TUBES SOUDÉS EN ACIER AU CARBONE

Réexamens


TUBES SOUDÉS EN ACIER AU CARBONE DE DIMENSIONS NOMINALES VARIANT DE 12,7 À 406,4 mm (1/2 po À 16 po) INCLUSIVEMENT, SOUS DIVERSES FORMES ET FINITIONS, HABITUELLEMENT FOURNIS POUR RÉPONDRE AUX NORMES ASTM A53, ASTM A120, ASTM A252, ASTM A589 OU AWWA C200-80 OU AUX NORMES ÉQUIVALENTES, Y COMPRIS CEUX POUR LE TUBAGE DE PUITS D’EAU, LES TUBES POUR PILOTIS, LES TUBES POUR ARROSAGE ET LES TUBES POUR CLÔTURE, MAIS À L’EXCEPTION DES TUBES POUR LES CANALISATIONS DE PÉTROLE ET DE GAZ FABRIQUÉS EXCLUSIVEMENT POUR RÉPONDRE AUX NORMES DE L’API, ORIGINAIRES OU EXPORTÉS DE LA RÉPUBLIQUE DE CORÉE
Réexamen no : RR-94-004

TABLE DES MATIERES


Ottawa, le lundi 5 juin 1995

EU ÉGARD À un réexamen, aux termes du paragraphe 76(2) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, des conclusions de préjudice sensible rendues par le Tribunal antidumping le 28 juin 1983, dans le cadre de l’enquête no ADT-6-83, prorogées sans modification par le Tribunal canadien du commerce extérieur le 5 juin 1990, dans le cadre du réexamen no RR-89-008, concernant les :

TUBES SOUDÉS EN ACIER AU CARBONE DE DIMENSIONS NOMINALES VARIANT DE 12,7 À 406,4 mm (1/2 po À 16 po) INCLUSIVEMENT, SOUS DIVERSES FORMES ET FINITIONS, HABITUELLEMENT FOURNIS POUR RÉPONDRE AUX NORMES ASTM A53, ASTM A120, ASTM A252, ASTM A589 OU AWWA C200-80 OU AUX NORMES ÉQUIVALENTES, Y COMPRIS CEUX POUR LE TUBAGE DE PUITS D’EAU, LES TUBES POUR PILOTIS, LES TUBES POUR ARROSAGE ET LES TUBES POUR CLÔTURE, MAIS À L’EXCEPTION DES TUBES POUR LES CANALISATIONS DE PÉTROLE ET DE GAZ FABRIQUÉS EXCLUSIVEMENT POUR RÉPONDRE AUX NORMES DE L’API, ORIGINAIRES OU EXPORTÉS DE LA RÉPUBLIQUE DE CORÉE

O R D O N N A N C E

Conformément aux dispositions du paragraphe 76(2) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, le Tribunal canadien du commerce extérieur a procédé à un réexamen des conclusions de préjudice sensible rendues par le Tribunal antidumping le 28 juin 1983, dans le cadre de l’enquête no ADT-6-83, prorogées sans modification par le Tribunal canadien du commerce extérieur le 5 juin 1990, dans le cadre du réexamen no RR-89-008.

Aux termes du paragraphe 76(4) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation, le Tribunal canadien du commerce extérieur proroge, par la présente, les conclusions susmentionnées sans modification.

Lyle M. Russell
_________________________
Lyle M. Russell
Membre présidant


Robert C. Coates, c.r.
_________________________
Robert C. Coates, c.r.
Membre


Desmond Hallissey
_________________________
Desmond Hallissey
Membre


Michel P. Granger
_________________________
Michel P. Granger
Secrétaire

Loi sur les mesures spéciales d’importation - Déterminer s’il y a lieu d’annuler ou de proroger, avec ou sans modification, les conclusions de préjudice sensible rendues par le Tribunal antidumping le 28 juin 1983, dans le cadre de l’enquête no ADT-6-83, prorogées sans modification par le Tribunal canadien du commerce extérieur le 5 juin 1990, dans le cadre du réexamen no RR-89-008.

Lieu de l’audience : Ottawa (Ontario)
Dates de l’audience : Les 18 et 19 avril 1995
Date de l’ordonnance et des motifs : Le 5 juin 1995

Membres du Tribunal : Lyle M. Russell, membre présidant
Robert C. Coates, c.r., membre
Desmond Hallissey, membre

Directeur de la recherche : Marcel J.W. Brazeau

Gestionnaire de la recherche : Ken Campbell

Économiste : Ihn Ho Uhm

Préposé aux statistiques : Margaret Saumweber

Avocat pour le Tribunal : David M. Attwater

Agent à l’inscription et à la
distribution : Pierrette Hébert


Participants : Ronald C. Cheng
Gregory O. Somers
pour IPSCO Inc.
Sidbec-Dosco Inc.

Lawrence L. Herman
pour Stelco Inc.
Stelpipe Ltd., A Subsidiary of Stelco Inc.

(producteurs)

Témoins :
V.P. (Vic) Marks
Gestionnaire
Projets civils et municipaux — Ventes
IPSCO Inc.

Glenn A. Gilmore
Surveillant de commerce
IPSCO Inc.

H.J. (Hank) MacComb
Président et Directeur général
Comco Pipe & Supply Company

Mario Lalanne
Directeur général, Tuyaux
Sidbec-Dosco Inc.

R.P. (Rick) Jaszek
Gestionnaire des ventes — Page-Hersey-Works
Stelpipe Ltd., A Subsidiary of Stelco Inc.

Douglas J. Jury
Gestionnaire financier
Stelpipe Ltd., A Subsidiary of Stelco Inc.

Donald K. Belch
Directeur — Relations gouvernementales
Stelco Inc.

