NORTH PEACE CULTURAL SOCIETY

Décisions


NORTH PEACE CULTURAL SOCIETY
v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-92-360

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le mardi 10 mai 1994

Appel n o AP-92-360

EU ÉGARD À un appel entendu le 5 novembre 1993 aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. (1985), ch. E-15;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le ministre du Revenu national le 18 décembre 1992 concernant un avis d'opposition signifié aux termes de l'article 81.17 de la Loi sur la taxe d'accise.

ENTRE

NORTH PEACE CULTURAL SOCIETY Appelant

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est admis.

Anthony T. Eyton ______ Anthony T. Eyton Membre présidant

Sidney A. Fraleigh ______ Sidney A. Fraleigh Membre

Robert C. Coates, c.r. ______ Robert C. Coates, c.r. Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise à l'égard d'une détermination du ministre du Revenu national datée du 3 avril 1992, qui a eu pour effet de rejeter une demande de remboursement de la taxe de vente fédérale pour le motif qu'elle a été faite après le délai prescrit par la Loi sur la taxe d'accise. La demande était datée du 13 mars 1992 et portait sur la période comprise entre le 24 novembre 1988 et le 23 mars 1990. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si l'appelant a fait sa demande de remboursement dans le délai de deux ans prévu à l'article 68.26 de la Loi sur la taxe d'accise.

DÉCISION : L'appel est admis. La date de vente des marchandises correspond à la date d'achèvement total des travaux. Le Tribunal conclut que, selon les éléments de preuve, le 16 mars 1990, date du dernier certificat d'avancement des travaux remis par l'architecte à l'appelant, ce dernier n'avait pas encore réglé le coût de certains travaux qui n'étaient pas terminés. Ces travaux comprenaient notamment la vérification du système d'alarme incendie, ce qui a été fait le 27 mars 1990. Le Tribunal conclut donc que l'appelant a fait sa demande de remboursement dans le délai de deux ans prévu à l'article 68.26 de la Loi sur la taxe d'accise.

Lieu de l'audience : Calgary (Alberta) Date de l'audience : Le 5 novembre 1993 Date de la décision : Le 10 mai 1994
Membres du Tribunal : Anthony T. Eyton, membre présidant Sidney A. Fraleigh, membre Robert C. Coates, c.r., membre
Avocat pour le Tribunal : Joël J. Robichaud
Greffier : Anne Jamieson
Ont comparu : Brian Anderson, pour l'appelant Brian Tittemore, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise [1] (la Loi) à l'égard d'une détermination du ministre du Revenu national (le Ministre) datée du 3 avril 1992, qui a eu pour effet de rejeter une demande de remboursement de la taxe de vente fédérale (TVF) au montant de 36 098,38 $ pour le motif qu'elle a été faite après le délai prescrit par la Loi. La demande était datée du 13 mars 1992 et portait sur la période comprise entre le 24 novembre 1988 et le 23 mars 1990. L'appelant a signifié un avis d'opposition daté du 2 juillet 1992. Le Ministre a ratifié la détermination dans un avis de décision daté du 18 décembre 1992. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si l'appelant a fait sa demande de remboursement dans le délai de deux ans prévu à l'article 68.26 de la Loi.

L'appelant est un organisme à but non lucratif. Il a passé un contrat avec la société Hegge Construction Ltd. (Hegge) pour la construction d'un centre des arts - bibliothèque à Fort St. John (Colombie-Britannique). L'architecte était la firme Howard/Yano Partners Architects Inc. Les travaux de construction ont débuté en 1988. Hegge a remis des certificats d'avancement des travaux à l'architecte à différentes étapes du projet. Le 13 juin 1989, Hegge a soumis le certificat d'avancement des travaux no 10, qui indiquait que les travaux étaient totalement achevés. Selon ce même certificat, Hegge devait encore recevoir 142 362,00 $ et une somme de 138 964,31 $ représentant une retenue de 10 p. 100 du coût des travaux. La valeur totale du contrat révisé comprenait une somme de 15 962,15 $ pour les ordres de modifications nos 1 à 3. Par suite de la remise de ce certificat d'avancement des travaux par Hegge à l'architecte, ce dernier a remis à l'appelant son certificat d'avancement des travaux no 10, attestant que Hegge avait droit à une somme de 97 762,00 $ pour la période de facturation qui se terminait le 22 juin 1989. Subséquemment, l'architecte a remis à l'appelant trois autres certificats d'avancement des travaux à divers moments, autorisant le versement en espèces à Hegge. Le certificat d'avancement des travaux no 13, soit le dernier certificat remis par l'architecte à l'appelant, confirmait que Hegge avait droit à une somme de 10 000,00 $ pour la période de facturation qui se terminait le 16 mars 1990. À ce moment, un montant de 2 000,00 $ était encore payable à Hegge.

