CAULFEILD APPAREL GROUP LTD.

Enquêtes


RAPPORT AU
MINISTRE DES FINANCES
DEMANDE D’ALLÉGEMENT TARIFAIRE DÉPOSÉE PAR
CAULFEILD APPAREL GROUP LTD.
CONCERNANT
UN CERTAIN TISSU DE COTON
LE 31 MARS 1999

TABLE DES MATIÈRES


Demande no : TR-98-007

Membres du Tribunal : Anita Szlazak, membre présidant
Peter F. Thalheimer, membre
Richard Lafontaine, membre


Directeur de la recherche : Réal Roy


Gestionnaire de la recherche : Paul R. Berlinguette


Avocat pour le Tribunal : Gerry Stobo


Agent à l’inscription et à la
distribution : Pierrette Hébert

Adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

INTRODUCTION

Le 14 juillet 1994, le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) a reçu du ministre des Finances (le Ministre), aux termes de l’article 19 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur [1] le mandat [2] de faire enquête sur les demandes présentées par les producteurs nationaux qui souhaitent obtenir des allégements tarifaires sur les intrants textiles importés dans le cadre de leurs activités de fabrication, et de formuler des recommandations au Ministre concernant ces demandes.

Conformément au mandat confié par le Ministre, le Tribunal a reçu, le 21 octobre 1998, de la société Caulfeild Apparel Group Ltd. (Caulfeild), de Downsview (Ontario), une demande de suppression, pour une période indéterminée, des droits de douane sur les importations, en provenance de tous les pays, de tissu de flanelle de coton, devant servir à la fabrication de chemises de nuit, de pyjamas, de peignoirs de bain ou d’articles similaires, pour hommes, et de caleçons boxeur. Le 21 décembre 1998, convaincu que le dossier de la demande était complet, le Tribunal a publié un avis d’ouverture d’enquête qui a fait l’objet d’une large distribution et a paru dans la Partie I de la Gazette du Canada du 2 janvier 1999 [3] . Dans l’avis d’ouverture d’enquête, le tissu en question a été décrit comme du tissu, uniquement de coton, brossé des deux côtés, de fils de différentes couleurs, de la sous-position no 5208.43, devant servir à la fabrication de chemises de nuit, de pyjamas, de peignoirs de bain ou d’articles similaires, pour hommes, et de caleçons boxeur, de la position no 62.07 (le tissu en question).

Dans le cadre de l’enquête, le personnel de la recherche du Tribunal a envoyé des questionnaires aux producteurs éventuels de tissus identiques ou substituables au tissu en question. Une demande de renseignements a également été envoyée aux importateurs éventuels du tissu en question. Une lettre a été adressée au ministère du Revenu national (Revenu Canada) pour obtenir des renseignements sur le classement tarifaire du tissu en question, et un échantillon a été fourni aux fins d’analyse en laboratoire. Des lettres ont également été envoyées à plusieurs autres ministères pour obtenir des renseignements et des avis pertinents.

Il n’a pas été nécessaire de distribuer un rapport d’enquête du personnel du Tribunal dans le cadre de la présente enquête puisque les producteurs éventuels de tissus identiques ou substituables au tissu en question n’ont pas fait opposition à la demande.

Aucune audience publique n’a été tenue dans le cadre de la présente enquête.

RENSEIGNEMENTS SUR LE PRODUIT

Le tissu en question est un tissu à armure sergé, dont le rapport d’armure est de trois (3), fait de fils simples de différentes couleurs. Les fils sont uniquement constitués de fibres de coton. Le tissu en question est légèrement brossé des deux côtés et sa masse surfacique est d’environ 144 g/m2. Le tissu de coton (flanelle), tel qu’il est décrit dans l’avis d’ouverture d’enquête, fait l’objet de différents traitements tarifaires selon son utilisation finale.