Adresser toutes les communications au :

Secrétaire
Tribunal canadien du commerce extérieur
Standard Life Centre
333, avenue Laurier ouest
15e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0G7

EXPOSÉ DES MOTIFS

CONTEXTE

Il s’agit d’un réexamen, aux termes du paragraphe 76(2) de la Loi sur les mesures spéciales d’importation [1] (la LMSI), des conclusions de préjudice sensible rendues par le Tribunal antidumping le 28 juin 1983, dans le cadre de l’enquête no ADT-6-83, prorogées sans modification par le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) le 5 juin 1990, dans le cadre du réexamen no RR-89-008, concernant les tubes soudés en acier au carbone de dimensions nominales variant de 12,7 à 406,4 mm (1/2 po à 16 po) inclusivement, sous diverses formes et finitions, habituellement fournis pour répondre aux normes ASTM A53, ASTM A120, ASTM A252, ASTM A589 ou AWWA C200-80 ou aux normes équivalentes, y compris ceux pour le tubage de puits d’eau, les tubes pour pilotis, les tubes pour arrosage et les tubes pour clôture, mais à l’exception des tubes pour les canalisations de pétrole et de gaz fabriqués exclusivement pour répondre aux normes de l’API, originaires ou exportés de la République de Corée (la Corée).

Aux termes du paragraphe 76(2) de la LMSI, le Tribunal a procédé à un réexamen des conclusions et a publié un avis de réexamen [2] le 15 décembre 1994. Cet avis a été envoyé à toutes les parties intéressées connues.

Dans le cadre du présent réexamen, le Tribunal a envoyé des questionnaires de réexamen aux producteurs nationaux et aux importateurs des marchandises en question. À partir des r 9‚ponses à ces questionnaires de réexamen et de renseignements obtenus d’autres sources, le personnel de la recherche du Tribunal a préparé des rapports public et protégé préalables à l’audience. En outre, le dossier du présent réexamen comprend tous les documents pertinents, y compris les conclusions, l’avis de réexamen et les parties publiques et confidentielles des réponses aux questionnaires de réexamen, ainsi que les rapports public et protégé préalables à l’audience. Toutes les pièces publiques ont été mises à la disposition des parties intéressées, tandis que les pièces protégées n’ont été distribuées qu’aux avocats indépendants qui avaient déposé auprès du Tribunal un acte de déclaration et d’engagement en matière de confidentialité.

Des audiences publiques et à huis clos ont été tenues à Ottawa (Ontario) les 18 et 19 avril 1995.

Les sociétés IPSCO Inc. (IPSCO), Sidbec-Dosco Inc. (Sidbec-Dosco), Stelco Inc. (Stelco) et Stelpipe Ltd., A Subsidiary of Stelco Inc. (Stelpipe) étaient représentées à l’audience par des avocats, ont soumis des éléments de preuve et plaidé en faveur de la prorogation des conclusions. Un témoin pour Comco Pipe & Supply Company (Comco), un distributeur de tubes, a comparu à la demande de l’industrie nationale. Aucun des exportateurs coréens ou des importateurs canadiens n’a comparu à l’audience.

PRODUIT

Le produit visé par le présent réexamen comprend certains tubes soudés en acier au carbone. Ce produit, aussi appelé «tube normalisé», est généralement utilisé dans les installations de plomberie et de chauffage pour acheminer de la vapeur, de l’eau et de l’air.

L’American Iron and Steel Institute classe les tubes en acier dans les groupes suivants, selon leur utilisation finale : tubes normalisés, tubes pression, tubes de canalisation, tubes de construction, tubes pour usages mécaniques et articles tubulaires pour l’industrie du pétrole. Les tubes soudés en acier au carbone sont produits dans des usines métallurgiques par soudure continue (SC) et par soudure par résistance électrique (SRE). Les diamètres extérieurs des tubes produits par SC varient d’un minimum de 0,405 po à un maximum, en général, de 4,500 po alors les diamètres extérieurs des tubes produits par SRE varient de 2 à 24 po. Dans les deux cas, après le façonnage, le produit est redressé et fini, c.-à-d. qu’il est ébouté, dressé et alésé. Les tubes de types SC et SRE sont interchangeables, quoique certains utilisateurs préfèrent les tubes SRE aux tubes SC.

Les tubes normalisés sont produits selon les normes de l’American Society for Testing and Materials (l’ASTM), qui précisent les exigences en matière de composition et de résistance. La plupart des tubes normalisés sont utilisés dans des installations de plomberie et de chauffage et sont conformes à la norme ASTM A53. Ils présentent des finis noirs et galvanisés standard. Les dimensions nominales les plus populaires comprennent les tubes de 1 po, 2 po, 3 po, 4 po, 6 po et 8 po. Les tubes conformes à la norme ASTM A53 sont considérés de première qualité et peuvent être soudés, enroulés, cintrés et bridés. Les tubes normalisés sont également destinés à servir, entre autres, de tubes pour pilotis (ASTM A252), de tubages de puits d’eau (ASTM A589 ou AWWA C200-80) ainsi que de tubes pour arrosage et de tubes pour clôture (ASTM A795).

Les tubes soudés en acier au carbone sont vendus par des producteurs nationaux à d’importants distributeurs. Ces derniers ont généralement des succursales partout au Canada qui achètent les produits soit des producteurs nationaux et des organismes publics d’importation ou qui en importent eux-mêmes. Le marché comprend, en outre, de nombreux petits importateurs directs qui s’approvisionnent principalement aux États-Unis.

INDUSTRIE NATIONALE

L’industrie nationale compte quatre grands producteurs : Stelco, Sidbec-Dosco, IPSCO et Bolton Steel Tube Co. Ltd. (Bolton). Camrose Pipe Company (Camrose), Prudential Steel Ltd. (Prudential) et Welded Tube of Canada Limited produisent des tubes normalisés dans des volumes beaucoup moins importants que les grands producteurs. Stelco, Sidbec-Dosco et IPSCO, trois sociétés qui appuient la prorogation des conclusions, interviennent pour plus de 70 p. 100 de la production nationale et ont des usines à plusieurs endroits au Canada.

Stelco a produit et vendu des tubes normalisés sous la marque «Stelco» jusqu’en 1984. Au cours de cette année, Stelco a procédé à la réorganisation de ses installations de production de matériel tubulaire en une entité commerciale distincte, Stelco Pipe and Tube Company, laquelle est devenue Stelpipe en 1988. Stelpipe produit des tubes à trois usines situées à Welland (Ontario). De plus, au début de 1992, Stelco a vendu son usine de Camrose (Alberta), tout en y conservant une participation minoritaire. Au milieu de 1992, la société a entrepris de faire construire un nouveau laminoir étireur-réducteur à Welland, ce qui a représenté un investissement de 70 millions de dollars, et a fermé sa tuberie SC à l’usine Page-Hersey-Works. Stelco produit la gamme complète de tubes soudés en acier au carbone et les commercialise partout au pays.

