GÉNÉRALE ÉLECTRIQUE DU CANADA INC.

Décisions


GÉNÉRALE ÉLECTRIQUE DU CANADA INC.
v.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
POUR LES DOUANES ET L'ACCISE
Appel no AP-92-035

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, mercredi le 31 mars 1993

Appel n o AP-92-035

EU ÉGARD À un appel entendu le 29 octobre 1992 aux termes du paragraphe 61(1) de la Loi sur les mesures spéciales d'importation, L.R.C. (1985), ch. S-15;

ET EU ÉGARD À un réexamen effectué par le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise aux termes de l'article 59 de la Loi sur les mesures spéciales d'importation concernant une demande déposée aux termes de l'article 58 de la Loi sur les mesures spéciales d'importation.

ENTRE

GÉNÉRALE ÉLECTRIQUE DU CANADA INC. Appelant

ET

LE SOUS - MINISTRE DU REVENU NATIONAL

POUR LES DOUANES ET L'ACCISE Intimé

L'appel est admis.

Desmond Hallissey ______ Desmond Hallissey Membre présidant

Kathleen E. Macmillan ______ Kathleen E. Macmillan Membre

Arthur B. Trudeau ______ Arthur B. Trudeau Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





L'appelant est un fabricant et importateur de produits de consommation et de produits industriels qu'il distribue au Canada. Les marchandises en cause sont des moteurs électriques produits dans la République de Corée, exportés aux États - Unis, puis réexportés au Canada. Ces marchandises sont de la même description que les moteurs électriques visés par des conclusions de préjudice sensible concernant le dumping au Canada de certains moteurs électriques originaires ou exportés des États - Unis. Des droits antidumping n'ont pas été imposés sur les marchandises en cause lorsqu'elles ont été exportées des États - Unis vers le Canada. Les marchandises ont par la suite fait l'objet d'une nouvelle cotisation, et des droits antidumping ont été imposés. La nouvelle cotisation ayant été contestée, le sous - ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise l'a confirmée sur le motif que les marchandises étaient de la même description que les marchandises visées par les conclusions mentionnées ci - dessus. La question, dans le présent appel, consiste à déterminer si les conclusions s'appliquent aux marchandises en cause et si des droits antidumping devraient être imposés sur celles - ci en conséquence.

DÉCISION : L'appel est admis. Pour que les conclusions s'appliquent aux moteurs électriques exportés des États - Unis, les marchandises en cause doivent non seulement être de la même description que les marchandises auxquelles les conclusions s'appliquent, mais encore être produites dans un pays qui a fait l'objet d'une enquête de dumping et qui a été nommé dans les conclusions. Quoique les marchandises en cause soient de la même description que celles qui sont désignées dans les conclusions, elles ont été produites dans un pays qui n'a pas fait l'objet d'une enquête de dumping et qui n'a pas été nommé dans les conclusions. Le fait qu'elles ont été exportées au Canada depuis un pays nommé dans les conclusions ne les assujettit pas nécessairement aux conclusions si elles ont été en fait produites dans un pays tiers auquel les conclusions ne s'appliquent pas. En conséquence, les droits antidumping ont été imposés par erreur, et l'appel est admis.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 29 octobre 1992 Date de la décision : Le 31 mars 1993
Membres du Tribunal : Desmond Hallissey, membre présidant Kathleen E. Macmillan, membre Arthur B. Trudeau, membre
Avocat pour le Tribunal: Hugh J. Cheetham
Greffier : Janet Rumball
Ont comparu : Richard G. Dearden, pour l'appelant Meg Kinnear, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté aux termes du paragraphe 61(1) de la Loi sur les mesures spéciales d'importation [1] (la LMSI) à l'égard d'un réexamen effectué par le sous-ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise (le Sous-ministre) et ayant pour effet de confirmer une nouvelle cotisation et l'imposition de droits antidumping sur certains envois de moteurs à induction intégrale d'un horse-power (1 HP) à deux cents horse-power (200 HP) inclusivement, produits dans la République de Corée (la Corée) et expédiés vers les États-Unis, avant d'être importés au Canada par l'appelant. La nouvelle cotisation initiale était fondée sur les conclusions rendues par le Tribunal antidumping le 15 avril 1983, conclusions selon lesquelles le dumping de moteurs à induction intégrale de 1 HP à 200 HP inclusivement, originaires ou exportés des États-Unis, causait un préjudice sensible à la production au Canada de marchandises similaires [2] . Les conclusions ont été prorogées par le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) le 10 octobre 1990 [3] dans le cadre d'un réexamen effectué aux termes de l'article 76 de la LMSI, et elles sont toujours en vigueur.

