CONFISERIE REGAL INC.

Décisions


CONFISERIE REGAL INC.
v.
LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL
Appels nos AP-98-043, AP-98-044 et AP-98-051

TABLE DES MATIÈRES

Ottawa, le vendredi 25 juin 1999

Appels n os AP-98-043, AP-98-044 et AP-98-051

EU ÉGARD À des appels entendus le 19 février 1999 aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes, L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.);

ET EU ÉGARD À des décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national les 17 avril, 10 juin et 24 juillet 1998 concernant des demandes de réexamen aux termes de l'article 63 de la Loi sur les douanes.

ENTRE

CONFISERIE REGAL INC. Appelante

ET

L E SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL Intimé

Les appels nos AP-98-043 et AP-98-051 sont rejetés, et l'appel no AP-98-044 est admis.


Patricia M. Close ______ Patricia M. Close Membre présidant

Michel P. Granger ______ Michel P. Granger Secrétaire





Il s'agit de trois appels concernant le classement tarifaire des produits suivants : des biberons remplis de bonbons dont l'étiquette porte la mention « Dino•Rocks » (Biberons) pour l'appel no AP-98-043; des emballages-coques contenant un distributeur motorisé de bonbons et deux paquets de bonbons PEZ (Power PEZ) pour l'appel no AP-98-044; ainsi que des banques jouets en plastique clair ayant la forme de canards (Tirelires Canard) pour l'appel no AP-98-051. La question en litige dans les appels nos AP-98-043 et AP-98-044 consiste à déterminer si les Biberons et les Power PEZ sont correctement classés dans le numéro tarifaire 1704.90.90 à titre d'autres sucreries sans cacao, comme l'a déterminé l'intimé, ou s'ils doivent être classés à titre d'autres jouets, modèles réduits et modèles similaires pour le divertissement, dans le numéro tarifaire 9503.90.00 dans le cas des Biberons, et à titre d'autres jouets à moteur, autres que ceux de métal, dans le numéro tarifaire 9503.80.90 en ce qui concerne le Power PEZ, comme l'a soutenu l'appelante. La question en litige dans l'appel no AP-98-051 consiste à déterminer si les Tirelires Canard sont correctement classées dans le numéro tarifaire 3923.90.90 à titre d'autres contenants de plastique, comme l'a déterminé l'intimé, ou si elles doivent être classées dans le numéro tarifaire 9503.90.00 à titre d'autres jouets, comme l'a soutenu l'appelante.

DÉCISION : Les appels nos AP-98-043 et AP-98-051 sont rejetés, et l'appel no AP-98-044 est admis. En ce qui a trait aux Biberons, ne pouvant classer les marchandises conformément à la Règle 1 des Règles générales pour l'interprétation du Système harmonisé (les Règles générales), le Tribunal passe à la Règle 3 b), étant donné que ces marchandises sont composées de plus d'un produit. Le Tribunal doit, par conséquent, déterminer le caractère essentiel des marchandises, soit à titre de jouets dans la position no 95.03, soit à titre de bonbons dans la position no 17.04. Tout compte fait, les éléments de preuve indiquant que les Biberons sont, d'abord et avant tout, des jouets ne sont pas convaincants; plutôt les biberons consistent en un emballage dont l'aspect inédit contribue à la mise en marché des bonbons. Ces marchandises sont donc correctement classées dans le numéro tarifaire 1704.90.90 à titre d'autres sucreries sans cacao.

En ce qui concerne les Power PEZ, là encore, il est impossible de classer ces marchandises uniquement en s'appuyant sur la Règle 1 des Règles générales. Le Tribunal doit tenir compte de la Règle 3 b), puisque l'emballage-coque renferme le distributeur motorisé de bonbons, qui peut être classé à titre de jouet, et les deux paquets de bonbons, qui peuvent être classés à titre de sucreries. Selon le Tribunal, aux fins du classement, l'aspect amusant de l'emballage n'est habituellement pas un facteur déterminant; cependant, comme dans le cas du Power Pez, le facteur amusant est tel qu'il transforme le caractère essentiel du produit. L'intérêt ludique du Power Pez est plus important que les bonbons. Il est conçu pour être utilisé à titre de jouet bien avant que les bonbons soient mangés et même avant l'ouverture du paquet. En outre, son intérêt ludique est durable, comme le démontre le fait que la pile du Power PEZ est remplaçable et qu'il est un article de collection. Par conséquent, le Tribunal est d'accord avec l'appelante que le rôle ludique du Power PEZ est non seulement durable, mais précède la consommation des bonbons. Par conséquent, le Power PEZ doit être classé à titre d'autres jouets à moteur, autres que ceux de métal, dans le numéro tarifaire 9503.80.90.

En ce qui a trait aux Tirelires Canard, le Tribunal est d'avis, compte tenu de la Règle 1 des Règles générales, que ces marchandises sont correctement classées dans le numéro tarifaire 3923.90.90. Bien que plusieurs de leurs caractéristiques les rendent attrayantes, les Tirelires Canard sont des contenants de plastique, non des jouets, au moment de l'importation. Elles sont utilisées par l'appelante comme contenants pour la vente de toutes sortes de bonbons. Leur usage secondaire, comme primes pour le détaillant, n'est pas pertinent pour leur classement tarifaire. Ce que les détaillants font des Tirelires Canard lorsqu'elles sont vides, qu'ils mettent autre chose dedans ou les vendent comme jouets, est purement circonstanciel et n'a aucune incidence sur le classement tarifaire de ces marchandises.

Lieu de l'audience : Ottawa (Ontario) Date de l'audience : Le 19 février 1999 Date de la décision : Le 25 juin 1999
Membre du Tribunal : Patricia M. Close, membre présidant
Avocats pour le Tribunal : Gilles B. Legault Michèle Hurteau
Greffiers : Anne Turcotte Margaret Fisher Ont comparu : Darrel H. Pearson, J. Peter Jarosz et Kenneth H. Sorensen,
pour l'appelante Louis Sébastien, pour l'intimé





Il s'agit de trois appels aux termes de l'article 67 de la Loi sur les douanes [1] à l'égard de décisions rendues par le sous-ministre du Revenu national au sujet de l'importation des produits suivants : des biberons remplis de bonbons dont l'étiquette porte la mention « Dino•Rocks » (Biberons) pour l'appel no AP-98-043; des emballages-coques contenant un distributeur motorisé de bonbons et deux paquets de bonbons PEZ (Power PEZ) pour l'appel no AP-98-044; ainsi que des banques jouets en plastique clair ayant la forme de canards (Tirelires Canard) pour l'appel no AP-98-051.

