BIÈRE

Enquêtes (article 42)


LA BIÈRE ORIGINAIRE OU EXPORTÉE DES ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE PAR PABST BREWING COMPANY, G. HEILEMAN BREWING COMPANY INC. ET THE STROH BREWERY COMPANY, LEURS SUCCESSEURS ET AYANTS DROIT, OU EN LEUR NOM, POUR UTILISATION OU CONSOMMATION DANS LA PROVINCE DE LA COLOMBIE-BRITANNIQUE
Enquête no : NQ-91-002

TABLE DES MATIÈRES


Ottawa, le mercredi 2 octobre 1991

Enquête no : NQ-91-002

EU ÉGARD À une enquête en vertu de l'article 42 de la Loi sur les mesures spéciales d'importation concernant :

LA BIÈRE ORIGINAIRE OU EXPORTÉE DES ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE PAR PABST BREWING COMPANY, G. HEILEMAN BREWING COMPANY INC. ET THE STROH BREWERY COMPANY, LEURS SUCCESSEURS ET AYANTS DROIT, OU EN LEUR NOM, POUR UTILISATION OU CONSOMMATION DANS LA PROVINCE DE LA COLOMBIE-BRITANNIQUE

C O N C L U S I O N S

Le Tribunal canadien du commerce extérieur a procédé à une enquête, en vertu des dispositions de l'article 42 de la Loi sur les mesures spéciales d'importation, à la suite de la publication d'une décision provisoire de dumping datée du 4 juin 1991 et d'une décision définitive de dumping datée du 30 août 1991 rendues par le sous-ministre du Revenu national, Douanes et Accise, concernant l'importation de la boisson de malt, communément appelée bière, d'une teneur alcoolique en volume d'au moins 1 p. 100 et d'au plus 6 p. 100, en bouteilles ou en boîtes d'au plus 1 180 ml (40 oz), originaire ou exportée des États-Unis d'Amérique par Pabst Brewing Company, G. Heileman Brewing Company Inc. et The Stroh Brewery Company, leurs successeurs et ayants droit, ou en leur nom, pour utilisation ou consommation dans la province de la Colombie-Britannique.

Conformément au paragraphe 43(1) de la Loi sur les mesures spéciales d'importation, le Tribunal canadien du commerce extérieur conclut, par les présentes, que le dumping des marchandises susmentionnées originaires des États-Unis d'Amérique a causé, cause et est susceptible de causer un préjudice sensible à la production de la Colombie-Britannique de marchandises similaires.

Kathleen E. Macmillan
_________________________
Kathleen E. Macmillan
Membre présidant


Michèle Blouin
_________________________
Michèle Blouin
Membre


Charles A. Gracey
_________________________
Charles A. Gracey
Membre


Robert J. Martin
_________________________
Robert J. Martin
Secrétaire

L'exposé des motifs sera rendu d'ici 15 jours.

Ottawa, le jeudi 17 octobre 1991

Enquête no : NQ-91-002

LA BIÈRE ORIGINAIRE OU EXPORTÉE DES ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE PAR PABST BREWING COMPANY, G. HEILEMAN BREWING COMPANY INC. ET THE STROH BREWERY COMPANY, LEURS SUCCESSEURS ET AYANTS DROIT, OU EN LEUR NOM, POUR UTILISATION OU CONSOMMATION DANS LA PROVINCE DE LA COLOMBIE-BRITANNIQUE

Loi sur les mesures spéciales d'importation - Déterminer si le dumping des marchandises susmentionnées a causé, cause ou est susceptible de causer un préjudice sensible, ou s'il a retardé ou retarde la production en Colombie-Britannique de marchandises similaires.

DÉCISION : Le Tribunal canadien du commerce extérieur conclut, par les présentes, que le dumping des marchandises susmentionnées originaires des États-Unis d'Amérique a causé, cause et est susceptible de causer un préjudice sensible à la production en Colombie-Britannique de marchandises similaires.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario)

Dates de l'audience : Du 4 au 6 septembre et du
9 au 12 septembre 1991

Date des conclusions : Le 2 octobre 1991
Date des motifs : Le 17 octobre 1991

Membres du Tribunal : Charles A. Gracey, membre présidant
Sidney A. Fraleigh, membre
Michèle Blouin, membre

Directeur de la recherche : J.A. (Sandy) Greig
Gestionnaire du projet : Douglas Cuffley
Gestionnaire de la recherche : Don Shires
Agent de la recherche : Peter Rakowski

Préposé aux statistiques : Gilles Richard

Avocats pour le Tribunal : Debra P. Steger
Robert Desjardins

Préposé à l'inscription
et à la distribution : Margaret J. Fisher


Participants : Peter Clark,
Chris Hines,
Michael Flavell et
Geoffrey Kubrick
pour Molson Brewery B.C., Ltd.,
Labatt Breweries of British Columbia et
Pacific Western Brewing Company

(parties plaignantes)
et Brewers' Association of British Columbia et
Association des brasseurs du Canada

(parties appuyant les parties plaignantes)
John T. Morin, c.r.,
Michael Round,
Michael Beber et
Bill Alberger
pour G. Heileman Brewing Company Inc.

(exportateur)
Allan H. Turnbull,
Paul D. Burns et
Mme Carol S. Osmond
pour The Stroh Brewery Company

(exportateur)
P. John Landry et
David Richardson
pour Pabst Brewing Company

(exportateur)
James L. Shields
John S. Tyhurst
pour Directeur des enquêtes et recherches,
Loi sur la concurrence
(partie intéressée)

Témoins :

Barry Seims, C.A.
Chef des Finances
Pacific Western Brewing Company

John R. Winter
Président
Molson Breweries
Division de l'ouest

A.L. Peterson, C.A., C.M.A.
Contrôleur
Molson Breweries
Division de l'ouest

David L. Durandt
Directeur, Prix de revient et inventaire
Molson Breweries

B.D. Walker
Directeur du marketing
Marques régionales
Labatt Breweries of Canada

Patrick J. Mulhern
Directeur, Planification générale
Labatt Breweries of Canada

R.R. Booker, B.A., C.G.A.
Contrôleur
Labatt Breweries of British Columbia

Ken Conway
Contrôleur
Labatt Breweries of Canada

C.E. Ruddick
Directeur des affaires publiques
Labatt Breweries of British Columbia

Gordon Hall
Directeur, Recherche intégrée et élaboration des politiques
Direction générale de la distribution des alcools
Ministère du Travail et de la Consommation
Province de la Colombie-Britannique

R.H. Reinhardt
Président
Haida Trading Inc.

John L. Currie
Contrôleur
G. Heileman Brewing Co., Inc.

Robert L. Bennardo
Directeur général
G. Heileman Brewing Co., Inc.
Division Internationale

Christopher T. Sortwell
Premier vice-président, Finances
The Stroh Brewery Company

Ronald C. Wiepz
Contrôleur
Pabst Brewing Company
Tumwater Division

Prière d'adresser toute communication au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Immeuble Journal sud
365, avenue Laurier ouest
20e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

EXPOSÉ DES MOTIFS

LE DÉROULEMENT DE L'ENQUÊTE

Conformément aux dispositions de l'article 42 de la Loi sur les mesures spéciales d'importation (la LMSI) [1] , le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) a procédé à une enquête à la suite d'une décision provisoire de dumping datée du 4 juin 1991 et d'une décision définitive de dumping datée du 30 août 1991 rendues par le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise (le Sous-ministre) concernant l'importation de la boisson de malt, communément appelée bière, d'une teneur alcoolique en volume d'au moins 1 p. 100 et d'au plus 6 p. 100, en bouteilles ou en boîtes d'au plus 1 180 ml (40 oz), originaire ou exportée des États-Unis d'Amérique par Pabst Brewing Company (Pabst), G. Heileman Brewing Company Inc. (Heileman) et The Stroh Brewery Company (Stroh), leurs successeurs et ayants droit, ou en leur nom, pour utilisation ou consommation dans la province de la Colombie-Britannique. L'enquête effectuée par le Sous-ministre au sujet du dumping a porté sur les importations des marchandises en question entre le 1er janvier 1990 et le 31 mars 1991.

Les avis de décisions provisoire et définitive de dumping ont paru dans la partie I de la Gazette du Canada du 22 juin 1991 et du 21 septembre 1991, respectivement. Quant à l'avis d'ouverture d'enquête publié par le Tribunal le 6 juin 1991, il a paru dans la partie I de la Gazette du Canada du 15 juin 1991.

Le 9 août 1991, le Tribunal a donné avis que le Directeur des enquêtes et recherches, Loi sur la concurrence [2] , et Stroh avaient demandé à présenter des instances sur la question de savoir si le Tribunal devait, au cas où il constaterait qu'il y a préjudice sensible, présenter au ministre des Finances un rapport précisant si l'imposition d'un droit antidumping, ou si l'imposition d'un tel droit pour le montant total, serait ou pourrait être contraire à l'intérêt public. Le Tribunal a entendu des arguments sur la question de l'intérêt public le 23 septembre 1991. Le Tribunal publiera sans délai, dans un document distinct, son avis sur la question de l'intérêt public.

Dans le cadre de l'enquête, le Tribunal a envoyé des questionnaires détaillés aux producteurs de la Colombie-Britannique et à l'importateur des marchandises en cause pour leur demander des renseignements sur la production, l'importation et les marchés, ainsi que des données financières et autres sur la période du 1er janvier 1987 au 31 mars 1991. Dans un questionnaire supplémentaire, le Tribunal a demandé des données financières pour la période à l'étude sur les brasseries de Labatt Breweries of Canada et de Molson Breweries situées dans les provinces autres que la Colombie-Britannique. On a de plus demandé à l'Association des brasseurs du Canada de fournir des renseignements sur les ventes de bières canadiennes et importées sous emballage dans les provinces et les territoires du Canada. Le personnel de la recherche du Tribunal a établi, à partir des réponses aux questionnaires et d'autres sources, des rapports public et confidentiel préalables à l'audience et portant sur la période visée par l'enquête.