Générale électrique du Canada Inc. est un fabricant et importateur de produits de consommation et de produits industriels qu'il distribue à des détaillants et à d'autres acheteurs dans tout le Canada. Les moteurs électriques ont été achetés par l'appelant à sa société mère aux États-Unis. Des droits antidumping n'ont pas été imposés sur les marchandises en cause lorsqu'elles sont entrées au Canada le 30 mai 1990 à la faveur de la déclaration no 14076-025851365 de Douanes Canada. Les marchandises ont fait l'objet d'une nouvelle cotisation le 11 décembre 1990 aux termes de l'article 57 de la LMSI, et des droits antidumping ont été imposés. La nouvelle cotisation a été contestée auprès du Sous-ministre et, par une décision du 10 mars 1992, celui-ci a confirmé la nouvelle cotisation sur le motif que les moteurs électriques étaient de la même description que les marchandises visées par les conclusions.

La question, dans le présent appel, consiste à déterminer si les conclusions s'appliquent aux marchandises en cause.

Le premier témoin de l'appelant a été M. Jeff B. Irish, directeur de la prospection de la clientèle, GE Motors, General Electric Company (la société mère de l'appelant). Selon M. Irish, environ 80 p. 100 de l'ensemble des moteurs électriques commandés par l'appelant seraient normalement importés directement de la Corée, alors que les autres seraient d'abord importés aux États-Unis, où ils seraient entreposés en attendant que le besoin s'en fasse sentir au Canada. M. Irish a admis que les moteurs importés aux États-Unis «entered the commerce» ([traduction] entraient dans le commerce) aux États-Unis dans la mesure où ils avaient passé la douane américaine. Il a également témoigné qu'aucun droit antidumping n'était payé sur ces moteurs importés directement de la Corée au Canada.

Le deuxième témoin de l'appelant a été M. James D. McAnsh, directeur des Services de réglementation commerciale à Générale électrique du Canada Inc. M. McAnsh a expliqué comment, lorsque l'appelant avait exporté certains moteurs électriques vers les États-Unis, puis avait importé les mêmes moteurs au Canada, des droits antidumping avaient été imposés par Douanes Canada, puis remboursés, si bien qu'en fait, dans ces cas, aucun droit antidumping n'a été versé.

L'avocat de l'appelant a ouvert son argumentation en reconnaissant que les marchandises en cause étaient de la même description que les marchandises désignées dans les conclusions, qu'elles avaient été exportées de la Corée vers les États-Unis, qu'elles étaient entrées dans le commerce aux États-Unis et qu'elles avaient été exportées des États-Unis au Canada. L'avocat a soutenu que la question portée devant le Tribunal consistait à déterminer quelles marchandises étaient touchées par les conclusions. À cet égard, il a soutenu qu'il y avait deux possibilités : i) tous les moteurs de la description en question, peu importe le pays dans lequel ils ont été produits et le fait que ce pays avait fait ou non l'objet d'une enquête de dumping (ce qui, selon lui, était la position de l'intimé); ou ii) tous les moteurs de la description en question produits dans un pays qui avait fait l'objet d'une enquête et qui avait été nommé dans des conclusions de préjudice. En faisant valoir que les conclusions devraient être interprétées comme s'appliquant uniquement à la seconde de ces deux possibilités, l'avocat a développé deux allégations connexes : premièrement, les droits antidumping ne peuvent être imposés que sur les marchandises provenant de pays qui ont fait l'objet d'une enquête du Sous-ministre; et, deuxièmement, les droits antidumping ne peuvent être imposés, aux termes de l'article 3 de la LMSI, que s'il y a eu production de ces marchandises dans un pays qui a fait l'objet d'une enquête.

