J.S. BAL

Décisions


J.S. BAL
v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-91-171

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le mercredi 23 septembre 1992

Appel n o AP-91-171

EU ÉGARD À un appel entendu le 9 juillet 1992 en vertu de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. (1985), ch. E-15, dans sa version modifiée;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le ministre du Revenu national le 18 mars 1991 concernant un avis d'opposition signifié en vertu de l'article 81.15 de la Loi sur la taxe d'accise.

ENTRE

J.S. BAL Appelant

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est rejeté. Le Tribunal déclare que l'appelant n'est pas admissible, en vertu de l'article 68.16 de la Loi sur la taxe d'accise, au remboursement de la taxe sur les achats de propane utilisé comme carburant.


Desmond Hallissey ______ Desmond Hallissey Membre présidant

W. Roy Hines ______ W. Roy Hines Membre

Robert C. Coates, c.r. ______ Robert C. Coates, c.r. Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





L'appelant, qui était le propriétaire et l'exploitant d'un taxi alimenté au propane, a reçu des remboursements de la taxe d'accise payée sur l'essence; dans une décision rendue ultérieurement, il a été établi que ces remboursements avaient été effectués par erreur, car le propane ne constitue pas un carburant admissible aux remboursements en cause. En conséquence, une cotisation représentant le montant des remboursements a été établie au nom de l'appelant. Ce dernier a soutenu que n'étant pas responsable des erreurs commises, il ne devrait pas être tenu de remettre les sommes qui lui ont été versées. Il a également fait valoir que le propane était un carburant apparenté à l'essence et qu'il doit être visé par la définition du terme «essence» au paragraphe 2(1) de la Loi sur la taxe d'accise. Il a donc prétendu avoir droit aux sommes reçues sous forme de remboursements. L'avocate de l'intimé a soutenu que la Loi sur la taxe d'accise ne prévoit un remboursement que si la taxe d'accise a été payée sur l'essence, conformément à l'article 23 de la Loi sur la taxe d'accise. Elle a fait valoir que l'appelant n'a produit aucun élément prouvant qu'il avait payé la taxe d'accise sur le propane qu'il avait acheté. Elle a donc prétendu que l'appelant n'était pas admissible à un remboursement. Elle a soutenu en outre que les erreurs commises par les fonctionnaires du ministère du Revenu national n'ont pas engendré de droit absolu.

DÉCISION : L'appel est rejeté. L'appelant ne s'est pas acquitté du fardeau de la preuve, c'est - à - dire d'établir qu'il avait payé la taxe d'accise sur le propane qu'il avait acheté. Bien que le Tribunal compatisse à la frustration de l'appelant, qui doit remettre des sommes qui lui ont été versées par erreur, il n'est pas habilité à refuser d'appliquer la loi, même pour des motifs d'équité.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 9 juillet 1992 Date de la décision : Le 23 septembre 1992
Membres du Tribunal : Desmond Hallissey, membre présidant W. Roy Hines, membre Robert C. Coates, c.r., membre
Services juridiques : Karen Jensen
Greffier : Dyna Côté
Ont comparu : J.S. Bal, pour l'appelant Linda J. Wall, pour l'intimé





Il s'agit d'un appel portant sur une cotisation interjeté en vertu de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise [1] (la Loi). En vertu d'une décision datée du 18 mars 1991, l'intimé a confirmé l'Avis de cotisation no OTT 0018 du 6 juin 1990, selon lequel une cotisation totalisant 603,11 $ a été établie au titre de la taxe, de la pénalité et des intérêts pour la période comprise entre le 1er janvier 1987 et le 31 décembre 1988.

L'appelant, M. J.S. Bal, était le propriétaire et l'exploitant d'un taxi alimenté au propane. À cinq occasions distinctes, il a demandé le remboursement de la taxe d'accise payée sur le propane en utilisant les formulaires prescrits pour les remboursements de la taxe d'accise payée sur l'essence. Sur deux de ces formulaires, l'appelant a précisé que sa demande visait des achats de propane.

Sur production des cinq demandes de remboursement, l'appelant a reçu un remboursement total de 577,60 $. Cependant, à la suite d'une vérification effectuée en 1990, les fonctionnaires du ministère du Revenu national (Revenu Canada) ont conclu que les remboursements ont été effectués par erreur, car le propane n'était pas un carburant admissible au remboursement dont il est question. Un avis de cotisation a donc été publié pour demander au requérant de remettre les sommes reçues en vertu des quatre dernières demandes de remboursement. En outre, une pénalité et des intérêts ont été imposés à l'appelant. La première demande de remboursement de M. Bal n'a pas été assujettie à une vérification parce qu'elle datait de plus de quatre ans, période d'établissement d'une cotisation conformément au paragraphe 81.11(2) de la Loi. En conséquence, la première demande de remboursement, au montant de 150,50 $, n'a pas été prise en compte dans la cotisation.

