FALL PROTECTION GROUP INC. ET HUMAN RESOURCES INTERNATIONAL INC.

Décisions


FALL PROTECTION GROUP INC. ET HUMAN RESOURCES INTERNATIONAL INC.
Dossier no : PR-95-031

TABLE DES MATIÈRES


Ottawa, le jeudi 6 juin 1996

EU ÉGARD À une plainte déposée par FPG/HRI Joint Venture (Fall Protection Group Inc. et HRI Human Resources International Inc.) aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.), modifiée par L.C. 1993, ch. 44;

ET EU ÉGARD À une décision d’enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes de l’article 30.14 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte est en partie fondée.

Aux termes du paragraphe 30.15(2) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur recommande, à titre de mesures correctives, que le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux n’exerce pas sa faculté de prolonger le marché pour une période supplémentaire de deux ans et, si le besoin continue d’exister, qu’il lance plutôt un nouvel appel d’offres concurrentiel pour satisfaire à la demande conformément aux dispositions des accords applicables.

Raynald Guay

_________________________

Raynald Guay

Membre



Michel P. Granger

_________________________

Michel P. Granger

Secrétaire

Dossier no : PR-95-031

Date de la décision :

Le 6 juin 1996

Membre du Tribunal :

Raynald Guay

Gestionnaire d’enquête :

Randolph W. Heggart

Avocat pour le Tribunal :

Joël J. Robichaud

Plaignant :

FPG/HRI Joint Venture (Fall Protection Group Inc.

et HRI Human Resources International Inc.)

Intervenant :

Pacific Granite Mountaineering Inc.

Institution fédérale :

Ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux

CONCLUSIONS DU TRIBUNAL

Introduction

Le 8 mars 1996, la société FPG/HRI Joint Venture (Fall Protection Group Inc. et HRI Human Resources International Inc.) (le plaignant) a déposé une plainte aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur [1] (la Loi sur le TCCE) concernant le marché public passé par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (le Ministère) (numéro de l’invitation XSH W04A2-5-N290/00/A) pour la fourniture de services de formation et de supervision dans divers domaines de compétence technique, dans le cadre du cours sur l’art du commandement et l’esprit d’initiative que le ministère de la Défense nationale (le MDN) offre aux cadets au Centre national de formation des cadets de l’Armée - Banff.

Le plaignant allègue que la procédure de passation des marchés publics a comporté des lacunes parce que des communications inopportunes et injustes ont eu lieu entre les membres du comité d’évaluation et la société Pacific Granite Mountaineering Inc. (l’adjudicataire) au cours du processus d’appel d’offres. Le plaignant allègue également que sa soumission n’a pas été correctement évaluée et que la proposition soumise par l’adjudicataire aurait dû être déclarée non conforme. En particulier, le plaignant soutient que le comité d’évaluation du MDN avait des contacts suivis avec l’adjudicataire au cours du processus d’appel d’offres, que des rapports personnels existaient entre le président de Pacific Granite Mountaineering Inc. et les membres du comité d’évaluation, que des renseignements protégés ont été communiqués à l’adjudicataire par le comité d’évaluation avant la date limite de remise des soumissions et que l’évaluation des offres du plaignant et de l’adjudicataire a été entachée d’incohérence et de partialité en faveur de l’adjudicataire. Le plaignant a demandé, à titre de mesures correctives, que le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal), entre autres, ordonne un arrêt immédiat des travaux, procède à un examen des critères obligatoires énoncés dans la demande de proposition (la DDP) et juge irrecevables les soumissions qui ne satisfont pas à ces critères. En outre, les offres devraient être réévaluées en leur totalité par un organisme objectif, impartial et compétent en vue de déterminer quel soumissionnaire offre à l’État le meilleur rapport qualité-prix.

Enquête

Le Tribunal a déterminé que les conditions d’enquête précisées à l’article 7 du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics [2] (le Règlement) avaient été remplies relativement à la plainte et a décidé d’enquêter sur la question pour déterminer si le marché public avait été passé conformément aux exigences du chapitre 10 de l’Accord de libre-échange nord-américain [3] (l’ALÉNA) et du chapitre cinq de l’Accord sur le commerce intérieur [4] (l’ACI).

Le 9 avril 1996, le Ministère a déposé auprès du Tribunal un rapport de l’institution fédérale (le RIF) en application de l’article 103 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur [5] . Les observations du plaignant sur le RIF ont été déposées auprès du Tribunal le 22 avril 1996. Un rapport provisoire a été rédigé par le personnel du Tribunal et versé au dossier le 9 mai 1996. Le plaignant, le Ministère et l’adjudicataire ont, par la suite, déposé des observations auprès du Tribunal concernant ce rapport.

Étant donné que les renseignements figurant au dossier permettaient de déterminer le bien-fondé de la plainte, le Tribunal a décidé qu’une audience n’était pas nécessaire et a rendu une décision fondée sur les renseignements versés au dossier.