Pour appuyer sa première allégation, l'avocat de l'appelant s'est penché sur le libellé du paragraphe 41(1) de la LMSI. Il a déclaré que les mots «chacun des importateurs des marchandises pour lesquelles l'enquête est menée» qui figurent à l'alinéa 41(1)a) de la LMSI montrent qu'une décision définitive ne vise que les importateurs exerçant leurs activités dans les pays qui ont fait l'objet d'une enquête. Donc, en l'espèce, le Sous-ministre n'avait pas l'autorité, aux termes de la LMSI, d'imposer des droits antidumping sur les moteurs, car ces derniers étaient des marchandises provenant d'un pays qui n'avait pas fait l'objet d'une enquête. Pour appuyer davantage cette allégation, l'avocat s'est référé au libellé du paragraphe 43(1) de la LMSI, qui stipule que le Tribunal peut rendre une ordonnance ou des conclusions «à l'égard de marchandises objet d'une décision définitive». Ces mots, a-t-il soutenu, limitent le champ d'application d'une ordonnance ou de conclusions aux marchandises provenant de pays qui ont fait l'objet d'une enquête, puisqu'il s'agit des seules marchandises objet de la décision définitive. L'avocat a rejeté la thèse de l'intimé selon laquelle les mots «pays d'exportation» qui figurent à la fin de la première phrase du paragraphe 43(1) de la LMSI pourraient être interprétés comme donnant au Tribunal le pouvoir de nommer les pays auxquels son ordonnance s'appliquerait. L'avocat a estimé que ces mots devraient être considérés tout au plus comme étant utilisés en rapport avec le fait de nommer un fournisseur précis dans une cause précise, ce qui n'est pas le cas ici. L'avocat a également fait remarquer que les mots «originaires ou exportés de» ne se trouvent pas dans la LMSI, et qu'il ne peut donc pas être dit que ces mots constituent une condition suspensive de la prise d'une décision définitive ou de conclusions aux termes de la LMSI.

Passant à sa deuxième allégation, l'avocat de l'appelant a déclaré que son argument selon lequel les marchandises produites dans un pays qui n'a pas fait l'objet d'une enquête ne peuvent être assujetties à des droits antidumping aux termes de l'article 3 de la LMSI, avait un double fondement. Premièrement, les termes utilisés dans l'article VI de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce [4] le (GATT) et dans différents articles du Code antidumping [5] du GATT (le Code) indiquent qu'un élément de production des marchandises doit se trouver dans les pays auxquels les droits antidumping doivent être imposés. L'avocat a souligné que les articles du Code indiquent que les droits antidumping, s'ils doivent être imposés, ne doivent l'être que sur l'importation de «produits» du territoire d'une autre partie contractante. L'avocat a soutenu que le mot «produit» ou «produits» évoque ou suppose une forme de production quelconque. Pour appuyer davantage sa thèse, l'avocat a cité l'ouvrage du professeur Jackson, World Trade and the Law of GATT [6] , dans lequel l'auteur, à propos des obligations découlant du GATT relativement à l'«origine» ou à la «nationalité» des marchandises, déclare que, dans certains articles du GATT, parmi lesquels ceux qu'a cité l'avocat, les obligations sont imposées sur le traitement des importations qui sont les «products of the territories of other contracting parties [7] » ([traduction] produits des territoires des autres parties contractantes). L'avocat a conclu que, pour que soient applicables les droits ou obligations prévus par ces dispositions du GATT, il doit y avoir eu production des marchandises dans le pays contre lequel une ordonnance ou des conclusions étaient rendues, avant que cette ordonnance ou ces conclusions puissent être rendues. Là encore, il n'y a pas, dans la présente cause, de lien de «production» entre les conclusions et la Corée.

