une « plateforme automatisée » [traduction] pour permettre, entre autres, une « interconnectivité avec la transparence des fournisseurs dans les principaux systèmes d’armes » [traduction] [33] . Ainsi, sur ce fondement, le ou les systèmes qui semblent avoir été analysés par PwC sont ceux auxquels la solution d’ERICA a été appliquée, et non la solution d’ERICA elle-même.

[55] Bien que le Tribunal soit d’accord avec PwC que TPSGC a rédigé le CT3 de façon à empêcher tout type d’évaluation discrétionnaire ou qualitative du ou des systèmes analysés, le problème tient au fait que le montant de 8 milliards de dollars indiqué par PwC dans sa soumission initiale – et le seul montant en dollars présenté dans la soumission – n’était pas explicitement lié au ou aux systèmes que PwC alléguait avoir analysés. Les exigences relatives à l’identification d’un « système » qui a été analysé et à l’indication de la « valeur » de ce système n’étaient pas dissociables, de manière à être respectées séparément ou individuellement. La valeur indiquée devait se rapporter au système identifié dans la soumission.

[56] En ce qui concerne l’affirmation de PwC selon laquelle le budget annuel de 8 milliards de dollars mentionné dans sa soumission concernait le SIG du BAP de la Marine (c’est-à-dire le système à l’égard duquel, selon PwC, la « solution de résilience opérationnelle » [traduction] a été appliquée), le Tribunal fait remarquer que ces renseignements nouveaux et contradictoires n’ont été fournis qu’en réponse à la demande de précisions de TPSGC après la date de clôture de l’appel d’offres [34] . Étant donné qu’il n’y a aucun renvoi au SIG du BAP de la Marine dans la soumission initiale de PwC, sa mention dans les précisions apportées à la soumission ne peut raisonnablement être interprétée comme une explication d’un aspect existant de la soumission initiale de PwC. Comme il est mentionné ci-dessus, le budget annuel de 8 milliards de dollars cité dans la soumission de PwC était explicitement lié à une « solution de résilience opérationnelle » [traduction], et non au SIG du BAP de la Marine. Par conséquent, comme en a conclu le Tribunal ci-dessus, l’utilisation de ces nouveaux renseignements par TPSGC aux fins de l’évaluation de la soumission de PwC aurait constitué une modification inadmissible à la soumission. Le fait que TPSGC ait demandé des précisions à PwC au sujet de sa réponse au CT3 ne lui donnait pas le droit de fournir de nouveaux renseignements. La demande visait à donner à PwC la possibilité d’identifier , dans sa soumission, se trouvaient ces renseignements.

[57] Ayant conclu que le montant de 8 milliards de dollars n’était pas lié à un système qui avait été analysé par PwC et qui a été cité en réponse au CT3 dans sa soumission initiale, le Tribunal n’a pas à examiner la question soulevée par TPSGC, soit de savoir si le SIG du BAP de la Marine peut être considéré comme un « système » aux termes du CT3.

[58] Le Tribunal conclut donc que la décision de TPSGC de ne pas accorder de points à PwC pour le CT3, qui a déjà été jugée raisonnable au motif que PwC n’avait pas fourni une valeur appropriée en réponse au CT3, n’a été que renforcée par l’analyse et les conclusions qui précèdent.

Conclusion

[59] À la lumière de ce qui précède, le Tribunal conclut que la plainte de PwC n’est pas fondée.

Autres remarques

[60] Même s’il a conclu que la plainte de PwC n’est pas fondée, le Tribunal souhaite commenter le manque de clarté dans le libellé du CT3, tel qu’il a été rédigé par TPSGC. Il est regrettable que les auteurs n’aient pas fourni de définitions des termes « système » et « valeur » ou, à tout le moins, n’aient pas fourni un contexte supplémentaire à leur interprétation. Toutefois, PwC a autant fait preuve de négligence dans la préparation de sa soumission que les auteurs de la DP l’ont préparée avec peu de rigueur, et, comme il est indiqué ci-dessus, il incombe clairement au soumissionnaire de faire preuve de diligence raisonnable dans la préparation de sa soumission. PwC aurait pu, et aurait dû, demander à TPSGC de préciser la signification de « système » et de « valeur » avant de présenter sa soumission. En fin de compte, PwC ne l’a pas fait en l’espèce.