Procédure de passation des marchés publics

Le Camp national des cadets de l’Armée est situé dans le parc national Banff, en Alberta, et c’est là que le cours sur l’art du commandement et l’esprit d’initiative est donné aux cadets. L’objet de ce cours est de faire acquérir à ces derniers les qualités requises d’un chef. Le parc national Banff a été choisi en raison de la gamme unique et diverse de possibilités qu’il présente dans les domaines du canotage, du kayak, de l’escalade, de la randonnée et des excursions sur glaciers. Les meilleurs candidats sont choisis parmi les quelque 26 000 cadets de l’Armée canadienne et sont transportés à Banff pour recevoir une formation. En 1989, le MDN a décidé de sous-traiter les volets formation et supervision du cours. L’adjudicataire a aussi été le soumissionnaire retenu en 1989, 1990 et 1993 et fournit ces services au MDN chaque été depuis 1989. Le 19 octobre 1995, le bureau du Ministère à Calgary a reçu une demande de prestation de services. La demande a été publiée dans l’édition du 10 novembre 1995 de Marchés publics.

La DDP, datée du 2 novembre 1995, comprend 16 pages et 3 annexes. Son contenu est divisé de la façon suivante :

Partie I - DEMANDE DE PROPOSITION - CONDITIONS ET INSTRUCTIONS

Partie II - LE BESOIN

Partie III - FORMAT ET CONTENU DE LA PROPOSITION

Partie IV - MÉTHODE D’ÉVALUATION ET DE SÉLECTION

Partie V - CLAUSES APPLICABLES À TOUT MARCHÉ ADJUGÉ

ANNEXE A - Énoncé du besoin

ANNEXE B - Certificats

ANNEXE C - Méthode d’évaluation et de sélection.

[Traduction]

Les Instructions et conditions uniformisées DSS-MAS 9403-5 (06/94) et les Conditions générales - Services DSS-MAS 9676 (03/95), énoncées dans le manuel intitulé Clauses et conditions uniformisées d’achat, ont été intégrées, par renvoi, à la DDP.

À la page 6 de la DDP, on trouve une section intitulée : [traduction] «9. DEMANDES DE RENSEIGNEMENTS» qui se lit, en partie, comme suit :

Il incombe au soumissionnaire d’obtenir des éclaircissements sur tous les détails se rapportant au processus d’appel d’offres. Toutes les demandes de renseignements et toute autre communication avec l’État au cours de la période commençant à la date de la publication de la présente DDP et se terminant à la date de l’adjudication du marché DOIVENT être adressées directement et sans aucune exception à l’autorité contractante mentionnée ci-dessous. La non-observation de cette condition au cours de la période d’appel d’offres peut (pour ce seul motif) entraîner le rejet de votre offre.

Pour avoir l’assurance que tous les soumissionnaires reçoivent uniformément les mêmes renseignements, les réponses données aux demandes de renseignements portant sur l’interprétation de la DDP seront transmises par le SIOS simultanément à chacun des soumissionnaires éventuels, sans que soit révélées la ou les sources de la demande de renseignements. Toutes ces demandes doivent être reçues par écrit, au moins sept (7) jours ouvrables avant la date limite de remise des soumissions.

[Traduction]

À la page 14 de la DDP, on prévoit un modèle de ventilation des prix de la proposition et un tableau exigeant des «prix fermes tout compris» pour la première année et pour chacune des deux années optionnelles. Ce tableau comprend, entre autres, les divisions suivantes :

PARTIE A : CAMP DE FORMATION

1) Préparatifs du camp de formation lui-même

2) Prestation de la formation

3) Préparatifs de la fermeture du camp de formation,

ce qui comprend les évaluations et le rapport mentionnés dans

l’Énoncé du besoin

TOTAL PARTIEL, PARTIE A

PARTIE B : TRANSPORT

1) Transport et conducteurs offerts jusqu’à destination et en provenance des lieux de formation

PRIX TOTAL (PARTIE A + PARTIE B)

[Traduction]

En ce qui concerne l’évaluation des propositions, à la page 12 de la DDP, on prévoit, notamment, ce qui suit :

Les propositions devront satisfaire à l’Énoncé des travaux, à l’annexe «A», et seront évaluées en fonction des conditions obligatoires et des conditions cotées numériquement énoncées dans les Critères d’évaluation et de sélection, à l’annexe «B», ci-joints et ci-énoncés.

[Traduction]

À la page 14 de la DDP, on peut lire, en partie, ce qui suit :

L’évaluation et la sélection de l’entrepreneur se feront conformément aux critères spécifiés à l’annexe «C». CHAQUE SOUMISSION SERA ÉVALUÉE UNIQUEMENT EN FONCTION DE SON CONTENU.

[Traduction]

Une description générale de la manière dont les propositions seraient officiellement évaluées est donnée à l’annexe C de la DDP, en partie, comme suit :

Les propositions seront évaluées en fonction de critères obligatoires et de critères cotés numériquement. Les propositions qui ne satisfont pas aux conditions obligatoires seront réputées non valides et leur évaluation ne sera pas poursuivie. Avis est donné aux soumissionnaires qu’ils doivent aborder ces critères selon l’ordre spécifié et suffisamment en détail pour permettre une évaluation complète. Un élément pour lequel il n’y aura pas de réponse sera réputé ne pas satisfaire aux conditions obligatoires ou la cote zéro lui sera attribuée selon un système de cotes numériques.

Les mots [anglais] «shall», «must» et «will» [rendus par «doit» en français] utilisés dans les présentes doivent être interprétés comme désignant des conditions OBLIGATOIRES. Les conditions COTÉES sont caractérisées par l’utilisation du terme [anglais] «should» [rendu en français par «devrait»].