Le Tribunal a en outre demandé au Directeur général des programmes de cotisation du ministère du Revenu national, Douanes et Accise, des renseignements sur le volume et la valeur des importations en cause expédiées dans chaque province par chacun des trois exportateurs désignés. Le Tribunal a aussi demandé si les marchandises en cause étaient vendues à des prix de dumping, ainsi qu'une estimation de l'importance du dumping pratiqué par chaque exportateur. Le Tribunal a demandé ces renseignements pour l'aider à se prononcer sur la question de l'industrie régionale et, plus particulièrement, pour déterminer s'il y avait concentration d'importations sous-évaluées sur le marché de la Colombie-Britannique par rapport à ce qui se passe ailleurs au Canada.

Le dossier de l'enquête comprend toutes les pièces déposées devant le Tribunal, y compris les réponses publiques et confidentielles aux questionnaires, toutes les pièces déposées par les parties à l'audience, ainsi que le compte rendu de toutes les délibérations. Toutes les pièces publiques ont été mises à la disposition des parties intéressées et les pièces confidentielles n'ont été communiquées qu'aux avocats indépendants.

Les audiences publiques et à huis clos ont eu lieu à Ottawa à partir du 4 septembre 1991. Les parties plaignantes, soit Labatt Breweries of British Columbia (Labatt), Molson Brewery B.C., Ltd. (Molson) et Pacific Western Brewing Company (PWB), les exportateurs, soit Pabst, Heileman et Stroh, ainsi que le Directeur des enquêtes et recherches, Loi sur la concurrence, étaient tous représentés à l'audience par des avocats.

Le 2 octobre 1991, le Tribunal a rendu des conclusions selon lesquelles les marchandises sous-évaluées ont causé, causent et sont susceptibles de causer un préjudice sensible à la production en Colombie-Britannique de marchandises similaires.

LE PRODUIT

La définition du produit comprend l'ale, la bière de fermentation basse, le stout et le porter, mais non la bière en fûts ou en contenants d'une capacité supérieure à 1 180 ml, normalement appelée bière-pression dans le commerce. La définition comprend la bière non pasteurisée ou filtrée à froid, qui peut être désignée sous le nom de bière-pression, en emballages d'au plus 1 180 ml, mais non la bière panachée.

L'INDUSTRIE DE LA COLOMBIE-BRITANNIQUE

Il y a actuellement trois brasseries principales en Colombie-Britannique qui produisent la bière en cause. Ce sont Labatt, Molson et PWB. Ces trois sociétés, toutes parties plaignantes dans la présente cause, représentent 99 p. 100 de la production en Colombie-Britannique. Le reste de la production de la Colombie-Britannique provient d'un certain nombre de brasseries artisanales.

Labatt est une division de Labatt Breweries of Canada, qui en est une de Labatt Brewing Company Limited, elle-même filiale à part entière de John Labatt Limited de London (Ontario). Labatt exploite deux brasseries en Colombie-Britannique, une à New Westminster et l'autre à Creston.

Molson est une filiale à part entière de Molson Breweries qui, créée en août 1989, est une entreprise à parts égales constituée par The Molson Companies Limited, société publique canadienne, et par Carling O'Keefe Breweries of Canada Limited, filiale à part entière du Foster's Brewing Group Limited (auparavant Elders IXL Limited d'Australie). À la suite de la fusion, Molson a fermé l'ancienne brasserie de Carling O'Keefe en Colombie-Britannique et modernisé sa brasserie de Vancouver.

Le plus petit des trois producteurs, PWB, exploitait jusqu'à récemment une brasserie à Prince George (Colombie-Britannique) et une autre à St. Catharines (Ontario). PWB était une division d'International Potter Distilling Corporation (Potter) de Vancouver. Le 28 février 1991, Potter a vendu sa brasserie de Prince George à Pacific Pinnacle Investments, société de Vancouver. Comme le nouveau propriétaire appuie aussi la plainte, PWB est demeurée partie plaignante dans cette affaire.

L'IMPORTATEUR ET LES EXPORTATEURS

La British Columbia Liquor Distribution Branch (Direction générale de la distribution de l'alcool), qui relève du ministère provincial du Travail et de la Consommation, est le seul importateur des marchandises en cause en Colombie-Britannique. Responsable de l'importation, de la distribution et de la vente au détail de la bière importée dans la province, la Direction générale de la distribution de l'alcool importe toutes les marchandises en cause, mais d'autres sociétés ou agents, agissant pour le compte des exportateurs, sont responsables de certaines activités administratives et publicitaires liées à l'importation et à la revente des marchandises en cause.

Revenu Canada a fait enquête sur trois producteurs américains de la bière en cause : Pabst, Heileman et Stroh. La plainte de dumping déposée par l'industrie de la Colombie-Britannique ne visait que ces trois producteurs étrangers.

LA DISTRIBUTION DU PRODUIT

La Direction générale de la distribution de l'alcool exploite 2 entrepôts et 217 magasins gouvernementaux des alcools disséminés dans toute la province. L'entrepôt principal se trouve à Vancouver et l'autre, à Kamloops. En plus d'exploiter les magasins des alcools, le gouvernement autorise 132 détaillants du secteur privé (agents ruraux) à agir comme agents de la Direction générale de la distribution de l'alcool. Plus de 6 400 établissements détiennent un permis de vente de bière à consommer sur place, dont 740 ont aussi un permis de vente au comptoir de bière sous emballage à emporter (détenteurs de permis). En 1985, ces détenteurs de permis ont été autorisés à demander un permis d'exploitation d'un magasin de détail adjacent à leur établissement. Il y a présentement 219 de ces magasins (détaillants détenteurs de permis) communément appelés magasins de bière froide et de vin.

Les brasseurs de la Colombie-Britannique livrent directement de leur usine à tous les détaillants. Molson et Labatt utilisent leurs propres flottes de camions en plus de celle de leur coentreprise, Pacific Brewers Distributors Ltd.

La bière importée n'est livrée que des deux entrepôts de la Direction générale de la distribution de l'alcool aux magasins gouvernementaux des alcools. La Direction générale de la distribution de l'alcool a sa propre flotte de véhicules de livraison à l'intérieur de la région métropolitaine de Vancouver et retient les services de transporteurs publics à qui elle confie ses expéditions vers toutes les autres localités de la province. Les propriétaires des agences rurales et des établissements détenteurs de permis (bistrots, hôtels) doivent ramasser la bière importée à un magasin gouvernemental des alcools. La Direction générale de la distribution de l'alcool exploite aussi, à l'entrepôt de Vancouver, un magasin réservé exclusivement aux détenteurs de permis. Elle en exploite aussi un deuxième à Victoria. Les détaillants détenteurs de permis n'ont pas le droit de vendre de bière importée.

LES RÉSULTATS DE L'ENQUÊTE DU SOUS-MINISTRE

Le Sous-ministre a choisi de faire enquête sur les importations de la bière en cause entre le 1er janvier 1990 et le 31 mars 1991.

Dans la décision définitive de dumping, le Sous-ministre a indiqué qu'à l'exception d'un nombre négligeable de caisses provenant de Stroh, presque toute la bière en cause exportée vers la Colombie-Britannique au cours de la période visée par l'enquête avait été sous-évaluée. La marge de dumping totale était de 29,8 p. 100, tandis que les marges moyennes pondérées étaient les suivantes pour chaque exportateur : Pabst, 14,9 p. 100, Heileman, 33,6 p. 100, et Stroh, 15,7 p. 100.

LA PLAINTE

Les avocats des parties plaignantes ont affirmé que d'après les éléments de preuve dans cette cause, le Tribunal devait décider que le dumping de la bière sous emballage en cause effectué par Heileman, Stroh et Pabst avait causé, causait et était susceptible de causer un préjudice sensible à la production en Colombie-Britannique de marchandises similaires. Ils ont affirmé que le préjudice avait pris la forme surtout d'une compression des prix, d'une compression de la marge, d'une baisse de la rentabilité et des investissements.

Les avocats ont aussi affirmé que la Colombie-Britannique est un marché isolé ou régional pour les marchandises en cause, conformément à l'Article 4 du Code antidumping [3] et au paragraphe 42(3) de la LMSI. Ils ont affirmé que l'on avait satisfait aux quatre critères : (1) la bière produite en Colombie-Britannique est consommée en totalité ou presque dans la province; (2) la Colombie-Britannique importe très peu de bière des autres provinces; (3) il y a concentration en Colombie-Britannique d'importations sous-évaluées; et (4) un préjudice sensible a été causé, est causé et est susceptible d'être causé à la totalité ou à la quasi-totalité de la production en Colombie-Britannique.

Quant aux critères relatifs à la concentration, les avocats ont affirmé que la cause des Portes d'entrée de véhicules de plaisance [4] du Tribunal canadien des importations (le TCI) offre deux critères possibles, soit ceux de la densité et de la pénétration [5] . Ils ont affirmé que l'on avait satisfait au critère relatif à la pénétration.

Les avocats ont soutenu que le Tribunal doit examiner chaque industrie qui comparaît devant lui en fonction de ses circonstances particulières. Ils ont mentionné que les autorités provinciales réglementent de très près l'industrie des boissons alcooliques au Canada. La production de la Colombie-Britannique est réservée, en totalité ou presque, à ce marché régional. Les avocats ont affirmé qu'ils ne savaient pas quelles conséquences aurait, sur ce marché régional, le rapport [6] imminent des membres du jury du GATT, mais qu'on ne pouvait raisonnablement s'attendre à ce qu'il limite davantage l'accès des États-Unis au marché de la Colombie-Britannique. Pour ce qui est de l'accord intergouvernemental [7] récent sur l'élimination prévue des obstacles interprovinciaux au commerce de la bière, les avocats ont affirmé qu'il serait très spéculatif et hypothétique d'essayer de fixer un délai pour cette intégration. L'industrie estime en général que l'élimination des obstacles devrait se faire sur une période raisonnable.

