NOTRA ENVIRONMENTAL SERVICES INC.

Décisions


NOTRA ENVIRONMENTAL SERVICES INC.
Dossier no : PR-97-027

TABLE DES MATIÈRES


Ottawa, le mardi 16 décembre 1997

Dossier no : PR-97-027

EU ÉGARD À une plainte déposée par la société NOTRA Environmental Services Inc. aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.), modifiée;

ET EU ÉGARD À une décision d’enquêter sur la plainte aux termes du paragraphe 30.13(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes de l’article 30.14 de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, le Tribunal canadien du commerce extérieur détermine que la plainte n’est pas fondée.

Robert C. Coates, c.r.
_________________________ Robert C. Coates, c.r.
Membre


Michel P. Granger
_________________________ Michel P. Granger
Secrétaire






Date de la décision : Le 16 décembre 1997

Membre du Tribunal : Robert C. Coates, c.r.

Gestionnaire de l’enquête : Randolph W. Heggart

Avocat pour le Tribunal : Gerry Stobo

Plaignant : NOTRA Environmental Services Inc

Institution fédérale : Ministère des Travaux publics et
des Services gouvernementaux

CONCLUSIONS DU TRIBUNAL

INTRODUCTION

Le 16 octobre 1997, la société NOTRA Environmental Services Inc. (NOTRA) a déposé une plainte aux termes du paragraphe 30.11(1) de la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur [1] (la Loi sur le TCCE) concernant le marché public (numéro d’invitation W8476-4-CB71/A) passé par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (le Ministère) portant sur des services d’enlèvement et de destruction de munitions et de produits connexes, par le biais d’une offre à commandes, pour le compte du ministère de la Défense nationale (MDN) et du Service correctionnel du Canada (SCC).

NOTRA a allégué que son offre était techniquement conforme et la moins-disante. NOTRA a de plus allégué que le Ministère a incorrectement déclaré son offre irrecevable pour le motif que ladite offre ne répondait pas aux conditions relatives au Programme de contrats fédéraux pour l’équité en matière d’emploi, énoncées à l’article 6.2 de la demande d’offre à commandes (DOC).

NOTRA a demandé, à titre de mesures correctives, que le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) ordonne au Ministère de résilier le marché adjugé à la société Les Technologies industrielles SNC Inc. (SNC), de l’adjuger plutôt à NOTRA et de verser à NOTRA un montant de 500 000,00 $ pour la dédommager des frais qu’elle a engagés et du tort qui a été fait à sa réputation. À titre de solution de rechange, NOTRA a demandé une indemnité de 939 974,65 $ pour la dédommager du tort qui a été fait à sa réputation et du manque à gagner qu’elle a subi.

ENQUÊTE

Le 20 octobre 1997, le Tribunal a déterminé que les conditions d’enquête précisées à l’article 7 du Règlement sur les enquêtes du Tribunal canadien du commerce extérieur sur les marchés publics [2] (le Règlement) avaient été remplies relativement à la plainte et a décidé d’enquêter sur la question qui consiste à déterminer si le marché public a été passé en conformité avec les exigences énoncées au chapitre cinq de l’Accord sur le commerce intérieur [3] (ACI).

Le 21 octobre 1997, le Tribunal, en application du paragraphe 30.13(3) [4] de la Loi sur le TCCE, a ordonné de différer l’adjudication de tout contrat relatif à l’offre à commandes jusqu’à ce que le Tribunal se soit prononcé sur la validité de la plainte. Le Tribunal a rendu cette décision puisque le dossier de la plainte ne faisait mention d’aucune urgence et pour préserver la plus vaste gamme possible des mesures correctives énoncées au paragraphe 30.15(2) [5] de la Loi sur le TCCE.