Pour être jugée recevable, une soumission doit :

a) satisfaire à toutes les conditions obligatoires du présent appel d’offres;

b) obtenir le minimum requis de 75 p. 100 des points visant les critères qui font l’objet d’une cote numérique précisée dans le présent appel d’offres. Les cotes sont attribuées selon une échelle de 100 points.

[Traduction]

L’annexe C énumère les conditions obligatoires qui feront partie de l’évaluation des propositions et précise, en partie, ce qui suit :

A. Le soumissionnaire doit donner la preuve que les autorités nécessaires délivreront les licences ou les permis requis pour les activités suivantes :

1) une licence de guide donnant l’autorisation d’exercer dans le parc national Banff;

2) un permis d’exploitation de commerce requis pour la Ville de Banff;

3) un permis d’usager du parc provincial Assiniboine;

4) un permis d’utilisation pour la Kananaskis.

C. Objet : Objectifs de rendement 401 à 429 de l’Énoncé du besoin. Fournir un nombre suffisant d’instructeurs pour respecter le ratio minimal instructeurs/élèves accepté comme norme dans l’industrie. Devront faire partie de l’équipe, au moins trois membres entièrement qualifiés de l’Association des guides de montagne canadiens (UIAGM) qui devront être des guides alpins pleinement agréés pour l’été et l’hiver. Les autres membres de l’équipe doivent être des membres associés ou à titre restreint de l’Association des guides de montagne canadiens. Les membres de cette association devront être titulaires d’un certificat de secourisme et d’une attestation de compétence en RCR pour demeurer des membres en règle (secourisme avancé). Tous les autres instructeurs devront être titulaires au minimum d’un certificat de secourisme général et d’une attestation de compétence en RCR.

[Traduction]

Les critères cotés qui devaient être pris en compte dans l’évaluation des propositions ont également été énumérés à l’annexe C de la DDP et sont les suivants :


A. PROPOSITION TECHNIQUE

1. Compréhension du besoin

2. Approche, méthodes et contrôles proposés

3. Adéquation du plan de travail et du calendrier

4. Familiarité avec le terrain local et les conditions techniques

40

B. PERSONNEL

1. Formation et expérience pertinentes

2. Personnel adéquat et disponible

3. Infrastructure de gestion auxiliaire

15

C. EXPÉRIENCE DE L’ENTREPRISE DANS DES DOMAINES CONNEXES

1. Expérience confirmée :

- réussites antérieures

- dimensions et complexité

- degré de similitude

2. Exemples de plans de formation et de calendriers

de travail antérieurs

3. Références écrites

35

D. ORGANISATION

1. Organisation d’ensemble du projet

10

____

100

[Traduction]

Avant la date limite de réception des propositions, le Ministère a effectué trois mises à jour; deux d’entre elles renfermaient des réponses à des questions posées, par écrit, par le plaignant avant la date limite de remise des soumissions et la troisième visait à informer les parties concernées d’un changement d’adresse du bureau du Ministère, à Calgary. Outre les mises à jour qui ont été envoyées à tous les soumissionnaires potentiels, le Ministère a envoyé des lettres de réponse directement au plaignant.

Trois propositions ont été reçues. L’agente de négociation des contrats a effectué une première évaluation des critères obligatoires. À la suite de cette évaluation, il a été déterminé qu’une proposition n’était pas conforme et son examen n’a donc pas été poursuivi. Deux propositions, celle du plaignant et celle de l’adjudicataire, ont été jugées conformes aux critères obligatoires. Les portions techniques et de gestion de ces propositions ont été envoyées au MDN, accompagnées d’une note de service de présentation.

Le personnel du MDN a évalué les propositions du point de vue des critères cotés énumérés dans la DDP. Le MDN a fait parvenir au Ministère une note de service en date du 12 janvier 1996 accompagnée d’un résumé de l’évaluation des propositions et d’une synthèse des remarques faites sur chacune d’elles. Après avoir reçu le résumé du MDN, l’agente de négociation des contrats a évalué les deux propositions sous l’angle des critères cotés. Le 29 janvier 1996, en vue de concilier le résumé de l’évaluation des propositions présenté par le comité d’évaluation du MDN et l’évaluation effectuée par l’agente de négociation des contrats, celle-ci et l’officier d’état-major - Cadets, Formation et soutien, au MDN se sont entendus, au téléphone, sur la note à accorder aux propositions. À la suite de cette évaluation, il a été déterminé que la soumission du plaignant n’obtenait pas la note minimale requise de 75 p. 100 pour les conditions cotées, et que, par conséquent, le marché ne pouvait être adjugé qu’à l’adjudicataire, seul soumissionnaire acceptable.

Le 9 février 1996, le marché a été adjugé à Pacific Granite Mountaineering Inc. Le plaignant a été avisé de l’adjudication le 12 février 1996. Le 19 février 1996, le Ministère a eu un entretien final avec le plaignant pour ensuite lui faire parvenir une note de service. Le plaignant a déposé une plainte auprès du Tribunal le 8 mars 1996.

Bien-fondé de la plainte

Position du plaignant

Les préoccupations du plaignant portent sur la procédure, notamment sur l’existence de contacts suivis et de rapports personnels entre l’adjudicataire et le comité d’évaluation technique à Winnipeg (Manitoba) pendant le processus d’appel d’offres, et sur la divulgation de renseignements à l’adjudicataire par le MDN avant la date limite de remise des soumissions.