Sidbec-Dosco, autrefois la propriété du Québec, est une filiale en propriété exclusive d’Ispat Mexicana. La société compte quatre installations de production au Canada, mais produit des tubes soudés en acier au carbone uniquement à son usine de Montréal (Québec). L’usine de Montréal utilise le processus par SC pour produire des tubes dont le diamètre extérieur est de 4 po au plus. Sidbec-Dosco s’approvisionne en tubes SRE variant de 2 à 6 po de diamètre extérieur auprès de Tubes-Delta Inc., une société liée. Sidbec-Dosco commercialise des tubes soudés en acier au carbone partout au pays.

IPSCO, une société cotée en Bourse, a commencé à produire des tubes soudés en acier au carbone à Regina (Saskatchewan) en 1957. Depuis lors, la société a pris de l’expansion grâce à l’acquisition d’installations de production de matériel tubulaire à Edmonton, Red Deer et Calgary (Alberta). IPSCO produit des tubes normalisés variant de 2 à 16 po de diamètre extérieur à l’aide du processus SRE. La société commercialise les tubes normalisés au pays par l’intermédiaire d’un réseau de distributeurs.

Bolton a commencé à produire des tubes normalisés à deux tuberies acquises de Canada Tube en 1981. En 1988, la société a accru la production des tubes normalisés en se portant acquéreur de deux usines de Toro Steel Tube Co., de Mississauga (Ontario). La majeure partie de la production de Bolton est vendue à titre de tubes pour clôtures, le reste répondant aux besoins dans le cadre d’utilisations industrielles et commerciales spécialisées.

RÉSUMÉ DES CONCLUSIONS DE 1983

Le 28 juin 1983, le Tribunal antidumping a conclu que le dumping des marchandises en question originaires de la Corée avait causé, causait et était susceptible de causer un préjudice sensible à la production au Canada de marchandises similaires, mais que le dumping des marchandises en question originaires de la République sud-africaine et du Luxembourg n’avait pas causé, ne causait pas et n’était pas susceptible de causer un préjudice sensible à la production au Canada de marchandises similaires.

La plainte avait été déposée par IPSCO, Stelco, Sidbec-Dosco et Prudential. Les quatre entreprises ont participé aux audiences, de même qu’Olympia Tubes Limited, un importateur, la Korea Steel Pipe Association qui représentait les exportateurs coréens, TradeARBED Canada Inc., un agent, et Crane Supply, Division of Crane Canada Inc., un distributeur.

Le Tribunal antidumping, dans son examen du préjudice sensible, a constaté que les producteurs avaient réussi à établir et à maintenir une pr?E9‚sence importante sur le marché canadien, mais que les producteurs de l’Ouest avaient fait porter leurs efforts sur la production de produits tubulaires pour l’industrie du pétrole, ce qui a permis aux importations des tubes en question d’être sensiblement plus importantes sur le marché de l’Ouest canadien. En 1982, le marché pour les tubes soudés en acier au carbone a connu une baisse, mais celui des marchandises tubulaires pour l’industrie du pétrole s’est effondré. Les producteurs nationaux se sont alors tournés vers la production de tubes soudés en acier au carbone afin de maintenir leurs activités de production.

En 1981 et 1982, toutes les importations de tubes coréens ont été faites dans l’ouest du Canada. Ces importations avaient augmenté sensiblement. Les importations des marchandises en question en provenance de la République sud-africaine et du Luxembourg n’avaient augmenté que légèrement et uniquement dans l’est du Canada. Le Tribunal a fait remarquer que le volume des importations coréennes sous-évaluées au cours du premier trimestre de 1982 représentait les deux tiers des importations totales de 1982. De plus, la chute des importations coréennes en 1982 a coïncidé avec la nouvelle politique d’établissement des prix adoptée par IPSCO en mars 1982.

Les escomptes offerts par IPSCO ont donné lieu à un important remaniement des parts du marché entre les producteurs nationaux tant à l’est qu’à l’ouest du pays. IPSCO, avec sa politique d’établissement des prix, a fait absorber la totalité des pertes de volumes par les autres producteurs nationaux, ce qui a permis à IPSCO de ne pas perdre de part du marché. Étant donné que les autres producteurs n’ont pas modifié leurs prix, ils ont subi un préjudice, en raison du dumping, qui s’est manifesté sous la forme d’une perte de part du marché, alors qu’IPSCO a subi un préjudice qui s’est traduit par une compression des prix.

Le Tribunal antidumping n’a pas été convaincu que le préjudice était attribuable à la présence d’importations sous-évaluées en provenance de la République sud-africaine et du Luxembourg dans l’est du Canada, et dans l’ouest du pays, il n’a pas été allégué qu’un préjudice avait été causé par ces importations.

RÉSUMÉ DE L’ORDONNANCE DE 1990

Dans une ordonnance datée du 5 juin 1990, le Tribunal a prorogé sans modification les conclusions de 1983. Les quatre producteurs qui avaient pris part à l’enquête d’origine ont soumis des éléments de preuve en faveur de la prorogation des conclusions. En 1989, les ventes globales de tubes soudés en acier au carbone réalisées par ces sociétés étaient de l’ordre de 90 millions de dollars et représentaient approximativement 80 p. 100 du marché canadien total d’environ 110 millions de dollars.

Quant à la probabilité d’une reprise du dumping, le Tribunal a constaté qu’au cours de la plus grande partie des 10 années qui ont précédé le réexamen, la Corée était le principal pays d’importation des marchandises en question au Canada, avec une moyenne d’environ 60 p. 100 des importations totales pour la période allant de 1986 à 1988. En outre, le Tribunal a fait remarquer que la capacité potentielle d’exportation de la Corée était sensiblement plus élevée que l’ensemble du marché canadien des tubes soudés en acier au carbone. Compte tenu de cela, le Tribunal estimait qu’il était fort probable que le marché canadien soit à l’avenir, comme il l’avait été par le passé, un débouché pour une grande partie de cette capacité d’exportation. De plus, il était fort probable que ces exportations coréennes soient sous-évaluées, en l’absence de droits antidumping, en raison de la très forte concurrence et des prix à la baisse qui existaient sur le marché canadien.