Dans le cadre du présent appel, il convient de déterminer (1) si l'appelant avait droit, en vertu de l'article 68.16 de la Loi, au remboursement de la taxe d'accise payée sur l'essence et (2) s'il est interdit à l'intimé d'imposer une cotisation à l'appelant à l'égard des remboursements de la taxe d'accise qui avaient été autorisés.

M. Bal a témoigné en son propre nom. Il a déclaré que même si au départ il doutait de l'admissibilité de sa demande de remboursement de la taxe d'accise sur l'essence, ses doutes se sont dissipés lorsqu'il a reçu ses trois premiers remboursements. Il a affirmé que le formulaire de la troisième demande renfermait une rubrique «Carburants non admissibles», où les requérants devaient indiquer si leur demande englobait des achats de carburant diesel, d'huile à chauffage, de propane ou de carburant d'aviation. L'appelant a témoigné qu'il n'a pas menti en déclarant qu'il utilisait le propane pour alimenter le moteur de son taxi, et que par le fait même ses demandes étaient fondées sur l'utilisation de propane et non d'essence. Au cours du contre-interrogatoire, l'appelant a indiqué que selon lui la question relative au genre de carburant qu'il a utilisé signifiait que des exceptions seraient établies pour certains carburants non admissibles. Il a expliqué qu'il en est arrivé à cette conclusion parce que, même s'il était bien précisé que le propane était un carburant non admissible, rien n'indiquait sur le formulaire que des remboursements ne seraient pas accordés aux utilisateurs de propane. Lorsque l'appelant a reçu un remboursement au titre de sa troisième demande, il a tenu pour acquis que des remboursements étaient accordés pour le propane. Il a donc produit ses quatrième et cinquième demandes et, peu après, il a reçu un chèque représentant le total de ces deux demandes.

L'appelant a déclaré qu'il ne savait pas s'il avait ou non payé la taxe d'accise lorsqu'il a acheté le propane pour son taxi. Il a ajouté que lorsqu'il a produit ses demandes, il ne savait pas que les remboursements étaient réservés aux personnes qui avaient payé la taxe d'accise sur le carburant qu'elles avaient acheté. M. Bal a déclaré qu'il a lu le guide accompagnant le formulaire de demande. Cependant, il a affirmé qu'il ne se rappelait pas avoir lu que les remboursements de la taxe d'accise étaient réservés uniquement aux acheteurs qui avaient payé la taxe d'accise sur le carburant qu'ils avaient acheté.

M. Bal a fait valoir que le propane est un carburant «du genre de l'essence» suivant la définition de ce terme au paragraphe 2(1) de la Loi. Il a soutenu que les formulaires de demande, qui précisent que le propane est un carburant non admissible, ne sont pas conformes à la définition du terme «essence», tel que mentionné dans la Loi. Il a donc soutenu qu'il avait droit aux sommes qu'il a reçues à titre de remboursement.

M. Bal a ajouté que le manque d'information sur les formulaires et dans les guides qui les accompagnent ont engendré de la confusion, à savoir si la taxe d'accise payée sur le propane était remboursable. Il a prétendu qu'il ne devrait pas être tenu de remettre les sommes qu'il a reçues parce qu'il n'est pas responsable de cette confusion ni des erreurs commises à l'égard des remboursements.

L'avocate de l'intimé n'a convoqué aucun témoin. Elle a déclaré qu'il incombait à l'appelant de prouver qu'il avait payé la taxe d'accise dont il a reçu le remboursement. Elle a soutenu que l'appelant n'a pas prouvé qu'il avait payé la taxe sur le propane et qu'en conséquence, il n'avait pas droit aux sommes qui lui ont été remboursées par erreur.

L'avocate de l'intimé a noté que l'article 23 de la Loi prévoit l'imposition d'une taxe d'accise sur l'essence. En vertu de l'article 68.16 de la Loi, un remboursement est accordé dans certaines circonstances, lorsque la taxe a été payée sur l'essence en vertu de l'article 23 de la Loi. Si un remboursement est accordé par erreur, il est prévu à l'article 81.39 de la Loi que le paiement est réputé être une taxe que doit payer le premier destinataire dudit paiement. Le Ministre est donc autorisé à publier un avis de cotisation. Par conséquent, l'avocate a soutenu que l'avis de cotisation qu'a reçu l'appelant est conforme aux dispositions de la Loi.

