SMED MANUFACTURING INC.

Décisions


SMED MANUFACTURING INC.
v.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appel no AP-93-081

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le mardi 17 mai 1994

Appel no AP-93-081

EU ÉGARD À un appel entendu le 16 novembre 1993 aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise, L.R.C. (1985), ch. E-15;

ET EU ÉGARD À une décision rendue par le ministre du Revenu national le 23 avril 1993 concernant un avis d'opposition signifié aux termes de l'article 81.15 de la Loi sur la taxe d'accise.

ENTRE

SMED MANUFACTURING INC. Appelant

ET

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

L'appel est admis.



Sidney A. Fraleigh ______ Sidney A. Fraleigh Membre présidant

Arthur B. Trudeau ______ Arthur B. Trudeau Membre

Desmond Hallissey ______ Desmond Hallissey Membre

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise relativement à une cotisation établie par le ministre du Revenu national le 3 mars 1992. L'avis de cotisation portait sur la période comprise entre le 1 er décembre 1989 et le 31 décembre 1990 et précisait que l'appelant avait [traduction] «déduit des montants démesurés». Les déductions en question correspondent à des montants que l'appelant a déduits à l'interne plutôt que de demander un remboursement de la taxe de vente fédérale qu'il avait, à son avis, payée par erreur à l'égard de ventes d'appareils d'éclairage des aires de travail et de matériel électrique.

DÉCISION : L'appel est admis. Le Tribunal conclut que les activités de l'appelant relativement aux appareils d'éclairage des aires de travail ou au matériel électrique, ou aux deux, ne constituent pas de la production ni de la fabrication et que l'appelant n'est donc pas redevable de la taxe de vente fédérale sur le prix de vente des appareils d'éclairage des aires de travail et du matériel électrique aux termes de l'alinéa 50(1)a) de la Loi sur la taxe d'accise. Il en découle donc que les sommes versées par l'appelant au titre de la taxe de vente fédérale sur le prix de vente des appareils d'éclairage des aires de travail ou du matériel électrique, ou des deux, constituent des montants versés par erreur au sens de l'article 68 de la Loi sur la taxe d'accise. Par conséquent, la cotisation établie à l'égard de l'appelant au titre des montants qu'il a déduits était erronée.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 16 novembre 1993 Date de la décision : Le 17 mai 1994
Membres du Tribunal : Sidney A. Fraleigh, membre présidant Arthur B. Trudeau, membre Desmond Hallissey, membre
Avocat pour le Tribunal : Shelley Rowe
Greffier : Janet Rumball
Ont comparu : Michael McCourt, pour l'appelant Anne Michaud, pour l'intimé





Le présent appel est interjeté aux termes de l'article 81.19 de la Loi sur la taxe d'accise [1] (la Loi) relativement à une cotisation établie par le ministre du Revenu national le 3 mars 1992. L'avis de cotisation portait sur la période comprise entre le 1er décembre 1989 et le 31 décembre 1990 et précisait que l'appelant, un fabricant titulaire de licence qui produit des meubles modulaires de bureau, avait [traduction] «déduit des montants démesurés». Les déductions en question, au titre desquelles une cotisation a été établie à l'égard de l'appelant, représentent des montants que l'appelant a déduits de ses déclarations mensuelles de taxe de vente fédérale (TVF) destinées au ministère du Revenu national (Revenu Canada) plutôt que de demander un remboursement de la TVF aux termes de l'article 68 de la Loi. L'appelant soutient qu'il a versé ces sommes par erreur à l'égard de la vente d'appareils d'éclairage des aires de travail et de fils couplés, de câbles de pontage, de prises de courant doubles et de lisières à prises multiples (collectivement désignés «matériel électrique»). Le montant des déductions représentait la différence entre le montant payé par l'appelant au titre de la TVF sur le prix de vente des appareils d'éclairage des aires de travail et du matériel électrique et le montant qu'il aurait versé en TVF d'après la valeur à l'acquitté desdits appareils et dudit matériel au moment de leur importation. La question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si la cotisation établie à l'égard de l'appelant au titre des montants qu'il a déduits était correcte.