En se penchant sur la vulnérabilité de l’industrie nationale à une reprise du dumping, le Tribunal a constaté que, depuis les conclusions de 1983, l’industrie nationale avait connu de courtes périodes de reprises modestes, particulièrement en 1988. Cependant, les éléments de preuve montraient que ces périodes de reprises modestes n’avaient pas été suffisantes pour permettre le rétablissement de la santé et de la stabilité financières de l’industrie nationale, particulièrement en raison du recul qui semblait s’être manifesté au cours de la deuxième moitié de 1988 et qui ne semblait pas vouloir s’estomper. Dans ces circonstances, l’industrie nationale aurait probablement subi un préjudice sensible attribuable à la reprise du dumping et, par conséquent, les conclusions ont été prorogées.

AUTRES CONCLUSIONS

Il y a présentement deux autres conclusions qui visent des importations de tubes soudés en acier au carbone. À part quelques exceptions mineures, les deux conclusions portent sur les mêmes marchandises que celles faisant l’objet du présent réexamen, mais visent des pays différents.

Dans l’enquête no NQ-90-005 [3] , le Tribunal a conclu que le dumping au Canada de certains tubes soudés en acier au carbone originaires ou exportés de l’Argentine, de l’Inde, de la Roumanie, de Taiwan, de la Thaïlande et du Venezuela avait causé, causait ou était susceptible de causer un préjudice sensible à la production au Canada de marchandises similaires.

Dans l’enquête no NQ-91-003 [4] , le Tribunal a conclu que le dumping au Canada de certains tubes soudés en acier au carbone originaires ou exportés du Brésil avait causé, causait ou était susceptible de causer un préjudice sensible à la production au Canada de marchandises similaires et que le dumping de certains tubes soudés en acier au carbone originaires ou exportés du Luxembourg, de la Pologne, de la Turquie et de la Yougoslavie avait causé, mais ne causait pas et n’était pas susceptible de causer un préjudice sensible à la production au Canada de marchandises similaires.

POSITION DE L’INDUSTRIE NATIONALE

IPSCO et Sidbec-Dosco

Dans leurs observations préliminaires, les avocats d’IPSCO et de Sidbec-Dosco ont souligné que tous les éléments de preuve soumis par l’industrie nationale demeurent «incontestés» puisque les exportateurs coréens et les importateurs canadiens de leurs produits ont décidé de ne pas comparaître à l’audience. Les avocats ont soutenu que tous les producteurs nationaux sont vulnérables à une reprise du dumping, et cela de façons différentes, selon leur emplacement géographique, les structures de coûts qui varient et d’autres facteurs qui ont une incidence sur leurs activités. De l’avis des avocats, les conditions qui existaient au moment du réexamen de 1990 existent toujours aujourd’hui et, par conséquent, les conclusions doivent être prorogées sans modification.

En abordant la question de la vulnérabilité de l’industrie nationale à une reprise du dumping, les avocats d’IPSCO et de Sidbec-Dosco ont fait valoir que tous les producteurs nationaux avaient été exposés à des pressions incessantes exercées sur les prix en raison du dumping successif pratiqué par plusieurs pays depuis le début des années 80. Les avocats ont ajouté que ces pressions se sont accentuées avec l’arrivée d’importations en provenance des Philippines, de la République sud-africaine, de la Turquie et, plus récemment, du Mexique et de la République populaire de Chine. Les avocats ont souligné le fait que les tubes normalisés sont des produits de base dont le prix est d’une importance capitale dans les décisions d’achat et qu’il s’agit de produits entièrement substituables, qu’ils soient fabriqués au pays ou importés. En outre, les avocats ont laissé entendre que les pressions exercées sur les prix ont augmenté parce que les importateurs vendent souvent «au quai», offrant des tubes en très petites quantités, mais à rabais.

Les avocats d’IPSCO et de Sidbec-Dosco ont soutenu que des événements récents ont amélioré la position concurrentielle de leurs clients. Par exemple, IPSCO a fermé une de ses tuberies afin de réduire les coûts, et Sidbec-Dosco a de nouveaux propriétaires du secteur privé, ce qui devrait améliorer les perspectives de l’entreprise. Cependant, les avocats ont soutenu que des volumes de production élevés sont nécessaires pour contenir les coûts de production, mais que l’industrie nationale est aux prises avec une sous-utilisation importante de sa capacité de production. Les avocats ont aussi fait valoir que les perspectives de croissance future de la demande du marché et des prix ainsi que l’avantage conféré à l’heure actuelle par la valeur favorable de la devise sont des éléments sur lesquels on ne pourra pas compter au cours de la prochaine année.

Quant à la probabilité d’une reprise du dumping si les conclusions sont annulées, les avocats d’IPSCO et de Sidbec-Dosco ont fait remarquer que le ministère du Revenu national (Revenu Canada) a imposé des droits antidumping aux importations coréennes au cours de chacune des années visées par le réexamen et que ces droits n’étaient pas négligeables. De plus, les avocats ont fait valoir que le récent examen de la valeur normale fait par Revenu Canada indique que les exportations de tubes de la Corée sont peut-être sous-évaluées parce qu’elles ne semblent pas refléter les coûts actuels des intrants.