Le plaignant allègue que l’évaluation des propositions comportait des lacunes au niveau aussi bien des conditions obligatoires que des critères cotés. En ce qui a trait aux conditions obligatoires, le plaignant conteste les points suivants : 1) l’acceptation des éléments de preuve présentés par l’adjudicataire selon lesquels les autorités nécessaires délivreront un permis d’exploitation de commerce pour Banff; 2) la nécessité d’obtenir un permis pour le parc provincial Assiniboine, alors qu’il n’est pas prévu dans la soumission que ce parc sera utilisé; et 3) l’évaluation de la proposition de l’adjudicataire indiquant que cette proposition remplissait la condition exigeant de «[f]ournir un nombre suffisant d’instructeurs pour respecter le ratio minimal instructeurs/élèves accepté comme norme dans l’industrie».

Le plaignant conteste les points qui ont été attribués à sa proposition dans l’évaluation des critères cotés ainsi que diverses remarques relevées dans le résumé de l’évaluation divulgué. En ce qui concerne l’évaluation de la proposition technique, le plaignant croit que la note qu’il a reçue ne reflète pas adéquatement la valeur de cette partie de sa proposition. En faisant des remarques comme [traduction] «discute trop des lacunes perçues de l’entrepreneur précédent» et «met beaucoup de temps à discuter le programme du personnel, mais qu’en est-il du programme pour les cadets», les membres du comité trahissent leur incompréhension de sa proposition. Pour ce qui est de l’évaluation du personnel, le plaignant souligne ses inquiétudes concernant les curriculum vitae présentés sans l’autorisation des personnes concernées. Le plaignant fait remarquer que les observations du comité, selon lesquelles les curriculum vitae qu’il avait présentés n’indiquaient pas clairement que les personnes étaient titulaires d’un certificat de secourisme et d’une attestation de compétence en RCR, sont une preuve de l’importance accordée au personnel proposé. Il indique également que les observations du comité sur la disponibilité du personnel manifestent l’importance de fournir le personnel proposé. Cela 9‚tant, il estime que le fait d’utiliser des curriculum vitae sans autorisation devrait donner lieu à une déclaration d’irrecevabilité d’une soumission. En ce qui a trait à l’évaluation de l’expérience connexe, le plaignant estime que la note qui lui a été attribuée contredit la remarque faite à la section précédente : [traduction] «important système de soutien utilisant des ressources HRI [et] une infrastructure de gestion auxiliaire».

Dans ses observations sur le RIF, le plaignant répète ses inquiétudes concernant les contacts qui ont eu lieu entre l’adjudicataire et le personnel du MDN, compte tenu de son interprétation de la clause sur les demandes de renseignements dans la DDP. La composition du comité d’évaluation est mise en question et la participation de l’officier d’état-major - Cadets, Formation et soutien, au MDN à un aspect quelconque du marché public est jugée être, par le plaignant, un avantage accordé à l’adjudicataire. Le plaignant doute que l’adjudicataire ait la capacité de faire une soumission à un prix qui se rapproche du chiffre budgétaire réel et avance ce fait comme un élément de preuve indiquant que de l’information a injustement été communiquée par le MDN à l’adjudicataire. Le plaignant est d’avis que les documents joints à sa proposition montrent qu’il a l’envergure, le caractère et l’expérience personnelle et d’entreprise requis pour remplir ces conditions.

Position du Ministère

Dans le RIF, le Ministère a retenu trois aspects de la plainte : l’interaction entre le MDN et l’adjudicataire, avant et pendant le processus d’appel d’offres; l’évaluation de la proposition du plaignant; et l’évaluation de la proposition de l’adjudicataire et sa sélection subséquente comme entrepreneur. La position du Ministère est qu’il n’y a eu aucune interaction entre l’adjudicataire et le MDN qui a été discriminatoire ou qui a eu pour effet d’empêcher la concurrence, que les deux propositions ont été évaluées de façon juste et conformément aux critères et conditions essentielles énoncés dans la documentation relative à l’appel d’offres et que le Tribunal devrait rejeter la plainte.

Sur la question de l’interaction entre le MDN et l’adjudicataire, avant et pendant le processus d’appel d’offres, le Ministère est d’avis que la clause de la DDP qui porte sur les communications entre les soumissionnaires et l’État doit être interprétée dans le contexte qu’elle vise. Le Ministère maintient que, dans ses affaires courantes, le gouvernement n’a pas à être limité et que cette clause vise à éliminer un fournisseur qui chercherait à obtenir et obtiendrait, sur une condition, des connaissances lui donnant un avantage concurrentiel injuste. Le Ministère reconnaît qu’il y a peut-être eu des contacts entre l’adjudicataire et le MDN avant et pendant le processus d’appel d’offres, mais que ces contacts n’ont porté que sur des questions découlant des exigences administratives du marché antérieur et que rien n’a porté atteinte à la concurrence à cet égard. Pour ce qui est des contacts qui ont prétendument eu lieu au cours du processus de 1993, la position du Ministère est que le processus de 1993 n’est pas l’objet de la présente plainte. Quant aux rapports personnels qui se sont établis entre l’adjudicataire et les membres du MDN, le Ministère reconnaît que des rapports personnels, à la fois négatifs et positifs, peuvent s’établir et s’établissent effectivement lorsque des marchés sont de longue durée, mais sa position est que, dans la présente affaire, des mesures nombreuses et adéquates ont été prises pour éviter que le processus n’accorde un avantage injuste découlant de ces rapports.