L'avocate de l'intimé a présenté une requête préliminaire concernant la compétence du Tribunal pour entendre l'appel. Elle a fait valoir que la question en litige dans le présent appel consiste à déterminer si les appareils d'éclairage des aires de travail et le matériel électrique sont des «marchandises partiellement fabriquées» et que le Tribunal n'est pas habilité à rendre une décision à cet égard parce que, selon la définition de l'expression «marchandises partiellement fabriquées» donnée à l'article 42 de la Loi et selon la jurisprudence [2] , «[l]e ministre est le seul à décider si des marchandises sont ou non des marchandises partiellement fabriquées».

Le représentant de l'appelant a fait valoir que, dans le cadre du présent appel, la question en litige consiste à déterminer si l'alinéa 50(1)a) de la Loi, qui prévoit que la TVF est imposée sur le prix de vente des marchandises produites ou fabriquées au Canada, s'applique ou si l'alinéa 50(1)b) de la Loi, qui stipule que la TVF est imposée au moment de l'importation des marchandises, s'applique.

Le Tribunal a décidé d'entendre tous les faits et toutes les présentations se rapportant à l'appel avant de rendre une décision et il a commencé à entendre les témoins de l'appelant et les arguments des parties.

M. Bryan Fance, qui travaille à la Division des ventes et du marketing chez SMED Manufacturing Inc., a comparu pour le compte de l'appelant. Il a identifié pour le Tribunal un exemple d'appareil d'éclairage des aires de travail et chacun des éléments électriques en question et il a remis au Tribunal des copies des factures des fournisseurs, des factures de Douanes Canada, les factures de l'appelant et une copie de la liste de prix 1989 de l'appelant, intitulée «Dollars and Sense». Il a fait le rapprochement entre les codes de produits et les descriptions figurant sur les factures et les prix et descriptions établis sur la liste de prix, et les appareils d'éclairage des aires de travail et le matériel électrique qu'il avait identifiés. Il a fait remarquer que les appareils d'éclairage des aires de travail et le matériel électrique sont décrits sur les factures de l'appelant comme d'«autres produits» et sont parfois vendus séparément et non dans le cadre d'une vente de ce qu'il a qualifié de poste de travail de bureau.

Il a décrit les appareils d'éclairage des aires de travail et le matériel électrique comme des «marchandises de revente» qu'il considérait comme des accessoires de postes de travail de bureau fabriqués par l'appelant et constitués de divers composants, notamment des panneaux, des surfaces de travail sur panneau, des meubles de rangement et des modules de rangement. La disposition des postes de travail de bureau commence par un dessin assisté par ordinateur à partir duquel on produit un schéma d'installation. Si l'utilisateur final a besoin d'appareils d'éclairage des aires de travail ou de matériel électrique, ou des deux, le tout est indiqué sur le dessin et sur le schéma d'installation. Cependant, la nécessité des appareils d'éclairage des aires de travail ou du matériel électrique, ou des deux, est fonction des besoins de l'utilisateur final particulier.

M. Fance a déclaré que les appareils d'éclairage des aires de travail ont été achetés et importés auprès d'un fabricant des États-Unis et ont été vendus dans la forme où ils ont été importés. Le matériel électrique a également été acheté à un fabricant des États-Unis, mais a été acheté en vrac; en conséquence, il a dû être remballé aux fins d'expédition après son achat.

Selon M. Fance, l'appelant écoule environ 30 p. 100 des postes de travail de bureau en vente directe à des utilisateurs finals et environ 70 p. 100 par l'entremise de revendeurs. Les postes de travail de bureau sont vendus en pièces détachées et non en bloc; les pièces sont détaillées une à une sur les factures de vente de l'appelant quoique, sur la liste de prix 1989 «Dollars and Sense», les postes de travail de bureau sont montrés, aux fins de présentation, comme un ensemble et comme pièces détachées. Tous les composants des postes de travail de bureau sont livrés démontés à l'utilisateur final ou au revendeur et sont montés sur place par ce dernier ou par l'utilisateur final.