Les avocats d’IPSCO et de Sidbec-Dosco ont rappelé les tentatives faites par la Corée pour contourner les conclusions de préjudice, tant au Canada qu’aux États-Unis, comme preuve évidente de la propension de ce pays à pratiquer le dumping. De plus, les avocats ont soutenu que le dumping d’une vaste gamme d’autres produits en acier au Canada par les mêmes exportateurs, ainsi que le dumping de tubes normalisés aux États-Unis et l’enquête en cours aux États-Unis relativement au dumping par la Corée d’articles tubulaires pour l’industrie du pétrole tendent à appuyer les allégations concernant la propension des exportateurs coréens à pratiquer le dumping. De l’avis des avocats, les éléments de preuve indiquent qu’il existe une sous-utilisation importante des capacités de production en Corée et des stocks considérables dans ce pays. Compte tenu de la nécessité pour la Corée d’exporter et de l’activité de ce pays sur les marchés nord-américains, les avocats ont soutenu que les exportateurs cor 9‚ens constituent une menace évidente pour l’industrie nationale si les conclusions sont annulées.

Stelco et Stelpipe

Dans sa plaidoirie, l’avocat de Stelco et de Stelpipe a mentionné plusieurs facteurs qui justifient la prorogation des conclusions, notamment l’énorme capacité de production des producteurs coréens, capacité qui est largement supérieure à la demande intérieure de la Corée et qui fait en sorte que ce pays doit constamment exporter afin de maintenir ses niveaux de production et une marge brute d’autofinancement. L’avocat a soutenu que les Coréens sont constamment demeurés présents sur le marché canadien depuis le dernier réexamen et qu’ils ont ciblé l’ensemble du marché nord-américain pendant cette période. En outre, l’avocat a fait remarquer qu’en dépit des conclusions, le dumping de tubes en provenance de la Corée se poursuit et que, depuis le dernier réexamen, des conclusions de dumping préjudiciable de tubes normalisés aux États-Unis ont été rendues à l’endroit des mêmes exportateurs.

L’avocat de Stelco et de Stelpipe a soutenu que les tubes normalisés sont des produits de base vendus au plus bas prix possible. Ainsi, un volume relativement faible de produits sous-évalués peut avoir une incidence négative sur les prix d’un marché local comme celui de Vancouver (Colombie-Britannique) et peut influer sur les prix dans l’ensemble du Canada. L’avocat a fait valoir que les importateurs investissent peu et vendent des tubes «au quai», à des prix inférieurs aux prix publics de l’industrie nationale.

L’avocat de Stelco et de Stelpipe a laissé entendre que l’établissement des prix actuel des producteurs coréens ne permet pas à ces derniers de récupérer le coût intégral de la production. Il a été allégué que les prix actuels à l’importation de tubes coréens sont inférieurs présentement à ceux demandés au moment du dernier réexamen. De l’avis de l’avocat, une annulation des conclusions déstabiliserait le fragile marché canadien des tubes et mettrait en danger les récents gains réalisés par l’industrie nationale au chapitre des prix.

L’avocat de Stelco et de Stelpipe a soutenu que les facteurs liés au marché canadien sont les mêmes aujourd’hui qu’au moment du réexamen de 1990. Le principal changement depuis 1990 a été des conclusions de dumping rendues aux États-Unis à l’endroit des mêmes exportateurs coréens. En outre, les éléments de preuve donnent à penser que ces exportateurs ont tenté de contourner les conclusions tant au Canada qu’aux États-Unis en important des tubes de canalisation API qu’ils revendent par la suite en tant que tubes normalisés.

En dernier lieu, l’avocat de Stelco et de Stelpipe a fait valoir que l’industrie nationale demeure vulnérable à une reprise du dumping. Bien que l’industrie nationale se remette lentement des effets de la récession, les prix demeurent inférieurs à ceux de 1990. L’avocat a soutenu que l’industrie nationale a subi des pertes nettes sur les ventes de tubes soudés en acier au carbone pendant toute la période visée par le réexamen, même si les conclusions ont permis à l’industrie nationale d’augmenter lentement ses prix en vue de rétablir une rentabilité. Pour ce qui est de Stelpipe, l’avocat a fait remarquer que la société a investi des capitaux importants dans la modernisation de ses installations de production. L’avocat a soutenu que l’annulation des conclusions menacerait cet investissement.

INDICATEURS ÉCONOMIQUES

Le tableau suivant résume les principaux indicateurs économiques pour la période visée par le réexamen, soit la période allant de 1991 à 1994.

PRINCIPAUX INDICATEURS ÉCONOMIQUES

1991

1992

1993

1994

Production (tonnes)

123 687

127 457

158 474

150 465

Importations (tonnes)

Corée

3 572

3 449

5 077

4 004

Autres pays

41 490

37 690

36 166

40 879

Marché (tonnes)

Ventes à partir de la production

intérieure

105 540

98 416

114 271

110 414

Ventes à partir des importations

coréennes

3 572

3 449

5 077

4 004

Ventes à partir d’autres importations

41 490

37 690

36 166

40 879

Marché total

150 602

139 555

155 514

155 297

Ventes nettes de l’industrie1 (000 $)

66 251

53 304

60 854

65 220

Bénéfice (perte) net de

l’industrie1 (%)

(7)

(18)

(18)

(12)

Emplois de l’industrie

253

286

320

268

Note :

1. Exclut les ventes à l’exportation.

Source : Questionnaires de réexamen du Tribunal et renseignements de Statistique Canada sur les importations.

La demande sur le marché pour des tubes soudés en acier au carbone est cyclique et dépend largement des activités de construction industrielle et commerciale. De 1991 à 1994, le marché des tubes soudés en acier au carbone a été calme, et est tombé à environ 140 000 tonnes en 1992. La demande s’est quelque peu accrue au cours de la période allant de 1993 à 1994, mais est tout de même demeurée inférieure aux volumes de ventes obtenues avant 1989.

La production intérieure a augmenté d’environ 30 000 tonnes en 1993 par rapport aux niveaux de 1991 et de 1992, avant de chuter de 8 000 tonnes en 1994. L’amélioration des niveaux de production de l’industrie au cours des deux dernières années de la période visée par le réexamen a été en grande partie attribuable à des gains réalisés dans les exportations destinées au marché des États-Unis. Les ventes de l’industrie nationale ont été stagnantes entre 1991 et 1994, alors que la part du marché de l’industrie nationale est demeurée relativement constante, passant d’un plancher de 70 p. 100 en 1991 à un sommet de 75 p. 100 en 1993.