En ce qui concerne l’évaluation de la proposition du plaignant, la position du Ministère est que toutes les propositions ont été évaluées en fonction des conditions prescrites dans la DDP. Le Ministère reconnaît que l’application de ce type de critère d’évaluation comporte une certaine part de subjectivité, mais que, dans la présente affaire, les évaluations ont été effectuées aussi objectivement que possible et que les points attribués à un critère en particulier reflètent le jugement de l’équipe d’évaluation. Dans le RIF, le Ministère a présenté des arguments détaillés sur les aspects d’évaluation précis des critères cotés de la proposition du plaignant. Une explication particulièrement détaillée sur l’aspect «Expérience de l?92'entreprise dans des domaines connexes» y est incluse.

Quant à l’évaluation de la proposition de l’adjudicataire et la sélection subséquente de celui-ci comme entrepreneur, la position du Ministère est que la proposition de l’adjudicataire remplissait toutes les conditions obligatoires énoncées dans la DDP, qu’elle a été la seule à se voir attribuer une note de passage pour les critères cotés et que, par conséquent, le soumissionnaire était en droit de se voir attribuer le marché. En ce qui concerne les affirmations faites par le plaignant dans sa proposition concernant le ratio instructeurs/élèves et l’utilisation non autorisée de curriculum vitae par l’adjudicataire, le Ministère estime que ces questions relèvent de l’administration des marchés ou de la personne concernée et du soumissionnaire. La position du Ministère, en général, est que chaque proposition doit être évaluée selon ses particularités propres et non pas en fonction de renseignements ou d’allégations faites dans la proposition d’un concurrent, et que les opinions ou points de vue d’un soumissionnaire au sujet d’un autre soumissionnaire ne peuvent être pris en compte dans l’évaluation des propositions.

Le Ministère résume sa position en déclarant que le plaignant n’a fait l’objet d’aucune discrimination et n’a pas été traité moins favorablement que n’importe quel autre fournisseur potentiel au cours de la procédure de passation des marchés publics; que l’adjudicataire n’a pas obtenu de renseignements concernant la procédure de passation des marchés publics qui n’aient été disponibles à tout autre soumissionnaire éventuel ou qui auraient eu pour effet d’empêcher la concurrence; que l’évaluation de la proposition du plaignant a été effectuée correctement et conformément aux critères et conditions essentielles énoncés dans la documentation relative à l’appel d’offres; et que l’évaluation de la proposition de l’adjudicataire et l’adjudication subséquente du marché ont été effectuées conformément aux critères et conditions essentielles énoncés dans la documentation relative à l’appel d’offres.

Position de l’intervenant

L’adjudicataire a demandé et obtenu le statut d’intervenant dans la présente affaire. En ce qui concerne les questions de sécurité, l’intervenant s’en tient à son dossier exemplaire de huit ans en matière de sécurité. Bref, la position de l’intervenant relativement à la plainte est que les allégations d’inconduite et d’irrégularités sont sans fondement et qu’il y a été suffisamment répondu dans le RIF.

Décision du Tribunal

Aux termes de l’article 30.14 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal est tenu, lorsqu’il a décidé d’enquêter, de limiter son étude à l’objet de la plainte. En outre, à la fin de l’enquête, le Tribunal doit déterminer le bien-fondé de la plainte en fonction du respect des critères et des procédures établis par règlement pour le contrat spécifique. De plus, l’article 11 du Règlement prévoit, entre autres, que le Tribunal doit déterminer si le marché public a été passé conformément aux exigences de l’ACI et de l’ALÉNA.

L’alinéa 3b) de l’article 504 de l’ACI interdit «la rédaction des spécifications techniques de façon soit à favoriser ou à défavoriser des produits ou services donnés, [...] soit à favoriser ou à défavoriser des fournisseurs de tels produits ou services, en vue de se soustraire aux obligations prévues par le présent chapitre». L’article 501 de l’ACI prévoit, entre autres, que l’objet du chapitre cinq «vise à établir un cadre qui assurera à tous les fournisseurs canadiens un accès égal aux marchés publics, de manière à réduire les coûts d’achat et à favoriser l’établissement d’une économie vigoureuse, dans un contexte de transparence et d’efficience». Le paragraphe 506(6) de l’ACI prévoit, entre autres, que «[l]es documents d’appel d’offres doivent indiquer clairement les conditions du marché public, les critères qui seront appliqués dans l’évaluation des soumissions et les méthodes de pondération et d’évaluation des critères».

L’article 1008 de l’ALÉNA, intitulé «Procédures de passation des marchés», prévoit ce qui suit :

1. Chacune des Parties fera en sorte que les procédures de passation des marchés suivies par ses entités :

a) soient appliquées de façon non discriminatoire; et

b) soient conformes au présent article et aux articles 1009 à 1016.

2. À cet égard, chacune des Parties fera en sorte que ses entités :

a) ne communiquent pas à un fournisseur des renseignements se rapportant à tel ou tel marché, d’une manière qui aurait pour effet d’empêcher la concurrence; et

b) ouvrent à tous les fournisseurs le même accès aux renseignements concernant un marché, au cours de la période précédant la publication de tout avis ou de toute documentation relative à l’appel d’offres.