Les Biberons sont de petites bouteilles de plastique, de 3 po de hauteur et 1 po de diamètre environ, qui ressemblent à de véritables biberons. Ils sont remplis de bonbons. Au moment de l'importation, en novembre 1995, les Biberons étaient commercialisés sous le nom de « Dino•Rocks », l'illustration sur leur étiquette étant celle d'un bébé dinosaure à bicyclette. Le Power PEZ, quant à lui, comporte un distributeur de bonbons motorisé électromécanique alimenté par une pile « AAA » remplaçable. Les instructions sur l'emballage mentionnent que le distributeur contient 12 cavités dans lesquelles les bonbons PEZ, qui se trouvent également dans l'emballage, peuvent être placés lorsqu'on appuie sur le bouton électrique. On appuie de nouveau sur le bouton pour éjecter les bonbons. Quant aux Tirelires Canard, elles sont faites de plastique transparent et ont la forme d'un canard, comme leur nom l'indique. Elles ont 14 po de hauteur et 6 po de diamètre et une capacité de 4,7 L; selon le catalogue du fournisseur; les Tirelires Canard ont une poignée, un chapeau, des yeux, un bec, une boucle de ceinture et des jambes en plastique. Le chapeau a une fente qui peut être découpée, permettant ainsi à l'utilisateur de déposer de l'argent.

La question en litige dans les appels nos AP-98-043 et AP-98-044 consiste à déterminer si les Biberons et les Power PEZ sont correctement classés dans le numéro tarifaire 1704.90.90 de l'annexe I du Tarif des douanes [2] à titre d'autres sucreries sans cacao, comme l'a déterminé l'intimé, ou s'ils doivent être classés à titre d'autres jouets, modèles réduits et modèles similaires pour le divertissement, dans le numéro tarifaire 9503.90.00 dans le cas des Biberons, et à titre d'autres jouets à moteur, autres que ceux de métal, dans le numéro tarifaire 9503.80.90 en ce qui concerne le Power PEZ, comme l'a soutenu l'appelante. La question en litige dans l'appel no AP-98-051 consiste à déterminer si les Tirelires Canard sont correctement classées dans le numéro tarifaire 3923.90.90, à titre d'autres contenants de plastique, comme l'a déterminé l'intimé, ou si elles doivent être classées à titre d'autres jouets dans le numéro tarifaire 9503.90.00, comme l'a soutenu l'appelante.

M. Henri Neufeld, vice-président de la société Confiserie Regal inc., est le seul témoin qui ait comparu devant le Tribunal à l'audience. Il a qualifié l'appelante d'entreprise de vente et de distribution. Les tâches de M. Neufeld incluent la conception et l'élaboration des produits importés et distribués au Canada par l'appelante ainsi que la négociation des prix des produits que l'appelante se procure auprès de ses fournisseurs. M. Neufeld participe également à l'établissement des prix de vente des produits et a donc la responsabilité de la rentabilité de l'entreprise. À propos de l'évolution des activités de l'appelante, M. Neufeld a dit que, au cours des années 70 et au début des années 80, son frère et lui ont commencé à participer à l'administration et au fonctionnement quotidiens de l'entreprise de distribution de bonbons créée par leur père. Se rendant compte que les changements que subissait l'industrie de la confiserie offraient des possibilités immenses pour la vente de produits inédits et de « jouets interactifs » [3] [traduction], les deux frères ont décidé de vendre également des jouets. À ce propos, M. Neufeld a produit trois catalogues (pièce A-1) décrivant la gamme d'articles inédits et de bonbons jouets interactifs de l'appelante. En ce qui a trait à l'expression « jouets interactifs », M. Neufeld a déclaré que ce type de produit est fondamentalement un jouet accompagné d'une quantité symbolique de bonbons. Il est conçu et mis en marché pour sa valeur ludique, les bonbons étant un élément ajouté. M. Neufeld a également présenté en preuve la définition du mot anglais « novelty » (« nouveauté ») que contient The Concise Oxford Dictionary of Current English [4] , qui précise ce qui suit : « new or unusual thing or occurrence; novel character of something; small decoration or toy of novel design » [5] (« objet ou fait nouveau ou inhabituel, caractère original de quelque chose, petite décoration ou jouet de conception inédite »).

En ce qui concerne les Biberons, M. Neufeld a affirmé que la conception et l'image de ces produits correspondent exactement aux jouets de « conception inédite » [traduction] dont fait mention la définition donnée ci-dessus. Il a ajouté que les Biberons satisfont à la définition du mot anglais « toy » (« jouet ») donnée par The Concise Oxford Dictionary of Current English [6] , qui précise ce qui suit : « a plaything, esp. for a child . . . a model or miniature replica of a thing, esp. as a plaything (toy gun) . . . a thing, esp. a gadget or instrument regarded as providing amusement or pleasure » [7] (« quelque chose pour jouer, particulièrement à l'usage d'un enfant […] un modèle ou une reproduction en miniature d'un objet, particulièrement pour jouer (arme-jouet) […] un objet, en particulier un gadget ou un instrument dont on considère qu'il amuse ou apporte du plaisir »). Il a expliqué que l'entreprise qui fabrique ces produits est un fabricant de jouets, de jouets accompagnés de bonbons, de jouets de fantaisie et de jouets interactifs. Il a de plus expliqué que les documents d'expédition décrivent ces produits comme des bonbons jouets et biberons jouets. Il a insisté sur le fait que les Biberons sont vraiment des reproductions en miniature de véritables biberons, qu'elles comportent la plupart de leurs caractéristiques et, afin de rendre la comparaison possible, a présenté en preuve de véritables biberons. M. Neufeld a également expliqué que des produits identiques, quoique maintenant mis en marché sous un nom légèrement différent, portent la mention « trois ans et plus » [traduction] conformément aux Lignes directrices - Jouets : Classification selon l'âge, publiées en 1998 par le Bureau de la sécurité des produits de la Direction générale de la protection de la santé du ministère de la Santé [8] . Il a expliqué aussi que la mention « Dino•Rocks » sur l'étiquette des produits avait été changée pour « Big Baby » (« Gros bébé ») parce que l'appelante avait espéré augmenter l'attrait de ces biberons jouets. À propos du nouveau dessin accompagnant cette mention — un visage de bébé portant un bonnet — M. Neufeld a affirmé que les Biberons sont destinés, d'abord et avant tout, à servir de biberons jouets à des enfants qui s'amusent avec des poupées et utilisent ces bouteilles comme répliques des vraies pour nourrir leur poupée. Il a fait remarquer qu'elles sont également utilisées par les enfants comme pistolets à eau et même par les grands enfants pour imiter des bébés. En ce qui a trait à leur valeur économique, M. Neufeld a affirmé que les bouteilles représentent plus de 60 p. 100 du coût des produits [9] . Les produits sont vendus à des grossistes et à des détaillants partout au Canada, y compris à des magasins à grande surface comme Wal-Mart, Zellers et Toys “R” Us.