Au cours de la période de quatre ans, les importations totales sont passées de 45 000 tonnes en 1991 à 41 000 tonnes en 1992 et 1993, avant de revenir, en 1994, au niveau de 1991. Les importations coréennes ont toujours été présentes pendant cette période et ont représenté, annuellement, environ 10 p. 100 de l’ensemble des importations. Les importations en provenance des pays visés par les conclusions de 1991 (Argentine, Inde, Roumanie, Taiwan, Thaïlande et Venezuela) et les conclusions de 1992 (Brésil) ont été déplacées par des importations en provenance des Philippines et des États-Unis. Les tubes originaires des Philippines ont représenté 18 p. 100 de l’ensemble des importations en 1994, comparativement à 3 p. 100 en 1991. Les importations en provenance des États-Unis, le principal pays d’importation de tubes, ont représenté plus de 50 p. 100 de toutes les importations pendant la période visée par le réexamen. En 1994, d’importants volumes de tubes ont aussi été importés d’un certain nombre de nouveaux pays, principalement de la Turquie, de la République sud-africaine et de la Russie.

Toutes sociétés confondues, les ventes de l’industrie nationale ont diminué de 13 millions de dollars en 1992 et, quoique les ventes aient augmenté au cours des deux années suivantes, elles étaient tout de même, en 1994, inférieures de 1 million de dollars aux niveaux de 1991. Exception faite de 1991, toutes sociétés confondues, les ventes de l’industrie nationale n’ont pu générer un bénéfice brut, les coûts étant supérieurs aux recettes. Sur le plan du revenu net, l’industrie nationale a connu d’importantes pertes pendant la période visée par le réexamen, ces pertes variant d’un plancher de 7 p. 100 à un sommet de 18 p.100 des ventes nettes. La demande du marché étant plus faible, les taux d’utilisation de la capacité de l’industrie sont demeurés à des niveaux très bas au cours des quatre années et, en 1994, les niveaux d’emploi dans l’industrie ont diminué de façon marquée par rapport au niveau maximal de 320 employés affectés à la production atteint en 1993.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Afin de déterminer s’il doit proroger, avec ou sans modification, ou annuler les conclusions du Tribunal antidumping, le Tribunal doit examiner deux questions. Avant de proroger les conclusions, le Tribunal doit en premier lieu être convaincu qu’en l’absence de conclusions de préjudice, il y aura probablement une reprise du dumping pratiqué par la Corée et, en deuxième lieu, qu’une telle reprise du dumping est susceptible de causer un préjudice sensible à la production au Canada de marchandises similaires.

Probabilité d’une reprise du dumping

Les éléments de preuve produits dans le cadre du présent réexamen indiquent que la situation demeure essentiellement inchangée depuis le réexamen effectué par le Tribunal en 1990 en dépit du fait qu’un certain nombre de nouveaux facteurs se soient manifestés sur le marché canadien ainsi que sur d’autres marchés de tubes. Après avoir examiné les éléments de preuve présentés dans la présente affaire, le Tribunal est d’avis qu’une annulation des conclusions entraînerait une reprise du dumping de tubes soudés en acier au carbone par la Corée.

Pour en arriver à cette conclusion, le Tribunal accorde beaucoup d’importance aux actions antérieures des exportateurs coréens sur le marché nord-américain. Les producteurs d’acier coréens, y compris un certain nombre des producteurs des marchandises visées par le présent réexamen, pratiquent depuis longtemps du dumping au Canada et aux États-Unis. Des conclusions de préjudice ont été rendues relativement à une gamme variée de produits d’acier dans les deux pays au cours des vingt dernières années [5] , et plusieurs de ces conclusions demeurent en vigueur. Toutefois, ce qui est plus important encore, les éléments de preuve montrent que les mêmes exportateurs à l’endroit desquels des conclusions de dumping de tubes normalisés ont été rendues au Canada pratiquaient le dumping préjudiciable des mêmes marchandises aux États-Unis et ce, pas plus tard qu’à la fin de 1992 [6] . Le Tribunal fait aussi remarquer que, le 2 février 1995, le Département du commerce des États-Unis a rendu une décision provisoire de dumping relativement aux articles tubulaires pour l’industrie du pétrole originaires de la Corée [7] , une catégorie de marchandises connexes produites dans les mêmes usines que les tubes normalisés.

Ces antécédents en matière de dumping semblent indiquer, selon le Tribunal, une propension de la Corée à pratiquer le dumping. Toutefois, un certain nombre d’autres éléments corroborent cette opinion. D’abord, bien que les États-Unis [8] et, plus récemment, les Philippines aient remplacé la Corée à titre de principale source étrangère d’approvisionnement pour les tubes soudés en acier au carbone, les importations coréennes sont demeurées présentes sur le marché canadien. Les données sur l’importation [9] indiquent que, pendant toute la période allant de 1991 à 1994, les importations coréennes ont représenté environ 10 p. 100 de l’ensemble des importations, les volumes les plus considérables étant importés au cours des deux dernières années de cette période. En outre, les éléments de preuve montrent que les importations de tubes en provenance des Philippines sont faites par les mêmes importateurs qui comptaient autrefois sur les tubes coréens pour répondre à leurs besoins. Le Tribunal est d’avis qu’une annulation des conclusions inciterait les importateurs à revenir à leur source traditionnelle d’approvisionnement, c.-à-d. la Corée.

Deuxièmement, les éléments de preuve montrent qu’un volume important de tubes coréens est disponible aux fins d’exportation. Bien qu’un pourcentage plus important de produits coréens semble aujourd’hui consommé à l’intérieur de ce pays comparativement à 1990, et qu’aucun élément de preuve n’indique que la capacité inutilisée de l’industrie coréenne ou le niveau des stocks soit plus élevé que la normale, il ressort des éléments de preuve que le volume de tubes coréens disponibles aux fins d’exportation au Canada est important comparativement à la taille du marché canadien. Par exemple, l’industrie coréenne dispose habituellement de stocks correspondant à environ 5 p. 100 de sa production. À un niveau estimatif de 55 00 tonnes en 1993 [10] , les stocks coréens auraient pu approvisionner environ 35 p. 100 du marché canadien. Les éléments de preuve montrent aussi clairement que le marché de l’ouest de l’Amérique du Nord est un marché d’exportation de premier plan pour les producteurs coréens, ce qui leur permet de maintenir des taux d’utilisation de la capacité élevés. Compte tenu de la grande capacité de production de l’industrie coréenne des tubes et de la présence continue des tubes coréens sur le marché canadien, le Tribunal estime qu’une annulation des conclusions se traduirait par une augmentation significative des importations de tubes coréens dans l’Ouest canadien. Le Tribunal est d’avis qu’une reprise du dumping, même dans des volumes et des marges faibles, déstabiliserait rapidement le fragile marché canadien et éliminerait les récents gains enregistrés par l’industrie nationale sur le plan des prix.