L’article 1015 de l’ALÉNA prévoit, en partie, ce qui suit :

4. L’adjudication des marchés s’effectuera conformément aux procédures suivantes :

a) pour être considérée en vue de l’adjudication, une soumission devra être conforme, au moment de son ouverture, aux conditions essentielles spécifiées dans les avis ou dans la documentation relative à l’appel d’offres, et avoir été présentée par un fournisseur remplissant les conditions de participation;

d) l’adjudication des marchés sera conforme aux critères et aux conditions essentielles spécifiés dans la documentation relative à l’appel d’offres.

Le Tribunal a examiné tous les éléments de preuve qui lui ont été soumis ainsi que tous les arguments présentés dans les exposés du Ministère, du plaignant et de l’intervenant. Après avoir attentivement examiné les exigences des accords qui s’appliquent, le Tribunal détermine que la plainte est en partie fondée. Dans l’évaluation des propositions du plaignant et de l’adjudicataire, le Ministère n’a pas appliqué les critères d’évaluation énoncés de la manière spécifiée dans la DDP. Cela constitue une violation du paragraphe 506(6) de l’ACI et de l’alinéa 1a) de l’article 1008 et de l’alinéa 4d) de l’article 1015 de l’ALÉNA.

De l’avis du Tribunal, la plainte peut être divisée en cinq points essentiels : 1) le rapport personnel apparent entre le titulaire du marché antérieur, l’adjudicataire et le personnel du MDN chargé d’administrer le marché, et l’incidence que cela a eue ou aurait pu avoir sur le caractère équitable de la passation du marché public en question; 2) la communication de renseignements par le personnel du MDN à l’adjudicataire, avant et pendant le processus d’appel d’offres, ce qui a défavorisé les autres soumissionnaires potentiels; 3) l’évaluation incomplète ou inadéquate des conditions obligatoires énoncées dans la DDP; 4) l’évaluation inadéquate de la proposition du plaignant en ce qui a trait aux conditions cotées énoncées dans la DDP; et 5) l’évaluation inadéquate de la proposition de l’adjudicataire et l’adjudication subséquente inadéquate du marché.

En ce qui concerne le premier point, les éléments de preuve montrent que le Ministère et le MDN ont pris et prennent des mesures (énoncées dans le RIF) pour que les rapports personnels aient le moins d’effet possible sur le processus de passation des marchés publics concurrentiels, notamment à propos du présent besoin. De l’avis du Tribunal, aucun élément de preuve n’indique que ces rapports ont donné à l’adjudicataire un avantage injuste dans la présente affaire.

Pour ce qui est du deuxième point, l’adjudicataire et le MDN ont tous les deux confirmé qu’il y avait eu des communications entre ledit adjudicataire et le personnel du MDN, à Calgary et à Winnipeg, chargé de l’organisation du camp de formation au commandement; ces communications ont uniquement consisté en des discussions sur le matériel à acheter pour le camp, et aucun renseignement sur les budgets ou sur d’autres propositions n’a été discuté à ces occasions-là. La DDP exige que toutes les demandes de renseignements et toute autre communication avec l’État soient adressées au Ministère et qu’une violation de cette clause peut entraîner le rejet de la proposition du contrevenant. De l’avis du Tribunal, cette clause doit être interprétée selon l’esprit dans lequel elle a été rédigée, c’est-à-dire relativement au marché public en régime de concurrence. Ce qui ne signifie pas, cependant, que des soumissionnaires potentiels ont le droit de recevoir, dans le cadre de contacts informels ou par des contacts administratifs requis, des renseignements qui leur procureront un avantage injuste sur les autres soumissionnaires potentiels. L’alinéa 2b) de l’article 1008 de l’ALÉNA interdit explicitement ce genre de comportement. Dans la présente affaire, des renseignements au sujet du matériel qu’il était recommandé d’acheter pour le camp de formation au commandement, à la suite du marché antérieur, ont été échangés entre l’adjudicataire et le personnel du MDN. Dans certaines circonstances, les renseignements de ce genre pourraient donner à un fournisseur, sur le marché public à venir, des connaissances qui ne seraient pas facilement accessibles aux autres fournisseurs. Cependant, le besoin à satisfaire pour ce marché public a été énoncé de façon très détaillée dans la documentation relative à l’appel d’offres mise à la disposition de tous les fournisseurs. Par conséquent, de l’avis du Tribunal, sur la foi des éléments de preuve qui lui ont été soumis, l’adjudicataire n’a pas obtenu un avantage injuste du fait que des renseignements lui ont été communiqués sur le matériel. Même si le Tribunal a déterminé qu’aucun avantage injuste n’a été créé dans la présente affaire, ce genre de comportement pendant la période d’appel d’offres pourrait donner lieu à des perceptions défavorables.

Quant au troisième point, le Tribunal est convaincu, en s’appuyant sur les renseignements fournis à l’agente de négociation des contrats concernant le permis d’exploitation de commerce requis pour la Ville de Banff, qu’elle a eu raison d’accepter un permis pour 1995 comme «élément de preuve établissant que les autorités nécessaires délivreront la licence ou le permis requis».