L'avocate de l'intimé a prétendu que les erreurs commises par les fonctionnaires de Revenu Canada lorsqu'ils ont accordé des remboursements à l'appelant à l'égard du propane n'ont pas engendré de droit absolu. Elle a déclaré que la loi n'était pas affectée par le fait que Revenu Canada a commis une erreur. Elle a cité les causes A.G. Green Co. Limited c. Le ministre du Revenu national [2] et Walbern Agri - Systems Ltd. c. Le ministre du Revenu national [3] dans le cadre desquelles le Tribunal a conclu qu'une erreur ou un renseignement erroné de la part des fonctionnaires de Revenu Canada n'exonère pas le contribuable du paiement de la taxe pas plus qu'il s'agit d'un motif d'évitement du paiement de la taxe. L'avocate a noté également que ces deux décisions suivent la décision rendue dans la cause Joseph Granger c. La Commission de l'emploi et de l'immigration [4] en vertu de laquelle la Cour fédérale du Canada a conclu qu'un tribunal administratif ne peut pas annuler le texte de la Loi, quelle que soit la gravité de la situation de la personne en cause.

L'article 68.16 de la Loi précise sans équivoque qu'un remboursement n'est accordé que lorsque la taxe d'accise a été payée à l'égard de l'essence achetée. La cotisation était fondée sur la prémisse suivante : l'appelant n'était pas admissible à un remboursement de la taxe d'accise. L'avis de cotisation précisait que le propane n'était pas admissible au remboursement de la taxe d'accise sur l'essence et l'avocate de l'intimé a souligné qu'aucune taxe d'accise n'a été payée sur le propane. D'habitude, dans le cadre d'un appel portant sur une cotisation, il incombe à l'appelant de prouver qu'il a payé la taxe d'accise qui a donné lieu à un remboursement en vertu de l'article 68.16 de la Loi [5] . Le Tribunal conclut que l'appelant ne s'est pas acquitté de son obligation de prouver qu'il avait payé la taxe d'accise sur le propane qu'il avait acheté. En conséquence, il n'a pas droit à un remboursement.

Bien que l'appelant puisse se considérer comme mal informé au sujet des modalités qui régissent le remboursement de la taxe d'accise, le Tribunal ne peut pas le soustraire à son obligation de remettre les sommes dues. Le Tribunal partage l'avis de l'intimé, à savoir que les erreurs commises par les fonctionnaires de Revenu Canada ne constituent pas une excuse qui justifierait le non-paiement de la taxe [6] .

Le Tribunal compatit à la frustration de l'appelant qui doit remettre les sommes qu'il a reçues par erreur. Cependant, le Tribunal n'est pas habilité à refuser d'appliquer la loi [7] . Selon la Loi, lorsqu'une personne reçoit un versement auquel elle n'a pas droit, le montant est réputé être une taxe imposée à cette personne, et un avis de cotisation est publié. De même, la Loi exige l'imposition d'une pénalité et d'intérêts à l'égard des sommes impayées que doit remettre une personne. Le Tribunal n'a aucun pouvoir discrétionnaire à l'égard de l'annulation de ces frais [8] .

Pour ces motifs, le Tribunal conclut que l'appelant doit payer les montants déterminés dans la cotisation établie par le ministre du Revenu national. En conséquence, l'appel est rejeté.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. E - 15, dans sa version modifiée.

2. Non publiée, Tribunal canadien du commerce extérieur, appel no AP - 89 - 134, le 9 août 1990.

3. Non publiée, Tribunal canadien du commerce extérieur, appel no 3000, le 21 décembre 1989.

4. [1986] 3 C.F. 70.

5. Dans une décision rendue dans la cause Roderick W.S. Johnston v. The Minister of National Revenue, [1948] R.C.S. 486, la Cour suprême du Canada énonce le principe selon lequel une personne qui conteste une cotisation à l'égard d'une taxe doit produire des preuves pour réfuter les faits sur lesquels est fondée ladite taxe.

6. Walbern Agri - Systems Ltd. c. Le ministre du Revenu national, supra, note 3.

7. Ibid.

8. Non publiée, Oerus Corporation Ltd. c. Le ministre du Revenu national, Tribunal canadien du commerce extérieur, appel no AP - 91 - 056, le 3 septembre 1992.


Publication initiale : le 30 juin 1997