Le 29 octobre 1997, le Ministère, aux termes du paragraphe 30.13(4) [6] de la Loi sur le TCCE, a certifié par écrit au Tribunal que l’acquisition était urgente et qu’un retard dans l’adjudication du marché pourrait être contraire à l’intérêt public. Le 30 octobre 1997, le Tribunal a rendu une ordonnance annulant l’ordonnance de différer l’adjudication, rendue le 21 octobre 1997.

Le 17 novembre 1997, le Ministère a déposé auprès du Tribunal un rapport de l’institution fédérale (RIF) en application de l’article 103 des Règles du Tribunal canadien du commerce extérieur [7] . Le 27 novembre 1997, NOTRA a déposé auprès du Tribunal ses observations sur le RIF.

Les renseignements au dossier permettant de déterminer le bien-fondé de la plainte, le Tribunal a décidé qu’une audience n’était pas nécessaire et a statué sur la plainte à partir des renseignements au dossier.

PROCÉDURE DE PASSATION DU MARCHÉ PUBLIC

Le Ministère dit avoir reçu, le 19 janvier 1995, une demande d’établissement d’une offre à commandes principale et nationale (OCPN) relativement à des services d’enlèvement et de destruction de munitions et de produits connexes pour le MDN et le SCC. Un avis de projet de marché (APM), utilisé comme avis annuel de l’existence de la liste de fournisseurs pour les services susmentionnés, a été diffusé le 27 décembre 1996 par l’entremise du Service des invitations ouvertes à soumissionner (SIOS). À la suite de cet avis, NOTRA a demandé d’être inscrite à la liste des fournisseurs. Après que sa demande a fait l’objet d’examen, NOTRA a été inscrite à la liste. Le 31 janvier 1997, le Ministère a diffusé un APM par l’entremise du SIOS en vue de l’établissement d’une OCPN pour des services d’enlèvement et de destruction de munitions et de produits connexes et il a remis aux fournisseurs potentiels une DOC dont la date de clôture était fixée au 28 février 1997.

La DOC prévoit, notamment, ce qui suit :

1.10 RENDEMENT DES FOURNISSEURS

1. Le Canada peut rejeter une soumission dans l’un ou l’autre des cas suivants :

b) en ce qui concerne des transactions actuelles ou antérieures avec le gouvernement du Canada

ii) le soumissionnaire refuse de fournir les renseignements nécessaires à la compréhension ou à l’évaluation de sa soumission;

2. Dans le cas où le Canada a l’intention de rejeter une soumission conformément au paragraphe 1, l’autorité contractante le fait savoir au soumissionnaire et lui donne un délai de dix (10) jours pour faire valoir son point de vue, avant de rendre une décision définitive sur le rejet de la soumission.

1.13 AVIS AUX SOUMISSIONNAIRES

Aucune modification des propositions ne sera acceptée après la date de clôture.

2.1 ÉNONCÉ DES TRAVAUX

Les munitions seront détruites, recyclées ou redistribuées d’une manière sécuritaire, non toxique et soucieuse de l’environnement, de telle sorte qu’aucune partie, aucun matériel ni aucun explosif ne serve ou ne puisse servir aux fins auxquelles il était initialement destiné.

2.3 MÉTHODE DE SÉLECTION

Pour être jugée recevable, une offre doit satisfaire à toutes les exigences obligatoires de la présente DOC. Les offres ne répondant pas à toutes les exigences obligatoires seront éliminées.

6.2 ÉQUITÉ EN MATIÈRE D’EMPLOI (POUR LES PROPOSANTS CANADIENS SEULEMENT)

En vertu du Programme de contrats fédéraux pour l’équité en matière d’emploi, certaines entreprises soumissionnant des marchés fédéraux doivent s’engager formellement à mettre en œuvre un programme d’équité en matière d’emploi avant que leurs soumissions puissent être validées. Tous les soumissionnaires doivent cocher les cases appropriées ci-dessous. À défaut de ce faire, la soumission sera jugée irrecevable.