M. Garth Thompson, de la société Thompson + Associates Tax Management Inc., un expert-conseil en taxe de vente sur les marchandises, a également témoigné pour le compte de l'appelant. Il a déclaré qu'après avoir examiné les activités et les registres de l'appelant, il en est venu à la conclusion que l'appelant importe de nombreuses matières premières et que son courtier en douane donne son numéro de licence de fabricant pour faire entrer les matières premières au Canada en franchise de taxe. Il a expliqué que la TVF payée sur les ventes des appareils d'éclairage des aires de travail et du matériel électrique a été établie d'après le prix de vente de ces marchandises, corrigé pour tenir compte des frais de transport et d'installation qui étaient compris dans le prix de vente. Les déductions effectuées à l'interne par l'appelant correspondaient à la différence entre la TVF réellement payée sur le prix de vente de chaque appareil d'éclairage des aires de travail et de chaque élément électrique, avec rajustement pour tenir compte des variations de prix, des rabais ainsi que des frais de transport et d'installation, et le montant de TVF qu'il aurait payé sur la valeur à l'acquitté des appareils d'éclairage des aires de travail et du matériel électrique, compte tenu d'un redressement pour variation des taux de change.

Le représentant de l'appelant a déclaré qu'aux termes de l'alinéa 50(1)a) de la Loi, la TVF est imposée sur les marchandises vendues et fabriquées ou produites au Canada, ce qui, selon lui, signifie que la TVF doit être calculée lorsque les marchandises sont livrées à l'acheteur ou au moment où le titre de propriété des marchandises est transmis, en choisissant celle de ces dates qui est antérieure à l'autre. Il s'est reporté à la décision rendue dans la cause W.T. Hawkins Limited v. The Deputy Minister of National Revenue for Customs and Excise [3] qui, à son avis, appuie le point de vue selon lequel une décision pour déterminer si un produit est exonéré ou non de la TVF doit être prise à la date de la vente. Il a fait valoir que, pour décider si la TVF est payable aux termes de l'alinéa 50(1)a) de la Loi, il doit donc être décidé au moment de la vente si les marchandises ont été fabriquées ou produites au Canada.

Le représentant de l'appelant a soutenu que le critère relatif à la fabrication établi dans la cause Le Ministre du Revenu national c. Dominion Shuttle Company Limited [4] n'a pas été respecté, car l'appelant ne donne pas de «nouvelles formes, qualités et propriétés ou combinaisons [5] » aux appareils d'éclairage des aires de travail ou au matériel électrique, comme le confirment les éléments de preuve fournis par M. Fance.

Le représentant de l'appelant a fait valoir que l'installation ne constitue pas de la fabrication. Il s'est reporté à la décision rendue dans la cause Tenneco Canada Inc. c. Sa Majesté la Reine [6] , à savoir que l'installation de systèmes d'échappement sur les véhicules automobiles des clients ne constituait pas de la fabrication ou de la production de marchandises destinées à la vente, mais plutôt un service. Il a également invoqué la décision rendue dans l'affaire Fiat Auto Canada Limited c. La Reine [7] , à savoir que l'installation d'appareils de radio dans des automobiles ne constituait pas de la fabrication ou de la production aux termes de l'alinéa f) de la définition de l'expression «fabricant ou producteur», donnée au paragraphe 2(1) de la Loi, et à la décision rendue dans la cause Lorne Shields Intertrade Corp. c. Le sous - ministre du Revenu national pour les douanes et l'accise [8] , à savoir que l'installation d'un fauteuil porte-bébé sur une bicyclette ne constituait pas de la fabrication et qu'un fauteuil porte-bébé est «un accessoire au même titre qu'un timbre, qu'un klaxon ou qu'un phare [9] ».

Pour ce qui est des montants que l'appelant a déduits de ses déclarations de la TVF, le représentant de l'appelant a fait valoir que l'article 73 de la Loi autorise de telles déductions lorsqu'aucune demande de remboursement n'est requise et que l'autorisation générale de ces déductions est prévue au paragraphe 16 du Mémorandum de l'Accise ET 105 [10] . Il a ensuite fait valoir que l'appelant a établi les montants qu'il a déduits conformément à la division 46c)(ii)(A) de la Loi, au Règlement sur le coût d'érection ou d'installation [11] établi en application de la Loi et au Mémorandum de l'Accise ET 205 [12] , qui précisent la façon de calculer, aux fins de la TVF, la valeur des marchandises installées.