Quant au préjudice sensible qui existe selon eux, les avocats ont déclaré qu'en 1988, les producteurs de la Colombie-Britannique avaient vu baisser leurs volumes de production et leur part du marché à cause des importations en question, qui ont augmenté de 50 p. 100 en 1988. Afin de bloquer toute autre croissance des ventes de la bière importée en cause, les producteurs de la Colombie-Britannique ont réduit leur prix en décembre de la même année. Les avocats ont affirmé que les études de prix de Molson ont révélé que le créneau de la bière bon marché prenait de plus en plus d'importance. Ils ont affirmé que la réduction des prix mise en oeuvre en Décembre 1988 visait à en bloquer la croissance.

Cette baisse des prix imposée en décembre 1988 par les producteurs de la Colombie-Britannique a réussi à enrayer toute croissance des importations en cause, dont la part du marché n'a augmenté que de 1/10 de 1 p. 100 en 1989. En 1990, toutefois, la première période examinée plus précisément par le Sous-ministre, les importations sous-évaluées ont augmenté de 35 p. 100 et leur part du marché a grimpé de 1,8 point de pourcentage.

Les avocats ont affirmé, de plus, que les importations sous-évaluées avaient fait tomber considérablement le prix de marchandises similaires en Colombie-Britannique et avaient limité considérablement les hausses de prix imposées par les producteurs, en plus de refermer les marges brutes et de réduire les bénéfices des producteurs de la Colombie-Britannique. Sur un marché sensible aux prix, ont affirmé les avocats, les prix de la marque Rainier produite par Heileman, qui étaient très inférieurs aux prix pratiqués par la concurrence en 1990, ont maintenu à un bas niveau les prix des autres exportations en cause et provoqué l'érosion des prix à l'industrie de la Colombie-Britannique. Ils ont aussi laissé entendre que les mêmes importations en cause, qui étaient néfastes pour PWB, causaient aussi un préjudice sensible à Labatt et à Molson.

Selon les avocats, les données financières ont révélé une détérioration des profits et du rendement au cours de la période à l'étude. Les producteurs de la Colombie-Britannique avaient un rendement inférieur à celui des producteurs du reste du Canada. On a aussi affirmé que le dumping avait une incidence négative sur la capacité des producteurs d'investir davantage.

Pour ce qui est du remplacement des bouteilles par les boîtes (canettes), les avocats ont affirmé qu'il aurait été trop risqué pour les producteurs nationaux de ne pas contrer les importations de bière en canettes en offrant eux-mêmes de la bière en canettes. Les avocats ont affirmé que les consommateurs achèteront de la bière en canettes si elle est moins dispendieuse que la bière en bouteilles. Ils ont ajouté que si des mesures antidumping ne limitent pas l'expansion du créneau de la bière en canettes, celui-ci prendra de l'envergure à l'avenir.

Au sujet de l'efficacité des producteurs de la Colombie-Britannique, les avocats ont affirmé que les exportateurs en cause peuvent prétendre que c'est parce qu'ils se concentrent sur la production de bière en canettes pour le marché américain qu'ils sont plus compétitifs que les producteurs de la Colombie-Britannique. Les avocats ont cité la cause des Tubes soudés en acier au carbone [8] , dans laquelle le Tribunal a déclaré, dans ses motifs, que lorsqu'il cherche à déterminer si les importations sous-évaluées causent un préjudice, le Tribunal évalue l'impact de ces importations sur la production actuelle. Pour persuader le Tribunal que les coûts de production élevés constituaient un élément du préjudice, les avocats auraient dû prouver que l'industrie nationale ne pourrait soutenir la concurrence des importations à des prix comprenant les droits de dumping. Les avocats ont affirmé que la question était la même dans cette enquête, c'est-à-dire que les brasseurs américains ne pouvaient faire concurrence dans le créneau de la bière bon marché sans pratiquer le dumping.

Au sujet du préjudice futur, les avocats ont fait allusion au témoignage rendu par le témoin de PWB, qui a affirmé que l'entreprise ne pourrait survivre sans l'imposition de droits antidumping, ce qui constituait la meilleure évaluation du préjudice. Les avocats ont aussi affirmé que sans dumping, PWB pouvait être un intervenant efficace sur le marché et freiner efficacement Molson et Labatt.

Enfin, on a exprimé le doute que le marché américain puisse absorber toute la capacité de production de ses producteurs.

Les avocats ont aussi déclaré que le coût des frais de service imposé aux importations par la Direction générale de la distribution de l'alcool n'avait aucun lien avec le dumping. Quant au fait que les prix n'aient pas augmenté immédiatement après la mise en oeuvre du coût des frais de service, les avocats ont affirmé qu'il s'agissait d'une saine décision d'affaires parce que la taxe sur les produits et services était sur le point d'entrer en vigueur et que les consommateurs auraient pu réagir négativement à la hausse des prix. Les prix ont toutefois augmenté depuis.

Quant aux demandes d'exclusion présentées par Stroh et Pabst, les avocats ont affirmé que le Tribunal effectue d'habitude un cumul lorsque la partie en cause, même si elle est de moindre envergure, se livre au dumping.

LA RÉPONSE

Les avocats représentant les intérêts des exportateurs de bière ont affirmé que les importations en cause n'ont pas causé, ne causent pas et ne sont pas susceptibles de causer un préjudice sensible aux producteurs de la Colombie-Britannique.

G. Heileman Brewing Co. Inc.

Les avocats de Heileman ont affirmé que tout préjudice subi par les producteurs de la Colombie-Britannique découlait de leur propre conduite et des mesures qu'ils ont prises à partir de la fin de 1988. Ils ont aussi affirmé que si les importations en cause étaient à l'origine d'un préjudice quelconque, seule PWB avait subi le préjudice en question et que ce n'est pas suffisant dans une affaire d'industrie régionale parce qu'il faut que le préjudice soit causé à la totalité ou presque de la production du marché régional.

Les avocats ont aussi prétendu qu'il n'existe en Colombie-Britannique aucune concentration d'importations sous-évaluées qui permettrait au Tribunal de conclure qu'il y a préjudice sensible, en l'occurrence, parce que les importations en cause ne représentaient que 8 p. 100 du marché de la Colombie-Britannique et moins du tiers des importations de l'ensemble du Canada. Les avocats ont fait remarquer que ces chiffres étaient très inférieurs à ceux dans la cause des Portes d'entrée de véhicules de plaisance du TCI [9] . Les avocats ont ajouté que dans les deux cas, l'Alberta avait connu une concentration plus élevée ou similaire d'importations en cause de 1988 à 1990.

Les avocats ont fait allusion aux témoignages des témoins de Molson et de Labatt, ainsi qu'à certaines études de marché en particulier qui, ont-ils affirmé, portaient sur le plan qu'a fini par mettre en oeuvre Molson, ainsi que l'a fait Labatt, qui avait une stratégie de marché semblable. De l'avis des avocats, ce qui est arrivé à Molson et à Labatt à partir de 1988 jusqu'en 1991 est le résultat de plans de marketing et de mesures qui se sont retournés contre ces entreprises et qui ont aggravé leur situation financière. Les avocats estiment que les importations en cause ne sont pas à l'origine de ce qui s'est produit. Ils ont aussi prétendu que les difficultés qu'a connues PWB au cours de la même période pouvaient aussi être liées aux stratégies de marketing en question de Molson et de Labatt. Les avocats ont ajouté que la part du marché acquise par les importations en cause avait été arrachée à PWB, et non à Molson et à Labatt.

Les avocats ont de plus affirmé qu'il y a trois caractéristiques importantes du marché de la Colombie-Britannique qu'il ne faut pas oublier lorsque l'on compare le rendement des brasseurs nationaux dans cette province à leur rendement ailleurs au Canada. La première, c'est que les prix sont déréglementés depuis 1981, et qu'il y a concurrence sur le plan des prix en Colombie-Britannique. La deuxième, c'est qu'il existait auparavant un brasseur régional relativement puissant (PWB) qui a créé le créneau de la bière bon marché et qui est à l'origine de la concurrence des prix sur le marché. La troisième, c'est que les grands brasseurs ont toujours été moins rentables en Colombie-Britannique qu'ailleurs au Canada à cause de coûts de production plus élevés, résultat des salaires plus élevés payés à leurs travailleurs.

Les avocats ont aussi affirmé que même s'il y avait concurrence pour accaparer une part du marché dans le créneau de la bière bon marché depuis 1988, les ventes ont chuté dans celui de la bière ordinaire, sans oublier que Molson et Labatt ont accaparé une augmentation compensatoire dans le créneau de la bière de qualité. Cette tendance révèle que les habitudes du consommateur ont changé considérablement en Colombie-Britannique.

Pour répondre à l'industrie de la Colombie-Britannique qui a soutenu que les importations étaient à l'origine du remplacement des bouteilles par les canettes, les avocats ont affirmé que c'était plutôt parce que les consommateurs préfèrent les canettes aux bouteilles. Les avocats ont cité des exemples d'autres provinces où la proportion des canettes était élevée lorsqu'elles coûtaient moins cher que les bouteilles et demeurait quand même importante lorsqu'on imposait une prime sur la bière en canettes, comme en Ontario. Au sujet du marché de la Colombie-Britannique, les avocats ont affirmé que le ratio était de 60-40 en faveur de la bière en canettes, mais ils ont aussi déclaré que le même ratio valait dans les magasins des alcools et chez les détaillants de bière froide. Parce que les vendeurs de bière froide n'offraient aucun produit importé, mais uniquement des produits canadiens, les avocats ont conclu que les habitudes d'achat des consommateurs étaient très claires pour ce qui est du contenant.

Les avocats ont aussi demandé au Tribunal de ne pas oublier que la Colombie-Britannique limite la capacité des importations en cause d'accaparer une part importante du marché. Ils ont précisé qu'il est difficile d'obtenir l'affichage pour une bière américaine, que d'importantes parties du marché de la Colombie-Britannique sont fermées aux bières américaines et que le coût récent des frais de service a entraîné l'augmentation des frais imposés sur la bière américaine et, par conséquent, une hausse des prix et une chute des volumes. Les avocats ont affirmé qu'à cause de ces limitations, les importations américaines ne continueraient d'occuper qu'une faible partie du marché de la Colombie-Britannique à l'avenir.