À propos du Power PEZ, M. Neufeld a affirmé que, en plus des caractéristiques décrites au début des présents motifs, les 12 cavités du distributeur de bonbons motorisé peuvent se déplacer dans le sens antihoraire, tandis que le plateau circulaire tourne dans le sens horaire, ce qui crée un effet kaléidoscopique et un vrombissement. Pour ajouter au plaisir, il y a une agrafe de ceinture à l'arrière du distributeur de bonbons. Il a ajouté que le Power PEZ est conforme aux normes pour les jouets, l'emballage précisant « quatre ans et plus » [traduction]. Au sujet de la pièce A-1, M. Neufeld a insisté sur le fait que le Power PEZ se trouve dans les catalogues, y compris à la page 10 du catalogue de Pâques, dans la même section que les « toy telephones and toy cameras » [10] (« téléphones jouets et caméras jouets »). Les Power PEZ sont fabriqués par la société Hasbro, Inc. (Hasbro), un fabricant bien connu de jouets. M. Neufeld a répété que le bonbon dans le Power PEZ est une partie secondaire ou symbolique de ce produit. Les distributeurs représentent plus de 80 p. 100 du coût des produits, tandis que les bonbons en représentent 5 p. 100. En outre, le prix de détail du distributeur de 155 g varie de 4,99 $ à 5,99 $, mais la valeur au détail de deux paquets de 17 g de bonbons est d'environ 0,25 $ à 0,30 $. Les Power PEZ sont distribués aux détaillants et magasins à grande surface qui vendent aussi les Biberons; ils sont également offerts en Ontario à une chaîne de magasins au détail de jouets et de nouveautés appelée « Le Magasin » (ou en anglais, « ….it store »). M. Neufeld a présenté à titre d'élément de preuve, à ce propos, une lettre de la vice-présidente de cette chaîne corroborant le témoignage de M. Neufeld quant au peu d'intérêt que les acheteurs ont pour les bonbons du Power PEZ parce que « it is the toy they want » [11] (« c'est le jouet qu'ils veulent »). À propos de photographies de présentoirs de Power PEZ dans un Le Magasin, M. Neufeld a précisé qu'ils se trouvent à côté de divers jouets en peluche. M. Neufeld a ajouté que l'emballage-coque sert à attirer les consommateurs, qui peuvent jouer avec l'article étant donné que le bouton des Power PEZ n'est pas couvert. Les consommateurs peuvent par conséquent se rendre compte de l'intérêt ludique du produit avant d'ouvrir l'emballage. Se servant à nouveau de la définition du mot « jouet » qu'il a présentée en preuve lors de son témoignage sur les Biberons, M. Neufeld a dit que le Power PEZ correspond à tous les aspects de cette définition.

Par ailleurs, M. Neufeld a déclaré que les Tirelires Canard sont des jouets vides lorsqu'elles sont importées et ne sont remplies de bonbons que lorsqu'elles sont vendues par l'appelante. Le fabricant de ces produits est la société Niagara Giocattoli S.p.A., d'Italie [12] . M. Neufeld a dit qu'il ne considère pas les Tirelires Canard comme des contenants, étant donné qu'elles sont importées pour être offertes en prime afin de stimuler les ventes et d'améliorer les volumes de vente de l'appelante et parce que, à la différence d'autres contenants de bonbons, elles sont instables, difficiles à ouvrir et trop grandes pour des enfants, et parce qu'il n'y a pas d'endroit où poser une étiquette décrivant ce qu'elles contiennent. Ces produits sont vendus surtout dans les dépanneurs, comme primes, et il est bien entendu, selon M. Neufeld, que, lorsqu'ils sont vides, les magasins pourront les vendre séparément comme jouets, réalisant de la sorte un profit bien plus important. Lorsqu'elles sont expédiées aux détaillants, les Tirelires Canard renfermant des bonbons sont emballées individuellement dans des boîtes placées dans des cartons d'expédition sur lesquels les produits sont représentés sans bonbon à l'intérieur. Puis, mentionnant une décision nationale des douanes que l'appelante a demandée pour un produit similaire appelé « Tirelire géante Poussin », M. Neufeld a insisté sur le fait que ce produit avait d'abord été classé parmi les « tirelires », mais que la décision avait été abrogée en attendant l'issue d'un appel concernant les Tirelires Canard [13] .

Au cours du contre-interrogatoire, M. Neufeld a confirmé que l'appelante ne vend que des produits contenant des bonbons. Il a précisé que le travail de conception effectué par l'appelante quant aux Power PEZ correspondait à ce qu'il a appelé la « canadianisation » de ces produits, c'est-à-dire que l'appelante fait en sorte qu'ils respectent la réglementation canadienne. Le moule pour la fabrication des Biberons est celui de l'appelante, selon M. Neufeld, celle-ci ayant travaillé avec le fabricant, la société Candy Novelty Works Ltd., dont le siège social est à Kowloon, à Hong Kong.

En ce qui a trait au lieu où les marchandises en cause sont présentées dans les principaux magasins de détail de l'appelante et dans les magasins à grande surface, M. Neufeld, en répétant que l'appelante est une entreprise qui vend et distribue à l'échelle du pays, a admis qu'il ne le savait pas et qu'il ne savait pas non plus si les produits de l'appelante ont déjà été mis à l'essai par le Conseil canadien d'évaluation des jouets. Il a déclaré que, aux termes des lignes directrices canadiennes sur l'étiquetage des jouets, il n'est pas obligatoire, à sa connaissance, de mentionner un groupe d'âge sur les produits. M. Neufeld a reconnu, par contre, qu'il est légalement obligatoire de donner la liste, sur les Biberons, des ingrédients des bonbons qu'elles contiennent.

M. Neufeld a répété que la valeur ludique des Biberons est immédiatement apparente, étant donné qu'ils peuvent servir de jouet, qu'ils soient pleins de bonbons ou qu'ils soient vides, avec une poupée ou par un enfant qui joue à faire semblant. Ils ne sont pas, cependant, conçus pour être utilisés avec une poupée en particulier. À propos du Power PEZ, M. Neufeld a dit que le vrombissement qui se produit lorsqu'on appuie sur le bouton contribue à la valeur ludique d'un jouet, alors que les fabricants d'un dispositif mécanique cherchent à masquer le bruit de ce mécanisme. M. Neufeld a confirmé que l'appelante n'a pas d'accord de redevance pour l'utilisation de la marque de commerce PEZ, mais qu'elle achète ce produit de Hasbro, qui est censé avoir pris des arrangements pour obtenir la licence. M. Neufeld a précisé que l'appelante vend des paquets de bonbons de recharge sous un emballage-coque qui contient huit paquets; cela ne représente toutefois qu'une très infime partie du chiffre d'affaires de l'appelante par comparaison aux ventes du Power PEZ. Par ailleurs, M. Neufeld a décrit les ingrédients contenus dans les bonbons et dont la liste, a-t-il fait remarquer, se trouve sur l'emballage-coque. Il a déclaré que, probablement, seuls les bonbons PEZ entrent dans le distributeur. Lorsque l'avocat de l'intimé a demandé à M. Neufeld de remplir un Power Pez de bonbons PEZ, M. Neufeld a clairement eu de la difficulté. En ce qui a trait aux Tirelires Canard, M. Neufeld a dit qu'elles sont importées vides et expédiées dans de très gros sacs de plastique qui en contiennent 50 ou plus. Une fois importées au Canada, elles ont été remplies et ce, au cours des quatre à cinq dernières années, de différentes sortes de bonbons. M. Neufeld a précisé que, quelquefois, la fente pour la monnaie est découpée au moment de l'importation.