D’une façon générale, le tissu en question est classé, à des fins douanières, dans le numéro tarifaire 5208.43.90 de l’annexe du Tarif des douanes [4] et, depuis le 1er janvier 1999, est passible de droits ad valorem de 14,5 p. 100 en vertu du tarif NPF, de 6,5 p. 100 ad valorem en vertu du tarif du Mexique et de 7,0 p. 100 ad valorem en vertu du tarif du Chili et entre en franchise en vertu du tarif des États-Unis et du tarif de l’Accord Canada-Israël. Lorsque, comme c’est le cas pour Caulfeild, le tissu de coton contient au moins 85 p. 100 en poids de coton et doit servir à la fabrication de vêtements ou d’accessoires vestimentaires, il est classé dans le numéro tarifaire 9935.00.00. Depuis le 1er janvier 1999, il est dans ce cas passible de droits de douane ad valorem de 10,0 p. 100 en vertu du tarif NPF et de 8,0 p. 100 ad valorem en vertu du tarif du Mexique et entre en franchise aux termes du tarif des États-Unis, du tarif de l’Accord Canada-Israël et du tarif du Chili. Cependant, si le tissu doit servir à la fabrication de gilets de corps, chemises de nuit, pyjamas, déshabillés, peignoirs de bain, robes de chambre ou articles similaires, pour femmes, fillettes ou garçonnets, et de caleçons boxeur, de la position no 62.07 ou 62.08, il est classé dans le numéro de classement 5208.43.30.00 et entre au Canada en franchise de droits de douane [5] .

OBSERVATIONS

Caulfeild fabrique des vêtements depuis 1886 et emploie au total 71 personnes. Elle importe le tissu en question en provenance de la République populaire de Chine, du Pakistan et du Portugal. Elle réalise la conception, produit le papier de marquage et met les vêtements en marché, et confie en sous-traitance certaines étapes de la confection comme la coupe, la couture et la finition.

Caulfeild a affirmé qu’il n’y a pas de tissu identique ou substituable disponible au Canada et que le fait a été démontré lors d’affaires déjà entendues par le Tribunal. Caulfeild a déclaré que les demandes d’allégement tarifaire sur des tissus similaires ou pratiquement identiques ont été accordées [6] . Caulfeild a affirmé que les moindres coûts du tissu découlant de l’allégement tarifaire lui permettraient d’être plus compétitive à l’endroit des vêtements de confection importés, tant sur le marché national que sur les marchés à l’exportation. Elle a soutenu que l’augmentation des ventes entraînerait l’embauche de nouveaux employés, l’achat de nouvel équipement et aurait des retombées favorables sur les entreprises locales de soutien. Caulfeild a aussi affirmé déjà sentir les effets de l’allégement tarifaire accordé aux fabricants de vêtements pour femmes, ces derniers détournant peut-être une partie de leurs tissus vers le secteur du vêtement pour hommes.

La société Les Industries Majestic (Canada) Ltée, de Montréal (Québec), un fabricant de peignoirs de bain, de vêtements de nuit, de chemises, de maillots de bain et de vêtements molletonnés pour hommes, a appuyé la demande d’allégement tarifaire de Caulfeild. La société Manufacture Universelle Inc., de Montréal, une entreprise spécialisée dans la fabrication de vêtements de nuit pour femmes et pour enfants, et la société Stanfield’s Limited (Stanfield’s), de Truro (Nouvelle-Écosse), un fabricant de sous-vêtements, de pyjamas, de tenues de détente, de chemises en tricot, de bas, de T-shirts et de cols roulés, ont aussi appuyé la demande d’allégement tarifaire de Caulfeild. Stanfield’s a indiqué qu’il n’y a pas de tissu identique ou substituable disponible au Canada et que la suppression des droits de douane sur le tissu en question réduira le coût des vêtements pour les détaillants, ce qui entraînera une réduction du coût pour le consommateur. Selon Stanfield’s, l’allégement tarifaire la rendrait aussi plus compétitive à l’endroit des produits étrangers, protégerait des emplois et entraînerait peut-être une augmentation de la production.

L’Institut canadien des textiles (ICT) a désigné les sociétés Consoltex Inc., Doubletex, DIFCO Tissus de performance Inc. et Rayonese Textile Inc. comme fabricants éventuels de tissus identiques ou substituables au tissu en question. Des questionnaires du Tribunal ont été envoyés aux entreprises susmentionnées, mais aucune réponse n’a été reçue. Consoltex Inc., cependant, a avisé le Tribunal qu’elle ne faisait pas opposition à la demande d’allégement tarifaire de Caulfeild parce que les tissus similaires, lorsqu’ils servent dans la fabrication de vêtements de nuit et de tenues de détente pour femmes et pour enfants, entrent au Canada en franchise.