L'avocate de l'intimé a réitéré son point de vue, c'est-à-dire que le Tribunal n'est pas habilité à décider si les appareils d'éclairage des aires de travail et le matériel électrique sont des «marchandises partiellement fabriquées» et qu'il doit, en conséquence, rejeter l'appel. Cependant, elle a fait valoir en outre que si le Tribunal conclut qu'il est habilité à entendre le présent appel, la question en litige doit consister à déterminer si les appareils d'éclairage des aires de travail et le matériel électrique sont correctement assujettis à la TVF en fonction de leur prix de vente. L'avocate a soutenu que les appareils d'éclairage des aires de travail et le matériel électrique ont été importés par l'appelant sous forme de marchandises partiellement fabriquées et que la TVF n'était donc pas payable sur la valeur à l'acquitté des marchandises. À son avis, les appareils d'éclairage des aires de travail et le matériel électrique sont conformes à la définition de l'expression «marchandises partiellement fabriquées» donnée à l'article 42 de la Loi, puisqu'ils sont incorporés au système modulaire vendu par l'appelant et en forment une partie constituante. L'avocate a invoqué le fait que les dessins et la liste de prix portent sur des postes de travail de bureau, y compris les appareils d'éclairage des aires de travail et le matériel électrique.

L'avocate de l'intimé a fait valoir qu'une distinction peut être établie entre la jurisprudence à laquelle le représentant de l'appelant s'est reporté, et les faits du présent appel. Premièrement, elle a invoqué la décision rendue dans la cause Lorne Shields et a fait valoir qu'elle porte sur une disposition d'exonération et non sur une disposition d'imposition et que, dans cette cause, la bicyclette et le fauteuil n'ont pas été vendus ensemble, comme c'est le cas pour les appareils d'éclairage des aires de travail, le matériel électrique et les postes de travail de bureau. Deuxièmement, elle a soutenu que, contrairement aux faits relatifs au présent appel, où l'appelant fabrique et installe des postes de travail de bureau, dans la cause Fiat, une société vendait les automobiles et une autre installait les appareils de radio. Enfin, elle a prétendu que la cause Tenneco portait sur l'installation de pièces de rechange.

Après avoir examiné tous les éléments de preuve et toutes les présentations, le Tribunal est d'avis que, pour déterminer si le ministre a correctement établi la cotisation à l'égard de l'appelant dans le cadre du présent appel, il faut déterminer si l'appelant était redevable de la TVF sur le prix de vente des marchandises en question. Selon le Tribunal, il s'agit d'une question relevant de sa compétence.

Le paragraphe 50(1) de la Loi prévoit que la TVF est imposée sur le prix de vente de marchandises 1) produites ou fabriquées au Canada, 2) importées au Canada, 3) vendues par un marchand en gros titulaire de licence, ou 4) retenues par un marchand en gros titulaire de licence pour son propre usage ou pour être louées par lui à d'autres. D'après les éléments de preuve produits, il est évident que l'appelant n'est pas visé par les troisième et quatrième catégories. Il convient, toutefois, de déterminer si les activités de l'appelant relativement aux appareils d'éclairage des aires de travail ou au matériel électrique, ou aux deux, constituent de la production ou de la fabrication, auquel cas l'appelant serait redevable de la TVF sur le prix de vente des appareils d'éclairage des aires de travail et du matériel électrique, ou si l'appelant est redevable de la TVF sur la valeur à l'acquitté des appareils d'éclairage des aires de travail et du matériel électrique [13] .

Le Tribunal conclut que même si l'appelant est un fabricant de postes de travail de bureau, ses activités relativement aux appareils d'éclairage des aires de travail et au matériel électrique ne constituent ni de la production ni de la fabrication.

