MANUFACTURE KUTE-KNIT INC.

Enquêtes


RAPPORT AU MINISTRE DES FINANCES
DEMANDE D’ALLÉGEMENT TARIFAIRE DÉPOSÉE PAR
MANUFACTURE KUTE-KNIT INC.
CONCERNANT LES FILS PEIGNÉS, CONSTITUÉS
DE MÉLANGES DE POLYESTER ET DE COTON,
PRODUITS PAR FILATURE À ANNEAUX
LE 5 JUILLET 1995

TABLE DES MATIERES


Demande no : TR-94-002

Membres du Tribunal : Raynald Guay, membre présidant
Charles A. Gracey, membre
Lise Bergeron, membre


Directeur de la recherche : Marcel J.W. Brazeau


Agent de la recherche : Anis Mahli


Avocat pour le Tribunal : David M. Attwater


Agent à l’inscription et
à la distribution : Claudette Friesen


Adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

INTRODUCTION

Le 14 juillet 1994, le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) a reçu du ministre des Finances (le Ministre), aux termes de l’article 19 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur [1] , le mandat de faire enquête sur les demandes présentées par des producteurs nationaux qui souhaitent obtenir des allégements tarifaires sur les intrants textiles importés dans le cadre de leurs activités de fabrication et de formuler des recommandations au Ministre concernant ces demandes.

Conformément au mandat confié par le Ministre, le Tribunal a reçu, le 28 décembre 1994, de la société Manufacture Kute-Knit Inc. (Kute-Knit), de Montréal (Québec), une demande de suppression immédiate et permanente des droits de douane sur les importations, en provenance de tous les pays, de fils peignés constitués de mélanges de polyester et de coton, des numéros et compositions qui suivent : quatre numéros de fils (12/1, 18/1, 24/1 et 30/1) en trois compositions de mélanges (52:48, 50:50 et 55:45); et un numéro de fil (40/1) en trois compositions de mélanges (52:48, 50:50 et 65:35). Dans sa demande, Kute-Knit a déclaré que ces fils entrent dans la production de tissus écrus, puis de vêtements pour enfants. Dans une lettre datée du 3 avril 1995, Kute-Knit a précisé que sa demande, ainsi qu’il en avait été question avec le personnel du Tribunal lors d’une visite de l’usine le 9 mars 1995, se limitait aux fils de cette description produits par filature à anneaux. Ces marchandises, ainsi précisées, constituent les fils en question.

Kute-Knit a demandé un allégement tarifaire immédiat et permanent à l’égard des fils en question importés des pays assujettis au tarif NPF à compter du 1er septembre 1994 ou, à défaut, de la date de la présentation de la demande. Kute-Knit a indiqué que les fils en question sont importés sous les numéros tarifaires 5509.53.00.22, 5509.53.00.23 et 5509.53.00.24 de l’annexe I du Tarif des douanes [2] .

Le 15 février 1995, le Tribunal, estimant que le dossier de la demande était complet, a publié un avis d’ouverture d’enquête qui a fait l’objet d’une diffusion à grande échelle et a paru dans la Partie I de la Gazette du Canada du 25 février 1995.

Dans le cadre de l’enquête, le personnel de la recherche du Tribunal a fait parvenir des questionnaires à des producteurs potentiels, à des importateurs et à des utilisateurs de fils identiques ou substituables aux fils en question. Il a également envoyé des questionnaires à des importateurs de tissus identiques ou substituables aux tissus fabriqués à partir des fils en question et à des utilisateurs de tissus fabriqués à partir des fils en question. Des lettres ont également été envoyées à plusieurs ministères pour obtenir des renseignements et des avis.

Un rapport d’enquête du personnel, résumant les données fournies par les ministères susmentionnés et les entreprises qui ont répondu aux questionnaires, a été remis aux parties qui avaient déposé des actes de comparution dans le cadre de la présente enquête, soit : 1) Kute-Knit; 2) Glendale Yarns Inc. (Glendale); 3) l’Institut canadien des textiles (l’ICT); 4) Teinturerie Perfect Canada Inc.; 5) Manufacture de Lingerie Château Inc. (Château); et 6) St. Lawrence Textiles Inc. (St. Lawrence).

L’ICT a déposé auprès du Tribunal, au nom des fabricants canadiens de fils, un exposé auquel Kute-Knit a répondu. Aucune audience publique n’a été tenue aux fins de la présente enquête.