Le 28 octobre 1992, l'architecte a fait parvenir une lettre à E.G. Tkachuk & Associates Limited, qui, d'après les pièces déposées, semblait être un représentant de l'appelant, au sujet de la construction du centre des arts - bibliothèque par Hegge, pour signaler que les travaux étaient achevés en grande partie depuis le 19 juin 1989. Selon la lettre, une liste de problèmes à résoudre avait été dressée et des dispositions prévues au contrat à l'égard de l'achèvement en grande partie des travaux avaient été prises.

Le 7 mai 1993, l'architecte a écrit à IBA Corporate Services Ltd. (IBA), qui, d'après les pièces déposées, semblait être un autre représentant de l'appelant, pour signaler que le certificat d'avancement des travaux no 13 remis le 16 mars 1990 constituait la dernière facture et confirmait l'achèvement total des travaux. Toujours selon la lettre, une somme de 2 000,00 $ était encore retenue et le serait jusqu'à ce que l'achèvement total des travaux puisse être vérifié.

À l'audience, l'appelant était représenté par M. Brian Anderson, qui a aussi été le seul témoin. Il a déposé plusieurs documents en preuve à l'appui de son affirmation selon laquelle la demande de remboursement de la TVF avait été faite dans le délai prescrit par la loi. Parmi ces documents figurait une lettre de L.W. Hryciuk, de la firme Arctic Electric Ltd., à IBA datée du 20 octobre 1993. On pouvait y lire que les travaux d'électricité stipulés dans le contrat pour le centre des arts - bibliothèque, qui comprenaient l'installation et la vérification du système d'alarme incendie, avaient été achevés en mars 1990. Il y avait aussi un «certificat de vérification» du système d'alarme incendie du centre des arts - bibliothèque daté du 27 mars 1990. Une partie du contrat des travaux d'électricité qui, selon M. Anderson, avait été accordé en sous-traitance, a également été déposée comme preuve. On pouvait y lire que les travaux d'électricité stipulés dans le contrat ne seraient pas considérés comme achevés en grande partie avant qu'il n'y ait vérification. Une lettre de l'architecte à IBA datée du 3 novembre 1993, selon laquelle le certificat d'avancement des travaux no 13 dressait une liste des travaux non effectués, laquelle liste faisait mention de la vérification du système d'alarme incendie, a également été déposée à titre de preuve. D'après cette lettre, la vérification du système d'alarme incendie faisait partie du contrat initial et n'avait pas été faite à la date du certificat d'avancement des travaux no 13. Toutefois, la lettre mentionnait que la vérification avait été effectuée le 27 mars 1990 et que cela mettait un terme aux travaux. Enfin, une lettre de l'architecte à l'appelant datée du 16 mars 1990, selon laquelle le certificat d'avancement des travaux no 13 prévoyait une retenue de 2 000,00 $ pour assurer la vérification du système d'alarme incendie et certains travaux d'aménagement des trottoirs a été déposée à titre de preuve.

M. Anderson s'est appuyé sur la fiche de décision 5325/8-5 active du ministère du Revenu national (Revenu Canada) selon laquelle «si la preuve démontre que la demande de remboursement a été présentée en fonction d'une facturation proportionnelle ET que cette demande se rapporte à la date de la facturation finale, la période pertinente pour fins de remboursement débute à la fin de la période de facturation [2] ». Il a soutenu que, d'après cette fiche de décision, la période de deux ans devait commencer à la date d'achèvement total des travaux et non le 19 juin 1989, date à laquelle on a prétendu que les travaux avaient été achevés en grande partie. Il a affirmé que, d'après les éléments de preuve, le contrat n'a été exécuté que le 27 mars 1990, date de la vérification du système d'alarme incendie. M. Anderson a allégué que, lors de la remise du certificat d'avancement des travaux no 10 par Hegge à l'architecte, le 13 juin 1989, le contrat n'était toujours pas exécuté. Certains travaux de construction devaient être effectués. Par conséquent, il a déclaré que cette date ne pouvait être considérée comme marquant le début du délai.

L'avocat de l'intimé a soutenu que la période de deux ans devait débuter à la date de la vente des marchandises à l'appelant. En se fondant sur la lettre de l'architecte du 28 octobre 1992, il a soutenu que le centre des arts - bibliothèque avait été achevé en grande partie le 19 juin 1989. Citant le certificat d'avancement des travaux no 10 remis par Hegge à l'architecte, il a affirmé que les dernières marchandises achetées par l'appelant ont été vendues le 13 juin 1989 et que, par conséquent, la demande de remboursement est frappée de prescription. Citant en outre la lettre de l'architecte du 28 octobre 1992, l'avocat a soutenu que les certificats d'avancement des travaux nos 11, 12 et 13 portaient non pas sur la vente de marchandises ou sur le transfert de leur propriété, mais uniquement sur la facturation et le paiement des frais liés aux ordres de modifications, à la correction des lacunes et au versement de la somme retenue.