Le programme ne s’applique pas pour les raisons suivantes :

[ ] la valeur de la soumission est inférieure à 200 000 $;

[ ] notre organisation compte moins de 100 employés permanents, à temps partiel ou à temps plein à l’échelle nationale;

[ ] notre organisation est réglementée par le gouvernement fédéral;

ou, le programme s’applique :

[ ] copie de l’attestation d’engagement est incluse; ou

[ ] le numéro officiel de l’attestation est ____.

(Soulignement ajouté)
[Traduction]

Au cours de la période de présentation des soumissions, une réunion des soumissionnaires a été tenue, et NOTRA y a participé. De même, durant la même période, 13 modifications de la DOC ont été publiées en réponse à des questions reçues des fournisseurs ou pour repousser la date de clôture de la DOC. Aucune question au sujet des conditions liées à l’équité en matière d’emploi figurant dans la DOC n’a été soulevée ni soumise par l’un ou l’autre des soumissionnaires dans le cadre des occasions susmentionnées.

La date de clôture de la DOC était le 21 mai 1997. Le Ministère dit avoir reçu six offres en tout. À la fin de la période d’évaluation des soumissions, soit de mai à août 1997, deux offres, c’est-à-dire celles de SNC et d’un autre soumissionnaire, ont été déclarées conformes à tous les critères d’évaluation obligatoires. La proposition de NOTRA ne traitait pas des conditions obligatoires énoncées à l’article 6.2 de la DOC. Par conséquent, la proposition de NOTRA a été déclarée irrecevable et a été éliminée. SNC ayant présenté l’offre conforme au plus bas prix global, l’OCPN lui a été adjugée. Le 28 août 1997, le Ministère a diffusé un avis d’adjudication de marché en ce sens par l’entremise du SIOS.

BIEN-FONDÉ DE LA PLAINTE

Position de NOTRA

NOTRA soutient que, le 31 janvier 1997, elle a envoyé une lettre au Ministère, à SNC et à une autre société dans laquelle elle traitait de sa situation au regard de l’article sur l’équité en matière d’emploi. NOTRA soutient de plus qu’elle a inclus les déclarations suivantes dans son offre :

• NOTRA « se conforme aux modalités de l’offre permanente et y adhère »;

• NOTRA « se conformera entièrement à toute loi, décret et règlement du Canada au cours de l’exécution du marché [...] »;

• NOTRA est conforme à « toutes les modalités énoncées dans la DOC ».

[Traduction]

NOTRA déclare que, après le dépôt de son offre, l’autorité contractante du Ministère lui a posé des questions et que NOTRA a répondu auxdites questions au sujet des aspects financiers de sa soumission en réponse à la DOC. Cela, selon NOTRA, est contraire à la déclaration du Ministère selon laquelle l’offre de NOTRA « était irrecevable parce qu’elle ne répondait pas à l’une des conditions obligatoires, soit les conditions énoncées à l’article sur l’équité en matière d’emploi, et a été éliminée » [traduction]. Dans un tel contexte, NOTRA se demande pourquoi le Ministère l’aurait interrogée sur les aspects financiers de sa soumission si celle-ci était vraiment irrecevable.

NOTRA soutient que le Ministère a omis de se conformer aux critères qu’il avait lui-même fixés dans le paragraphe 1.10.2 de la DOC. Même si le Ministère a déclaré, dans le RIF, qu’une demande concernant les renseignements manquants relativement à l’article sur l’équité en matière d’emploi « serait interprétée dans le sens d’une correction et non d’un éclaircissement de soumission » [traduction], NOTRA soutient que, en l’absence d’une telle demande d’éclaircissement de soumission, le Ministère ne pouvait aucunement savoir si NOTRA avait ou non omis un renseignement ou refusait de « fournir les renseignements nécessaires à la compréhension et à l’évaluation de sa soumission » [traduction]. Selon NOTRA, la décision du Ministère de rejeter son offre est fondée sur des présomptions et n’est pas dans le meilleur intérêt des contribuables canadiens.