La société Metro Textiles Inc. (Metro), de Downsview, importe le tissu en question et le vend aux fabricants de vêtements pour hommes et pour femmes. Metro a appuyé la demande d’allégement tarifaire. Elle a déclaré qu’il n’est pas logique de limiter l’entrée en franchise de droits aux tissus devant servir uniquement à la fabrication de vêtements de nuit, de tenues de détente pour femmes, fillettes ou garçonnets, et de caleçons boxeur. Metro a indiqué que la suppression des droits de douane sur le tissu en question permettrait aux fabricants canadiens de livrer concurrence.

La société MWG Apparel Corp. (MWG), de Winnipeg (Manitoba), un fabricant de chemises, de vestes et de chapeaux, a appuyé la demande d’allégement tarifaire. MWG a déclaré que la structure tarifaire qui s’applique présentement aux textiles impose des droits sur les tissus qui ne sont pas produits au Canada, augmentant ainsi artificiellement le coût des intrants et la rendant moins concurrentielle par rapport aux produits finis importés.

La société Telio et Cie (Telio), de Montréal, et la société Trend-Tex Fabrics Inc. (Trend-Tex), de Port Coquitlam (Colombie-Britannique), des importateurs qui vendent des tissus aux fabricants de vêtements et aux détaillants de tissus, ont aussi appuyé la demande de Caulfeild. Telio a indiqué que l’allégement tarifaire rendrait les fabricants canadiens plus compétitifs, stimulerait la production et découragerait l’importation de marchandises finies. Cependant, Telio a soutenu que l’utilisation finale ne devrait pas être limitée aux vêtements de nuit, aux tenues de détente et aux caleçons boxeur pour hommes. Elle a fait valoir que de telles restrictions de l’utilisation finale sont impossibles à contrôler et entraînent un fardeau bureaucratique inutile. Trend-Tex a déclaré qu’il n’y a pas de tissu identique ou substituable disponible au Canada et que l’allégement tarifaire réduirait le coût des intrants.

AUTRES RENSEIGNEMENTS

Le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international (MAÉCI) a avisé le Tribunal que le Canada impose des contingents sur les tissus de coton, finis (de la sous-catégorie 32.2), importés de la République populaire de Chine, de Hong Kong et de Taïwan. Par conséquent, les tissus de coton de la sous-position no 5208.43 y sont visés. L’accord bilatéral, qui prévoit la restriction susmentionnée, passé entre le gouvernement du Canada et le gouvernement de la République populaire de Chine, est en vigueur depuis 1987. Les accords bilatéraux passés entre le gouvernement du Canada et le gouvernement de Hong Kong et la Fédération du textile de Taïwan sont en vigueur depuis 1979.

Le MAÉCI a aussi indiqué qu’il considérera les demandes de déclaration en marge du contingent concernant les intrants textiles lorsque le Tribunal aura recommandé la suppression des droits de douane pour le motif de non-disponibilité. Le traitement en marge du contingent ne sera accordé que dans les cas où il peut être prouvé que l’utilisation des produits faisant l’objet du contingent est assortie de frais supplémentaires ou lorsque les marchandises sont introuvables au Canada.

Revenu Canada a indiqué que l’administration de l’allégement tarifaire n’entraînerait aucun coût en sus de ceux qu’il supporte déjà si l’allégement tarifaire était accordé.

L’ICT et l’Institut canadien des manufacturiers du vêtement ont déposé des actes de comparution auprès du Tribunal, mais n’ont pas présenté d’observations concernant la demande.

ANALYSE

Aux termes du mandat qu’il a reçu du Ministre, le Tribunal est tenu d’évaluer l’incidence économique d’une réduction ou d’une suppression des droits de douane sur les producteurs nationaux de textile et les entreprises en aval et, à cette fin, de considérer tous les facteurs économiques qui entrent en ligne de compte y compris la possibilité de substituer des tissus importés aux tissus nationaux et la capacité des producteurs nationaux de desservir les industries canadiennes en aval. Par conséquent, la décision du Tribunal de recommander un allégement tarifaire est fondée sur la mesure dans laquelle le Tribunal considère que cet allégement tarifaire apporterait des gains économiques nets au Canada.

Caulfeild a affirmé qu’il n’y a pas de production nationale de tissus identiques ou substituables au tissu en question. Son affirmation n’a été contestée par aucun producteur de tissu national. Par conséquent, si ce n’est des recettes correspondant aux droits de douane qu’abandonnerait le gouvernement, le Tribunal est d’avis qu’il n’y aura pas de coûts économiques directs associés à la suppression des droits de douane sur les importations du tissu en question.