The Stroh Brewery Company

Les avocats de Stroh ont soutenu que les parties plaignantes n'avaient pas prouvé que les importations leur avaient causé un préjudice sensible à la suite d'un dumping sur le marché de la Colombie-Britannique. Il a été affirmé que les producteurs de la Colombie-Britannique n'avaient pas réussi à satisfaire au critère d'exception relatif à l'existence d'un marché régional prévu à l'article 4 du Code antidumping. Les avocats ont affirmé que si le Tribunal considérait le marché de la Colombie-Britannique comme un marché régional, il devrait aussi décider si l'on satisfait à deux autres exigences de l'article 4 du Code antidumping pour décider qu'il y a préjudice. Quant à la concentration d'importations sous-évaluées, les avocats ont soutenu que les parties plaignantes n'avaient pas satisfait aux critères relatifs à la densité et à la pénétration établis dans la cause des Portes d'entrée de véhicules de plaisance [10] . Quant à la dernière exigence, les avocats ont prétendu que les importations sous-évaluées ne causaient pas de préjudice aux producteurs de la totalité ou presque de la production sur le marché régional. S'il y a eu préjudice, celui-ci a affecté PWB seulement et non les deux principaux producteurs.

Les avocats ont appuyé les propos de Heileman voulant que tout préjudice subi par les parties plaignantes ait été causé par d'autres facteurs relevant de la compétence de leur direction.

Les avocats ont soutenu que tout préjudice lié au passage des bouteilles aux canettes n'avait aucun lien avec les importations sous-évaluées, quelle que soit la façon de décrire le changement. Si les parties plaignantes ont décidé de faire concurrence dans le créneau de la bière bon marché en y offrant autre chose que leur emballage le moins cher, ce sont alors elles qui ont causé tout préjudice qui a pu en découler. En revanche, si les parties plaignantes ont décidé de faire concurrence dans le créneau de la bière bon marché en y offrant des canettes parce que les consommateurs trouvent cet emballage plus commode, elles réagissaient alors à une préférence des consommateurs et non à des importations sous-évaluées.

Il a été affirmé que les frais de service imposés sur les importations à partir du 1er janvier 1991 accordent aux parties plaignantes une protection plus que suffisante. Il a été soutenu qu'à la suite de la mise en oeuvre des frais de service et de la perception des droits de dumping, les parties plaignantes n'ont pas augmenté leurs prix pour rattraper les recettes et les bénéfices perdus. De l'avis des avocats, cette inaction renforce la position des exportateurs qui affirment que les importations en cause ne sont pas à l'origine du préjudice.

Enfin, les avocats ont affirmé que si le Tribunal concluait qu'il y a préjudice, Stroh devrait être exclue de cette décision, car ses exportations ont représenté moins de 1 p. 100 du marché de la Colombie-Britannique au cours de la période à l'étude.

Pabst Brewing Company

Les avocats de Pabst ont souligné que le créneau de la bière bon marché en Colombie-Britannique existait bien avant que les exportateurs américains n'y fassent réellement sentir leur présence. Ce créneau doit son existence à la déréglementation et à la présence d'un brasseur régional en Colombie-Britannique. À l'automne de 1988, ce brasseur régional, PWB, était un intervenant majeur dans le créneau de la bière bon marché et faisait des progrès importants avec sa bière en canettes. De l'avis des avocats, Molson et Labatt ont réduit leurs prix en décembre 1988 avant tout pour réagir aux progrès importants réalisés par PWB dans leur part du créneau de la bière bon marché.

Les avocats ont fait remarquer que les prix des marques de bière ordinaires sont passés de 5,95 $ en janvier 1988 à 6,80 $ [11] en juin 1988 pour un emballage de six canettes. Ils ont soutenu qu'une augmentation aussi importante de la bière ordinaire à ce moment-là allait pousser les consommateurs vers la bière bon marché, qui se vendait alors de 4,85 $ à 4,90 $ l'emballage de six, et entraînerait une expansion du créneau de la bière bon marché. Les avocats ont exhorté le Tribunal à analyser le préjudice sensible en fonction, non pas des plafonds atteints par les prix en 1988, mais plutôt d'une période qui a précédé la hausse importante des prix.

Les avocats ont aussi affirmé qu'à la suite de la mise en oeuvre des frais de service le 1er janvier 1991, le prix des importations en cause a augmenté considérablement, pour passer de 4,60 $ à 5,20 $, ce qui a beaucoup atténué les problèmes qu'ont pu connaître les producteurs de la Colombie-Britannique. Au cours des deux premiers trimestres de 1991, avant l'imposition de droits de dumping, les avocats ont affirmé que les importations en cause ont diminué respectivement de 5 p. 100 et de 27 p. 100. Ils ont soutenu qu'après avoir bénéficié de l'augmentation des frais de service, les producteurs ne tireraient aucun avantage sensible de l'imposition de droits de dumping à cause de la stratégie de marché de PWB.

Les avocats ont enfin affirmé que si le Tribunal concluait qu'il y avait préjudice, Pabst devrait aussi être exclue de la décision, car sa part du marché est en fait moins importante que celle de Stroh.

Le Directeur des enquêtes et recherches

Les avocats du Directeur des enquêtes et recherches ont déclaré que le seul rôle du Directeur dans ces délibérations était d'attirer l'attention du Tribunal sur les préoccupations qui découlent des responsabilités qui lui sont confiées conformément à la Loi sur la concurrence.

Les avocats ont expliqué que le Directeur était intervenu dans les délibérations parce qu'il avait décidé, en vertu de la Loi sur la concurrence, de ne pas contester la fusion entre Molson et Carling O'Keefe en 1989. En décidant de ne pas contester la fusion, le Directeur a mentionné spécifiquement le rôle que les importations de bière bon marché des États-Unis jouaient dans l'industrie de la bière en Colombie-Britannique. Les avocats ont aussi confirmé que le Directeur suit de près la concurrence dans l'industrie canadienne de la bière jusqu'en 1992.

Les avocats ont exhorté le Tribunal à tenir compte, lorsqu'il évaluerait les renseignements contenus dans le rapport préparé par le personnel sur les critères relatifs à la concentration dans un marché régional, de la jurisprudence pertinente, de la cause des Portes d'entrée de véhicules de plaisance [12] du TCI et de l'appui apporté à l'argument sur cette question par les avocats de Heileman. Les avocats ont aussi fait allusion à un commentaire formulé par un jury précédent dans la cause des Barres d'armature en acier au carbone [13] du TCI, par lequel on affirmait que si une partie plaignante ne réussit pas à satisfaire à un des critères formulés, l'argument relatif au marché régional ne tient alors plus.

Les avocats ont demandé au Tribunal de tenir soigneusement compte de l'accord conclu récemment en vue de supprimer les obstacles, de son aspect obligatoire, de la tendance à la hausse des échanges interprovinciaux, du fait que les producteurs appuient la libéralisation des échanges et qu'on a déjà apporté des modifications sans attendre la signature officielle de l'accord. Les avocats ont laissé entendre qu'il était juste pour le Tribunal de supposer qu'un des facteurs ayant contribué à la non-rentabilité a été les obstacles interprovinciaux, à l'origine de certaines inefficiences opérationnelles.

Les avocats ont aussi attiré l'attention du Tribunal sur le premier trimestre de 1991, période très cruciale, selon eux, à cause du changement fondamental qui s'est produit. Les frais de service ont eu une incidence immédiate et visible sur le marché en ce qui a trait aux parts du marché. Il a été soutenu aussi que ces frais sont susceptibles d'augmenter afin de compenser les hausses de coûts que pourrait connaître le gouvernement de la Colombie-Britannique, parce que c'est lui seul qui fixe le montant des frais.

Les avocats ont aussi fait remarquer que la suggestion des avocats des parties plaignantes, selon lesquels PWB constituerait un contre-poids efficace à Labatt et Molson, contredit les éléments de preuve qui ont trait à ce qui s'est passé sur le marché de la bière-pression.

Enfin, les avocats ont soutenu que les consommateurs préféraient les canettes. Ils ont demandé comment on pourrait autrement expliquer l'expérience de l'Ontario et de la Saskatchewan, où les canettes ont accaparé une importante part du marché. De plus, on se demande comment on pourrait expliquer la décision des parties plaignantes de faire concurrence aux importations en cause par des canettes plutôt que par des bouteilles, qui coûtent moins cher à produire.

LES INDICATEURS ÉCONOMIQUES

En Colombie-Britannique, le marché total de la bière sous emballage en cause est passé de 1,71 million d'hectolitres en 1987 à 1,94 million d'hectolitres en 1990, une augmentation globale de 13,4 p. 100 au cours de cette période. Au cours du premier trimestre de 1991, il a augmenté encore de 4,4 p. 100 comparativement au même trimestre de 1990.

Les parties plaignantes occupent la principale part du marché. En 1990, les ventes qu'elles ont tirées de leur production en Colombie-Britannique ont représenté 87,5 p. 100 du total de la bière sous emballage consommée en Colombie-Britannique, contre 92,7 p. 100 en 1987.

Les ventes d'importations provenant des fournisseurs en cause ont représenté 4,1 p. 100 du marché total de la Colombie-Britannique en 1987. Elles sont passées de 71 000 hl en 1987 à 156 000 hl en 1990 et ont représenté 8,1 p. 100 du marché. Au cours du premier trimestre de 1991, leur part du marché est tombée à 6,6 p. 100.

Le marché de la Colombie-Britannique se subdivise en trois créneaux : celui des marques bon marché ou vendues à rabais, celui des marques de prix moyen ou ordinaires et celui des marques de prix élevé ou de qualité. Les importations américaines en cause et les marques vendues par PWB sont en général destinées au créneau de la bière bon marché. Molson et Labatt offrent des marques dans les trois créneaux du marché.

Les prix moyens des marques nationales ordinaires (tous emballages) ont augmenté au printemps de 1988 pour culminer en juin 1988. Les prix se sont ensuite repliés un peu en juillet 1988, puis beaucoup plus en décembre 1988. Le prix moyen pour les marques nationales ordinaires était moins élevé en 1989 et en 1990 qu'il ne l'était en 1988 et, au mois de mars 1991, n'avait pas regagné le niveau de juin 1988.