Position du Ministère

En réponse à la plainte, le Ministère soutient qu’il incombe au soumissionnaire de préparer et de soumettre tous les renseignements nécessaires à l’évaluation correcte de son offre. Le Ministère fait valoir que NOTRA admet [8] ne pas l’avoir fait. Le Ministère soutient de plus que le manquement susmentionné de la part de NOTRA ne menait pas à une situation nécessitant des éclaircissements. Demander de tels renseignements aurait été comme permettre une correction de soumission, ce qui est interdit, puisque cela serait l’équivalent de permettre à NOTRA de modifier son offre après la date de clôture des soumissions. Le Ministère soutient n’avoir eu d’autres choix que de déclarer l’offre de NOTRA irrecevable puisque : 1) l’article sur l’équité en matière d’emploi est une condition obligatoire de la DOC; 2) la DOC précise clairement que, à défaut de fournir les renseignements demandés à l’article 6.2, l’offre sera jugée irrecevable; 3) NOTRA a admis que, à la suite d’une erreur administrative, elle n’a pas inclus dans son offre une copie dûment remplie des pages 17 et 18 de la DOC, qui contenaient l’article sur l’équité en matière d’emploi.

Quant à l’allégation de NOTRA selon laquelle la lettre qu’elle a envoyée le 31 janvier 1997 à l’autorité contractante traitait, notamment, des exigences de l’article sur l’équité en matière d’emploi, le Ministère déclare ne pas avoir reçu la lettre en cause. Quoi qu’il en soit, ladite lettre, en supposant qu’elle ait été envoyée, a été envoyée hors du cadre de l’offre de NOTRA et n’a pas été intégrée, ni explicitement ni par renvoi, dans ladite offre. La question n’a jamais été ensuite soulevée de nouveau par NOTRA dans une lettre subséquente, au cours de la réunion des soumissionnaires ou à l’occasion des questions adressées au Ministère durant la période de demande de soumissions. Les éléments qui précèdent expliquent pourquoi le Ministère n’a pas répondu à la lettre susmentionnée. De plus, le Ministère soutient que ladite lettre ne faisait pas partie intégrante de la proposition de NOTRA et que permettre à NOTRA de fournir, après la date de clôture des soumissions, les renseignements manquants, serait considéré comme une correction et non d’un éclaircissement de la soumission.

Quant à l’allégation de NOTRA selon laquelle le Ministère aurait dû traiter l’omission de NOTRA comme s’il s’agissait d’un refus de fournir des renseignements, conformément au sous-alinéa 1.10.1 b) ii) de la DOC, sous l’intertitre « Rendement des fournisseurs », le Ministère soutient que ce sous-alinéa ne s’applique pas dans les circonstances. En vérité, NOTRA n’a jamais refusé de fournir de renseignements. De fait, en signant la DOC, elle a indiqué qu’elle acceptait de se conformer à toutes les modalités. Plutôt, elle n’a pas, à cause d’une omission, fourni certains renseignements obligatoires.

Quant à l’allégation de NOTRA selon laquelle son offre était techniquement conforme parce que NOTRA avait déjà été inscrite à la liste des fournisseurs du Ministère, le Minist 8Šre soutient que le fait qu’un fournisseur soit inscrit à une liste de fournisseurs ne signifie pas que ce dernier est automatiquement considéré recevable et compétent pour la fourniture de services d’enlèvement et de destruction de munitions et de produits connexes. L’invitation était une procédure complètement séparée et distincte. Les compétences des fournisseurs et la recevabilité des soumissions sont déterminées uniquement lors de l’évaluation de chaque soumission en vue de besoins spécifiques. De plus, le Ministère nie que lui-même ou le MDN ait avisé NOTRA que son offre était techniquement conforme. En vérité, le Ministère déclare que l’équipe d’évaluation n’aurait pu déterminer si l’offre de NOTRA était techniquement conforme ou pas puisque l’évaluation technique n’a jamais été complétée en conformité avec les critères d’évaluation. En outre, le Ministère soutient que NOTRA ne pouvait déduire que son offre faisait encore l’objet d’un examen attentif vers le 21 août 1997 uniquement du fait qu’il lui a été demandé de prolonger la période de validité de sa soumission. En vérité, selon le Ministère, c’est une pratique courante, lorsque la période de validité doit être prorogée, de demander à tous les soumissionnaires de le faire, que leur soumission soit recevable ou non.