Troisièmement, les avocats de l’industrie nationale ont allégué que les exportateurs coréens et les importateurs canadiens des marchandises en question ont tenté de contourner les conclusions en décrivant les marchandises en question comme étant d’autres marchandises au moment de leur entrée au Canada [11] . Le Tribunal reconnaît qu’il est difficile de produire des éléments de preuve tangibles à l’appui de ces allégations. Toutefois, les éléments de preuve révèlent qu’à deux occasions au moins, Revenu Canada a avisé les importateurs du fait que tous les tubes de canalisation API utilisés comme tubes normalisés et originaires de la Corée sont assujettis à des droits antidumping de 19 p. 100. Le Tribunal fait aussi remarquer que, par suite d’allégations similaires formulées par des producteurs américains, le Département du commerce des États-Unis a décidé que les tubes de canalisation en provenance de la Corée et utilisés comme tubes normalisés sont visés par son ordonnance antidumping [12] .

En dernier lieu, les données fournies par Revenu Canada [13] révèlent qu’en dépit des conclusions, les tubes coréens sont toujours sous-évalués au Canada. Les droits antidumping imposés ne sont pas importants par rapport à la valeur des importations en provenance de la Corée. Toutefois, les droits imposés indiquent des augmentations d’année en année, de sorte que le montant des droits imposés en 1994, exprimé en tant que pourcentage de la valeur en douane des marchandises, était environ trois fois plus important qu’il ne l’était en 1990.

Pour tous les motifs qui précèdent, le Tribunal conclut qu’en l’absence de conclusions de préjudice, il y a probabilité d’une reprise du dumping des marchandises en question par la Corée.

Probabilité de préjudice sensible

Les éléments de preuve recueillis dans le cadre du présent réexamen permettent au Tribunal de conclure qu’une reprise du dumping des tubes normalisés par la Corée causerait un préjudice sensible à la production au Canada de marchandises similaires. Le Tribunal en est venu à cette conclusion en examinant les conditions du marché canadien, les pratiques commerciales des importateurs, le rendement du marché et les résultats financiers de l’industrie nationale.

Comme l’ont indiqué les avocats de l’industrie nationale, depuis les conclusions de 1983, l’industrie n’a connu que de courtes périodes de reprises. Les données sur le marché présentées dans le cadre du présent réexamen indiquent que la demande totale de tubes pour la période allant de 1991 à 1994 a été considérablement inférieure au niveau record de 1988 [14] . La situation récessioniste du début des années 90 a eu un important effet modérateur sur le secteur de la construction industrielle et commerciale, le principal utilisateur de tubes normalisés. Bien que les données de 1993 et de 1994 semblent indiquer l’amorce d’une reprise, la demande au cours de ces années est demeurée inférieure aux niveaux atteints en 1989 et 1990. Les éléments de preuve produits par les témoins pour le compte de l’industrie nationale indiquent que le marché pourrait continuer à connaître une croissance modérée en 1995, mais que les perspectives à plus long terme sont, au mieux, incertaines.

Compte tenu de la faiblesse de la demande, la concurrence entre les fournisseurs pour obtenir une part du marché demeure intense. Dans l’ensemble, la part du marché des producteurs nationaux a oscillé entre 70 et 75 p. 100 pour la période allant de 1991 à 1994 [15] , comparativement à 80 p. 100 au moment du dernier réexamen. Bien que le réexamen de 1990 ait prorogé les conclusions à l’endroit de la Corée, l’industrie nationale a encore fait face à la concurrence d’importations sous-évaluées en provenance d’un ensemble de nouveaux pays. Quoique les conclusions de préjudice sensible rendues en 1991 et de nouveau en 1992 aient pu alléger les pressions sur le marché, il est évident que l’industrie nationale a eu très peu de répit au niveau des pratiques commerciales déloyales au cours de la période entière du début des années 90. Les données sur les importations indiquent que la concurrence demeure intense, les importateurs s’approvisionnant maintenant auprès d’un certain nombre de nouveaux fournisseurs dont les Philippines, la Turquie et la République sud-africaine.

Cette concurrence persistante des importations a empêché l’industrie nationale d’augmenter ses prix de façon à couvrir entièrement l’accroissement du coût des matières premières. Les tubes normalisés sont essentiellement des produits de base offerts par un grand nombre de pays exportateurs. Les décisions d’achat sont essentiellement fonction du meilleur prix, des facteurs comme la qualité et la disponibilité des produits ne semblant pas être des contraintes importantes sur le plan des approvisionnements. Les importateurs ont donc continué de rechercher le produit le moins coûteux. Les éléments de preuve fournis par le témoin de Comco [16] , un distributeur de la gamme complète de tubes produits au Canada et importés, indiquent que la pratique des importateurs de vendre «au quai», constatée lors du dernier réexamen, se poursuit toujours. Les clients canadiens peuvent ainsi acheter de petits volumes de tubes à des prix intéressants normalement offerts pour des volumes plus importants. Le témoin de Comco a déclaré que sa société n’aurait d’autre choix que de recommencer à acheter des tubes en provenance de la Corée si les prix des produits de ce pays devenaient plus intéressants par suite d’une annulation des conclusions.