Les prix mensuels moyens des marques nationales bon marché (tous emballages) ont suivi une tendance semblable. Les prix ont atteint leur maximum en avril 1988 pour retomber au cours de l'été, et de nouveau en décembre 1988 jusqu'en février 1989. Les prix de la bière nationale bon marché se sont toutefois rétablis plus rapidement que ceux de la bière nationale ordinaire. Le prix annuel moyen était moins élevé en 1989 qu'en 1988, mais le prix moyen de 1990 était plus élevé que le prix moyen de 1988.

De 1988 à 1990 et jusqu'au premier trimestre de 1991, l'écart entre les prix des bières nationales ordinaires et des marques nationales bon marché s'est refermé parce que celui des bières bon marché s'est rétabli relativement plus vite que celui des marques ordinaires.

Les prix mensuels moyens des marques importées en cause étaient en général moins élevés que ceux des marques nationales bon marché, qu'il s'agisse de tous genres d'emballages ou de canettes seulement. Il y a eu, dans le cas des canettes seulement, deux périodes notables au cours desquelles les prix des marques nationales ont été moins élevés. La première a été celle de décembre 1988 à février 1989 : les prix des marques nationales bon marché ont alors diminué. La deuxième, de janvier à mars 1991, a suivi l'entrée en vigueur des frais de service imposés sur les importations. Les prix des marques nationales bon marché en bouteilles étaient, en général, un peu plus élevés que ceux des marques nationales bon marché en canettes.

L'écart de prix entre les importations en cause et la bière nationale bon marché (tous genres d'emballages) s'est refermé en 1989. Il s'est élargi en 1990 parce que le prix de la bière nationale bon marché a augmenté relativement plus que celui de la bière importée en cause. Pour le premier trimestre de 1991, le prix des marques nationales bon marché était légèrement inférieur à celui des importations des marques bon marché en cause.

Les résultats financiers combinés que les trois parties plaignantes ont tirés de leurs ventes de bière sous emballage en Colombie-Britannique ont révélé qu'entre leurs exercices financiers de 1987 et 1991, les volumes des ventes ont augmenté, de même que les revenus nets tirés des ventes, les revenus unitaires ont diminué, les coûts unitaires ont augmenté et les bénéfices bruts ainsi que le bénéfice net avant impôts ont diminué.

Il est possible de comparer les résultats financiers des activités combinées de Labatt et Molson en Colombie-Britannique avec les résultats financiers des activités de Labatt Breweries of Canada et de Molson Breweries dans «le reste du Canada». Les deux principaux producteurs de la Colombie-Britannique ont été moins rentables que leurs homologues du reste du Canada au cours de chacun des cinq exercices à l'étude. En outre, pendant que les producteurs de la Colombie-Britannique voyaient baisser leurs bénéfices, celui de leurs homologues du reste du Canada ont, en général, été à la hausse.

LES MOTIFS DE LA DÉCISION

La présente enquête porte sur quatre questions principales. Tout d'abord, le Tribunal doit déterminer si les producteurs de bière sous emballage de la Colombie-Britannique constituent une industrie régionale distincte. Deuxièmement, il doit déterminer si les producteurs de la Colombie-Britannique ont subi, subissent ou sont susceptibles de subir un préjudice sensible. Troisièmement, le Tribunal doit déterminer s'il y a un lien de cause à effet entre le préjudice sensible et les importations sous-évaluées. Le Tribunal doit enfin décider s'il doit user de son pouvoir discrétionnaire pour accorder une exclusion à Pabst ou à Stroh sur foi de leur affirmation voulant que leurs parts du marché sont minimes et qu'elles ne contribuent pas au préjudice.

L'industrie nationale

Le Tribunal doit trancher d'abord la question clé, à savoir si les producteurs de la Colombie-Britannique constituent une industrie régionale distincte. Dans une cause antidumping, conformément à l'alinéa 42(3)a) de la LMSI, le Tribunal doit tenir entièrement compte de l'alinéa 1 de l'article 4 du Code antidumping, qui définit ce qu'est une industrie nationale. L'alinéa 1(ii) de l'article 4 prévoit :

dans des circonstances exceptionnelles, le territoire d'une Partie pourra, en ce qui concerne la production en question, être divisé en deux ou plusieurs marchés compétitifs et les producteurs à l'intérieur de chaque marché pourront être considérés comme constituant une branche de production distincte si a) les producteurs d'un tel marché vendent la totalité ou la quasi-totalité de leur production du produit en question sur ce marché, et si b) la demande sur ce marché n'est pas satisfaite dans une mesure substantielle par les producteurs du produit en question implantés dans d'autres parties du territoire. Dans de telles circonstances, il pourra être constaté qu'il y a préjudice même s'il n'est pas causé de préjudice à une proportion majeure de la branche de production nationale totale, à la condition qu'il y ait une concentration d'importations faisant l'objet d'un dumping sur un de ces marchés isolés, et qu'en outre les importations faisant l'objet d'un dumping causent un préjudice aux producteurs de la totalité ou de la quasi-totalité de la production à l'intérieur de ce marché [14] .

Le Tribunal est d'avis que selon l'alinéa 1(ii) de l'article 4 du Code antidumping, il doit procéder à une analyse en deux volets [15] . Dans un premier temps, les producteurs d'un marché géographique donné peuvent être considérés comme une industrie régionale si (i) ils vendent la totalité, ou la quasi-totalité, de leur production sur le marché en question et si (ii) la demande sur le marché en question n'est pas satisfaite dans une mesure substantielle par des producteurs implantés hors du marché en question. Autrement dit, on peut trouver qu'il existe une industrie régionale distincte là où il y a un marché isolé. Deuxièmement, lorsqu'il existe une industrie régionale, il peut être décidé qu'il y a préjudice uniquement si (i) il y a concentration d'importations sous-évaluées sur le marché isolé et (ii) les importations sous-évaluées causent un préjudice aux producteurs de la totalité, ou de la quasi-totalité, de la production à l'intérieur de ce marché.

Le Tribunal est d'avis que les parties plaignantes représentent une industrie régionale distincte en l'occurrence. Quant à la première exigence, les éléments de preuve indiquent qu'entre le 1er avril 1990 et le 31 mars 1991, les ventes combinées de bière sous emballage de Labatt et de Molson en Colombie-Britannique ont représenté 95 p. 100 de leurs ventes totales au Canada de bière sous emballage. Dans le cas de PWB, les renseignements communiqués au Tribunal par le propriétaire précédent au sujet de la période en cause n'indiquent pas clairement si PWB a vendu une partie de sa production à d'autres provinces. Le nouveau propriétaire a toutefois signalé qu'au cours de son premier mois d'exploitation, soit mars 1991, il a effectué la totalité de ses ventes nationales totales en Colombie-Britannique. Même si les trois producteurs exportent une partie de leur production, le Tribunal ne tient pas compte de leurs exportations pour déterminer s'ils vendent la totalité, ou la quasi-totalité, de leur production sur le marché en question. Comme l'a déclaré le TCI dans la cause d'Urée solide [16] :

... Le paragraphe 1 de l'article 4 du Code antidumping porte précisément sur les conditions en vertu desquelles la production d'une région particulière peut être considérée distincte de celle du reste du territoire national, indépendamment de l'isolement de ce marché régional du déplacement des marchandises à l'échelle internationale...

Le Tribunal est donc convaincu que la première exigence, à savoir si les producteurs vendent la totalité, ou la quasi-totalité, de leur production sur le marché régional, est satisfaite.

Pour ce qui est de la deuxième exigence relative à l'existence d'un marché isolé, les éléments de preuve indiquent qu'il se vend très peu de bière produite dans les autres provinces sur le marché de la Colombie-Britannique. De 1987 à 1990, les producteurs des autres provinces ont fourni moins de 1 p. 100 de la bière sous emballage consommée en Colombie-Britannique. Le Tribunal est donc d'avis que la demande de bière sous emballage en Colombie-Britannique n'est pas satisfaite dans une mesure substantielle par les producteurs situés ailleurs au Canada.

Après avoir établi qu'il existe un marché isolé, le Tribunal conclut que les producteurs de bière de la Colombie-Britannique peuvent être considérés comme une industrie régionale distincte. Le Tribunal considère donc que les circonstances qui caractérisent le marché des marchandises en cause en Colombie-Britannique sont des «circonstances exceptionnelles», telles que prévues à l'alinéa 1(ii) de l'article 4 du Code antidumping.

Le Tribunal n'a été saisi d'aucun élément de preuve démontrant clairement que les obstacles interprovinciaux qui affectent l'isolement du marché de la bière en Colombie-Britannique disparaîtront ou seront enlevés réellement sous peu. Au sujet de l'Accord intergouvernemental sur les pratiques de commercialisation de la bière [17] , le Tribunal a entendu des témoignages selon lesquels le gouvernement de la Colombie-Britannique ne l'avait pas encore mis en oeuvre et que la mise en oeuvre de l'accord n'entraînera pas de changements prévisibles dans le régime réglementaire actuel. Des témoins ont affirmé au Tribunal que les pratiques de distribution sont le dernier obstacle important qui reste et l'on prévoit que le comité technique établi dans le cadre de l'accord en discutera. Si le régime réglementaire évolue de façon à affecter l'isolement du marché de la bière en Colombie-Britannique à la suite d'un rapport d'un groupe du GATT, de négociations fédérales-provinciales, ou pour d'autres raisons, il serait possible de revoir la question en vertu de l'article 76 de la LMSI.

Une fois qu'il a été établi que les producteurs de la Colombie-Britannique constituent une industrie régionale, il faut examiner les deux conditions obligatoires au sujet du préjudice subi par l'industrie en question. Il faut d'abord se demander s'il y a eu concentration d'importations sous-évaluées sur le marché de la Colombie-Britannique. Dans des causes précédentes, le TCI s'est fondé sur deux critères pour évaluer la question. Le Tribunal, lui, se fonde sur le «critère de la distribution» et le «critère de la densité».