Pour rendre sa décision, le Tribunal s'est fondé sur la conclusion de la Cour suprême du Canada dans la cause Her Majesty the Queen v. York Marble, Tile and Terrazzo Limited [14] , à savoir que les termes «produire» et «fabriquer» ne sont pas des synonymes et qu'une marchandise peut être produite sans être fabriquée.

Le Tribunal souscrit à l'interprétation du terme «production» dans la cause Le ministre du Revenu national c. Enseignes Imperial Signs Ltée [15] , dans laquelle la Cour d'appel fédérale, se reportant à l'affaire Gruen Watch Company of Canada Ltd. v. Attorney General of Canada, a conclu qu'«il y a production si ce que fait une personne a pour résultat de produire une chose nouvelle. Et une chose est nouvelle lorsqu'elle peut remplir une fonction que ne pouvaient remplir les choses qui existaient auparavant [16] ».

Le Tribunal accepte également la définition généralement acceptée du terme «fabrication» tirée de la décision dans l'affaire Dominion Shuttle [17] . Ce terme y était défini comme la «production of articles for use from raw or prepared material by giving these materials new forms, qualities and properties or combinations whether by hand or by machinery.» ([traduction] la production à partir de matériaux bruts ou préparés des articles destinés à être utilisés, en donnant aux matériaux de nouvelles formes, qualités et propriétés ou combinaisons soit à la main, soit à la machine.)

Le Tribunal conclut que les activités de l'appelant relativement aux appareils d'éclairage des aires de travail ou au matériel électrique, ou aux deux, ne constituent ni de la production ni de la fabrication au sens conféré à ces termes dans les affaires Gruen Watch, Enseignes Imperial et Dominion Shuttle. Les éléments de preuve indiquent clairement que l'appelant importe les appareils d'éclairage des aires de travail et le matériel électrique et les revend à des utilisateurs finals dans la forme où il les a importés. Les appareils d'éclairage des aires de travail et le matériel électrique sont des accessoires des postes de travail de bureau fabriqués par l'appelant, mais ils ne sont pas requis; en outre, l'appelant n'en effectue pas l'installation. De l'avis du Tribunal, l'appelant ne manipule pas les appareils d'éclairage des aires de travail ou le matériel électrique, ou les deux, pour en faire une chose nouvelle ou pour leur faire exécuter une fonction nouvelle, pas plus qu'il ne leur confère de nouvelles formes, qualités, propriétés ou combinaisons.

Le Tribunal fait remarquer que l'alinéa f) de la définition de l'expression «fabricant ou producteur» donnée au paragraphe 2(1) de la Loi englobe :

toute personne qui, y compris par l'intermédiaire d'une autre personne agissant pour le compte de celle - ci, prépare des marchandises pour la vente en les [...] emballant ou remballant.

Le sens de l'expression «emballant ou remballant» dans cette disposition a été examiné par la Cour fédérale du Canada, Division de première instance, dans la cause ECG Canada Inc. c. La Reine [18] . Cependant, de l'avis du Tribunal, dans cette affaire, la Cour fédérale du Canada n'a pas précisé la signification de l'expression «prépare des marchandises pour la vente».

Il est un principe bien établi que «[l]es politiques et l'interprétation administratives ne sont pas déterminantes, mais elles ont une certaine valeur et, en cas de doute sur le sens de la législation, elles peuvent être un 'facteur important' [19] ». À cet égard, le Tribunal s'est reporté au bulletin Nouvelles de l'accise [20] , publié par Revenu Canada en décembre 1980 et intitulé «Définition élargie de fabricant ou producteur (fabrication marginale)», et à une note de service, en date du 6 juillet 1981, adressée aux directeurs régionaux et intitulée Principes et philosophie de la fabrication marginale. Les Nouvelles de l'accise donnent, à la page 3, divers exemples d'activités qui ne constituent pas de la fabrication marginale, notamment «l'emballage ou la mise en caisse de marchandises exclusivement aux fins d'expédition pour remplir une commande d'un client». Aux quatrième et cinquième paragraphes de la note de service adressée aux directeurs régionaux, il est mentionné que «[l]es activités précitées [y compris l'emballage ou le remballage] [...] sont toutes reliées à la préparation des marchandises pour la vente, c'est-à-dire changer, modifier ou rehausser la présentation commerciale en vue de la vente. [...] La préparation des marchandises pour la vente ne comprend pas l'emballage des marchandises pour l'expédition seulement ni leur préparation en vue de satisfaire aux exigences d'un client, lorsque cette activité n'est pas orientée vers la 'mise en valeur' du produit».