Il ressort clairement des données financières des producteurs nationaux que ces derniers demeurent très vulnérables à une compression des prix. Parallèlement aux tendances du marché abordées précédemment, les ventes de l’industrie nationale, toutes sociétés confondues, ont diminué de façon marquée en 1992 et, quoique les ventes aient augmenté au cours des deux années subséquentes, leur valeur monétaire demeurait inférieure à celle de 1991, année au cours de laquelle le Tribunal a rendu des conclusions de dumping à l’endroit de six pays. Les données globales pour Stelpipe, Sidbec-Dosco et IPSCO indiquent que ces sociétés ont enregistré des pertes substantielles, variant d’un plancher de 7 p. 100 à un sommet de 18 p. 100, pendant la période visée par le réexamen. Certaines de ces pertes sont attribuables à des problèmes de démarrage au nouveau laminoir étireur-réducteur de la Stelpipe situé à Welland, mais les éléments de preuve montrent que les résultats financiers de Sidbec-Dosco et d’IPSCO ont aussi été moins que satisfaisants. Les trois sociétés ont toujours des capacités excédentaires considérables et leurs résultats financiers demeureront faibles à moins qu’il n’y ait une hausse très marquée de la demande ou que certaines des installations actuelles ne ferment.

Le Tribunal constate que l’industrie nationale dépend de plus en plus sur ses ventes à l’exportation aux États-Unis. Sans ces ventes, la capacité d’utilisation des installations de production, qui s’est maintenue 0… des niveaux très bas pendant toute la période visée par le réexamen, aurait peut-être compromis le fonctionnement de certaines usines. Un taux de change favorable a, sans doute, contribué au rendement de l’industrie nationale au niveau des exportations, mais les taux actuels ne constituent pas un indicateur fiable des perspectives. En effet, les ventes à l’exportation [17] étaient en 1994 inférieures à celles de 1993, et les témoins pour le compte de l’industrie nationale ne croyaient pas que le marché américain offrirait de nouveaux débouchés dans un proche avenir.

En outre, le Tribunal constate les efforts incessants déployés par les producteurs nationaux afin de rationaliser leur production et demeurer concurrentiels. Comme il a été mentionné précédemment, en 1992, Stelpipe a entrepris la construction d’un laminoir étireur-réducteur à la fine pointe de la technologie, ce qui a requis un investissement substantiel. Bien qu’il semble que ce laminoir ait éprouvé un certain nombre de problèmes de démarrage, les témoins de Stelpipe sont confiants que le laminoir réalisera sous peu des bénéfices, mais à condition que les règles du jeu de la concurrence soient équitables. De même, IPSCO a fait d’importants investissements à son usine de Red Deer et a vendu une usine à Regina afin d’améliorer sa structure des coûts et son efficacité. Sidbec-Dosco a aussi investi d’importantes sommes au cours de la dernière année afin d’améliorer l’efficacité de son usine de Montréal.

Les éléments de preuve montrent clairement que le marché canadien est demeuré fragile depuis le réexamen de 1990. En dépit des efforts incessants de l’industrie nationale afin d’améliorer sa position concurrentielle, le Tribunal conclut qu’elle demeure très vulnérable à une reprise du dumping.

CONCLUSION

Pour les motifs qui précèdent, le Tribunal conclut que la production au Canada de tubes soudés en acier au carbone est susceptible de subir un préjudice sensible causé par une reprise du dumping par la Corée, une situation qui se produirait probablement si les conclusions étaient annulées. Par conséquent, les conclusions sont prorogées sans modification.


1. L.R.C. (1985), ch. S-15.

2. Gazette du Canada Partie I, vol. 128, no 52, le 24 décembre 1994 à la p. 4773.

3. Certains tubes soudés en acier au carbone originaires ou exportés de l'Argentine, de l'Inde, de la Roumanie, de Taiwan, de la Thaïlande et du Venezuela , Tribunal canadien du commerce extérieur, Conclusions , le 26 juillet 1991, Exposé des motifs , le 12 août 1991.

4. Certains tubes soudés en acier au carbone, originaires ou exportés du Brésil, du Luxembourg, de la Pologne, de la Turquie et de la Yougoslavie , Tribunal canadien du commerce ext? E9 ‚rieur, Conclusions , le 23 janvier 1992, Exposé des motifs , le 7 février 1992.

5. Pièce du fabricant A-1, dossier administratif, vol. 7; et pièce du fabricant C-9 (exemplaire unique), dossier administratif, vol. 7A.

6. Pièce du fabricant C-9 (exemplaire unique), dossier administratif, vol. 7A.

7. Pièce du fabricant C-10, annexe K, dossier administratif, vol. 7A.

8. Des témoins ont déclaré que les importations en provenance des États-Unis sont des tubes spécialisés qui ne sont pas faciles à obtenir de la production canadienne et qui se vendent à des prix sensiblement plus élevés que ceux des importations en provenance d'autres pays. Transcription de l'argumentation , le 19 avril 1995 à la p. 29.

9. Public Pre-Hearing Staff Report , le 10 mars 1995, pièce du Tribunal RR-94-004-5, dossier administratif, vol. 1 à la p. 115.

10. Certain Circular, Welded, Non-Alloy Steel Pipes and Tubes from Brazil, the Republic of Korea, Mexico, Romania, Taiwan, and Venezuela , Commission du commerce extérieur des États-Unis, USITC Publication 2564, octobre 1992 à la p. I-42, pièce du fabricant C-9 (exemplaire unique), dossier administratif, vol. 7A.

11. Pièce du fabricant C-1, dossier administratif, vol. 7.

12. Pièce du fabricant C-10, annexe L, dossier administratif, vol. 7A.

13. Pièce du Tribunal RR-94-004-4, dossier administratif, vol. 1 à la p. 97.

14. Public Pre-Hearing Staff Report , révisé le 28 mars 1995, pièce du Tribunal RR-94-004-5A, dossier administratif, vol. 1 à la p. 154.

15. Public Pre-Hearing Staff Report , le 10 mars 1995, pièce du Tribunal RR-94-004-5, dossier administratif, vol. 1 à la p. 116.

16. Pièce du fabricant A-4, dossier administratif, vol. 7.

17. Protected Pre-Hearing Staff Report , le 10 mars 1995, pièce du Tribunal RR-94-004-6 (protégée), dossier administratif, vol. 2 à la p. 12.


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Publication initiale : le 28 août 1996