Dans la cause des Portes d'entrée de véhicules de plaisance [18] du TCI, on a affirmé que l'on pouvait se fonder sur l'un ou l'autre des deux critères alternatifs pour trancher la question de la concentration : (1) le «critère de la pénétration» (ci-après appelé «critère de la distribution»), qui compare le volume des importations utilisées sur le marché régional à celui des importations utilisées sur le territoire national dans l'ensemble, et (2) le «critère de la densité», qui compare le volume des importations sous-évaluées sur le marché régional au volume total du marché régional. Le TCI a constaté que les deux critères avaient été satisfaits en l'occurrence.

Dans la cause d'Urée solide [19] du TCI, qui a été confirmée par la Cour d'appel fédérale, on a constaté que le critère de la concentration avait été satisfait parce que toutes les importations sous-évaluées de la République démocratique allemande et de l'Union des républiques socialistes soviétiques étaient destinées à être utilisées sur le marché régional. Dans cette cause, la décision en ce qui a trait à la concentration était basée uniquement sur le critère de la distribution.

Le Tribunal est d'avis qu'il convient, en l'occurrence, d'appliquer le critère de la distribution pour déterminer s'il y a concentration d'importations sous-évaluées sur le marché isolé. Une simple lecture de l'alinéa 1(ii) de l'article 4, qui mentionne «une concentration d'importations faisant l'objet d'un dumping sur un de ces marchés isolés», laisse entendre qu'il faut examiner la question de la concentration en comparant le volume des importations sur le marché régional au volume des importations dans le reste du pays.

L'alinéa 1(ii) de l'article 4 mentionne aussi «une» concentration et non «la» concentration d'importations faisant l'objet d'un dumping. Un pays comme le Canada, à régime fédéral et aux étendues géographiques immenses, comporte parfois des marchés régionaux pour des raisons géographiques, réglementaires, commerciales ou autres. Au Canada, parce que les provinces ont des régimes réglementaires différents, on pourrait soutenir qu'il existe plusieurs marchés régionaux isolés pour la production, la distribution et la vente de la bière. Ces marchés isolés absorbent des proportions différentes de la consommation globale de bière au Canada. Le Tribunal est donc d'avis qu'il est logique, en l'occurrence, d'évaluer la concentration en fonction de la part que détient la Colombie-Britannique des importations en cause [20] comparativement à sa part de la consommation totale de bière sous emballage au Canada.

Le Tribunal note que l'alinéa 1(ii) de l'article 4 prévoit une étude de la concentration des «importations faisant l'objet d'un dumping». L'application du critère de la distribution pose toutefois une difficulté pratique au Tribunal. Le Tribunal a reçu des éléments de preuve fiables sur le volume des importations en cause en Colombie-Britannique et dans d'autres provinces. Toutefois, comme l'enquête du Sous-ministre n'a porté que sur les importations en cause en Colombie-Britannique, sa détermination de dumping ne s'applique qu'aux importations en Colombie-Britannique. Le ministère du Revenu national, Douanes et Accise, a fourni au Tribunal des estimations sur les marges de dumping et sur les volumes des importations en cause dans d'autres provinces. Ces renseignements ne représentent, toutefois, que des estimations et non des déterminations actuelles de dumping.

C'est pourquoi le Tribunal a l'intention de s'en remettre aux faits portant sur les volumes des importations en cause en Colombie-Britannique comparativement aux volumes des importations en cause dans le reste du Canada. Il examinera, de plus, pour l'année 1990, le volume des importations en cause qui ont été sous-évaluées en Colombie-Britannique par rapport au volume des importations en cause qui sont estimées être sous-évaluées dans le reste du pays. Il s'agira là d'une indication de la concentration probable d'importations «sous-évaluées».

En se fondant sur le critère de la distribution, le Tribunal conclut que les importations en cause constituent en réalité «une concentration» d'importations sur le marché de la Colombie-Britannique. En 1988, 1989 et 1990, les statistiques révèlent que 37 p. 100, 20 p. 100 et 29 p. 100, respectivement, du total des importations en cause au Canada ont été consommés en Colombie-Britannique. [21] La part des importations totales en cause en Colombie-Britannique était donc 2,9 fois plus élevée que la part de la Colombie-Britannique pour ce qui est de la consommation totale de bière sous emballage au Canada en 1990. Ce ratio s'établissait à 2,0 en 1989 et à 4,1 en 1988.

Le Tribunal note, en outre, que la Colombie-Britannique a reçu 41 p. 100 du total des importations en cause sous-évaluées, ou estimées être sous-évaluées, au Canada en 1990.

Le Tribunal est aussi d'avis que les parties plaignantes représentent «la totalité, ou la quasi-totalité, de la production» de la Colombie-Britannique. Les ventes de bière sous emballage effectuées en Colombie-Britannique par les trois parties plaignantes, entre 1987 et 1990, ont représenté 99 p. 100 des ventes totales de marchandises similaires effectuées par tous les producteurs de la Colombie-Britannique à partir de la production en Colombie-Britannique. Le Tribunal est d'avis qu'il s'agit d'éléments de preuve concluants démontrant que les parties plaignantes sont les producteurs nationaux de la totalité, ou de la quasi-totalité, de la production de bière sous emballage vendue sur le marché isolé de la Colombie-Britannique. Quant à savoir si la totalité, ou la quasi-totalité, de ces producteurs ont subi un préjudice sensible à cause des importations sous-évaluées, le Tribunal aborde cette question ci-après dans son analyse du préjudice sensible et des liens de cause à effet.

Le préjudice sensible

Après avoir établi qu'il existe une industrie régionale, il faut ensuite déterminer si l'industrie en question a subi un préjudice sensible. Les renseignements fournis en réponse aux questionnaires du Tribunal, ainsi que des éléments de preuve supplémentaires réunis au cours de l'audience, ont permis au Tribunal de passer en revue l'éventail des facteurs qui indiquent que l'industrie de la Colombie-Britannique a subi un préjudice. L'analyse des renseignements et des éléments de preuve révèle que les importations ont augmenté considérablement leur part du marché et qu'il y a eu compression des prix sur le marché au cours de la période à l'étude. Cette compression des prix a grugé régulièrement les bénéfices bruts et les revenus nets avant impôts des trois producteurs. Des augmentations de coût liées au passage de la bouteille à la canette ont aggravé l'érosion des bénéfices bruts. L'industrie de la Colombie-Britannique a, en outre, perdu une part du marché aux importations en cause au cours de la période à l'étude.

En évaluant le préjudice subi par les producteurs de la Colombie-Britannique, le Tribunal est d'avis qu'il faut considérer deux facteurs. Premièrement, le marché de la bière sous emballage en Colombie-Britannique est sensible aux prix, lesquels ont été déréglementés au début des années 80 en Colombie-Britannique. Cette déréglementation a permis aux producteurs et aux exportateurs d'influer sur le prix réel à la consommation : plus le prix facturé par le producteur ou l'exportateur à la Direction générale de la distribution de l'alcool est bas, plus le prix final à la consommation l'est aussi. En Colombie-Britannique, la lutte pour la part du marché se fait par les prix et n'est pas limitée surtout à la concurrence par la publicité et la promotion comme c'est le cas dans d'autres provinces qui ont davantage de réglementation de prix. Au cours de l'enquête, on a obtenu un montant considérable de données sur les prix et les volumes, lesquels ont confirmé que le marché était sensible aux prix.

Deuxièmement, il ne faut pas oublier que pour lutter contre les importations sous-évaluées, les producteurs nationaux ont, en dernier ressort, deux choix. Ils peuvent soit affronter la concurrence en baissant leurs prix dans le but de garder leur part du marché, soit maintenir leurs prix et céder une part du marché aux exportateurs. À l'analyse de cette cause, il est clair pour le Tribunal que l'industrie de la Colombie-Britannique a réagi en réduisant ses prix afin de protéger sa part du marché. C'est pourquoi les importations sous-évaluées ont eu, sur l'industrie de la Colombie-Britannique, une incidence négative hors de proportion par rapport à leur part relativement mince du marché. Il est évident pour le Tribunal que la part du marché occupée par les importations en cause a augmenté rapidement entre 1987 et 1988, et que cette augmentation n'a été contrée que lorsque les brasseries principales de la Colombie-Britannique ont réduit leurs prix pour faire concurrence aux importations en cause.

À la fin de 1987, première année pour laquelle le Tribunal a réuni des données sur les ventes, les importations en cause, vendues surtout dans le créneau des bières bon marché, occupaient 4,1 p. 100 du marché total de la Colombie-Britannique. Les importations en cause ont porté leur part du marché à 6,2 p. 100 en 1988, ce qui représente une augmentation d'environ 50 p. 100.

En analysant l'évolution des prix, le Tribunal a accordé une attention particulière aux changements de prix imposés par Labatt, Carling O'Keefe et Molson au cours de la première partie de 1988, de même qu'en décembre 1988. Les trois brasseries principales de la Colombie-Britannique ont augmenté le prix affiché [22] (c.-à-d., le prix au consommateur) de leurs marques vendues en grande quantité dans le créneau de la bière ordinaire pour les porter, en deux temps, de 6,30 $ l'emballage de six canettes en mars 1988 à 6,60 $ en juin 1988, ce qui représente une augmentation de 4,8 p. 100. Ces augmentations de prix se sont ajoutées aux changements de prix entrés en vigueur qui ont fait passer les prix affichés de ces marques de 6,00 $ au début de 1987 à 6,30 $ en janvier 1988. En 1988, les trois brasseries ont aussi augmenté les prix de leurs marques bon marché vendues en grande quantité, de 4,75 $ en mars à 4,95 $ en avril, soit une augmentation de 4,2 p. 100. Les augmentations de prix imposées en 1988 ont suivi une année de chute des bénéfices pour les trois brasseries principales. En avril et mai 1988, PWB a aussi augmenté les prix de certaines de ses marques vendues en grande quantité.