Selon l'interprétation fournie par Revenu Canada, le Tribunal est d'avis que l'expression «prépare des marchandises pour la vente» désigne la préparation de marchandises destinées à la vente ou en vue de les vendre, et non de marchandises qui ont déjà été vendues.

Si l'on applique cette interprétation aux faits du présent appel, il est évident que l'emballage de matériel électrique par l'appelant ne constitue pas de la fabrication marginale au sens de l'alinéa f) de la définition de l'expression «fabricant ou producteur» donnée au paragraphe 2(1) de la Loi. Selon les éléments de preuve produits par M. Fance, l'appelant a placé le matériel électrique dans des boîtes de carton à des fins d'expédition dans le but d'exécuter les commandes de clients. Le Tribunal ne conteste pas le fait que ces activités constituent de l'emballage ou du remballage au sens courant de ces termes. Cependant, d'après les éléments de preuve, le Tribunal conclut que ces activités d'emballage ou de remballage n'ont pas été effectuées pour préparer le matériel électrique pour la vente, mais pour préparer le matériel électrique, qui était déjà vendu, pour l'expédition au client. Puisque les activités de l'appelant n'étaient pas de préparer les fournitures électriques pour la vente, les exigences de l'alinéa f) n'ont pas été respectées.

Ayant conclu que les activités de l'appelant relativement aux appareils d'éclairage des aires de travail ou au matériel électrique, ou aux deux, ne constituent pas de la production ou de la fabrication, le Tribunal est d'avis que l'appelant n'est pas, aux termes de l'alinéa 50(1)a) de la Loi, redevable de la TVF à l'égard de la vente ou de la consommation des appareils d'éclairage des aires de travail et du matériel électrique d'après leur prix de vente. Par conséquent, les sommes versées au titre de la TVF sur le prix de vente constituent des montants payés par erreur au sens de l'article 68 de la Loi. L'appelant aurait plutôt dû payer la TVF au moment de l'importation des appareils d'éclairage des aires de travail et du matériel électrique aux termes de l'alinéa 50(1)b) de la Loi. Ainsi, la cotisation établie à l'égard de l'appelant au titre des montants qu'il a déduits était erronée.

Par conséquent, l'appel est admis.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. E-15.

2. Her Majesty The Queen v. Skuttle Mfg. Co. of Canada Ltd. , [1963] C.T.C. 500.

3. [1958] R.C. de l'É. 152.

4. (1933), 72 C.S. du Québec 15.

5. Ibid. à la p. 18.

6. Cour fédérale du Canada, Division de première instance, non publié, n o du greffe T - 757 - 83, le 26 octobre 1987.

7. [1984] 1 C.F. 203.

8. (1985), 10 R.C.T. 215.

9. Ibid. à la p. 218.

10. Déductions , ministère du Revenu national, Douanes et Accise, le 31 mars 1989.

11. DORS/83-136, le 4 février 1983, Gazette du Canada Partie II, vol. 117, n o 4 à la p. 625.

12. Marchandises érigées ou installées , ministère du Revenu national, Douanes et Accise, le 29 mars 1989.

13. L'article 42 de la Loi prévoit que «dans le cas de marchandises importées, le prix de vente est réputé être leur valeur à l'acquitté».

14. [1968] R.C.S. 140.

15. (1990), 116 N.R. 235; Cour d'appel fédérale, n o du greffe A - 264 - 89, le 28 février 1990.

16. Ibid. à la p. 239.

17. Cette définition a également été adoptée par la Cour suprême du Canada dans l'affaire York Marble .

18. [1987] 2 C.F. 415.

19. Gene A. Nowegijick c. Sa Majesté La Reine , [1983] 1 R.C.S. 29 à la p. 37.

20. Publié dans supra , note 17.


Publication initiale : le 21 mai 1997