Enfin, quant à l’allégation de NOTRA selon laquelle SNC pourrait ne pas satisfaire certaines exigences afférentes à l’objet de la DOC, le Ministère déclare que l’offre de SNC n’a pas été discutée durant la séance de débreffage tenue avec NOTRA. De même, le Ministère soutient que SNC est capable d’enlever et de détruire tous les types de munitions énumérés dans la DOC et ce, en conformité avec les critères obligatoires énoncés à l’article 2.1 de la DOC. En résumé, le Ministère soutient que la procédure de passation du marché public a été tenue en conformité avec les dispositions de l’ACI et que l’offre de NOTRA a correctement été jugée irrecevable. Par conséquent, le Ministère a demandé le remboursement des frais de défense qu’il a engagés dans la présente affaire.

DÉCISION DU TRIBUNAL

Aux termes de l’article 30.14 de la Loi sur le TCCE, le Tribunal est tenu, lorsqu’il a décidé d’enquêter, de limiter son étude à l’objet de la plainte. En outre, au terme de l’enquête, il lui faut déterminer le bien-fondé de la plainte en fonction du respect des critères et des procédures établis par règlement pour le contrat spécifique. L’article 11 du Règlement prévoit, entre autres, que le Tribunal doit déterminer si le marché public a été passé conformément aux exigences du chapitre cinq de l’ACI.

La principale question sur laquelle le Tribunal doit statuer consiste à déterminer si le Ministère s’est conformé à la méthode d’évaluation et aux critères énoncés dans la DOC lorsqu’il a évalué l’offre de NOTRA.

Le paragraphe 506(6) de l’ACI prévoit, notamment, que « [l]es documents d’appel d’offres doivent indiquer clairement les conditions du marché public, les critères qui seront appliqués dans l’évaluation des soumissions et les méthodes de pondération et d’évaluation des critères ».

Le Tribunal est convaincu que les conditions relatives à l’équité en matière d’emploi ont clairement été énoncées à l’article 6.2 de la DOC. De plus, le Tribunal est convaincu que les soumissionnaires étaient au courant des conséquences de ne pas satisfaire auxdites conditions, puisque la DOC énonce clairement ce qui suit : « [t]ous les soumissionnaires doivent cocher les cases appropriées ci-dessous. À défaut de ce faire, la soumission sera jugée irrecevable » [traduction].

Nul ne conteste que NOTRA n’a pas satisfait aux conditions de l’article 6.2 de la DOC dans son offre. Cependant, à cet égard, NOTRA soutient que sa lettre du 31 janvier 1997 au Ministère a satisfait aux exigences de fond de l’article 6.2; elle y a déclaré, entre autres, que « [e]n tant que petite société canadienne, NOTRA est soustraite aux dispositions de l’article 6.2 énoncées dans le document susmentionné » [traduction]. De plus, NOTRA soutient que le Ministère aurait dû recourir aux dispositions du sous-alinéa 1.10.1 b) ii) et du paragraphe 1.10.2 de la DOC avant de déclarer l’offre de NOTRA irrecevable. En vérité, en l’absence d’une question spécifique en ce sens à NOTRA, le Ministère ne pouvait pas correctement déterminer la question de savoir si NOTRA avait omis de fournir certains renseignements relativement à l’équité en matière d’emploi ou avait refusé de fournir de tels renseignements, au sens du sous-alinéa 1.10.1 b) ii).