Le Tribunal fait également observer que le décret C.P. 1998-1119, daté du 18 juin 1998, a modifié l’annexe du Tarif des douanes, notamment en éliminant les droits de douane sur les importations de tissu, fait uniquement de coton, brossé des deux côtés, devant servir à la fabrication de chemises de nuit, de robes de nuit, de pyjamas, de déshabillés, de peignoirs de bain, de robes de chambre ou d’articles similaires pour femmes, fillettes ou garçonnets, et de caleçons boxeur, de la position no 62.07 ou 62.08. La demande d’allégement tarifaire déposée par Caulfeild porte sur un tissu similaire au tissu visé dans le décret C.P. 1998-1119, sauf que les produits finals sont des vêtements de nuit, des tenues de détente et des caleçons boxeur pour hommes.

Selon les renseignements mis à la disposition du Tribunal, l’octroi de l’allégement tarifaire entraînerait un gain d’au-delà de 100 000 $ par année pour Caulfeild et pour d’autres utilisateurs. En outre, l’allégement tarifaire apporterait des avantages aux utilisateurs, sous la forme de réduction des coûts, qui pourraient entraîner l’embauche de nouveaux employés, l’achat de nouveau matériel et des avantages supplémentaires issus des retombées pour les industries de soutien locales.

En résumé, le Tribunal conclut que l’allégement tarifaire demandé par Caulfeild entraînera un gain économique net pour le Canada.

Le Tribunal a examiné la demande de Telio, qui souhaiterait que la disposition portant sur l’utilisation finale englobe toutes les autres utilisations finales. D’une façon générale, le Tribunal n’examine de telles demandes que lorsqu’elles sont reçues avant l’ouverture de l’enquête. À titre exceptionnel, le Tribunal examinera la faisabilité d’une extension, d’ordre mineur, de la portée de l’enquête, par exemple l’inclusion d’un tissu légèrement plus lourd, et, dans le cadre d’un tel examen, communiquera avec les parties intéressées afin d’obtenir leur point de vue à cet égard. Étendre la portée de l’enquête à une étape aussi tardive de la procédure et ce, pour englober toutes les autres utilisations finales, exigerait que le Tribunal rouvre l’enquête et publie un avis de modification de l’avis d’ouverture d’enquête initial. Le Tribunal est d’avis que cela retarderait indûment la publication d’une recommandation relative à la demande d’allégement tarifaire de Caulfeild. Étant donné les circonstances, le Tribunal a décidé de ne pas étendre la portée de l’enquête au-delà des marchandises qui ont été décrites dans l’avis d’ouverture d’enquête. Si Telio souhaite obtenir l’allégement tarifaire pour toutes les autres utilisations finales, il faudra qu’une nouvelle demande soit déposée conformément aux dispositions du Guide de la saisine sur les textiles du Tribunal.

RECOMMANDATION

Le Tribunal recommande au Ministre, par la présente, d’accorder l’allégement tarifaire, pour une période indéterminée, sur les importations en provenance de tous les pays, de tissu, uniquement de coton, brossé des deux côtés, de fils de différentes couleurs, de la sous-position no 5208.43, devant servir à la fabrication de chemises de nuit, de pyjamas, de peignoirs de bain ou d’articles similaires, pour hommes, et de caleçons boxeur, de la position no 62.07.

Anita Szlazak
_________________________
Anita Szlazak
Membre présidant


Peter F. Thalheimer
_________________________
Peter F. Thalheimer
Membre


Richard Lafontaine
_________________________
Richard Lafontaine
Membre


1. L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.).

2. Les 20 mars et 24 juillet 1996, et le 26 novembre 1997, le ministre des Finances a révisé ledit mandat.

3. Vol. 133, no 1 à la p. 5.

4. L.R.C. (1985), ch. 41 (3e suppl.).

5. Le numéro de classement 5208.43.30.00 a été inclus au Tarif des douanes en raison de la mise en œuvre d’une recommandation du Tribunal dans le cadre des demandes nos TR-97-002 et TR-97-003.

6. La déclaration renvoie à la recommandation du Tribunal dans le cadre des demandes nos TR-97-002 et TR-97-003, mise en œuvre le 18 juin 1998.


[ Table des matières]

Publication initiale : le 7 avril 1999