M. Neufel a été prié de lire une lettre qu'il a écrite, dont voici un extrait :

La confiserie, de nos jours et depuis une trentaine d'années, a toujours utilisé les jouets de plastique et d'autres primes pour appuyer la vente de bonbons. Quelquefois, ces jouets de plastique sont donnés avec l'achat d'un certain volume de bonbons. Ou encore, ces primes sont remplies de bonbons.

Dans les deux cas, l'idée est la même. Le détaillant achète des bonbons et obtient gratuitement un jouet. C'est peut-être plus attrayant lorsque le bonbon est dans la prime, mais, en fait, le [principe] est le même. Nous pourrions facilement offrir aux détaillants un Canard Jouet en Plastique vide et un sac de 120 Crazy Fruits [à côté], puis il pourrait décider de se servir temporairement du Canard Jouet en Plastique comme présentoir, ou non, mais d'une façon ou d'une autre, il est entendu que le Canard Jouet en Plastique n'est pas un présentoir, mais plutôt un jouet distinct donné en prime [14] .

[Traduction]

En réponse à la question du Tribunal portant sur la signification de l'expression « jouets interactifs » que M. Neufeld a utilisée pendant son témoignage, il a admis qu'il ne savait pas ce que cela signifiait, mais que « le mot "interactif" a de nos jours une allure moderne dérivée du monde de l'informatique » [15] [traduction]. Il a précisé, cependant que, pour l'appelante, un jouet interactif devrait comporter des bonbons, bien que ceux-ci constituent un élément marginal. Il a déclaré que l'appelante dit toujours de ses produits que ce sont des « jouets interactifs avec des bonbons » [16] [traduction]. M. Neufeld a admis que les grands enfants pouvaient se servir des Biberons pour boire et qu'ils le faisaient. En réponse à une autre question du Tribunal, M. Neufeld a expliqué sa perception du processus de prise de décisions des clients lorsqu'ils achètent les Biberons de l'appelante. Il a affirmé que la seule justification du prix de vente élevé était l'attrait ludique de ces produits. C'est un aspect important pour les jeunes enfants lorsqu'il s'agit de décider d'acheter ces produits. En ce qui concerne le Power PEZ, M. Neufeld a précisé que ce qu'il a dit du pourcentage minime des ventes que les recharges de PEZ représentent pour l'appelante était vrai surtout de la valeur en dollars, plutôt que du volume. Le Power PEZ est vendu 4,99 $ à 5,99 $ au détail et les recharges sont détaillées 0,99 $ à 1,49 $. Pour ce qui est des Tirelires Canard, le Tribunal a demandé à M. Neufeld de commenter un extrait du catalogue du fournisseur de l'appelante qui mentionne qu'« elle est specialisée dans la production de jouets nouveauté : jouets à pousser, jouets premiere enfance, articles pour la confiserie, pour les Parcs d'attractions et le Carneval, contenituer transparents pour les bon ton et pour outre choise » [sic] . Tout en admettant que les Tirelires Canard pourraient être considérées comme des gadgets ou des jouets de promotion pour les fabricants de sucreries, M. Neufeld a fait remarquer que ce fournisseur fabrique une foule de produits, comme des petits contenants en plastique qui peuvent être remplis de jouets, de bonbons ou de bulles de savon, que le consommateur achète ensemble. Ce n'est toutefois pas le cas des Tirelires Canard vendues par l'appelante puisqu'elles ne sont pas vendues directement aux consommateurs.

Dans leur plaidoirie, les avocats de l'appelante ont examiné les différentes marchandises en cause les unes après les autres. En ce qui a trait aux Biberons, les avocats ont fait valoir que ces marchandises sont fabriquées par Candy Novelty Works Ltd., un fabricant de jouets. Les avocats ont ajouté que la présence du mot « novelty » dans la raison sociale de cette entreprise correspond à la fabrication de « jouets » de conception inédite, comme l'indique la définition du dictionnaire de ce mot. Les avocats ont également fait valoir que la définition du mot « jouet » inclut une reproduction et que les Biberons sont des reproductions, comme l'ont établi les éléments de preuve. Les avocats ont renvoyé à la définition, qui selon eux était très large, du mot « jouet » dans l'affaire Zellers Inc. c. L e sous-ministre du Revenu national [17] . Les avocats ont également soutenu que, comme le prévoit l'article 10 du Tarif des douanes, le classement des marchandises doit être déterminé conformément aux Règles générales pour l'interprétation du Système harmonisé [18] (les Règles générales). À ce propos, les avocats ont d'abord soutenu que la Règle 1 des Règles générales s'applique, étant donné que les Biberons, comme cela a été établi par les éléments de preuve, satisfont à trois critères, qui, selon lui, déterminent l'application de cette règle, c'est-à-dire le critère de l'apparence, le critère de la conception et du meilleur usage et le critère de la commercialisation et de la distribution [19] . En outre, comme le précisent les Notes explicatives du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises [20] (les Notes explicatives) du Chapitre 95, tout matériel peut servir à la fabrication des articles de ce chapitre; que des bonbons fassent partie des Biberons n'empêche pas ceux-ci d'être classés parmi les jouets. Selon les avocats, les bonbons sont entièrement accessoires. Toutefois, si la Règle 1 ne s'applique pas, la Règle 3 b), qui exige que le caractère essentiel soit pris en compte, est celle qui s'applique ensuite. Selon lui, aux termes de la Règle 3 b), les éléments de preuve amènent à conclure que le caractère essentiel des Biberons est d'être des miniatures. Les avocats ont ajouté, à ce sujet, que les bouteilles représentent 60 p. 100 du coût total de ce produit, un facteur dont il faut tenir compte en vertu des Notes explicatives de la Règle 3 b). De plus, si le Tribunal conclut que la Règle 3 b) n'est pas pertinente, alors la Règle 3 c), qui prévoit l'application de la position qui arrive en dernier dans l'ordre numérique, est celle qui s'applique ensuite. Dans ce cas, les Biberons sont classés parmi les jouets, étant donné que le Chapitre 95 suit le Chapitre 17. De manière subsidiaire, les avocats ont demandé au Tribunal de classer les Biberons dans la position no 95.02 à titre d'accessoires pour les poupées. Selon les avocats, le témoignage de M. Neufeld appuie ce classement, qui est conforme aussi à la définition du mot « accessoire » que contient un mémorandum des douanes [21] . Les avocats se sont de nouveau appuyés sur les trois critères dont il a été question ci-dessus pour faire valoir que les Biberons peuvent être classés parmi les accessoires pour les poupées conformément à la Règle 1. Si la Règle 1 ne peut être appliquée, les avocats ont fait valoir que, en raison de leur caractère essentiel, les Biberons peuvent être classés parmi les accessoires pour les poupées conformément à la règle pertinente. Toutefois, si le Tribunal en vient à la conclusion qu'aucun de ces deux classements ne s'applique, alors la Règle 3 c) prescrit au Tribunal d'appliquer la dernière position dans l'ordre numérique.