Les prix affichés des importations en cause n'ont pas augmenté autant que les prix des trois brasseries principales et de PWB. En résultat, les importations en cause ont augmenté leur part du marché. Inquiètes de l'expansion du créneau de la bière bon marché, les brasseries principales ont ramené le prix de leurs marques ordinaires de 6,60 $ en juin à 6,30 $ en juillet 1988, soit au niveau de mars de la même année. Elles ont, de plus, ramené le prix affiché de leurs marques bon marché de 4,95 $ en mai 1988 à 4,60 $ en juin 1988, là encore au même prix qu'en mars 1988. PWB a réduit le prix de certaines de ses marques vendues en grande quantité de 4,90 $ en mai 1988 à 4,60 $ en juin 1988.

En octobre et novembre 1988, Molson a mis le point final à un certain nombre d'études de marché internes, dans le cadre desquelles elle a analysé la stratégie qu'elle devrait adopter en matière d'établissement des prix sur le marché de la Colombie-Britannique. L'entreprise voulait déterminer le meilleur positionnement possible pour ses marques face à la croissance prévue du créneau de la bière bon marché et au prix très bas de la marque Rainier.

En décembre 1988, les brasseries principales ont réduit de nouveau de 0,70 $ l'emballage de six canettes le prix de leurs marques ordinaires vendues en grande quantité, le ramenant ainsi de 6,30 $ à 5,60 $. Elles ont réduit, en outre, les prix de leurs marques bon marché vendues en grande quantité de 4,60 $ à 4,30 $ l'emballage de six canettes. PWB a aussi réduit le prix de ses lagers traditionnelles vendues en grande quantité pour le ramener de 4,50 $ en décembre 1988 à 4,05 $ en janvier 1989.

Ces changements de prix ont eu deux résultats. Tout d'abord, la baisse des prix unitaires de la bière s'est répercutée directement sur l'état des résultats combinés de l'industrie de la Colombie-Britannique pour réduire les bénéfices bruts. Au cours de l'exercice 1989, le bénéfice net avant impôts de la Colombie-Britannique était inférieur à celui de 1988. En réalité, l'industrie de la Colombie-Britannique a subi une perte nette avant impôts au cours de l'exercice 1989. Deuxièmement, les volumes des importations ont augmenté légèrement au cours de l'année civile 1989 pour passer à 6,3 p. 100 du total des ventes effectuées sur le marché de la Colombie-Britannique.

Les prix ont augmenté en 1989, 1990 et au cours du premier trimestre de 1991. Les prix des marques ordinaires de Molson et de Labatt vendues en grande quantité ont augmenté pour passer de 5,75 $ l'emballage de six canettes à la fin de 1989 à 5,95 $ à la fin de 1990 et à 6,10 $ en mars 1991. Les prix des marques ordinaires n'ont jamais regagné les niveaux de janvier 1988 (6,30 $), et encore moins ceux de juin 1988 (6,60 $). Dans le cas de Molson et de Labatt, les prix des marques bon marché vendues en grande quantité sont passés à 4,85 $ l'emballage de six canettes à la fin de 1989, 4,95 $ à la fin de 1990 et entre 5,10 $ et 5,35 $ en mars 1991. Ceux des marques bon marché de PWB vendues en grande quantité sont passés d'entre 4,85 $ à 5,35 $ à la fin de 1989, n'ont pas augmenté en l990 et sont passés d'entre 5,10 $ à 5,45 $ en mars 1991.

À la suite de l'augmentation graduelle des prix nationaux, les importations en cause ont commencé de nouveau à augmenter leur part du marché. En 1990, les importations sous-évaluées ont représenté 8,1 p. 100 du total des ventes sur le marché de la Colombie-Britannique, ce qui constitue une augmentation de 29 p. 100 par rapport au volume de 1989.

Au cours du premier trimestre de 1991, à cause de l'évolution des droits et des taxes, et de changements apportés à la marge bénéficiaire de la Direction générale de la distribution de l'alcool, y compris de l'imposition de frais de service sur la bière importée, le prix affiché de la bière importée a augmenté plus rapidement que celui des bières nationales. La part du marché des importations sous-évaluées a reculé à 6,6 p. 100 au cours de ce trimestre, comparativement à 7,2 p. 100 au cours du même trimestre en 1990.

Le Tribunal a examiné attentivement les présentations de Molson et de Labatt au sujet des répercussions, sur les coûts, du passage des bouteilles aux canettes [23] . Même s'il a affecté les deux producteurs de façon différente, pour Molson et Labatt ensemble, le passage des bouteilles aux canettes a fait augmenter les coûts plus rapidement que ce n'aurait été le cas autrement. Les ventes de bière en canettes en Colombie-Britannique ont représenté 63 p. 100 du total des ventes de bière sous emballage effectuées en Colombie-Britannique en 1990, comparativement à 30 p. 100 en 1987. En guise de comparaison, dans le reste du Canada, les ventes de bière en canettes ont représenté seulement 16 p. 100 du marché total de la bière vendue sous emballage en 1990, contre 12 p. 100 en 1987.

Entre les exercices 1988 et 1991, les ventes nettes de l'industrie de la Colombie-Britannique ont augmenté, le revenu net par hectolitre a diminué et le coût moyen des marchandises vendues par hectolitre a augmenté. En conséquence, l'industrie de la Colombie-Britannique a vu diminuer considérablement ses bénéfices bruts et son revenu net avant impôts. En fait, l'industrie de la Colombie-Britannique, qui avait enregistré un bénéfice au cours de l'exercice 1988, a vu ses pertes augmenter de plus en plus au cours de chacun des exercices de 1989 à 1991. Dans le cas de PWB, les pertes ont été trop importantes. PWB avait presque fermé ses portes en Colombie-Britannique au moment où elle a été vendue à un nouveau propriétaire en février 1991.

En résumé, le Tribunal constate qu'au cours de la période à l'étude, la part du marché des importations a augmenté considérablement et qu'il y a compression de prix sur le marché. L'érosion continue des bénéfices bruts et des revenus nets avant impôts de l'industrie de la Colombie-Britannique a été causée, dans une large mesure, par la compression des prix. Les hausses des coûts liées au passage des bouteilles aux canettes ont accentué l'érosion des bénéfices bruts. L'industrie de la Colombie-Britannique a aussi perdu une part du marché aux importations en cause au cours de la période à l'étude. Le Tribunal est d'avis que l'ordre de grandeur du préjudice subi par l'industrie de la Colombie-Britannique a été, et est, important et que les producteurs représentant la quasi-totalité de la production en Colombie-Britannique ont subi et subissent un préjudice sensible.

Le lien de cause à effet

Le Tribunal doit ensuite déterminer s'il y a un lien de cause à effet entre le préjudice sensible subi par les producteurs en Colombie-Britannique de marchandises similaires et les importations sous-évaluées.

Le Tribunal est convaincu que l'importante compression des prix qui a eu lieu sur le marché de la Colombie-Britannique au cours de la période à l'étude a été causée par les importations sous-évaluées qui ont maintenu les prix du marché à un niveau anormalement bas. Le Tribunal est d'avis que l'expansion du créneau de la bière bon marché, mue par le faible prix des importations en cause, est à l'origine des réductions de prix nationaux qui ont eu lieu en 1988. Ce sont, de plus, le maintien à des niveaux bas du prix des importations en cause en 1989 et le dumping des importations en cause en 1990 et au cours du premier trimestre de 1991 qui ont empêché les prix des marques nationales ordinaires [24] de revenir aux niveaux du début de 1988 et qui ont ralenti la reprise des prix nationaux de la bière bon marché.

L'analyse des prix préparée par le personnel de la recherche du Tribunal a révélé qu'en 1988, le prix moyen pondéré des importations en cause (tous emballages) était inférieur de 14 $ l'hectolitre au prix moyen des marques bon marché de l'industrie de la Colombie-Britannique (tous emballages). En 1989, cet écart s'est refermé à 10 $ l'hectolitre pour se creuser toutefois à 19 $ l'hectolitre en 1990. Au cours du premier trimestre de 1991, les prix des bières bon marché pratiqués par l'industrie de la Colombie-Britannique étaient inférieurs de 1 $ l'hectolitre au prix des importations sous-évaluées. Le Sous-ministre a aussi choisi 1990 et le premier trimestre de 1991 comme période de calcul des valeurs normales et des prix à l'exportation. Les résultats de son enquête ont révélé que les importations en cause étaient sous-évaluées de presque 30 p. 100 sur une moyenne pondérée.

Le Tribunal a analysé l'établissement des prix de toutes les importations en cause. Il a toutefois concentré son attention sur l'établissement des prix de la marque Rainier parce que celle-ci était généralement la moins cher sur le marché de la Colombie-Britannique et qu'elle représentait la part la plus importante des importations en cause. En juin 1983, la Direction générale de la distribution de l'alcool a affiché pour la première fois la bière Rainier en canettes. Au moment de son lancement, le prix de la bière Rainier f. à b. à la Direction générale de la distribution de l'alcool était de 3,90 $ les 24 canettes. Après être demeuré constant pendant quatre ans, le prix est passé à 4,00 $, puis à 4,25 $ en juillet 1989. Toutes les autres fluctuations des prix affichés jusqu'à janvier 1991 ont été causées principalement par des fluctuations du taux de change entre le Canada et les États-Unis. En janvier 1991, le prix affiché de la bière Rainier a augmenté surtout à la suite de l'imposition des frais de service. Le Tribunal est d'avis que les prix de la bière Rainier, qui sont demeurés presque stables durant sept ans, ont nui à la capacité de l'industrie de la Colombie-Britannique d'imposer des augmentations de prix raisonnables et l'ont, en fait, obligée à annuler certaines hausses de prix.

Le Tribunal a analysé attentivement l'argument des exportateurs américains qui ont affirmé que Molson et Labatt s'étaient infligées à elles-mêmes le préjudice qu'elles ont subi, à cause de leur propre stratégie d'établissement des prix. Le Tribunal est toutefois convaincu que dans les circonstances, Molson et Labatt ont pris des décisions d'établissement de prix raisonnables pour réagir aux importations en cause. Il s'en remet aux éléments de preuve fournis par Molson et Labatt, qui affirment que les réductions de prix s'imposaient si elles voulaient maintenir leurs ventes et leur part du marché. Le Tribunal a aussi tenu compte de l'analyse effectuée dans l'étude Molson, où l'on a reconnu que même si les réductions de prix seraient coûteuses pour Molson, l'inaction lui coûterait encore plus en part du marché et en rendement financier.