DESCRIPTION DU PRODUIT

Les fils en question sont produits par filature à anneaux et sont constitués de fibres peignées de coton naturel et de polyester combinées. Les fibres de coton sont mélangées avec des fibres de polyester où la substance qui forme les fibres est un polymère synthétique à chaîne contenant au moins 85 p. 100 en poids d’un ester d’alcool dihydrique et d’acide téréphtalique. La qualité du fil se mesure habituellement par la variation du titre, la résistance, la régularité, la douceur et les défauts par 1 000 mètres. Le peignage et la filature à anneaux donnent un fil de meilleure qualité.

Selon le ministère du Revenu national, les fils en question sont classés aux fins des douanes dans le numéro tarifaire 5509.53.00. Ils sont passibles de droits de douane de 10 p. 100 ad valorem en vertu du tarif NPF et du TPG, de 3 p. 100 ad valorem et de 3,3 ¢/kg en vertu du tarif des É-U. et de 8 p. 100 ad valorem et de 8,8 ¢/kg en vertu du tarif du Mexique.

Les fibres sont soumises à un certain nombre de procédés avant de devenir des fils. La première étape est le mélange, où sont rassemblés divers types, qualités et catégories de fibres. Vient ensuite le cardage, qui comporte le brossage des fibres, l’élimination des matières étrangères et la formation de fils appelés rubans.

Afin de fabriquer certains types de fils de qualité supérieure, on envoie ensuite les rubans au peignage, qui sépare les fibres désirables des fibres non désirables et élimine les autres impuretés des fibres. Ce procédé donne des fils peignés supérieurs aux fils cardés. Vient ensuite l’étirage, qui est le procédé d’élimination des irrégularités, d’allongement des rubans et, dans certains cas, de combinaison des rubans de différentes fibres pour obtenir les mélanges de la composition désirée. Enfin, le doublage ramène le ruban d’étirage à des dimensions se prêtant à la filature à anneaux et, s’il y a lieu, donne une torsion au fil.

Les procédés de filature à fibres libérées et à jet d’air créent des fils directement à partir des rubans. Ces procédés sont à grande vitesse, à faible coût, efficaces et à forte intensité de capital. Ils permettent de ne pas recourir aux procédés d’étirage et de doublage qui doivent être exécutés dans la filature à anneaux. Ces procédés ajoutent au coût de fils produits par filature à anneaux, mais en améliorent la qualité.

Les réponses aux questionnaires démontrent que les importations connues des fils en question ont dépassé considérablement 400 000 kg et avaient une valeur en douane de plus de 2,0 millions de dollars en 1994. Il est prévu que ces importations dépasseront les 2,5 millions de dollars en 1995. Les droits de douane sur les importations prévues pour 1995 dépasseraient 250 000 $.

Selon les données publiées par Statistique Canada pour les trois numéros tarifaires pertinents, les fils en question sont importés surtout des États-Unis, du Pakistan et du Brésil. Ces données, toutefois, comprennent plus que les fils en question et indiquent que le Pakistan intervient pour plus de 40 p. 100 du total des importations.

Il est impossible d’estimer la consommation intérieure annuelle des fils en question, mais les données disponibles indiquent que les fils peignés, produits par filature à anneaux, coûtent beaucoup plus cher que les fils cardés.

OBSERVATIONS

Kute-Knit a allégué qu’il n’y a au Canada aucun fabricant de fils peignés, constitués de mélanges de polyester et de coton, produits par filature à anneaux, et qu’elle ne peut acheter aucun fil substituable convenable à partir de la production nationale.

Kute-Knit tricote les fils en question en tissus écrus, teint les tissus et fabrique des vêtements milieu et haut de gamme pour enfants, à son usine de Montréal. Bien que Kute-Knit ait vu le jour en 1955 comme fabricant de vêtements pour enfants en recourant à des entrepreneurs de l’extérieur, en 1972, elle était devenue un fabricant à intégration verticale de ces produits. Kute-Knit utilise une grande proportion de sa production totale de tissus écrus pour produire des vêtements pour enfants et vend le reste à d’autres utilisateurs de tissus, avec qui elle traite sans liens de dépendance.