En ce qui a trait à l’évaluation de l’article «C» des conditions obligatoires, un examen du personnel proposé n’a été effectué que pour déterminer si la condition minimale «de trois membres entièrement qualifiés [guides alpins pleinement agréés pour l’été et l’hiver] de l’Association des guides de montagne canadiens (UIAGM)» était remplie. Le Tribunal détermine que le fait de ne pas avoir évalué les conditions obligatoires énoncées consistant à «[f]ournir un nombre suffisant d’instructeurs pour respecter le ratio minimal instructeurs/élèves accepté comme norme dans l’industrie» et à voir à ce que les autres guides soient des «membres associés ou à titre restreint de l’Association des guides de montagne canadiens» constitue un changement des critères d’évaluation énoncés dans la documentation relative à l’appel d’offres et constitue, par conséquent, une violation des exigences prévues à l’alinéa 4a) de l’article 1015 de l’ALÉNA et au paragraphe 506(6) de l’ACI.

En ce qui concerne le quatrième point, l’évaluation des conditions cotées de la proposition du plaignant, le Ministère et le MDN ont pris des mesures définitives en vue de sauvegarder l’objectivité de l’évaluation. Le RIF comportait une annexe traitant spécifiquement de l’évaluation et de la sélection des propositions. Le Ministère a envoyé les propositions au MDN pour qu’il les évalue, après en avoir effacé les renseignements sur les prix. Le comité d’évaluation était formé de deux membres sans liens avec l’administration du marché. Un guide d’évaluation a été rédigé pour les membres du comité d’évaluation. Chaque évaluation a été effectuée indépendamment par les membres du comité. L’agente de négociation des contrats a effectué une évaluation indépendante du MDN, et les résultats de toutes les évaluations ont été pris en compte pour établir le pointage final. Le Tribunal est d’avis, cependant, que l’évaluation comportait de graves irrégularités qui ont peut-être diminué quelque peu le caractère objectif de la note accordée à la proposition du plaignant. Le Tribunal fait remarquer, comme l’a souligné le Ministère, que le comité d’évaluation était formé de personnes relativement inexpérimentées dans l’évaluation du genre de services fournis. Le Tribunal tient à déclarer, à titre de référence, que la conduite des personnes concernées n’est pas en cause. Rien n’indique que celles-ci aient agi autrement que de façon consciencieuse. Les irrégularités décelées dans l’évaluation relèvent de la procédure et renvoient aux lacunes des instruments utilisés à cette fin, et ont peut-être été aggravées par le manque d’expérience des évaluateurs.

Le guide de cotation utilisé lors de l’évaluation par le comité d’évaluation comporte de graves lacunes au niveau des critères d’évaluation énoncés dans la documentation relative à l’appel d’offres. La pondération attribuée aux éléments des critères cotés ne peut être déduite de l’organisation des mêmes critères à l’annexe C de la DDP. Il était tout à fait impossible aux soumissionnaires potentiels de savoir quels éléments devaient être accompagnés d’un plus grand nombre d’explications ou comment leurs propositions seraient en définitive évaluées. Le guide de cotation ne fournit aux évaluateurs aucune échelle de notation, c.-à-d. dans quel cas est attribué la totalité des points, la moitié des points, aucun point, etc. L’absence d’une telle échelle laisse trop de place au jugement subjectif des évaluateurs et constitue un problème, surtout lorsque les évaluateurs ne sont peut-être pas familiers avec la matière qu’ils évaluent. Le Tribunal souligne que deux évaluateurs ont donné la note zéro à trois éléments importants de la proposition du plaignant touchant les critères cotés sous la rubrique «Expérience de l’entreprise dans des domaines connexes», mais qu’ils ont donné très peu d’explications au sujet de cette note. Même si, dans le RIF, le Ministère a développé beaucoup plus en détail les raisons pour lesquelles cette note avait été attribuée, après avoir examiné chacune des feuilles de pointage, le Tribunal se demande toujours pourquoi la note zéro a été donnée. Compte tenu du fait que la proposition renfermait un assez grand nombre de renseignements sur cette question, le fait d’attribuer une telle note à la proposition sans fournir de raisons explicites et détaillées ressortit à une question de procédure plutôt que de jugement. Le fait d’établir la moyenne des notes des évaluateurs n’a pas fait disparaître l’obligation d’expliquer les notes basses attribuées lors de l’évaluation. Le Tribunal détermine que l’imprévisibilité du modèle de cotes numériques et le manque d’instructions données aux évaluateurs, qui ont augmenté la subjectivité des évaluations, favorisent le titulaire du marché antérieur du simple fait qu’il avait déjà participé au même genre de marché public, défavorisent les autres soumissionnaires potentiels et constituent, par conséquent, une violation de l’alinéa 1a) de l’article 1008 de l’ALÉNA et du paragraphe 506(6) de l’ACI.