Relativement au Power PEZ, les avocats de l'appelante ont suivi une démarche similaire. Les Power PEZ sont fabriqués par un manufacturier de jouets et ils correspondent à la définition courante du mot « jouet », cette fois-ci parce que ce sont des gadgets procurant divertissement ou plaisir. Ils correspondent aux termes employés par le Tribunal dans l'affaire Zellers pour déterminer ce qui constitue un jouet. En outre, ont ajouté les avocats, en matière d'apparence, de conception et de meilleur usage, ainsi que de commercialisation et de distribution, le Power PEZ est prima facie classable à titre de jouet dans la position no 95.03. Si la Règle 1 des Règles générales ne s'applique pas, ont fait valoir les avocats, le Power PEZ est encore un jouet en raison de son caractère essentiel, conformément à la Règle 3 b) et aux facteurs énoncés dans les Notes explicatives de cette règle, p. ex., quant à la nature et à la valeur des composantes, à leur volume et à leur poids. Les avocats ont insisté, à ce propos, pour dire que les couleurs vives du distributeur Power PEZ et ses dimensions sont ce qui attirent l'attention des enfants, non les deux petits et légers paquets de bonbons. De nouveau les avocats ont mentionné la Règle 3 c) au cas où la Règle 3 b) ne s'appliquerait pas, pour conclure que, en dernier recours, le Power PEZ doit être classé dans la position qui vient en dernier dans l'ordre numérique parmi celles qui méritent également d'être prises en considération, c'est-à-dire dans la position no 95.03.

En ce qui a trait aux Tirelires Canard, les avocats de l'appelante ont rappelé qu'elles sont fabriquées par Niagara Giocattoli S.p.A., d'Italie, et que le mot « giocattoli » signifie « jouets » en italien. Les avocats ont insisté sur le fait que des tirelires similaires en plastique translucide fabriquées par cette entreprise sont prévues dans la nomenclature, au Chapitre 95 [22] , et que les Notes explicatives de la position no 95.03 incluent expressément les marchandises qui, comme les tirelires, sont des coffrets-caisses jouets. Les avocats ont de plus précisé que les coffrets-caisses sont également prévus à la position no 95.03. Les avocats ont ajouté que, dans l'affaire Zellers, le Tribunal a noté que les jouets pouvaient être mis en vedette sur une étagère et reproduire des animaux. De plus, en ce qui concerne la Règle 1 des Règles générales, les avocats ont soutenu que, comme les éléments de preuve l'attestent, les Tirelires Canard sont des jouets en matière d'apparence, de conception, de meilleure utilisation, de commercialisation et de distribution. À ce propos, les avocats ont signalé une décision modifiée et abrogée du ministère du Revenu national (Revenu Canada) relative à des tirelires similaires en forme de pingouins ou de poussins pour bien montrer que Revenu Canada et ses représentants n'étaient pas certains du classement correct de telles marchandises similaires. Les avocats ont également fait valoir que les Tirelires Canard font de piètres contenants, étant donné qu'elles ne sont pas carrées, ne permettent pas d'économiser de l'espace sur le comptoir, ne sont pas stables et qu'il n'y a pas de place pour des étiquettes. Finalement, les avocats ont soutenu que, si la Règle 1 ne s'applique pas, les Tirelires Canard doivent être classées conformément à la Règle 3 c), dans la position qui vient en dernier dans l'ordre numérique parmi celles qui méritent également d'être prises en considération.

L'avocat de l'intimé a soutenu qu'il faut plus d'imagination qu'auparavant pour vendre des bonbons, et que, par conséquent, les marchandises en cause constituent une présentation inédite, non des jouets. L'avocat a fait remarquer, à ce propos, que, comme les catalogues de produits de l'appelante le montrent, aucun de ces produits n'est vendu sans bonbons. En ce qui a trait aux Biberons, l'avocat a fait valoir que la Règle 1 des Règles générales exige que le Tribunal considère le texte de la position ainsi que les Notes explicatives. Il a maintenu que le mot « [s]ucreries » de la position no 17.04 inclut les bonbons et, par conséquent, inclut les produits ayant un emballage inédit, comme les Biberons. S'appuyant sur les trois critères cités par le Tribunal dans l'affaire Zellers, l'avocat a également allégué que les Biberons sont correctement classés à titre de bonbons, étant donné surtout que, en ce qui a trait à la commercialisation et à la distribution, la loi exige que ces produits donnent la liste des ingrédients formant les bonbons. L'avocat a également mentionné le fait que, lorsqu'on lui a demandé où, dans leurs magasins, se trouvaient les Biberons vendus par différents détaillants, M. Neufeld a répondu qu'il ne le savait pas, sauf pour le Power PEZ dans la chaîne Le Magasin. L'avocat a fait valoir que le mémoire de l'intimé contient la « preuve » incontestée que les Biberons sont en général vendus au rayon des confiseries de Toys “R” Us. L'avocat a comparé les marchandises en cause au miel vendu en contenants de plastique en forme d'oursons, et a soutenu que, dans ce cas, l'acheteur ne se procure pas un ourson de plastique pour que celui-ci serve de jouet, mais achète du miel même si le contenant pouvait être utilisé comme jouet. L'avocat a également allégué que les Biberons ne sont pas des reproductions à l'échelle. En résumé, l'avocat a fait valoir que les Biberons sont des sucreries selon la Règle 1, parce qu'ils sont correctement classés à titre de bonbons ayant une présentation inédite, selon la Règle 3 a), parce qu'ils sont plus spécifiquement décrits à titre de sucreries, ou selon la Règle 3 b), parce que l'acheteur achète, d'abord et avant tout, des bonbons et non un jouet.