Aux fins du présent appel, les dispositions pertinentes se trouvent à l'article 68.26 qui stipule que :

Lorsque la taxe a été payée en vertu de la partie VI à l'égard de matériaux et que les matériaux ont été achetés :

[...]

b) par tout organisme, ou pour son compte, et sont destinés exclusivement à la construction d'un bâtiment pour cette organisation, devant servir exclusivement ou principalement de bibliothèque publique non commerciale dirigée par cet organisme ou en son nom;

[...]

une somme égale au montant de cette taxe doit, sous réserve des autres dispositions de la présente partie, être versée à cette institution, organisme ou société, si elle en fait la demande dans les deux ans suivant l'achat des matériaux.

La période de deux ans doit débuter à la date de la vente des marchandises à l'acquéreur, laquelle doit être déterminée d'après l'intention des parties, qui peut être déduite d'après les modalités du contrat, la conduite des parties et les circonstances entourant la transaction [3] . Si le contrat ne précise pas à quel moment la propriété des marchandises devait être transférée, le Tribunal doit s'appuyer sur d'autres éléments pour dégager l'intention des parties en ce qui touche le moment du transfert de propriété ou la date de la vente. En l'occurrence, le contrat n'a pas été déposé comme preuve. Bien que la fiche de décision de Revenu Canada ne permette pas de disposer du présent litige et ne lie pas le Tribunal, celui-ci a examiné les faits à la lumière de cette fiche de décision [4] . Il est ressorti, tant de l'audience que des exposés écrits, que les parties s'appuyaient sur la fiche de décision et cherchaient à en expliquer le sens.

Lorsque la propriété de marchandises n'est pas transférée en bloc et que le paiement est échelonné sur la période des travaux de construction, Revenu Canada a pour pratique de permettre le report du dépôt d'une demande de remboursement jusqu'à l'achèvement des travaux de construction. En l'espèce, Revenu Canada a considéré que la date du 19 juin 1989, mentionnée dans la lettre de l'architecte à E.G. Tkachuk & Associates Limited du 28 octobre 1992 était celle de l'achèvement en grande partie des travaux et constituait le point de départ du délai de prescription. M. Anderson, qui a témoigné pour l'appelant, a soutenu que le 27 mars 1990 devrait marquer le début du délai puisque les travaux ont été totalement achevés à cette date.

La demande de remboursement de la TVF payée par l'appelant a été signée le 13 mars 1992, date qui, selon le Tribunal, serait la plus rapprochée où l'appelant a pu faire sa demande de remboursement. Par conséquent, la question en litige consiste à déterminer si les travaux de construction ont été achevés avant le 13 mars 1990 ou, à défaut, si le transfert de propriété des marchandises a eu lieu avant cette date.

Le Tribunal ne peut retenir l'argument de l'intimé selon lequel la date d'achèvement des travaux est celle où les travaux ont été achevés en grande partie. Il convient donc avec l'appelant que la date d'achèvement est celle de l'achèvement total des travaux. Le Tribunal fait remarquer en outre que la date de la dernière période de facturation pourrait être l'une ou l'autre des cinq dates suivantes : le 13 juin 1989, celle de la dernière facture remise par Hegge à l'architecte; le 22 juin 1989, celle du certificat d'avancement des travaux no 10 remis par l'architecte à l'appelant autorisant le paiement d'une partie de la somme due à Hegge; ou encore le 22 août 1989, le 25 octobre 1989 ou le 16 mars 1990, dates qui figurent sur les trois derniers certificats d'avancement des travaux remis par l'architecte à l'appelant autorisant le paiement du solde dû à Hegge.

Ayant accepté que la date de vente des marchandises soit celle de l'achèvement total des travaux, le Tribunal conclut que, selon les éléments de preuve, le 16 mars 1990, date du dernier certificat d'achèvement des travaux remis par l'architecte à l'appelant, ce dernier n'avait pas encore réglé le coût de certains travaux qui n'étaient pas terminés. Ces travaux comprenaient notamment la vérification du système d'alarme incendie, ce qui a été fait le 27 mars 1990. Le Tribunal conclut donc que l'appelant a fait sa demande de remboursement dans le délai de deux ans prévu à l'article 68.26 de la Loi.

Par conséquent, l'appel est admis. Ayant examiné la requête formulée par l'avocat de l'intimé dans cette éventualité, le Tribunal renvoie la détermination au Ministre aux fins de vérification des livres de l'appelant pour fixer le montant du remboursement auquel celui-ci a droit.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. E-15.

2. Délai de remboursement - facturations proportionnelles et paiements proportionnels , le 24 avril 1990.

3. Voir, par exemple, Island Coastal Services Ltd. c. Le ministre du Revenu national , Tribunal canadien du commerce extérieur, appel n o AP-90-004, le 31 octobre 1991.

4. Voir, par exemple, West Shore Constructors Ltd. c. Le ministre du Revenu national , Tribunal canadien du commerce extérieur, appel n o 3066, le 2 février 1990.


Publication initiale : le 4 juin 1997