Des cinq tricoteurs qui ont répondu au questionnaire du Tribunal à l’intention des utilisateurs, St. Lawrence et Château, de Montréal, appuient la demande d’allégement tarifaire, alors que Nova Scotia Textiles, Limited, de Windsor (Nouvelle-Écosse), et Agmont Inc. ainsi que Consoltex Inc., de Montréal, s’opposent à la demande. Les entreprises qui s’opposent à la demande ont fait valoir que : 1) les fils en question et des fils substituables sont produits au Canada; 2) si les importations continuent de déplacer les ventes à partir de la production nationale destinée à la consommation intérieure, il n’y aura bientôt plus d’industrie nationale du fil, et elles risqueront de perdre leurs principales sources d’approvisionnement; et 3) une concession tarifaire à Kute-Knit représentera un désavantage comparatif pour les tricoteurs qui font concurrence à Kute-Knit sur le marché des vêtements en offrant des vêtements confectionnés de tissus tricotés à partir de fils substituables.

La société Fils Spécialisés Dominion (FSD) s’oppose à la suppression des droits de douane sur les importations de fils peignés, produits par filature à anneaux, affirmant produire les fils en question et des fils substituables et avoir suffisamment de capacité excédentaire pour répondre à l’augmentation de la demande du marché. FSD a indiqué que, s’il est accordé, l’allégement tarifaire provoquera une chute de 10 p. 100 (le droit de douane équivalent) de ses prix des fils en question et des fils substituables. Une telle baisse des prix intérieurs se répercuterait sérieusement sur sa rentabilité et sur la viabilité des usines qui produisent ces marchandises.

La société Fils Dominion (SFD), de Saint-Laurent (Québec), qui ne produit que des fils cardés, produits par filature à fibres libérées, s’oppose également à la demande pour le motif que ses fils cardés sont substituables aux fils peignés. SFD a fait valoir que [traduction] «il y a un degré plutôt marginal de qualité différenciant les fils cardés et les fils peignés aujourd’hui». En outre, elle a soutenu que [traduction] «lorsque le tissu ou les vêtements sont offerts en vente avec la mention d’une teneur en coton “peigné 4", ils commandent généralement un prix de vente supérieur à celui des marchandises “cardées” équivalentes, qui reflète le coût supplémentaire lié au procédé de peignage». Selon SFD, s’il est accordé, l’allégement tarifaire provoquera des réductions des prix des marchandises qu’elle produit, ce qui finirait par lui infliger des pertes financières et par l’obliger à procéder à des licenciements.

De même, Glendale, de Hamilton (Ontario), un troisième filateur de fils cardés, produits par filature à fibres libérées, a allégué que les fils cardés sont substituables aux fils peignés. Elle a aussi allégué qu’une érosion de 10 p. 100 ou plus du coût rendu des fils en question réduira la rentabilité de ses ventes et l’obligera à procéder à des licenciements.

Dans son exposé préliminaire, l’ICT, qui représente les fabricants canadiens de textiles, s’est opposé à la demande parce que les fils en question et des fils substituables sont produits au Canada et que l’entrée en franchise de droits des fils en question nuirait à la production intérieure, aux ventes, à la part du marché, à l’établissement des prix, à la rentabilité, à l’emploi et à l’investissement au Canada. Par la suite, commentant le rapport d’enquête du personnel, l’ICT a déclaré que les fils peignés coûtent plus cher à produire et se vendent à des prix supérieurs à ceux d’autres fils; le supplément est payé par des tricoteurs pour qui les propriétés et le nom des fils peignés représentent une valeur. L’ICT a soutenu qu’un tricoteur peut toujours [traduction] «faire valoir de façon subjective que, pour lui, il n’y a pas de substitut pour un fil peigné». L’ICT a aussi fait grand cas du fait que la description donnée dans l’avis d’ouverture d’enquête ne correspondait pas à l’objet de l’enquête, si bien que la définition du produit s’en trouve modifiée. L’ICT a en outre fait observer que l’all?E9‚gement tarifaire ne représenterait pas un facteur important pour les utilisateurs des fils en question, mais que, pour l’industrie nationale de production de fils, il ferait la différence entre des ventes viables et des pertes impossibles à soutenir. Il a aussi fait valoir que la différence de prix entre les fils peignés et les fils cardés, qui peut varier périodiquement et d’un titre à l’autre, est du même ordre de grandeur que l’actuel tarif douanier NPF sur les fils. En éliminant le tarif, on étendrait le préjudice à d’autres fils, parce que les fils en question seraient disponibles au Canada au prix normalement payé pour les fils cardés.