Le Tribunal est d'avis que puisque le consommateur préfère les canettes, les producteurs nationaux ont dû affronter les importations sous-évaluées de bière en canettes en offrant un produit national en canettes. Le Tribunal reconnaît que parce que les brasseries principales de la Colombie-Britannique ont décidé de faire concurrence avec des canettes plutôt qu'avec des bouteilles, les consommateurs ont délaissé en nombre les bouteilles en faveur des canettes, ce qui a eu des répercussions sur les coûts des brasseries principales et qui a contribué à la détérioration de leur rendement financier.

Le Tribunal a aussi tenu compte des autres coûts qui ont pu affecter la rentabilité décroissante de l'industrie de la Colombie-Britannique. Il a tenu compte, plus particulièrement, du niveau et de la hausse des coûts dans l'industrie de la Colombie-Britannique. Au sujet du niveau des coûts, le Tribunal est persuadé que l'industrie de la Colombie-Britannique, aux niveaux des coûts actuels, pourrait faire concurrence aux importations à des prix comprenant les droits de dumping. Pour ce qui est des hausses des coûts, le Tribunal a remarqué qu'au cours de la période à l'étude, le coût unitaire des marchandises vendues a augmenté moins rapidement en Colombie-Britannique qu'ailleurs au Canada. C'est pourquoi le Tribunal ne croit pas que le niveau ou la hausse du coût des marchandises vendues dans l'industrie de la Colombie-Britannique ont contribué sensiblement au préjudice.

Comme on l'a déjà dit, le Tribunal est convaincu que la compression des prix et, dans une moindre mesure, les coûts liés au passage des bouteilles aux canettes sont à l'origine de la détérioration de la situation financière de l'industrie de la Colombie-Britannique. Le Tribunal est aussi convaincu que la compression des prix et les coûts liés au passage des bouteilles aux canettes ont été causés par la présence des importations sous-évaluées. Le Tribunal est donc d'avis que les importations sous-évaluées en question ont causé et causent un préjudice sensible à tous les trois producteurs. Comme la quasi-totalité de l'industrie de la Colombie-Britannique a subi un préjudice sensible causé par les importations sous-évaluées, le Tribunal est aussi convaincu que le quatrième critère a été satisfait quant à l'existence d'une industrie régionale.

Pour ce qui est de l'avenir, le Tribunal reconnaît que les frais de service imposés récemment sur les importations par la Direction générale de la distribution de l'alcool ont entraîné une augmentation marquée des prix affichés des importations sous-évaluées qui, s'ils se maintiennent à ces niveaux, pourraient permettre à l'industrie de la Colombie-Britannique de récupérer une partie de ses pertes financières. Les témoignages recueillis au cours de l'audience ont toutefois démontré que les ventes de Rainier, marque de commerce qui représentait la plus grande partie des importations sous-évaluées, à la Direction générale de la distribution de l'alcool étaient faites à des niveaux rentables. Comme l'exportateur a décidé de fixer ses prix à l'extrémité inférieure du créneau de la bière bon marché, le Tribunal est d'avis que si les droits de dumping ne sont pas maintenus, Heileman reprendra ses activités de dumping et pourrait absorber au besoin une partie, ou la totalité, des frais de service afin de ramener leurs prix à l'échelon inférieur du marché. À ces bas prix, les exportateurs se rétabliraient solidement sur le marché et continueraient d'augmenter leur part du marché au détriment de l'industrie de la Colombie-Britannique. Le Tribunal conclut, par conséquent, que le dumping des importations en cause est susceptible de causer un préjudice sensible à la totalité, ou à la quasi-totalité, de la production en Colombie-Britannique de marchandises similaires.

Les demandes d'exclusion

Stroh et Pabst ont demandé au Tribunal, s'il conclut qu'il y a préjudice, de ne pas appliquer sa décision à leurs produits parce que le volume de leurs importations est minime. Au sujet de l'exclusion, le Tribunal dispose d'un pouvoir discrétionnaire que les tribunaux ont déjà reconnu [25] . Récemment, un groupe binational spécial établi en vertu de l'article 1904 de l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis a réaffirmé ce pouvoir discrétionnaire dans la cause de Certain Dumped Integral Horsepower Induction Motors [26] . Dans la cause en cours, le Tribunal conclut, après avoir tenu compte des marges de dumping et de la nature sensible du marché de la bière de la Colombie-Britannique aux prix, que les bas prix du marché des marques de Stroh et de Pabst ont contribué à la compression des prix. De plus, l'effet cumulatif du dumping par les trois exportateurs désignés a causé un préjudice sensible à l'industrie de la Colombie-Britannique.

Le Tribunal constate que toutes les importations de Pabst et toutes celles de Stroh, à l'exclusion d'un petit nombre de caisses, étaient sous-évaluées à des marges de 14,9 p. 100 et de 15,7 p. 100, respectivement. Vu les marges élevées de dumping, le Tribunal est convaincu que le retrait des droits antidumping permettra aux deux exportateurs de reprendre leur dumping à de bas prix sur un marché où Heileman n'a plus le droit de vendre les marchandises en cause à des prix sous-évalués. En conséquence, Pabst et Stroh augmenteraient leurs exportations et exerceraient une pression à la baisse sur les prix, continuant, de cette façon, à causer un préjudice sensible à l'industrie de la Colombie-Britannique.

LA CONCLUSION

À la lumière de ce qui précède, le Tribunal conclut que le dumping de la bière sous emballage en cause, originaire ou exportée des États-Unis, par Pabst Brewing Company, G. Heileman Brewing Company Inc. et The Stroh Brewery Company, leurs successeurs et ayants droit, ou en leur nom, pour utilisation ou consommation dans la province de la Colombie-Britannique, a causé, cause et est susceptible de causer un préjudice sensible à la production en Colombie-Britannique de marchandises similaires.


1. L.R.C. (1985), ch. S-15.

2. Loi sur la concurrence, L.R.C. (1985), ch. 34, art. 125, dans sa version modifiée.

3. Accord relatif à la mise en o euvre de l'article VI de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce, signé à Genève (Suisse) le 17 décembre 1979, GATT IBDD 265 (1980).

4. Portes d'entrée de véhicules de plaisance, produites ou exportées par Elixir Industries, de Gardena (Californie), États-Unis d'Amérique, ou en son nom, pour utilisation ou consommation dans les provinces d'Alberta et de Colombie-Britannique, Enquête no CIT-12-87, le 18 mars 1988.

5. Ces deux critères sont abordés plus en détail dans la partie les motifs de la décision de cet exposé des motifs.

6. Plainte des États-Unis au sujet de certaines pratiques des régies des alcools provinciales au Canada.

7. Accord intergouvernemental sur les pratiques de commercialisation de la bière, le 1er janvier 1991.

8. Certains tubes soudés en acier au carbone originaires ou exportés de l'Argentine, de l'Inde, de la Roumanie, de Taïwan, de la Thaïlande, et du Venezuela, le Tribunal canadien du commerce extérieur, Enquête no NQ-90-005, le 26 juillet 1991.

9. Supra, renvoi no 4.

10. Ibid.

11. Les preuves révèlent que le prix des marques ordinaires vendues en volumes était de 6,60 $ l'emballage de six canettes en juin 1988.

12. Supra, renvoi no 4.

13. Certaines barres d'armature, barres et profilés de construction, en acier au carbone, laminés à chaud, originaires ou exportés du Mexique et des États-Unis d'Amérique, à des fins d'utilisation ou de consommation dans la province de la Colombie-Britannique, Enquête no CIT-8-87, le 22 décembre 1987.

14. Supra, renvoi no 3.

15. Le TCI a aussi souligné que selon l'alinéa 1(ii) de l'article 4 du Code, il devait procéder à une analyse en deux volets dans la cause Portes d'entrée de véhicules de plaisance, produites ou exportées par Elixir Industries, de Gardena (Californie), États-Unis d'Amérique, ou en son nom, pour utilisation ou consommation dans les provinces d'Alberta et de Colombie-Britannique, Enquête no CIT-12-87, le 18 mars 1988.

16. Urée solide originaire ou exportée de la République démocratique allemande et de l'Union des républiques socialistes soviétiques et destinée à être utilisée ou consommée dans l'est du Canada (le territoire canadien à l'est de la frontière de l'Ontario et du Manitoba), Enquête no CIT-9-87, le 24 décembre 1987.

17. Supra, renvoi no 7.

18. Supra, renvoi no 4.

19. Supra, renvoi no 16.

20. «Importations en cause» désigne les marchandises en cause exportées par les trois exportateurs américains désignés.

21. La part du marché canadien total occupée par la Colombie-Britannique était de 9 p. 100, 10 p. 100 et 10 p. 100 en 1988, 1989 et 1990, respectivement.

22. Il s'agit d'un résumé de ce qui s'est passé en réalité, c. à d. que les trois brasseries principales de la Colombie-Britannique ont augmenté leurs prix à la Direction générale de la distribution de l'alcool d'un montant qui, majoré de la marge de la Direction générale de la distribution de l'alcool selon ses politiques courantes, a porté les prix affichés de l'emballage de six canettes de 6,30 $ en mars 1988 à 6,60 $ en juin 1988.

23. Le Tribunal a tenu compte de l'augmentation à la fois des dépenses financières et d'exploitation par rapport au mélange bouteilles-canettes qui existait en 1987.

24. Désigne les prix de marques ordinaires vendues en grande quantité en emballage de six canettes.

25. Hitachi et autres c. le Tribunal antidumping et autres, [1979] 1 R.C.S. 93; Sacilor Aciéries et al. v. Anti-dumping Tribunal et al., [1985] 9 C.E.R. 210 (C.F., division de première instance).

26. Groupe binational établi en vertu de l'article 1904, décision datée du 11 septembre 1991, dans l'affaire de Certain Dumped Integral Horsepower Induction Motors, One Horsepower (1 HP) to Two Hundred Horsepower (200 HP) Inclusive, with Exceptions Originating in or Exported from the United States of America.


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Publication initiale : le 17 juillet 1997