En ce qui a trait au Power PEZ, l'avocat de l'intimé a soutenu que, comme pour les Biberons, les Power PEZ sont correctement classés dans la position no 17.04 selon la Règle 1 des Règles générales et selon la définition du mot « sucreries » dans les Notes explicatives, qui inclut les bonbons. L'avocat a fait valoir que, si la Règle 1 ne s'applique pas, c'est alors la Règle 3 b) qui s'applique et que les bonbons PEZ, non les distributeurs de bonbons, contenus dans l'emballage-coque donnent au Power PEZ son caractère essentiel. À l'appui de son argumentation, l'avocat a insisté sur le fait que le distributeur n'a pas de caractéristiques (p. ex., des mains, des jambes, un visage amusant) qui en feraient, en lui-même, un jouet. L'avocat s'est également appuyé sur une décision du Conseil de coopération douanière (CCD) qui concluait que les distributeurs PEZ originaux devaient être classés dans la position no 17.04, car le fait « qu'ils puissent être utilisés comme jouets par des enfants après que le bonbon a été mangé est une question subjective et n'est pas pertinente pour le classement » [traduction]. En réponse au Tribunal, qui lui demandait si le fait que le Power PEZ est un objet collectionnable faisait une différence, l'avocat a déclaré que, dans la présente affaire, cela n'en faisait pas, soutenant que ce n'est pas parce que quelque chose est dit pouvoir faire l'objet d'une collection que cet objet devient intéressant à collectionner. De manière subsidiaire, l'avocat a mentionné que le Power PEZ pouvait être classé dans le numéro tarifaire 8543.89.40 à titre d'autres machines électriques, à commande mécanique.

Pour ce qui est des Tirelires Canard, l'avocat de l'intimé a soutenu que le classement tarifaire doit être déterminé au moment de l'importation et que, à ce moment-là, les fentes qui se trouvent sur le dessus des Tirelires Canard n'étaient pas coupées. Surtout, a-t-il dit, il n'y a pas en dessous de ces produits le « bouchon » qui se trouve habituellement sous les tirelires et permet d'en retirer la monnaie. L'avocat a aussi maintenu que les Tirelires Canard peuvent contenir à peu près n'importe quoi, depuis des billes jusqu'à des blocs. L'avocat s'est appuyé sur une décision de l'applicateur du tarif des États-Unis, dans laquelle il a été établi que les tirelires en forme d'oursons servent d'abord et avant tout de récipient ou d'espace de rangement pour la monnaie, non de jouet, étant donné que ce sont des tirelires immobiles et passives destinées aux enfants ou aux adultes. L'avocat a donc maintenu qu'il est clair que, d'après la Règle 1 des Règles générales et les Notes explicatives, ces marchandises sont des contenants de plastique. De plus, l'avocat a fait remarquer que déterminer le classement de marchandises doit se faire à partir de ce que sont les marchandises au moment de l'importation, leur utilisation subséquente n'étant pas pertinente. L'avocat a fait la distinction, à ce sujet, entre la décision du Tribunal dans l'affaire Zellers et la situation actuelle, soutenant que, dans l'affaire Zellers, les marchandises avaient des utilisations concurrentes, soit comme jouet ou comme coussin, tandis que, dans les présents appels, les Tirelires Canard ont des utilisations successives, c'est-à-dire premièrement comme contenants pour l'appelante et deuxièmement comme tirelire pour les clients de l'appelante.

En réponse, les avocats de l'appelante ont fait valoir que, parmi les arguments présentés par l'avocat de l'intimé, beaucoup étaient subjectifs ou n'étaient tout simplement pas appuyés par les éléments de preuve au dossier.

DÉCISION

L'article 10 du Tarif des douanes prévoit que le classement de marchandises importées en vertu d'un numéro tarifaire doit être déterminé conformément aux Règles générales et aux Règles canadiennes [23] , tandis que l'article 11 prévoit qu'il faut tenir compte du Recueil des Avis de classement du Système harmonisé de désignation et de codification des marchandises [24] et des Notes explicatives pour interpréter les positions et les sous-positions.

En ce qui a trait aux Règles générales, le Tribunal doit d'abord chercher à appliquer la Règle 1, ne passant à la règle suivante que si la règle précédente ne s'applique pas. La Règle 1 exige que le classement soit déterminé conformément aux termes des positions et de toutes Notes de Section ou de Chapitre pertinentes. La Règle 2 s'applique aux articles incomplets, non finis, non assemblés ou démontés, ainsi qu'aux mélanges et, dans le cas de ces derniers, elle renvoie à la Règle 3 lorsque les marchandises sont faites de plus d'une matière ou substance. Dans ce cas, la Règle 3 a) prévoit que les marchandises seront classées dans la position qui offre la description la plus précise, bien qu'elle établisse que, si les positions en litige renvoient à une partie seulement des marchandises en cause ou à une partie seulement d'un ensemble offert à la vente au détail, les deux positions seront considérées comme également précises. D'où l'application de la règle suivante, la Règle 3 b), qui prévoit que le classement doit être effectué comme si les marchandises étaient faites de la composante ou de la matière qui leur donne leur caractère essentiel. Finalement, la Règle 3 c) prévoit que, lorsque les marchandises ne peuvent pas être classées selon la Règle 3 a) ou 3 b), elles sont classées dans la position qui arrive en dernier dans l'ordre numérique parmi celles qui méritent également d'être prises en considération.

Le Tribunal fait également remarquer que les avocats de l'appelante se sont appuyés sur ce qu'ils ont appelé « les » trois critères aux termes de la Règle 1 des Règles générales. Cependant, la Règle 1 et les Notes explicatives ne disent rien de ces soi-disant critères. Le Tribunal convient qu'il peut être pertinent et utile de tenir compte de l'apparence, de la conception et de la meilleure utilisation des marchandises en cause, ainsi que de la façon dont elles sont commercialisées et distribuées (en fait, l'intimé semble faire exactement cela dans certaines affaires, comme le prouve la décision de l'intimé qui a fait l'objet de l'appel auprès du Tribunal dans l'affaire Zellers) mais, pour ce qui est de l'application de la Règle 1, le Tribunal doit considérer ce à quoi cette règle renvoie, c'est-à-dire les termes des positions et les Notes de Section et de Chapitre pertinentes. L'apparence, la conception, la meilleure utilisation, la commercialisation et la distribution dont l'avocat de l'intimé a fait état ne sont pas en elles-mêmes des critères, mais des facteurs individuels qu'il peut être utile de considérer, de temps à autre, pour le classement des marchandises. Le Tribunal est d'avis, cependant, qu'aucun de ces facteurs n'est décisif, et que l'importance de chacun varie en fonction du produit en cause.