Quant à la première question, le Tribunal observe que la lettre du 31 janvier 1997 de NOTRA, bien qu’elle ait peut-être été envoyée par NOTRA au Ministère, n’a pas été reçue par ce dernier. Le Ministère n’a jamais répondu à la lettre, et la question soulevée par NOTRA dans sa lettre du 31 janvier 1997 relativement à l’équité en matière d’emploi n’a pas ensuite été soulevée par NOTRA lors de la réunion des soumissionnaires à laquelle elle a participé ni au moyen de questions écrites au cours de la période de préparation des soumissions. Que NOTRA ait envoyé ou non une lettre le 31 janvier 1997, il demeure que ladite lettre ne constituait pas une partie intégrante de l’offre de NOTRA. Si elle a été envoyée, c’était avant que NOTRA ne soumette son offre en réponse à la DOC en cause. De plus, la lettre n’a touché qu’indirectement la question de la position de NOTRA relativement à l’équité en matière d’emploi. Dans ses grandes lignes, la lettre présentait une plainte au sujet de la différence entre les exigences relatives à l’équité en matière d’emploi imposées aux Canadiens et celles imposées aux fournisseurs potentiels étrangers. Le Tribunal est d’avis que la lettre n’aurait pas alors pu être considérée comme une partie intégrante de l’offre de NOTRA, et qu’elle ne peut pas non plus être considérée comme telle maintenant. Ajouter ladite lettre à l’offre de NOTRA reviendrait à modifier l’offre relativement à une condition obligatoire, après la date de clôture des soumissions. La DOC énonce très clairement à l’article 1.13 que « [a]ucune modification des propositions ne sera acceptée après la date de clôture » [traduction].

En ce qui a trait au sous-alinéa 1.10.1 b) ii) et au paragraphe 1.10.2 de la DOC, le Tribunal est d’avis qu’il s’agit là de dispositions qui ne s’appliquent pas à la question en litige. Le Tribunal est convaincu que NOTRA a fait défaut ou a omis de fournir certains renseignements obligatoires relativement à l’article sur l’équité en matière d’emploi à cause d’une erreur administrative. Le Tribunal est d’avis que le Ministère n’est pas tenu, contrairement à ce qu’avance NOTRA, de communiquer avec les fournisseurs potentiels pour leur demander des renseignements au sujet des offres qu’ils ont présentées. Le Tribunal est aussi d’avis que l’objet du sous-alinéa 1.10.1 b) ii) et du paragraphe 1.10.2 n’est pas de déterminer l’intention, mais plutôt d’obtenir les renseignements nécessaires pour comprendre ou évaluer les renseignements déjà contenus dans une soumission. Le Tribunal est d’avis que, en l’espèce, le Ministère n’avait besoin d’aucun autre renseignement pour évaluer la conformité de NOTRA aux conditions obligatoires. Des renseignements essentiels manquaient à l’offre de NOTRA relativement à l’équité en matière d’emploi et, de ce fait, le Tribunal est d’avis que le Ministère a correctement déclaré l’offre de NOTRA irrecevable.

En ce que a trait à l’affirmation de NOTRA selon laquelle son offre était techniquement conforme parce qu’elle avait déjà été inscrite à la liste des fournisseurs du Ministère pour les services d’enlèvement et de destruction de munitions et de produits connexes, le Tribunal fait observer l’absence de fondement d’une telle affirmation. Selon le Tribunal, la liste des fournisseurs fait uniquement ressortir un groupement de fournisseurs potentiels autorisés à présenter des soumissions à l’égard de certains besoins. Elle ne permet pas à de tels fournisseurs potentiels d’éviter de satisfaire toutes les conditions obligatoires d’une DOC qui pourrait suivre.

En ce qui a trait aux affirmations de NOTRA selon lesquelles son offre a été déclarée techniquement conforme par le MDN ou par le Ministère, et que SNC, l’adjudicataire du marché, pourrait ne pas satisfaire à certaines exigences afférentes à l’objet du marché énoncées dans la DOC, le Tribunal est d’avis que lesdites affirmations ne sont pas fondées dans les faits.