Pour ce qui est du cinquième point, l’évaluation de la proposition de l’adjudicataire, le comité d’évaluation a choisi de ne pas tenir compte des renseignements contenus dans la proposition du plaignant qui visaient la proposition de l’adjudicataire. Le Tribunal est d’avis que la position du Ministère sur cette question, voulant que chaque proposition soit évaluée en fonction de ses particularités propres, est appuyée par le libellé de la DDP concernant la façon dont l’évaluation et la sélection seraient menées. En ce qui concerne la question de la disponibilité du personnel, même si aucun élément de preuve n’indique le recours à une «publicité-leurre [6] » dans la présente affaire, l’absence d’une condition définitive concernant la disponibilité du personnel proposé mène à la possibilité d’une telle tactique. Le Tribunal est d’avis que l’évaluation des propositions de l’adjudicataire et du plaignant a été incomplète concernant l’article «C» des conditions obligatoires énoncées à l’annexe C de la DDP et que, par conséquent, le fait d’avoir adjugé le marché sans une évaluation complète constitue une violation de l’alinéa 4d) de l’article 1015 de l’ALÉNA et du paragraphe 506(6) de l’ACI.

Lorsque le Tribunal détermine qu’une plainte est fondée, en recommandant les mesures correctives à prendre, il est tenu, aux termes du paragraphe 30.15(3) de la Loi sur le TCCE, de tenir compte de tous les facteurs qui interviennent dans le marché de fournitures ou de services visé par le contrat spécifique, notamment des suivants :

a) la gravité des irrégularités qu’il a constatées dans la procédure de passation des marchés publics;

b) l’ampleur du préjudice causé au plaignant ou à tout autre intéressé;

c) l’ampleur du préjudice causé à l’intégrité ou à l’efficacité du mécanisme d’adjudication;

d) la bonne foi des parties;

e) le degré d’exécution du contrat.

En examinant dans quelle mesure un préjudice a été causé au plaignant dans la présente affaire, le Tribunal examinera ce qui aurait dû advenir de la proposition du plaignant aux premières étapes de ce marché public. La proposition du plaignant n’a pas satisfait au besoin en transport. Elle ne renfermait aucun prix pour cette portion du besoin à satisfaire et ne faisait aucune allusion directe à ce besoin, ni dans la proposition technique ni dans le plan de gestion. Toutefois, selon le plaignant, la question de savoir s’il était ou non obligatoire de soumissionner cette portion du besoin relative au transport a été soulevée au cours de conversations téléphoniques avec l’agente de négociation des contrats, et il a eu l’impression qu’il était optionnel de soumissionner cette portion de la demande, cette question et toute réponse ultérieure n’ont jamais été communiquées par écrit, comme l’exige la DDP. La documentation relative à l’appel d’offres, de l’avis du Tribunal, prévoyait que toutes les parties des renseignements à propos des prix devaient être remplies et obligeait l’entrepreneur, dans le cadre de l’énoncé du besoin, à assurer le transport jusqu’aux lieux de formation et en provenance de ceux-ci. La proposition du plaignant, par conséquent, n’était pas, au moment de l’ouverture des soumissions, conforme à toutes les conditions essentielles énoncées dans la documentation relative à l’appel d’offres et son examen n’aurait pas dû être poursuivi.

Étant donné que le temps manque pour lancer un nouvel appel d’offres pour cette année et qu’une réévaluation des propositions éliminerait le plaignant de la concurrence, le Tribunal ne recommandera pas que le marché soit résilié. Il est, cependant, recommandé que le Ministère n’exerce pas sa faculté de prolonger le marché pour une période supplémentaire de deux ans et, si le besoin continue d’exister, qu’il lance plutôt un nouvel appel d’offres concurrentiel pour satisfaire à la demande. Le nouvel appel d’offres devrait comprendre une liste complète des critères obligatoires et cotés qui seront examinés et retenus au cours de l’évaluation des propositions. La DDP devrait clairement indiquer la pondération et la définition des critères cotés. Le Ministère devrait réexaminer les guides de cotation utilisés lors de l’évaluation pour assurer que les propositions soient évaluées de façon objective et juste et que les évaluateurs aient des instructions claires et détaillées sur la façon d’évaluer et sur les justifications à donner pour les notes. Une attention particulière doit être accordée à la clarification des clauses concernant le personnel clé et au point auquel le fait de proposer tel ou tel personnel se transforme en engagement de fournir les personnes nommées.

Décision du Tribunal

Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal détermine, relativement à l’objet de la plainte, que la plainte est en partie fondée.

Aux termes du paragraphe 30.15(2) de la Loi sur le TCCE, le Tribunal recommande, à titre de mesures correctives, que le Ministère n’exerce pas sa faculté de prolonger le marché pour une période supplémentaire de deux ans et, si le besoin continue d’exister, qu’il lance plutôt un nouvel appel d’offres concurrentiel pour satisfaire à la demande conformément aux dispositions des accords applicables.


1. L.R.C. (1985), ch. 47 (4 e suppl.).

2. DORS/93 - 602, le 15 décembre 1993, Gazette du Canada Partie II, vol. 127, n o 26 à la p. 4547, modifié.

3. Signé à Ottawa (Ontario), les 11 et 17 décembre 1992, à Mexico, D.F., les 14 et 17 décembre 1992, et à Washington, D.C., les 8 et 17 décembre 1992 (en vigueur au Canada le 1 er janvier 1994).

4. Signé à Ottawa (Ontario), le 18 juillet 1994.

5. DORS/91 - 499, le 14 août 1991, Gazette du Canada Partie II, vol. 125, n o 18 à la p. 2912, modifiées.

6. Une publicité-leurre a lieu lorsqu'un soumissionnaire obtient que sa proposition reçoive une évaluation favorable en offrant du personnel qu'il ne s'attend pas à utiliser dans l'exécution du marché.


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Publication initiale : le 18 décembre 1996