En ce qui a trait aux jouets en général, et à la lumière de l'affaire Zellers, le Tribunal fait remarquer que, dans Zellers, le Tribunal a mentionné que l'essence d'un jouet, c'est de procurer un divertissement. Cela ne signifie pas, cependant, simplement parce qu'un produit a une valeur ludique, qu'il devrait nécessairement être classé parmi les jouets. C'est un fait reconnu qu'un enfant jouera pendant des heures avec une boîte de carton vide, un sac de papier ou un bâton. Le Tribunal est, par conséquent, d'avis que le divertissement seul ne fait pas d'un objet un jouet aux fins du classement tarifaire.

Le Tribunal examinera les marchandises en cause les unes à la suite des autres. Tout d'abord, pour ce qui est des Biberons, le Tribunal ne doute pas que l'appelante fasse tout ce qu'elle peut pour reproduire de véritables biberons, même en modifiant ces produits au besoin pour que ceux-ci correspondent aux dernières innovations sur le marché. Toutefois, que les Biberons soient des bouteilles miniatures n'en fait pas nécessairement des jouets. Il faut considérer que les bonbons contenus dans ces bouteilles sont des produits de confiserie. Étant donné l'impossibilité de classer ces produits aux termes de la Règle 1 des Règles générales, le Tribunal passe aux règles suivantes et conclut que la Règle 3 b) s'applique, étant donné que les Biberons sont des marchandises formées de plus d'un produit. Le Tribunal doit donc déterminer le caractère essentiel de ces marchandises, soit que ce sont des jouets de la position no 95.03, ou des bonbons de la position no 17.04. Tout bien considéré, les éléments de preuve indiquant que les Biberons sont, d'abord et avant tout, des jouets ne sont pas convaincants. Bien qu'un enfant puisse jouer avec les bouteilles après que certains bonbons, ou tous les bonbons, ont été mangés, le Tribunal est d'avis qu'il est peu probable qu'un enfant ne fasse que jouer avec les Biberons sans jamais manger les bonbons. De plus, même si l'enfant se servait des Biberons par la suite pour boire, ou comme d'une sucette, cela n'en ferait pas des jouets. Le Tribunal fait également remarquer que les ingrédients contenus dans les bonbons sont énumérés sur les Biberons, ce qui représente, selon les constatations du Tribunal, une exigence juridique, tandis que la notation relative à l'âge sur l'emballage est à la discrétion du fabricant. En outre, le Tribunal est quelque peu surpris de constater que le témoin de l'appelante ne sait pas où exactement dans leurs magasins les principaux détaillants de l'appelante et les magasins à grande surface vendent les Biberons. En dernière analyse, le Tribunal conclut que, selon la Règle 3 b), ces bouteilles constituent un emballage inédit et que, en tant que tel, les Biberons sont correctement classés dans le numéro tarifaire 1704.90.90. Compte tenu de cette décision, le Tribunal conclut qu'il n'est pas nécessaire d'examiner l'argument présenté à titre subsidiaire par les avocats de l'appelante, suivant lequel les Biberons doivent être considérés comme des accessoires pour les poupées.

En ce qui a trait au Power PEZ, le Tribunal est d'avis que ces marchandises ne peuvent pas être classées uniquement en s'appuyant sur la Règle 1 des Règles générales. La règle que le Tribunal doit appliquer ensuite est la Règle 3 b), étant donné que les marchandises sont formées de plus d'une substance et qu'elles sont vendues sous forme d'ensemble. Le Power PEZ consiste en au moins deux articles différents qui sont, prima facie, classables dans deux positions différentes, à savoir le distributeur de bonbons parmi les jouets et les deux paquets de bonbons parmi les sucreries. Il peut être vendu directement aux utilisateurs sans être emballé de nouveau, dans la présente affaire, sous emballage-coque [25] .

Il y a beaucoup de raisons pour classer le Power PEZ parmi les bonbons. En premier lieu, les marchandises en cause consistent en bonbons et en un distributeur de bonbons. Les ingrédients qui composent ces bonbons sont énumérés sur l'emballage, comme l'exige la loi. Le CCD a déjà statué dans le cas d'un distributeur de bonbons PEZ, d'un modèle plus traditionnel toutefois que le distributeur en cause, que le bonbon était l'élément essentiel de l'ensemble. De plus, la marque de commerce « PEZ » est celle d'un bonbon et elle prédomine sur l'emballage, apparaissant neuf fois sur l'emballage-coque. En dernier lieu, seuls les bonbons PEZ peuvent être introduits dans le distributeur. Pour ces raisons, le distributeur Power PEZ peut être considéré comme un emballage innovateur tout au plus, contribuant à la vente des bonbons PEZ.

Toutefois, si le Tribunal tient compte de la Note VIII des Notes explicatives de la Règle 3 b) pour déterminer le classement du Power PEZ, le distributeur motorisé semble être plus qu'un emballage inédit. En ce qui a trait aux ensembles, la Note VIII prévoit ce qui suit :

[l]e facteur qui détermine le caractère essentiel varie suivant le genre de marchandises. Il peut, par exemple, ressortir de la nature de la matière constitutive ou des articles qui les composent, de leur volume, leur quantité, leur poids ou leur valeur, de l'importance d'une des matières constitutives en vue de l'utilisation des marchandises.

Au moins deux des facteurs énoncés ci-dessus, la valeur et le poids, exigent que les Power PEZ soient classés à titre de jouets. Le distributeur motorisé est sensiblement plus lourd. En ce qui concerne son coût de production [26] , il est beaucoup plus élevé que celui des deux paquets de bonbons, un argument qui, de façon moindre, s'appliquait aussi aux Biberons ci-dessus. Pour ce qui est du Power PEZ, comme pour les Biberons, le rôle que jouent les composantes, dans le cadre de l'utilisation des marchandises, est l'élément qui revêt une importance critique. Dans le cas des Biberons, les bouteilles en elles-mêmes n'étaient autres, de l'avis du Tribunal, qu'un emballage inédit qui amènerait les clients à acheter les bonbons. Cependant, dans le cas du Power PEZ, le Tribunal ne peut aussi facilement ignorer le rôle du distributeur motorisé. D'un côté, il peut être perçu tout simplement comme une ruse de commercialisation; de l'autre côté, des éléments de preuve et des arguments ont été présentés au Tribunal selon lesquels les clients achètent le Power PEZ pour obtenir le distributeur. Le Power PEZ, comme il est noté sur l'emballage-coque, sont des articles de collection. Le distributeur est l'article de collection plutôt que les bonbons. Son rôle, en outre, n'est pas simplement celui d'un distributeur de bonbons; en fait, il est très difficile de le remplir de bonbons, activité qui exige temps et dextérité. En plus d'être un article de collection et un distributeur de bonbons, il a une valeur ludique avant et après que les bonbons qui se trouvent dans les paquets sont mangés.