Kute-Knit a répondu au rapport d’enquête du personnel et à l’exposé de l’ICT en déclarant que l’important dans l’allégement tarifaire est le montant absolu qui est payé chaque année en droits sur les importations des fils en question, et non pas le montant des droits en pourcentage du prix des vêtements finis. Pour Kute-Knit, les économies de droits de douane pourraient représenter la différence entre un profit et une perte pour l’exercice en cours. Kute-Knit a aussi fait valoir qu’il y a une distinction qualifiable entre les fils peignés et les fils cardés et que ces derniers sont beaucoup moins chers. En outre, elle a mentionné que, si l’allégement tarifaire est accordé, il n’y aura pas de transfert des fils cardés nationaux, produits par filature à fibres libérées, au profit des fils peignés importés, produits par filature à anneaux, en raison du prix international supérieur inhérent de ces derniers et parce que le marché fait une distinction claire entre les deux fils et qu’il y a une préférence des consommateurs pour chaque type de fil.

ANALYSE

Dans le cas présent, le Tribunal s’intéresse aux questions de savoir, d’abord, si des fils peignés, produits par filature à anneaux, sont toujours produits au Canada et, en second lieu, si les fils cardés et les fils produits par filature à fibres libérées et à jet d’air sont substituables aux fils en question.

FSD affirme produire des fils identiques aux fils en question importés par Kute-Knit. Désireux de vérifier ces affirmations, le Tribunal a fait plusieurs demandes, mais FSD n’a pas fourni de données sur la production intérieure récente de fils peignés, produits par filature à anneaux. Elle a plutôt affirmé que [traduction] «les ventes peuvent être une mesure de la production». Le Tribunal fait remarquer qu’il peut y avoir plusieurs sources possibles d’approvisionnement pour les ventes de FSD autres que sa propre production intérieure actuelle. En outre, certaines des données fournies par FSD révèlent que ses ventes de fils peignés, produits par filature à anneaux, ont diminué sensiblement au cours de l’exercice 1995 (à compter de juillet 1994).

Les données disponibles révèlent également que FSD a subi des pertes sur ses ventes de fils peignés pendant l’exercice 1994, pendant que SFD réalisait un bénéfice sur ses fils cardés se vendant à des prix moyens nettement plus bas. Enfin, les données relatives aux ventes disponibles révèlent que les plus récents prix de vente de FSD pour les fils peignés, produits par filature à anneaux, sont plus du double des prix de vente moyens de 1994 de SFD pour les fils cardés, produits par filature à fibres libérées, et aussi beaucoup plus élevés que le coût rendu de Kute-Knit pour les fils en question.

À la lumière des éléments de preuve, le Tribunal ne peut pas conclure que des fils peignés, produits par filature à anneaux, sont toujours produits au Canada. S’appuyant sur les éléments de preuve au dossier, le Tribunal croit que les producteurs de fils concentrent leurs efforts sur la production de fils cardés, produits par filature à fibres libérées, qui peuvent être produits à profit et dont la demande est vigoureuse. À cet égard, le Tribunal fait remarquer que SFD fait l’appoint de sa production intérieure par des importations de fils cardés, produits par filature à fibres libérées.

Le Tribunal doit considérer ensuite si les fils cardés et peignés, produits par filature à fibres libérées et à jet d’air, sont substituables ou non aux fils peignés, produits par filature à anneaux. Les renseignements au dossier révèlent que trois sociétés au Canada produisent des fils cardés par le procédé de filature à fibres libérées. Il s’agit de FSD, SFD et Glendale. FSD produit également certains fils peignés.

Comme il a été mentionné précédemment, dans le procédé de filature à fibres libérées, des rubans sont introduits directement dans des turbines qui tournent à grande vitesse pour produire des fils à faible coût pouvant présenter un certain degré de peignage. La filature à fibres libérées et la filature à jet d’air sont toutes deux de nouveaux procédés qui permettent de produire des fibres à moindre coût, mais de moindre qualité, en raison des propriétés et des qualités particulières émanant de la méthode de filature à anneaux. La méthode plus traditionnelle de filature à anneaux, en raison des opérations supplémentaires de peignage, d’étirage et de doublage qu’elle requiert, est plus coûteuse, mais confère aux fils et aux tissus constitués de ces fils certaines qualités et caractéristiques que n’offrent pas les autres procédés. Ces caractéristiques ont été décrites comme une meilleure apparence, une plus grande douceur et une plus grande régularité, une meilleure résistance au rétrécissement et au boulochage ainsi qu’une meilleure «main», entre autres.