[61] Le Tribunal fait également remarquer que, même si PwC est responsable de son manque de diligence raisonnable dans la préparation de sa soumission en adoptant une interprétation du terme « valeur » qui ne correspondait pas à son sens ordinaire et en omettant d’identifier clairement le « système » qu’il avait analysé, si TPSGC avait été plus clair et avait fourni des définitions pour les termes « système » et « valeur », PwC n’aurait probablement pas commis ces erreurs et TPSGC aurait vraisemblablement obtenu des services similaires à un meilleur prix. Bien que le Tribunal n’exonère pas PwC de son erreur, il est d’avis qu’il existe des mesures que TPSGC peut et devrait prendre pour réduire la probabilité que de telles erreurs soient commises, favorisant ainsi la concurrence et contribuant à réduire les coûts d’approvisionnement pour le gouvernement.

FRAIS

[62] Aux termes de l’article 30.16 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal peut adjuger les frais afférents à toute procédure de plainte portant sur un marché public.

[63] TPSGC a demandé le remboursement des frais qu’il a engagés pour répondre à la plainte. En tant que partie ayant eu gain de cause dans le cadre de la présente enquête, il a droit au remboursement de ses frais raisonnables. Toutefois, comme il a été mentionné ci-dessus, si TPSGC avait fourni des définitions pour les termes « système » et « valeur », la présente plainte n’aurait probablement pas été nécessaire. Pour ce motif, le Tribunal réduira d’environ un tiers le montant des frais accordés afin de tenir compte du fait que TPSGC doit assumer une certaine responsabilité pour le dépôt de la plainte et l’ouverture subséquente d’une enquête.

[64] Pour décider du montant des frais en l’espèce, le Tribunal a tenu compte de ses Lignes directrices sur la fixation des frais dans une procédure de plainte portant sur un marché public (les Lignes directrices), qui fonde l’évaluation du degré de complexité d’une affaire sur trois critères : la complexité du marché public, la complexité de la plainte et la complexité de la procédure.

[65] La complexité du marché public était faible à modérée, puisqu’il concernait la prestation de services professionnels. La complexité de la plainte était faible, puisqu’il y avait, à toutes fins utiles, un seul motif de plainte, qui concernait l’évaluation de TPSGC de la soumission de PwC relativement à un seul critère d’évaluation technique. Enfin, la complexité de la procédure était également faible, puisque, même s’il y avait une partie intervenante et qu’il y a eu recours au délai de 135 jours, TPSGC a accueilli la demande de PwC concernant la production de certains documents, et les observations des parties étaient relativement concises et ont été déposées en temps opportun.

[66] Par conséquent, conformément à l’annexe A des Lignes directrices, le Tribunal détermine provisoirement que le degré de complexité de la plainte correspond au degré 1, qui impose habituellement un tarif fixe, tout compris, de 1 150 $. En l’espèce, pour les motifs susmentionnés, le Tribunal détermine provisoirement que le montant des frais sera réduit à 750 $.

DÉCISION

[67] Aux termes du paragraphe 30.14(2) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal détermine que la plainte n’est pas fondée.

[68] Aux termes de l’article 30.16 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal accorde à TPSGC une indemnité raisonnable pour les frais engagés dans sa réponse à la plainte, indemnité qui doit être versée par PwC. Conformément aux Lignes directrices, le Tribunal détermine provisoirement que le degré de complexité de la présente plainte correspond au degré 1 et que le montant de l’indemnité est de 750 $. Si l’une ou l’autre des parties n’est pas d’accord en ce qui a trait à la détermination provisoire du degré de complexité ou du montant de l’indemnité, elle peut déposer des observations auprès du Tribunal, en conformité avec l’article 4.2 des Lignes directrices. Il relève de la compétence du Tribunal de fixer le montant définitif de l’indemnité.

 



[18] Comme l’a affirmé le Tribunal dans Entreprise commune de BMT Fleet Technology Ltd. et NOTRA Inc. c. Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (5 novembre 2008), PR-2008-023 (TCCE) au par. 25, « [l]a détermination de [l’institution fédérale] sera jugée raisonnable si elle est fondée sur une explication défendable, même si elle n’est pas convaincante aux yeux du Tribunal ».

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