L'avocat de l'appelant a cité la cause National Corn Growers Assn. c. Canada (Tribunal des importations) [8] à l'appui de deux importantes propositions qui sous-tendent son argument. Premièrement, le GATT et les Codes du GATT connexes peuvent être utilisés comme aide d'interprétation par le Tribunal même s'il n'y a pas d'ambiguïté dans le texte de loi. Deuxièmement, la LMSI doit être interprétée d'une manière qui soit conforme aux obligations que ces traités confèrent au Canada. L'avocat a ajouté que toute interprétation des articles 3 et 43 de la LMSI qui a donné lieu à l'imposition de droits antidumping à un pays qui n'avait pas fait l'objet d'une enquête aboutirait non seulement à un résultat absurde, mais aussi à un résultat incompatible avec les obligations contractuelles du Canada.

L'avocate de l'intimé a ouvert son argumentation en rappelant les faits dont l'appelant avait convenu et en faisant remarquer qu'il est précisé dans les conclusions que celles-ci s'appliquent aux marchandises de la description pertinente «originaires ou exportées des États-Unis». L'avocate a fait valoir que, comme les moteurs ont été «exportés des» États-Unis au Canada, les conclusions s'appliquent clairement à eux, et les droits antidumping ont été imposés à bon droit. L'avocate a déclaré que le mot clé, dans le membre de phrase «originaires ou exportées des», est le mot «ou». L'avocate a plaidé que l'appelant, dans son interprétation des conclusions, ne tient pas compte de ce mot et le remplace par «et», et les conclusions n'utilisent tout simplement pas ce mot.

L'avocate de l'intimé a soutenu que le Tribunal a le pouvoir, aux termes de l'article 43 de la LMSI, de rendre les conclusions qu'il juge appropriées. Ce pouvoir, a-t-elle affirmé, dérive des mots «indiquées dans chaque cas» qui figurent au paragraphe 43(1) de la LMSI. L'avocate a émis l'hypothèse que ces mots donnent au Tribunal une grande latitude d'action lorsqu'il rend ses ordonnances ou conclusions. Elle a plaidé qu'en l'espèce, le Tribunal a utilisé les mots qu'il a jugé appropriés, et que l'intimé n'a pas d'autre choix que d'appliquer ces mots comme il l'a fait. À l'appui de ces arguments, l'avocate a également cité le réexamen des conclusions fait par le Tribunal et, en particulier, la dissertation de celui-ci sur la cause Hitachi [9] dans son exposé des motifs. Pour ce qui est de l'interprétation que le Tribunal a fait de ses pouvoirs aux termes du paragraphe 43(1) de la LMSI, l'avocate a cité le passage suivant, dans lequel le Tribunal indique qu'il estime que, d'après la décision Hitachi :

les conclusions rendues en vertu du paragraphe 43(1) ne doivent pas nécessairement viser un exportateur en particulier ou s'appliquer uniquement aux exportateurs qui ont été déclarés avoir fait entrer au Canada des marchandises sous-évaluées au moment de l'enquête de dumping ou de l'enquête sur le préjudice sensible. En fait, il est possible d'appliquer ces conclusions à l'ensemble du pays. Le Tribunal estime que ces conclusions sont conformes à l'économie générale de la LMSI et à l'intention du parlement en promulgant la loi [10] .