De l’avis du Tribunal, il y a des différences quantifiables et qualitatives importantes entre ces divers fils. Sans ces différences, les tricoteurs opteraient certainement pour des fils peignés, produits par filature à fibres libérées ou à jet d’air, ou pour des fils cardés, tous moins coûteux. Les qualités inhérentes des fils peignés, produits par filature à anneaux, plaisent aux tricoteurs qui veulent fabriquer des produits de grande qualité. Le Tribunal estime que les fils cardés et les fils peignés, produits par filature à fibres libérées et à jet d’air, ne sont pas substituables aux fils peignés, produits par filature à anneaux.

L’ICT a soutenu que la différence de prix entre les fils peignés et les fils cardés est du même ordre de grandeur que l’actuel taux NPF de 10 p. 100, mais il a concédé que les fils peignés coûtent plus cher à produire et se vendent plus cher. Il peut en être ainsi pour certains fils peignés, produits par filature à fibres libérées, mais le Tribunal est de l’avis que, sur la foi des renseignements disponibles, la différence de prix entre les fils peignés, produits par filature à anneaux, et d’autres fils peignés et cardés, est beaucoup plus grande que l’actuel tarif NPF. Il est donc peu probable, de l’avis du Tribunal, que les tricoteurs qui utilisent actuellement les fils cardés et peignés, produits par filature à fibres libérées ou à jet d’air, se tournent vers les fils peignés, produits par filature à anneaux, si les tarifs douaniers sont supprimés.

En résumé, le Tribunal est convaincu, sur la foi des éléments de preuve, que les fils cardés ne sont pas substituables aux fils peignés, produits par filature à anneaux.

Les principaux avantages directs issus de l’allégement tarifaire proposé, selon le niveau projeté d’importations de fils peignés, produits par filature à anneaux, représenteraient plus de 250 000 $ par année, si les fils en question étaient tous passibles du taux de droit de douane NPF. Outre les droits correspondants que perdrait le gouvernement, le Tribunal ne croit pas que l’allégement tarifaire entraînerait des coûts commerciaux directs. En résumé, le Tribunal conclut que les avantages économiques nets de l’allégement tarifaire dans le cas présent seront positifs.

Le Tribunal fait remarquer que FSD a récemment fait un investissement important dans un nouveau matériel de filature à fibres libérées qui peut produire des fils «peignés», constitués de mélanges de polyester et de coton, mais que le volume de production des fils «peignés» produits par ce matériel, et par le procédé de filature à jet d’air actuellement en place, est très limité. Par ailleurs, le Tribunal n’est pas persuadé que les fils produits par ce matériel sont présentement de qualité substituable à celle des fils peignés, produits par filature à anneaux. Étant donné que ces nouveaux procédés ne sont pas assujettis aux contraintes inhérentes de la filature à anneaux pour ce qui est de la vitesse de production, de l’efficacité et de la productivité, il se peut que, à un moment donné dans l’avenir, la production de fils peignés produits par ce matériel augmente sur le plan de la quantité et de la qualité et que ces fils deviennent substituables aux fils produits par filature à anneaux qui sont importés. Si cela devait se produire, FSD, ou tout autre producteur, aura le loisir de demander l’ouverture d’une enquête aux termes du paragraphe 18(1) des Lignes directrices relatives à la saisine sur les textiles dans le but de recommander une modification de l’ordonnance du gouverneur en conseil accordant l’allégement tarifaire, avant son expiration.

Afin d’assurer une certaine stabilité à Kute-Knit et aux autres utilisateurs de fils peignés, produits par filature à anneaux, le Tribunal recommande que tout allégement tarifaire dans la présente affaire soit accordé pour une période de trois ans.

Pour ce qui est de la demande de Kute-Knit concernant l’entrée en vigueur rétroactive de l’allégement tarifaire, le Tribunal ne croit pas que des circonstances extraordinaires justifient une telle recommandation.

RECOMMANDATION

À la lumière de ce qui précède et des éléments de preuve au dossier, le Tribunal recommande au Ministre, par la présente, de supprimer pour une période de trois ans les droits de douane sur les importations de fils peignés, constitués de mélanges de polyester et de coton, produits par filature à anneaux.

Raynald Guay
_________________________
Raynald Guay
Membre présidant


Charles A. Gracey
_________________________
Charles A. Gracey
Membre


Lise Bergeron
_________________________
Lise Bergeron
Membre


1. L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.).

2. L.R.C. (1985), ch. 41 (3e suppl.).


[ Table des matières]

Publication initiale : le 28 août 1996