Un bouton qui sort de l'emballage permet à l'acheteur de jouer avec le distributeur avant d'ouvrir l'emballage et, donc, avant de manger les bonbons. Cette caractéristique distingue le Power PEZ du distributeur de bonbons PEZ visé par la décision antérieure du CCD, dans laquelle un distributeur de bonbons PEZ plus traditionnel, rempli de bonbons, a été classé dans la position des bonbons. La note préparée par le Secrétariat du CCD pour la décision mentionne que : « le fait que le distributeur puisse servir à un usage répété et qu'il puisse être utilisé comme jouet par des enfants après que les bonbons ont été mangés sont des questions subjectives et ne sont pas pertinentes pour le classement » [27] [traduction]. Cependant, c'est le contraire dans le cas du Power PEZ. Le distributeur Power Pez peut être, et vraisemblablement sera, utilisé comme un jouet avant que les paquets individuels de bonbons soient mangés. Il reste à savoir si les bonbons seront ou non mangés après que le bouton a été poussé et le distributeur transformé en un kaléidoscope vrombissant.

La valeur ludique du Power PEZ diffère aussi de celle de l'affaire PEZ dont le CCD a été saisi du fait que le distributeur dans la présente affaire est durable [28] . Non seulement s'agit-il d'un article de collection, mais il est muni d'une pile remplaçable. Par conséquent, selon le Tribunal, ce qui était peut-être à l'origine une stratégie commerciale (les différents modèles de distributeurs PEZ) a, dans le cas du Power PEZ, pris préséance et a transformé le caractère essentiel de l'ensemble. Le Tribunal est d'avis que les bonbons ont une importance secondaire et ne sont pas essentiels au Power PEZ.

Pour les raisons mentionnées ci-dessus mais, en particulier, compte tenu, premièrement, du rôle ludique et, deuxièmement, du rôle d'article de collection des distributeurs en ce qui concerne l'utilisation de ces marchandises, le Tribunal convient avec l'appelante que le Power PEZ doit être classé parmi les autres jouets à moteur, autres que ceux de métal, dans le numéro tarifaire 9503.80.90.

En ce qui a trait aux Tirelires Canard, le Tribunal est d'avis, en s'appuyant sur la Règle 1 des Règles générales, que ces marchandises sont correctement classées à titre de contenants de plastique dans le numéro tarifaire 3923.90.90. Bien que leurs nombreuses caractéristiques les rendent attrayantes, les Tirelires Canard sont des contenants de plastique vides, non des jouets, au moment de l'importation. Elles sont utilisées comme contenants par l'appelante pour la vente de toutes sortes de bonbons. Leur utilisation secondaire, comme primes pour le détaillant, n'est pas pertinente pour le classement tarifaire. Ce que les détaillants font des Tirelires Canard lorsqu'elles sont vides, qu'ils mettent autre chose dedans ou qu'ils les vendent comme jouets, n'est que circonstanciel et n'a aucune incidence sur le classement tarifaire de ces marchandises.

Pour toutes ces raisons, les appels nos AP-98-043 (relatif aux Biberons) et AP-98-051 (relatif aux Tirelires Canard) sont rejetés, et l'appel no AP-98-044 (concernant le Power PEZ) est admis.


[ Table des matières]

1. L.R.C. (1985), ch. 1 (2e suppl.).

2. L.R.C. (1985), ch. 41 (3e suppl.).

3. M. Neufeld a mentionné, à différentes reprises, les bonbons interactifs puis s'est corrigé, les appelant jouets interactifs. En fait, le catalogue de Noël 1998 de l'appelante, la pièce A-1, les appelle « bonbons jouets interactifs » [traduction].

4. Septième éd., Oxford, Oxford University Press, 1989.

5. Ibid. à la p. 693.

6. Huitième éd., Oxford, Clarendon Press, 1990.

7. Ibid. à la p. 1291.

8. Pièce A-3.

9. Le chiffre exact a été versé au dossier à titre de renseignement confidentiel aux termes de l'article 46 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.).

10. Pièce A-1 (appelés « Candy Camera B » et « Candi Phone » dans le catalogue [anglais] de Pâques 1999 de l'appelante à la p. 11 et dans le catalogue [anglais] de Noël de 1998 de l'appelante aux p. 6 et 7).

11. Pièce A-9.

12. Pièce A-11.

13. Pièces du Tribunal AP-98-051-23.4 et AP-98-051-24.2.

14. Pièce du Tribunal AP-98-051-24.1 à la p. 2.

15. Transcription de l'audience publique, le 19 février 1999 à la p. 107.

16. Transcription de l'audience publique, le 19 février 1999 à la p. 109. Cependant, le Tribunal a déjà noté que, dans le catalogue de Noël de 1998 de l'appelante, l'expression utilisée est « jouets bonbons interactifs » [traduction].

17. Tribunal canadien du commerce extérieur, appel no AP-97-057, le 29 juillet 1998 à la p. 8, dans lequel le Tribunal déclare que « [e]ssentiellement, un jouet correspond à quelque chose qui procure un divertissement ou un plaisir. Les jouets peuvent imiter des choses ou des animaux ou avoir des formes qui leur sont propres. Ils peuvent être de construction dure ou rigide ou être doux et moelleux. Ils peuvent être conçus en vue d'une manipulation ou pour être mis sur une étagère pour les exposer. Ils peuvent avoir un aspect mignon et amical ou féroce et effrayant. Ils peuvent être conçus pour être malmenés ou exiger d'être manipulés avec soin. Leur valeur pécuniaire est souvent minime quoique certains jouets, comme les ensembles de trains électriques miniatures, peuvent facilement coûter des milliers de dollars. Tout ceci pour dire que les jouets couvrent une infinité de produits dont certains peuvent être facilement identifiables comme des jouets et d'autres seulement après un examen plus attentif ».

18. Supra note 2, annexe I.

19. Ce sont des critères qui ont été utilisés dans des appels antérieurs à l'égard de décisions des douanes.

20. Conseil de coopération douanière, 1re éd., Bruxelles, 1986 et 2e éd., Bruxelles, 1996.

21. Classement des parties et des accessoires dans le Tarif des douanes, ministère du Revenu national, Accise, Douanes et Impôt, mémorandum D10-0-1, le 24 janvier 1994.

22. Le Tribunal fait remarquer, ici, que ces « tirelires » sont prévues dans la sous-section statistique du tarif qui, cependant, ne fait pas partie de la loi.

23. Supra note 2, annexe I.

24. Conseil de coopération douanière, 1re éd., Bruxelles, 1987.

25. Voir la Note X des Notes explicatives de la Règle 3.

26. Mémoire confidentiel de l'appelante, paragr. 24.

27. Classification of « PEZ » Candy, Conseil de coopération douanière, Comité du Système harmonisé, le 11 juin 1992 à la p. 3.

28. Le Secrétariat du Conseil de coopération douanière a pris note que le distributeur de bonbons PEZ ne semblait pas durable.


Publication initiale : le 12 août 1999