L'avocate de l'intimé a émis l'hypothèse que l'appelant, sans vouloir que les conclusions soient considérées comme visant un exportateur en particulier, veut qu'elles soient considérées comme visant un pays en particulier. L'avocate a soumis que le Tribunal devrait rejeter cette proposition et interpréter l'article 43 de la LMSI plus largement, d'une façon conforme au libellé des conclusions. À cet égard, l'avocate a pressé le Tribunal de ne pas examiner si la Corée a fait antérieurement l'objet d'une enquête, ce qui à son avis n'est pas pertinent en l'espèce, mais si le libellé des conclusions inclut les moteurs produits en Corée et exportés de ce pays.

Se penchant sur l'utilisation faite par l'appelant du GATT et des Codes du GATT pour aider dans l'interprétation de la LMSI, l'avocate de l'intimé a déclaré que la cause National Corn Growers cautionne la proposition selon laquelle il peut être recouru aux traités internationaux comme aide d'interprétation seulement en cas d'ambiguïté. L'avocate a soutenu qu'ici, il n'y a pas d'ambiguïté quant au libellé de l'article 43 de la LMSI ou celui des conclusions.

Le Tribunal n'est au courant d'aucune décision antérieure concernant la question précise portée devant lui dans la présente cause. Ainsi que l'avocat de l'appelant l'a fait remarquer, une question de ce genre a été soulevée dans la cause Jeumont-Schneider [11] , mais le Tribunal n'a pas été appelé à se prononcer sur ce point. Le Tribunal est donc conscient de l'importance d'examiner cette question à la lumière du fait que l'objet principal de la LMSI est de protéger les fabricants et les producteurs canadiens de marchandises similaires contre le préjudice sensible causé par l'importation de marchandises sous-évaluées ou subventionnées ou les deux [12] .

De l'avis du Tribunal, le libellé des articles 3, 31, 38, 41, 42 et 43 de la LMSI ne permet pas l'imposition de droits antidumping dans la présente cause. Le Tribunal estime que ces articles limitent le champ d'application d'une décision définitive du Sous-ministre ou d'une ordonnance ou de conclusions du Tribunal aux exportateurs des pays qui ont fait l'objet d'une enquête. Cela découle du libellé de l'alinéa 41(1)a) de la LMSI, qui stipule que la décision définitive doit être prise à l'égard «des marchandises». Le Tribunal estime que, dans le contexte de cet alinéa, le terme «marchandises» renvoit aux marchandises de chaque importateur «pour lesquelles l'enquête est menée», puisque ce sont là les seules «marchandises» mentionnées auparavant dans l'alinéa. L'«enquête» est menée par le Sous-ministre aux termes de l'article 31 de la LMSI, et les «marchandises» sont celles qui font l'objet de l'enquête. Ces «marchandises» sont les marchandises auxquelles s'applique toute décision provisoire prise aux termes de l'article 38 de la LMSI et elles sont au coeur de l'enquête menée par le Tribunal en application de l'alinéa 42(1)a) de la LMSI, qui stipule que l'enquête doit porter sur les «marchandises en cause», c'est-à-dire sur celles qui sont visées par la décision provisoire de dumping.

Par conséquent, une décision définitive ne peut être interprétée que comme s'appliquant aux marchandises provenant de pays qui ont fait l'objet d'une enquête. Il s'ensuit que le membre de phrase «marchandises objet d'une décision définitive» qui figure au paragraphe 43(1) de la LMSI doit être compris d'une manière compatible avec l'interprétation faite par le Tribunal du paragraphe 41(1) de la LMSI, et, par conséquent, les ordonnances ou les conclusions quelconques que le Tribunal pourrait rendre aux termes du paragraphe 43(1) de la LMSI ne s'appliqueraient qu'aux marchandises provenant de pays visés par l'enquête du Sous-ministre, et donc aux marchandises des pays nommément désignés dans les conclusions. Enfin, cette interprétation de l'identité des marchandises auxquelles s'appliquent une ordonnance ou des conclusions rendues par le Tribunal aux termes de l'article 43 de la LMSI constitue le fondement de l'imposition de droits antidumping en application de l'article 3 de la LMSI. Le Tribunal ayant conclu que son ordonnance ou ses conclusions ne s'appliquent qu'aux marchandises provenant de ceux des pays nommés dans les conclusions qui ont véritablement fait l'objet d'une enquête du Sous-ministre, il s'ensuit qu'en l'espèce, les conclusions n'ont pu être rendues dans l'intention d'être appliquées aux marchandises en cause, puisque ces dernières ont été produites dans un pays, la Corée, qui ne faisait pas l'objet de l'enquête qui a précédé les conclusions et qui n'était pas nommé dans celles-ci.