Le Ministère a demandé le remboursement des frais qu’il a engagés dans cette affaire. Dans les circonstances, le Tribunal est d’avis qu’il ne convient pas d’accorder les frais et dépens contre NOTRA. La plainte, bien qu’elle n’ait pas été accueillie, n’était pas dénuée de tout fondement, et NOTRA a perdu une importante occasion de marché à cause de son omission.

Avant de clore la présente affaire, le Tribunal souhaite présenter des observations sur une question qui a été soulevée dans la présente affaire et qui le préoccupe. Le 21 octobre 1997, le Tribunal a ordonné de différer l’adjudication du marché. Le Ministère a répondu en certifiant que l’acquisition des services était urgente et qu’un retard pourrait être contraire à l’intérêt public. NOTRA a fait des commentaires au Tribunal au sujet de la décision du gouvernement d’invoquer une telle disposition. Selon le Tribunal, au vu de l’explication que le gouvernement a fournie à l’appui de l’attestation susmentionnée, rien ne semble justifier le recours à la disposition applicable en cause. Le Tribunal est d’avis qu’il ne faut invoquer cette disposition que lorsqu’il y a véritablement urgence ou que des motifs d’intérêt public justifient l’adjudication du marché pendant la tenue de l’enquête du Tribunal. Différer l’adjudication du marché, jusqu’au règlement de la plainte que le Tribunal a accepté d’enquêter, permet au Tribunal de disposer de la gamme la plus étendue possible de mesures correctives, advenant une décision que la plainte est fondée. Le Tribunal n’a jamais encore statué sur le bien-fondé d’une attestation d’urgence par un ministère gouvernemental. Sans donner son avis sur la manière dont il tranchera une telle question, s’il en est saisi, le Tribunal estime que le gouvernement ne devrait recourir au pouvoir extraordinaire susmentionné que dans les cas où un tel recours s’impose. Dans de tels cas, le Tribunal s’attendrait que le ministère gouvernemental lui fournisse une explication qui justifie l’attestation.

DÉCISION DU TRIBUNAL

Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal détermine, relativement à l’objet de la plainte, que le marché public a été passé conformément à l’ACI et que, par conséquent, la plainte n’est pas fondée.


1. L.R.C. (1985), ch. 47 (4e suppl.).

2. DORS/93-602, le 15 décembre 1993, Gazette du Canada Partie II, vol. 127, no 26 à la p. 4547, modifié.

3. Signé à Ottawa (Ontario) le 18 juillet 1994.

4. « Le cas échéant, le Tribunal peut ordonner à l’institution fédérale de différer l’adjudication du contrat spécifique en cause jusqu’à ce qu’il se soit prononcé sur la validité de la plainte. »

5. « Sous réserve des règlements, le Tribunal peut, lorsqu’il donne gain de cause au plaignant, recommander que soient prises des mesures correctives, notamment les suivantes : a) un nouvel appel d’offres; b) la réévaluation des soumissions présentées; c) la résiliation du contrat spécifique; d) l’attribution du contrat spécifique au plaignant; e) le versement d’une indemnité, dont il précise le montant, au plaignant. »

6. « Il doit toutefois annuler l’ordonnance dans le cas où, avant l’expiration du délai réglementaire suivant la date où elle est rendue, l’institution fédérale certifie par écrit que l’acquisition de fournitures ou services qui fait l’objet du contrat spécifique est urgente ou qu’un retard pourrait être contraire à l’intérêt public. »

7. DORS/91-499, le 14 août 1991, Gazette du Canada Partie II, vol. 125, no 18 à la p. 2912, modifiées.

8. Lettre de NOTRA, datée du 9 septembre 1997, au ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux.


[ Table des matières]

Publication initiale : le 20 janvier 1998