De plus, le Tribunal remarque que l'expression «originaires ou exportées de» ne se trouve pas dans la LMSI. Ces mots ont été tirés par le Tribunal de la décision provisoire prise par le Sous-ministre dans la présente cause. En établissant la catégorie de marchandises pour les besoins des décisions provisoire (et définitive), le Sous-ministre a, depuis le début des années 70, généralement parlé de «marchandises originaires ou exportées de». Il en a présumément été ainsi pour prévenir le transbordement des marchandises dans un pays qui ne fait pas l'objet de conclusions, dans l'intention d'éviter les droits antidumping.

Par conséquent, les conclusions ne peuvent être appliquées aux moteurs, quoique ceux-ci soient de la même description que les marchandises visées par les conclusions, parce qu'ils n'ont pas été produits dans un pays nommé dans les conclusions. Si le Tribunal agissait autrement en l'espèce, il protégerait le marché canadien contre des marchandises pour lesquelles il n'a pas été déterminé qu'elles étaient sous-évaluées et qu'elles causaient un préjudice sensible, et il déformerait ainsi l'objet principal de la LMSI.

En conséquence, l'appel est admis.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. S - 15.

2. Moteurs à induction intégrale d'un horse - power (1 hp) à deux cents horse - power (200 hp) inclusivement, à l'exception des moteurs de pompe à arbre vertical habituellement appelés moteurs à base verticale en P, ou moteurs à plateaux verticaux en P, originaires ou exportés des États - Unis d'Amérique , enquête n o ADT - 8R - 78, le 15 avril 1983.

3. Certains moteurs à induction intégrale sous-évalués, d'un horse - power (1 hp) à deux cents horse - power (200 hp) inclusivement, avec exceptions, originaires ou exportés des États - Unis d'Amérique , réexamen n o RR - 89 - 013, le 10 octobre 1990.

4. Instruments de base et documents divers , Volume IV, Genève, mars 1969.

5. Accord relatif à la mise en oeuvre de l'article VI de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce , signé à Genève le 12 avril 1979.

6. John H. Jackson, Charlottesville, Virg., Michie, 1969.

7. Ibid . à la p. 465.

8. [1990] 2 R.C.S. 1324.

9. Hitachi et autres c. Tribunal antidumping et autres , [1979] 1 R.C.S. 93.

10. Supra , note 3 à la p. 10.

11. Certains systèmes de conversion de puissance électrique et redresseurs importés de, ou fournis par, la Jeumont - Schneider (France), la Fuji Electric Co. Ltd. ou la Toshiba Corporation (Japon), ou autrement introduits sur le marché canadien par ces sociétés ou en leur nom, Tribunal canadien des importations (anciennement le Tribunal antidumping), enquête n o ADT - 13 - 84, le 31 janvier 1985.

12. Voir, par exemple, Electrohome Ltd. c. Canada (sous - ministre du Revenu national, Douanes et Accise) , [1986] 2 C.F. 344; Urée solide originaire ou exportée de la République démocratique allemande et de l'Union des républiques socialistes soviétiques et destinée à être utilisée ou consommée dans l'est du Canada (le territoire canadien à l'est de la frontière de l'Ontario et du Manitoba) , Tribunal canadien des importations, enquête n o CIT - 9 - 87, le 24 décembre 1987.


Publication initiale : le 11 juin 1997